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ANXIETE A L'EGARD DES MATHEMATIQUES

Recherche réalisée dans le cadre du programme local de subvention à la recherche et à l'expérimentation pédagogique

Louise Lafortune

Chercheure et professeure de mathématiques Cégep André-Laurendeau

Août 1989

- 1 -

Copie de conservation disponible en format électronique sur le serveur WEB du Centre de documentation collégiale (CDC):

URL = http://www.cdc.qc.ca/parea/708541_lafortune_anxiete_mathematiques_laurendeau_PAREA_1989.pdf Rapport d'une recherche financée par le ministère de l'Éducation du Québec, Cégep André-Laurendeau, 1989.

Format numérisé : 18 pages en PDF.

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r ANXIETE A L'EGARD DES MATHEMATIQUES

I

L'intérêt pour approfondir notre connaissance des réactions d'anxiété à l'égard m, des mathématiques remonte à quelques années. Déjà, il y a environ quatre ans. nous

nous sommes renseignée auprès de diverses institutions aux États-Unis, reconnue pour

™ faire du travail en ce sens et surtout, nous voulions savoir s'il était possible en

tant qu'intervenante de suivre une formation sur le sujet. Plusieurs personnes nous avaient alors fait parvenir les documents qu'ils utilisaient pour intervenir sur l'anxiété m à l'égard des mathématiques: cependant, aucune formation n'était disponible pour les enseignants et enseignantes. Nous avons donc poursuivi notre formation en autodidacte

f" par des lectures et expérimentations plus ou moins structurées.

La poursuite des recherches que nous menons actuellement a ressuscité chez

nous l'idée d'aller aux États-Unis afin d'approfondir davantage cette problématique

r*1 et de nous familiariser avec les moyens et approches utilisés dans ce pays. Nous connaissions les ouvrages de Mme Sheila Tobias (Over-comlng math anxiety. 1978; Succeed

! with math: every student's guide to conquering math anxiety, 1987) et avons décidé de communiquer avec elle. Cette dernière nous a suggéré trois personnes (Elizabeth Fennema de l'université du Wisconsin; Suzanne Culler au collège de Santa Barbara et

<™ Jean Smith du collège communautaire Middlesex) à rencontrer et Mme Jean Smith a répondu favorablement et chaleureusement à notre demande.

1 En dehors de son travail de mathématicienne et de professeure de mathématiques.

™ nous avons rencontré une personne stimulante avec une personnalité exceptionnelle.

Elle détient une maîtrise en mathématiques de l'université de Harvard, à 70 ans,

;' elle commence un doctorat à l'université du Maine et enseigne encore les mathématiques a temps complet au collège communautaire Middlesex au Connecticut. Elle présente

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également des ateliers sur l'anxiété à l'égard des mathématiques à travers le monde

(Angleterre, Afrique de l'Ouest, Australie et États-Unis). En tant que spécialiste de

l'enseignement des mathématiques, elle a fait partie d'une équipe dirigée par Mme

Sheila Tobias qui a mis sur pied la première clinique aux États-Unis traitant l'anxiété

à l'égard des mathématiques (en 1975). Dans la poursuite de toutes ces activités, elle songe à la retraite sans s'y résigner.

Afin de rendre compte des éléments retirés de cette rencontre, nous allons d'abord présenter la conception de l'anxiété à l'égard des mathématiques de Jean Smith, son modèle d'enseignement par rapport à cette problématique, le travail dans la clinique mathématique, les différents ateliers qu'elle présente et organise ainsi que l'organisation de son travail dans le collège où elle enseigne actuellement. Ensuite, nous décrirons brièvement les échanges et discussions que nous avons eus avec elle.

Enfin, nous conclurons ce rapport en présentant ce que cette rencontre nous a rapporté plus précisément et les perspectives de la poursuite des échanges que nous aurons avec cette femme.

Mathématiques et anxiété

En ce qui concerne l'anxiété à l'égard des mathématiques, Jean Smith adopte la définition retenue par Robinson et Simons (1972) lors d'une étude sur le sujet et qui se lit comme suit "sentiments de tension et d'anxiété qui interagissent lors de la manipulation de nombres et dans la résolution de problèmes au cours d'une grande variété de situations des vies quotidienne et académique" (cité par Smith, 1979, p.3) (traduction de l'auteure).

