• Aucun résultat trouvé

LE RÔLE DU MÉDIATEUR EUROPÉEN

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "LE RÔLE DU MÉDIATEUR EUROPÉEN"

Copied!
12
0
0

Texte intégral

(1)

European Ombudsman

LE RÔLE DU MÉDIATEUR EUROPÉEN

Discours

Monsieur le Président,

Le traité de Maastricht sur l'Union européenne, entré en vigueur en 1993, a introduit dans le traité instituant la Communauté européenne des dispositions relatives à la citoyenneté de l'Union. Est citoyen de l'Union toute personne ayant la nationalité d'un État membre. Les citoyens européens jouissent du droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire de l'Union, de même que du droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales et aux élections au Parlement européen. Les citoyens bénéficient en outre de l'assistance

diplomatique des autorités de tout État membre sur le territoire d'un pays tiers où son pays d'origine n'a pas de représentation diplomatique.

Par ailleurs, le droit de pétition devant le Parlement européen, qui s'était déjà développé dans la pratique, a été introduit dans le traité. Pour finir, le traité de Maastricht confère à tout citoyen de l'Union ou à toute personne physique ou morale résidant ou ayant son siège statutaire dans un État membre le droit de s'adresser au Médiateur européen.

Au mois de juillet 1995, le premier Médiateur européen a été élu par le Parlement européen.

J'ai débuté mes travaux au mois de septembre 1995 et, au mois d'avril 1996, j'ai présenté mon premier rapport annuel couvrant uniquement la période allant du 27 septembre jusqu'à la fin de 1995. Au mois d'avril 1997, j'ai présenté mon deuxième rapport annuel couvrant la première année complète d'activité, à savoir 1996. Entre le début de mon mandat, en 1995, et le 30 juin 1997, j'ai reçu 1 735 plaintes. Sur l'ensemble des plaintes enregistrées, 1 573 avaient été examinées à la date du 30 juin 1997.

1.LE MANDAT DU Médiateur

Le Médiateur européen a pour tâche d'examiner les cas de mauvaise administration dans l'action des institutions ou organes communautaires, à l'exclusion de la Cour de justice et du Tribunal de première instance dans l'exercice de leurs fonctions juridictionnelles.

Conformément à l'article 8 D, tout citoyen de l'Union peut s'adresser au Médiateur européen, lequel peut également procéder à une enquête de sa propre initiative.

Certains articles parus au début sur le Médiateur européen laissaient entendre que les citoyens de l'Union ne pouvaient s'adresser à ce dernier que s'ils étaient personnellement concernés par un cas de mauvaise administration. Si aucune exigence de cette nature ne figure ni dans les articles du traité relatifs au Médiateur ni dans le statut de ce dernier, elle est par contre prévue pour le droit de pétition. C'est la raison pour laquelle les

commentateurs pensaient que cette exigence était également requise pour les plaintes

(2)

adressées au Médiateur. Il a également été écrit qu'une telle exigence ne serait en fait que naturelle. J'ai personnellement du mal à comprendre comment une telle restriction d'un droit accordé aux citoyens pourrait être appliquée alors qu'elle n'est de toute évidence pas exigée. Le fait que cette exigence est explicitement requise dans un autre cas de nature similaire devrait rendre ce que je viens de dire encore plus clair.

Dans ce contexte, soulignons que le droit d'adresser une plainte à un médiateur, dans la version traditionnelle du paysage constitutionnel des pays nordiques, a toujours été une

"actio popularis", où il n'est pas nécessaire d'être concerné par le problème pour déposer une plainte. En fait, il est possible d'introduire une plainte avec succès, même si les parties concernées s'opposent à ce qu'une telle plainte soit adressée au Médiateur.

2.QU'EST-CE QU'UNE ACTION ADMINISTRATIVE?

Le traité exclut sagement des compétences du Médiateur la Cour de justice et le Tribunal de première instance dans l'exercice de leurs fonctions juridictionnelles. Il ne donne cependant aucune indication au sujet de la Commission européenne ou du Conseil européen dans leurs fonctions législatives, ni au sujet du Parlement européen dans ses fonctions politiques. Par ailleurs, il est bien clair qu'un acte législatif n'est pas un acte administratif, si bien que les actes législatifs ne semblent pas relever de la compétence du Médiateur. Dans le contexte communautaire, la difficulté réside dans le fait que le même type de mesures - règlements et décisions - peuvent être utilisées à des fins clairement administratives aussi bien qu'à des fins clairement législatives. Il existe bien sûr une large zone grise entre les deux. En ce qui concerne l'interprétation, on pourrait imaginer comme cas limites des situations où est allégué soit un abus de pouvoir soit une violation des droits fondamentaux ou des droits de l'homme.

