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Retour sur SB XVI 12869: une lettre byzantine relative à une fondation religieuse

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Retour sur SB XVI 12869: une lettre byzantine relative à une fondation religieuse

SCHUBERT, Paul

Abstract Révision d'une lettre byzantine sur papyrus.

SCHUBERT, Paul. Retour sur SB XVI 12869: une lettre byzantine relative à une fondation religieuse. Chronique d'Egypte, 2002, vol. 77, p. 259-272

DOI : 10.1484/j.cde.2.309199

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:80723

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1 / 1

(2)

PAUL SCHUBERT

Retour sur SB XVI 12869:

une lettre byzantine relative à une fondation religieuse

Introduction

Dans la collection de la Bibliothèque Publique et Universitaire de Genève se trouve une belle lettre byzantine relative à une fondation religieuse ('). Les parties en présence sont chargées de faire exécuter une livraison de blé pour le compte d'un monastère à Apollonopolis

(vr-vne

s. après J.-C.). Ce papyrus comporte quelques problèmes isolés en ce qui concerne le déchiffrement. Mais c'est surtout la syntaxe du texte qui a causé des difficultés aux éditeurs, lesquels doivent à plusieurs reprises constater des ruptures de construction. Selon eux, le contenu de cette let- tre aurait été plus ou moins volontairement plongé dans l'obscurité, la rai- son en étant que les ecclésiastiques répugneraient à parler de questions d'argent de manière trop explicite. L'essentiel du message résiderait dans la remarque finale de la lettre, où l'expéditeur demande qu'on laisse par- tir deux bateaux.

Sur le plan de la méthode, on peut toutefois affirmer d'emblée qu'il semble incongru qu'une personne ait pris la peine de rédiger un si long document en laissant planer une obscurité volontaire sur 1 'essentiel du texte. Nous devrions au contraire baser notre interprétation sur la sup- position de principe que le texte recèle un contenu cohérent, même si cette cohérence peut, dans certains cas, nous échapper. Les lettres rap- portent généralement des éléments dont le contexte est connu de 1 'ex- péditeur et du destinataire, mais non du lecteur moderne. Dans les lignes qui suivent, nous tenterons donc de retrouver au moins une partie du sens général de la lettre, et de montrer que les divers points dont elle traite peuvent être liés entre eux de manière sinon assurée, du moins plausible. Ajoutons cependant que, sans le travail déjà réalisé par les premiers éditeurs du papyrus, il n'aurait pas été possible de parvenir au

(1) Cf. B. BOUVIER el Cl. WEHRLI, «Lettre d'un ecclésiastique (P.Gen. inv. 301)», CE 69 (1984), pp. 149-157 [=SB XVI 12869].

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ÉGYPTE GRÉCO-ROMAINE

résultat qui suit; en outre, la révision présentée ici, quoique publiée sous le nom d'un seul auteur, doit beaucoup à l'aide ponctuelle de plusieurs collègues (2).

Texte

Le texte présenté ici se fonde sur 1 'editio princeps, mais incorpore les cor- rections proposées depuis sa publication

e).

Il comprend en outre plusieurs modifications qui seront commentées plus bas.

t

ô Kotvos oecrn6TilS ô ôcrtû.Yrœros tnicrKonos &~~a MaKapws i::yp[U\j/êV]

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aô-ros ypét.\j/at" Kai &<; ~ni -rftç <ÎÀTJ9f:ia<; Tj9éÀTJcra napaKaÀécrat 1:ft[v aù-roù tvooÇ,6tTJ-ra]

(2) Une première version de cet article a bénéficié des commentaires avisés de Roger Bagnall (Columbia University). ll n'est pas possible d'énumérer dans le détail tous les points qu'il a contribué à élucider; qu'il trouve néanmoins ici l'expression de ma profonde gratitude. Le texte du papyrus a aussi été examiné dans le cadre d'un séminaire de 3" cycle financé par la Conférence Universitaire de Suisse Occidentale. Dans l'impossibilité de citer nommément la contJ·ibution de chacun des nombreux participants, je me dois néanmoins

d'adresser un remerciement particulier à mes collègues Jean-Luc Fournet (Strasbourg),

Adalberto Giovannini (Genève) et Martin Steinrück (Neuchâtel 1 Fribourg), qui ont tous trois éclairci des points importants de l'interprétation. Finalement, Georges Nachtergael, en qualité de rédacteur de la présente revue, a apporté plusieurs corrections de détail, toutes bienvenues. J'assume évidemment l'entière responsabilité des erreurs qui pourraient sub- sister.

(3) Cf. BL IX 94.