Lors d'ateliers ou de conférences, elle explique ce phénomène en citant des exemples de personnes ressentant ce malaise: elle semble passer par des histoires

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de cas. Devant des groupes auprès desquels elle intervient, elle ne définit pas l'anxiété vis-à-vis des mathématiques - son expérience lui a démontré que ceux et celles qui ressentent cette anxiété la reconnaissent - elle dit tout simplement: "si vous ne savez pas ce que c'est, vous n'êtes pas anxieux à l'égard des mathématiques". Selon elle, cette anxiété influence négativement les élèves de deux façons: le niveau de performance requis n'est pas atteint et la quantité de mathématiques assimilée au-dessus du minimum requis pour réussir n'est pas adéquate.

Jean Smith s'interroge également sur les raisons qui font en sorte que ce malaise existe et persiste. Plusieurs raisons sont en cause. En particulier, on insiste trop sur la Çonne réponse et n'accorde pas assez d'importance au processus de résolution utilisé par chaque élève. Aussi, même si un certain niveau de vitesse est nécessaire pour réaliser certains exercices, très tôt dans leur cheminement scolaire les élèves intègrent l'exigence de la rapidité dans la quête de la bonne réponse. Et si on ajoute à cette situation le fait que les connaissances mathématiques sont cumulatives, les élèves qui n'ont pas l'impression d'avoir acquis une notion et se voient obliger de passer à une autre ne peuvent que se sentir frustrés, dévalorisés et ainsi, remettre en question leur capacité de réussir dans cette discipline.

À ces raisons s'ajoutent celles présentées par Sheila Tobias (1978). Trois d'entre

elles revêtent une certaine importance pour Jean Smith. La première concerne l'expérience de ce qu'elle appelle la "mort subite" ("sudden death" expérience). Les élèves qu'elle a rencontrés décrivent cette expérience en des termes semblables quel que soit le niveau mathématique atteint. Soudainement, un concept devient trop difficile à comprendre; il peut tout simplement être le prochain niveau à atteindre dans un

processus d'apprentissage. À ce moment-là, les élèves anxieux ont l'impression qu'un

rideau, un mur ou un fossé vient bloquer leur compréhension et les empêcher de réfléchir;

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ces élèves deviennent alors convaincus qu'ils ne pourront pas comprendre cette notion.

Et, pour camoufler ces sentiments d'échec, ils ne poseront plus de questions, ils vont se sentir coupables et gênés sans jamais considérer la possibilité que cela n'est peut- être pas entièrement de leur faute. Les mythes véhiculés autour des mathématiques contribuent également à perpétuer ces sentiments d'Impuissance à l'égard des mathématiques. Lors d'un mauvais examen d'histoire, aucun professeur de cette discipline n'ose prétendre que cet élève n'a pas un "esprit historique"; cependant, en mathématiques, les croyances diffèrent et on attribue trop souvent le succès dans cette discipline à une certaine prédisposition génétique.

La seconde raison se rapporte aux ambiguïtés du langage mathématique. Les élèves particulièrement verbaux sont plus désemparés devant ce langage qui amène souvent des confusions. Pour eux, la seule façon de "survivre" dans ce langage est d'utiliser la mémorisation; pour eux, la logique n'a plus sa place.

La troisième raison se situe dans l'incapacité de soutenir les frustrations - non pas les frustrations de façon générale - ces élèves savent souvent comment supporter les frustrations qu'ils rencontrent dans d'autres domaines - mais seulement celles qu'ils rencontrent en mathématiques. Ces élèves ne peuvent penser quitter un problème de mathématiques non résolu en se laissant le temps d'y réfléchir et de prendre un recul vis-à-vis le problème posé. Si la solution ne leur vient pas au premier essai, ils ressentent un haut niveau de frustration et cela les porte à réagir émotivement et à rejeter les mathématiques.

*

Jean Smith a pris conscience de ces difficultés partagées par plusieurs élèves.

Elle a travaillé à aider les élèves anxieux à l'égard des mathématiques et elle a élaboré un modèle d'enseignement en ce sens. Nous le décrirons dans ce qui suit.

