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Le toucher au cœur de l’autisme : approche développementale et thérapeutique

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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Année 2018/2019 N°

Thèse

Pour le

DOCTORAT EN MEDECINE

Diplôme d’État par

Marco GUIDOTTI

Né le 8 avril 1989 à Naples (Italie)

Le toucher au cœur de l’autisme : approche développementale et thérapeutique

Présentée et soutenue publiquement le mardi 15 octobre 2019 devant un jury composé de :

Président du Jury :

Professeur Frédérique BONNET-BRILHAULT, Physiologie, Faculté de Médecine-Tours

Membres du Jury :

Professeur Vincent CAMUS, Psychiatrie, Faculté de Médecine – Tours Professeur Jean XAVIER, Pédopsychiatrie, Faculté de Médecine – Poitiers Docteur Ugo FERRER-CATALA, Pédopsychiatrie, PH, CHU - Tours Directeur de thèse :

Professeur Frédérique BONNET-BRILHAULT, Physiologie, Faculté de

Médecine-Tours

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Remerciements

Cette thèse vient conclure un long parcours d’études, au cours duquel j’ai pu apprendre énormément de choses et rencontrer de nombreuses personnes. Ces dernières, des collègues, des amis, ont enrichi ce voyage et m’ont aidé à me construire en tant que médecin, mais surtout en tant qu’homme. Il serait long et prétentieux de remercier une par une toutes les personnes qui m’ont accompagné pendant toutes ces années, mais sachez que je pense à vous tous au moment où j’écris ces lignes (amis niçois, copains de Blois, ancien bureau de l’ATIPIC, …).

Mes premiers remerciements vont à mon jury :

Pr Bonnet-Brilhault : je vous remercie d’avoir dirigé ce travail et d’accepter que je puisse poursuivre ma carrière à vos côtés. Il est difficile d’exprimer mon admiration à votre égard et l’honneur que j’ai de pouvoir encore profiter de vos enseignements et de vos qualités professionnelles. Croyez-moi, cela représentait mon objectif depuis longtemps…

Pr Camus : vous me faites l’honneur de participer à mon jury. Pendant tout mon internat, j’ai pu apprécier vos qualités d’enseignement et, par l’intermédiaire de notre association, de gestion des démarches hospitalo-universitaires. Ces expériences ont été importantes pour moi, tant au niveau collectif qu’au niveau personnel. Merci !

Pr Xavier : je vous remercie d’avoir accepté de participer à mon jury de thèse. J’espère pouvoir profiter de votre expertise dans l’autisme et d’avoir la possibilité de collaborer avec vous sur des projets communs.

Dr Ferrer-Catala : votre présence à mon jury représente pour moi un vrai bonheur.

Grâce à vous et à vos enseignements, j’ai pu réellement apprécier la pédopsychiatrie et avoir un modèle auquel me référer pendant ma carrière. Merci infiniment pour tout !

Ensuite, il me semble indispensable de citer et de remercier les différentes unités dans lesquelles je suis passé :

l’équipe de psychiatrie adulte de Blois : Dr Boissicat, Dr Hermelin, merci de m’avoir accompagné dans mes premières expériences en tant que psychiatre;

l’équipe de pédiatrie de Blois : Dr Dieckmann et Jessica, merci pour ce semestre pas évident pour moi ;

la clinique de la Chesnaie : Dr Place, Dr Beligné, Margot, Magalie, merci beaucoup

pour votre soutien et votre gentillesse pendant mon stage et mes remplacements ;

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3 l’équipe de l’USIDATU : un grand merci au Pr Cohen d’avoir accepté mon inter-CHU et de m’avoir permis d’apprécier vos qualités professionnelles. Au Dr Giannitelli et à sa belle équipe : merci pour ce semestre enrichissant ! ;

le Centre Oreste : Dr Lenoir, Xavier, c’est un vrai plaisir pour moi d’avoir travaillé avec vous et l’ensemble de votre service. Une ambiance pétillante et des énormes compétences !

Des énormes remerciements vont à l’équipe du service de pédopsychiatrie du CHRU de Tours, avec qui j’ai eu la chance de travailler pendant 2 semestres et avec qui je continuerai mon expérience professionnelle :

Dr Malvy, Dr Bodier, Dr Perrot, Dr Houy-Durand, Dr Saby, Dr Guimard-Brunault, Laura et toute l’immense équipe paramédicale.

Adrien, comment oublier notre semestre passé ensemble à Clocheville ?? Merci pour ton amitié, ta sympathie, ton humour !

Des remerciements particuliers vont à Cindy, pour sa disponibilité, ses explications, ses conseils sur toute la partie de psychomotricité.

Par ailleurs, un grand merci va à l’équipe INSERM, m’ayant aidé et supporté pendant mon Master 2 (Claire et Nadia).

Enfin, à ma famille, m’ayant permis d’arriver jusque-là, au prix de beaucoup d’efforts. Si je suis médecin aujourd’hui, je le dois à vous : à votre patience, à votre soutien, à votre amour.

Roby : Questa tesi é il frutto del mio amore verso di te. Anche se spesso è complicato, il nostro rapporto é la cosa più cara che ho e tentero’ di preservarlo in ogni modo.

Mamma : Quello in cui hai sempre creduto é in queste pagine e soprattutto in me.

Difendero’ le idee che ti hanno spinto a fare tutti gli sforzi che conosciamo per la nostra famiglia. Ti saremo sempre grati del coraggio e della forza che hai sempre dimostrato per noi…

Papà : Quanto mi piacerebbe ritrovarti in questa sala, mentre parlo officialmente d’autismo… Questo traguardo e quello che sono diventato lo devo a te, ai valori che mi hai insegnato, al sostegno che mi hai sempre dato, al modello che hai rappresentato per me. Spero tu sia fiero di tutto questo…

Manue : Eh oui, c’est toi la dernière ! Mon moteur, ma raison, mon cœur. Tu n’imagines

pas quelle chance j’ai de t’avoir à mes côtés… je t’aime !

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Le toucher au cœur de l’autisme : approche développementale et thérapeutique

Résumé :

Les troubles du spectre de l’autisme (TSA) sont des troubles du neurodéveloppement touchant environ 1% de la population générale et se manifestant par des perturbations de la relation et de la communication sociale, ainsi que par des comportements répétitifs et stéréotypés. Depuis 2013, les anomalies sensorielles font partie des critères diagnostiques des TSA établis par le Diagnostical and Statistical Manual of mental disorders (DSM). Parmi ces particularités sensorielles, celles comprenant le toucher sont souvent présentes en clinique courante et ont fait l’objet de plusieurs études. Ces dernières mettent en évidence des troubles de la perception et des anomalies neurophysiologiques, mais restent peu concluantes. Or, le toucher est un sens primordial dans le développement humain. Premier sens se mettant en place au cours de la vie fœtale, il jouerait un rôle important dans les premières interactions entre le bébé et sa mère. Pour certains auteurs, le toucher serait même un véritable organe social, à la base de la construction du schéma corporel, du psychisme, ainsi que du développement de l’intersubjectivité. Par conséquent, les anomalies tactiles présentes dans l’autisme pourraient être responsables de troubles de la relation sociale observés au cours du développement. Cette hypothèse neuropsychopathologique ouvre alors un champ thérapeutique centré sur les thérapies d’intégration sensorielle et les différents protocoles de massages. Ces approches complémentaires permettraient d’améliorer la perception de nos patients, mais elles pourraient aussi, compte tenu de nos observations, avoir un impact sur leurs capacités sociales.