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RETOUR SUR SB XVI 12869

10 7têpi 'tOU'tOU, (JJJ .. : ~1têtÙTj OtOêlV on aÂÀa !-tOVacr-rijpt[a] À[

... ) Kat 011ÀOV-

6n nâna ihaÇ,sv tv Tft 8môo9eicrn ~-tot nap' ù~-tûw yvrocrst, ïva napaKaÂscrro aù-rôv

Kat 6noypÛ\jfat, 1:001:0U XÛptV OÙK è0SÀ110"a 1tOtfjcrat Ùta<popâ.v, àf,.,f,.,' tva ~-tévro{v}

napaKaÂrov aù1:ôv tva ypÛ\jf1l ~-t6vov sl(ç) 1:Tjv yv&crtv. otùa yàp O'Ct Kat 6~-têÏÇ OÙ 1t0têÏ'tê

ùta<popav. ëypa\jfév ~-tot ùè Kai aùtéi} 1:Q} èvùoÇ,(o)1:(6.tcp) Kotvéi}

ùecrn61:11 &ç à~-t<pépaÂev

15 i) 6~-te-rtpa nepi~Àe(n-roç) àosÀ<p01:1lÇ ne pi t&v cri('wu) (àp1:a~&v) Acr &ç où naptxe(-re) sl~-tfJ À[â.~J11-rs ~mcr'taÀ~-ta(1:a)

aù-rrov· Kat KaÀWÇ 6~-teiç èÇll'tTJO"a'tê TtlV àcr<pÛÂêtav 6~-t<ÙV.

ùts"-txe[llv of. ...

J

r .. ] . [ . ] . [ .. ] ..

K[ai] S1têlÔTJ èycû où ù6va~-tat llTJ etneiv àÂij0stav nav"Ci àv0proncp, ocra

dnév !lOt ëypa\jfa -réi) aù1:Q} OO"lffi"C[â.hcp smcrK01tQ). Kai yàp - &ç VO~-tiÇro - OlÙ 'tTJV

a1crx6v11v oùx 116psv àvnypa\jfat aù-réi) oÀroç. 1:aü-ra ypâ.<pro àcrnaÇ 6 [!lê voç]

20 'tTJV Ù!lé'tSpav ÙÙêÀ<plKTJV 7têpt~À8(1t't0't1l'ta). "COthO ' of; , Kat dnév ~-tOt, &ç èàv [~-tfJ ëÀ0ro]

!lê'tÙ 'tOÜ ÔO"tffi'tÛ'tOU !-tOU m~v0epoÜ 7tpÔÇ à~péi llaÜÂOV 1:[ ÔV âyt<Û'tatov ?]

ÙPX11~-tavùph11V Kai ÙtaÀÛ~1l 'tÔ 7tpà.y~-ta Kai KptV11 'tÔ 'ttÇ Ô<pétÀêl À[a]peiv 1:ô

{1:ô} xpucriov, oùùèv naptxs[1:]e .. [a]ù1:&v. ~-tTJ f;6pcûv oùv nsicrat aù1:ôv àvnypâ\jfat aù1:Q},

ÈycO 1:à 'tfjÇ ÙÂ110êiaç Ëypa\j/a. 1tÂTJV Kai UÀÀO 'ti 1tO'tê Ëypa\jféV

~-tOt nspi 1:o[Ü] Çs[v]s&voç

25 toü èv

NaBow,

&ç 08Àet tiç nots Katvo'to~-tflcrat tôv aù1:ôv Çeverova nap' Ô (dn)ev (?) È1tt "COÜ

tfjç ôcriaç ~-tVTJilllÇ àP~à. l:evo60ou, ïva napaKaÀécrro 1:Tjv aùtoü SVOOl Ç61: ]111:a Kat

ypÛ\jf1l Ù~-ttV 1têpi tOU"COU. Kai VO~-ttÇffi 1têpt.crcr6v Ècrnv "COÜ 1:TJV aù1:oü èvôo[Ç6t]11-ra

ypâ'l'at ù~tiv nepi 1:06-rou· où yàp OéÀst 1:1)v ol.avoi]no1:ê Katvo- -ro~-tiav yevécr0at.

261

(5)

ÉGYPTE GRÉCO-ROMAINE

dç otov8ipwn: npa:yJla, JléLÀLcr'ta, clç tKKÀ11crtacrnKéL. o(he Kai ÙJl~LÇ ÔcpetÀE"C€

30 cruyx.ropflmu· napaKaÀoo UJ.liiÇ cù8Éroç dnoÀÜcrat Kai "CO nÀoî:ov BtK"Copoç "COÙ

utoù Koç Jlë"Cà "COÙ lipaKoç Kai -ro aÀÀo nÀoî:ov Jlê"Cà "Coù a.ù"Coù lipaK[oç.]

Verso:

(2c m.)

1 [t 8ecrn6("CTI) t11éP "Cà n](l(v"Ca) neptWÀ'(f:n'tcp) néL(cr11ç) n~rfi(ç) ((Kai)) npocrKo(v11m::roç) dÇtOnéL"Ccp (?)

àbeÀcpcp

IlÀ'oo'cr'éL'Jl!lCù(vt) KOJl 'e'(n) (Kai) . .. cr'x.'()

t

2

t

KoÀÀoù8oç crùv 'O(ecp)' xap"C(OUÀ<ipwç)

t

Tt·aduction

( l-3) Notre maître à tous le très saint évêque abbé Makarios à écrit à mon insignifiance, pour que je vous écrive à propos du blé et de l'orge octroyés à l'abbé Senouthès de sainte mémoire au nom de la défunte dame (_

..

).