Au niveau national, les fonctions de médiateur sont traditionnellement prévues pour surveiller les autorités administratives au nom du parlement, et non pour surveiller les travaux législatifs ou autres actions politiques du parlement même. Bien que la situation ne soit pas tout à fait comparable au plan européen, les travaux politiques du Parlement européen ne peuvent pas être considérés comme une action administrative. Cette question a dû être concrètement examinée en raison du fait que, au début, le secrétariat du

Médiateur a reçu un certain nombre de plaintes concernant d'éventuels cas de mauvaise administration de la commission des pétitions dans l'examen de pétitions. Une de ces plaintes avait même été introduite par un membre de la commission en question. Sachant que la commission des pétitions est un organe politique chargé d'examiner des pétitions dans le cadre des tâches politiques du Parlement, ces plaintes n'ont pas été jugées

recevables. Dans l'examen des pétitions, la commission doit être surveillée par le Parlement même. Une enquête d'initiative menée par le Médiateur à propos de l'établissement de règles d'accès du public aux documents a été explicitement restreinte aux documents administratifs du Parlement.

3.QU'EST-CE QUE LA MAUVAISE ADMINISTRATION?

Dans le premier rapport annuel (1995), il était indiqué qu'il y a mauvaise administration

(3)

lorsqu'une institution ou un organe communautaire n'agit pas en accord avec le traité et les actes communautaires qui en découlent, ou quand il contrevient aux règles et aux principes de loi établis par la Cour de justice ou par le Tribunal de première instance. Le Médiateur doit également prendre en compte l'article F du traité de Maastricht qui stipule que les institutions et les organes communautaires doivent respecter les droits fondamentaux et les droits de l'homme. Le concept de mauvaise administration peut cependant recouvrir bien d'autres choses, notamment les irrégularités administratives, les omissions administratives, les abus de pouvoir, la négligence, les procédures illicites, l'incurie ou l'incompétence, la discrimination, les retards évitables ou le refus d'informer.

Comme indiqué dans ce même rapport annuel, l'expérience des médiateurs nationaux montre que, du moins au tout début de l'activité, il vaut mieux ne pas chercher à donner une définition stricte de la notion de "mauvaise administration". Je suppose que la jurisprudence des cours de Luxembourg, de même que la littérature relative au droit administratif tant européen que national guideront avec sûreté le navire du Médiateur sur la mer de la bonne et de la mauvaise administration.

Comme proposé dans le rapport [1] de la commission des pétitions du Parlement européen sur le rapport d'activité annuel du Médiateur européen pour 1996, le Parlement a adopté une résolution demandant une définition claire des termes de "mauvaise administration".

Sachant qu'il n'est pas possible de modifier le traité instituant la Communauté européenne à cette fin, je me suis engagé à définir ces termes de manière plus explicite dans mon rapport annuel pour 1997, afin de donner au Parlement européen et à sa commission compétente la possibilité de prendre position à ce sujet.

Une initiative importante en vue d'établir un code de conduite pour une pratique de bonne administration a été prise par M. Roy Perry, MdPE, rapporteur au mois de juin 1997 sur le rapport de la commission des pétitions concernant ses propres délibérations pendant l'année parlementaire 1996-1997 [2] . J'ai eu la possibilité d'examiner cette question avec le membre de la Commission responsable pour les relations avec le Médiateur, Mme Anita Gradin, qui est favorable à l'idée. Il serait pour moi d'une grande aide que les médiateurs nationaux me communiquent de bons exemples nationaux de tels codes.

4. EST-IL POSSIBLE DE SURVEILLER UN POUVOIR DISCRÉTIONNAIRE?

L'article 155 du traité instituant la Communauté européenne confère à la Commission la responsabilité de veiller à l'application de la législation communautaire. Par rapport aux États membres, la procédure prévue à l'article 169 constitue le principal instrument permettant à la Commission de mener à bien sa tâche de "gardien des traités". Cette procédure implique une enquête administrative de la Commission, laquelle peut éventuellement décider de saisir la Cour de justice.

