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Master professionnel

Communication des Institutions publiques ENA – CELSA

Mémoire de Master

Conclusions européennes, communications nationales

---

Les Conseils européens et la présentation de leurs résultats en France et en Allemagne. Des messages bien différents au service de la communication gouvernementale nationale qui traduisent nos sensibilités culturelles et soulignent

nos approches politiques différentes de ce que doit être le projet européen.

Erik Haase

Élève de la Promotion Jean Zay - Cycle International Long 2012/2013

Sous la direction de Françoise Boursin

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Conclusions européennes, communications nationales

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Les Conseils européens et la présentation de leurs résultats en France et en Allemagne. Des messages bien différents au service de la communication gouvernementale nationale qui traduisent nos sensibilités culturelles et soulignent

nos approches politiques différentes de ce que doit être le projet européen.

Plan

Page

Remerciements 01

Le corps du mémoire Introduction

1. La présentation du sujet, sa définition et sa délimitation 02 2. L’intérêt du sujet, sur le plan personnel et sur le plan professionnel 03

a. 2011 – Une année particulièrement riche en communication

politique dans le cadre européen 03

b. Le retour du moteur franco-allemand au sein de l’Union

européenne ? 06

3. La problématique et les hypothèses 08

4. La méthodologie utilisée 09

5. L’annonce du plan 12

Les grandes parties

I. La communication gouvernementale dans le cadre des conférences de presse à l’issue des Conseils européens 1. Cadre théorique : Définition et distinction des termes

Communication publique - Communication politique –

Communication gouvernementale 14

(4)

2. La fonction communicative des sommets du Conseil européen

dans des systèmes politiques différents 17

2.1. Définition des Conseils européens 17

2.2. Pour ce qui concerne la communication gouvernementale au plus haut niveau politique, les différences entre le système présidentiel en France et le système parlementaire en Allemagne

n’ont que peu d’importance 18

3. Fonction et portée de la conférence de presse dans le

contexte des sommets bruxellois 20

3.1. La couverture médiatique assurée augmente l’importance des conférences de presse à l’issue des

Conseils européens 20

3.2. La portée symbolique de Bruxelles et la maîtrise de l’interprétation de la réalité pour les chefs d’Etat et de gouvernement rendent les conférences de presse à l’issue

des Conseils européens encore plus attrayantes 21

II. Les identités nationales prévalent sur l’intérêt d’une Europe plus forte Introduction partielle : Les communications respectives des chefs

d’Etat et de gouvernement reflètent bien nos cultures politiques

différentes – explication anthropologique de la 23 communication gouvernementale nationale

1. Le flou français vs. la précision rationnelle allemande ? 25 2. Pour la communication politique, les sujets écartés sont tout

aussi importants que les sujets mis en avant 27 3. Gouvernance économique vs. Gouvernement économique vs.

Coopération renforcée en matière de politique économique 31 4. La sensibilité allemande quant à l’énergie nucléaire et ses

répercussions sur la communication gouvernementale au

niveau européen 34

Conclusion partielle : Les identités culturelles façonnent et

conditionnent la communication politique 37

(5)

III. Une Union européenne à la carte

Introduction partielle : Une atmosphère sociale défavorable 40 1. La chancelière et le président de la République utilisent la scène

européenne symboliquement forte afin d’amplifier une image de

protecteur des intérêts de leurs concitoyens 41 2. Après la réunion du Conseil européen, chacun à sa manière

communique les mêmes lignes nationales qu’avant le sommet

bruxellois 43

3. Une préparation verbale à une guerre « justifiée » ? 44 Conclusion partielle : pousser et freiner pour gagner dans les

sondages nationaux 46

IV. Véritable volonté de coopérer comme tandem franco-allemand ou simples considérations électoralistes ?

Introduction partielle : un rapprochement en termes de

communication ? 49

1. Le président de la République prône la coopération

avec la chancelière 50

2. Angela Merkel hésite beaucoup à se positionner en tant que

«couple» 52

Conclusion partielle : Un couple asymétrique en termes de

Communication 53

Conclusion

1. Est-ce que la communication insuffisante des institutions européennes favorise la présence médiatique des chefs d’État et de gouvernement ? 57 2. Compte tenu de la distanciation entre les citoyens et les institutions

européennes, favorise la dominance nationale dans la communication

sur l’Europe la compréhension de l’UE ? 58

3. La prévalence des identités nationales n’exclut pas l’intégration

Européenne 60

(6)

4. Vers un espace public européen grâce à un changement du paysage

médiatique ? 62

5. Une communication commune à 28 ou des conclusions plus

contraignantes ? 64

Bibliographie 66

Annexes

I. Sondages d’appréciation (satisfaction, confiance) de

Nicolas Sarkozy I

II. Historique des sondages en Allemagne au cours de l’année 2011 III III. Participation aux élections du Parlement européen IV IV. Eurobaromètres personnalisés :

1. Image globale de l’Union européenne 2011 – 2012,

vue par les Allemands et les Français V

2. Confiance des Allemands et des Français dans l’Union

européenne 2010 – 2012 VII

3. Confiance des Allemands et des Français dans le Conseil

2011 – 2012 IX

4. Confiance des Allemands et des Français dans la

Banque centrale européenne 2010 – 2011 XI V. Evaluation des analyses des conférences de presse et vue

d’ensemble des conclusions A-X

VI. Les protocoles des conférences de presse a-ssss

(7)

1

Remerciements

Arrivé au terme de la rédaction de ce mémoire, il m’est particulièrement agréable d’exprimer ma gratitude et mes remerciements à tous ceux qui, par leur enseignement, leur soutien et leurs conseils, m'ont aidé à sa réalisation.

Ma gratitude va d'abord à Madame le Professeur Françoise Boursin qui, de l’étape de la réflexion initiale autour de ce travail, en décembre 2011 jusqu’à la finition, en septembre 2013, était disponible pour des questions de fond et de forme, très réactive et détaillée dans ses réponses pour que les présentes pages voient le jour.

Je suis particulièrement reconnaissant à l’Ecole nationale d’administration (ENA) qui assurait le « bon cadre » pour cette coopération avec l’Ecole des hautes études en sciences de l'information et de la communication (CELSA). Les intervenants

« praticiens » sollicités, je ne cite qu’à titre d’exemples Monsieur Jean-Emmanuel Paillon, Madame Marie-Laure Simon-Beaulieu ou encore Monsieur Jean-Marie Dedeyan, ont tous, par leurs expériences respectives, contribué à ce que ce master en communication présente un ensemble diversifié.

En outre, il est vrai que l’ENA, au-delà des frontières françaises ou francophones, n’est guère connue, raison pour laquelle ce master en Communication publique et politique présente une véritable « valeur ajoutée » pour mon futur parcours professionnel.

Je tiens également à remercier Madame Sabine Blaison qui, heureusement, n’a pas cessé, à des intervalles utiles, de rappeler aux élèves ENA-CELSA les échéances du programme de master en général et du mémoire en particulier.

Strasbourg en septembre 2013

(8)

2

Introduction

1. La présentation du sujet, sa définition et sa délimitation

Le sujet du présent mémoire est la communication gouvernementale par rapport à l’Europe au plus haut niveau politique en France et en Allemagne. Plus exactement, il s’agit des Conseils européens et la présentation de leurs résultats (« les conclusions ») dans le cadre des conférences de presse tenues respectivement par le président de la République et la chancelière.

