• Aucun résultat trouvé

cr de Th. Brisart, Un art citoyen. Recherches sur l'orientalisation des artisanats en Grèce proto-archaïque (2011)

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "cr de Th. Brisart, Un art citoyen. Recherches sur l'orientalisation des artisanats en Grèce proto-archaïque (2011)"

Copied!
6
0
0

Texte intégral

(1)

HAL Id: hal-01456562

https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01456562

Submitted on 28 Feb 2017

HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers.

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés.

cr de Th. Brisart, Un art citoyen. Recherches sur l’orientalisation des artisanats en Grèce proto-archaïque

(2011)

Sabine Fourrier

To cite this version:

Sabine Fourrier. cr de Th. Brisart, Un art citoyen. Recherches sur l’orientalisation des artisanats en Grèce proto-archaïque (2011). 2013, pp.439-443. �hal-01456562�

(2)

Topoi 18 (2013) p. 439-443

Thomas Brisart, Un art citoyen. Recherches sur l’orientalisation des artisanats en Grèce proto-archaïque, Classe des Lettres, Académie royale de Belgique (2011). ISBN 978-2-8031-0278-5.

L’ouvrage est la publication d’une thèse soutenue à l’Université libre de Bruxelles en 2009. L’art grec orientalisant, vieux sujet, est à la mode. En France, plusieurs thèses récentes ont porté sur les orientalia découverts en Grèce 1 et un volume collectif réunissant les contributions présentées lors d’un séminaire de recherche consacré à la Méditerranée du viie s. vient de paraître 2. Dans le monde anglo-saxon, on peut citer, pour les six dernières années, un colloque et une monographie 3. Tous ces travaux s’accordent pour réévaluer les modes de contact entre Orient et Grèce avec l’acquis des études post-coloniales, mais les approches, comme les conclusions proposées, sont fort diverses.

Ce livre, qui exploite une documentation exclusivement archéologique, est une étude d’histoire sociale. C’est ce qu’affiche son joli titre (« un art citoyen ») ; c’est ce qu’affirme fortement l’auteur dans le préambule : « nous aimerions mettre en évidence le fait que l’art orientalisant constitue un phénomène intimement lié à l’émergence d’une nouvelle forme d’organisation sociale en Grèce, à l’articulation des périodes géométrique et proto-archaïque : la cité-État » (p. 18). Cet ouvrage se situe donc dans le prolongement d’études fécondes qui ont favorisé une nouvelle approche de la cité grecque, en l’abordant sous l’angle des pratiques sociales, dans des domaines divers (funéraire, cultuel, festif, etc.) 4. Ici, un trait générique de

1. C. saint-Pierre, Les offrandes orientales dans les sanctuaires du monde grec à l’époque archaïque (Université Panthéon-Sorbonne, 2005) ; G. Velho, Exotica et sociétés : les objets orientaux dans les tombes crétoises (Université de Strasbourg, 2009).

2. R. Étienne (dir.), La Méditerranée au viie siècle av. J.-C. (essais d’analyses archéologiques), Paris (2010). Catherine Saint-Pierre et Thomas Brisart font partie des contributeurs du volume. On y lira avec profit l’article de Fr. Croissant, qui met en particulier l’accent sur les apories que suscite une approche « globalisante » du phénomène orientalisant, qui gommerait à la fois la continuité entre périodes géométrique et archaïque et l’importance des identités stylistiques.

3. C. Riva, N.C. Vella (éds), Debating Orientalization. Multidisciplinary Approaches to Change in the Ancient Mediterranean, Londres (2006) ; A.C. Gunter, Greek Art and the Orient, New York (2009). On remarquera que le point de vue des orientalistes est davantage suscité dans ces ouvrages que dans leurs équivalents francophones.

4. Mentionnons en particulier, parce que ce sont les travaux que l’auteur cite le plus fréquemment, les études de I. Morris, Fr. de Polignac et A. Duplouy.

(3)

440 s. Fourrier

l’art grec du viie s., son caractère « orientalisant », qui est appliqué à des catégories d’objets extrêmement diverses, est associé à des pratiques sociales jugées caractéristiques de la cité, et même de toutes les formes de cité. L’hétérogénéité des sources, à laquelle s’oppose l’unicité de l’interprétation, ne va pas sans poser quelques difficultés, sur lesquelles je reviendrai.

