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La pharmacopée comme expression de société

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HAL Id: halshs-00516424

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Submitted on 10 Sep 2010

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Laurent Pordié

To cite this version:

Laurent Pordié. La pharmacopée comme expression de société : Une étude himalayenne. Des sources

du savoir aux médicaments du futur, Editions de l’IRD, pp.183-194, 2002. �halshs-00516424�

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La pharmacopée comme expression de société Une étude himalayenne

Laurent Pordié

Laboratoired'Ecologie Humaine, Universitéd'Aix-Marseille, 38, avenue de l'Europe 13090Aix-en-Provence-France

Résumé

Cechapitreviseàdégager la dimension plurielle de la démarcheethnopharmacologiqueenconsidérant avecautant d'emphaselescar¬

actèresbiologiques, sociaux et culturelsde la pharmacopée. L'argument retenu danscetteétude,conduitesurla médecinetibétaineau Ladakh, montre la matièremédicale,et lesplantesmédicinalesen particulier, comme révélateurdeschangements du monde social et de ses représentations contemporaines, mais également comme manifestation de la culture et symbole des enjeux entretradition et modernité. Lapharmacopéeestconsidérée comme unobjetdynamiquequi refusel'approchedualiste entre entitébio-thérapeutiqueet forme socioculturelle. Elleéclaire diversversantsdela sociétéladakhieparun renversementde perspectivecarl'originedu regardque nousportonssurlasociétépart d'un objetfondamentalementbiologiquemaissituéàl'interfacedesglissementsentrele social et lebi¬

ologique. L'observation du monde au travers de la planteélargitnotre spectre etéclaire la pharmacopée commeunecertaine formed'¬

expressionsociale.

Lesrecherchesscientifiquesmenéessurlestraditions médicalessont en grand nombre d'ordre ethnopharmacologique. C'est-à-dire qu'elles étudient les pharmacopées locales dans une perspective plus biologique que sociale, dont l'objet final est de déterminer l'efficacité pharmacologique d'une plante, d'une partie de plante ou d'un produitextrait. Ala lecturede sa définition l'ethnophar¬

macologie paraît être une sciencebioculturelle parexcellence : il s'agitde «l'étude scientifique interdisciplinaire de l'ensemble des matièresd'originevégétale,animaleouminérale, etdessavoirs ou des pratiquess'y rattachant, queles culturesvernaculaires mettent enoeuvrepourmodifierlesétatsdesorganismesvivants, àdesfins thérapeutiques, curatives, préventives ou diagnostiques» (Dos Santos etFleurentin, 1990).

Cependant «l'étudeinterdisciplinaire»serésumesouventsur leter¬

rain àlabotanique ou àl'ethnobotaniqueet lerestede la pluridis- ciplinaritésepasse enlaboratoire pour la suite proprementphar¬

macologique. Il suffitd'ailleurs delire les revuesspécialisées pour s'apercevoir que lavastemajoritédespublications concernedesré¬

sultats analytiques d'extraits végétaux ou des identifications botaniques. Toutes les autres disciplines qui sont invitées à par¬

ticiperde l'ethnopharmacologie (histoire etanthropologie notam¬

ment) sont finalement peu courantes en pratique.

L'ethnopharmacologie rassemble des compétences très disparates etuneapproche pluridisciplinaire paréquipe paraîtêtre la seule solutionviable.

En réalité, l'ethnopharmacologie implique essentiellement l'étude des pharmacopées eten particulier celle des plantes médicinales

avec une faibleattention apportée à ladimension sociale ou cul¬

turelledel'utilisationdecesplantes.L'ethnopharmacologue, depar lanaturedesonjugement,opposelematérialisme au mysticisme et utilise, selon les termes de Jean Benoist, l'anthropologie comme

«excipient».

Les pharmacopées sontl'objetde programme de recherche, avec l'O.M.S.parexemplequi annonce clairementsonorientation :«the contributionWHO mightmake topromotingrespectforandmain¬

tenanceof, indigenous knowledge, traditionsandremédies,in par¬

ticular theirpharmacopoeia»^. Le terme «pharmacopée» est en¬

tenduenfonction desonpotentielbiologiqueetthérapeutique mais détaché de son environnement socioculturel. Il s'agit d'une forme d'«ethnopharmacologiedéculturée»,enfaitdebio-pharmacologie.

Cet écueil se retrouve également dans les études portant sur la médecinetibétaine,objetde cetarticle. Uneproportionreprésenta¬

tivede la communauté institutionnelle forméeparlespraticienscor¬

respondants et la recherche pharmaceutique locale et interna¬

tionale tendent à donner un caractère scientifique à la médecine tibétaine selon des standards étrangers à ce systèmemédical. La

nature des protocoles cliniques, le mélange de catégories nosologiques, la séparation franche entre le rituel et l'objet (la plante) oul'interprétation del'étatdesantéconstituentdesentraves majeures àcetyped'étude carils peuventdifférer d'un systèmeà l'autreetformer de redoutables apories^. Un nombre impression¬

nant de communications données lors de la Conférence Internationale deMédecine Tibétaine, à Lhasaen juillet2000, ont porté sur des recherches d'ordre pharmacologique en justifiant l'activité de la médecine tibétaine par l'utilisation de paradigmes

Dessourcesdusavoir aux médicaments du futur From the sourcesofknowledgeto themedicinesofthefuture

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biomédicaux. La biomédecine y a été régulièrement présentée commestandard ultime(finalstandard)(CMAM,2000). Cette atti¬

tude est soutenue tant par les spécialistes tibétains que les chercheursétrangerstelque JùrgenAschoffqui ditclairement dans sonouvrage(1996):«Thereareonlymarginalattempts todevelop Tibetan medicinein a modemscientificdirection. Perhaps sucha developmentisundesirable,asany«development» in Tibetan med¬

icineoverthelastfewcenturies hasalways meanta minglingwith westernmédicalsciencewithoutany«serious»vérificationoftheef¬

fectiveness

of

traditionalmedicine». Cetteposition limitel'approche à des considérationsbiologiques etpharmacologiques, et conforte l'orientationdesétudesdanslesdomaines respectifs.

Notreproposestdemontrer quelesplantesmédicinales, et laphar¬

macopée de façongénérale,au-delà de leur fonction thérapeutique primaire, peuventéclairer d'autres versants lorsque nous portons notreregardsurleur expressionen société.Elles sontvecteurs des changements du monde social,d'unecertaine manifestation de la culture etde l'éventail desenjeux entretraditionetmodernité.

Ce chapitrevise à dégager la dimension pluriellede l'ethnophar¬

macologie en traitant avec autant d'égards les caractères bi¬

ologiques, culturels et sociaux de la plante. Symbole de la phar¬

macopée, la matière végétale forme le prisme au travers duquel nousobservonsles modifications engendréespar l'arrivéedel'ère moderne dansune deszoneslesplus enclavéesdusub-continentin¬

dien :leLadakh.Cetterégion duNord-Ouesthimalayenesttraitée comme un ensemble systémique oùchacune desentitésformantl'u¬

niverssocial etenvironnementalestimbriquéeetcomposeun com¬

plexe soumis aux divers changements socio-économiques ré¬

gionaux.L'objetn'est pasd'intégrerlematériel etl'immatériel, mais derefuser ledualismedela séparation entre lebiologiqueetleso¬

cial.