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Modèle d'enseignement

Le modèle d'enseignement pour diminuer les effets négatifs des réactions d'anxiété à l'égard des mathématiques tel que décrit par Jean Smith semble plutôt un ensemble de principes à respecter afin de contrer les difficultés rencontrées par les élèves et qui soient reliées à cette anxiété. Ce modèle comporte six points précis qui sont les suivants:

1. d'abord, elle passe autant de temps qu'elle le juge nécessaire à discuter des attitudes adoptées à l'égard des mathématiques et de leurs effets sur l'apprentissage de cette discipline. Si cela lui semble approprié, elle suggère aux élèves de rédiger un Journal à partir des bonnes et mauvaises expériences vécues en mathématiques et elle les amène à s'interroger sur les messages qu'ils ont Intégrés à partir de ces expériences. Elle part du principe qu'aucun adulte qui a eu une histoire mathématique douloureuse ne peut apprendre les mathématiques avant que ces sentiments négatifs n'aient été évacués. Ce principe est basé sur la question suivante: enseigneriez-vous à nager à quelqu'un lorsque ses muscles sont. tendus? On pourrait aller plus loin en se demandant si on peut enseigner la natation à quelqu'un avant qu'il ait évacué sa peur de se noyer?

2. Elle fait travailler les élèves par petits groupes pour leur montrer que l'apprentissage des mathématiques peut être une expérience sociale.

Elle donne même le premier examen en groupe - cela semble un succès - et elle a remarqué que les personnes anxieuses se sentent plus à l'aise pour aborder seules le deuxième examen.

3. Elle suggère au personnel enseignant de partir du principe qu'il n'y

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a pas de fausses réponses; la réponse fournie par l'élève est toujours rendue en fonction de ce qu'il a compris dans la question posée. Selon cette perspective, le professeur ou la professeure doit reformuler la question afin qu'elle soit comprise ou bien interroger l'élève afin de retrouver le sens de la question auquelle il répond. En adoptant ce principe, aucune question n'est considérée comme stupide et, pour la fin de la deuxième semaine, son objectif est d'obtenir une question de la part de chaque élève.

4. Les applications mathématiques sont centrées sur la résolution de problèmes. Et, pour montrer aux élèves l'importance de lire la question, elle leur demande de répondre au test de lecture en mathématiques (math reading test) développé par un collègue au collège Ithaca. Ce test n'est pas spécifiquement mathématique et chaque question comporte une subtilité qui ne peut être perçue si la lecture est trop rapide. Les élèves répondent à ce test en petits groupes - elle veut par ce moyen qu'aucun adulte ne soit ridiculisé devant l'ensemble de la classe - et, en général, ils y découvrent un plaisir et surtout, comprennent l'importance de bien lire la question. Il arrive que certaines équipes n'aient pas perçues la subtilité de la question et qu'elles aient été induites en erreur.

À ce moment-là, c'est toute l'équipe qui prend la responsabilité d'avoir

mal lu la question et peut rire de s'être laissée avoir au lieu de se sentir ridiculisée. En groupe, elle accepte toutes les réponses et n'accorde pas de préférence à une d'entre elles; elle amène plutôt le groupe à chercher la façon dont chaque réponse a été obtenue pour ensuite en choisir une si cela s'avère nécessaire. Elle insiste sur l'importance de lire la question et de ne pas se laisser influencer sur la "supposée"

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rapidité à laquelle on dont répondre.

5. Selon elle, un élève qui a un passé douloureux en mathématiques n'a pas la motivation pour travailler seul, à son rythme. Elle tente donc d'abord de faire relaxer ces élèves par rapport aux mathématiques pour ensuite leur permettre d'en parler et enfin, pour travailler avec eux en mathématiques. Le travail seul, à son rythme, ne peut être efficace que pour les niveaux plus avancés en mathématiques.

6. Elle encourage l'utilisation de la calculatrice car l'apprentissage doit plutôt être dirigé sur le processus et non la réponse. Elle n'accorde pas d'importance à la mémorisation et, dans ce sens, elle n'évalue pas les habiletés à mémoriser mais plutôt les habiletés à utiliser des concepts. Pour atteindre cet objectif, elle permet l'utilisation d'une fiche complétée par l'élève lors de l'examen. Cela évite la mémorisation de formules tout en diminuant le stress vécu lors de l'examen.