Le style, clair et précis, non dépourvu d’humour, offre une lecture agréable et l’auteur, malgré sa modestie, fait preuve d’une belle maîtrise d’une immense documentation tant archéologique qu’historiographique. Le sujet n’est pas neuf, il fallait situer son approche : l’auteur le fait avec force et le plan de l’ouvrage reflète la démarche suivie. Les trois parties, joliment coiffées d’un substantif grec, en évoquent les étapes, depuis l’objet observé dans les conditions matérielles de sa fabrication (Technê), jusqu’à sa mise en contexte dans les usages et les pratiques d’une société agonistique (Agôn) et à son interprétation dans le cadre socio- politique qu’il informe, celui de la cité (Polis).

La première partie, qui comporte un bilan historiographique utile, s’attache à la définition de l’objet orientalisant (l’ouvrage ne traite que du domaine de la civilisation matérielle, de l’artisanat, sans s’intéresser aux formes de la pensée et de son expression). Les traits orientalisants, définis comme des « emprunts » à l’Orient, sont classés en deux grandes catégories : les « emprunts techniques » et les « emprunts de motifs iconographiques ». La première catégorie est moins homogène qu’on pouvait s’y attendre, puisqu’il y est question à la fois de matériaux (ivoire), de procédés techniques (filigrane, moule) et de types d’œuvres (orthostates figurés, sculptures monumentales). L’inventaire, éclectique, renvoie à des objets divers (peut-on vraiment étudier ensemble et selon la même grille de lecture des aryballes de faïence et des orthostates ?) et des sources diverses : aucune région précise, réelle, du Proche-Orient n’a produit l’ensemble de ces objets. Certes, tous sont étrangers au répertoire géométrique grec, mais tous ces « emprunts » ne touchent pas l’ensemble du monde grec et ils ne proviennent pas des mêmes sources. Il serait intéressant de dépasser le constat (« c’est un trait orientalisant ») pour remonter à la source et tenter de suivre le cheminement des modèles. Cela permettrait de mettre en évidence des réseaux (les traits « orientalisants » des productions de Crète ne sont pas ceux des productions de Grèce de l’Est, par exemple) et, sans doute, d’identifier des intermédiaires (orientaux ou, tout aussi bien, grecs).

En ce sens, la définition proposée (p. 58) n’est pas entièrement satisfaisante :

« Nous réserverons ici l’appellation ‘orientalisant’ uniquement aux artefacts dont la technique et/ou l’iconographie faisaient, dans leur contexte d’usage antique, ostensiblement écho à l’une ou l’autre tradition artisanale du Proche-Orient, mais qui n’ont pas pour autant paru orientaux ». En se plaçant du point de vue de la réception et non de celui de la simple description, l’auteur suppose qu’on a les moyens d’appréhender l’effet produit par un objet ou un motif orientalisant dans leur contexte d’usage. Or, est-il certain, pour le commanditaire ou le peintre d’un vase, qu’une frise animalière évoquait ostensiblement l’Orient (et quel Orient ?) plutôt qu’un motif nouveau ou différent ?

(4)

La première partie s’achève sur l’exposé de la méthode et de la thèse soutenue : l’art orientalisant est lié à des pratiques citoyennes, il est l’un des modes de reconnaissance du citoyen, facteur de distinction dans les cités « ouvertes », à structure sociale fluide, facteur de cohésion dans les cités « fermées », à structure sociale fixe. Le reste du volume est consacré à la mise à l’épreuve de cette hypothèse, à partir d’études de cas précises.

La deuxième partie (Agôn) s’intéresse au premier type de cités, celles où se joue la compétition des élites (entendues comme un groupe à définition comportementale). L’auteur s’inspire largement des idées d’A. Duplouy, qu’il ne manque pas de citer 5. Mais, alors que l’ouvrage d’A. Duplouy traite de pratiques (les titres des chapitres, faits d’infinitifs – « énoncer une ascendance », « contracter un mariage », « récupérer la mort », etc. – le montrent clairement), l’auteur envisage ici une catégorie d’objets (mal définie et ambiguë, on l’a vu), qu’il associe à différents modes de distinction, documentés par d’autres sources. La démonstration s’appuie sur une série d’exemples : la céramique proto-attique dans les nécropoles ; les trépieds orientalisants dans les sanctuaires ; les aryballes protocorinthiens dans les banquets et les concours. Dans chacun des cas, en effet, l’objet est associé à un contexte d’émulation : visibilité de la tombe ou de l’offrande, pratiques sociales de l’élite. Mais l’objet « orientalisant » y joue-t-il un rôle particulier ? Ou, pour le formuler autrement, ces objets y ont-ils une importance particulière parce qu’ils sont « orientalisants » ? On peut, du moins dans certains cas, en douter. Ainsi, la consécration de trépieds évoquait-elle, pour les contemporains, ostensiblement l’Orient, ou prolongeait-elle une tradition géométrique ? Dans les textes homériques comme dans l’épisode de Kôlaios (cité p. 156 et dont on rappellera qu’il fait fabriquer un vase « en forme de cratère argolique »), le trépied renvoie à des usages grecs. Quant à la céramique protocorinthienne, elle était largement diffusée hors du monde de la cité grecque.