Les

plantes

:

une expression de la culture

Lesplantespeuventcertesêtre étudiéesselon leurscaractéristiques biologiques, cequenousavonsdénommé plus haut« ethnophar¬

macologiedéculturée». Maisnotreobjetestdelesprésenterselon leur ethnopharmacologie, c'est-à-dire selon leur pharmacologie vue sousl'angle de lapensée médicale étudiée. Carl'étuded'une pharmacologie vernaculairelaisseapparaître, au-delà de ses as¬

pects théoriques, un mode de pensée reflet d'uneculture donnée quirepositionne lesplantesdansleur contexteglobal.

Dans lecasde la médecinetibétaine,la pharmacologierelèvede fondements philosophiques bouddhiques sur lesquels la pratique médicale repose. Ellenousrenseigne surlesreprésentationsdel'u¬

nivers, exprime l'interdépendance des éléments, le rapport de l'hommeàla nature et lasimilarité de constitution entre microcosme et macrocosme.Lapharmacologie tibétaineestintimement liéeaux

cinq éléments cosmo-physiques(sa,chu, me, rlungetnam-mkha).

Cesélémentssont lescomposantsfondamentaux du corps humain etdel'univers, quelquefois compris àtortlorsqu'onles traduitpar terre, eau, feu,airetespace(éther) engardantleursenscommun.

Enfait, chaque substanceestun ensembledetousleséléments,l'un d'euxétant prédominant. Pour l'être humain, cetteprédominance produit certaines caractéristiques physiques et émotionnelles. La similarité avec l'universexprime les influencesthéoriques récipro¬

ques entre homme et environnement. La pharmacologie des sub¬

stances ingérées, médicaments ou aliments, est fonction de trois catégoriesd'agents : les sixsaveurs de bases (acide, sucré, salé, amer, astringent et épicé), les trois saveurs post-digestives (sucré, acide et amer) et les huit potentialités des drogues (lourd, léger, onctueux, âpre, froid, chaud, émoussé et incisif)3. Ces différents goûts etpouvoirs intrinsèques résultentd'une combinaison partic¬

ulière des cinq élémentscosmo-physiques4et agissenten fonction sur le systèmephysiologique.

La physiologiehumaine estfondée surunethéorie humorale, très proche del'ayurvéda,qui sous-tendtouteslesactivitésorganiques ou mentales. Lestrois humeurs[nyes-pa:rlung, mkhris-pa etbad- kan),traduites respectivementparvent(pneuma), bile et phlegme, sontchacune diviséesencinqcatégories distinctes caractériséespar des propriétés propres. Elles sont considérées comme les unités fonctionnellesphysiologiquesdescinq élémentscosmo-physiques :

rlung(vent)donnantrlung (vent), me(feu)donnant mkhris-pa (bile) et l'association de sa (terre) et chu (eau) donnant bad-kan (phlegme). Or, la maladie est considérée comme un déséquilibre dynamique des trois humeurs (c'est-à-dire un déséquilibre initial descinqéléments)qui,«siellessontdesentitésphysiologiques,sont autant d'agents pathogènes redoutables» (Meyer, 1988). Les

médicaments ou aliments administrés visent alors à rétablir l'équilibre humoral. Chacun possède des qualités conséquentes à l'augmentation ou à la diminution des cinq éléments et des trois

L'étiologie est présentée selon deux types de causes : proches et éloignées (ou fondamentales)6. Les causes proches sont les trois humeurs et leurs modifications selon le schéma d'accumulation, d'érection et de sédation. La phase d'érection est la phase pathologiquedéclenchée,après accumulation, pardesfacteursfa¬

vorablesliésau mode devie,àladiététique,auxvariationssaison¬

nières,aux répercussions des mauvaises actions antérieures, à un traitement erroné, aux poisons et aux esprits maléfiques (Meyer,

1988). Les causesfondamentales correspondentauxtrois poisons mentaux (attachement, haine et obscurité mentale) qui, selon les conceptions bouddhiques, sontle fruitde l'ignorance (ma-rig-pa), au sens où l'individu à une perception erronée de la réalité phénoménale7. L'attachemententraîneuneaggravation du vent, la haine entraîne uneaggravationdela bile et l'obscurité mentaleag¬

grave le phlegme. Les remèdes procurés permettent de traiterles

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maladiesenagissant directement surlescausesproches,sanspour autantavoiruneactionsurlespoisons mentaux (Cantwell, 1995).

La cure absolue des trois poisons, etdonc de la maladie, corre¬

spond à l'Eveil et s'obtient par une pratique religieuse boud¬

dhique8.TseringPhuntsog,praticien ladakhi de médecine tibétaine, souligne que « la seule solution pour cessertoute maladieestde venir à bout de l'ignorance, d'atteindre l'Eveil. Pour cela il faut réaliser que rienn'a d'existenceen soi, que toutestvideetimper¬

manentparunepratique assidue des enseignements du Bouddha9.

Lesmédicamentsnepeuventpaséradiquerlespoisonsmentaux,ils sont surtout actifs sur les effets des causes immédiates [proches].

Mais les amchi[praticiens de médecine tibétaine] devraient con¬

seillerleurspatientspourlesaider àréaliser la nature essentiellede leurmaladie.Quand unmalade vient consulter avec un rlungtrès haut[high rlung],j'essaiede luiparlerdudésir et del'attachement, de lui "faire prendre conscience". La pharmacologie tibétaine révèle le rôle du religieux au sein du médical maiséclaire égale¬

ment le médical comme véhicule des doctrines bouddhiques. La médecinetibétaine justifieparun raisonnementpharmacologique scientifique, dans la mesure où «les phénomènes observés sont compris selon des liens qui les unissent et démontrent leur co¬

hérence» (Meyer, 1988), la théorie d'interdépendance et la con¬

ception de la vie non spirituellement réalisée comme souffrance, caractéristiquesfondamentalesde lapenséebouddhique. Lechem¬

inementanalytiquepartantde laplante commeobjet d'étudenous informe finalement sur les relations entre médecine tibétaine et bouddhisme10, et illustre clairement la façon dont une étude ethnopharmacologique peutéclairercertainsaspectsde la culture.

La plante est entourée d'autres éléments indicateurs de l'environ¬

nementreligieux. Selon la penséetibétaine, l'origine même de la médecinetibétaineetdecertaines plantesutilisées repose sur des conceptions divines. La médecine tibétaine possède des origines sacrées, communément attribuées aux enseignements de Sangye Menla,le«BouddhaMédecin». Cettedivinitéestconsidéréecomme uneémanation thérapeutique du bouddha historique Shakyamuni qui exerçaitsapratiquesur levasteempire indien d'Ashoka avant de transmettre lasciencemédicale, incluant la pharmacopée, etles enseignements spirituels bouddhiques au Tibet au Vile siècle.

