INFLUENCE DE QUELQUES TECHNIQUES
DE CONSERVATION SUR L’EFFICACITÉ DE L’AZOTE DE LA LUZERNE CHEZ LE MOUTON
Michelle DURAND S.-Z.
ZELTER, J.-L.
TISSERANDMonique POISSON, F. DE MONREDON, Annie
BARDE,
Christiane DUMAY Laboratoire de Recherches sur la Conservation etl’E!’ccacité
desAliments,
16, rue Claude-Bernard, Paris 5e
Centre national de Recherches
zootechniques,
Institut national de la Recherche
agronomique
SOMMAIRE
Trois séries
d’expériences
sont effectuées en19 6 3 -6 4 -6 5 ,
avec des moutons adultes àl’entretien,
dont certains sont munis de canules permanentes de rumen. Leur
objectif
est de comparer la valeur azotée d’unfourrage
de luzerne conservé selon différentestechniques : congélation
du vert, fenaisonpartielle
suivie d’unpost-séchage
en grange,ensilage
humide sanstraitement, ensilage
aumétabisulfite de sodium ou à l’acide A.i.V.,
ensilage
parpréfanage ( 35 - 40
p. 100de matièresèche).
Tous les traitements sont
appliqués
le mêmejour
à la même coupe defourrage.
Les critères
biologiques
retenus sont : évolutionpostprandiale
del’ammoniogenèse
et de la concen-tration en azote non
protéique
dans le rumen, de l’urée du sangpériphérique, digestibilité
etrétention azotées.
Les
points
suivants sedégagent
des résultats :a le
préfanage
améliore nettement l’efficacité azotée del’ensilage
de luzerne en la rendant compa- rable à celle du vertcongelé
et du foinpréparés
àpartir
de la même coupe(tabl. 4 );
10les catabolismes
glucidique
et azoté que subit engénéral
une luzerne ensilée à faible taux de matière sèche et sans acidificationpréalable,
amoindrissent fortement la valeur azotée del’ensilage
au
point
d’entraînerparfois
des bilans azotésnégatifs,
mêmelorsque l’ingéré
azotédépasse large-
ment les besoins
théoriques
de l’animal(tabl.
4 et9 ) ;
-;ela distribution simultanée d’un aliment
énergétique susceptible
d’activer laprotéosynthèse
bactérienne dans le rumen à
partir
de formes azotéesparticulièrement dégradées (NH 3 )
améliorefortement l’utilisation azotée d’un mauvais
ensilage (tabl.
9et10 ).
INTRODUCTION
Des
recherches
antérieuressoulignent l’importance
des modificationschimiques
qui
surviennent au cours de la conservation d’une luzerne selon différentestechniques
d’ensilage
et les difficultés d’éviter lesdégradations
desprotéines
dufourrage :
contrai-rement à l’addition d’acides minéraux
AIV,
celle de métabisulfite de sodium nesemble inhiber ni la
protéolyse,
nil’ammoniogenèse (D URAND -S AI , OMON
et ZELT$R,I9
6 0
) ;
une élévation de la matière sèche à une teneur voisine de 35 p. 100parpré- fanage
surchamp,
limitel’ampleur
des processus de désamination mais a peu d’actionsur la
protéolyse (GouET
etal, i 9 6g). Or,
il est bien connu(A N rnsorr
etal, ig 54 ), qu’une
solubilité élevée desprotéines s’accompagne
souvent d’une intense ammo-niogenèse
au niveau du rumen suivie d’une excrétion azotée urinaire élevée.Les modifications
chimiques susceptibles
d’intervenir au cours de la conser-vation
ayant
toute chance de serépercuter
sur la valeurazotée,
nous avons étudié l’influencecomparée
deplusieurs techniques
de conservation de la luzerne sur diversesétapes
du métabolisme azoté et sur l’efficacité azotée de cefourrage
chez le mouton.Dans une
première
séried’expériences
réalisées au laboratoire enig6i-i 9 62,
S
HINN
( 19 6 3 )
distribue de la luzerne conservée de différentesmanières,
simultané-ment avec un aliment
énergétique
pauvre en azote pourajuster l’apport
azoté auniveau du besoin
théorique
du mouton adulte à l’entretien. Aucun écartsignificatif
n’est décelé entre les valeurs azotées des divers
types
defourrages
conservés(foin, ensilage
au métabisulfite desodium, ensilage préfané) malgré
des différencesqualita-
tives
importantes
entre les aliments. Onpeut
supposer que laprésence
d’amidondans l’aliment
énergétique
avait pu masquer l’effetintrinsèque
des traitements techno-logiques
en améliorant l’utilisation dans le rumen del’ammoniaque
desensilages
malconservés pour la
protéosynthèse
bactérienne.Une dissociation
expérimentale
de l’action de ces deux facteurs interférentspouvait présenter
de l’intérêt pourpréciser
les incidences propres aux traitements de conservation. Nous avonsrepris
les recherches en distribuant lesfourrages
conser-vés
seuls, puis
associés à un alimentcomplémentaire énergétique dépourvu
d’amidon.