(4-14) Car- comme il l'a écrit - votre éminente fraternité lui a dit que si je (Kollouthos, expéditeur de la présente lettre) n'écris pas à votre intention (Plousammon, destinataire de la présente lettre) une lettre rela- tive à cette affaire munie d'une souscription, (rien ne se fera); je me suis pourtant étonné de votre conduite, vous qui savez que, non seulement pour cette affaire, mais aussi pour quelque affaire que ce soit touchant à Apollonopolis, je n'accepte pas d'écrire moi-même, à moins que je ne prie au préalable notre maître à tous, le gloriosissime illustre, d'écrire en personne; et j'ai effectivement voulu adresser une demande à sa gloire concernant cette affaire, mais, puisque je savais que d'autres monastères ( ... ) ct puisqu'il a manifestement tout arrangé dans la liste qui m'a été soumise par vous, (la procédure prévoyant que) je le prie d'apposer aussi sa signature, pour cette raison je n'ai pas voulu accorder de traitement particulier, mais U'ai voulu) continuer de lui demander d'écrire seule- ment sur la liste. Car je sais que vous non plus vous n'accordez pas de traitement particulier.

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RETOUR SUR SB XVI 12869

(14-16) (Makarios) m'a écrit, ainsi qu'à notre gloriosissime maître à tous en personne, que votre éminente frMernité a hésité en ce. qui concerne les 1200 artabes de blé, disant que vous (Plousammon) ne fournissez pas à moins de recevoir un mandat de la part de (l'svùoÇ6ta:toç et Koll- outhos). Et vous (Plousammon) avez bien fait de chercher l'assurance qui vous couvre.

(16-20) Je me suis entretenu avec (notre gloriosissime maître), et, puisque, pour ma part, je ne peux pas m'empêcher de dire la vérité à cha- cun, tout ce qu'il m'a dit, je l'ai écrit au même très saint évêque (Makar- ios). Car, à mon avis, c'est par pudeur que (notre gloriosissime maître) n'est pas parvenu à répondre par écrit à lui (Makarios) de manière com- plète. J'écris cela en manifestant mon affection envers votre fraternelle éminence.

(20-24) (Notre gloriosissime maître) rn 'a en outre dit ceci: à moins que je (Kollouthos) n'aille avec mon très saint parent par mariage (Makarios) chez l'abbé Paulos le très saint archimandrite, que (Makarios) ne saisisse l'affaire et qu'il ne décide qui doit recevoir l'or, vous (Plousammon) n'en donnez rien (?). Donc, ne parvenant pas à convaincre (notre gloriosissimc maître) de répondre par écrit (à Makarios), c'est moi qui ai écrit la vérité.

(24-31) Ceci encore: (1 'évêque) rn' a écrit une autre fois au sujet de l'hospice à Naboo, disant que quelqu'un veut procéder à des innovations sur le même hospice, contrairement à ce que cette personne a dit (?) du temps de l'abbé Senouthès de sainte mémoire; (il me l'a écrit) pour que j'adresse une demande à sa gloire et qu'elle vous écrive à ce sujet. Or je pense qu'il est superflu que sa gloire vous écrive à ce sujet: car (sa gloire) ne veut pas d'une quelconque innovation dans quelque domaine que ce soit, particulièrement en ce qui concerne des affaires de l'Église. Et vous non plus, vous ne devez pas y consentir; mais je vous demande de laisser partir sans retard non seulement le bateau de Victor fils de Kos, avec la gesse, mais aussi l'autre bateau, avec la même gesse( ... ).

(Verso) À mon maître éminent en tout, très digne de tout honneur et adoration, mon frère le comte Plousammon ( ... ),de la part de Kollouthos, chartulaire avec l'aide de Dieu.

Commentaia·e

2-3. tep 't~[ç ocri.aç ~VTt~flÇ] 1 d~~(i LBVouen. L'editio princeps resti- tuait tep 1:t[~too1:a1:cp] 1 d~~éi Levouen. L'épithète honorifique 'ttJltûna-

263

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ÉGYPTE GRÉCO-ROMAINE

'tOÇ est certes u61isée de manière assez large (notamment pour des hommes d'Église dans les textes patristiques); cf. L. DINNEEN, Titles of Address in Christian Greek Epistolography to 527 A.D. (Washington D.C., 1929, réimpr. Chicago, 1980), pp. 73-75 et 109. Toutefois, elle n'est jamais associée à un abbé dans les papyrus. Pour qualifier un abbé, on utilise le plus fréquemment 6:yub1:a.1:oç ou ùcrtCÛ'tU'tOÇ, plus rarement 9coqnÀécr1:U1:0Ç, ou encore 9cocrc~écr1:U1:0Ç, 9c01:LJ.11l'tOÇ ou CÙÂ.a.~écr- 1:U1:0Ç. Le 1: suivant 1:cp est d'une lecture certaine; or aucune des épithètes énumérées ici ne commence par cette lettre. Il est donc quasiment certain qu'il faut restituer l'expression 'tllÇ OcrLUÇ J.1VllJ.111Ç, que l'on retrouve à la ligne 26 appliquée au même Senouthès. Cette correction a l'avantage de supprimer une hésitation de Bouvier et Wehrli (150), qui évoquaient la possibilité qu'il y ait dans ce document deux personnages nommés Senouthès, 1 'un vivant et l'autre mort. Il apparaît maintenant clairement que, dans les deux passages où Scnouthès est nommé, il est fait allusion à l'époque postérieure à sa mort.

4-5. Kollouthos rappelle le contenu d'une conversation entre Plousam- mon et l'abbé Makarios, dans laquelle Plousammon a cité la position de Kollouthos. Comme les données sont connues de toutes les parties en cause, Kollouthos juge superflu de rappeler explicitement 1 'échange dans sa totalité. Le sens approximatif de la phrase complète devrait donc vraisemblablement être le suivant: «si je n'écris pas à votre intention une lettre relative à cette affaire munie d'une souscription, (rien ne se fera)». 6.

