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Un curriculum national et son évaluation : un moyen pour « relever le niveau » ? Le cas de l’Angleterre

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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en éducation

Un curriculum national et son évaluation : un moyen pour « relever le niveau » ? Le cas de l’Angleterre

Sandra Johnson

Traducteur : Hélène Bréant et Roger-François Gauthier

Édition électronique

URL : http://journals.openedition.org/ries/7648 ISSN : 2261-4265

Éditeur

Centre international d'études pédagogiques

Référence électronique

Sandra Johnson, « Un curriculum national et son évaluation : un moyen pour « relever le niveau » ? Le cas de l’Angleterre », Revue internationale d’éducation de Sèvres [En ligne], Colloque 2019 : Conditions de réussite des réformes en éducation, mis en ligne le 11 juin 2019, consulté le 11 juin 2019. URL : http://

journals.openedition.org/ries/7648

Ce document a été généré automatiquement le 11 juin 2019.

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Un curriculum national et son évaluation : un moyen pour

« relever le niveau » ? Le cas de l’Angleterre

Sandra Johnson

Traduction : Hélène Bréant et Roger-François Gauthier

1 L’histoire de l’évaluation et du suivi du système scolaire anglais est aussi longue que mouvementée (Johnson, 2016), et ce depuis plusieurs décennies – le niveau de réussite attendu des élèves étant le principal indicateur de la qualité du système éducatif. Le suivi du système débute à la fin des années 1940 par des enquêtes ponctuelles par échantillonnage menées sur la « compréhension de l’écrit », suivies d’un programme d’enquête qui fit relativement long feu. Lancé à la fin des années 1970, ce programme dit

« APU », en référence à l’acronyme désignant l’Unité d’évaluation de la performance (Assessment of Performance Unit) sous tutelle du gouvernement, mettait l’accent sur le langage, les mathématiques et les sciences. Repérer les « sous-performances » («

underachievement ») des élèves était l’un des principaux objectifs du programme APU ; mais définir la notion de « sous-performances » s’est avéré difficile. Le programme s’est ensuite concentré sur les résultats relativement faibles, obtenus à partir de comparaisons entre des sous-groupes d’élèves (garçons versus filles, par exemple), sans conséquence particulière en matière d’imputation des responsabilités.

2 Quelles que fussent ses forces et ses faiblesses, ce programme était promis à ne pas durer, puisque le gouvernement conservateur qui s’installa peu de temps après son lancement ne l’appréciait pas : le motif principal de ce rejet était son incapacité – inhérente à sa conception - à être utilisé comme outil de reddition des comptes permettant l’évaluation de l’établissement scolaire, cette question obnubilant le gouvernement nouvellement au pouvoir. C’est ainsi qu’une loi de 1988 dite Education Reform Act instaure et développe à la hâte en Angleterre et au Pays de Galles le premier National Curriculum (destiné aux élèves âgés de 5 à 16 ans), assorti de dispositions contraignantes ayant trait à l’évaluation

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(National Curriculum Assessment, NCA). L’Irlande du Nord leur emboîte le pas avec une loi de 1989, Education Reform (Northern Ireland) Order, qui présente quelques différences dans le curriculum adopté à l’échelle nationale. L’Écosse n’est pas concernée ; son système éducatif est en effet indépendant. Daugherty (1994) brosse un tableau fascinant du paysage des politiques éducatives qui se sont succédé à l’époque, tandis qu’Isaacs (2010) dépeint les évolutions des vingt années suivantes.

3 Au début, les évaluations nationales obligatoires (NCA) avaient lieu à la fin de chacune des trois « étapes clés » (key stages), c’est-à-dire à la fin de la deuxième, de la sixième et de la neuvième année scolaire. Elles avaient deux objectifs principaux : fournir des informations relatives au niveau atteint par les élèves – dans l’intérêt des élèves, des enseignants et des parents – et fournir des données concernant les résultats obtenus par les établissements, à des fins à la fois d’auto-évaluation des établissements et de mesure externe de leurs performances.