Mots clés : Autisme - Particularités tactiles – Schéma corporel - Intégration sensorielle - Massages

Touch at the heart of autism : a developmental and therapeutic approach

Abstract :

Autism Spectrum Disorder (ASD) is a neurodevelopmental disorder that affects approximately 1% of the general population and is characterized by disturbances in social interaction and communication, as well as repetitive and stereotyped behaviors. Since 2013, sensory abnormalities have been included in the diagnostic criteria for ASD established by the Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (DSM). Among these sensory features, those including touching are often present in current clinic and have been the subject of several studies. These latter reveal perceptual disturbances and neurophysiological abnormalities, but remain inconclusive. Well, touch is a primordial meaning in human development. It’s the first sense to be put in place during the fetal life and it would play an important role in the first interactions between the baby and his mother. For some authors, the touch would even be a real social organ, at the base of the construction of the body image, the psyche, as well as the development of intersubjectivity. As a result, tactile abnormalities in autism may be responsible for deficits in social communication observed during development. This neuropsychopathological hypothesis then opens a therapeutic field focused on sensory integration therapies and different massage protocols. These complementary approaches would improve the perception of our patients, but they could also, given our observations, have an impact on their social abilities.

Key words : Autism – Sensory abnormalities – Body image – Sensory integration - Massages

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Table des matières

Remerciements p. 2

Résumé/ Abstract p. 4

Introduction p. 12

I. Du toucher à l’exploration de l’environnement et à la relation à l’autre p. 13

1. Les données neurophysiologiques p. 14

a. Les récepteurs périphériques b. Les récepteurs cutanés

c. Les voies somesthésiques afférentes d. L’intégration centrale

e. La voie « affective »

2. Les origines embryologiques et la croissance post-natale p. 31 a. Les origines embryologiques de l’épiderme et du derme

b. La croissance post-natale c. Le concept DOHAD

3. Le rôle du toucher dans le développement précoce de l’enfant p. 38 a. Le toucher et la construction du schéma corporel

b. Le toucher et les origines du psychisme

c. Le toucher et le développement de l’intersubjectivité

4. Etude expérimentale : Caractérisation neurophysiologique des stimuli

tactiles chez l’enfant neurotypique p. 46

a. Matériels et méthodes b. Résultats

c. Discussion

II. Les particularités du toucher dans l’autisme p. 61

1. Le changement de paradigme : de la psychanalyse aux neurosciences p. 61 a. Autisme et psychose infantile

b. Autisme et rencontre avec l’environnement c. Autisme et apparition du DSM

2. Les particularités sensorielles dans l’autisme p. 65 a. Définitions

b. Evolution des concepts

c. Caractéristiques des particularités sensorielles d. Répercussions comportementales

e. Evaluation des particularités sensorielles

3. Particularités du toucher p. 76

a. Particularités cliniques b. Mesures psychophysiques c. Corrélations cliniques

4. Les explorations neuroscientifiques p. 83

a. Particularités structurales et fonctionnelles b. Particularités de la voie « affective »

(11)

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c. Particularités de l’inhibition

III. Les approches thérapeutiques p. 87

1. Les différentes méthodes existantes p. 87

a. Thérapies d’intégration sensorielle b. Protocoles de massages

c. Enrichissement sensoriel d. Packing

e. « Hug Machine »

f. Places de l’haptonomie et du Kangaroo care

2. Mes expériences cliniques personnelles p. 96

a. Toucher et troubles du comportement b. Toucher et enrichissement sensoriel

Conclusion p 100

Annexes p 102

Annexe 1 – Critères diagnostiques des TSA (DSM 5) p 102

Annexe 2 – Sensory Profile 2 p 103

Bibliographie p 111

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12 Les troubles du spectre de l’autisme (TSA) sont des troubles neurodéveloppementaux de l’enfant, ayant des répercussions sur les domaines de la communication et des comportements. Les premières descriptions de ces troubles remontent aux observations de Léo Kanner, définissant un « autisme infantile précoce »(1), et Hans Asperger, mettant en avant plutôt une « psychopathie autistique ». Après la fin de la 2

e

guerre mondiale, des hypothèses psychodynamiques sur la physiopathologie de l’autisme deviennent majoritaires, mettant l’accent sur le rôle de la relation mère-bébé. Ce n’est que dans les années ‘80 que la vision des TSA change : l’approche neuroscientifique redéfinit les TSA comme des troubles du développement et du fonctionnement cérébral. Depuis, le nombre de publications dans ce domaine augmente d’année en année, témoignant d’un intérêt clinique et scientifique croissant.

La prévalence des troubles semble également avoir eu la même évolution : les TSA auraient intéressé en moyenne 0,2% des enfants dans les années 1980 et jusqu’à 0,6% au début des années 2000 (2). Les dernières cohortes américaines mettent en évidence une prévalence pouvant atteindre jusqu’à 1,4% de TSA parmi les enfants de 8 ans, avec une prédominance masculine 4 fois plus importante (3). A l’origine de cette augmentation, il pourrait y avoir l’élargissement des critères diagnostiques et un meilleur dépistage de la part des professionnels (2). En effet, les critères diagnostiques ont connu des changements marquants depuis les premières versions du Diagnostic and statistical manual of mental disorders (DSM) dans les années ’80. Anciennement appelés Trouble Global du Développement (DSM III) et Trouble Envahissant du Développement (DSM IV), les TSA actuels ont tendance à inclure différentes sous-catégories dans un spectre plus large et varié.

Si certains critères sont retrouvés d’une version à l’autre, d’autres apparaissent pour la première fois et donnent une connotation différente à ces troubles et en font évoluer les hypothèses neuropsychopathologiques. C’est notamment le cas des troubles sensoriels, inclus pour la première fois dans les critères diagnostiques des TSA dans la dernière version du manuel de l’Association Américaine de Psychiatrie (APA) en 2013. Cette dernière définit une

« Hyper ou hyporéactivité aux stimulations sensorielles ou intérêt inhabituel pour les aspects

sensoriels de l’environnement », qu’elle intègre dans la deuxième dimension autistique

consacrée aux comportements et intérêts restreints et répétitifs (Annexe 1). Ce nouvel

élément introduit « noir sur blanc » un aspect souvent observé en clinique courante, mais

parfois peu pris en compte dans la prise en charge des TSA : la sensorialité. Tout être vivant

utilise son système sensoriel pour répondre et réagir à son environnement, voire entrer en

relation avec d’autres organismes. Mais qu’en est-il lorsque cette sensorialité ne fonctionne

pas correctement ? Qu’en devient l’interaction au monde environnant ? L’exemple de

l’autisme nous permet de questionner cela, de repenser les interactions humaines par

l’intermédiaire de nos sens, de proposer des trajets développementaux différents, de réfléchir

à des prises en charge alternatives.

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13 Ce travail de thèse vient alors éclairer certains points de cette réflexion, expliquer des mécanismes neurophysiologiques, proposer des hypothèses neuropsychopathologiques, en se focalisant sur un sens souvent négligé : le toucher. La peau, organe complexe jouant plusieurs rôles dans le développement d’un individu, représente probablement la base des premières interactions et des premières expériences de conscience de soi. Certaines expressions du langage parlé font référence à un rôle identitaire et social attribué à la peau :

« entrer dans la peau d’un personnage », « faire peau neuve », « entrer en contact », « je l’ai dans la peau ». S’intéresser donc à cet organe et à ses rôles sensoriels reviendrait à explorer plusieurs caractéristiques d’un même individu : son interaction avec le monde, la construction du « soi », son monde social. Dans l’hypothèse d’un lien développemental existant entre toucher et habiletés sociales, l’objectif de notre travail est alors de rapprocher les troubles tactiles du développement des troubles de la communication et de la relation sociale connus dans les TSA. Pour cela, nous allons d’abord décrire les liens existants entre toucher et exploration de l’environnement et relation à l’autre chez l’individu neurotypique, en proposant également une étude expérimentale de caractérisation neurophysiologique des stimuli tactiles. Dans un second temps, nous nous attarderons sur les particularités sensorielles présentes dans l’autisme, pour ensuite focaliser notre attention sur les troubles tactiles. Enfin, nous présenterons les approches thérapeutiques basées sur cette modalité sensorielle.