ôn.

Pour les éditeurs, «le subordonnant

ôn

n'est pas suivi de son àn68ocrtç, mais il est naturel de sous-entendre après 'An6ÀÂ.covoç une expression comme o\hco notêtv cicû9a.j.1€V ou simplement oüno

nowi3-

Jl€V». Il semble toutefois préférable de faire de o(S'tc àvéxo[Jl]at è')'cb ')' pâ.'lfUt 1' àn68ocrtç manquante. Quant à

oiS't

c, il s'agit vraisemblable- ment d'une confusion avec où8é, que l'on trouve attestée déjà dans les papyrus ptolémaïques, cf. E. MAYSER, Grammatik der gr. Papyri aus der Ptoleméierzeit II.3 (Berlin

1

Leipzig, 1934), p. 173, 17-20.

7-8. Bouvier et Wehrli (149) ont signalé la perte de quelques lettres à la fin de chacune des deux lignes, déchiffrées par leurs devanciers mais aujourd'hui disparues. Pour la ligne 7, il s'agit des lettres a.tc')'CO')'PU'IfUt.

Pour la ligne

8:

pt ; les deux lettres lisibles s'accordent avec la restitution de tMÀo6cr ]'~Pt<? Y à la fin de la ligne.

264

(8)

RETOUR SUR SB XVl12869

8. tvùo~(6)'t(U'tüv) t~(J .. o6ahpt<?Y· Le titre èvùo~6'ta'toç (= lat. glo- riosissimus) est porté exclusivement par des laïcs de haut rang, cf. L. DIN- NEEN, Tilles of Address in Christian Greek Epi~tolography to 527 AD (Washington D.C., 1929), pp. 43 et 108; M.B. O'BRIEN, Titles of Address in Christian Latin Epistolography to 543 A.D. (Washington D.C., 1930) pp. 150 et 166. Dans le cas présent, on pourrait songer par exemple à un pagarque, cf. G. RouiLLARD, L'administration civile de L'Égypte byzantine (Paris, 19282) pp. 52-62, en particulier p. 54; P.Koeln VII 319, 5 (Héra- cléopolis, 627 [?] après J.-C.): napà <DÀ.(au\.cp) <DütPa~t~tcovt 1:4) tvùo-

~o'ta't<:p tÀ.À.oua1:pi~ Kai nayapx(~) 'taO-rtl(ç) CHpaKÀ.(éouç) n(6À.ecoç).

Relevons aussi le cas du pagarque Flavius Serenus, qui porte le double titre de èvùo~6'tŒ'tOÇ et de tÀ.À.OUCJtptoç (Aphroditè, VIc s. après J.-C.); cf.

P.Cair. Masp. ID 67325 rn verso 13; vu verso 25; P.Flor. III 298, 13-15.

Dans le présent document, il pourrait aussi s'agir d'un à.vnyaouxoç, une sorte d'intendant général agissant en lieu et place du propriétaire; 1 'à.vn- yeouxoç occupe la place la plus élevée dans la hiérarchie de 1 'administra- tion des grands domaines byzantins. Cf. P.Oxy. XVI 1860, 6: 1:4) KOtv{i) ùccrn6'tn 1:éi} èvùo~(o'ta't~) ÏÀ.À.(oucr'tpicp) Kat à.vnycouxcp. Sur la fonc- tion d'à.v'ttyeouxoç, cf. A.H.M. JoNEs, The Later Roman Empire 284-602 (Oxford, 1964), Il, p. 790; P.Oxy. LVI 3871, 6 n. et LVIII 3957, 8 n.

12. ùta.<popav. Pour le sens de «traitement particulier» ou «traitement de faveur» appliqué au mot ùta.<popa, cf. SB IV 7354, 9-11 (provenance inconnue,

u e

s. après J.-C.): ofùaç, on nêiv p(LI[ùto]v ?tç 1loùç à.]ÙêÀ.<pouç crou ùtg,<popà[v] 1 [ËJxetç ~a.i ôncpoxi)v; P.Lond. V 1727, 43 (Syène, 583/584 après J.-C.): ~~ Ùta<popàv 'tSKV~ na.pà 'tSKVOV not i) aa.cr8a.t.

~tvcov. Les premiers éditeurs ont identifié - non sans hésitation (p.

150)-un personnage du nom de Ménon, auquel ils atttibuaient un rôle dans la suite du texte. Ils ont donc lu à.À.À., ïva Mtvcov 1 na.pa.Ka.À.tcrn (conection de na.pa.Ka.À.&v) a.Ù'tov ïva. yp6.\lfn ~6vov el(ç) 'tTJV yv&crtv, et traduit par «mais que Ménon le prie de signer simplement sur la liste».

