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Lise Aucerne AMINA. Elles sont déchaînées, vos femmes! Tome 3

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Lise Aucerne

AMINA

Elles sont déchaînées, vos femmes !

Tome 3

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L’illustration de couverture est une peinture de Moïses Finalé.

Ce livre a été publié sur www.bookelis.com ISBN : 979-10-227-2465-4

© Lise Aucerne

Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction, intégrale ou partielle, réservés pour tous pays.

L’auteur est seul propriétaire des droits et responsable du contenu du livre.

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À Maman, amie si proche indépendante, révoltée légère, généreuse Tu vis ici

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Après que les concubines se soient pliées aux contraintes les plus extrêmes, tout en conservant intacte leur volonté d’exister, après qu’elles se soient montrées capables à l’égal des hommes et même au-delà, l’auteure leur dit :

« Révoltez-vous les filles, exigez plus de justice. ».

Ce message est destiné à donner aux femmes soumises, le courage d’affronter les instruments derrière lesquels se cachent lâchement certains hommes, là où ils s’installent en toute bonne conscience, derrière les religions, les traditions et les lois imposées.

Exiger, nécessite un rapport de forces et la solidarité du plus grand nombre. Amina est prête à mener ce combat loyalement pour le bien de toutes.

Pourquoi un apartheid de sexe serait-il plus tolérable qu’un apartheid de couleur ?

En occident, les luttes menées par les suffragettes, femmes instruites donc conscientes des injustices, ont fait évoluer les lois, modifier les traditions et moderniser la religion.

En occident, lorsque l’éducation des filles s’est généralisée, cette infériorité intellectuelle que les hommes leur attribuaient pour les écarter à participer aux lois a été dénoncée.

Maintenant, c’est au tour des femmes orientales. Lise dit à toutes, instruisez-vous, affirmez-vous, mais n’oubliez ni la fête ni l’Amour, vous êtes des femmes.

Comment nous imposer des lois votées seulement par des hommes, nous voulons prendre part aux lois qu’on nous impose.

Millicent Garrett Fawcett 1847 - 1929

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1 – Retour au harem

Alors, la privilégiée, enfin de retour ? Un billet d’avion en cadeau et combien

de baises avec le Sultan ?

— Mets ta djellaba ! ordonna Frau Gertrude.

La mort dans l’âme, Amina revêtit ce vêtement gris garni de quelques passepoils argentés autour de l’encolure.

Ma tenue de prisonnière…

— Trie les affaires de cette valise et range celles qui étaient les tiennes ! Poursuivit l’Allemande chargée de gérer le harem.

Quel contraste entre la djellaba que je porte et ces belles tenues ! Aucun vêtement n’est à moi, même pas les dessous, puisqu’au harem aucune n’en porte.

Nostalgique, avec un pincement au cœur, Amina sortit lentement une à une les robes qu’elle avait portées. Elle avait encore mal au poignet tellement Frau Gertrude l’avait serré fort pour la tirer dans l’escalier montant au harem.

C’est incroyable qu’une petite bonne femme comme elle puisse grimper les escaliers aussi vite ! Mais c’est la maladie du lieu : dès qu’on se déplace dans les escaliers et les couloirs, il faut foncer comme si le mal y rôdait…

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A peine deux heures se sont écoulées depuis nos adieux à la délégation chinoise, et voilà : ma vie rebascule dans l’enfermement, dans un quotidien monotone qui me ronge lentement de l’intérieur…

C’est fini. Je ne remettrai plus jamais ces vêtements.

Frau Gertrude va les stocker dans d’immenses armoires.

Dès maintenant, je dois tourner la page – et la suivante est blanche.

Amina plaça ses vêtements soigneusement pliés sur deux chaises et ôta son slip qu’elle jeta sur l’un des tas, puis elle referma la valise.

Je n’ai rien, absolument rien, à placer dans le coffre de ma chambre. Je reviens au harem avec mon corps nu dans une djellaba de merde !

Elle s’apaisa en réalisant qu’elle tenait une enveloppe cachée dans sa manche.

Si, si, j’ai mon cadeau, et ça, personne ne me le prendra !

L’Allemande sortit du bureau et dévisagea la jeune concubine.

— Donne-moi ton billet d’avion !

— Non, jamais ! Il est à moi ! s’écria Amina.

— Tant pis pour toi si on te le vole.

— Pourquoi voulez-vous qu’on me le vole ? Il est nominatif.

— Par jalousie. Pour te faire du mal.

— Je le cacherai. Affirma Amina avec force.

— C’est comme tu veux, mais ne viens pas te plaindre après. Le Sultan m’a confié le sien.