I. Du toucher à l’exploration de l’environnement et à la relation à l’autre

Quand nous évoquons le toucher, c’est fréquemment pour décrire son rôle dans l’exploration de notre environnement. Cette modalité sensorielle est en effet utile pour caractériser la texture d’un objet, sa température, sa consistance. Cependant, le toucher a également sa place dans la communication et la relation avec autrui. Toucher l’avant-bras de quelqu’un et/ou lui faire un câlin peuvent être des marques de réassurance et d’affection, lui donner un baiser un témoignage d’amour. La peau véhicule alors plusieurs informations en fonction des modalités de son utilisation et du contexte social dans lequel nous nous trouvons.

Grace à plusieurs approches, nous allons décrire les fonctionnements neurophysiologiques du

toucher, son origine embryologique, ainsi que son rôle dans le développement précoce de

l’enfant. Enfin, nous allons exposer un protocole de recherche sur la caractérisation des

stimulations tactiles.

(14)

14 1. Données neurophysiologiques (4–8)

La physiologie est une science étudiant le fonctionnement des différents organes et systèmes du corps humain. Plus spécifiquement, la neurophysiologie s’occupe de décrire le fonctionnement du système nerveux central (SNC) et de ses composantes périphériques.

Grâce à ces connaissances, nous allons remonter la voie somesthésique afférente, permettant à l’information venant des récepteurs périphériques de rejoindre le SNC, où elle sera intégrée et traitée.

a. Les récepteurs périphériques

Le système nerveux périphérique (SNP) est composé de fibres nerveuses reliant le SNC aux différentes parties du corps. Par ces fibres, le SNC prend connaissance des informations arrivant de l’intérieur ou de l’extérieur de l’organisme. Pour cela, les neurones afférents disposent de récepteurs sensoriels répondant aux stimuli environnants, un stimulus étant défini comme toute modification perceptible par le corps. Compte tenu des différentes formes ou modalités de stimuli existants, plusieurs récepteurs spécialisés sont présents aux extrémités, pour répondre spécifiquement à chaque stimulus perçu. Chaque récepteur va alors convertir l’énergie reçue en signal électrique : c’est la transduction sensorielle. Les stimuli vont alors provoquer des potentiels gradués, ou potentiels récepteurs, eux-mêmes responsables de l’apparition de potentiels d’action dans la fibre afférente, permettant la transmission de l’information au niveau du SNC.

Selon la nature du stimulus présenté, les récepteurs peuvent être classés de la façon suivante, en fonction de leur spécificité de réponse :

Photorécepteurs : sensibles à la lumière et à ses différentes longueurs d’onde ;

Mécanorécepteurs : sensibles à l’énergie mécanique, comme l’étirement musculaire, les ondes sonores au niveau de l’oreille interne, la pression artérielle au niveau des parois sanguines (barorécepteurs), etc. ;

Thermorécepteurs : sensibles à la température ;

Osmorécepteurs : sensibles aux concentrations des substances dissoutes et aux niveaux de pression osmotique ;

Chimiorécepteurs : sensibles à des substances chimiques spécifiques. Ce type de récepteurs alimente les sensations de goût et d’odorat, par exemple ;

Nocicepteurs : sensibles aux stimuli douloureux, c’est-à-dire à toute agression susceptible d’endommager les tissus (pincement, brûlure, déformation).

Malgré la spécificité de ces récepteurs, certains stimuli dits composites (comme le « mouillé », par exemple) ne possèdent pas de récepteurs propres : leur perception vient de l’intégration centrale de plusieurs stimuli sensoriels élémentaires concomitants (pour le « mouillé » : toucher, pression et température).

La transduction sensorielle est une étape importante de la transmission du signal de la

périphérie au SNC. Celle-ci passe par la naissance d’un potentiel récepteur gradué et

(15)

15 éventuellement d’un potentiel d’action. La stimulation d’un récepteur provoque une modification de la perméabilité de sa membrane, passant le plus souvent par l’entrée d’ions Na

+

dans la cellule : c’est la dépolarisation cellulaire. Cette dernière est à la base du potentiel récepteur, dont l’amplitude et la durée varient avec l’énergie du stimulus et la vitesse à laquelle il est reçu ou retiré. Plus le stimulus est intense et/ou répétitif, plus le potentiel récepteur qui en résultera sera grand. Une fois le seuil de stimulation atteint, un potentiel d’action est déclenché grâce à l’ouverture des canaux Na

+

de la membrane du neurone afférent adjacente au récepteur. Ce potentiel d’action aura toujours la même amplitude, suivant la loi du tout ou rien. Ce qui reflètera l’intensité du stimulus sera alors la fréquence des potentiels d’action du neurone afférent et le nombre de récepteurs stimulés. Nous parlerons alors de codage en fréquence (plus le potentiel récepteur est grand, plus le potentiel d’action est fréquent) et de codage numérique (plus le stimulus est important, plus le nombre de récepteurs activés dans une région est grand). Cependant, un même stimulus ne donne pas toujours naissance au même potentiel récepteur. Certains récepteurs peuvent diminuer l’amplitude de leur potentiel récepteur (et donc diminuer la fréquence de son potentiel d’action) malgré la persistance d’un stimulus : c’est le phénomène d’adaptation. En fonction de leur vitesse d’adaptation, nous pouvons différencier deux types de récepteurs :

Les récepteurs toniques : pas d’adaptation ou adaptation très lente, permettant d’envoyer l’information au SNC sur la persistance d’un stimulus. Parmi ce type de récepteurs, nous retrouvons les récepteurs proprioceptifs articulaires, dont la sensibilité doit rester constante pour permettre au SNC de connaitre la position des articulations et ainsi maintenir l’équilibre corporel ;

Les récepteurs phasiques : adaptation rapide, renseignant le SNC sur les variations d’un stimulus. Ce type de récepteurs répond au début du stimulus, s’adapte rapidement si le stimulus persiste et répond à nouveau à l’arrêt de la stimulation (réponse « off »). C’est le cas par exemple des récepteurs tactiles sensibles à la pression exercée sur la peau, permettant au sujet de s’adapter rapidement au port de vêtements ou de bracelets/ montre.

Une autre importante caractéristique d’un récepteur est la taille de son champ récepteur.

Dans le cas des neurones somatosensoriels, s’occupant des sensations somesthésiques, le

champ récepteur est défini par la zone limitée de la peau qui l’entourent. La taille du champ

récepteur est inversement proportionnelle à la densité des récepteurs dans la zone. Plus la

densité des récepteurs est grande, plus la taille du champ récepteur est petite et plus le

pouvoir de discrimination, appelé également acuité, est important. De façon plus pratique, la

pulpe du doigt, comptant un nombre considérable de récepteurs, a un pouvoir discriminatif

plus important que celui du coude, où les récepteurs possèdent des champs récepteurs plus

larges. Ces différences de densité et de discrimination des récepteurs créent une

hétérogénéité des afférences somesthésiques, représentées au niveau cortical par la

distorsion de l’homonculus sensitif.