Aux lignes 16-17, 1 'identité de 1 'interlocuteur de Kollouthos est perdue, et les éditeurs y ont placé à nouveau Ménon: «Je me suis entretenu [à ce sujet avec ledit Ménon]». li faut souligner le fait qu'il s'agit là d'une con- jecture, puisque le nom de l'interlocuteur est perdu dans la lacune. Enfin, d'après les éditeurs, Ménon referait implicitement apparition aux lignes 23-24: ~Tt eôpcûv oôv neî:aat a.ù-rov àvnypa'l'a.t a.ù'téi), 1 èycü 1:à 'tftç

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ÉGYPTE GRÉCO-ROMAINE

!ÎÀ:r18eiaç ~ypmva («Or, [Ménon] n'ayant pas trouvé moyen de le per- suader de lui répondre, c'est moi qui ai écrit les choses comme elles sont»). Ce dernier passage pose un problème de syntaxe, puisque la con- struction participiale (!lll eùpcüv) devrait être au génitif absolu, le sujet de la principale étant différent. Il paraît par conséquent plus simple cl 'at- tribuer 1 'action du participe eupcüv à Kollouthos, qui est aussi le sujet du verbe ëypmva. Le nom même de Ménon est problématique par sa rareté: dans tous les papyrus documentaires entre 400 et 800 après J.-C. (cf.

DDBDP), il s'agirait de la seule attestation de ce nom. Il est plus économique de considérer ce Ménon comme un fantôme, et de reprendre la construction des !.ignes 12-13. Le papyrus présente le texte suivant:

!lf:VOJV 1 rca.paKaÀOJV. Sous cette forme, la syntaxe est fautjvc, et il faut se résoudre à corriger le texte. La construction !lÉVCO + participe présent est attestée dans le sens de «continuer à», cf. P.Oxy. VI 903, 36 (rve s. après J.-C.): É!l8tvev Àéycov O'tt (trad. Grenfell-Hunt: «he kept saying» ); cf.

aussi P.Amh. II 152, 5 (vc_y,e s. après J.-C.). Par conséquent, la correction la plus simple consiste à supprimer le v final de !lf:VOJV, et de lire 'tva

!lÉVOJ lnapaKaÀow ( « ... pour que je continue à demander»). En conclu- sion, le personnage de Ménon disparaît, au profit d'un usage attesté du verbe ~-tévco; ce personnage n'a aucune raison de sc trouver dans les autres passages où les éditeurs avaient cru déceler sa présence.

15.

ne pi 1éiw cri( 'tou) (àp'ta~&v) Acr. Dans l' editio princeps, on lit nepi 1&v cri('tOU) (àp'ta~&v) aLç, traduit par «au sujet des 1 l/2 1/6 artabes de blé». Le mérite de la correction revient aux efforts conjugués de Roger Bagnall et Jean-Luc Fournet. La séquence des fractions 1/2 et 1/6 était suspecte. Ce que les éditeurs ont ptis pour L = 1/2 correspond en fait à la partie inférieure du~ de èv8oÇ(o)'t(a'tcp) à la ligne précédente. Le chiffre représentant 1000 consiste en un a, à 1 'extrémité duquel est liée une barre oblique descendante; pour un parallèle à une telle pratique de numération, cf. p. ex. P.Thomas 26 recto et verso (pl. 21). Il est donc question de 1200 artabes de blé, ce qui correspond à une quantité consi- dérable. À titre de comparaison, on peut citer le cas de P.Cair. Masp. I 67057 (Antaiopolis, env. 539 après J.-C.), un registre de comptes où appa- raît l'impôt annuel dû pour Antaiopolis, d'une montant de 61.674 artabcs.

Cf. R.S. BAGNALL, «Agricultural Productivity and Taxation in Later Roman Egypt», TAPhA 115 (1985), pp. 289-308, en particulier p. 303.

Vers la fin du VIe siècle, l'impôt en nature exigé d'Oxyrhynque et Kynop- olis s'élève à 350.000 artabes de blé. Cf. P.Oxy. XVI 1921, 3; J. GAscou,

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RETOUR SUR SB XVI 12869

«Les grands domaines, la cité et l'État en Égypte byzantine», T&MByz 9 (1985), pp. 1-90, en particulier p. 46. Les 1200 artabes de blé apparem- ment retenues par Plousammon cotTesponclent sans doute à une allocation destinée à l'entretien du monastère. Plus loin (23), il est question d'or, dont l'archimandrite Paulos doit déterminer à qui il revient, ce qui suggère une conversion de la valeur du blé en une valeur monétaire, ph6nomène courant par ailleurs à cette époque.

16. ùtû.tx0[11Y os . . . ] 1 [ • • ] . [

J . [ .. ] ...

L'identité de l'interlocuteur est perdue, mais on peut tenter de reconnaître ici une men- tion du laïc apparaissant déjà aux 1 ignes 8 et 14 sous 1 'appellation -rov Kotvov oecrn6-r11v 1:ov èvoo~(6)1:(a:wv) tMÂ.oucr]-çptQy, respectivement 'té!) èvoo~(o)-r(â.-rcp) KOtvé!) oacm6-rn. On trouve une fOlmule plus brève à deux reprises, aux lignes 26 et 27: -r11v a.ù1:oÜ èvoo[~6't]11'tO.. Les traces qui subsistent ne permettent pas de trancher; en outre, on ne peut pas exclure qu'il s'agisse encore d'une autre personne.

21-22. npoç d~~(i Ila.ÜÀov -r[ov â.ytûna.'t:OV ?] 1 dPX11J.lO.VOpÎ:t11V (1.

dpxt-). Pour la restitution de ét.ytûna.-rov , cf. P.Amst. 1 48, 3-5 (nome hetmopolite, VIc s. après J.-C.): [-ré!) ét.]ytcp['tâ.-rcp] na.L-rpi d]~~Q.