L'enseignementde l'art médical tibétain estconsigné dans un ou¬

vrage fondamental, le Rgyud-bzhi, ou QuadrupleTraité Médical, dans lequel lesréférencesau religieuxsont explicites11. Les textes indiquent égalementqu'un certain nombrede plantes médicinales sont d'origine céleste, tel que les divers myrobolans, (a-ru-ra, Terminalia chebula Retz., skyu-ru-ra, EmbellicaofficinalisGaertn.

et ba-ru-ra, Terminalia belerica Roxb.) ou le safran [gur-gum, Crocus sativus L.)12. Il existe également d'aprèsClark(1995) des fleurs etcertainstypes decalcite ou d'exsudats minérauxqui, en plusdeleursvertus revigorantes,facilitentlesadeptesde lamédi¬

tationetlesyogis àvivre de peude nourriture et às'adonner à leur pratique avec de meilleures dispositions mentales. Le divin inscrit

sonempreinte danslescomposantesde lapharmacopée.Cartoute chosematérielleestconsidérée commematièreàguérir, commel'a préciséleBouddha lui-même,ou enfonction des récits,Jivaka, son médecinpersonnel. L'histoire raconte que lebouddha historiquede¬

manda àsesdisciples de partirdans la nature etde lui rapporter quelque chose qui ne possède pas de valeur médicinale. Aucun d'euxne leput,cequi attestapar l'expériencedu« monde comme médecine»(Clark, 1995).

L'enveloppe culturelle et religieuse entoure également les plantes dans les actes qui forment le quotidien de Yamchi. Le divin peut alorsvenirrenforcersonexercicemédical, commel'exprimelacol¬

lectedesvégétaux. Il s'agit d'une opération ritualiséequi possède une signification symbolique et laisse émerger le religieux. Elle permetd'augmenter lepouvoirintrinsèquede la plante lorsqu'elle estréalisée lorsde jourssaints13etestaccompagnée de récitation de montra^4. Les montra sont destinées à renforcer l'action des plantes grâce à l'aide divine de Sangye Menla, ou à utiliser ce guidecosmiquepourleslocaliser15. Ces«actesdeparole»nesont pas seulement destinésà figurer l'immatériel, ilssontmatière eux- mêmes. Ilsopèrentcar la divinité, ou les puissances surnaturelles, sont forcéesà être présentes. Evidemment la collecterépondégale¬

ment a des exigences biologiques (état de floraison ou de bour¬

geonnement, périodes propice à la collecte de racines, etc.) qui, parconnaissanceempirique,permettentde préleverles plantesou leurspartiesà leur étatphysiologiqueoptimalpour l'usageprojeté.

Cetteconception fut souvent décrite comme des expériences inlass¬

ablement répétées puis entrées dans la tradition (Lévi-Strauss, 1962). L'utilisation des plantes dans la préparation des médica¬

ments est également une forme particulière de l'expression re¬

ligieuse. L'amc/i/ récitedesmontraenlesréduisanten poudreeten préparant sescompositions. Lorsquela préparation est finie, il les imaginetransforméesennectar et dotéesd'un pouvoirsupplémen¬

taire.Lesmédications deviennent alorsdesoffrandes religieuses. Le thérapeuteenprend unepartiequ'ildéposesur sonautel, ouoffre symboliquementà SangyeMenla, et une autre partie qu'il ingère afindebénéficierlui aussi des bénédictionsdontsontpourvuesles plantes devenues médicaments16. Le thérapeute utilise la plante pourcréerunobjet(lesmédicaments)quiexerceen retoursonac¬

tiondivinesurl'individuàl'originedesacréation. Vamchiladakhi TseringTondup,de Lingshed,nousinforme surunautre aspectfonc¬

tionnel de l'ensemble rituel :«la cérémonie augmente les pouvoirs du traitement, elle purifie les choses négatives ou impures. S'il manque une ou deux plantes [dans un traitement], la cérémonie permet uneactionidentique».Cescommentairesconfirmentlerôle potentiel du religieuxdans la thérapeutique. Lacérémoniedote la composition médicamenteused'un pouvoirthérapeutique supérieur mais ellepermetégalement deremplacerlesplantesmanquantes et éclairesadimensionthérapeutiquepropre.

Les plantes révèlentdanscesdeux exemples la force de la dimen¬

sionrituelle commeadjuvantauremèdephysique.Lamatière végé-

Dessourcesdusavoir aux médicaments du futur From the sourcesofknowledge tothemedicinesofthefuture

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taieesten faitlepointdeconvergence desefforts tendant às'ap¬

proprierla puissance,quel'oncontraintàagirpardesactescodi¬

fiés et culfurellementsignificatifs. La plante apparaîtcomme sym¬

bolique de l'acte médico-religieux. Il est alors possible de voir la plante,au-delàsa dimensionbiologique,comme vecteurprincipal d'une efficacité symbolique du traitement procuré et comme représentation physique de manifestations culturelles immatérielles.

La relation qu'entretien le praticien aveclevégétal assureson lien avec le divinetdans une certaine mesure l'en rapproche. La ren¬

contre deYamchiavecleBouddhaMédecinau travers decestech¬

niques rituelles et religieuses «suggère, affirme et confirme la présence brillante d'une description du réel dans de nombreux textes de tradition Mahayana» (Birnbaum, 1979), dont certains textes médicaux. La plante catalyse les actions du praticien, réaf¬

firme l'appartenance au groupeet transmet un héritage commu¬

nautaire.Elledevient unerelationagissant au moyend'un dialogue détourné.Levégétalestunvecteurdel'identitéculturelleets'intègre ainsidansun projetde société.

Plantes et modernisation au Ladakh

Lesplantes sont à la fois menacéesparune sociétémodernisanteet nécessairesau maintien potentiel de la santé de la vastemajorité de la population. La matière végétalese présentecommegarante de la santépubliquedansleszonesrurales et non biomédicalisées du Ladakh.Or, lemonde socialenchangement entraîne également desconséquencessur lemondebiologique. Laplantefiltrenotrere¬

gard etdévoileles changementsde la sociétéladakhie. Ladégra¬

dationenvironnementale,nousentendonslacausalité socialed'une dégradation biologique, l'émergence de la biomédecine (arrivée de nouvelles techniques de soins, concurrence avecla plante), l'oc¬

currence de nouvelles pathologies (épidémiologie socioculturelle) ou le développement du tourisme et des infrastructures associées sontautantdeparamètresquinouspermettentd'observerlaplante comme lieu de rencontre entrelebiologiqueetlesocial.Maisavant d'allerplus loin, ilestnécessairedeconnaîtrecequiformelesup¬

portà notre analyse : leLadakhcontemporain.