MATÉRIEL
ETMÉTHODES EXPÉRIMENTALES
1
°
Dispositifs
et critèresexpérimentaux
Trois séries
d’expériences (A,
B,C)
sont réalisées avec de la luzerne(Medicago sativa)
variétéFlamande
récoltée à un stade de floraison de 5-Io p. 100 en 1963( 2 e coupe), iç6 4 (i re coupe)
etrç6g (
2
e coupe).
Dans deux de ces séries la valeur azotée de différents typesd’ensilage
estcomparée
àcelles du vert
congelé
et du foin ventilé(série A),
ou à celle du foin ventilé(série B)
dans desrégimes
comportantuniquement
lefourrage
conservé étudié. Dans la troisième(série C)
l’efficacité azotéed’ensilage préfané
etd’ensilage
humide non traité est mesurée enrégime fourrage
seul, et enrégime
mixte
(fourrage
+complément énergétique).
Pour chacun des essais, tous les traitements de conservation sont
appliqués
le mêmejour
à dela luzerne de même provenance
(coupe
etparcelle).
Les méthodesd’ensilage
utilisées sont décritespar FATIANOFF et al.
( 19 66).
Le foin estfabriqué
parpréfanage
suivi d’unpost-séchage
en grange par ventilation forcée avec de l’air ambiant ; laplante
stockée à l’état de vert estcongelée
en tunnelet conservée à - i8°C.
Les
dispositifs généraux
et les critères des 3expériences
sont donnés dans le tableau r.Dans les
expériences
A etC,
les animauxreçoivent
les différents aliments enquantité
calculéepour assurer la couverture de leurs besoins
énergétiques
selon les normes de LEROY( 10 6 1 ).
Dans
l’expérience
B,l’ensilage
AIV étant l’aliment le moins bienaccepté,
lesquantités jour-
nalières de matière sèche distribuées avec les deux autres
régimes
sontajustées
sur celles consomméesavec le
premier;
elles couvrent environ 80p. 100des besoinsénergétiques théoriques.
Dans
l’expérience
C, les deuxensilages
sont donnés seuls ou avec un alimenténergétique complémentaire.
Celui-ci pauvre en azote(matière
azotée = 6,4 p. 100 de laM.S.)
abaissel’apport
azoté de la ration au niveau du besointhéorique,
tout en maintenant un apporténergétique
correct. Il est
composé de paille
deblé (q 4 , 5 p. i oo) de pulpes
sèches debetterave ( 47 p. r oo), d’huile de
maïs
(5
p.100 )
et de matière minérale( 3 , 5
p.100 ).
Dans lerégime mixte,
laproportion
de matièresèche
d’ensilage
diffère avec la taille dessujets (tabl. 2 ).
2
° Méthodes
biologiques a)
Bilan azoté.Les
périodes d’adaptation
àchaque régime
sont de 2ojours (les
animaux sont maintenus pen- dant 15jours
au sol et les 5jours
suivants encage).
Les mesures de bilan portent sur les 10jours qui
suivent. Les animaux sontéquipés
d’undispositif
permettant de recueillir l’urineséparément
des fèces dans des flacons contenant de l’acide
sulfurique
et duthymol
pour éviter des contami- nations et des pertes d’ammoniac(ZELT ER
etCHARL E T-LÉRY, 19 6 1 ).
Lesingesta
et excréta fraissont mesurés et échantillonnés
chaque jour.
Unepartie aliquote
est conservée aucongélateur (― i8°C)
en vue desdosages
d’azote, effectués sur des échantillons fraispondérés
cumulés, parpériode
de5
jours.
La teneur des
ingesta
et des matières fécales en matière sèche est déterminéejournellement.
Un
dosage
de matières minérales est effectué sur les échantillons secs cumulés de lapériode
debilan,
en vue du calcul de la matière
organique digestible.
b)
Mesures au niveau du rumen.Des
prélèvements
dejus
de rumen sont effectués à l’issue despériodes
de bilan azotépendant
deux
jours
non consécutifs pour lesexpériences
A et C etpendant
une seulejournée
pourl’expé-
rience B. Les temps de
prélèvement
sont situés dans l’intervalle o-7 heuresaprès
le repas du matin(
1/2
rationjournalière),
engénéral
aux temps o, le 2, 3,4, 5, 7 heures. Le contenuprélevé (environ
20
g)
est filtré aussitôt sur 5épaisseurs
de gaze. i heureaprès
le repas(expérience
B etC),
10g depolyéthylène glycol (PEG)
solubilisés dans 100ml d’eau, sont introduits dans le rumen afin d’évaluer le volume de son contenu à ce temps, suivant latechnique
de HYDEN(r 9 6r).