Dans ses toutes premières réponses au Médiateur européen à propos des "affaires article 169", la Commission a fait valoir que les plaintes portaient sur l'exercice, par la Commission, de son pouvoir discrétionnaire concernant les poursuites en vertu de l'article 169. Elle a également ajouté que: " En décidant de ne pas entamer de poursuites, la Commission a exercé

(4)

son pouvoir de discrétion que lui reconnaît totalement la Cour ". [3] .

En outre, la Commission a indiqué qu'elle " a agi vis-à-vis des plaignants conformément aux principes de bonne administration ". Cela signifie qu'elle reconnaît que la procédure

administrative aboutissant à la décision relève des compétences du Médiateur, son mandat étant d'examiner les cas éventuels de mauvaise administration.

Dans les observations relatives à l'avis de la Commission, les plaignants de l'affaire du contournement de Newbury ont réagi en faisant valoir que " les remarques de la Commission relatives à son pouvoir de discrétion équivalent à affirmer qu'elle peut agir de façon arbitraire ".

De toute façon, l'avis exprimé par la Commission soulève la question de savoir si l'exercice du pouvoir de discrétion peut être contrôlé par le Médiateur. Fondamentalement, bien sûr, un pouvoir de discrétion octroyé à une autorité publique ne peut pas être mis en question aussi longtemps que ce pouvoir est exercé de manière correcte. L'organe de surveillance ne devrait pas intervenir dans le choix entre un certain nombre de solutions possibles. Il

appartient à l'autorité publique même d'effectuer ses choix, conformément à ses objectifs et priorités.

Rappelons cependant que pouvoir de discrétion et pouvoir illimité ne sont pas équivalents.

Dans l'exercice d'un pouvoir de discrétion, les principes de loi généraux doivent être soigneusement observés.

Il ne doit y avoir ni abus de pouvoir, ni solutions discriminatoires ou arbitraires, ni

irrégularités de procédure, ni encore non-observation manifeste de la règle de droit. Pour moi, il est clair que la question de savoir si un pouvoir de discrétion a ou non été exercé dans les limites établies par les principes juridiques généraux relève de la justice de même que du contrôle du Médiateur. Il est un fait qu'une grande part des tâches quotidiennes d'un

Médiateur consiste à vérifier si les pouvoirs discrétionnaires de l'administration ont été correctement exercés. Il est également logique qu'un pouvoir de discrétion soit plus ou moins limité, en fonction de l'objectif pour lequel il a été accordé. Lorsqu'il s'agit de décider si un cas doit ou non être porté devant la Cour de justice, il semble approprié de prévoir une assez large marge d'appréciation, tout en gardant en mémoire que la discrétion doit être exercée de manière appropriée et pour un objectif approprié.

5.QU'EN EST-IL DES DOCUMENTS RELEVANT DU TROISIÈME PILIER?

Dans la littérature spécialisée, des voix se sont prononcées à la fois pour et contre dans la question de savoir si le Médiateur européen a des compétences en ce qui concerne les questions relevant des deuxième et troisième piliers [4] au même titre que du premier pilier.

Je n'ai pas cherché à résoudre cette question pour la bonne raison que, à l'heure actuelle, il n'existe aucune action des institutions ou organes communautaires relative à ces piliers qui soit à contrôler. Rappelons que dans le traité, le libellé de mes compétences mentionne

"l'action des institutions ou organes communautaires".

Ce qui est surprenant est que cette question a été soulevée par le Conseil européen dans

(5)

une affaire concernant l'accès du public aux documents. Dans l'affaire en question, le plaignant demandait des documents du Conseil relatifs au troisième pilier. Cette demande a été traitée par le Conseil sur la base de sa décision relative à l'accès du public à ses

documents [5] et a été en partie rejetée. La lettre faisant part du rejet partiel informait le plaignant de son droit de s'adresser au Médiateur. Cependant, lorsque le plaignant s'est adressé au Médiateur, le Conseil a répondu en contestant les compétences de ce dernier pour les questions relevant des deuxième et troisième piliers.

La réponse du Médiateur au Conseil soulignait qu'il ne s'agissait pas de la question

pertinente. La décision relative à l'accès du public aux documents avait été prise sur la base de l'article 151 du traité instituant la Communauté européenne. Dans son arrêt dans l'affaire Pays-Bas contre Conseil [6] , la Cour de justice a confirmé que la décision avait des effets juridiques à l'égard des tiers en tant que question relevant du droit communautaire.