La troisième partie (Polis) traite exclusivement de la Crète. Après avoir rassemblé les témoignages qui définissent la spécificité de la cité crétoise (un modèle de cité « fermée », où l’élite coïncide avec le cercle des citoyens), l’auteur s’intéresse à deux études de cas. À Aphrati, il étudie trois séries d’objets : les pithoi à relief (qui, certes, de par leur nature même de grands conteneurs, sont associés à des pratiques communautaires, mais dont l’aspect « oriental » n’est pas évident tant ils s’inscrivent dans une longue tradition locale, qui remonte au moins au Bronze Récent) ; la céramique peinte ; les armures (dont l’auteur propose qu’elles ont été prises à l’ennemi et exposées : elles ne renvoient donc pas à un Orient lointain, mais au voisin crétois…). À Gortyne, il reprend le délicat dossier des figurines « dédaliques » et il propose, de manière convaincante, qu’elles ne soient pas des consécrations féminines mais des dédicaces citoyennes, adressées à une divinité guerrière. La conclusion portée par le chapitre est que les consécrations

5. A. DuPlouY, Le prestige des élites. Recherches sur les modes de reconnaissance sociale en Grèce entre les xe et ve siècles avant J.-C., Paris (2006).

(5)

442 s. Fourrier

« orientalisantes » sont, en Crète, une pratique communautaire, servant la cohésion, là où, dans les cités à compétition, elles sont une pratique individuelle, servant la distinction. Dans un cas comme dans l’autre, elles participent de la bonne marche de la cité.

Si la clarté de l’exposé et la maîtrise des sources offrent des développements utiles sur un certain nombre de points particulièrement débattus dans l’historiographie récente, j’hésiterai toutefois à suivre l’auteur sur le fond de sa démonstration, et cela d’abord pour des raisons de méthode. Certes, le refus du corpus, qui est affirmé et justifié dès l’introduction, peut se comprendre : la documentation serait trop vaste pour que son inventaire ait un sens. La démarche ne repose donc pas sur la compilation et le croisement des sources ; l’hypothèse, posée a priori, est éprouvée à partir d’un choix d’exemples. N’y a-t-il pas toutefois quelque chose d’artificiel dans l’interprétation du même phénomène (mais s’agit-il vraiment du même phénomène ?) comme caractéristique de deux sociétés radicalement différentes, celle de la cité « ouverte » et celle de la cité

« fermée » ? Bien que l’auteur s’en défende (p. 326-327), le modèle paraît plaqué plutôt que déduit. L’enquête devait certes être située, elle s’intéresse au monde de la cité, mais le phénomène « orientalisant » est loin de s’y cloisonner. Que faire du phénomène « orientalisant » d’Étrurie ou de Chypre, par exemple ?

Le refus du corpus en masque d’ailleurs un autre : l’absence de catalogue couvre l’absence de définition. « L’orientalisant », parfois figé en substantif au cours du texte, n’est jamais clairement caractérisé. La distinction orientalisant/

oriental reste floue : « en optant pour l’orientalisant plutôt que pour l’oriental, l’usager met en avant sa capacité à susciter la production d’objets similaires à ceux utilisés par les Orientaux et de ce fait, se met sur un pied d’égalité par rapport à ces derniers. Le processus d’identification n’en est que plus parfait » (p. 107, l’affirmation est répétée p. 320). Paradoxe : on devient différent, singulier, bref on se comporte « à l’orientale » en utilisant des objets qui, tout en ne « paraissant » pas orientaux, évoquent « ostensiblement » l’Orient, pour reprendre les termes utilisés par l’auteur. Cependant, les objets « orientalisants » ne sont pas du tout