Dans
l’expérience
A, la 1/2de la rationjournalière
defourrage
est à ladisposition
de l’animal,pendant
toute la durée desprélèvements.
Dans lesexpériences
B et C les refus non consommési heure
après
le début du repas sont retirés etpesés.
L’eau de boisson est totalementsupprimée pendant
lesprélèvements
dès le début du repas dans lesexpériences
A et C, et retirée i heureaprès
le début du repas dans
l’expérience
B.c)
Mesure de l’uréesanguine.
Des
prises
de sang sont faites dans la veinejugulaire
aux temps 0-3-5et 7 heuresaprès
le débutdu repas du
matin, pendant
2jours
non consécutifs dansl’expérience
C. Dansl’expérience
B, ellesont lieu le
jour
desprélèvements
dejus
de rumen sur animaux fistulisés et ledernier jour
de lapériode
de bilan azoté sur les animaux intacts.
d) Techniques analytiques.
L’analyse qualitative
desensilages
est faite par lestechniques
décrites dans GOUET et al.(r 9 6 5 ).
L’azote soluble total est extrait par
broyage
de l’échantillon dans la salive artificielle(M AC
Dou-GALL
)
utilisée par TISSERAND et ZELTER( 19 65).
L’azote total des aliments, de l’urine et des fèces est dosé selon
Kjeldahl (catalyseur : oxyde
rouge de mercure, microdistillation dans
l’appareil Parnas-Wagner,
distillat recueilli dans unesolution d’acide
borique
à i p. 100et titrée parS0 4 H 2 N/ 5 o
enprésence
de l’indicateur deC ONWAY .).
L’urée est déterminée dans l’urine par la méthode
colorimétrique
de SHRAMMet AINES(r 959 )
et dansle sang immédiatement
après prélèvement
par latechnique
à l’uréase CONWAY( 1950 ).
L’azoteaminé libre total des
ensilages
et de l’urine est dosé suivant la méthode au cuivre parphotométrie après
réaction à lacuprizone
MALANGEAUet BOURDON,( 19 6 3 ).
Ledosage
del’ammoniaque
est faitselon CONWAY
( 1950 )
dans l’urine et dans lejus
de panse dans les 5 minutesqui
suivent leprélève-
ment N non
protéique
estdéterminé par précipitation
à l’acidetrichloracétique (concentration
finalede TCA = 10 p.
100 ),
suivie d’unecentrifugation
à 18 ooo g. Lepolyéthylène glycol
est dosépar turbidimétrie selon HYDEN
( 1955 ).
RÉSULTATS
La
composition chimique
desfourrages
et leurqualité
sontdonnées
dans letableau
3.10
Com!ayaison
desrégimes
luzerne vertecongelée, foin ventilé, ensilage préfané et ensilage
traité aumétabisulfite
de sodium(Expérience A)
Les résultats
rapportés dans
le tableau 4 concernent la moyenne des résultatsindividuels
obtenus avecchaque régime.
Un animal a dû être éliminé durégime
luzerne verte
congelée.
Lesingesta (tabl. 4 )
sontlégèrement plus importants
pour la luzernecongelée
tant en cequi
concerne l’azote que la matièreorganique diges-
tible. Pour les 3 autres
régimes
les différences ne sont passignificatives
maispour l’ensilage
au métabisulfitequi
est le moinsappétent, les ingesta
sontplus faibles ; dans
ce cas lesbesoins énergétiques théoriques
sont couverts à8 0
p. 100seulement
et les besoins azotés à 180p. 100.Par
rapport
à la luzerne vertecongelée,
lesensilages
et surtout le foin ventilé ont des taux de cellulose brutelégèrement plus élevés ;
la teneur en matière orga-nique digestible
de cesfourrages
est de ce fait inférieure d’environ 6points.