En outre, la décision a été interprétée et appliquée par le Tribunal de première instance dans l'affaire Carvel et Guardian Newspapers contre Conseil [7] . Cette affaire portait notamment sur l'accès à des documents du Conseil concernant le troisième pilier. Étant donné les

restrictions apportées à la compétence de la Cour de justice par l'article L du traité sur l'Union européenne, le Tribunal de première instance n'aurait pas été compétent pour examiner cet aspect de l'affaire Carvel si l'accès aux documents du Conseil concernant le troisième pilier était lui-même une question relevant du troisième pilier. Dans les faits, cependant, la Cour a accepté la compétence dans cette affaire.

Aussi l'interprétation et l'application correctes de la décision du Conseil relative à l'accès du public aux documents relèvent-elles du droit communautaire et entrent-elles de ce fait dans le cadre du mandat du Médiateur. Le Conseil a maintenant communiqué son avis sur les plaintes en faisant valoir des arguments précis à l'appui de son point de vue selon lequel il a traité la demande du journaliste sur la base de sa décision relative à l'accès du public aux documents du Conseil. Le Conseil a donc admis que l'examen des demandes d'accès aux documents est une question d'interprétation du droit communautaire et non une question relevant du troisième pilier.

6. QUAND LE MEDIATEUR DOIT-IL PRENDRE DES INITIATIVES?

La plupart des médiateurs nationaux ont le droit de procéder à des enquêtes de leur propre initiative. Dans mon premier rapport annuel, la philosophie qui sous-tend le recours à cet instrument important a été expliquée. L'idée était d'accorder la priorité aux plaintes et de ne prendre des initiatives que lorsqu'elles semblaient nettement inspirées par un grand nombre de plaintes sur la même question et lorsqu'une initiative devait permettre de déterminer d'éventuelles solutions et actions plus facilement ainsi que d'une manière plus efficace et cohérente. Cette position a été légèrement critiquée dans le rapport de la commission des pétitions sur le premier rapport annuel et considérée trop passive [8] .

Certaines initiatives de principe ont cependant été prises.

6.1. Les règles applicables à l'accès du public aux documents

(6)

La première initiative concernait la transparence des actions des institutions et organes communautaires. L'enquête a été lancée à la suite du fait que le secrétariat du Médiateur avait reçu un certain nombre de plaintes semblant indiquer que le personnel des institutions et organes communautaires n'est pas toujours correctement informé de la manière dont il doit traiter les demandes de documents et que ces derniers sont parfois rendus publics avec un retard considérable. Sachant qu'une part importante de la tâche du Médiateur est

d'améliorer les relations entre les institutions et organes communautaires, d'une part, et les citoyens européens, d'autre part, une administration européenne plus transparente est de toute évidence une condition de réussite dans ce contexte.

À l'heure actuelle, il n'existe pas de disposition du traité ou, de manière générale, de disposition législative communautaire concernant l'accès du public aux documents. La déclaration 17 annexée à l'Acte final du traité de Maastricht souligne que la transparence renforce le caractère démocratique des institutions ainsi que la confiance du public envers l'administration.

Suite à une recommandation contenue dans la déclaration, la Commission et le Conseil ont adopté leurs propres règles - accessibles au public - concernant l'accès à leurs documents [9]

. Sachant que les autres institutions et organes n'avaient pas adopté de telles règles, le Médiateur s'est adressé à eux pour s'enquérir de la question.

L'enquête d'initiative portait sur les institutions de la Communauté au sens de l'article 4 du traité (en dehors du Conseil et de la Commission qui avaient déjà établi des règles), les quatre organes établis par le traité ainsi que les huit (sur un total de dix) agences communautaires décentralisées déjà en fonction [10] .

À l'issue d'un échange de vues avec les institutions et organes en question, au cours duquel ces derniers ont tous fait preuve d'une attitude positive à l'égard de l'initiative, le Médiateur a formellement recommandé à quatorze d'entre eux, au mois de décembre 1996, d'adopter des règles relatives à l'accès du public aux documents. La recommandation rappelait les exigences de la législation communautaire telles qu'énoncées par la Cour de justice:

" Tant que le législateur communautaire n'a pas adopté une réglementation générale sur le droit d'accès du public aux documents détenus par les institutions communautaires, celles-ci doivent prendre les mesures ayant pour objet le traitement de telles demandes en vertu de leur pouvoir d'organisation interne, lequel les habilite à prendre des mesures appropriées en vue d'assurer leur fonctionnement interne dans l'intérêt d'une bonne administration ". [11]

La plupart des institutions et organes ont adopté de telles règles. En raison de la complexité de la tâche, il a fallu à certaines d'entre elles plus de temps qu'à d'autres, mais elles

devraient néanmoins rapidement adopter leurs règles.