LeLadakh fut exposé au cours de sonhistoire, du faitdesa posi¬

tion nodale, à diverses cultures ou populations lors des contacts établis aveclesmarchands de la route duselou lorsdeséchanges commerciaux avec le Tibet. Il est décrit par les auteurs du XVIIIe sièclecommeunimmensecaravansérailoùsecôtoyaientdes marchands de contrées multiples et de cultures disparates (Dollfus, 1989). L'invasion du Tibet par la Chine en 1959 a mis fin aux échangescommerciaux, culturels et éducatifs entrelesdeux régions d'allégeancereligieusesimilaire(ibid.).Maisc'estaucontact de la sociétéindustriellemoderne quelebouleversementest leplus netet lechangement le plusradical. Lesdeux facteurs de changementso¬

cialprédominants au Ladakh sontletourisme17 etl'arméeindienne (installéedès 1948 etparticulièrementen 1962, dates respectives

des conflits indo-pakistanais et sino-indien). Ils forment lemoteur principaldel'économielocale et favorisentleprocessusdediffusion culturelle.Lesaménagementsterrestres, issus des diversespolitiques de développement du Nord-Ouest himalayen indien, forment le troisièmeangle dece triangle decausalité et sonten relation de dépendance étroite avec les deux premiers facteurs. La mise en placed'unréseaudecommunication terrestreetle développement conséquentdes modesde transportont entraîné une modification durapportàl'espace.Or, l'espacegéographiqueestunespacede relationset cesmodificationsontfavorisé uneplusgrande interac¬

tion sociale. Lerapprochementdes hommes a entraîné une multi¬

plicationdesrapports,quisesontdiversifiéset intensifiéspourcon¬

tribuerà la«stimulation générale»dontparleGuyRocher(1968).

LeLadakhestaujourd'hui reliéparlesterresà l'Etat de l'Himachal Pradeshetà lavillecachemirie de Srinagar.Lalevéed'une presque totale inaccessibilité a permis l'arrivée de nouvelles denréesetde matériaux divers, ainsi que denouvellestechnologies, mais surtout lamiseenplaced'uneéconomie de marché dans laquelle lasociété de subsistance et les systèmes d'échanges traditionnels ont été sérieusementébranlés.L'argent,qui existait cependant auparavant, pritde la valeur. L'intérêt despopulations animéespar de nouveaux désirs entraîna alors la nécessité de développer des moyens d'obtenirces roupiesetau-delàcesymbolederéussitesociale. Le développement de structures biomédicales etd'un système d'édu¬

cation, calqué sur une société aux fondements technologiques et économiques plutôt qu'écologiques, participent également à l'émergence de la société moderne. Le Ladakh connaît alors un glissementdes pouvoirs locaux des cadrestraditionnels vers ceux de lamodernitéqui concernetoutes lessphèresde lasociété etno¬

tamment la pratique médicale traditionnelle dominante. Les con¬

séquences sont un réalignement des valeurs sociales, imbriquées dansl'enchevêtrementcomplexedesfacteurs delamodernisation, ainsiqu'unimpactenvironnemental notoire au traversdesquelsles pratiques autochtones de santé setrouventmodifiées.

Lesplantes:entre enjeux biologiquesetenjeuxsociaux

Laplante commeobjet social formeunrenversementdeperspective carl'origine duregard que nous portons surla société part d'un objet fondamentalement biologique. Les enjeux biologiques véhiculés parla plante sont une question de santé publique, no¬

tamment dansleszones isoléesdu Ladakh. Cependantles raisons concernéesparleschangements danslesmodalitésd'approvision¬

nementen matièrevégétale, de préparation médicamenteuse, de rétributiondespraticiensou deprescriptionaux patientssontpour la plupartdes raisonssociales, et leur répercussion influentpoten¬

tiellementl'univers thérapeutique. L'observationdu monde au tra¬

vers de la plante élargie notre spectre ethnopharmacologique et révèleparconséquentlapharmacopée comme une certaine forme d'expressionsociale.

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Approvisionnementenmatièrevégétale

Laconstruction des infrastructures routières à entraînédes modifi¬

cations de l'approvisionnement. Elle assure notamment la liaison entreLehetManalidansl'Himachal Pradesh etpermet uneimpor¬

tation aisée de plantes utilisées en médecinetibétaine etabsentes du Ladakh. Les amchi peuvent également atteindre le col de Rothang,lieuréputépour la diversité etl'abondance de la flore,en seulementdeux jours debuscontre presque trois semaines à pied.

Ils y trouveront des végétaux inexistants au Ladakh. Mais le dé¬

placementdanscettequêtedesplantespossèdeégalementdescon¬

séquences négatives carle praticien s'absentede la maison pour unequinzaine de jours etôtelafamilledesacontributionauxac¬

tivitésagricoles. Lespraticiensrurauxsont tous desfermiersou des pasteurs et leur devoir correspondant reste présent malgré leur double activité. Lespraticiens collectent égalementleursplantesau Ladakh,danslesmontagnesenvironnantes,ouleséchangent entre villages. Mais ladégradation environnementale s'intensifie etex¬

ercesa pression surla disponibilitévégétale. Lesroutes ontégale¬

ment des effets néfastes sur les plantes du Ladakh car elles con¬

tribuent à l'augmentation en nombredes engins motorisés etdes visiteurs. La pollution croissante et le développement du tourisme exercentune pressioncertaine sur l'environnement. Lestouristesse déplacent avec des animaux, pouvant aller jusqu'à plusieurs dizaines de chevaux ou demulespourunseulgroupe, quisontau¬

tant depattes pourletransportdes sacsàdosetde lanourriture.

L'impactenvironnemental estnotamment ressenti chez les popula¬

tionspastorales.Lesvacanciersdorment dans lescampementsnon occupés, identifiés pardes abris de pierres dans lesquels les no¬

madesgardentleurstroupeaux.Or, lesanimauxqui accompagnent les touristes profitent de la halte pour se nourrir. C'est là que le problèmesepose en termesenvironnementaux.Lebétailsedélecte despâturagesquisont supposésrecevoirlesanimauxdesnomades etchaque jourcesdizainesd'animauxforment auboutdesmoiset de l'enchaînement des groupes des centaines de têtes qui ne pensent qu'à une chose, à manger. Amchi Motup, de Kharnak, nousditàcesujet: «Leproblème avec lestouristesc'estqueleurs animaux mangent l'herbe denos animaux.(...)L'an passé [1997]

nous avons été obligésd'acheterdu fourrage pournos bêtes afin depasser l'hiver. Nous en achetons toujours un peu mais main¬

tenant c'est beaucoup plus. Nous sommes allés voir le D.C.

[Deve/opmentCouncil] pour annoncerce problèmeet ils nousont ditsdedemanderplusd'argent auxtouristesqui passentdansnotre campement. Nous demandonsdéjà vingt roupies par tente, mais vingtroupiesça ne paie pas la nourriture pour une seule bête, et nous enavonsdes dizaines. (...) Maintenantil faut quej'ailleen¬

coreplus loinpourtrouvermesplantes[médicinales]».Acela s'a¬

joute l'apparition récente de «collecteurs professionnels» (reven¬

deurs,structuresmédicalestibétained'envergure...)qui renforcece phénomène. Il s'agit notamment du Men-Tsee-Khang de Dharamsala(TibetanMédical and Astro. Institute,TMAI)quiest un des premiers producteurs mondiaux de médicaments tibétains.