Les tauxde matière azotée totale des 4
fourrages
est similaire mais lacomposition
de la frac- sion azotée desensilages
sedistingue
de celle du foin et du vertcongelé
par des pro-portions plus
élevées de Nsoluble,
de N nonprotéique
et deN-NH, :
ces formesazotées sont en
quantités plus importantes
dansl’ensilage
aumétabisulfite, qui
par ailleurs contientdavantage
d’acideacétique
et d’acidebutyrique,
indicesd’une
mau-vaise conservation. ’
Intensité
de l’ammoniogenèse
au niveau du rumen(fig. i):
Pour des
ingesta azotés voisins, l’augmentation des
concentrations ammonia-cales rapportées
à celle dutemps
o est nettementplus
faible pour lefoin
que pour lesensilages ;
cephénomène
estparticulièrement
net chez le mouton42 . I,a
consom-mation
d’ensilage préfané
fournit les concentrations lesplus
élevées deNH 3
dansle rumen.
Le
mouton 25ayant
consomméplus
lentement le repasd’ensilage
au méta-bisulfite, l’ammoniogenèse correspondante
estplus
étalée dans letemps.
Digestibilité et
rétention azotée.La
tendance des résultats est lamême, quel
que soit le moded’expression
ducoefficient de
digestibilité, apparent
ouréel (corrigé
pour Nfécal métabolique
= o,4g N p. 100 g de matièresèche ingérée) :
lesensilages,
surtoutl’ensilage
au métabi-sulfite,
ont unedigestibilité
azotéesupérieure
àcelle
dufoin,
mais lesdifférences
ne sont passignificatives.
Les bilans azotés des
régimes
deluzerne
vertecongelée,
de foin etd’ensilage
préfané
sont similaires et touspositifs. L’ensilage
aumétabisulfite
entraînesysté-
matiquement
des bilansnégatifs
pour tous les animaux. Avec cetensilage
l’excré-tion
de N urinairerapportée
à Ningéré
est de 30p. 100supérieure
à celle des autresrégimes.
L’azote retenurapporté
à Ningéré, digéré apparent
oudigéré réel,
n’accuse pas de différences entre vertcongelé,
foin etensilage préfané ;
par contre les coeffi- cients de rétention del’ensilage
au métabisulfite sontsignificativement plus
faibles(P
<0 , 05 ), malgré
des variations individuellesimportantes.
Les
proportions
de Nuréique,
de N ammoniacal et de N aminé libre del’urine,
ne sont pas modifiées par le
type
derégime (tabl. 5 ) :
les teneurs en N aminé etN-NH S
sont faibles
(N
aminé < i p. 100du Ntotal, N-NH a c
3 p.100 ) ;
et l’azoteuréique représente
en moyenne 80 p. 100du N total.L’excrétion supplémentaire
de N urinaireavec
l’ensilage
au métabisulfite a essentiellement lieu sous forme d’urée(tabl. 5).
20
Com!ayaison
desrégimes foin ventilé, ensilage préfané et ensilage
AIV(Expérience B)
D’après
les testsbiochimiques
dequalité,
les deuxensilages
sontparfaitement
réussis : absence d’acide
butyrique, ammoniogenèse
inexistante dansl’ensilage
AIV ettrès faible dans le
préfané qui,
par contre, a la couleur et l’odeur d’unensilage ayant
chauffé.Les animaux fistulisés utilisés
uniquement
pour les mesures au niveau du rumenet du sang, ont des
ingesta
inférieurs à ceux non fistulisés en biland’azote,.
Ce faitest
particulièrement
net pourl’ensilage
AIV dont lepH trop
acide(pH = 3 , 3 ),
entraî-nait de
l’inappétence.
Les
teneurs en matièreorganique digestible
et en matières azotées totales de cetensilage
sontlégèrement plus
élevées que celles des deux autresfourrages. (tabl. 3 ).
Ammoniagenèse
dans le rumen et évolution de l’urée du sangpériphérique.
Les mesures effectuées sur animaux fistulisés
(fig. 2 ),
necorrespondent qu’à une seule donnée
parpériode. Elles
n’ont doncqu’une
valeur indicative.Les
comparaisons
entrerégimes (fig.
2, tabl.6)
montrentqu’à jeun (temps o),
les concentrations de N non
protéique
et deN-NH,
au niveau du rumen et de N-uréedu sang sont
plus
élevées pour le foin.Les
teneurs maximum deN-NH,
observées2 heures
après
le repas sont semblables pour le foin etl’ensilage préfané ;
celles deN non
protéique
sont i heureaprès
le repasplus
élevées pour le second. Mais l’accrois- sement des concentrationsammoniacales rapporté
autemps
o est nettementplus
fort pour
l’ensilage préfané (8 2
p.ioo),
intermédiaire pourl’ensilage
AIV( 75
p.100 )
et faible pour le foin
( 24
p.100 ).
