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Prise en charge du patient diabétique en cancérologie

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484 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 9 - octobre 2016

DOSSIER

Antitumoraux &

populations particulières

Prise en charge du patient diabétique en cancérologie

Care of the diabetic patient in oncology

A. Grimaldi*

* Professeur émérite, service de diabé- tologie, hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris.

L

a question se pose différemment si le diabète est ancien et déjà connu, s’il est découvert lors du diagnostic de cancer, ou encore s’il apparaît durant le traitement, en particulier par corticothérapie ou thérapies ciblées, anti-mTOR et inhibiteurs de la tyrosine kinase (ITK).

Si le diabète est ancien ou s’il est susceptible d’avoir été méconnu pendant plusieurs années, il est néces- saire de vérifier l’absence ou la présence de compli- cations pouvant modifier la prise en charge globale du patient : rétinopathie, néphropathie, neuropathie, artérite des membres inférieurs, coronaropathie, insuffisance cardiaque, parondotopathie. Il importe également d’évaluer l’équilibre du diabète par le dosage de l’hémo globine A1c (HbA1c), qui reflète la glycémie moyenne des 2 mois précédant le prélè- vement. L’équilibre est estimé bon si l’HbA1c est inférieure à 7 % ; il est jugé acceptable entre 7 et 8 %, insuffisant entre 8 et 9 %, mauvais au-delà de 9 % avec un risque accru d’infection.

Mais le diabète peut apparaître de façon plus ou moins insidieuse pendant le traitement anticancé- reux, et particulièrement en cas de corticothérapie.

Il importe donc d’inclure systématiquement le dosage de la glycémie à jeun tous les mois dans les examens de surveillance, afin de ne pas laisser s’installer une déshydratation avec hyperosmolarité venant révéler le diabète !

L’objectif glycémique pendant la durée du traitement du cancer est d’éviter à la fois le risque d’hyper- glycémies prolongées comportant un risque d’in- fection (plus de 2 g durant plusieurs heures, voire pendant plusieurs jours) et celui d’hypoglycémies sévères avec une neuroglucopénie susceptible de provoquer des chutes, des épisodes confusionnels ou des convulsions. Les hypoglycémies sont provoquées par l’insuline et les insulinosécréteurs, mais elles sont favorisées par les défauts d’alimentation, certaines molécules – dont les ITK –, et par l’arrêt de médica- ments hyperglycémiants, comme les corticoïdes sans ajustement parallèle des posologies des traitements hypoglycémiants. Il convient donc de mesurer la

glycémie capillaire par piqûre au bout du doigt et de réaliser un contrôle plusieurs fois par jour (3 à 6 fois selon la situation). La cible se situe entre 1 et 2 g/l, c’est-à-dire qu’au-delà de ces résultats il faut modi- fier le traitement.

Les hypoglycémiants oraux sans risque d’hypo- glycémie (metformine et inhibiteurs de la dipep- tidylpeptidase-4 [DPP-4]) sont à privilégier, mais ils ne peuvent être maintenus que si la situation clinique est stable, s’ils sont bien tolérés et si les résultats glycémiques sont jugés satisfaisants (glycémies inférieures à 2 g/l). Rappelons que la metformine doit être arrêtée si la clairance de la créatinine est inférieure à 30 ml/mn.

Dans tous les autres cas, en particulier au cours d’un traitement par sulfamides hypoglycémiants, il faut passer à l’insuline. En effet, les sulfamides hypo glycémiants comportent tous un risque d’hypo- glycémie sévère prolongée, risque éventuellement accru par des interactions médicamenteuses.

Surtout, ils ne permettent pas une adaptation rapide du traitement aux besoins fluctuants contrai- rement à l’insuline, en particulier grâce aux analogues rapides de l’insuline. Il est donc essentiel de disposer d’une mesure pluriquotidienne de la glycémie capillaire, à une fréquence adaptée à la situation.

Si le patient est diabétique insulinodépendant, il faut s’assurer qu’il a un schéma d’insulinothérapie basale/

prandiale par pompe ou par multiples injections et qu’il en maîtrise l’usage. Le schéma basal/prandial ou basal/bolus associe une insulinothérapie basale assurée par 1 ou 2 injections d’insuline “lente” (ou par le débit de base de la pompe) et des injections de bolus d’insuline rapide avant et entre les repas, à la carte, à chaque fois que la glycémie est supé- rieure à 2 g/l. Lorsque l’alimentation est aléatoire, au lieu de faire l’injection d’insuline rapide avant le repas comme il se doit, on peut la faire juste à la fin en modulant la dose en fonction de ce que le patient a réellement mangé. Par ailleurs, il faut savoir que, entre 2 injections d’insuline rapide par voie sous-cutanée, il faut respecter un délai minimum de

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La Lettre du Cancérologue • Vol. XXV - n° 9 - octobre 2016 | 485

Points forts

3 heures pour éviter les phénomènes de chevauche- ment comportant un risque d’hypoglycémie (il est en règle générale inutile de mesurer la glycémie 1 ou 2 heures après les repas). Si la situation est très instable, par exemple en chirurgie ou en réanimation, il est alors préférable d’utiliser la voie veineuse avec une insulinothérapie à la seringue électrique et un contrôle de la glycémie toutes les heures ou toutes les 2 heures.