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16 Enfin, il n’existe pas de transmission neuronale sans messager chimique. Ces messagers portent le nom de neurotransmetteurs, substances chimiques produites par les neurones et permettant la transmission d’un signal chimique d’un neurone à l’autre. Cette transmission est le résultat de la libération des neurotransmetteurs par l’axone dans la fente synaptique (espace délimité par deux neurones) et de leur fixation sur des récepteurs spécifiques. Le couplage neurotransmetteur/récepteur donne une réponse spécifique, permettant de classer les synapses et leurs neurotransmetteurs en fonction de leur valence en :

Excitatrices : glutamate, acétylcholine, catécholamines, sérotonine, histamine, …

Inhibitrices : GABA, glycine, …

La fixation du neurotransmetteur sur son récepteur provoque une modification du potentiel de membrane postsynaptique, jusqu’à l’élimination du messager dans la fente synaptique. Un neurone pouvant recevoir plusieurs synapses, ce n’est que la sommation des différentes valences qui va définir l’apparition du potentiel d’action postsynaptique. Nous parlons alors de sommation temporelle ou de sommation spatiale si le potentiel d’action est provoqué par des modifications de potentiel de membrane rapprochées dans le temps ou dans l’espace. Par ailleurs, certains neurones peuvent produire d’autres molécules, les neuromodulateurs, ne provoquant pas de potentiel d’action à court terme, mais pouvant modifier lentement l’activité d’une synapse d’une manière positive ou négative. Concernant la somesthésie, plusieurs neurotransmetteurs et neuromodulateurs semblent être impliqués dans ses voies : le GABA et la sérotonine (effets inhibiteurs), les opioïdes endogènes (diminution de la douleur), la substance P (perception de la douleur), les endorphines et l’ocytocine (augmentés lors de stimuli tactiles).

En résumé, le SNC reçoit, par l’intermédiaire du codage périphérique, trois types d’informations sur les stimuli sensoriels entrants :

Le type de stimulus : identifié par le type de récepteur activé et par la voie afférente spécifique empruntée ;

Le siège du stimulus : dépendant du champ récepteur correspondant et de la voie afférente empruntée ;

L’intensité et la durée du stimulus (Fig 1) : codées par la fréquence des potentiels d’action du neurone afférent, ainsi que par le nombre de récepteurs activés.

Ces informations sensorielles peuvent alors être utilisées de différentes façons pour :

Programmer un comportement moteur ou une activité visant à maintenir l’homéostasie de l’organisme. Sans ce type d’afférences, toute interaction avec l’environnement serait impossible ;

Maintenir la vigilance et la conscience, par l’activation du système réticulé activateur ;

Percevoir le monde extérieur ;

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17

Créer une trace mnésique, pouvant être utilisée dans un second temps ;

Provoquer une émotion.

Fig 1 : Caractérisation de la réponse d’un récepteur périphérique à un stimulus sensoriel. D’après Sherwood L, Ectors F. Physiologie humaine. Louvain-la-Neuve: De Boeck; 2015.

b. Les récepteurs cutanés

La peau est considérée comme un organe à part entière, recouvrant l’ensemble de la

surface de l’organisme. Ses fonctions spécifiques comprennent la protection contre les agents

traumatiques externes, la thermorégulation, la sensation tactile (toucher, chaleur, pression,

douleur) et la sécrétion de lipides protecteurs, lait, etc.

(18)

18 Sa structure étant variable selon la localisation, son histologie classique lui reconnait 3 couches principales :

L’épiderme : couche épithéliale de surface, il est en contact direct avec l’environnement extérieur ;

Le derme : couche intermédiaire de tissu de soutien fibroélastique, synthétisé par les fibroblastes ;

L’hypoderme : tissu sous-cutané composé essentiellement de tissu adipeux. Couche la plus profonde de la peau, son épaisseur et son contenu sont variables selon la localisation.

L’épiderme est la couche de cellules la plus superficielle et protectrice de la peau. Son architecture est complexe et souvent décrite par la présence de 4 couches, de différentes épaisseurs en fonction de la partie du corps concernée :

La couche de kératine : la plus externe, composée de plaques de kératine et de kératinocytes anucléés, formant une épaisseur hydrophobe, directement en lien avec l’environnement (donc en permanence éliminée et renouvelée) ;

La couche granuleuse : siège des kératinocytes, cellules produisant la kératine et d’autres substances hydrophobes destinées à la couche la plus superficielle ;

La couche spinocellulaire : sous-jacente à la couche granuleuse, cette partie de l’épiderme se compose de cellules à épines reliées les unes aux autres par des desmosomes, jonctions cellulaires assurant une stabilité mécanique ;

La couche basale : couche la plus profonde de l’épiderme, elle est responsable du renouvellement des kératinocytes. A ce niveau, une membrane basale unit l’épiderme du derme sous-jacent et empêche leur séparation par la présence de fibres d’ancrage et de crêtes épidermiques (d’autant plus présentes que la peau est soumise à des forces de cisaillement.

En plus des kératinocytes, nous retrouvons d’autres types de cellules dans l’épiderme, cellules dites non kératinisantes : les mélanocytes, les cellules de Langerhans et les cellules de Merkel.

Les premières, présentes surtout dans la couche basale, produisent la mélanine, substance responsable de la couleur de la peau et la protégeant des effets nocifs des rayons ultraviolets.

Les cellules de Langerhans sont des cellules immunitaires, retrouvées dans toutes les couches épidermiques, responsables de la reconnaissance des antigènes. Enfin, les cellules de Merkel sont des récepteurs sensibles de la couche basale, peu abondantes, faisant synapse avec des terminaisons nerveuses périphériques. Elles peuvent être dispersées entre les kératinocytes ou regroupées en amas en forme de disques : ce sont les récepteurs ou corpuscules tactiles.

Pour compléter notre description, nous pouvons citer les annexes cutanées présentes dans

l’épiderme. Parmi celles-ci, nous retrouvons le follicule pilosébacé, constitués du follicule

pileux (dont la papille dermique reçoit des terminaisons nerveux), de la tige du poil, des

glandes sébacées et du muscle arrecteur du poil. Cette annexe permet la production de poils

(19)

19 et de sébum, sécrétion hydrophobe renforçant le caractère imperméable de la kératine.

Ensuite, une autre annexe est représentée par les glandes et canaux sudoripares eccrines, qui permettent la sécrétion de la sueur sous le contrôle du système nerveux autonome (SNA) sur toute la surface de la peau. Enfin, les glandes apocrines, présentes au niveau des organes génitaux, des aisselles et de l’anus, produisent une sécrétion visqueuse légèrement laiteuse, dont la fonction reste inconnue chez l’homme.

Situé en dessous de l’épiderme, le derme est considéré comme le tissu de soutien de la peau. Celui-ci contient les annexes cutanées et des réseaux vasculo-nerveux et lymphatiques.

Histologiquement, deux couches cellulaires sont décrites : le derme papillaire, plus fin et proche de la jonction avec l’épiderme, et le derme réticulaire, partie plus volumineuse située entre le derme papillaire et le tissu adipeux sous-cutané. A ce niveau, nous retrouvons des plexus vasculaires, participant par la régulation du débit sanguin à la thermorégulation. Le derme contient également le réseau nerveux cutané, composé de :

Un réseau amyélinique sous le contrôle du système nerveux autonome sympathique, gérant les annexes cutanées et les débits vasculaires ;

Un système myélinisé et amyélinisé afférent, appartenant au système nerveux sensitif.