Les
quantités
deN-NH, présentes
dans la panse i heureaprès
le repas(calculées d’après
le volume du contenu de cetorgane),
sont similaires pourl’ensilage préfané
et le foin et
plus
faibles pourl’ensilage
AIV(tabl. 7 ).
L’urémie est
plus
élevée avec lerégime
foinqu’avec
lesensilages.
La différenceest
particulièrement
nette pour les animaux en bilan azoté(tabl. 6).
Chez cesmêmes
sujets, l’ensilage AIV, malgré
uningéré
azotésupérieur,
donne des concen-trations en urée
sanguine
voisines de celles del’ensilage préfané.
Digestibilité et
yétent-ion azotée.Les rations étant établies sur un
apport équivalent
de matièresèche,
lesingesta
de N et de MOD sont sensiblement inférieurs pour les
ensilages préfanés
et le foin(tabl. q.),
que pourl’ensilage
AIVplus
riche en matièreorganique digestible
et enmatières azotées
(tabl. 3 ).
Les coefficients de
digestibilité
azotéeapparent
et réel de ce dernier sont nettementsupérieurs (P
<o,i)
à ceux du foin et surtout del’ensilage préfané qui
a chauffé(tabl. 4).
Les bilans azotés sont
positifs
pour les troisrégimes.
Lescoefficients de
rétentionont tendance à être
supérieurs
pourl’ensilage AIV,
mais les différences ne sont passignificatives.
3
0 Com!araison
entreensilages
humides non traités etpréfanés
donnésseuls ou en
régime
mixteExpérience
CL’ensilage préfané
à 40 p. 100 de matière sèche est de bonnequalité. L’ensilage
humide non traité est moins bien
conservé,
mais saqualité
estsupérieure
à celle es-comptée
et à celle del’ensilage
traité au métabisulfite desodium,
del’expérience
A(tabl. 3).
Ammoniogenèse
dans le rumen et urémiePériphérique.
En
régime fourrage seul, l’ensilage préfané
entraîne dans la panse uneplus
forte élévation des concentrations en N non
protéique
etN-NH,
quel’ensilage
humi-de et ce,
quel
que soit le moded’expression
des résultats(fig.
3 etq.).
Les concen-trations d’urée
sanguine
sont de mêmeplus
élevées avec lepremier (fig. 3 ).
Les valeurs de
N-NH,
et de N nonprotéique
dans le rumenatteignent
leurmaximum environ i à 2 heures
après
le début du repas et celles d’uréesanguine
2 à3
heures
après
celles deN-NHg.
Le volume du contenu du rumen i heure
après
le repas étantsignificativement plus
faible avec lesrégimes d’ensilage préfané,
lesquantités
totales deN-NH 3
et de Nnon
protéique présentes
alors(calculées d’après
levolume)
sontidentiques
pour les 2ensilages (tabl. 7 ).
En
régime mixte,
la dilution azotée del’ensilage
par l’alimenténergétique,
diminuel’ampleur
del’ammoniogenèse
et abaisse les concentrations de N nonprotéique
dansle rumen. Ce
phénomène
est net, mêmelorsque
l’accroissement des concentrations ammoniacales estrapporté
à l’azoteingéré (fig. 4 ). Parallèlement,
lesquantités
totales de
N-NH,
et N nonprotéique
observées i heureaprès
le repas et l’urée san-guine périphérique
sontplus
basses.Digestibilité et
rétention azotée.Un animal malade
(de
racelimousine)
a dû être éliminé des deuxpériodes
four-rage seul. Les consommations de matière
organique digestible rapportées
à pO.75 sontassez similaires pour tous les animaux et les deux
régimes.
Lesquantités
des matièresazotées
ingérées, correspondent
à 2,4 fois les besoinsthéoriques
enrégime fourrages
seuls et i,2 fois en
régime
mixte.En
régime fourrage seul,
ladigestibilité
azotée del’ensilage préfané
aurait ten-dance à être
plus
faible mais n’est passignificativement
différente de celle del’ensilage
humide
(tabl. 4).
En
régime mixte, l’adjonction
de l’alimenténergétique,
- dont le propre coeffi- cient dedigestibilité apparente (CUD a )
de l’azote mesuré sur 2 animaux est deq.7,8
p. 100, - abaisse le coefficientapparent
dedigestibilité
durégime
d’une dizaine depoints.
Ce résultatprévisible
est d’autantplus
net que laproportion
de cet alimentdans la ration est
plus
élevée(tabl. 8).