Le Parlement européen et la Cour de justice ont éprouvé des difficultés à traiter la question dans la mesure où ils devaient tenter d'établir une distinction entre les documents relatifs à leurs travaux proprement dits - politiques pour l'un, judiciaires pour l'autre - et les

(7)

documents administratifs. Le Parlement y est parvenu et a adopté des règles. La Cour de justice, quant à elle, m'a fait savoir qu'elle ne voyait pas l'intérêt d'établir une telle distinction, sachant que les documents ayant trait à des affaires revêtaient de toute façon une plus grande importance dans ce contexte. À l'heure actuelle, il semble que la Cour de justice envisage d'élaborer très prochainement des règles relatives à l'accès à l'ensemble des documents pertinents. Je disposerai bientôt d'informations plus précises à ce sujet.

L'initiative sur la transparence, qui sera la première à constituer un rapport spécial au Parlement européen, sera lancée avant la fin de l'année.

6.2. Les secrets du "gardien des traités"

Une autre question ayant donné lieu à de nombreuses plaintes est la procédure à la fois longue et non ouverte que la Commission applique lorsqu'un citoyen se plaint du non-respect des obligations qui incombent à un État membre en vertu du droit

communautaire. La Commission a invité les citoyens européens à déposer des plaintes en publiant un formulaire-type au Journal officiel, en 1989 [12] .

Les enquêtes du Médiateur sur les "affaires article 169", mentionnées au point 4 ci-dessus, ont conduit à la conclusion qu'il était nécessaire de procéder à un examen plus général de la position des plaignants en matière de procédure dans le contexte de la procédure de l'article 169. Il est apparu que la procédure appliquée par la Commission est une source importante de mécontentement pour les citoyens européens dont certains estiment que la Commission examine leur plainte de manière condescendante et arrogante. La procédure ne semblait pas améliorer le degré de transparence que les citoyens européens attendent de plus en plus de la part des institutions et organes communautaires.

L'enquête, lancée le 15 avril 1997, ne portait sur la question de savoir si le droit

communautaire ne devrait pas, en matière de procédure, prévoir des droits plus étendus pour les plaignants dans le contexte de la procédure de l'article 169, mais elle a souligné que la Commission pourrait elle-même introduire de tels droits dans le cadre d'une bonne administration. En particulier, la Commission pourrait, avant de prendre une décision finale, inviter les plaignants à lui communiquer leur avis sur ses conclusions dans un délai donné.

La Commission a réagi positivement à cette initiative et a apporté certains changements importants à la procédure en faveur des plaignants. Elle ne semble cependant pas encore disposée à ouvrir pleinement la procédure en acceptant que le plaignant constitue une partie bénéficiant de droits à part entière. La raison en est que, traditionnellement, la procédure de l'article 169 porte sur des questions concernant la Communauté et un État membre.

Récemment, j'ai également lancé une enquête portant sur la base juridique et l'applications des limites d'âge dans les procédures de recrutement de la Communauté. Cette question a fait l'objet de nombreuses plaintes, en particulier de la part des nouveaux États membres.

Sur cette question, les traditions juridiques varient d'un État membre à l'autre. Dans certains d'entre eux, les limites d'âge sont interdites par la constitution en tant que discrimination fondée sur l'âge. Dans d'autres, elles sont acceptées et fréquemment appliquées dans le

(8)

secteur public. Il semble cependant que l'attitude évolue lentement en faveur d'une restriction ou d'une interdiction du recours aux limites d'âge. Il importe de souligner que l'article sur la discrimination du projet de traité d'Amsterdam mentionne l'âge comme cause possible de discrimination.

7. QUEL EST L'APPORT DU TRAITÉ D'AMSTERDAM?

Le projet de traité d'Amsterdam comporte un certain nombre de dispositions qui affectent les compétences du Médiateur européen. Selon le traité de Maastricht, le troisième pilier de la coopération intergouvernementale couvrait les domaines de la justice et des affaires intérieures. Selon le traité d'Amsterdam, les questions d'asile et d'immigration seront introduites dans le traité instituant la Communauté européenne et relèveront des

compétences de la Cour de justice et du Médiateur européen. Le nouveau troisième pilier sera limité à la coopération policière et judiciaire en relation avec les affaires criminelles.