L'élaboration de ce modèle d'enseignement est issue de plusieurs années de réflexion et d'expériences dans l'enseignement des mathématiques. En particulier, Jean Smith a pu concrétiser ses intuitions par rapport aux interventions à prioriser auprès des élèves anxieux en participant au travail d'équipe dirigé par Sheila Tobias dans le cadre d'une clinique mathématique où l'anxiété à l'égard des mathématiques était le principal objet d'étude.

Clinique mathématique

Cette clinique mathématique prit forme à l'université Wesleyan (une institution privée) en 1975. Cette équipe décida de parler d'"anxiété à l'égard des mathématiques"

car cette expression permettait aux gens de se reconnaître, de les encourager à sortir de leur isolement et de parler de leur malaise. Cette clinique mise sur pied grâce

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à une subvention du Fond pour l'Amélioration de l'Education post-secondaire à Washington était composée de six (6) spécialistes.

Sheila Tobias, sociologue et doyenne associée et coordonnatrice des études des femmes (Women's Studies), avait elle-même vécu des difficultés avec les mathématiques et était touchée par la façon dont les étudiantes et les femmes adultes évitaient les mathématiques. Elle soupçonnait que ces femmes choisissaient les lettres et les métiers non scientifiques, non par inclination, mais plutôt parce qu'elles avaient peur des mathématiques et de tout ce qui s'y rattachait. Robert Tosenbaum, professeur de mathématiques, avait construit un nouveau cours sur le calcul infinitésimal pour les étudiants et étudiantes "non-matheux" de dernière année. Il remarqua que cette population étudiante qui avait besoin des mathématiques pour leur carrière et qui avait fait de l'algèbre et même de la trigonométrie, montrait peu d'habiletés à utiliser les notions acquises et peu de capacité à les appliquer pour résoudre des problèmes.

Ces constatations l'amenèrent à s'intéresser à la clinique mathématique. Bonnie Donady agissait comme conseillère avec son expérience dans le traitement des incapacités en lecture. Steve Shmurak, psychologue et maître en enseignement des mathématiques, apportait principalement son expertise psychologique. Sue Auslander, étudiante douée en mathématiques, aidait les élèves dans leurs difficultés mathématiques et Jean Smith, professeure de mathématiques, apportait son expérience considérable de travail auprès d'élèves. Jeunes et adultes, qui n'arrivaient pas à faire des mathématiques.

Le but de cette clinique, entièrement Indépendante du département de mathématiques, était d'augmenter l'assurance personnelle et de réduire l'anxiété de façon à ce que l'enseignement puisse ensuite se faire au rythme habituel. Cette équipe croyait que si cette anxiété n'était pas d'abord traitée, aucune connaissance mathématique, même bien enseignée, ne pouvait être assimilée de façon satisfaisante.

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Les élèves utilisant les services de cette clinique avaient satisfait aux conditions d'admission de Wesleyan, mais ressentaient des lacunes dans leur ' compréhension des mathématiques: soit que leurs bases mathématiques leur semblaient r» inadéquates ou qu'ils ressentaient de l'anxiété à l'égard de cette discipline. La clinique les aidait à identifier l'origine de leur anxiété en écoutant leurs premières expériences

^ mathématiques. De cette façon, l'équipe a pris conscience des stratégies de survie

développées par rapport à l'école et surtout, des tensions rencontrées dans les cours

; de mathématiques.

f"* À Wesleyan et à Middletown, la nouvelle de l'existence de cette clinique se

propagea rapidement et les élèves y venaient pour passer le test de niveau (partant

■ des calculs de base à la trigonométrie). Les élèves étaient ensuite placés dans une

— section où ils travaillaient à leur rythme et revoyaient les bases avec un enseignant

i

1 ou une enseignante, soit seuls ou en petits groupes. De plus, de courtes rencontres

f* de groupe étaient parfois organisées lorsque l'intérêt y était et portaient sur des

thèmes précis tels les logarithmes, les statistiques, la résolution de problèmes, etc.

j Ces élèves venaient de tous les coins de l'université.