LeCUD a
de l’azote del’ensilage
humide dis-tribué est de
7 6,i,
il tombe enrégime
mixte à 70,3pour les animaux de 60kg
dont laration contient
4 8, 5
p. 100 de MS d’alimenténergétique
et à6q., 9
pour ceux de 40kg qui
enreçoivent 6i,6
p. 100.Les
légères
différences dedigestibilités apparentes
observées entreensilages
enrégime fourrages
seuls semblentpersister
enrégime
mixte. Les coefficients dediges-
tibilité réelle sont par contre semblables pour tous les
régimes.
En
régime fourrage seul,
les bilans azotés relevés pourl’ensilage préfané,
sont tou-jours supérieurs à +
igN/jour (+
3,5 ; + i,r; +i, 9 ).Avecl’ensilagehumideilssont
très
hétérogènes (―
3,5 ; -f-3 ,6 ; + 0 , 7 ).
Lescoefficients de rétention, quel
que soit leur mode de formulation sonttoujours beaucoup plus
faibles pourl’ensilage humide ;
mais en raison de fortes variations
individuelles,
les différences ne sont passignifica-
tives.
En
régime mixte, quel
que soitl’ensilage,
tous les bilans azotés sontpositifs (tabl. 8) :
ilsdépassent toujours
+ 2 gN/jour
pour les animaux de 40kg,
recevant laplus
forteproportion
d’alimentcomplémentaire.
Lescoefficients de
rétention azotée deviennentidentiques
pour les deuxensilages
et sontplus
élevésqu’en régime
four-rage
seul ;
lephénomène
estplus
accentué chez les animaux de q.okg
que chez ceux de6
0
kg (différence
de i5points
entre les deux groupesd’animaux) (tabl. 8).
DISCUSSION ET CONCLUSION
Le nombre de données que nous avons obtenues à l’intérieur de
chaque expérience
est
parfois
insuffisant pour avoir des résultatssignificatifs.
Enparticulier
les animauxporteurs
defistules, plus fragiles
que les animauxintacts,
sontplus
difficiles à main- tenir en cage à métabolismependant
delongues périodes,
cequi
nous a conduitparfois
à en
supprimer
en coursd’expérience.
Toutefois,
enreprenant
d’unepart
l’ensemble des résultats de nos troisexpé- riences,
avec lesrégimes fourrages seuls,
d’autrepart
ceux obtenus au laboratoire enrégimes
mixtes par nous-mêmes sur la coupe de luzerne de l’année6 4
et par SHirrrr surles coupes des années
ig6i
et19 6 2 ,
il estpossible
dedégager
certaines différencescaractéristiques
dans l’utilisation azotée desfourrages
suivant latechnique
de conser-vation et le mode de distribution du
fourrage
conservé.A ―
Régimes fourrages
seuls1
0 Relation entre intensité
d’ammoniogenèse
au niveau du rumen et concentration d’uréesanguine.
Quelques-uns
des résultatsprécédents
concernant les mesures au niveau du rumen sont délicats àinterpréter ;
en effet pourpouvoir
comparer l’influence desrégimes
surl’ammoniogenèse,
de nombreuses conditionsexpérimentales
devraient être strictementidentiques : parmi
celles-ci citons lesquantités
d’azote et d’eauingérées,
la durée du repasd’épreuve ;
cela est difficilement réalisable avec desfourrages
conservés dont lateneur en matière sèche et
l’appétibilité
varient en fonction du traitement.D’une
façon générale, l’hypothèse,
selonlaquelle
desensilages qui
renferment une forteproportion
de matière azotée soluble( >
à 70p. 100Ntotal)
donnent lieu à uneimportante ammoniogenèse,
se trouve confirmée. Cephénomène
est observé mêmeavec
l’ensilage préfané qui
est d’excellentequalité :
lesquantités d’ammoniaque
conte-nues dans le rumen i heure
après
le repas sontidentiques
avec cetensilage
etl’ensilage
humide
(tabl. 7 ).
Le foin contenant moins de 5o p. 100 d’azote total sous
forme soluble,
il estnormal que les accroissements des concentrations
ammoniacales
parrapport
au taux initial dans le rumen soientnettement
moinsimportantes qu’avec
lesensilages.
Enrevanche,
les concentrations initiales(avant
lerepas)
sont souventplus
élevées avecle foin
qu’avec l’ensilage préfané.
Cephénomène
ne serait pas dû à une différence de volume de contenu de rumend’après
les résultats del’expérience
B(tabl. 7 ) ;
maispeut-être
à unedégradation plus
lente de l’aliment ou à un retour d’uréeplus impor-
tant dans le rumen.