[L)epflly[cp] Q:pXtJ.l[a]vopi'tTI 1:0~ ét.yiou· J.lOVŒO"'t1lPLOU Q:~~(i 1 'A~9~~<$-roç. P.'S.tras. VII 679, 11 (origine inconnue, fin du vrc s. après J.-C.): 1:é!) 1:à nâ.(v)1:a. ét.ytunâ.-r(q>) mnpi [d]~~g, <Hpa.KÂ.aion dpxt- wxvopi(-rn). BGU 1 103, verso(= W.Chr. 134; Pinarachthis [?; nome oxyrhynchite], VI-vnc s. après J.-C.): 'té!) &.yw:n(â.)-r(cp) na1:p(i) (i~~Q­

Lepivoç (1. Lspflvq>) dpxt~ta.vop(hn)

t

'A~pcûxJ.l 'Aproro( ). Un archi-

mandrite était le supérieur d'un monastère, cf. F.L. CRoss

1

E.A. LI- VINGSTONE (Edd.), The Oxford Dictionary of the Christian Church (Oxford, 19973), s.v.

24. ~s[v]e&voç. Les éditeurs ont cru identifier un anthroponyme, Ze[v]écovoç (idem, ligne 25: Zav8cova.). Pour la correction, cf. BL X 294.

25. KO.tVO'tOJ.lTJO"O.t. Le verbe KatVO'tOJ.l8CO s'applique à 1 'origine à l'ou- verture de nouveaux filons dans les mines. Il a toutefois rapidement pris le sens métaphorique d' «innover». À 1 'époque où notre document est rédigé, le substantif KatVO'tOJ.lia. conserve le sens d' «innovation». Cf.

p. ex. P.Lond. V 1676, 62 (nome hermopolite, 561/562 après J.-C.);

P.Oxy. L 3584 (Tampemu, nome oxyrhynchite, ve s. après J.-C.).

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ÉGYPTE GRÉCO-ROMAINE

nap' ô (dn)ëv. Cette restitution est peu convaincante, mats Je ne parviens pas à proposer une meilleure solution. Une graphie EV pour ~v serait sans parallèle. Le sens général de la phrase est néanmoins com- préhensible: quelqu'un cherche à introduire une innovation par rapport à la situation qui a prévalu du vivant de Senouthès.

30-31. BtKtopoç tOU 1 utou Koç j.lctà. tOU apaKOÇ. Les éditeurs lisaient Kocrj.lcta tou "Apa~oç, corrigé en Koç (1. Kéûç) j.lctà. tou

"Apa~oç par P.J. SIJPESTEIJN, «Short Remarks on Sorne Papyri IV», Aegyptus 68 (1988), pp. 87-88. La lecture apaKoç est due à J.-L. Fournet.

L'apa~ ou apaKoç («gesse») est une légumineuse, une sorte de poix chiche utilisé dans l'alimentation humaine et animale; cf. M. ScHNEBEL, Die Landwirtschaft im hellenistischen Agypten = Münchn. Beitr. 7 (Munich, 1925) pp. 185-189 et P.Vind. Sijp. 8, 11 n.

Verso, 1-2. Le déchiffrement a été sensiblement remanié depuis l' editio princeps, dans laquelle les éditeurs proposaient la lecture suivante: (t)éi) ncpt~'t.:(tm:q:>) Kat npocrKu(viJcrsroç) d~tot6:tq:>

d'osÀcp'éi) IJ).,'ou'criq:> K6j..t's'(n) (Kai) cr'x'C )t 1 t KoÀÀou8oç crùv '8( séi) )'

x

apt( ouÀapwç)t. Toutes les difficultés sont toutefois loin d'être résolues. Au début de la ligne 32, la lacune laisse la place pour la formulation usuelle occrn6(t1l) èj..téi). Pour un parallèle proche de cette adresse, cf. P.Oxy. XVI 1860 verso 16-17 (Oxyrhynque, VT-vne s.

après J.-C.): [t 8J~?qn6(t11) èJ..téP tà. néL(vta) m~pt~Àé(ntq:>) néL(cr11ç) tq.t.ft(ç) (Kai) npo(crKuviJcrsroç) d~iq:> yv11(criq:>) q>iÀq:> (Kai) docÀ<pcP reropyiq:> KOj..tê(n) xaptouÀapi(o)u (1. -piq:>) Kat ototK(11)t(fl) t M11vaç crùv O(céi)) 1 t 8KotK(oç) KuyÇ>[7t]9LÀ(hou). On relèvera par ailleurs que 1 'expéditeur de cette dernière lettre désigne le destinataire par les mots t[Tjv] 1 UJ.tctépav nepi~Àentov docÀ<p6t11ta (P.Oxy.

XVI 1860, l-2), comme c'est le cas dans le présent document (4): f]

UJ.lcté pa ne pi~Àe(ntoç) docÀ<p6t11Ç. La lecture IIÀ 'ou' cr 'a' j..tj..tro(vt) (suggérée par Jean-Luc Fournet) me paraît plus satisfaisante que IIÀ 'ou' criq:>: le a surélevé est clairement reconnaissable. Le nom I1Ào6crtoç est certes abondamment attesté, mais on trouve aussi plusieurs occurrences de IIÀoucréLj.lj.lWV, par exemple dans le dossier relatif à Flavius Taurinus fils de Plousammon (BGU XII 2137 sqq., passim; Hermopolis, à partir de 426 après J.-C.); on retrouve un Tau-

rinus fils de Plousammon dans P.Sorb. II 69, 114B, (Hermopolis, vne s. après J.-C.).