L'article K 8 du traité de Maastricht sera remplacé par un nouvel article K 13 qui supprimera tout doute quant aux compétences du Médiateur en ce qui concerne l'action des institutions et organes communautaires dans le contexte du troisième pilier.

Pour finir, un nouvel article 191 A sera introduit dans le traité instituant la Communauté européenne. Il accordera aux citoyens le droit d'accès aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission, sous réserve des principes généraux et des limites établis pour des raisons d'intérêt public ou privé. Ces principes et limites seront fixés par le Conseil dans le cadre d'un règlement qui sera établi conformément à la procédure de codécision avec le Parlement (article 189 B), dans un délai de deux ans après l'entrée en vigueur du traité. Chaque institution élaborera, dans son règlement intérieur, des dispositions particulières concernant l'accès à ses documents.

Il y a lieu de se féliciter de l'introduction de cet article, bien qu'il soit regrettable que ses dispositions ne s'appliquent qu'aux trois institutions mentionnées et non aux autres institutions et organes communautaires.

8. LES POUVOIRS DU MÉDIATEUR SONT-ILS SUFFISANTS?

Bien des commentaires relatifs aux fonctions du Médiateur européen émettent des doutes quant à la question de savoir si les pouvoirs de ce dernier permettent réellement de remédier à un cas de mauvaise administration. La question a maintes fois été posée de savoir si le Médiateur ne devrait pas disposer de pouvoirs lui permettant d'imposer à une institution de modifier son attitude ou sa décision dans un cas particulier, ou bien d'avoir la possibilité d'engager des poursuites judiciaires ou, le cas échéant, de poursuivre un

fonctionnaire. Ces commentaires aidant, l'on pourrait être amené à penser que les pouvoirs du Médiateur européen sont particulièrement faibles, comparés à ceux d'un médiateur national.

Ce ne sont pas tant les pouvoirs d'enquête du Médiateur européen qui faisaient l'objet de critiques, lesquelles portaient essentiellement sur ses pouvoirs d'action lorsqu'un cas de mauvaise administration est mis en évidence. Conformément au statut du Médiateur, ce

(9)

dernier peut appliquer trois mesures dans ce contexte. Tout d'abord, il doit essayer de rechercher avec l'institution ou l'organe concerné une solution de nature à éliminer les cas de mauvaise administration et à donner satisfaction à la requête du plaignant.

Deuxièmement, si aucune solution de ce type ne peut être obtenue, il informe l'institution ou l'organe concerné et, le cas échéant, formule des recommandations. L'institution ou l'organe doivent répondre dans un délai de trois mois. Si les recommandations ne sont pas suivies et si aucune autre solution permettant de remédier au cas de mauvaise administration ne peut être trouvée, le Médiateur peut, en troisième lieu, transmettre au Parlement européen ainsi qu'à l'institution ou à l'organe concerné un rapport comportant d'éventuelles

recommandations. Cela offre au Parlement la possibilité de rechercher un moyen de résoudre le problème. En outre, le Médiateur est tenu d'informer la police nationale

concernée si ses enquêtes révèlent une action criminelle, ou bien d'informer l'institution ou l'organe concerné quant à la nécessité d'engager une procédure disciplinaire.

Jusqu'à présent, ces trois mesures n'ont pas toutes été appliquées. Le secrétariat du

Médiateur a présenté deux recommandations formelles et les deux ont permis d'obtenir un résultat. Aucun rapport spécial adressé au Parlement européen n'a encore été nécessaire, et ce en grande partie du fait de l'attitude positive dont témoignent les institutions, en

particulier la Commission. De nombreuses solutions amiables ont été trouvées directement entre l'institution et le plaignant, une fois la plainte reçue pour avis. Il ne faut naturellement pas exclure qu'à l'avenir, des différends surgissent qui donnent lieu à des rapports adressés au Parlement européen.

Les dispositions du statut du Médiateur européen en matière de procédure ont permis de mettre en place une procédure administrative normale en deux parties, avec le droit, pour le plaignant, d'exprimer ses points de vue sur tout avis présenté par l'institution ou l'organe concerné. Le seul élément important venu compléter la procédure telle que décrite dans le statut a été l'introduction d'une pratique de clôture de certaines affaires par une "remarque critique". Il s'agit d'une pratique traditionnelle chez la plupart des médiateurs nationaux que je connais. Elle est utilisée lorsqu'il n'y a plus aucune possibilité de rétablir la pratique administrative dans un cas déterminé, mais il est utile, pour l'avenir, de préciser ce qu'est une bonne administration dans un cas déterminé. Naturellement, l'infraction ne doit ni être grave ni soulever des questions de principe.