D'après Thinley,leTMAIa multipliéparvingtcinqsaproductionde médicaments etfaitactuellement faceauxenvironnementalistesqui l'accusentd'épuiserles ressourcesnaturelles, notammentcelles du Ladakh (Thinley, 1997). Tenzin Cheudrak, amchi personnel du DalaïLama, reconnaît:«à monarrivéeen Inde,lesmédecinstibé¬

tains disposaient de moins de quatre-vingt substances pour fabri¬

quer les remèdestraditionnels.Jeme suisatteléà la recherche de matièrespremières,qui sontpourlaplupartenvoyéesduTibet etdu Ladakh» (citéparTager, 1999). Ilestimportantdenepassous-es- timer la collecte exercée parlesamchi ladakhis eux-mêmes et ses conséquences sur la disponibilitévégétale. Selon un représentant duDépartementdesForêts,les amchi seraientune des causes ma¬

jeuresdel'extinction de certaines plantes médicinales. Ilscollectent généralementlesplantessansprendregardeàlaissersurplace un nombre suffisant à leurreproduction.Laplante entièreestprélevée, souvent arrachée, même lorsqu'une seule partie est utile. Les racinessontextraitesparfoisinutilement et la repoussedevientalors impossible.D'autrespraticiens locaux collectentplusque nécessaire pourleurpropreexercicemédical. Ilsprofitent alors de l'avènement du marché économique et de la demande croissante en plantes médicinalespourservirleursintérêts etbesoinsfinanciers.

Lefaitsocialestunesourcede changementsurl'environnement plus rapidequenel'est la nature elle-même. Ledéveloppementurbain, l'expansiondémographiqueetletourismeviennent aupremierplan de ladégradationenvironnementale, bienavantlesfacteursdepol¬

lution ou les catastrophes naturelles. Certaines zones, construites, cultivéesousimplementparcouruesparuncheptellocalplusdense n'offrentplus les plantes qu'elles possédaient. Il sedégage de cet écueilunschémaexprimantlepassagedel'appropriationde lana¬

ture parl'homme à uneexploitationdela natureparl'homme. La relation entre hommes et naturesemodifie dansl'élande la moder¬

nité(Eder, 1996), etla pression nouvellement exercéesur le milieu affecte àuncertaindegré ladisponibilitévégétale.Ilexisteparcon¬

séquentdesplantesendémiques disparues ou raréfiées commel'at¬

testentcertainsamchi qui reconnaissentqu'avantledéveloppement deleurvillagedes plantesétaientà leurdisposition dans lesalen¬

toursimmédiatsetne le sont plusaujourd'hui18.Lescommentaires deAmchi TashiBoulou,de Hanu Gongma,recueillisen 1998, ré¬

sument cespropos etapportentuncomplémentd'information :«Les plantessont plusduresà collecteraujourd'hui carje suisplusvieux etdonc la marcheenmontagneestpluséprouvante».Jeréoriente ladiscussion surunchamp environnemental. Ilcommente: «Ah !, enfaitellessont plusfaciles à trouver,cardenosjoursilexiste des magasinsqui vendentdes plantesà Leh». Jenote etlequestionne à nouveauenm'efforçantd'êtreclair. Ildit:«Non,enfaitellessont plusdures à trouver surleterrain car j'ai presque 60ans etmes connaissances sont de plus en plus vastes. Je connais plus de plantes etdonc ai plusdedifficultéspourlestrouvertoutes.Parfois jedoisallerjusqu'àManali [deux jours etdemidebusde sonvil¬

lage].» Je réitère la question et il répond : «Les plantes ici sont moins nombreusesennombreet enquantitéqu'auparavant carily

Dessourcesdu savoirauxmédicamentsdufutur From the sourcesofknowledgeto themedicinesofthefuture

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a plusde monde,plusde cultures et debétail». Cetamchiprésente de façon claire et synthétique les aspects démographiques, économiques, environnementaux et le vieillissement de la popula¬

tion de praticiens. Autantde paramètres de la modernisation qui émergent dans une étude considérant initialement les plantes médicinales.

Mais les modifications environnementales affectent également les

amchipar l'essordes prixde matières premières, potentiellement consécutifs à la raréfaction des plantes. Les diverses espèces du genre Aconitum en sont un exemple évocateur. Cette plante est seulementprésentedans quelquesrégions du Ladakhdontcertaines sontdel'avis du responsable du département de médecine amchi, Tsering Phuntsog, secrètement gardées et non divulguées.

Cependant, ce même interlocuteur nous dit en voir de moins en moins danslesmontagnes etqu'à sasurpriselesprixde certaines espèces d'Aconitum ont étonnement augmenté à New Delhi19.

L'hypothèseque nous émettons iciliel'augmentation desprix àla raréfaction des plantes au Ladakh et dans d'autres régions hi- malayennes. Le lien de cause à effet n'estsans doute pas aussi linéairemais larelation entrecesdeux facteurs peut être suggérée.

L'augmentation desprixà NewDelhiest immédiatement suivie de celleà Leh.Or,les amchisefournissenttous,en supplémentà leur collecte, auprès deséchoppes dematière médicale et l'augmenta¬

tion des tarifs forme une entrave à leur pratique.

L'approvisionnement en plantes éclaire la dégradation environ¬

nementale qui entraîne par principe de réactions en chaîne des conséquences importantes au niveau micro-économique et poten¬

tiellesentermede couverturetraditionnelledesanté.

L'évolution la plus conséquentetouchant la médecine tibétaine au Ladakhestliéeà l'économie de marché.Lehestaujourd'huipourvu enéchoppesde plantes quisontfréquentéespartous lesamchi.Ces magasins sont installésdepuis le débutdes années 1990 etcon¬

naissent un engouementnotoire. Les amchides zonesrurales col¬

lectenttoujours unepartiedeleursplantesalors que ceuxdeszones urbainesnes'enremettentqu'auxéchoppesde lavillecentrale.Les

amchipeuventtrouver danscesmagasinsdespartiesde plantes, de lamatièremédicale animale,despierres médicinales etdespilules confectionnées. Ces magasins provoquent des effets tant positifs quenégatifs surlapratique médicale locale. Ilsobligentles amchi à payer leur matière première alors que rares sont ceux qui font payerlecoûtglobalde leur traitement.Ceséchoppesproposentdes

prixfixes etleur récentessora provoqué l'émoi despraticiensqui pourbeaucoup s'étaient habitués à la facilité de ladistribution en boutique. Les amchiqui fontleurstockpour l'hiverdecettefaçon attendent souvent ladernière heure et certains prennent le risque de seretrouver bloqués par lesneiges etdonc sans aucun traitement pourleslongs moishivernaux. Cetincidents'estproduitenoctobre 1998 par l'effet de variations climatiques (chute de neiges avancées) et a entraîné l'intervention du gouvernement pour ap¬

provisionner un village. Cependant, les échoppes médicales pro

posent des plantesqui sontabsentes du Ladakh etfacilitent donc l'exercice médical en fournissant tous les ingrédients de la phar¬

macopée. Car la médecine tibétaineestune synthèseoriginalede divers systèmes médicaux et, malgré les substitutions de nom¬

breusesplantesnonendémiquespardesplantes indigènes (Meyer, 1986), il existe certaines plantes qui ne sont pasoriginaires de l'HimalayaetduLadakhenparticulier20.Ellespeuventprovenirdes régions sub-tropicales de l'Inde ou de la Chine, telles certaines Ménispermacées. Ces magasins s'inscrivent comme manifestation de l'économie de marché et se substituentau système d'échange traditionnel. L'approvisionnement en plantes médicinales connaît doncdes modalités nouvelles,concomitantesaux changements de la sociétéladakhie, et présente la plante non seulementcommeun enjeude santémaiségalement comme partiedu nouveau marché économique.