« similaires » aux objets orientaux. Pour ne mentionner que l’exemple de la céramique, les cas d’imitation de la forme, et non pas seulement des motifs, sont excessivement rares (comme le plat illustré p. 141, fig. 7, ou le type du vase à parfum traditionnellement nommé lydion, et ce sont des types dont la diffusion dans le monde grec, restreinte, demanderait à être étudiée de près). Cela signifie que les gestes qu’implique la manipulation des vases restent fondamentalement différents : dans un skyphos « orientalisant », fût-il orné de frises animales étrangères au répertoire géométrique local (qui d’ailleurs ne sont utilisées en Orient qu’en orfèvrerie), on boit « à la grecque », en tenant le récipient d’une façon complètement différente de celle des Levantins, qui se servent de bols sans anse. Il ne peut y avoir d’identification quand les gestes, et les pratiques qu’ils documentent, s’inscrivent dans une tradition locale. Pour être cohérente, la démonstration devrait s’appuyer sur une étude précise de chaque trait orientalisant, de sa source (au-delà d’un « Orient » largement imaginaire) et des modes de

(6)

circulation des modèles (dont beaucoup semblent transmis à l’intérieur du monde grec). Quel Orient, donc ? Mais aussi de quelle période ? La rencontre de la Grèce proto-archaïque avec l’Orient, on l’a souvent souligné, n’est qu’une redécouverte et le monde égéen participait largement, au Bronze Récent, d’une civilisation matérielle en bonne partie commune à l’ensemble de la Méditerranée orientale.

Or, les viiie et viie siècles grecs sont justement une époque de redécouverte, de réappropriation de ce passé (ce dont témoigne notamment l’installation de cultes sur des vestiges monumentaux du deuxième millénaire). L’utilisation de motifs orientaux, dont beaucoup sont directement hérités de l’Âge du Bronze, évoque-t- elle donc ostensiblement un ailleurs contemporain ou un passé local ?

On lira avec profit cet ouvrage intelligent et cultivé, qui propose, sur bien des dossiers, des mises au point utiles. La modestie affichée ne doit pas en cacher l’ambition : il s’agit d’appréhender la civilisation matérielle dans son contexte, de replacer l’objet dans son cadre d’utilisation, bref d’employer les vestiges archéologiques à l’écriture d’une histoire sociale. La démarche est exemplaire, mais la thèse défendue, bien que séduisante, reste, à mon sens, gratuite. Certes, le phénomène « orientalisant » (si tant est qu’on puisse englober sous un seul terme des manifestations aussi diverses et variables selon les régions du monde grec) est concomitant d’une phase de développement et de consolidation de la cité grecque, mais la relation logique entre les deux ne m’apparaît pas clairement. Elle ne me semble pas, du moins en l’état, étayée par une démonstration.

Sabine Fourrier HiSoMA-UMR 5189 MOM, Lyon

Références

Documents relatifs

Pour faire cette tête en verre bleu, il fallait également ajouter bien d’autres ingrédients : des opacifiants pour rendre le verre opaque puis des co- lorants pour donner la

plusieurs réfections et réaménagements au long des siècles. Les recherches ont éventuellement attribué à cet autel quelques coupures sur le roc 101. Le mur nord des

Thèse présentée en vue de l’obtention du grade académique de Docteur en Histoire, art et archéologie (ULB) et. de Docteur en Sciences de l’Antiquité, histoire, archéologie,

16 Pour l’inventeur de l’art brut, il est cependant inconcevable de faire entrer sa collection de 5.000 œuvres dans un musée d’art contemporain au sein du circuit

Prls1dent Oltecteur Génê••J Claude Gauthoer D~recteur de 18 Publication Bernard Donnad•eu Responsable de la RédaCtiOn Jackoa Oelobbe Responsable dB la coordmatton

tenant quelques ustensiles garnis argent. 84 — Étui plat en or émaillé, à vases et guirlandes de fleurs sur fond bleu. Fin du xvmc siècle. 85 — Étui en ancien émail

Or, le premier membre de cette équation n'est autre chose que le terme de reste de la série de factorielles ( î o ) ; quant au second membre, il tend vers zéro avec 1 - pour

La méthode est une méthode graphique et nous appliquerons brutalement des formules, peu connues d'ailleurs car presque exclusivement mises au point vers 1926 et employées par les