Au niveau européen, il convient naturellement d'ajouter qu'une solution amiable n'est parfois pas possible en raison du fait que la situation dans laquelle elle aurait été possible ne se présente plus. L'introduction de la "remarque critique" signifie également que le

Médiateur européen n'est pas contraint de recourir trop souvent à la procédure de la recommandation formelle. En effet, un recours trop fréquent à cette solution qui, après tout, présente un léger caractère de sanction, pourrait conduire à lui faire perdre beaucoup de son impact.

Il me semble erroné de croire que les médiateurs nationaux ont en règle générale des pouvoirs plus étendus que ceux dont le Médiateur européen dispose à l'heure actuelle. C'est ainsi que les pouvoirs du médiateur danois, lequel a constitué un modèle pour bien des offices de médiateurs nationaux, ainsi que pour celui du Médiateur européen, sont en

(10)

grande partie les mêmes que ceux de ce dernier, à savoir le droit de procéder à des enquêtes, de formuler des recommandations et de faire rapport.

Dans une société démocratique où l'administration publique est tenue d'être ouverte et responsable de ses actes, cela s'est avéré suffisant. Parmi l'ensemble des systèmes de médiateur que je connais, seuls les systèmes existant en Suède et en Finlande offrent des pouvoirs plus étendus, y compris le droit d'engager des poursuites ou de poursuivre des fonctionnaires. Cependant, même dans ces cas, les pouvoirs en question sont rarement utilisés en raison du fait que, progressivement, le Médiateur est davantage associé à l'idée de conciliation que de répression. Pourquoi faudrait-il revenir en arrière au niveau européen?

Selon l'expérience que j'ai acquise, du moins jusqu'à présent, les institutions et organes communautaires s'engagent à être des administrations plus ouvertes et davantage

responsables de leurs actes et sont disposés à évoluer. Si l'avenir me donne tort, je ne pense pas que la situation pourrait changer en profondeur en accordant au Médiateur des

pouvoirs disciplinaires ou répressifs plus étendus. Je suis d'avis que le problème des relations de la Communauté avec les citoyens européens serait alors beaucoup trop grave pour pouvoir être résolu à l'aide de mesures disciplinaires.

9. LE MANDAT DU MÉDIATEUR EST-IL TROP RESTREINT?

Dans la proposition présentée par l'Espagne dans le cadre des négociations qui ont abouti au traité de Maastricht, le Médiateur européen devait également contrôler l'application des droits des citoyens européens au niveau national. Dans le compromis adopté à Maastricht, basé sur une proposition du Danemark [13] , le mandat du Médiateur était limité aux éventuels cas de mauvaise administration dans l'action des institutions ou organes communautaires.

Parmi les plaintes reçues jusqu'à présent, plus de 60% ne semblent clairement pas entrer dans le cadre du mandat, essentiellement en raison du fait qu'elles portent sur l'action des autorités nationales. Ce problème a été abordé de deux manières. Premièrement, le bureau du Médiateur a lancé une campagne d'information ciblée pour déterminer quels sont les citoyens et les entreprises pouvant être amenés à se plaindre de l'action des institutions ou organes communautaires. Deuxièmement, une coopération étroite et souple a été mise en place avec les médiateurs nationaux et les organes similaires afin de garantir qu'il existe toujours un organe compétent pour examiner toute plainte ayant trait au droit

communautaire, que cela soit au niveau européen ou national.

À l'heure actuelle, il existe des bureaux de médiateur dans douze États membres. Au niveau national, les derniers ont été mis en place en Belgique, où deux médiateurs fédéraux ont récemment été élus, et en Grèce, où la loi instaurant un médiateur a été adoptée par le parlement au mois d'avril dernier. L'Allemagne et le Luxembourg disposent de commissions des pétitions au niveau national tandis que, en Italie, il n'existe que des médiateurs

régionaux et municipaux. Une proposition législative visant à établir des fonctions nationales n'a toujours pas abouti.