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Je n’ai rien à faire de vos arguments, j’ai besoin de le voir ce billet, de le toucher, de rêver en parcourant ce qui est écrit dessus, vous ne comprenez pas ? Au harem, on m’a dépouillée de tout, je suis nue et on m’efface chaque jour un peu plus, j’ai enfin quelque chose à moi. C’est écrit sur ce billet. J’existe !

Elle se retira précipitamment dans sa chambre et referma la porte. Sa chambre était située à proximité de celles d’Elissa et de Zohra sur le côté court du patio rectangulaire, alors que les autres chambres s’alignaient de part et d’autre des deux côtés longs. Toutes donnaient sur une cour agrémentée de trois petits carrés de jardin au centre desquels murmurait l’eau des fontaines à étages.

Vingt-deux concubines résidaient dans le harem du jeune Sultan. Les favorites, les jeunes femmes avec enfants et celles qui étaient enceintes habitaient la première cour. Les autres, plus nombreuses, occupaient la deuxième, récemment agrandie et rénovée.

On a été jusqu’à 30 ici, mais des concubines ont quitté le harem. Je suis arrivée comme numéro 29, tu parles d’un rang nul ! Une jeune fille blonde, Yasmine, est arrivée après moi, un peu amoureuse du Sultan et pleine de rêves d’adolescente, mais elle est repartie vierge. Elle continue ses études au lycée dans un internat, très déçue de son expérience au sein de ce « troupeau de femmes ».

Raoudha non plus, ne compte plus parmi les concubines – elle reste ici dans l’attente de son mariage. Il faut aussi que je pense à Elissa : elle n’a pas réintégré le harem depuis sa participation à la négociation avec la délégation chinoise.

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Frau Gertrude et moi en connaissons la raison mais pas encore le Sultan…

Amina ouvrit son coffre en bois peint. Il contenait tout ce qu’elle possédait : au-dessus des vêtements qu’elle avait portés en arrivant au palais étaient pliés deux djellabas et trois caftans, tous beaucoup plus jolis que sa djellaba grise de tous les jours. Dans une petite boîte fixée à l’intérieur du coffre, elle avait placé ses accessoires : des petits foulards brodés et des ceintures. Sa cachette se trouvait sous cette boîte. Elle y avait fixé un rectangle de carton rigide avec des punaises et glissé trois photos de sa famille.

Elle retira les punaises et observa les photos, longuement.

La première témoignait de sa complicité avec son père.

J’ai eu une enfance et une adolescence fantastiques, avec toi papa ! En me laissant partager ton travail de gouverneur de notre région, tu m’as tant appris sur le fonctionnement de la société, mais, subitement, tu m’as trahie de la pire manière possible : tu m’as donnée au Sultan pour que notre région obtienne des subventions permettant de faire face à la sécheresse. Peu après, tu as réalisé ton « erreur » et tu es mort de chagrin, parait-il.

Toi, tu es au paradis maintenant, alors que, moi, je dois me dépatouiller seule, ici, dans cette prison. Tu trouves ça juste, toi ?

La deuxième photo représentait toute la famille assise au salon.

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Ils doivent se débrouiller sans toi maintenant. Ma mère est devenue veuve trop tôt, elle n’a pas mérité ça, elle t’a toujours secondé avec une loyauté sans faille. Trop même. Quand tu as décidé de me donner au Sultan, elle ne s’y est pas opposée et ne m’a même pas expliqué ce qui allait m’arriver. Comme une gourde, je n’ai pas compris ce qui se tramait : c’était tellement inimaginable !

Amina regarda la photo de près.

Eux, ils savaient. Ma sœur me serrait contre elle dès qu’elle pouvait et mes trois frères me fuyaient, têtes baissées, comme s’ils avaient honte.

Puis elle prit la dernière photo.

Toi ma petite sœur au regard triste, obligée de grandir à toute vitesse maintenant que tu nous as perdu papa et moi ! J’ai appris que tu as refusé le mariage que nos parents voulaient t’imposer et que tu es studieuse. En quelque sorte, tu as pris ma place au sein de notre famille.

Amina sortit son billet d’avion d’une enveloppe et le plaça avec les photos sur le carton avant de refixer le tout avec les punaises sous la boîte. Elle roula sa jupe en velours de soie verte, celle qu’elle avait portée en arrivant au palais. Cette jupe lui servait souvent de nounours réconfortant et elle sentait maintenant le besoin de « le » serrer dans ses bras.

Elle referma le coffre et admira un instant sa décoration multicolore d’une grande finesse, faite d’oiseaux et de papillons voltigeant libres parmi des fleurs et des feuilles à profusion.

Elle s’allongea sur son lit et prit Nounours dans ses bras.

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Je suis crevée, mais je veux repenser à chaque instant, à chaque mot, à chaque détail de ces quelques jours de rêve passés en compagnie de la délégation chinoise, du Sultan, d’Elissa, de Frau Gertrude et retrouver mes sensations d’alors…

Mon billet d’avion pour la Chine : un espoir de ressortir du harem ou un leurre ?