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RETOUR SUR SIJ XVI 12869

Essai d'interprétation

En dépit du caractère allusif de cette lettre, il est possible de proposer une explication générale cohérente qui tienne compte des divers éléments présents dans le texte. La suppression de deux fantômes, Zénéon et Ménon, m'amène à poursuivre dans la même direction, en tendant au principe de l'économie maximale, quand bien même certains passages du texte nous autoriseraient à introduire d'autres personnages non identifiés.

J'ai donc réduit la scène au plus petit nombre possible d'acteurs: une généreuse et pieuse donatrice décédée, le défunt abbé Senouthès, le char- tulaire Kollouthos, son collègue Plousammon, l'évêque Makarios, un haut fonctionnaire au titre d' èvooÇ6-ca.-coç, et J'archimandrite Paul os.

Pour honorer la mémoire d'une femme pieuse, une fondation a été établie, destinée à assurer l'entretien d'un monastère placé sous l'autorité de l'abbé Senouthès (1-3). Senouthès est mort (2 ct 26), et le monastère, probablement fondé par lui, continue d'être désigné par une référence à sa défunte personne. L'abbé Paulos a repris la direction du monastère en qualité d'archimandrite (21-22). La gestion du legs servant à l'entretien du monastère est placée sous le contrôle de l'évêque Makarios. La contribu- tion se fait par une livraison de blé et d'orge, vraisemblablement chaque année. Le produit de la vente des céréales, converti en or (23), doit être transféré au monastère par un fonctionnaire, le comte Plousammon.

La procédure à suivre est réglée par une liste (11 et 13: yv&crtç), dressée par Plousammon et son service. Plousammon appartient à l'au- torité civile (verso, 1); il contrôle probablement la circulation des denrées conservées dans un grenier public. L'archiviste (verso, 2: xa.p-couÀaptOç) Kollouthos est chargé de coordonner la livraison. La donation prévoit une certaine quantité de céréales (blé ct orge); dans le cas précis, l'affaire portera sur une cargaison de 1200 artabes de blé, comme on le verra plus loin (15).

Plousammon et Kollouthos dépendent tous deux d'un même représen- tant de l'autorité civile, dont l'identité et la fonction nous sont inconnues.

Kollouthos le désigne par l'appellation

o

Kotvè>ç 8ecm6-c11ç

o

tvooÇ6-ca.-

-coç (8 et 14). Il existe cependant un rapport hiérarchique entre Kollouthos et Plousammon, le premier ayant la compétence d'envoyer des instruc- tions au second.

Dans la suite, le texte pose des difficultés d'interprétation du fait que, à plusieurs reprises, l'expéditeur décrit les actions de ses interlocuteurs par des verbes dont le sujet n'est pas exprimé (dn:ev, «il a dit»; Ëypa.\jfêV,

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ÉGYPTE GRÉCO-ROMAINE

«il a écrit»). Un élément nous aidera cependant à mieux saisir le rôle de chacun: il s'agit du morle cie communication auquel Kollouthos recourt dans ses rapports avec son supérieur hiérarchique 1 'èv8oÇ6'ta:wç, avec Plousammon, ainsi qu'avec l'évêque Makarios. On constate en effet que Kollouthos communique par écrit avec l'évêque et avec Plousammon, tan- dis que ses rapports avec 1 'èv8oÇ6'ta.'tOÇ se font sur le mode oral. Cette constatation pennet, dans plusieurs cas, de préciser le sujet d'un verbe.

Tl semble que ce sont le décès de 1' abbé Senouthès et la passation de pou- voir à un nouvel archimandrite qui ont provoqué les difiicultés dont nous prenons maintenant connaissance. Plousammon n'a pas procédé à la livrai- son de céréales prévue, et l'évêque Makarios, qui est certainement le supérieur ecclésiatique du monastère, intervient auprès de Plousammon. Ce dernier réplique à l'évêque (4) que rien ne peut sc faire sans instructions écrites de Kollouthos; par conséquent, l'évêque écrit à Kollouthos, en le priant d'écrire lui-même à Plousammon (l-2). Mais Kollouthos voit une difficulté dans cette manière de faire: on ne peut pas lui demander de don- ner sans autre des ordres à Plousammon, car la procédure prévoit cJaire- ment que Kollouthos doit au préalable obtenir l'assentiment écrit du supérieur hiérarchique, 1 'èv8oÇ6'ta.-roç (6-9). Kollouthos se refuse à faire une exception pour ce monastère (l2), et persiste donc à demander à 1'èv- 8oÇ6'ta.'tOÇ de signer la li.ste permettant de faire exécuter les ordres (12-13).

En somme, ni Kollouthos ni Plousammon ne veulent prendre la respon- sabilité de la livraison: Kollouthos exige d'être couvert par l'èvooÇ6-ca.- 'tOÇ avant de transmettre les ordres à Plousammon, et Plousammon veut être protégé par les instructions écrites émanant de Kollouthos. En outre, il est manifeste que l' èv8oÇ6-ra.-roç rechigne à donner 1 'ordre attendu, en dépit des efforts insistants de Kollouthos.