La période analysée s’étend du 4 février 2011, date du premier Conseil européen en 2011, au 9 décembre 2011, ce qui couvre toutes les réunions des 27 chefs d’État et de gouvernement durant cette année-là. Il s’agit de six Conseils européens, cinq réunions ordinaires et une réunion extraordinaire. 1 Ce nombre de sommets et donc de conférences de presse semble suffisant afin d’assurer un minimum de continuité et de représentativité des propos des deux chefs d’Etat et de gouvernement pour que des conclusions précipitées puissent être exclues.

La base matérielle de la présente analyse, le corpus, sont les protocoles des conférences de presse tenues à l’issue des sommets bruxellois pour ce qui concerne la communication gouvernementale ainsi que les conclusions officielles des Conseils européens comme référence et repère « neutre » de ces six sommets réunissant les 27 chefs d’État et de gouvernement, le président du Conseil européen ainsi que le président de la Commission européenne.

1

Les sommets concernés sont :

1. Conseil européen du 4 février 2011

2. Réunion extraordinaire du Conseil européen du 11 mars 2011 3. Conseil européen des 24 et 25 mars 2011

4. Conseil européen des 23 et 24 juin 2011

5. Conseil européen du 23 octobre 2011

6. Conseil européen du 9 décembre 2011

(9)

3

Il serait bien évidemment très intéressant et d’autant plus instructif si on analysait les conférences de presse de tous les 27 chefs d’État et de gouvernement afin de se faire une image plus complète en ce qui concerne leurs façons de communiquer sur l’Europe. Simplement, le cadre de ce mémoire ne le permet malheureusement pas, je me concentrerai donc sur la France et l’Allemagne.

Par ailleurs, je considère que le recours systématique aux articles de presse autour des sommets concernés aurait, certes, eu un intérêt par rapport au climat politique de l’époque en France et en Allemagne, mais une telle démarche aurait dépassé le cadre d’un mémoire. Des références aux articles de presse sont donc proposées là où elles apportent une valeur ajoutée pour la compréhension du contexte politique.

2. Le sujet et son intérêt sur le plan personnel et sur le plan professionnel

a. 2011 – Une année particulièrement riche en communication politique dans le cadre européen

Si durant ces quatre dernières années, on entendait parler de l’Europe dans les médias, des mots comme « crise », « faillite », ou tout simplement « difficultés » y étaient presque automatiquement jumelés. Les connotations avec le projet de l’Union européenne et les spéculations sur son futur étaient largement inquiétantes pour ne pas dire négatives. La montée en puissance d’un discours national aussi bien de la part des médias que de la part des hommes politiques sautait à l’œil et fut probablement une réaction aux inquiétudes des populations en Europe. La phrase devenue célèbre « Jetzt auf einmal wird in Europa Deutsch gesprochen! » 2 prononcée par Volker Kauder, chef du groupe politique CDU au Bundestag, le 15 novembre 2011 au congrès de son parti, en est un exemple malheureux puisque cet homme politique n’est pas connu pour un discours nationaliste. Tout de même, cette

2

« Désormais, l’Europe parle allemand. »

(10)

4

phrase dévoile une nouvelle approche concernant les rapports de forces au sein de l’Union européenne.

2011, la troisième année après l’éclatement de la crise économique et financière, était intéressante sur plusieurs plans : la crise de la dette souveraine dans la zone euro avait davantage gagné en intensité et dominait largement la couverture médiatique. De nombreux commentateurs l’ont qualifiée de l'épreuve la plus sévère à laquelle l'Union européenne ait été confrontée depuis longtemps, voire depuis son existence. Désormais, il se pose même la question fondamentale du sens de l’intégration européenne.

Cette crise de la dette publique a transformé l’Union européenne plus que jamais.

Elle a intensifié une renationalisation des décisions politiques domestiques dans l’UE. A titre d’exemple, le gouvernement britannique, soutenu par un euroscepticisme populaire, se désengageait pour ne pas dire se retirait en splendid isolation des grandes décisions d’orientation communautaires, un retrait de l’Union européenne n’est plus seulement une spéculation. L’influence relative de la France a diminué, surtout à cause de son état économique fragile. L’Allemagne semble être le gagnant de cette évolution, moins à cause de la politique du gouvernement que grâce à sa

« santé économique » actuelle. 3

L’année 2011 fut une quête vers plus de convergence, de discipline budgétaire et d'intégration économique. Parallèlement à la nationalisation des discours politiques, l’aggravation de la crise a eu comme résultat principal que les gouvernements des pays membres comprenaient qu’ils ne pouvaient plus continuer à défendre leurs différents modèles de sortie de crise, jusque-là source de blocage politique à Bruxelles et force motrice pour davantage de spéculation des fameux « marchés internationaux » sur une possible faillite d’Etat de certains pays tels que la Grèce, le Portugal, l’Espagne, l’Italie - et qui savait quel autre Etat pouvait s’ajouter dans cette liste… A un moment clef, même la France, deuxième puissance économique européenne et donc contributeur net dans l’Union européenne, s’est vue l’objet des

3

Cf. Franzke, Jochen (2012) : Europa ohne Kompass. Dans : WeltTrends – Zeitschrift für

internationale Politik. N°84, p. 142-143

(11)

5

spéculateurs financiers, ce qui a par la suite culminé dans la perte du triple A (notation financière externe ou rating) par l’agence américaine Standard & Poor's en janvier 2012. 4 Tous ces éléments ont forcé les 17 membres de la zone Euro, et les 27 membres de l’UE, à trouver un terrain d’entente. La stabilité financière de la zone euro a été l’objectif prioritaire des décideurs politique en Europe, avec une double mission: d’un côté prendre des mesures d'urgence, comme la création et le renforcement de fonds de sauvetage, de l’autre côté mettre en place une nouvelle gouvernance économique pour éviter que de difficultés similaires ne surviennent à l'avenir.

Deux autres sujets d’envergure dominaient durant cette année 2011 les média européens qui furent particulièrement intéressants compte tenu de l’importance de ces thèmes respectivement pour les Allemands et les Français : les bouleversements en Afrique du Nord et dans le monde arabe ainsi que la catastrophe nucléaire de Fukushima.

Débutés en Tunisie et en Égypte où la destitution des régents autoritaires Zine el- Abidine Ben Ali et Hosni Moubarak s’est déroulée de manière (plutôt) paisible, les soulèvements ont continué de façon plus violente en Libye, au Yémen et en Syrie.

En amont de l’adoption de la résolution 1973 instaurant une no-fly-zone en Libye, la France a tout essayé pour rendre possible une intervention militaire dans le cadre de la Politique de Sécurité et de Défense Commune (PSDC). Finalement, la France et le Royaume Uni ont mené une intervention militaire qui s'est déroulée entre le 19 mars et le 31 octobre 2011, pilotée par l’OTAN (et non pas par la PSDC de l’UE). Dans ce contexte, les différences historiques fondamentales entre Français et Allemand dans leur rapport à la guerre ont émergé dont les conséquences se sont vues dans leurs communications gouvernementales respectives.