Dans ce système, plusieurs terminaisons nerveuses plus ou moins spécialisées sont reconnues :

o

Les terminaisons nerveuses libres, sensibles à la douleur et à la température ;

o

Les corpuscules de Pacini : spécialisés dans la pression et les vibrations et situés

principalement dans le derme profond ou dans le tissu sous-cutané des paumes des mains et des plantes des pieds ;

o

Les corpuscules de Meissner : sensibles au toucher, présents au sein du derme papillaire et plus nombreux au niveau des mains et des pieds ;

o

Les cellules de Merkel : récepteurs tactiles d’adaptation lente, décrits plus haut.

Enfin, la troisième et dernière couche de la peau est représentée par l’hypoderme. Celui-ci est constitué principalement de tissus adipeux, ainsi que des gros vaisseaux sanguins et nerfs drainant le derme sus-jacent. Cette partie de la peau a des fonctions d’isolation thermique, de stockage alimentaire et d’absorption des chocs.

Pour conclure, parmi les principaux éléments constitutifs de la peau, nous retrouvons

des récepteurs sensitifs plus ou moins spécialisés. Ces derniers constituent la première étape

de la perception d’un stimulus sensoriel, le point de départ d’une transmission nerveuse

ascendante vers le système nerveux central. La figure 2 résume les caractéristiques de ces

récepteurs cutanés, rencontrés principalement au sein de l’épiderme et du derme.

(20)

20

Fig 2 : Caractéristiques des récepteurs tactiles au sein de la peau. D’après 1. Widmaier EP, Raff H, Strang KT, Widmaier EP, Vander AJ. Physiologie humaine : les mécanismes du fonctionnement de l’organisme : Vander.

2013.

c. Les voies somesthésiques afférentes

Les récepteurs périphériques vus précédemment s’organisent autour deux systèmes

sensoriels principaux : le système épicritique et le système protopathique. Le premier

comprend le toucher discriminatif, la vibration et la proprioception ; le second s’occupe des

modalités de température et de douleur. Les informations transmises n’étant pas les mêmes,

leurs caractéristiques diffèrent également. En effet, le système épicritique est doté de fibres

de gros calibre, rapides, permettant une forte résolution temporelle et spatiale, alors que le

système protopathique se compose de fibres de petit calibre, lentes, avec une faible

résolution temporelle et spatiale. Les trajets ascendants s’organisent autour de la voie

lemniscale pour la sensibilité épicritique et de la voie extra-lemniscale pour la sensibilité

protopathique. Ces voies se composent de trois neurones : le premier débute en périphérie

et chemine jusqu’à la moelle, le deuxième va de la moelle au thalamus et le troisième du

thalamus au cortex. Compte tenu de la différence entre les deux systèmes sensoriels, nous

allons expliciter leurs trajets et leurs projections.

(21)

21 La première étape de la transmission ascendante de l’information somesthésique se fait au niveau de la moelle épinière : c’est le niveau segmentaire spinal. Les fibres périphériques déjà citées dérivent des neurones du ganglion rachidien, situé dans la partie postérieure de la moelle. Ce ganglion contient le corps cellulaire d’un ou plusieurs neurone(s) sensitif(s), composé(s) lui- (eux-) même(s) d’un axone bifurqué, présentant deux branches : une branche distale, définissant le champ récepteur, et une autre proximale, participant à la première synapse au niveau médullaire. L’ensemble des champs récepteurs d’un ganglion rachidien définit un dermatome, qui est la surface cutanée innervée par les axones sensitifs. Au niveau de la moelle épinière, les deux systèmes sensoriels se séparent, pour suivre deux voies ascendantes indépendantes. Comme la figure 3 nous le montre, l’ensemble des fibres épicritiques rejoignent le cordon postérieur ipsilatéral, pour ensuite se dissocier en deux groupes de fibres.

Fig 3 : Trajet des fibres afférentes somesthésiques jusqu’à la moelle épinière. D’après Purves D, Augustine GJ, Fitzpatrick D, Hall WC, LaMantia A-S, White LE. Neurosciences. Paris ; de boeck supérieur; 2015.

Le premier se dirige vers la corne ventrale, sous-tendant la proprioception segmentaire, et se

projette vers les motoneurones-α, pour une fonction motrice. Le deuxième groupe emprunte

la colonne dorsale pour se projeter jusqu’aux noyaux des cordons postérieurs au niveau de la

jonction bulbomédullaire. Quant aux fibres protopathiques, elles se terminent principalement

au niveau de la corne postérieure. Dans cette région, où l’architecture neuronale est

complexe, des synapses se forment entre segments adjacents par l’intermédiaire des fibres

propriospinales. Les informations arrivant via des fibres faiblement ou non myélinisées (Aδ et

C) subissent alors des délais de transmission supplémentaires, avant de traverser le canal

central de la moelle par l’intermédiaire de la commissure antérieure et rejoindre la région

ventro-latérale controlatérale. A ce niveau, les axones montent ensuite vers le tronc cérébral

et le thalamus, en formant le faisceau spinothalamique latéral. Au niveau segmentaire spinal,

nous pouvons alors remarquer que les fibres épicritiques sont « directes », restant du même

côté que les dermatomes correspondants, alors que celles protopathiques croisent la ligne

médiane, donnant des informations controlatérales.

(22)

22 Les voies somesthésiques ascendantes se composent de différents faisceaux de fibres. Les voies ascendantes épicritiques se concentrent autour de deux faisceaux principaux, suivant les cordons postérieurs de la moelle jusqu’à la jonction cervico bulbaire, pour faire ensuite synapse avec les neurones des noyaux des colonnes dorsales. On parlera alors des :

Faisceau gracile ou de Goll : réunissant les fibres entrant en-dessous de la 6

e

vertèbre thoracique et se terminant dans le noyau de même nom ;

Faisceau cunéiforme ou de Burdach : comprenant les fibres cervicales et thoraciques restantes et se projetant dans le noyau de même nom.

Une fois dans les noyaux de Goll et Burdach, ces fibres décussent, se projettent au niveau du lemnisque médian controlatéral, pour ensuite monter et rejoindre le noyau ventro-postéro- latéral (VPL) du thalamus (Figure 4). En ce qui concerne les fibres protopathiques, elles se réunissent autour du faisceau spinothalamique latéral (Figure 5), qui se termine sur l’un des trois sites suivants :

La formation réticulaire bulbaire, pontique et mésencéphalique : son activation provoque l’effet activateur (« éveillant ») des stimulations douleureuses, ainsi que l’impact de la douleur sur le tonus musculaire ;

La substance grise périaqueducale : en lien avec les régulations du SNC sur la transmission nociceptive ascendante ;

Le noyau ventro-postéro-latéral du thalamus : de ce noyau part la projection au niveau du cortex, permettant la localisation de la douleur, mais également l’analyse quantitative et qualitative de l’information protopathique.

Par ailleurs, une organisation différente est à noter pour la sensibilité de la face. Celle-ci est médiée par le système trigéminal, composé par les trois branches du nerf trijumeau, décrit comme le cinquième nerf crânien. Les récepteurs et les fibres du trijumeau sont identiques à ceux des nerfs s’occupant du reste du corps, véhiculent des informations épicritiques et protopathiques, et répondent à des champs récepteurs particuliers. En effet, la branche ophtalmique du trijumeau (V1) innerve la partie supérieure du visage (de la ligne des cheveux aux yeux), la branche maxillaire (V2) plutôt la partie centrale (nez, lèvre supérieure, joues et intérieur de la bouche), alors que la branche mandibulaire (V3) le menton, la lèvre inférieure, la marge inférieure de la mandibule, le plancher buccal et la langue. Ces trois fibres remontent les informations sensorielles au niveau du ganglion de Gasser, situé sur le plancher du sinus caverneux, représentant le « ganglion rachidien postérieur du nerf trijumeau » (Figure 4). A partir de ce ganglion, les voies épicritiques et protopathiques se séparent :

La plupart des fibres épicritiques font synapse dans le noyau sensitif principal du V,

dans la partie latérale du pont. Les neurones partant de ce noyau forment alors le

faisceau trigéminothalamique ventral ascendant, qui décusse et se termine au niveau

du noyau ventro-postéro-médial (VPM) du thalamus avec le lemnisque médian.