/**» Après une session de cette expérience, l'équipe prit conscience qu'une bonne partie des élèves qui suivaient un cours d'analyse avaient besoin de travailler l'algèbre.

i Ils décidèrent d'organiser un bon cours de révision d'algèbre en insistant sur la résolution de problèmes. Deux sections étaient offertes: l'une était liée à la psychologie de l'apprentissage des mathématiques et l'autre était plus traditionnelle mais non

r> terrorisante en offrant une attention individuelle. Étant donné que ce cours n'avait

pas été annoncé à l'avance et était offert pour la première fois à Wesleyan, l'équipe pensait à un groupe de 25; à leur étonnement, on dut le fermer à 60.

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Dans l'évolution du travail de la clinique, les enseignants et enseignantes de mathématiques se rendirent compte que les élèves anxieux en mathématiques ne pouvaient pas travailler seuls à leur rythme. L'aspect collectif prit alors plus d'importance.

Quatre (4) catégories d'élèves ont alors pu être Identifiées.

1. Élèves très anxieux avec des bases mathématiques très faibles (6 à 8 élèves).

2. Élèves très anxieux avec des bases mathématiques acceptables.

3. Élèves peu anxieux avec des bases mathématiques très faibles.

4. Élèves peu anxieux avec des bases mathématiques acceptables (15 à 18 élèves).

La répartition du nombre d'élèves par groupe allait en augmentant du groupe 1 au groupe 4 tel qu'identifié plus haut et variait entre 6 et 18 élèves. Jean Smith s'occupait des groupes les plus anxieux et les plus faibles en mathématiques et se chargeait également de choisir le personnel enseignant pour les autres groupes. La philosophie d'enseignement des professeurs et professeures devait aller dans le sens de celle de la clinique.

Afin de diriger les élèves dans le bon groupe, ils passaient des entrevues psychologique et mathématique. Ces deux entrevues étaient de durée variable et permettaient au psychologue et à la professeure de mathématiques d'échanger sur leur point de vue. Jean Smith a constaté qu'il n'y avait pas eu de désaccord dans leurs points de vue respectifs concernant la classification des élèves.

L'expérience de cette clinique mathématique dura six ans. Les fonds accordés cessèrent de l'être; cependant, Jean Smith ne cessa pas de travailler à aider les élèves anxieux à l'égard des mathématiques et de chercher des moyens pour baisser cette anxiété. Dans ce sens, elle organisa et organise encore des ateliers traitant de cette problématique. Elle s'adresse principalement aux adultes et s'occupe même de groupe de personnes âgées de 55 ans et plus afin de leur faire découvrir ou

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redécouvrir le plaisir de faire des mathématiques.

Différentes expérimentations

L'expérience acquise dans la clinique mathématique a amené Jean Smith à d'autres tentatives toutes aussi intéressantes les unes que les autres. D'abord, elle a enseigné les mathématiques à un groupe difficile de garçons dont personne ne voulait. Elle avoue ne pas avoir dormi durant les trois premières semaines afin de trouver un moyen de s'en sortir et surtout, de les aider. Ses réflexions l'ont conduite aux résultats suivants:

1. l'horaire du cours de mathématiques attribué à ce groupe était placé en fin de journée. Ces élèves avaient été "écrasés" pendant toute la journée et ils étalent souvent en colère. Jean Smith les laissait se libérer de cette colère et parler contre les professeurs et professeures s'ils le désiraient et tant qu'ils en avaient besoin. Cette période de défoulement est devenue une nécessité avant de passer au cours de mathématiques et être quelque peu efficace.

2. Pour un cours d'une heure, le professeur ou la professeure doit avoir préparé trois activités à faire car une d'entre elles peut ne pas fonctionner et on ne doit pas être pris au dépourvu. Elle avait toujours des "mots croisés" de chiffres prêts car elle avait remarqué que cela fonctionnait si rien d'autre n'allait.

3. Elle n'imposait que deux règles aux membres du groupe: personne ne devait s'attaquer aux autres physiquement et les bruits ne devaient pas déranger une autre classe.

4. Enfin, comme personne ou presque ne veut enseigner à ces groupes, ceux et celles qui acceptent ce défi doivent dtre regroupés, car les

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professeurs et professeures qui veulent le faire aiment parler de ces groupes et surtout, chercher des moyens de les aider. L'erreur souvent commise est de donner ces groupes faibles au personnel enseignant n'ayant pas toujours la formation adéquate en mathématiques ou l'expérience nécessaire pour faire face à ces groupes. Jean Smith considère qu'il faut connaître les mathématiques pour les enseigner et pour trouver plusieurs façons de le faire; le personnel enseignant à l'aise avec les mathématiques peut généralement accorder plus de temps et d'énergie sur la pédagogie.