4 Dès le départ, la mise en place du nouveau système rencontre des difficultés. Le poids considérable, impossible à soutenir, de l’évaluation déposé sur les épaules des enseignants l’explique en grande partie. En effet, les professeurs devaient évaluer chacun de leurs élèves au regard d’un grand nombre d’indicateurs de réussite et prendre des décisions sur le degré d’acquisition des connaissances de chaque apprenant dans chacune des nombreuses matières concernées. Les enseignants ont fini par se rebeller devant l’énormité de la tâche. Ce fut l’impossibilité de gérer ce programme qui conduisit à l’abandon de ce premier modèle d’évaluation nationale, même si des questions étaient aussi posées sur sa fiabilité et sur l’interprétation qu’on pouvait en faire sur toute une cohorte d’élèves.

5 La réponse politique a consisté alors à remplacer le modèle NCA par des tests nationaux exhaustifs à la fin de chacune des étapes clés – dispositif complété par un système simplifié d’évaluation des enseignants faisant appel à des indicateurs adéquats. C’est alors que « l’évaluation nationale échappe au contrôle des enseignants et se transforme en tests écrits en anglais, en mathématiques et en sciences… passés simultanément par l’ensemble des élèves d’un niveau donné. » (Isaacs, 2010). Néanmoins, d’autres problèmes en découlent et, en 1993, en réaction à une menace de boycott des tests nationaux par les enseignants concernés, le gouvernement met sur pied une révision du curriculum et de son évaluation (Rapport Dearing). Entre autres conséquences, les examens organisés à la fin de la première étape clé sont abandonnés, si bien que seule l’évaluation par les enseignants demeure, et si des tests restent de mise à la fin des étapes clés II et III, ils sont plus courts qu’auparavant et font dès lors l’objet d’une notation externe (alors qu’auparavant c’étaient les enseignants qui notaient leurs élèves lors des tests).

6 En 1996, on découvre les premiers classements des établissements scolaires pour les étapes clés II et III, ce qui marque le passage officiel d’une responsabilité portée par le système à une imputation de la responsabilité aux écoles. Les résultats NCA servent de plus en plus à sermonner les établissements auxquels on reproche de « faibles » performances, et même à fermer des écoles considérées comme « en échec » ; ces deux pratiques ont toujours cours, elles se sont même renforcées. En 2002, la NCA est complétée par la mise en place d’un profil d’apprentissage pour les enfants de 3 à 5 ans préscolarisés (Enseignement précoce et fondateur, Early Years Foundation Stage, EYFS), profil évalué par les enseignants – ce qui abaisse de facto l’âge à partir duquel commence le suivi des résultats. Au cours de cette période, les révisions du curriculum et des évaluations y afférentes se poursuivent, et on procède à d’autres changements (détaillés

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par Isaacs, 2010). On remarque notamment que l’évaluation à la fin de la troisième étape clé est abandonnée, et tandis que l’on continue à tester les élèves dans toutes les matières à la deuxième étape clé, les examens qui concernaient toute une cohorte en sciences sont remplacés par des tests réalisés par échantillonnage. En parallèle, un « test de graphophonétique » (en anglais « phonics ») est introduit en 2012 pour tous les élèves des écoles publiques âgés de six ans, afin de repérer les enfants présentant un faible développement en matière de littératie et d’y remédier.

7 En 2014, en réaction aux résultats corrects mais pas extraordinaires de l’Angleterre dans les enquêtes internationales, et notamment PISA, un nouveau Curriculum national « plus exigeant » est établi ; à partir de 2016, l’évaluation des compétences en anglais, en mathématiques et en sciences est redéfinie. La théorie de réponse à l’item (TRI) est notamment adoptée en tant que modèle de mesure sous-jacent. Les « niveaux de réussite » sont abandonnés au profit de scores gradués fondés sur la TRI. Les élèves obtiennent chacun un score gradué à l’issue des examens de la première étape clé, et un deuxième score qui sanctionne l’évaluation lors de la deuxième étape clé – la différence entre ces deux scores étant l’indicateur de la progression de chaque élève par rapport à la moyenne de tous les élèves ayant obtenu le même score à la première étape clé. En principe, ce modèle de « valeur ajoutée » prend en compte les différentes modalités de recrutement des écoles afin de fournir des comparaisons plus pertinentes de l’efficacité des établissements. L’évaluation par les enseignants est maintenue ; elle fait appel à de nouveaux indicateurs de performance, mais conserve une moindre importance que celle des résultats obtenus aux tests.