Le troisième grand sujet vint du pays du Soleil levant. Le 11 mars 2011, une triple catastrophe a hanté le Japon : un séisme très violent de magnitude 8,9 sur l’échelle

4

S&P confirme la perte du AAA français, Le Figaro du 13 janvier 2012 ;

http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2012/01/13/04016-20120113ARTFIG00603-la-france-aurait-perdu-

son-aaa.php

(12)

6

de Richter a ébranlé la croûte terrestre, provoqué un tsunami avec des vagues d’une hauteur allant jusqu’à 14 mètres qui ont frappé la centrale nucléaire de Fukushima- Daiichi, au nord de Tokyo. Elle a échappé à tout contrôle et explosé, déclenchant des vives discussions sur le futur de l’énergie nucléaire partout dans le monde et surtout en Europe. Des deux côtés du Rhin, les réactions des responsables politiques et des médias montraient des différences considérables.

Ces trois thèmes, pas du tout éphémères au plan médiatique, et ayant des caractéristiques de faire peur aux gens, ont par conséquence également déterminé l’agenda des Conseils européens qui sont l’objet d’analyse du présent mémoire. Les longévités des trois thèmes ont fortement divergé, au moins au niveau européen, lié aux compétences propres à l’UE dans les matières et au degré duquel les populations européennes se sont inquiétées (ou continuent de le faire) pour les sujets respectifs.

b. Le retour du moteur franco-allemand au sein de l’Union européenne ?

L’intérêt majeur de ce mémoire, aussi bien au plan professionnel que personnel, est pourtant la qualité de la coopération franco-allemande au sein de l’UE, étroitement liée aux événements décrits ci-dessus. 2011 était l’année où la « communauté de destin », le « moteur de l’Europe », le « tandem » franco-allemand a, finalement, de nouveau fait les grands titres. Le grand retour du « couple » franco-allemand (tel qu’on le nomme uniquement en France, pas en Allemagne) au plus haut niveau politique avait seulement repris en 2010 avec le Conseil des ministres franco- allemands en février et puis avec l’entretien entre le président de la République Nicolas Sarkozy et la chancelière fédérale Angela Merkel à Deauville. 5

5

Les deux chefs d’Etat et de gouvernement n’y se sont pas seulement accordés sur de nouvelles règles en matière de budget, ils ont également appelé à une réforme du traité de Lisbonne sans consultation préalable de leurs homologues européens. La rencontre à Deauville était même qualifiée de « putsch Merkel – Sarkozy » par le journal britannique Guardian ;

http://www.presseurop.eu/fr/content/article/366441-le-putsch-merkel-sarkozy

(13)

7

Indépendamment de la longévité ou de la pertinence des compromis politiques trouvés, il était particulièrement intéressant d’observer les changements dans la communication politique des deux chefs d’État et de gouvernement. Nicolas Sarkozy et Angela Merkel, peu d’accord durant leurs premières années communément en fonction (2007-2010), que ce soit pour la façon de présenter leurs politiques, liée à leurs personnalités respectives très différentes ou bien pour l’orientation politique générale de l’Union européenne. 6 Les contradictions furent nombreuses et même au plan diplomatique, il devint compliqué de cacher l’état tendu des relations entre l’Elysée et la chancellerie. 7

Compte tenu de l’intérêt que j’apporte depuis de nombreuses années aux relations franco-allemandes, au niveau politique, économique et des sociétés civiles, ce sujet s’est d’une certaine manière « imposé » dans le cadre du master en communication.

L’affichage du nouveau consensus franco-allemand prétendu n’est pourtant qu’une partie de la présente analyse. L’intérêt est plutôt né de l’observation que l’unité ostentatrice d’agir ensemble ne collait pas tout à fait (voire pas du tout) avec les subtilités des discours politiques des deux plus hauts représentants. C’est donc l’aspect communicatif des politiques européennes de Berlin et de Paris, et plus particulièrement les façons de présenter les résultats des sommets européens envers les citoyens des deux côtés du Rhin qui sont au centre du mémoire.

6

Cf. les présidences de l’UE en 2007 (Allemagne) et en 2008 (France) avec comme exemples phare la question de savoir qui peut moissonner des lauriers pour les 27 signatures sous le Traité de Lisbonne et le projet contesté d’une Union méditerranéenne

7

Une culmination peu glorieuse était le « couac » de communication du président de la République

dans le contexte de la polémique sur la question des Roms en France et en Europe. Il avait annoncé

que l'Allemagne allait procéder à des « évacuations de camps », s'attirant un démenti immédiat de

Berlin. Nicolas Sarkozy et Angela Merkel ont ensuite du saisir l’occasion d’un sommet à New York,

pour assurer le public de leur réconciliation. Cf. Roms : Nicolas Sarkozy met fin à sa brouille avec

Angela Merkel devant les caméras. Radio France International ; http://www.rfi.fr/france/20100921-

roms-nicolas-sarkozy-met-fin-brouille-angela-merkel-devant-cameras

(14)

8 3. La problématique et les hypothèses

Problématique du mémoire

En écoutant le président de la République et la chancelière à l’issue d’un Conseil européen, on peut avoir l’impression que deux sommets différents viennent d’avoir lieu. Sans parler d’une projection de ce phénomène à tous les 27/ 28 Etats membres…

En quoi est-ce que la présentation des résultats des réunions bruxelloises en France et en Allemagne, en quoi est-ce que les deux communications gouvernementales bien différentes révèlent-elles nos visions divergentes de ce que doit être le projet européen ? Et est-ce que l’approche par nos préoccupations nationales respectives ne souligne pas le fait (malheureux) que l’intérêt politique domestique prime toujours sur les « nécessités européennes » ?

Hypothèse 1

« Malgré l’ancienneté du projet européen et l’autonomie relative des institutions de l’Union européenne, le poids des identités nationales politique et culturelle reste prépondérant, surtout en matière de communication politique. Les façons de traiter la formation de l’opinion choisies par les deux chefs d’Etat et de gouvernement nous renseignent sur les valeurs et caractéristiques identitaires et culturelles de leur nation respective. »

Hypothèse 2

« Le président de la République et la chancelière fédérale communique une Europe

à la carte. Ils ne présentent pas tous les résultats des Conseils européens mais

seulement ces aspects qui leur permettent de « gagner des points » auprès de leurs

populations respectives en vue des échéances électorales nationales. Ainsi, ils

renforcent une tendance nationale dans le discours européen. »

(15)

9 Hypothèse 3

« Le franco-allemand, réalité indéniable dans la gestion des questions européennes, n’est pas, au plan de la communication, assumé au même titre à Berlin et à Paris. »

4. La méthodologie d’analyse utilisée

Les conclusions des Conseils européens de l’année 2011 ainsi que les protocoles des conférences de presse tenues à l’issue de ces réunions bruxelloises sont évidemment les sources primaires de ce mémoire. Pour une meilleure compréhension du contexte socio-politique de la période analysée s’y ajoutent des statistiques ciblées sur l’opinion des Français et Allemands en rapport avec l’Union européenne (Eurobaromètres personnalisées 8 ) ainsi que quelques sondages réalisés pour des journaux français ou allemands.

S’agissant de la littérature secondaire, il est vrai que le sujet étudié n’offre pas beaucoup d’ouvrage, à part, bien entendu, des livres généralistes dédiés à la communication publique et/ ou politique. Des ouvrages du domaine des sciences sociales ou politiques complètent ceux de la communication.

8

Cf. Annexe IV

(16)

10

Afin de donner une première compréhension de la démarche d’analyse, il s’agissait concrètement d’examiner les conférences de presse par rapport à certains mots-clefs que j’ai attribués à cinq catégories sémantiques différentes (champs lexicaux) :

1. Vocabulaire technique (structures – concepts politiques/ économiques - institutions)

Les termes choisis sont connotés à certains concepts politiques qui seront spécifiés dans la partie de l’analyse.