(23)

23

Les fibres protopathiques descendent dans le tractus spinal du V et font synapse dans le noyau caudal du trijumeau. A partir de ce dernier, elles s’unissent pour former le faisceau trigéminothalamique, en position dorsale du lemnisque médian. Ce faisceau, envoyant des collatérales vers la formation réticulée du tronc cérébral et la substance grise périaqueducale, se termine également au niveau du noyau VPM thalamique.

Fig 4 : Représentation schématique des voies épicritique (voie lemniscale) et de la sensibilité de la face. D’après Purves D, Augustine GJ, Fitzpatrick D, Hall WC, LaMantia A-S, White LE. Neurosciences.

Paris ; de boeck supérieur ; 2015.

(24)

24

Fig 5 : Représentation schématique des voies protopathiques (voie extra-lemniscale). D’après http://bbeauvalot.free.fr/S%E9miologie%20du%20SNP/SNP%20S%E9quence%203%20-

%20sensibilit%E9,%20motricit%E9.pdf.

Les neurones-relais des noyaux thalamiques VPL et VPM, recevant donc des afférences épicritiques et protopathiques, se projettent vers les cortex somesthésiques primaire et secondaire, en traversant le bras postérieur et le genou de la capsule interne. Ce relais thalamique avant l’arrivée au cortex est contrôlé par le noyau réticulaire, couche cellulaire enveloppant le thalamus. L’activité de ce noyau est elle-même régulée par la formation réticulée mésencéphalique, le cortex préfrontal et les régions corticales temporo-pariétales.

Ce contrôle permet de définir la source sensorielle sur laquelle le cortex sera focalisée,

participant ainsi au phénomène d’attention sélective. Ce phénomène semble avoir un rôle

considérable dans l’attention somesthésique, alors qu’il semble négligeable pour les autres

sens.

(25)

25 Comme nous avons pu le voir, les voies ascendantes sont complexes et comprennent différentes structures. Ces deux systèmes représentent l’hémicorps controlatéral, malgré une décussation à des moments différents. Les deux rejoignent également le thalamus, véritable filtre sensoriel et relais obligatoire précédant l’arrivée des fibres au niveau cortical.

d. L’intégration centrale

L’intégration centrale permet le traitement des informations somesthésiques afférentes, filtrées par le thalamus, par le cortex somesthésique. Celui-ci peut être divisé en cortex somesthésique primaire (S1), occupant la quasi-totalité du gyrus postcentral, et en cortex somesthésique secondaire, situé dans une petite région adjacente à la partie ventrale du gyrus postcentral.

Le S1 comprend différentes régions, se caractérisant par des cyto-architectures variées et spécifiques. Grâce à ces territoires, toute information somesthésique peut être décodée et interprétée. Parmi les aires de Brodmann spécifiques du traitement somesthésique, nous retrouvons :

L’aire 3 : recevant les projections thalamiques, elle se divise elle-même en :

o

Portion 3a : traitant les afférences musculaires et nociceptives, elle s’occupe principalement de proprioception et de douleur ;

o

Portion 3b : réservée aux afférences cutanées d’adaptation rapide et lente et subdivisée d’une mosaïque de patchs corticaux adjacents, elle joue un rôle dans la perception tactile (forme, taille, texture), la sensation vibratoire (pallesthésie) et la thermoception ;

L’aire 1 : traitant les informations cutanées provenant de l’aire 3b, cette aire est spécialisée dans la perception de la texture ;

L’aire 2 : recevant des projections des deux sous-unités de l’aire 3, cette aire s’occupe plus spécifiquement de la détection de la position et des bords, de la perception de la taille, de la perception tridimensionnelle de la forme (stéréognosie), ainsi que de la douleur.

Ces systèmes neuronaux répondent à une organisation somatotopique précise. Chaque

territoire du gyrus postcentral traite une partie spécifique de notre corps : c’est l’homonculus

sensoriel (Figure 6). Comme nous pouvons le voir, deux régions sont fortement

représentées au sein du cortex : la main et le visage (et notamment les lèvres). Pour ces zones

corporelles, le rapport champ récepteur cortical/surface cutanée est élevé, alors que d’autres

zones possèdent moins de surface corticale dédiée. Cette somatotopie reste fluide et

modulable, dépendant des demandes et des contraintes environnementales.

(26)

26

Fig 6 : Représentation schématique de la disposition somatotopique du cortex somesthésique primaire chez l’homme. D’après Purves D, Augustine GJ, Fitzpatrick D, Hall WC, LaMantia A-S, White LE. Neurosciences. Paris ;

de boeck supérieur ; 2015.

Le cortex somesthésique secondaire est connecté au S1 et reçoit des projections directement du thalamus. Son activité serait particulièrement dédiée à la discrimination de la forme et de la texture. Contrairement au S1, les deux S2 sont fortement liés par des connexions transcalleuses. Ces liens fonctionnels pourraient être à la base de plusieurs phénomènes, comme :

La coordination bimanuelle

La transmission bihémisphérique des inputs somatiques unilatéraux

Le transfert rapide des apprentissages tactiles, comme la discrimination par le toucher, d’une main vers l’autre

La représentation unifiée de l’ensemble de notre surface corporelle

(27)

27 Par ailleurs, le cortex somatosensoriel associatif, représenté par les aires 5 et 7 de Brodmann, reçoit des projections de l’aire 2 du S1. La partie caudale de l’aire 7 (7a) est également liée au cortex visuel associatif, alors que l’aire 5 et la portion rostrale de l’aire 7 (7b) sont fortement connectées aux régions motrices précentrales, sous-tendant ainsi l’intégration sensorimotrice. De plus, l’aire 7 semble être à la base de l’alignement des coordonnées spatiales centrées sur notre corps (égocentrisme) avec celles définies par l’environnement (allocentrisme), par la convergence des informations somesthésiques et visuelles dans cette zone corticale.

e. La voie « affective »

Dans les paragraphes précédents, nous avons décrit les voies sensorielles du toucher exploratoire. Celui-ci recouvre la dimension sensori-discriminative, permettant la localisation spatiale, ainsi que la reconnaissance de la nature et de l’intensité du stimulus. Parallèlement à ces aspects, certains auteurs se sont intéressés aux dimensions motivationnelle et affective du toucher, permettant de définir la valence (agréable ou non agréable) et la pertinence motivationnelle d’un stimulus tactile.

Plusieurs auteurs ont exploré ces aspects affectifs du toucher. Essick et al. en 1999 (9) s’intéressaient à l’évaluation du caractère agréable ou non de stimulations tactiles de différents sites, avec différents matériaux et différentes rapidités de stimulation. D’autres auteurs ont mesuré la perception d’un contact à soi-même (intrapersonnel) par rapport à un contact à autrui (interpersonnel), sur deux sites corporels (la paume de la main et l’avant- bras). Dans cette étude par exemple, le contact d’une autre personne était perçu comme plus agréable qu’un contact intrapersonnel et la stimulation de l’avant-bras plus douce que celle de la paume de la main (10). Des différences de perception sont alors progressivement reconnues, des sites plus sensibles que d’autres caractérisés et des fonctionnements neurophysiologiques spécifiques décrits. Comme pour les voies exploratoires, nous allons donc aborder la localisation, les récepteurs et les afférences de ce qui est appelée de nos jours la « voie affective ».