Au collège Middlesex, elle a organisé des ateliers de mathématiques afin de diminuer l'anxiété de certains adultes à l'égard de cette discipline et de les encourager à s'inscrire à un cours de mathématiques. Ces ateliers (groupes de 15) non crédités avaient Heu en soirée et se répartlssaient en cinq rencontres de deux heures trente chacune, une fois par semaine. Le contenu de chacune de ces rencontres était le suivant:

1. mathématiques et anxiété;

2. arithmétique, fractions et décimales;

3. nombres positifs et négatifs;

4. algèbre et résolution de problèmes;

5. graphes.

Si le besoin se faisait sentir, elle ajoutait une sixième rencontre sur les probabilités. Un groupe sur deux manifestait de l'intérêt pour cette sixième rencontre.

Selon son souvenir, toutes et tous s'inscrivaient ensuite à un cours de mathématiques

même si certains et certaines devaient suivre cette session à deux reprises.

Nous ne décrirons ici que le contenu plus précis de la première rencontre car elle concerne plus spécifiquement le sujet du présent travail. Cette première rencontre

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est prévue pour tenter de diminuer l'effet des réactions d'anxiété à l'égard des mathématiques. D'abord, assis en cercle, les adultes tentent de cerner ce qu'ils ressentent par rapport à leur présence dans le groupe. Elle leur demande ce qu'ils ressentent lorsqu'ils vont chez le dentiste et tente de faire un parallèle avec ce qu'ils ont ressenti en entrant dans la classe. Ensuite, ils évoquent ce qu'ils ont déjà fait en mathématiques et parlent de leurs bonnes et mauvaises expériences. Elle leur présente également un film sur l'anxiété à l'égard des mathématiques. Si les étapes précédentes ont bien fonctionné, elle leur demande de compléter le test de lecture en mathématiques (math reading test) en équipe et revient ensuite sur les résultats de ce travail surtout pour montrer l'importance de bien lire la question.

Finalement, elle cherche des moyens pour que tout le monde se connaisse par leur

nom.

Présentement, elle poursuit ce genre d'ateliers auprès de personnes âgées de 55 ans et plus. Elle intitule ces ateliers "les maths que vous auriez toujours voulu

connaître". Elle fait ce travail depuis trois ans à travers les États-Unis dans le

cadre d'un programme pour les Aînés et Aînées nommé "Elders Hostel". Il lui est arrivé de se retrouver dans un groupe de 39; même l'administration ne croyait pas que les mathématiques pouvaient présenter un si grand intérêt pour ces personnes.

Elle attribue cet intérêt au fait qu'à cet âge-là, les adultes ne vivent plus de pression liée à la réussite et que leurs questions par rapport à cette discipline demeurent entières et méritent des réponses.

Ces ateliers sont partagés en cinq rencontres d'une heure trente chacune à raison d'une rencontre par Jour pendant une semaine. Le contenu de ces rencontres se répartit comme suit:

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1. histoire des mathématiques;

2. théorie des ensembles;

3. nombres, bases, arithmétique;

4. logique;

5. probabilités.

Des questions sur le calcul sont très souvent posées; elle introduit alors cette notion graphiquement (dérivée et intégrale).

Toutes ces expériences l'ont amenée à modifier peu à peu son travail d'enseignante en mathématiques au collège communautaire Middlesex.

Enseignement des mathématiques

Dans le département de mathématiques composé de sept membres dont Jean Smith fait partie actuellement, on respecte beaucoup son travail. Cependant, elle est seule à s'intéresser spécifiquement à l'anxiété à l'égard des mathématiques. Elle est reconnue pour son expertise en la matière et les conseillers et conseillères qui orientent les élèves dirigent toujours les plus anxieux dans ses groupes. De plus, étant donné le mode de répartition des groupes d'enseignement des mathématiques, chacun et chacune sont appelés à tour de rôle à enseigner également aux jeunes et aux adultes (le soir) appelés "non traditionnal-students" alors, elle a acquis une connaissance de ces deux populations étudiantes.