Par exemple : compétitivité, stabilité, croissance, gouvernance économique, pacte (euro plus), flux migratoires, No-fly-zone, Mécanisme européen de stabilité (MES), Fonds européen de stabilité financière (FESF), FMI, Ligue arabe

2. Mots du champ sémantique « problèmes – danger » Par exemple : difficulté, crise, violent, massacrer, menacer

Termes ayant la force caractéristique d’atteindre les sentiments et émotions des gens, de les inquiéter.

3. Mots du champ sémantique « national » Par exemple : français/ France, allemand/ fédéral

Termes qui réfèrent au poids politique national dans les négociations au sein du Conseil européen respectivement à la volonté de dominer l’agenda de l’UE.

4. Mots du champ sémantique « européen – commun – idéaux »

Par exemple : Europe, européen, UE/ les 27, zone euro/ les 17, démocratie, Haute Représentante, Parlement européen, solidarité, démocratie, liberté.

Termes créant une association au projet de l’UE et des valeurs associées aux

idéaux républicains (occidentaux).

(17)

11 5. Évocation du partenaire

Par exemple : Madame Merkel, la chancelière, France et Allemagne, président de la République, Nicolas Sarkozy

Termes soulignant l’intensité des relations franco-allemandes et l’engagement pour leur réussite.

Les protocoles des conférences de presse figurent en annexe de ce mémoire. Les couleurs insérées sont censées aider le lecteur à retracer l’analyse présentée dans les trois parties principales. Puis, une évaluation de toutes les conférences de presse recueille l’analyse lexicologique dans les cinq catégories présentées ci-dessus.

Au plan quantitatif, la fréquence d’apparition de ces termes ou bien des noms des institutions (en toutes lettres ou sous forme de sigle voire de synonymes) a été comptée et mise en relation avec le nombre total de mots de chaque conférence de presse. Au plan qualitatif ont été analysées la préférence des champs sémantiques différents ainsi que l’occurrence de certains termes préférés des deux chefs d’État et de gouvernement ayant un rapport à leurs objectifs et intentions politiques qu’ils défendaient respectivement.

Par ailleurs, je n’ai pas jugé utile de procéder à des entretiens avec des conseillers

proches de la chancelière voire de l’ancien président de la République. En raison du

caractère politiquement délicat, des éléments pertinents n’étaient pas envisageables.

(18)

12 5. L’annonce du plan

La première partie de ce mémoire pose les bases théoriques pour une meilleure compréhension des autres parties principales. Notamment certains termes clefs de la communication et de la politique y sont définis, toujours ciblés vers le contexte de la présente analyse, la communication gouvernementale dans le cadre des conférences de presse à l’issue des Conseils européens à Bruxelles.

Les parties II, III et IV forment le cœur de l’analyse. Un fil rouge du mémoire entier est, certes, le volet (inter-)culturel des communications gouvernementales en Europe.

La deuxième partie se consacre aux identités nationales (françaises et allemandes), ancrées dans nos systèmes politiques depuis (au moins) le XIXe siècle, renforcées durant une bonne partie du XXe, et à leurs influences sur la manière de communiquer la politique gouvernementale, indépendamment s’il s’agit d’un cadre communautaire ou pas. Des approches anthropologiques générales sont exemplifiées par des cas de différences franco-allemandes concrets qui comptent parmi les « classiques » dans la politique communautaire mais qui en même temps ont bénéficié d’une attention médiatique particulière pendant l’année 2011.

Les parties III et IV sont un peu plus critiques dans la mesure où je considère que de nos jours, la politique européenne des Etats membres en général et de la France et de l’Allemagne en particulier, aurait le potentiel de faire un pas vers plus de démarches communes, malgré ou bien grâce aux divergences culturelles non négligeables.

La troisième partie se dédie à la contradiction présumée entre l’affichage européen volontiers et les discours nationaux en décodant les conférences de presse de la chancelière et du président de la République sous cet aspect-là.

La partie IV se pose la question de savoir s’il existait une véritable volonté de

fonctionner comme tandem franco-allemand entre Nicolas Sarkozy et Angela Merkel

(19)

13

ou si des simples considérations électoralistes ont motivé leurs références à la coopération étroite ainsi que leur mise en scène commune à partir d’octobre 2011.

En dernière partie, des questions concernant une communication insuffisante des

institutions européennes et la distanciation entre les citoyens et Bruxelles, en tenant

compte des raisonnements des trois parties précédentes, vont mener à la conclusion

que la prévalence des identités nationales n’exclut pas davantage d’intégration

européenne.

(20)

14

Partie I

La communication gouvernementale dans le cadre des conférences de presse à l’issue des Conseils européens

« La politique est inséparable de la communication, et d’ailleurs l’histoire de la démocratie est celle de leurs relations. » 9

Introduction partielle

Dans cette première partie seront détaillés le cadre théorique ainsi que les connaissances de base sur le domaine étudié. Dans un premier temps, il semble être nécessaire de distinguer les termes de Communication publique, Communication politique et Communication gouvernementale pour ensuite approfondir la fonction communicative des réunions du Conseil européen et plus particulièrement des conférences de presse des sommets réunissant les chefs d’Etat et de gouvernement à Bruxelles.

1. Cadre théorique : Définition et distinction des termes Communication publique - Communication politique - Communication gouvernementale

Communiquer est un devoir qui répond au droit à l’information des citoyens, aussi bien en Allemagne qu’en France. Les articles 5 et 20 de la loi fondamentale allemande garantissent l’accès à l’information et la liberté des médias. Il fait partie des fondements de la République fédérale que la démocratie repose sur des citoyens informés. La Cour constitutionnelle de Karlsruhe, dans sa décision du 2 mars 1977, a même souligné « le rôle crucial du travail d’information de l’Etat, qui

9

Wolton, Dominique (1995) : Les contradictions de la communication politique. Dans : Hermès, n°17-

18, p. 107

(21)

15

doit largement informer ses citoyens sur les questions décisives, car c’est le seul moyen de permettre à chacun d’évaluer à leur juste mesure, d’approuver ou de rejeter les décisions » 10 . En France, la valeur constitutionnelle de la liberté d’information repose sur l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, ensuite renforcée par une décision du Conseil constitutionnel d’octobre 1984, consacrée à la primauté de la liberté de la presse dans une démocratie. 11

Cette obligation d’informer s’applique à tout acteur public. Le terme global de communication publique inclut donc la communication émise par des institutions et administrations de toute échelle (organisations internationales, UE, Etat, collectivités territoriales, sphère sociale, entreprises publiques) mais également, dans un concours démocratique (article 4 de la Constitution de 1958), celle des hommes politiques, en fonction ou en quête d’occuper un poste.

Pour mieux différencier le terme de communication publique et introduire celui, plus spécifique, de communication politique, un recours à la définition et aux délimitations de Jacques Gerstlé est pratique. Ce dernier qualifie la communication politique d’un

« objet flou » qui peut donner lieu à quatre conceptions différentes :

Premièrement, une conception instrumentale selon laquelle la communication politique renvoie à l’ensemble des techniques auxquelles recourent les responsables politiques pour séduire et gérer l’opinion publique. Or, cette conception réduirait la politique à une technique et la communication à la manipulation.

Ensuite, une conception œcuménique qui met le focus à la transmission de l’information entre les acteurs politiques, les médias d’information et le public.