L'identificationdes plantes, en raison des nouvelles présentations proposées en magasins (produits en partiesou en poudre), peut apparaîtrecommeunobstacle supplémentaire, notammentpourles jeunes amchi. Mais les praticiens ont développé un artde la re¬

connaissance des produits grâce aux caractères organoleptiques et, selon eux, le problèmesesitue plutôt au niveaude la substitu¬

tion de plantes dans les compositions médicamenteuses. Les moti¬

vations sont généralement financières,lerevendeur remplacerades plantesonéreuses pardes produits végétaux moinschers pouvant conduire danslemeilleurdes casàuneinactivité,voire à unetox¬

icitédestraitementsordonnés. Leremplacementpourra êtrefait par desplantesapparentées ousimilairesd'apparenceoude goût.Or,

siceraisonnement peut êtreacceptable, au regard de la chimiedes plantes, quoique dangereux (entredeux Aconitum, l'un sera tox¬

iqueetl'autre non),dans le systèmetibétain chaque plante, voire partie de plante, possède des caractéristiques pharmacologiques propres (goût, goûtpost-digestif et potentialité), également fonction de ses lieu et condition de croissance, et rien ne garantitqu'une planteapparentéeaitlesmêmespropriétés.

La pénurie de plantes pourcertains amchi entraîne d'autres con¬

séquences.QuandYamchinepeutselesprocurer,iléviterad'aller visitersespatientscar il prendraitalorslerisque denepouvoirles traiter.«Jen'aipasassezde plantespourtraitermespatients.C'est pourcela quej'évited'allerlesvoir. Mais euxpensent que jesuis fainéant, quejeneveux paslestraiter»,nousditSonamDorje,de Lingshed,en 1998.Cetteremarque exprimelejeuparadoxalentre devoirmédical etdifficultés pratiques, \lamchigagneen discrédit en ne pouvant assumer son devoir médical etcontribueinvolon¬

tairement à dévalorisersa pratique. Leproblèmede l'approvision¬

nementau Ladakh seramifieenplusieurs brancheset s'étendaux domaines sociaux,environnementauxetéconomiques.

Préparationmédicamenteuseetdélivrance

La matière médicale tibétaine décrit2294 substances divisées en

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huit catégories : matières précieuses médicinales, terres médici¬

nales, pierresmédicinales,essencesmédicinales, médecinesthang, droguestiréesdesarbres,drogues tiréesdes êtresvivantset lessim¬

ples (Meyer, 1988). Elles sont administrées sous diverses formes galéniques:décoctions concentréesou non, poudres, pilules, pâtes, beurre médicinal, cendres médicinales, vin médicinal, pierres et composés végétaux. En plus des substances naturelles le médecin peutavoirrecoursàdestechniques externestelles que la saignée, lamoxibustion,lesbainsmédicaux danslessourcesd'eauchaude, le massage, les applications externes, l'aiguille dorée et la petite chirurgieendernierressort.

Lespilulestibétainessontrelativementpeufabriquéesparlesprati¬

ciensruraux. Les raisonsévoquéessontlemanque de temps oude matériel approprié.Les amchisontprincipalement occupésparles travaux agricoles et bénéficient d'une main d'euvre domestique diminuéeparlascolarisationdesenfants etledéplacement decer¬

tains membres de la famille dans les zones urbaines21. Certains amchiseplaignentdenepasposséderl'équipement nécessaire. Ils font allusion danscecasaux équipementsplusmodernesquel'on peuttrouver àLehou àDharamsala. L'introductiondestechnologies entraîne des modifications dans la préparation des plantes et surtoutdanssonrendement. Lespraticiens de Lehréalisenten peu de temps et avec plus de facilité des quantités multipliées de médicaments.Lescommentaires suivants illustrentledécalage entre milieu ruralet urbain. «Je prépare mespoudres en écrasantmes plantesà l'aidede deuxcailloux. C'estfatigantet le résultat n'est pas aussi bon qu'avec des machines. Je sais que l'on peut les trouverà Leh, jeles aivues. Il m'en faudraitunecarun jourjene pourrai plusfaire de médicaments»,Amchi Motup, Kharnak. Cet amchi précisequ'ilneconnaîtaucun deseshomologuesrurauxqui possèdede tellesmachines. Il les a seulement vues à Leh,chef de district.Saremarqueexprimebien la spirale de consommation qui s'opère lentement. Latechnologie n'estpas une nécessitépourdes méthodesdepréparationcentenaires et c'est plutôten termestech¬

niques que le problème devrait se poser. Certains amchicomme leursconcitoyensladakhis désirent du nouveauetdela facilité,sous peinede « ne pluspouvoirfaire sans. » Lesamchi du milieu rural dispensentdonc surtoutdespoudres etdesformulations de plantes sèches.Or, l'observance decestraitements n'est pas aisée carles posologies sont contraignantes et la durée du traitement, comme l'obtentiond'une guérison symptomatique, est, selon les Ladakhis, bien pluslonguequ'en biomédecine. Lespatientstrouventparcon¬

séquenten la biomédecineun confortsupplémentaire etun condi¬

tionnement qui répondaux nouvelles normes (emballage plastique, propreté,délivrépardespraticiens éduqués...).Lemodèlemédical importé a entraînéuneenviede «guérison rapide» et propose une image médicale neuve etmodernisante qui déclasse la thérapeu¬

tique vernaculaire. L'inclinaison à la modernité et à la rapidité, provoquéeparl'amorced'unchangement durapportau temps,en¬

traîne également une négligence des premières phases du traite¬

ment22(recommandationsalimentaires et comportementales), mais

aussidel'interrogationdu patient23.L'instauration d'uneidéologie biomédicaleforceYamchià donneruntraitement physiqueau pa¬

tient.Ildérogeauxrèglesde progressivité énoncées danslestextes médicaux. Letraitement directement prescritestàbasede plantes qui obtiennentdèslors un nouveau positionnementtemporel dans lathérapeutique.

La formulation galénique en pilules est censée permettre une meilleure conservationdesmédicaments.Or, au Ladakh,régionex¬

trêmementsèche et froide, la conservation des plantes sèches ne pose pasde réel problème. En tous caselle n'est pas la première motivationpour réaliserlespilules àdomicile. Lesplusvieuxamchi disentqu'ilslesfabriquaient auparavantmaisqu'aujourd'huiils les achètent à Lehen cas de besoin urgent. Ils illustrent à nouveau le rôledesmagasinsdistributeurs. Certainspraticiensaffirmentque la préparation des pilules est unedépense de temps considérableet qu'ilspeuventtraiteravecdescompositions médicamenteusesiden¬

tiques sous forme de poudre sans que le patient n'yaccorde de grande importance ou que l'efficacité du traitement n'en soitaf¬

fectée.Maiscettedernièreaffirmation n'est pasle reflet destextes médicauxcarlesplantessousforme de pilulessont censéesêtreutil¬

isées lors de moments particuliers d'une évolution pathologique.

L'efficacité dutraitement, selon lathéoriemédicaletibétaine,devrait enêtre conséquente.Contrairement àceque nousditcetamchi, il semble queles patients soientsensibles à ladélivrance de pilules.