Dans le département de mathématiques, il s'est également organisé un laboratoire de mathématiques assez élaboré et qui existe depuis quelques années.

Laboratoire de mathématiques

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■ Le laboratoire de mathématiques tient lieu dans une classe régulière. On y retrouve le mobilier habituel. Ce qui diffère d'une classe régulière c'est le décor i et l'ambiance. Il y a des fleurs et des plantes ainsi que du café et des biscuits.

« Chaque jour, il y a un casse-tête mathématique présenté au tableau et quatre ordinateurs et des logiciels sont disponibles. Une technicienne chargée de s'occuper du laboratoire

r à temps complet dirige l'organisation.

^ Ce sont des élèves-tuteurs (8 à 12 par session) qui répondent aux questions des élèves à raison de 6$ de l'heure et pour environ 6 heures par semaine. Ces m élèves-tuteurs reçoivent un bref entraînement basé sur les deux principes suivants:

i

ne pas répondre à une question, mais plutôt demander une autre question pour clarifier ce qui n'a pas été compris; travailler avec plusieurs élèves à la fois qui éprouvent les mêmes difficultés.

Échanges et discussions

Toutes ces expériences nous ont menée à avoir des échanges et discussions : intéressantes avec Mme Jean Smith surtout en ce qui concerne la recherche et

l'expérimentation que nous préparons pour l'automne 1989.

i t

Nous avons discuté avec elle des résultats de recherches que nous avons menées

f"* antérieurement et surtout de celle que nous terminons actuellement. Nous lui avons

également présenté le modèle andragogique que nous prévoyons expérimenter à l'automne 1989. Son point de vue et certains documents qu'elle nous a remis nous permettront rm d'améliorer certains éléments de l'expérimentation.

Enfin, nous avons réalisé une entrevue de cette dame qui sera probablement publiée dans le Bulletin AMQ (Association Mathématique du Québec) au cours de la m prochaine année; cela permettra de faire mieux connaître sa conception de l'enseignement

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et de l'apprentissage des mathématiques.

Conclusion

Cette visite aux États-Unis était pour nous une expérience nouvelle et a été

très enrichissante. Nous avons rencontré une femme prête à partager des idées et qui s'intéresse aux mêmes aspects que nous dans l'enseignement des mathématiques.

Tous les échanges que nous avons eus avec elle confirment plusieurs idées que nous préconisons et qui vont dans le sens des recherches que nous menons actuellement.

Cet échange est donc une stimulation à continuer dans le sens de nos hypothèses de travail.

Les échanges qui ont débuté cet été se poursuivront au-delà de cette rencontre.

Nous nous préparons à présenter un atelier commun sur l'anxiété à l'égard des mathématiques au prochain Congrès international sur l'enseignement des mathématiques (ICME) qui aura lieu à Québec en 1992. Dans la poursuite de son doctorat. Jean Smith songe à venir à Montréal pour connaître ce qui se fait ici. Enfin, elle désire être informée de l'évolution des résultats de la recherche que nous réaliserons au cours de l'année 1989-1990.

Finalement, tous les aspects énumérés ci-haut nous stimulent à vouloir renouveler l'expérience et à songer à poursuivre ce genre d'échanges. Nous prévoyons communiquer avec Mme K. Patricia Cross de l'université de Californie qui travaille sur les adultes et l'apprentissage de façon générale et avec M. Raymond J. Wlodkowski de l'université d'Antioch à Seattle qui s'intéresse aux adultes et à la motivation.

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Bibliographie

SMITH, Jean But. (1981). "Math Anxiety and the Student of the 80's". Middletown:

Math /Science division.

SMITH, Jean Burr. (1979). "Anxiety réduction in the developmental mathematics classroom". Document présenté à la conférence "Invitation to Innovation", Wllmington, Delaware.

SMITH, Jean Burr. (1976). "L'enseignement dans la clinique mathématique". Traduction du groupe "Sexe et Maths", IRE M d'Orléans.

TOBIAS, Sheila. (1987). Succeed with Math: Every Student's Guide to Conguering Math Anxiety. New York: Collège Entrance Examinatlon Board.

TOBIAS, Sheila. (1978). Over-comlng math anxiety. Boston: Houghton Mifflin Company.

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