Néanmoins, cette conception tend à esquiver le rapport de domination entre gouvernant et gouverné, et sous-estime l’échange d’autres biens que l’information, notamment symboliques tels que les images, les représentations ou les préférences.

10

Sie muss die Bürgerinnen und Bürger über entscheidende Sachfragen umfassend informieren. Nur so kann jede Einzelne und jeder Einzelne die getroffenen Entscheidungen, Maßnahmen und Lösungsvorschläge richtig beurteilen, sie billigen oder verwerfen (Bundesverfassungsgerichtsentscheidung 44, 125 (164)).

11

Décision n° 84 - 181 des 10 et 11 octobre 1984.

(22)

16

Troisièmement, une conception compétitive qui prévoit d’influencer et de contrôler, au moyen des médias, les perceptions publiques des événements politiques majeurs et des enjeux. Cette approche ne met pas seulement en lumière la dimension de lutte et de concurrence, mais souligne également le rôle central du symbolique dans les processus politiques.

Finalement, une conception délibérative où la communication et la politique sont consubstantielles et forment les conditions pour une démocratie inclusive, grâce à la discussion et au débat de tous les citoyens dans la société. 12

Si aucune de ces quatre conceptions doit être exclue, les dimensions compétitive et œcuménique prévalent dans le cadre du présent mémoire.

Incontestablement, le domaine de prédilection de la communication politique est celui des consultations électorales pour le choix des représentants. 13 Néanmoins, pour suivre la proposition de Jean-Marie Cotteret, il faut distinguer entre la communication politique de « conquête du pouvoir » et celle d’« exercice du pouvoir ». 14 Cette dernière accompagne l’action politique et vise d’abord à informer les citoyens par des conférences de presse, des communiqués, des prises de position dans les médias, etc. Il s’agit plus précisément de communication gouvernementale qui peut se définir par une approche par objectifs : « faire connaître, faire comprendre, faire accepter » 15 .

L'objet de recherche du présent travail a d’une certaine manière un caractère

« hybride » ou bien « transfrontalier » qui s’explique par le fait que, d’un côté, il analyse une période d’exercice du pouvoir, ce qui le ferait entrer par conséquent dans la catégorie de la communication gouvernementale. De l’autre, la tendance croissante à transformer la vie politique en campagnes permanentes 16 ne doit pas être sous-estimée, la communication gouvernementale implique donc également la notion de la re-conquête du pouvoir. Ceci est d’autant plus vrai pour la période

12

Gerstlé, Jacques (2004) : La communication politique. Armand Colin. Paris, p. 13-14

13

Zémor, Pierre (1995/ éd. 2007) : La communication publique. PUF. Paris, p. 111

14

Cotteret, Jean-Marie (1997): Gouverner, c’est paraître. PUF. Paris

15

Sellier, Dominique (2006) : La communication gouvernementale en Europe. L’Harmattan. Paris, p.25

16

Cf. Gerstlé 2004:153

(23)

17

étudiée qui se situe à l’aube d’échéances électorales. La période s’étend de janvier à décembre 2011, où notamment du côté français, les élections présidentielles de mai et puis les élections législatives de juin 2012 ont joué un rôle prédominant dans la communication du président de la République. Du côté allemand, un peu plus éloignées pourtant loin d’être négligeables étaient les élections au Bundestag de septembre 2013. S’y ajoutent les « contraintes fédérales » de l’Allemagne : le gouvernement allemand devait prendre en compte les enjeux de pouvoir durant ce

« Superwahljahr » avec sept scrutins régionaux dont les issues avaient le potentiel de bousculer la majorité dans la deuxième chambre parlementaire, le Bundesrat.

Le présent mémoire se situe donc aussi bien dans le champ de la communication gouvernementale que dans celui de la communication politique.

2. La fonction communicative des sommets du Conseil européen dans des systèmes politiques différents

2.1. Définition des Conseils européens

Le Conseil européen réunit autour de la table les plus hauts dirigeants de l'Union européenne, à savoir les vingt-sept chefs d'État ou de gouvernement des États membres, le président de la Commission européenne et le président du Conseil européen. Ensemble, ils essaient de définir les priorités politiques et de fixer le cap stratégique de l'Union européenne.

D’habitude, et selon les exigences du traité de Lisbonne, le Conseil européen ne

siège pas plus de deux fois par semestre. Néanmoins, on a assisté à une

multiplication des sommets depuis le début de la crise de l’Euro. En 2011 ont eu lieu

cinq réunions formelles du Conseil européen, une réunion extraordinaire, une

réunion informelle des membres du Conseil européen, ainsi que quatre sommets

distincts des chefs d'Etat ou de gouvernement de la zone euro. Dans le cadre du

présent mémoire ne seront pris en compte que les réunions officielles (formelles et

(24)

18

extra-ordinaire) du Conseil européen. Les réunions de la zone euro seraient trop spécifiques pour refléter une image globale des préoccupations communautaires, déjà très largement dominées par la crise de l'Euro.

Vue d’ensemble du nombre et de la nature des réunions du Conseil européen par an 17 :

Année Réunion ordinaire

Réunion extraordinaire

Réunion informelle

Zone euro

Total

2006 3 3

2007 3 3

2008 4 1 5

2009 4 2 6

2010 5 1 1 7

2011 5 1 1 4 11

2012 4 1 1 1 7

2.2. Pour ce qui concerne la communication gouvernementale au plus haut niveau politique, les différences entre le système présidentiel en France et le système parlementaire en Allemagne n’ont que peu d’importance 18 Sans trop entrer dans des explications détaillées des deux systèmes politiques largement connus, il est vrai que le système politique joue un rôle important dans la stratégie de communication et d’influence. Force est de constater qu’en France,

17

Tableau EH, fait à partir du site internet du Conseil européen ; http://www.european- council.europa.eu/council-meetings/conclusions?lang=de

18

D’un point de vue rigoureusement scientifique, la France est également un système parlementaire puisque le critère n’est pas si un système politique prévoit un président « puissant » mais si le parlement dispose du pouvoir de révocation du gouvernement. Cf. Steffani, Winfried (1979) : Parlamentarische und präsidentielle Demokratie : strukturelle Aspekte westlicher Demokratien.

Westdeutscher Verlag. Opladen

(25)

19

l’élection du président de la République au suffrage universel direct a eu pour effet de « présidentialiser » la vie politique. Certaines prérogatives exclusives du président de la République, dont certains aspects des Affaires étrangères, ont pour effet que les média se concentrent notamment sur lui en matière de politique européenne. 19 Certes, le système parlementaire allemand favorise la formation de gouvernements de coalition, ce qui oblige le chancelier beaucoup plus à « orchestrer » les différents points de vue politiques au sein de celle-ci que c’est le cas pour un président de la République en « harmonie » ou « concordance » avec la majorité à l’Assemblée nationale. Ceci est aussi vrai pour la communication.

Néanmoins, pour la présente analyse, cette différence peut être jugée négligeable dans la mesure où on assiste à une « présidentialisation » du système politique allemand du fait de la personnification du jeu politique à Berlin. 20 Ceci est particulièrement vrai pour les sommets européens du plus haut niveau politique pendant cette période de crise où les interventions des chefs d’Etat et de gouvernement, de plus en plus multipliées, effaçaient, au plan médiatique, toute autre réunion bruxelloise, à l’exception peut-être de celles des ministres des Finances.

Pour toutes ces raisons, bien qu’il y ait des différences nettes dans les systèmes politiques des deux côtés du Rhin, la comparabilité des conférences de presse à l’issue des Conseils européens semble être largement donnée.