Chez le patient atteint d’un diabète insulinodépen- dant instable, la mise en place d’un capteur sous- cutané permet de scanner en continu la glycémie et de connaître sa cinétique, ascendante, stable ou descendante (mais ce dispositif n’est pas, à ce jour, remboursé par la Sécurité sociale). Quoi qu’il en soit, il est vivement recommandé que le soignant prenne en compte l’avis d’un patient diabétique insulino- dépendant éduqué connaissant bien sa maladie et son traitement. En revanche, lorsqu’on introduit l’insuline chez un patient diabétique de type 2 non insulinodépendant, il est nécessaire d’éduquer le patient et/ou son entourage à la technique de l’in- jection d’insuline et à l’autocontrôle glycémique, à la prévention et au traitement de l’hypoglycémie.

Lors d’un traitement ambulatoire, la prescription d’insuline doit être associée à une prescription de glucagon, à injecter en cas d’hypoglycémie sévère avec trouble de conscience empêchant le resu- crage oral. Un membre de l’entourage doit savoir faire cette injection par voie intramusculaire ou, à défaut, par voie sous-cutanée. Les conseils diété-

tiques doivent être limités essentiellement à l’ab- sence d’ingestion de boissons sucrées (en dehors des hypoglycémies), mais la consommation d’une pâtisserie est possible à condition d’injecter la dose d’insuline correspondant à la quantité de glucides ingérés (en général entre 3 et 6 unités d’insuline rapide). Le schéma d’insulinothérapie pour un diabé- tique de type 2 doit être le même que celui pour un diabétique insulinodépendant de type 1, à savoir une insulinothérapie basale/bolus (tableau). Ce schéma peut être simplifié si la situation clinique est stable et si le diabète est bien contrôlé. En phase “chronique” du traitement, il est possible dans certains cas de revenir à un traitement par antidiabétiques oraux (ADO) seuls ou en association avec une insuline lente injectée en général le soir au coucher.

Si le patient a une tumeur cérébrale avec un risque de crises convulsives en cas d’hypoglycémie ou s’il est en fin de vie avec pour seul objectif le confort de la personne, le but du traitement se limite à éviter, d’une part, l’hypoglycémie et, d’autre part, la dés- hydratation due à l’hyperglycémie. On peut donc revoir à la hausse les objectifs avec des glycémies entre 1,50 et 2,50 g/l, et limiter les contrôles glycé- miques à 1 ou 2 fois par jour, voire les supprimer.

Dans tous les cas, la concertation entre les équipes médicales et paramédicales de diabétologie et d’oncologie est nécessaire pour individualiser les traitements et réaliser une éducation du patient et,

si besoin, de son entourage. ■

» En cas de diabète déjà connu, il faut vérifier l’absence de complications pouvant modifier la prise en charge.

» Le diabète peut apparaître en cours de traitement, il est donc important de pratiquer un dosage de la glycémie régulièrement.

» En cas de diabète insulinodépendant, il faut s’assurer que le patient a un schéma d’insulinothérapie basale/prandiale par pompe ou par multiples injections et qu’il en maîtrise l’usage. En cas de diabète de type 2 non insulinodépendant, il faut souvent, en phase “aiguë”, passer à l’insuline. En phase “chronique”

stable, il peut être envisagé de repasser aux ADO.

» Lorsque le patient est en fin de vie ou qu’il présente une tumeur au cerveau, le traitement se limite à éviter la déshydratation et l’hypoglycémie.

Mots-clés

Diabète Traitement anticancéreux Insulinothérapie

Highlights

»In case of already known diabetes, check the absence of complications that can change the care.

»Diabetes can occur during treatment, it is important to practise a dosage of the glycemia regularly.

»In case of insulin-dependent diabetes, make sure that the patient has a plan of basal insulin / prandial by pump or by multiple injections and he mastered the use. In case of non insulin-dependent type 2 diabetes, in “acute” phase, it is often necessary to switch to insulin. In “chronic” phase, it can be considered switching to ADO.

»When the patient is termi- nally ill or when he presents a brain tumor, treatment is limited to avoid dehydration and hypoglycemia.

Keywords

Diabetes Cancer treatment Insulin therapy Tableau. Schéma d’insulinothérapie.

Glycémies Matin Midi 15 h Dîner 22 h 3 h

≤ 1 g/l 4 unités après 5 unités Collation 5 unités Collation Collation ou jus

> 1 g/l 4 unités avant 5 unités 0 5 unités Collation 0

≥ 1,25 g/l 5 unités avant 6 unités 0 6 unités 0 0

≥ 1,50 g/l 6 unités … 7 unités 0 7 unités 0 0

≥ 1,75 g/l 8 unités … 8 unités 0 8 unités 0 0

≥ 2 g/l 10 unités … 10 unités 2 unités 10 unités 2 unités 0

≥ 2,50 g/l 12 unités … 12 unités 4 unités 12 unités 3 unités 2 unités

≥ 3 g/l 14 unités … 14 unités 6 unités 14 unités 4 unités 3 unités

A. Grimaldi déclare avoir des liens d’intérêts avec MSD.

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