Makarios s'impatiente et écrit une seconde lettre, cette fois-ci simul- tanément à Kollouthos et à l'èv8oÇ6-ca.-roç, vraisemblablement pour éviter que l'un des deux (en particulier l'èv8oÇ6-ccnoç) ne puisse feindre d'igno- rer l'affaire (14-15). Dans sa lettre, Makarios expose le point de vue de Plousammon, ce dernier exigeant des instructions écrites de Kolloulhos et de l'èv8oÇ6-ra-coç (14-16). Plousammon cherche manifestement à se pro- téger (16).

La seconde lettre de Makarios a pour effet que Kollouthos parle de 1 'af- faire avec l'èv8oÇ6-ra.'tOÇ (16-17). Mais cc dernier manifeste une certaine réticence à répondre par écrit à 1 'évêque; Kollouthos interprète ce com- portement comme un geste de pudeur (19-20). Il y a toutefois un élément plus concret qui permet d'expliquer la résistance de l'~v8oÇ6'ta.'toç. La

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RETOUR SUR SB XVI 12869

suite du document suggère en effet que les modalités d'attribution des sommes provenant de la donation doivent être revues suite au décès de 1 'abbé Senouthès (22-23). Le nouvel archimandrite étant entré en fonc- tion, il convient que Kollouthos et l'évêque Makarios aillent le trouver (20-21), et que Makarios décide comment les sommes doivent être répar- ties. Le partage concerne de l'or (23), qui peut difficilement être autre chose que le produit de la vente des 1200 artabes de blé mentionnées précédemment (15). Ce n'est apparemment qu'une fois cette condition préalable remplie que l'~vùoÇo·m:toç consentira à donner son accord pour la livraison.

Si 1 'interprétation de la ligne 21 donnée dans la traduction est correcte, Kollouthos et l'évêque Makarios sont des parents par alliance. Kollouthos se trouvant confronté au refus de son maître, il prend alors 1 'initiative d'écrire à Makarios pour lui exposer l'affaire dans le détail (23-24).

À une autre occasion, Makarios est intervenu par écrit auprès de Kol- louthos, à propos d'une affaire touchant à une innovation dans un hospice (24). Il a demandé à Kollouthos d'écrire à l'8v8oÇ6'ta:toç, pour que ce dernier à son tour écrive à Plousammon (26-27). Connaissant la réticence de son maître à écrire, Kollouthos estime que, cette fois-ci, il est superflu d'attendre une intervention de l'èv8oÇ6ta'tOÇ (27-28). Le conservatisme de 1 '8v8oÇ6'ta'tOÇ est notoire, en particulier pour tout ce qui touche aux affaires de l'Église (28-29). Kollouthos a donc pris sur lui de résister aux velléités d'innovation de Plousammon, sans même en référer à leur supérieur hiérarchique. Il est possible que ce soit par mesure de rétorsion que Plousammon a bloqué une cargaison de gesse que Kollouthos attendait (30-31). Ce dernier déclare donc pour terminer que Plousammon n'a pas à consentir à l'innovation, mais doit s'aligner sur la position con- servatrice de l'~v8o~6'ta'toç. Il ne lui reste donc qu'à laisser partir la car- gaison de gesse.

En définitive, cette lettre répond à une double motivation: dans l'im- médiat, il s'agit pour Kollouthos de faire débloquer une livraison de gesse; de manière plus large, l'expéditeur tente de régler une série de points qu'il considère comme des malentendus entre Plousammon et lui- même. Ces malentendus ont été accentués par diverses circonstances, cer- taines explicitement évoquées par Kollouthos, d'autres implicites mais néanmoins perceptibles pour le lecteur extérieur. En premier lieu, il faut retenir le décès vraisemblablement récent de Senouthès, et les difficultés liées à la poursuite des activités du monastère. Mentionnons aussi l'ap- parente mauvaise volonté de l'~v8oÇ6'ta'tOÇ, qui ne veut pas donner les

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ÉGYPTE GRÉCO-ROMAINE

ordres avant que les modalités relatives à l'attribution des sommes émanant de la donation soient révisées. De plus, on observe des jeux hiérarchiques subtils: du côté de 1 'autorité civile, un fonctionnaire attend les instructions de l'~vooÇ6·ta:toç, pour les transmettre à un autre fonc- tionnaire, et il s'instaure un jeu triangulaire entre les trois hommes; du côté de l 'autorité ecclésiastique, 1 'évêque Makarios se trouve lui aussi pris dans un rapport triangulaire, dans lequel il communique avec deux représentants de l'autorité civile, l' ~vooÇ6-ca-cet Kollouthos. Le texte nous autorise en outre à considérer un lien de parenté entre Makarios et Kollouthos; ce lien poutTait expliquer le zèle de Kollouthos à défendre les intérêts du monastère, et indirectement ceux de Makarios. Cette lettre con- tribue donc à éclairer de manière indirecte les rapports parfois ambigus qui ont prévalu d'une part entre l'autorité civile et l'autorité ecclésias- tique, d'autre part à différents échelons de la hiérarchie dans chacun des deux domaines.

Universités de Neuchâtel et Genève Paul ScHUBERT

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