19

Article 5 de la Constitution de 1958: „Le président de la République (…) est garant de l’indépendence nationale, de l’intégrité du territoire, du respect des accord de Communauté et des traités. »

20

Cf. Klingemann, Hans-Dieter et Voltmer, Katrin (2002): Politische Kommunikation als

Wahlkampfkommunikation. Dans: Politische Kommunikation in der demokratischen Gesellschaft.

Westdeutscher Verlag. Wiesbaden, p. 398

(26)

20

3. Fonction et portée de la conférence de presse dans le contexte des sommets bruxellois

« Le pouvoir s’exerce, communication comprise. » 21

3.1. La couverture médiatique assurée augmente l’importance des conférences de presse à l’issue des Conseils européens

La portée communicationnelle d’une conférence de presse à l’issue d’un Conseil européen est élémentaire pour les chefs d’Etat et de gouvernement puisque toute prise de parole derrière un pupitre officiel et devant un fond « bleu-européen » est un acte hautement symbolique et donc rappel de légitimité, de pouvoir. Ceci est particulièrement vrai en cette période de crise où tous les yeux étaient dirigés vers Bruxelles, l’attention médiatique et l’apparition au JT étaient donc assurées. Ceci surtout compte tenu de la notoriété importante qu’a acquis cet organe d’impulsion politique : les Conseils européens attirent quelque 2000 journalistes dans le bâtiment à Bruxelles Où se tiennent toutes les réunions des chefs d’Etat et de gouvernement depuis 2003. 22

Comme une étude des intérêts journalistiques le montre, 23 la couverture médiatique de l’action des décideurs politiques ne peut pas être plus élevée. Dans les journaux et médias, les occasions politiques « institutionnalisées », comme des élections ou des réunions de haut niveau à Bruxelles, bénéficient de la plus grande attention des rédactions. Et ceci est particulièrement le cas en Allemagne et en France : à 58% (D) respectivement 42% (F) des cas, c’est des événements de routine qui sont l’occasion pour les journaux d’écrire sur l’Europe ; contre seulement 23% au Royaume Uni et 26% en Pologne. 24 Les journaux allemands et français préfèrent par conséquent

21

Zémor 2007:113

22

Cf. Lepoivre, Marc (2009) : Le Conseil de l’Union européenne et les défis de « l’Europe communicante ». Dans : Administration n°224, Revue de l’administration territoriale de l’Etat décembre 2009 – janvier 2010, p. 98

23

Hepp, Andreas et al. (2012) : Politische Diskurskulturen in Europa. Die Mehrfachsegmentierung europäischer Öffentlichkeit. Springer Verlag. Wiesbaden

24

Cf. Hepp 2012:201

(27)

21

traiter le sujet de l’Union européenne à travers les sommets qui bénéficient d’une couverture médiatique assurée. Ils appartiennent « au programme obligatoire » comme le confirme un correspondant de la Westdeutsche Allgemeine Zeitung (WAZ) : « Quand un sommet européen a lieu et Angela Merkel et tous les autres y participent, nous le couvrons, bien sûr. Indépendamment de ce qu’ils font, nous en écrirons quelque chose. » 25

3.2. La portée symbolique de Bruxelles et la maîtrise de l’interprétation de la réalité pour les chefs d’Etat et de gouvernement rendent les conférences de presse à l’issue des Conseils européens encore plus attrayantes

Comme le rappelle Jacques Gerstlé, la politique est « un univers de signes qui ont une efficacité sociale et pas seulement cognitive ou expressive (…). Pour produire le sens de leur expérience, les hommes se servent de symboles. Symboliser, c’est représenter le réel et établir un rapport de signification entre les choses ». 26 Pour la diffusion des images par la télévision ou par la presse écrite, rien que le fait d’y être présent est déjà un acte de communication, indépendamment de ce qui est dit. 27 Une particularité d’un événement comme le Conseil européen réside aussi dans le caractère de « huis-clos » de la manifestation puisque, comme les discussions ne sont pas publiques, dans les yeux du grand public, seul les chefs d’État et de gouvernement disposent de l’information cruciale. Il y a certes des images de la place Schuman et de la salle de réunion 50.1 du bâtiment Justus Lipsius, mais quand le conseil commence, les journalistes doivent quitter les lieux. Aux yeux du grand public, seuls les participants tiennent donc de la capacité de cadrage officielle de la situation qu’ils peuvent ensuite imposer aux médias. 28

25

Cité d’après Hepp 2012:202

26

Gerstlé 2004:21-22

27

Dans ce contexte, il serait intéressant de mener une étude sur la véritable importance du

« contenu » des propos lors d’une conférence de presse à Bruxelles par rapport à la portée des seules images diffusées.

28

Cf. Gerstlé 2004:158

(28)

22

Cette circonstance augmente l’intérêt porté à leurs paroles lors de la conférence de presse à l’issue du conseil. Ou avec d’autres mots : « l’équilibre fragile » entre les trois discours (médias, politiques, opinion publique), à laquelle la communication politique est exposée, se brise au profit des chefs d’Etat et de gouvernement puisque

« l’enjeu est la maîtrise, momentanée, de l’interprétation de la réalité dans une perspective qui est toujours liée à la prise de pouvoir, ou à son exercice » 29 .

30

29

Wolton 1995:119

30

Conférence de presse de Nicolas Sarkozy lors du Conseil européen du 24 mars 2011 ; Image tirée

de : http://www.lemonde.fr/afrique/article/2011/03/25/l-intervention-en-libye-a-evite-des-milliers-de-

morts-selon-sarkozy_1498182_3212.html

(29)

23

Partie II

Les identités nationales prévalent sur l’intérêt d’une Europe plus forte

Hypothèse 1

« Malgré l’ancienneté du projet européen et l’autonomie relative des institutions de l’Union européenne, le poids des identités nationales politique et culturelle reste prépondérant, surtout en matière de communication politique. Les façons de traiter la formation de l’opinion choisies par les deux chefs d’Etat et de gouvernement nous renseignent sur les valeurs et caractéristiques identitaires et culturelles de leur nation respective. »

Introduction partielle : Les communications respectives des chefs d’Etat et de gouvernement reflètent bien nos cultures politiques différentes – explication anthropologique de la communication gouvernementale nationale

Si l’analyse de ce mémoire épouse la problématique de la communication politique, l’hypothèse sous-jacente acquiert une dimension anthropologique.

La communication gouvernementale ne pourrait-elle être que nationale ?

C’est au moins ce que Dominique Wolton allègue dans son article « Les

contradictions de la communication politique » : Bien que les défis et difficultés soient

en grande partie les mêmes dans l’ensemble de l’Union européenne, les formes et le

sens de la communication politique divergent dans chaque capitale. Puisque tout est

différent, « du langage, des traditions, des vocabulaires, des représentations, des

références historiques, des symboles », la communication ne pouvait qu’être

(30)

24

nationale. Selon Wolton, les caractéristiques nationales d’un modèle de communication politique ne sont pas extrapolables d’un pays à l’autre. 31

Pourtant, est-ce encore vrai en 2011, 16 ans après la publication de son livre en 1995, dans une Union européenne beaucoup plus intégrée après les traités d’Amsterdam (1999), de Nice (2003) et surtout de Lisbonne (2009) ? Et est-ce plus concrètement vrai pour l’Allemagne et la France, les deux « poids lourds » dans le jeu politique des 27 dont les problèmes et les intérêts se ressemblent vraisemblablement le plus ? Et finalement, n’y a-t-il pas des journaux et chaînes de télévision européennes (notamment Euronews et Arte pour ne pas citer les nombreux sites Internet dédiés à l’Europe) qui contribuent à propager des messages (pan-) européens, détachés des seuls intérêts nationaux ?