Les Chinois lui avaient offert ce billet pour la remercier de les avoir guidés pendant une excursion dans le sud du pays – de manière si compétente et distrayante, avaient-ils dit.

Quand My me l’a donné, pendant que les autres membres de la délégation m’acclamaient, le Sultan a fait une de ces têtes ! Il n’avait certainement pas l’intention de me laisser partir seule en Chine pour revoir ces Chinois, qui m’avaient permis sans le savoir d’être moi-même.

Le lendemain, Elissa, Frau Gertrude et le Sultan avaient reçu des billets d’avion identiques.

L’espoir est peut-être là : un possible voyage d’affaires dans l’année, puisque nos deux pays viennent de conclure un accord visant à implanter une usine de montage de voitures dans le Sultanat.

Les pensées d’Amina furent brutalement interrompues.

— Alors, la privilégiée, enfin de retour ? Un billet d’avion en cadeau et combien de baises avec le Sultan ?

Elle reconnut la voix provocante de Zohra derrière le volet ajouré et décida de ne pas répliquer.

— Qu’est-ce que t’as fait d’Elissa ? Elle s’est perdue en chemin ? Elle s’est tirée avec un Chinetoque ?

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Cette question lui fit l’effet d’un coup de poignard dans la poitrine. Les femmes avaient bien deviné. Oui le départ en Chine d’Elissa avec Kim, un membre de la délégation chinoise, était imminent. Dans l’attente d’obtenir un visa, elle vivait cachée avec lui quelque part dans le Sultanat.

J’espère vivement que le Sultan ne découvrira la disparition d’Elissa que lorsqu’elle aura quitté le pays ! Ensuite il va certainement me faire subir un interrogatoire en règle, pensant que j’étais au courant, vu qu’elle et moi occupions la même chambre à l’hôtel. Mais l’interrogatoire n’est pas ce qui me fait le plus mal : au fil des mois, Elissa est devenue une vraie amie et maintenant elle est sur le point de s’envoler pour toujours. Elle m’a suggéré de profiter de l’occasion pour m’enfuir comme elle, mais pour faire quoi ?

Je veux devenir journaliste politique, mais je sais bien qu’en l’état actuel des choses, mes perspectives de carrière dans le Sultanat sont compromises. Pour le moment, je ne suis qu’une concubine avec une seule raison d’être : satisfaire les fantasmes sexuels du Sultan ! Un désastre ! En restant sagement au harem pour l’instant, je garde un infime espoir de sortir d’ici un jour et de pouvoir réaliser mon projet professionnel – aucunement à l’étranger – dans mon pays, évidemment.

Zohra harcela Amina :

— C’est idiot que tu ne répondes pas parce qu’on a un scoop à t’annoncer, un scoop qui va te concerner aussi.

De près ou de loin. Sûrement de près, puisque tu aimes jouer à la cheftaine…

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Zohra est douée : elle tape là où il faut !

En effet, se conduire en meneuse correspondait bien à Amina. Elle ne le faisait pas exprès : c’était simplement sa franchise et son impatience qui lui faisaient endosser ce rôle de manière naturelle.

Maintenant, la curiosité la titillait violemment, mais elle continua à se taire.

Elle cherche à me faire parler, mais elle n’aura pas ce plaisir ce soir. N’empêche que j’ai une folle envie de savoir de quel scoop elle veut m’informer.

Amina serra sa jupe roulée dans ses bras et admit avant de s’endormir :

Zohra a gagné : elle a gâché ma soirée, cette peau de vache ! Et dire que, demain matin, je dois de nouveau affronter toutes les autres nanas. J’en ai marre de cette vie de con !

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2 – Le scoop

C’est quoi cette histoire de scoop ? Ah bon ?! Elle pouffa de rire. C’est rigolo…

— Allez, les nénettes, ramenez-vous, cria Zohra, c’est l’heure de la réunion !

Bientôt la petite salle à manger fut bondée.

— Laissez les sièges aux femmes accompagnées d’enfants, aux femmes enceintes et aux vieilles ! commanda Amina, qui poursuivit en riant : bon, des vieilles, on n’a pas, on est toutes jeunes et jolies, mais à part ça, c’est comme dans les transports publics ici !

Fatima était pâle et fit descendre sa fille de ses genoux.

— Tu es malade ? questionna Amina avant que le calme ne s’installe. Ce sont les danses folkloriques qui t’ont trop fatigué ?

— Je ne sais pas. Ça me lance dans le bas-ventre.

Je dois être enceinte de nouveau.

— Ah bon. Félicitations !

— Où est Elissa ? demanda Daourina.

— Je ne sais pas, elle est peut-être souffrante, mentit Amina.

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