La preuve de ce contre-exemple est que lorsque les amchi sont pourvus detelstraitements, médicaments"fabriquésmaison" ouen apportexogène,cesontceux-làquisontdemandésparlespatients etentouslescasdélivrésenpremier ressortparlesthérapeutes. On pourraitsuggérer iciquelespilules soient uneformegaléniqueplus prochedesdiversconditionnementsbiomédicauxetqueleur usage soit plus aiséque celui des poudres. Le décalageest net entre la théorie, le discoursdesamchiet lapratique. Ilestapparu parune étude des registres de délivrance d'un centre rural de médecine tibétaine queles pilules, fournies parune ONGaprès évaluation desbesoinsparlespraticiens concernés,ontétédistribuéesendeux semaines etdemi seulementpourun stockde six moisinitialement prévu. A la fin de ladite période de nombreuses plantes sèches restaientaux amchi. Cesrésultats reflètent lespréférences dans le type de médicamentsà délivreretrendent comptedesattentesdes patients. D'ailleurs, le support pharmaceutique du département gouvernemental de médecineamchinecomprend quedesproduits conditionnés sous forme de pilules. Or, le gouvernement véhicule également uneimage de progrès et de modernité et représente la manifestationdesnouveaux pouvoirs danslechampdesthérapies traditionnelles.Lesproduitssousforme de pilulesincarnentparcon¬

séquent uneimage supérieureaux autres formes, renforcée parle faitque lamajoritédestraitementsdélivrésdanslescliniquesamchi de Leh, dontla forme s'apparente aux cliniques biomédicales, est principalementsous forme de pilules. Vamchi, gouvernemental ou non, quidélivrecetype deproduitassure son statutau seinde la communautécar il s'accordeauxcadres modernes etrépond aux

V§v9v Dessourcesdusavoir aux médicaments du futur From the sourcesofknowledgetothemedicinesofthefuture

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nouvelles formes d'une société en mutation. Les plantes, leurs formes et formulations physiques jouent de symboles avec les représentationsdu monde social.

Modalitésderétributiondespraticiens

La société ladakhie a su apporter, au cours de son évolution, les réponses nécessaires pour permettre un exercice optimal de l'art médical tibétain.

A

l'époque où le Ladakh était un royaume, les

amchisevoyaientoctroyerledon deterrescommesalaire etun des statuts sociaux les plus élevés. Plus tard, lesvillages ont étédotés d'un«champ des médicaments»dans lequeltouslesvillageoistra¬

vaillaientàtour de rôleetpermettaient ainsi àYamchidedédierla majeure partiede sontemps à rassemblerlesmatières premières, préparerdesmédicaments etconsulterlespatients. Lesamchi, etce seulementdans certaines régions, étaient également exempts des tâchescommunautaires (déplacement à laville principale, travaux communs, transport des combustibles naturels...) dans un objectif identique. Larétributiondes amchiétaitdonc basée sur unecohé¬

sionétroite de la communauté.Lapharmacopée, au travers del'ex¬

ercicemédical, canalisaitalors lefluxdeséchanges.De nos jours, ladélivrance de plantes et de formulations dérivéesestinscritedans un systèmederétribution traditionnelrépondantau schéma dudon et du contre-dontel quedéfiniparMarcel Mauss. Le praticienad¬

ministre ses traitements contre travail du patient guéri dans ses champs oucontre quelques denrées.Mais l'économie de marché a modifié lanature del'échange etlepaiementdesmédicamentsen roupies se généralise, autant que le travail du patient dans les champs de Yamchi s'amenuise. La modernisation du Ladakh en¬

fermelesgensdansleur noyaufamilial,conduit àunindividualisme grandissantetun relâchementmarquédeslienssociaux. Lesréper¬

cussions portent logiquement sur le soutien communautaire des amchi.

Les amchides villages doivent aujourd'hui acheter une partie de leurs plantes, se rendre à Leh pour s'approvisionner, voire à Manali,etsontdonc dansl'obligationdeposséderdel'argent pour confectionner leursmédicaments. Lespraticiens rurauxse trouvent actuellement dans une impassecar ilsdistribuentdesmédicaments quasi-gratuitement24 et n'obtiennent une partie indispensable de leur matièrepremière que contre finance. Ilsdisentne pouvoirde¬

manderdefaçon expresse del'argentsouspeinedesevoir traiter de pingre ou de renier la tradition, mais doivent, ou devraient, porter secours à tout patient pour tenir leurs engagements médi¬

caux. Car si le système de don et de contre-don est «en réalité obligatoirement fait et rendu» (Mauss, 1950), il est en théorie volontaire et délibéré et la demande ne peut être exprimée sous peine de sortir du système d'échange et parconséquent de l'an¬

crage traditionnel. Certains praticiens tels que Tsultim Gyatso ne renoncentcependant pas à intégrer leurpratiquedans lenouveau modèle social. «La faute n'appartientpas auxvillageois mais aux amchiqui ne veulent pas demander. Les villageois serventqu'au

jourd'hui lemoyen detransactionestl'argentets'ils le veulent,ou en comprennent l'utilité finale, ils peuvent payer. C'estdonc aux amchi delesinformer. (...)Lesamchinesaventpasutiliser leures¬

prit pour utiliseren retour l'argent. Même s'ils ont de l'argent ils s'enserviront à d'autres fins. (...)Lesamchi pensentplusàl'argent qu'ausystème[médical]alorsqu'ilsdevraient utiliserl'argentparet pourlesystème».CepraticiendeLehs'inscrit dansunepratiqueré¬

solument moderniste, il possède deux cliniques qui fructifient, développe des activités, voyage en Europe et traite avec les bailleurs étrangers. Cet écueil illustrelesdeux tendancesprincipales entre amchi urbains et ruraux, et les tensions respectivesqui sont générées. Leproblèmeque mettenten lumièrelesmodifications de la rétribution des praticiens est un enjeu fondamental de la pratique.

Aceci s'ajoutent,quand ilsexistentoufonctionnent,descentresde santé gouvernementaux qui distribuent gratuitement des médica¬

ments et favorisent la dévalorisation de l'image véhiculée par la médecine traditionnelle. La délivrance gratuite de médicaments supprime radicalement le contre-don et contribueparconséquent à déstabiliserl'organisation sociale traditionnelle età confirmer, au travers de l'hégémonie biomédicale, la possibilité d'obtenir des soins sanscontre-partiepourainsi favoriser leprocessusquipousse les amchi ruraux dans des déboires financiers. D'après le Chief AmchiTseringPhuntsog,la gratuité s'opposeenquelque sorte à la compliance au traitement. Lecontre-don serait danslesreprésenta¬

tionspopulaireslegarantde la valeur decequiestdonné: «Siles gensobtiennentles médicamentsgratuitementils n'yprennentpas garde. S'ils payent ou donnent quelque chose en échange, ils réalisent leurvaleuret lesprennent mieux.Ilspensentqueleschoses gratuitesn'ontpas devaleur». La valeurestleprixdel'objetplus quel'objetlui-même.Etquand l'onsupprimeceprix,l'objet

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icile médicament

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estmoins considéré, même sipour les villageois la gratuitéestlogiquement plus attractive.