(11)

Comme vous vous en souvenez, les médiateurs nationaux et les organes similaires se sont réunis lors d'un séminaire qui s'est déroulé à Strasbourg au mois de septembre dernier en présence de représentants des institutions communautaires, afin d'examiner la question de la coopération en matière de contrôle du droit communautaire au niveau national. Au cours de ce séminaire, il a été décidé de nommer, auprès de chaque médiateur, des agents de liaison chargés d'assurer cette coopération sur le plan pratique. Le réseau en question a été mis en place en 1996.

Les 23 et 24 juin 1997, un séminaire s'est tenu à Bruxelles pour permettre aux agents de liaison d'examiner des questions ayant trait au droit communautaire et à la poursuite de la coopération. L'attitude positive dont vous avez fait preuve dans le cadre de cette coopération a été très encourageante, à la fois pour moi-même et pour les institutions communautaires concernées. J'espère que cette coopération permettra aux droits des citoyens européens de devenir une réalité vivante dans les États membres.

[1] A4-0211/97, rapporteur Nikolaos Papakyriazis.

[2] A4-0190/97.

[3] Plainte 206/27.10.95/HS/UK et autres (contournement de Newbury), plainte 132/21.9.95/AH/EN (autoroute M40), Rapport annuel 1996, pp. 66, 75. Cf. également P.

Kunzlik et B. Jacobson "Article 169, the Ombudsman and the Parliament", 6 European Environmental Law Review , p. 46.

[4] À savoir les titres V et VI du traité sur l'Union européenne, traitant respectivement de la politique étrangère et de sécurité commune et de la coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures.

[5] Décision du Conseil du 20.12.1993 relative à l'accès du public aux documents du Conseil, JO L 340 du 31.12.1993, p. 43.

[6] Affaire C58/94, Pays-Bas contre Conseil [1996] Rec. I-2169.

[7] Affaire T-194/94, Carvel et Guardian Newspapers contre Conseil , [1995] Rec. II-2765.

[8] A4-0176/96, rapporteur: Mme Nuala Ahern.

[9] Cf. Code de conduite concernant l'accès du public aux documents du Conseil et de la Commission, JO n° L 340 du 31.12.1993, p. 41; décision du Conseil du 20.12.1993 relative à l'accès du public aux documents du Conseil, JO n° L 340 du 31.12.1993, p. 43; décision de la Commission du 8.2.1994 relative à l'accès du public aux documents de la Commission, JO n°

L 46 du 18.2.1994, p. 58.

[10] Voici la liste complète des institutions et organes couverts par l'enquête:

Parlement européen

(12)

Cour de justice Cour des comptes

Banque européenne d'investissement Comité économique et social

Comité des régions

Institut monétaire européen

Office de l'harmonisation dans le marché intérieur Fondation européenne pour la formation

Centre européen pour le développement de la formation professionnelle (Cedefop) Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail Agence européenne pour l'environnement

Centre de traduction des organes de l'Union européenne Observatoire européen des drogues et des toxicomanies Agence européenne pour l'évaluation des médicaments.

[11] Affaire C58/94, Pays-Bas contre Conseil [1996], Rec. I-2169.

[12] JO n° C 26 du 1.2.1989, p. 6.

[13] CONF-UP 1777/91, 21 mars 1991.

Références

Documents relatifs

Voir Guide sur les obligations des fonctionnaires et agents du Parlement européen (code de bonne conduite) (JOCE C 97/1, 5 avril 2000) ; annexe à la décision de la Commission du

Actes du symposium réunissant les présidents des Cours constitutionnelles et suprêmes des États Membres, Luxembourg, 30 et 31 mars 2009. Thèmes: Droit

Face à cette situation, les services du Médiateur de la République ont émis plusieurs recommandations de réforme : étendre le bénéfice du dispositif de l’Acaata à toute

Co-fondatrice de l’ASBL Trialogues (2004) , formatrice en médiation et co-fondatrice de la formation qualifiante (2012), co-responsable de Trialogues-Entreprises, avocate

Commission de lui rembourser les frais de sortie du garde-meuble, ce qu’elle a fait. Trois ans plus tard, le 8 mars 2010, le plaignant a demandé à la Commission de lui rembourser

La médiation est un processus ou une méthode qui peut s’avérer efficace pour résoudre certains conflits qui sont nés sur le lieu de travail, en particulier les conflits

[r]

Le Médiateur européen procède à des enquêtes sur les cas de mauvaise administration dans l’action des institutions, organes et organismes de l’Union