Dominique Sellier donne une autre orientation de cet aspect de l’analyse en étudiant la communication gouvernementale de différents pays européens, à travers leurs services d’information respectifs. Il conclut que ces derniers traduisent les identités culturelles et politiques nationales même si les possibilités techniques sont pareilles pour tous. Selon Sellier, entre le Bundespresseamt, le Service d’information du gouvernement (SIG) et le Central Office of Information (COI) britannique, le rapport à l’objet de la « communication gouvernementale » est différent. 32 Ainsi, l’organisme gouvernemental allemand (Bundespresseamt) met l’accent sur sa mission d’informer pendant que le COI britannique fonctionne comme une vraie agence de communication s’adressant à des clients. Le SIG (rattaché au Premier Ministre), lui, oscille entre information et communication 33 .

D’après cette analyse, l’Allemagne préférerait maintenir le cap d’une diffusion linéaire de l’information, à travers une structure de porte-parolat, rendue possible par une tradition ancienne de respect de l’Etat et de l’administration. 34 Pour ce constat, Sellier s’inspire de l’historien et sociologue Emmanuel Todd qui présente dans son ouvrage anthropologique « L’invention de l’Europe » la thèse d’une fragmentation de l’Europe

31

Cf. Wolton, Dominique (1995) : Les contradictions de la communication politique. Dans : Hermès, n°17-18, p. 121

32

Cf. Sellier 2006:93

33

Cf. idem p. 44

34

Cf. idem p. 45

(31)

25

quasi structurelle en quatre systèmes familiaux, la France et l’Allemagne lui apparaissant comme emblématiques en tant que systèmes idéologiques. 35

Projeté sur la présente analyse et partant de l’étude de D. Sellier, est-ce que derrière la dénomination commune de communication gouvernementale se trouvent, en France et en Allemagne, la même signification et les mêmes perspectives et pratiques ? Ces pays, sont-ils autant emblématiques au plan de leur communication gouvernementale ? Concrètement, la façon de « débriefer » un Conseil européen, traduit-elle plutôt une volonté d’informer ou bien de communiquer un message ?

1. Le flou français vs. la précision rationnelle allemande ?

Il est extrêmement instructif d’étudier les conférences de presse par rapport aux mots-clefs employés par le président de la République et la chancelière et aux champs sémantiques dans lesquels ces termes entrent. Chaque partie du présent mémoire proposera une analyse macro sous un autre angle et peaufinera dans un deuxième temps cette analyse sous un aspect plus précis ou l’exemplifiera à l’aide d’une ou deux conférences de presse des deux chefs d’Etat et de gouvernement.

Dans un premier abord, force est de constater que, de manière général, la chancelière Merkel a beaucoup plus recours aux termes techniques, surtout au vocabulaire économique, sigles à la FESF, MES, etc. comprises, et aux termes incluant des concepts ou mécanismes politiques que son homologue français, comme le montre ce tableau :

35

Attribuant une influence prépondérante aux systèmes familiaux des sociétés, Todd a identifié pour l’Allemagne (comme pour l’Autriche par ailleurs) une prédomination des familles souches dans ces sociétés, ayant tendance à des valeurs comme l'inégalité et l'autorité.

Todd, Emmanuel (1990) : L’invention de l’Europe. Seuil. Paris, p. 16-30

(32)

26

Vocabulaire technique « structures/ mécanismes – concepts politiques/

économiques » : 36

4/02/ 11/03/ 25/03/ 24/06/ 23/10/ 9/12/ mentions/ mots

Merkel 115 59 111 68 46 140 539/ 16.500 3,27%

Sarkozy 47 91 153 62 30 87 470/ 24.000 1,96%

Une autre vue d’ensemble quantitative explique que les deux chefs d’Etat et de gouvernement ont à peu près la même tendance à employer des termes du champ sémantique « européen – commun – ensemble – idéaux » ; la petite différence de 0,08% n’est pas véritablement statistiquement significative :

Mots du champ sémantique « européen – commun – ensemble – idéaux » : 37 4/02/ 11/03/ 25/03/ 24/06/ 23/10/ 9/12/ mentions/ mots

Merkel 58 18 38 23 33 75 245/ 16.500 1,48 %

Sarkozy 48 98 85 83 14 57 385/ 24.000 1,58 %

Pourtant, en distinguant à l’intérieur de cette « catégorie rouge », en ouvrant le sous- champ des « idéaux & valeurs moraux » (entendus, certes, dans une optique occidentale), on remarque une très grande divergence. Angela Merkel n’a pratiquement aucun recours aux termes ayant caractère moral pendant que son homologue français explique sa politique et émaille son discours à l’aide des idéaux politiques et sociétaux, son résultat étant onze fois supérieur à celui de la chancelière :

Extrait « Idéaux & valeurs moraux » (démocratie, liberté, droits de l’homme, humanitaire, révolution) : 38

4/02/ 11/03/ 25/03/ 24/06/ 23/10/ 9/12/ mentions/ mots

Merkel 4 1 0 0 0 0 5/ 16.500 0,03%

Sarkozy 18 38 14 8 0 0 78/ 24.000 0,33%

36

Tableau EH

37

Tableau EH

38

Tableau EH

(33)

27

Que peut-on déduire de ce premier constat statistique ?

Premièrement, que la chancelière préfère l’explication technique et rationnelle à une contextualisation politique et morale. Deuxièmement, que la référence aux droits de l’Homme et du citoyen, tradition française depuis la Déclaration (voté le 26 août 1789 l’Assemblée nationale constituante) sont encore partie intégrante du discours politique même s’il faut prendre en considération que dans ces exemples concrets se superpose la volonté (et finalement le fait) d’intervenir militairement en Afrique du Nord (Libye) – au nom des idéaux républicains.

2. Pour la communication politique, les sujets écartés sont tout aussi importants que les sujets mis en avant

Il n’est pas seulement important de regarder ce que le président de la République respectivement la chancelière disent mais il est tout aussi révélateur d’observer quels sujets ils évitent. L’omission fait tout aussi partie d’une stratégie de communication puisque les hommes politiques ont intérêt à mettre en avant des thèmes qui témoignent de leur compétence et succès, et à essayer, en même temps, d’éviter que les médias traitent des thèmes qui renvoient à des points faibles de leur exercice de pouvoir desquels pourrait, à son tour, profiter l’opposition. 39

L’analyse montre que Nicolas Sarkozy essaie de réduire l’espace qu’il consacre à la politique économique ou évite d’évoquer les thèmes de domaines éventuellement délaissés par la France sous sa conduite durant les années auparavant. Ainsi, lors de la conférence de presse du 4 février 2011, il omit d’informer la presse sur les points « innovation » (investissement dans l'éducation, la recherche, la technologie) et « énergie » (marché intérieur de l'énergie intégré, interconnecté et pleinement opérationnel). Une tendance générale chez Nicolas Sarkozy est la préférence des thèmes « Affaires extérieures » à ceux de la politique économique. Par exemple, bien que la deuxième journée du Conseil européen de fin mars (24 et 25 mars) fût

39

Cf. Klingemann, Hans-Dieter et Voltmer, Katrin (2002): Politische Kommunikation als

Wahlkampfkommunikation. Dans: Politische Kommunikation in der demokratischen Gesellschaft.