Pourrépondre à cela,les amchiontadopté certaines solutions,par choix ou à défaut, telle que le démarrage d'activités lucratives (échoppes de ravitaillement pour les randonneurs, fonctions de

«poney-man»auserviced'agences derandonnée...)oul'ouverture decliniques privéesen milieu urbainetfonctionnantavec des prix fixes. D'autres ontétéintégrésdans lesprogrammes dugouverne¬

mentou d'associations àcaractère social et d'autres enfin ontété contraints àabandonnerleur pratique.

L'étude desmodesde revenusnouséclaire à plusieurs égards. Elle meten lumièrele nouveau systèmeéconomique, les modifications del'organisationsocialeetl'individualisme, la prisedepositiondes amchi etlerôledesstructuresinstitutionnelles, gouvernementales ou non, impliquées dans ledéveloppement de la médecine amchi. La pharmacopée devient ici unenjeu micro-économique, la cibledes divers projetsdedéveloppementet lerévélateurd'une déstabilisa¬

tion du monde social.

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Lesplantes :entretraditionetmodernité

Ce paragrapheconcluce chapitreparunnouvel angle de regard surlapharmacopéeenlaconsidérant comme interfaceparticulière entretraditionetmodernité. Notrepropos général,au-delà de l'é¬

clairage particuliersurlacultureet le monde social changeant,est de cernerparunobjetd'apparencesimple

-

la pharmacopée

-

le jeu entre les sphères traditionnelles et modernes. Car la pharma¬

copée tibétaine peut apparaître bien moderne : idéologie écolo¬

giste, symboled'un «retourauxsources», armepolitique, potentiel économique, médecine considérée comme «douce»enterresocci¬

dentales,thérapie étroitement connectées aveclesélémentsetcon¬

sidérée comme une médecinebouddhiste.

Laplante seprésentecomme potentiel économiqueparlesespoirs qu'elle présenteen terme thérapeutique. Elle susciteen outrel'in¬

térêt de la recherchepharmaceutique internationale, exprime alors sous uneforme symbolique la connaissanceet la tradition, issues d'une science médicale centenaire et se constitue en négatif au monde technologique moderne. La pharmacopée tibétaine s'ac¬

corde avec l'économie de marchéquipourtantestla principalere¬

sponsablede la rupture del'organisation socialeetdesmodes de rétributiontraditionnelledesamchi. Elles'inscrit dansdes registres opposés, entredéveloppement oupromotionetdégradationoudé¬

clin. Mais si les moyens sont encore limités au Ladakh pour le développement de la médecine amchi, c'estqu'elle neparaît pas être un bon produit d'export. La situation est bien différente au Men-Tsee-KhangdeDharamsala, structure médicale institutionnelle dominante des tibétains en exil, pour qui la médecine apparaît comme une excellente représentation consensuelle de la culture tibétaine25.Cequipassepourde la culturepopulaireoufolklorique peutêtre en faitconsidéré comme une stratégie de reconstruction décidéeparuneéliteprochedesmeneurspolitiques.LecasLadakh estbiendifférent, mais la situation actuellelaissepenser queles au¬

torités perçoiventle potentiel économique qui se profileen ombre chinoise àla médecinetibétaine.Lamétaphoreestvouluecarnous savonsbien que leconflitsino-tibétain catalyselesrécoltesde fonds etl'intérêt généralpourcequi concerne la culture tibétaine.

Lapharmacopée peut être considérée comme partieintégrante de l'identité culturelle des Ladakhis qui revendiquent leurs droits de propriété intellectuelle en imposant contrôledraconien ou protec¬

tionnismeaiguàtouspostulantsà l'étude de la flore locale.Au-delà de la protection simplement juridique, c'est l'identité ethnique qui s'exprime au travers du végétal. Egalement,êtresympathisant des médecines traditionnelles, ou de leurs pharmacopées, est une marque identitaire encline au modernisme. Car le retour aux valeurs autochtonesestunedesorientationsdu mondemoderne et le développement des médecines traditionnelles, ou leur défense politique, s'inscrit de nos jours dans un champ contemporain. La pharmacopée traditionnelle représente des médecines, parfois in¬

justementdénommées «douces»enoccidentou considérée comme

des pratiques spirituelles,qui connaissentuncertainregain deno¬

toriété. Desmédecinesfinalement modernes.

Lapharmacopéeestunsymboledel'environnement etprovoqueau traversdesonpoidsethnique, danslecasde la défense de laflore, uneprisede conscience locale de lavaleuretdelarichessedel'en¬

vironnement naturel (maisaussi social etculturel). Elles setrouvent au centre despolitiques depréservationetincarnent à nouveauun symbole de la modernité, à l'imagede la protection de l'environ¬

nement, mais au profitde la tradition (la médecine tibétaine).On comprend dès lors les raisons qui font de la plante, et de sa di¬

mension plurielle, un allié politique de choix, pouvant catalyser aussibienles milieux traditionalistes(la plante comme culture) que modernistes (la plante comme enjeux des nouvelles politiques de conservation).

Lemouvementenvironnementaliste, catalyséparla plante,entraîne unephase nouvelle de l'institutionnalisationpolitiquecommeagent de construction de la société moderne.Lanaturedevientlecontexte d'une intégrationsocialeennaturalisant la logiquedel'interaction entre individus. L'environnemenfalisme, au profit des traditions médicales, peutalors glisser dans un discours écologiste ettrans¬

former son mouvement politique en groupe culturel de pression dans une sociétéétroitement dépendante de l'environnement. Les plantesontlepouvoirdecristalliserlesréseauxenformantlepoint nodal de leurs intentions. Elles éclairent le télescopage d'une Nature thérapeutique à une Nature comme fait social, etforcent par conséquent la transition de la plante à l'homme, de la botaniqueà l'anthropologie.

Il s'agitdecettedoublebipartition, «social-biologique» et« tradi¬

tion-modernité » qui nous permet de voir en la plante une pièce charnièredu mondeladakhidanssonévolutioncontemporaine. Ce chapitre, centréautourde quelques exemples significatifs, expose levégétal commegrillede lecture pertinentedu monde social etcul¬

turel. Car une étude des plantes qui se dégagedes perspectives simplementbiologiquesetdesexplications naturalistesn'apasàse cantonner à l'efficacitésymbolique ou à lapsychobiologie. Elleex¬

primeles interactions del'homme, individuel ouensociété,avec la nature et les transformations que l'un et l'autre subissent dans le processus.Lapharmacopéeapparaîtcommeunélémentbioculturel depremier rang et illustrele jeu dialectique entre hommesen so¬

ciété,nature et culture, tant surdesplans matérielsqu'idéels. Elle estuneexpressioncertainedela société,qui prendsoinettâchede guérir en procédant d'une dynamique multiple étroitement enchâsséedans le monde social. Laplanteestvéhicule du culturel etdépendante du social ; elle en indique les mouvements et con¬

firme qu'une compréhension globale, au sensoù l'ethnopharma¬

cologiesedéfinit,doitprendreencomptetantletravaildepaillasse que l'enveloppe sociale du végétal.

Dessourcesdusavoiraux médicamentsdu futur From the sourcesofknowledge tothemedicinesofthefuture

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