Les recherches concernant le toucher « dynamique » (mouvement continu d’un point

à un autre, souvent répétitif, comme une caresse ou un frottement (11)) suggèrent qu’un

toucher plutôt doux et lent peut être codé par le système nerveux de manière affective et

hédonique, et non seulement de façon purement sensorielle. A la base de ce codage, il y aurait

un type particulier de fibres nerveuses afférentes : les fibres tactiles C. Ces dernières sont

sensibles à des stimulations tactiles inoffensives (12), sont non myélinisées et possèdent un

seuil mécanique bas (13). La vitesse de la stimulation jouerait également un rôle sur leur

activation : ce type de fibres répond le mieux à des stimulations de 1 à 10 m/s. Pour des stimuli

plus rapides et plus lents, la fréquence des potentiels d’action neuronaux est moins

importante. Parallèlement, plus un stimulus est agréable, plus les décharges neuronales des

fibres C sont fréquentes, suivant une réactivité similaire à celle de la vitesse de stimulation

(28)

28 (14). Cependant, ce profil de réponse n’est pas retrouvé pour les fibres rapides Aβ, pour lesquelles les potentiels d’action augmentent avec la vitesse de stimulation. Les différentes réactivités de ces fibres sont résumées dans la figure suivante :

Fig 7 : Profils de réponse des fibres tactiles C (Fig A et B) et des fibres rapides Aβ (Fig C) à des stimulations tactiles à type de frottements (à partir de McGlone et al, 2014).

Concernant leur localisation, les fibres tactiles C ont été retrouvées uniquement au niveau de la peau poilue, la peau glabre en étant donc dépourvue ((12); (14)). McGlone et al.

(15) résument en 2014 les voies afférentes supposant transmettre les informations affectives aux noyaux centraux. Au niveau médullaire, ces fibres suivraient le faisceau spinothalamique, comme suggéré par les effets de privation de plaisir secondaires à une section médullaire antérolatérale. Au niveau cérébral, un frottement doux de la peau poilue provoque l’activation du cortex somesthésique (S1 et S2), ainsi que du cortex insulaire postérieur controlatéral.

L’insula, une aire cérébrale souvent négligée, est potentiellement responsable de l’intéroception, ainsi que de l’intégration d’informations émotionnelles, cognitives et motivationnelles (16). D’autres structures ont également été mises en évidence dans la voie affective par une étude en IRM fonctionnelle : le sulcus temporal postéro-supérieur (pSTS), le cortex préfrontal médial (mPFC) et le cortex cingulaire dorso-antérieur (dACC). Ces éléments font partie du « cerveau social », s’occupant des perceptions et des cognitions sociales (17).

Les fibres tactiles C semblent donc spécifiques d’un traitement émotionnel et affectif de

certaines stimulations tactiles, laissant avancer l’hypothèse fonctionnelle d’un « toucher

social » (18). Cependant, malgré une certaine spécialisation dans le traitement de

l’information, les stimuli affectifs semblent également influencer la perception discriminative :

une inhibition du cortex somesthésique a été mise en évidence en IRM fonctionnelle (19) et

un rôle d’inhibition de la douleur fortement suspecté (20).

(29)

29 Enfin, le schéma suivant résume la voie affective, par opposition à la voie discriminative du toucher. Malgré des parcours apparemment parallèles et distincts, ces deux dimensions se croisent et s’influencent réciproquement. La complexité de ces mécanismes, encore mal élucidés, laisse alors encore ouvert le débat sur la place réellement occupée par les perceptions sensorielles sur nos processus affectifs et sociaux.

Fig 8 : Schéma représentant les voies affective et discriminative du toucher (d’après McGlone et al, 2014)

(30)

30 Pour conclure, le tableau suivant résume et compare les caractéristiques des deux principales voies somesthésiques, les systèmes épicritique et protopathique, ainsi que de la voie affective décrite précédemment :

Caractéristique Epicritique Protopathique Affective Modalités

sensorielles

Forme, texture, toucher, pression, glissement, vibration,

position

Température, douleur, toucher

Valence agréable ou non agréable

Résolution spatiale et temporelle

Haute Basse Basse

Type de fibres Gros calibre, myélinisées, de conduction rapide

Petit calibre, faiblement myélinisées ou amyéliniques, de conduction lente

Non myélinisées, de conduction lente

Organisation segmentaire

Paucisynaptique : trajet direct vers les noyaux des cordons

postérieurs

Polysynaptique : fibres propriospinales

segmentaires

?

Faisceaux ascendants

Cordons postérieurs (faisceaux de Goll et

Burdach) et dorsolatéraux

Faisceau spinothalamique

latéral

Faisceau spinothalamique

latéral

Latéralisation des fibres médullaires

ascendantes

Ipsilatérale, jusqu’à la décussation dans le

bulbe

Controlatérale (décussation

médullaire)

?

Cibles des faisceaux ascendants

Noyaux de Goll et Burdach ipsilatéraux ;

relais via le lemnisque médian

vers le noyau VPL controlatéral

Formation réticulaire du tronc cérébral et

noyau VPL

Noyaux thalamiques

Cibles corticales Gyrus postcentral : aires 3a, 3b, 1 et 2

Gyrus postcentral : aires 3a et 2

Cortex insulaire postérieur

Tableau 1 : Caractéristiques des voies sensorielles épicritique, protopathique et affective ; tableau modifié à partir de Nadeau SE, Antonelli PJ. Neurosciences médicales. Paris: Elsevier; 2006.

(31)

31 2. Les origines embryologiques et la croissance post-natale (8,21)

Comme les autres organes, la peau nait et se développe au cours de la vie embryonnaire. Dans un premier, nous allons expliciter son origine embryologique, particulièrement intéressante car partagée avec le SNC. Dans un second temps, nous nous intéresserons à sa croissance post-natale, pouvant nous donner des éléments de réflexion importants sur comment le bébé perçoit les stimulations tactiles qui lui sont adressées.

a. Les origines embryologiques de l’épiderme et du derme

La peau est le premier sens se développant au cours de la vie embryonnaire. Le début de sa formation remonte à la 4

e

semaine de vie intra-utérine, lorsque l’embryon n’est qu’un disque germinal tridermique. Ses trois couches de cellules sont représentées par l’ectoderme, le mésoderme et l’endorme. Chacune de ces couches va donner naissance à différents organes définitifs au cours de la vie fœtale. Au cours de la 4

e

semaine, l’embryon prend forme et deux processus surviennent : le soulèvement et la neurulation. Le premier permet aux trois feuillets déjà en place de se plisser et de prendre progressivement une forme cylindrique, par une croissance en longueur et une fusion des couches cellulaires latérales. L’embryon est alors tridimensionnel et un plan corporel tubulaire-intratubulaire se différencie. Parallèlement, la neurulation va permettre la formation du tube neural, ébauche du futur système nerveux central, à partir de la plaque neurale. Cette dernière se forme à partir de l’ectoderme pendant la 3

e

semaine, au cours du processus d’induction neurale. Au cours de la 4

e

semaine, la plaque neurale va donc se transformer en un tube creux, recouvert par l’ectoderme superficiel (Figure 9).

Fig 9: Représentation schématique des processus de soulèvement et de neurulation embryonnaires. D’après Larsen WJ, Schoenwolf GC, Bleyl SB, Brauer PR, Francis-West PH, Alexandre H, et al. Embryologie humaine de

Larsen. 2017.