Avec
lesensilages
del’expérience C,
les tauxles plus
élevés d’uréesanguine, correspondent
auxplus
fortesconcentrations de NH,
dans le rumen cequi
a aussiété observé par LEWIS
( 1957 )
etT A G ARI , A S C AR E LLI
et BONDI( 19 6 4 )
pour des ali- ments différents. Mais contrairement à ces auteurs et à CHAr,MERS et MAR- SHALL( 19 6 4 )
nous ne trouvons pas de relation entre les concentrations ammoniacales dans le rumen celles d’uréesanguine
et l’excrétionazotée
urinaire absolue: avecl’ensilage préfané,
des concentrations maximales de 55mg deN-NH,
p. 100ml dans lerumen et de 28 mg de
N-uréique
p. 100ml dans le sang,correspondent
à une excré-tion azotée urinaire de 21
g/jour;
avecl’ensilage
humide des teneurs maximum de4
2 mg
N-NH,
p. 100 ml dans le rumen et 25 mgN-uréique
p. 100mldans
le sang,correspondent
à une excrétion azotée urinaire de 25g/ jour,
pour desingérés azotés
voisins.
2
0
Digestibilité
azotée.Les coefficients de
digestibilité
desensilages humides quel
quesoit
leurtraite-
ment, sont
significativement supérieurs (P < o,oi)
à ceux du foin et del’ensilage pré-
fané
(CUD a
moyen despremiers = 75 , 0 ±
0,3 contre73,i !
0,5 pour les seconds(tabl. 4 ).
Ladigestibilité plus
élevée de l’azote desensilages
mal conservéss’explique aisément
par leurplus
forte teneur en formes azotéessimples,
résorbées en totalité auniveau du
tube digestif.
Dans ce cas les coefficients dedigestibilité
sont sansrapport
avec la
valeur
azotéepuisque
les coefficientscorrespondants
de rétention azotée sont lesplus faibles. Ces
résultats sont bien en accord avec ceux de SHINN( 19 6 3 )
etde
FE RRANDO ( 19 66).
Ladigestibilité
élevée del’ensilage
AIV(expérience B),
dont lesprotéines
se sont très peudégradées
au cours del’ensilage, pourrait
être due à unautre
phénomène :
influence dupH acide (?),
absenced’échauffement
lors dela
conservation. Par contre, la faibledigestibilité
azotée del’ensilage préfané
de cettemême
expérience
est vraisemblementimputable
à une fermentation chaude.3
0 Efficacité
azotée.L’ensilage
le moins bien conservé(ensilage
aumêtabisulfite
del’expérience A)
est le seul à entraîner des bilans azotés
négatifs ;
étant moins bienconsommé
du faitde son
inappétence
sonapport énergétique
nereprésente
que 80 p. 100 des besoinsthéoriques.
Cequi pourrait expliquer l’importance
de l’excrétion azotée urinaire(8
2
p. 100du Ningéré),
la matière azotée étant dans ce cas utilisée à des finsénergé- tiques. Cependant
pour lesrégimes
foin etensilage préfané
del’expérience
B dont lesniveaux
énergétiques
sontsimilaires
et de l’ordre de 80 p. 100 des normes,(tabl.
4,ingesta
deMOD) les
bilans azotés sontsystématiquement positifs.
Aussi on est conduit àpenser que les bilans azotés
négatifs
del’ensilage
au métabisulfite n’ont pas tant pourorigine
la carenceénergétique
que laqualité
del’ensilage.
Des bilans azotésnégatifs après
consommation de mauvaisensilages
sont aussi relevés par FERRANDO( 19 66)
sur moutons, et par CONRADet
al., ( 19 6 1 )
sur vaches laitières.Les écarts individuels sont
généralement plus
réduitsquand
les valeurs sontexprimées
en rétention réelle(correction
pour N fécalmétabolique).
Ces valeurs sont très voisines pour lesensilages préfanés
des 3expériences : l’erreur-type
de l’en-semble des données ne
représente
que 5 p. 100 de la moyenne(tabl. g).
Les coeffi-cients sont similaires à ceux du vert
congelé
du foin et del’ensilage
AIV. Par contre,les coefficients de rétention des
ensilages
humides non acidifiés sontsignificativement plus
faibles(P
<o,oi) (tabl. 9 ).
Récemment Wn!,no etal., ( 19 6 5 )
trouvent demême avec un
ensilage
humide de luzerne dequalité
médiocre consommé ad libitum par desbouvillons,
des coefficients de rétention azotée inférieurs à ceux du foin corres-pondant.
I,aplus
faible efficacité azotée desensilages
humides mal conservéspeut
être a
priori
reliée àl’état plus dégradé
de leurs matières azotées(tabl.
3, exp.A).