Westdeutscher Verlag. Wiesbaden, p. 399

(34)

28

consacrée à la politique économique, le président de la République Nicolas Sarkozy a abordé volontiers, de nouveau, les sujets de la Libye et de la Syrie. Deux tiers de son intervention y étaient consacrés malgré le fait que, déjà, le 24 mars, toute la réunion du Conseil européen et par conséquent toute la conférence de presse étaient dédiées à ces sujets.

C’est tout à fait le cas contraire chez Angela Merkel. Quand elle peut, elle dit peu voire rien sur des sujets touchant les relations extérieures afin de se concentrer davantage sur la politique économique.

Dans ce sens, la conférence de presse du 11 mars sert de bon exemple : La France avait demandé une réunion extraordinaire du Conseil européen, ayant lieu seulement 13 jours avant la réunion régulière prévue pour le 24 mars, afin de discuter la situation en Libye et de donner à la France (et au Royaume Uni) le soutien des autres Européens pour leurs négociations en faveur d’une résolution au sein du Conseil de Sécurité des Nations Unies. Cependant, les Allemands n’étaient pas en faveur d’une intervention militaire ; et Angela Merkel ne le fait pas seulement savoir en déclarant qu’il n’y avait pas, à ce jour-là, de « besoin de prendre une décision » 40 et en répétant son « scepticisme » quant à toute ingérence en Libye à quatre reprises en un seul paragraphe 41 , mais de plus, elle consacre au moins un tiers de sa conférence de presse au pacte pour la compétitivité qui était seulement discuté lors d’une réunion des chefs d’Etat et de gouvernements de la zone euro plus tard dans la même journée. En préférant parler de la réunion qui suit à celle à laquelle elle vient de participer (sur l’ordre du jour : Tunisie, Egypte, Libye), elle souligne que les priorités (allemandes) des Européens devraient être ailleurs qu’en Afrique du Nord. En outre, Angela Merkel ajoute un autre sujet à sa conférence de presse qui

40

« (…) für uns war klar, dass heute kein Entscheidungsbedarf besteht (…) »

41

« Ich habe aus meiner Skepsis nie einen Hehl gemacht. Ich bin grundsätzlich skeptisch, weil man immer das Ende bedenken muss. Aber ich sage auch: Wir erleben jeden Tag eine neue Situation.

Deshalb können wir heute nicht abschließend die gesamte Entwicklung in Libyen diskutieren. Ich habe

weder in meinen Einlassungen heute noch sonst einen Hehl daraus gemacht, dass ich das skeptisch

sehe und dass die zum Teil sehr offensiv vorgetragenen Forderungen zum Beispiel nach einer „no-

fly-zone“ aus meiner Sicht nicht immer in Betracht ziehen, welche Art von militärischem Engagement

dafür notwendig ist und was das im Einzelnen bedeuten kann. Deshalb besteht von meiner Seite eine

grundsätzliche Skepsis. »

(35)

29

n’était pas sur l’ordre du jour du Conseil européen concerné. La chancelière commence son intervention du 11 mars 2011 en réagissant tout de suite aux premières images arrivant de Fukushima. Certes, ses condoléances aux Japonais ne peuvent pas être interprétées comme ayant un caractère hypocrite, mais en chargeant sa conférence de presse de deux thèmes supplémentaires, elle marginalise automatiquement celui de la Libye et attire l’attention des médias (allemands) ailleurs.

Nicolas Sarkozy, en revanche, n’évoque ni Fukushima ni la réunion de la zone euro dans son intervention du 11 mars 2011, tout son attention étant consacrée à la Libye.

Quand un journaliste lui a fait des observations sur le pacte de compétitivité, il réagit fermement en ripostant : « Alors, je viens parler de cette question-là [Libye] parce que c’est le sujet, on en a parlé pendant six heures. Je ne veux pas parler d’autre chose (…) ».

Une autre conférence de presse, celle du 24 juin, confirme ces observations-là.

Quatre sujets figuraient sur l’ordre du jour de ce Conseil européen : la politique économique, les flux migratoires/l’espace Schengen, l’adhésion de la Croatie à l’Union européenne et la nomination de Mario Draghi à la tête de la Banque centrale européenne.

Angela Merkel dédie 2.000 de ses 2.160 mots prononcés à la politique économique (pacte euro plus, MES, compétitivité…). Parmi le peu de place laissée aux autres sujets, une phrase est consacrée à la Croatie et un paragraphe au processus de paix au Proche Orient. Le thème de migration/ espace Schengen est complètement écarté.

Ceci est en revanche un sujet de prédilection pour Nicolas Sarkozy qui, compte tenu

des flux migratoires accrus venus de l’Afrique du Nord et de l’incapacité de l’Italie de

sécuriser ses frontières extérieures, était à l’initiative d’un rétablissement des

contrôles aux frontières à l’intérieur de la zone de libre circulation des personnes. Par

contre, ce même jour, le président de la République n’a pas du tout évoqué

l’élargissement de l’UE avec la Croatie, éventuellement par peur que ce sujet pouvait

stimuler en France des discussions similaires à celles de 2005 autour du référendum

(36)

30

sur la Constitution de l’UE. A l’époque, le débat public portait avant tout sur l’élargissement à l’est (« le plombier polonais ») et une éventuelle adhésion de la Turquie. 42

Un cas spécial présente la conférence de presse commune du 23 octobre. Comme on l’a vu, il y a certains sujets ayant de forts potentiels à dévoiler les différends franco-allemands. Comment donc débloquer cette situation ? Comment les deux ont- ils réussi à ne pas révéler leur désaccord profond sur certaines questions lors de cette conférence de presse commune ?

Avec un moyen très simple de la diplomatie, en écartant tout thème éventuellement délicat, surtout en politique étrangère. En raison de la dispute entre Berlin et Paris sur l’intervention en Libye, Nicolas Sarkozy renonce à parler de la situation en Afrique du Nord/ dans le monde arabe, pourtant d’habitude son sujet de prédilection.

Par la même approche et pour ne pas soulever un lièvre et prendre des gants avec le partenaire, Angela Merkel n’aborde pas le changement climatique, cheval de bataille pour la chancelière.

Le sujet restant était la politique économique, inévitable pour les deux et à l’ordre du jour de toute réunion du Conseil européen en 2011. A l’intérieur de ce sujet, il est également intéressant d’observer comment les positions et le vocabulaire des deux subissent quelques modifications, selon le principe du donnant-donnant. Ainsi, Angela Merkel n’utilise pas une seule fois un de ses termes préférés,

« compétitivité », et qu’une seule fois celui de « stabilité » pour ne pas faire allusion à une suprématie de l’Allemagne sur la France en la matière. En revanche, la chancelière répète à quatre reprises « croissance » 43 , son record personnel en 2011 et, après « recapitalisation des banques » (5 mentions), l’autre concession à la France en termes de communication, le mot technique le plus utilisé par Angela

42

Ferenczi, Thomas (2005) : Désenchantement. Dans : Le Monde du 30. Mai 2005

43

L’expression « stimuler la croissance » est généralement synonyme d’injection d’argent public dans l’économie pour relancer l’économie ce qui correspond plutôt à une politique économique

keynésienne, en cette période 2011 plus chère à la France qu’à l’Allemagne.

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