(32)

32 Par la suite, le tube neural va se différencier dans le sens cranio-caudal, se refermant progressivement et permettant de mettre en évidence l’encéphale et la moelle épinière. A la fin de la 4

e

semaine de vie intra-utérine, les principales régions de l’encéphale deviennent perceptibles : le prosencéphale (cerveau antérieur), le mésencéphale (cerveau moyen) et rhombencéphale (cerveau postérieur). Pendant la neurulation, d’autres composantes spécialisées apparaissent et sont utiles pour illustrer notre propos : les cellules des crêtes neurales et les dermomyotomes. Les premières dérivent de la partie dorsale du tube neural et subissent un processus de migration important tout le long du corps de l’embryon. De ces cellules, dérivent beaucoup de tissus embryonnaires et d’organes définitifs. Enfin, les dermomyotomes dérivent des somites, formations segmentaires prenant forme du mésoderme au cours de la 3

e

semaine.

Comme nous avons pu le voir précédemment, la peau est constituée principalement de l’épiderme et du derme. Malgré leur proximité, ces deux couches n’ont pas la même origine embryologique. L’épiderme dérive de l’ectoderme de surface et sa constitution débute au début de la 4

e

semaine de vie intra-utérine (Figure 10).

Fig 10 : Représentation schématique de la formation de l’épiderme au cours de la vie fœtale (modifiée).

D’après Larsen WJ, Schoenwolf GC, Bleyl SB, Brauer PR, Francis-West PH, Alexandre H, et al. Embryologie humaine de Larsen. 2017.

Initialement composé d’une seule couche cellulaire, l’ectoderme de surface prolifère et forme

une couche externe de cellules, appelée périderme. L’ancien ectoderme de surface devient

alors la couche basale, composée de cellules prolifératives séparées du derme sous-jacent par

une lame basale. Au cours de la 11

e

semaine, la couche basale produit une nouvelle couche

intermédiaire au niveau de la face profonde du périderme : ce sont les futures couches

externes de l’épiderme définitif, composées de kératinocytes. La couche basale, devenue

couche germinative, constitue alors l’amas de cellules souches permettant le renouvellement

du futur épiderme. Au cours de la première partie du 5

e

mois, le périderme s’élimine

progressivement au sein du liquide amniotique et la couche intermédiaire se différencie pour

(33)

33 laisser la place aux trois couches définitives de l’épiderme externe : les couches spinocellulaire, granuleuse et cornée. Cette transformation se fait progressivement dans le sens cranio-caudal et implique la migration des kératinocytes de la couche germinative jusqu’aux couches les plus externes, incluant la production de protéines d’enveloppe et une énucléation cellulaire dans la couche cornée. En ce qui concerne les cellules épidermiques non kératinisantes, les mélanocytes proviennent des cellules des crêtes neurales et migrent dans l’épiderme entre la 7

e

et 10

e

semaine, les cellules de Langherans sont produites par la moelle osseuse et les cellules de Merkel dérivent des cellules épidermiques et peuvent être identifiées entre le 4

e

et 6

e

mois.

Quant au derme, son origine embryologique est triple : mésoderme et dermomyotome au niveau du tronc, cellules des crêtes neurales au niveau de la tête et du cou. Au cours du 3

e

mois, la couche externe du derme en développement prolifère et donne naissance à la couche papillaire, composée des papilles dermiques envahissant l’épiderme sus-jacent. Le système de ces modelages de surface, spécifiques à chaque partie du corps, est établi très tôt au cours du 5

e

mois de la vie fœtale. Les premières crêtes cutanées apparaissent au niveau des faces palmaires et plantaires des doigts et des orteils, au cours des 11

e

et 12

e

semaines.

Progressivement, l’ensemble du derme se différencie au cours des 2

e

et 3

e

trimestres et, malgré une certaine finesse à la naissance, il s’épaissit même après la vie intra-utérine, au cours de la petite enfance et l’enfance.

Enfin, certains éléments des voies ascendantes sensorielles décrites plus haut prennent naissance de structures embryologiques déjà citées. Il s’agit des ganglions rachidiens postérieurs, premiers relais de l’information somesthésique, dérivant de la crête neurale troncale. La même origine embryologique a été évoquée pour les ganglions sympathiques et parasympathiques régissant le système nerveux autonome.

Pour conclure, nous pouvons remarquer que l’ensemble de l’épiderme et une partie

du derme ont une origine embryologique commune avec le système nerveux central, ainsi que

certaines de ses composantes périphériques et autonomes. Même s’ils ne partagent pas les

mêmes cytoarchitectures, nous pouvons supposer qu’une anomalie embryologique du

système nerveux puisse avoir des répercussions sur la mise en place de la peau. De plus, le

développement du derme plus profond, contenant les nerfs et les récepteurs sensoriels,

continue même après la naissance, nous suggérant une probable influence de

l’environnement sur cette croissance.

(34)

34

b. La croissance post-natale

La naissance est un évènement important et déterminant pour tout individu. Le fœtus, ayant grandi pendant plusieurs mois dans un environnement liquidien et sous la dépendance respiratoire et métabolique de sa mère, se retrouve dans un environnement aérien, où il doit apprendre à devenir indépendant et à s’autoréguler.

La peau participe à cette adaptation post-natale par l’intermédiaire de plusieurs mécanismes et acteurs cellulaires. Visscher et al (22) mettent en évidence plusieurs rôles et acteurs de la peau à la naissance :

Fonctions Structures

Barrière contre :

la perte d’eau

la lumière

les irritants

Couche cornée et épiderme

Mélanocytes (épiderme)

Cellules de Langerhans (épiderme) Résilience à des traumas

mécaniques

Derme

Sensation Nerfs sensitifs (épiderme et derme)

Discrimination tactile Couche cornée et nerfs sensitifs

Régulation thermique Vaisseaux sanguins et glandes eccrines (derme), tissu adipeux (hypoderme)

Formation d’un film hydrolipidique Couche cornée et épiderme

Tableau 2 : Fonctions et structures de la peau à la naissance (d’après Visscher et al, 2015)

A la naissance, la peau présente une fine couche d’épiderme et des couches cornées bien formées, assurant une barrière efficace contre la perte d’eau transépithéliale. Cette dernière, faible à la naissance chez les nouveau-nés à terme, est considéré comme un bon marqueur de l’efficacité de la barrière cutanée. Aidant la mise en place de cette fonction, le vernix caseosa est une couche recouvrant la peau et formée d’eau (80%), de protéines (10%) et de lipides (10%). Cette couche, mise en place lors du dernier trimestre et présente à la naissance sous forme d’un film blanchâtre, assure une première protection contre l’eau et des agents bactériens et fongiques les plus communs. Par ailleurs, les enfants prématurés ne présentent pas la même maturation cutanée à la naissance. Pour les prématurés naissant avant 30 semaines d’aménorrhée, la perte d’eau transépithéliale est supérieure à celle mesurée chez les nouveau-nés à terme. Ceci est en lien avec une faible intégrité des couches cornées, exposant aux risques de déséquilibres électrolytiques, instabilité thermique, exposition accrue aux irritants et aux agents infectieux. Même si le développement cutané post-natal est rapide chez ces enfants, la maturité est acquise plus lentement (22).

Les mois suivant la naissance, la peau subit des modifications. De manière

physiologique, l’hydratation de celle-ci change les premières semaines post-natales : une

baisse importante est constatée lors du premier jour et une augmentation progressive

observée lors du premier mois. Ces modifications sont essentielles pour assurer la plasticité

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