Cependant
lesproportions
de Nsoluble
et de Nnon protéique
sont assez voisines dansles
ensilages préfanés
et et lesensilages
humides non acidifiés. Mais FATIANOFFetal., (
19
66) enregistrent
pour lesfourrages
del’expérience
A despertes
delysine beaucoup plus
élevées dansl’ensilage
au métabisulfite que dans lesensilages préfanés
et AIVcorrespondants :
les tauxrespectifs
de Nlysine
p. 100N total sont de2 ,8,
5,2et6,6
alors que la luzerne verte( 2 e
coupe19 6 3 ) qui
a servi à la fabrication de cesensilages
en contenait 7,4 p. 100à la mise en silo.
La richesse en
lysine
desensilages préfanés
n’estprobablement
ni laplus
satis-faisante ni la seule
explication
de leur efficacité azotée élevée. Cetacide aminé peut
être
catabolisé rapidement
dans le rumen par les bactéries LEWISetE MERY , ( 19 6 2 )
etaprès
un repasd’ensilage préfané
larapidité
et l’intensité desl’ammoniogenèse
dans
le rumen sont, comme nous l’avonsdéjà signalé,
aussi fortesqu’avec
un ensi-lage
humide. Cela conduit à penser que lasupériorité
desensilages préfanés pourrait
tenir en
partie
du moins à sa teneur en certainsmétabolites, qui
favoriseraient laprotéo-synthèse
microbiennedans
le rumen àpartir
duNH 3
formé in situ.En retardant et en
réduisant l’ampleur
des fermentations dansl’ensilage,
le
préfanage, préserve certains constituants,
notamment desglucides
GOUET etal., (zg6
5
).
Ainsidans l’expérience C,
la matière sèche del’ensilage préfané
renferme2 , 3
p. 100de
glucides solubles résiduels,
contre o, 2 p. 100seulementdans l’ensilage humide ;
ces teneurs sontidentiques
à celles citées par WALDO etal., ( 19 65)
pour lesmêmes
types d’ensilage ( 2 ,5
p. 100MS contre o,2 p.I oo).
Ces oses sont trèsrapide-
ment
métabolisées
par les bactéries du rumen : 80%
desglucides
solubles du trèfledisparaissent
du rumen à la fin du repas et la totalité en 3 heures BAILEY( 19 65).
D’autres facteurs
qu’il
y aurait lieu de rechercher dans cetype d’ensilage pourraient
aussi activer la
protéosynthèse
bactérienne :hemicelluloses,
substancespectiques,
acides gras ramifiés à courte
chaîne,
ou mêmeoligopeptides qui
contrairement auxacides aminés libres
peuvent
être d’excellentes sources d’azote pour I3actéroïdes ruminicola PITTMAN etB RYAN T, (1 9 6 4 ).
Selon HOSHINO etSA RUMARU ( I9 66),
unautre processus dont on ne
connaît
pasl’importance quantitative pourrait
inter-venir dans
l’utilisation
duNH, :
la formation deglutamine
àpartir d’acide gluta- mique
dans laparoi
du rumen. Nous avons pu constater que l’acideglutamique
libre n’était pas catabolisé dans un
ensilage préfané
alorsqu’il
l’étaitrapidement
avec formation d’acide
y-aminobutyrique
dans unensilage
humide non traitéGOUET et
al., ( 1965 ).
Ce processus de fixation del’ammoniaque pourrait
ainsiplus
facilement avoir lieu dans lesensilages préfanés.
B ―
Régimes
mixtes1
0 Intensité de
l’ammoniogenèse
au niveau du rumen.Il semblerait que, la distribution simultanée de l’aliment
énergétique
et del’ensilage
ait pour effet de diminuerl’ampleur
del’ammoniogenèse,
sans que lephéno-
mène soit dû
uniquement
à une différence dans le!ingesta
azotés(fig. 4 ).
Il estdifficile de
savoir
si celatémoigne d’une
moindre désamination ou d’uneprotéo-
synthèse
bactérienne accrue au niveau du rumen. Des faits similaires sontenregistrés,
en
particulier
par ANNisoN et al( 1954 ) après
addition d’amidon.2
0
Digestibilité
azotée.Les
régimes fourrages
seuls et lesrégimes
mixtes ont des coefficients réels dedigestibilité
de l’azote similaires. Par contre, il y a une différence nette dans les coefficients dedigestibilité apparents :
une chute de 10points
environ enrégime
mixte par
rapport
auxrégimes fourrages
seuls. Ce fait n’est sans doute pas dû àl’abaissement de
la teneur en matière azotée totalequi
passe de 18 p. 100 enrégime fourrage seul,
à 12 p. 100 enrégime mixte,
maisplutôt
à la moindredigestibilité
azotée de l’aliment