8 Le désir de « relever le niveau », c’est-à-dire d’améliorer le niveau de maîtrise des élèves dans les domaines du langage (littératie), des mathématiques (numératie) et des sciences, reste la motivation première de la NCA. Mais dans quelle mesure a-t-on atteint cette ambition, à ce jour ? Les résultats de ce National Curriculum Assessment (NCA) devraient être, en principe, l’indicateur incontestable – après tout, mesurer les acquis des élèves est sa raison d’être. Mais c’est un échec, car il n’a pas été possible de garantir la difficulté des tests au fil du temps et surtout car le curriculum, tout comme la méthodologie d’évaluation, ont été modifiés. Les résultats obtenus à l’échelle nationale ne sont pas pertinents à ce sujet ; ils sont en effet spécifiques à une matière, relèvent du choix de la matière par le candidat, et ne constituent pas un moyen satisfaisant de garantir la comparabilité des notes dans la durée. Les enquêtes internationales sont d’autres sources d’informations évidentes. Au fil des ans, PIRLS et TIMSS ont ainsi brossé un portrait changeant des résultats des élèves anglais. Malheureusement, lorsque ces variations indiquent des progrès – aussi infimes soient-ils – d’une enquête à l’autre, les hommes politiques et les responsables des politiques éducatives sont tout disposés à les interpréter comme la preuve d’une hausse du niveau à mettre à leur crédit. L’enquête PISA s’avère plus problématique à cet égard. Elle juge l’Angleterre avec une constance remarquable au fil du temps, dans toutes les disciplines testées (Jerrim et Shure, 2016).

Cette constance est au contraire qualifiée de « stagnation » par les tenants d’une certaine orientation politique.

9 Comme l’ont constaté McGrane et al. (2017, p. 149-150) au sujet des résultats de l’Angleterre dans l’enquête PIRLS de 2016 :

les systèmes éducatifs sont complexes ; il faut donc du temps pour que les politiques éducatives transforment les systèmes en profondeur ainsi que les performances des élèves au sein de ces systèmes.

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10 Il est possible aussi qu’en cas d’amélioration sensible du niveau des élèves au fil du temps, il soit impossible d’identifier précisément la ou les politiques auxquelles imputer ces progrès. Et si les résultats des élèves au plan national ne progressent pas de façon notable, que fera-t-on ? Quand sera-t-il temps de se demander si les ressources actuellement consommées par le test annuel de cohorte pourraient être plus utilement et plus efficacement déployées ailleurs ?

BIBLIOGRAPHIE

DAUGHERTY, R. (1995) : National Curriculum Assessment. A Review of Policy 1987-1994, Londres : The Falmer Press.

ISAACS, T. (2010) : « Educational assessment in England », Assessment in Education: Principles, Policy

& Practice, vol. 17 :3, p. 315-334. En ligne [http://dx.doi.org/10.1080/0969594X.2010.491787]

JERRIM, J. et SHURE, N. (2016) : Achievement of 15-Year-Olds in England: PISA 2015 National Report, Londres : Department for Education. En ligne [https://assets.publishing.service.gov.uk/

government/uploads/system/uploads/attachment_data/file/574925/

PISA-2015_England_Report.pdf]

JOHNSON, S. (2016) : « National assessment – intelligent accountability? », dans Wyse, D., Pandya, J. et Hayward, L. (coord.), SAGE Handbook on Curriculum, Pedagogy and Assessment. Part 5:

Assessment and the Curriculum, ch. 53, p. 853-870, Londres : Sage Publications.

MCGRANE, J., STIFF, J., BAIRD, J.-A., LENKEIT, J. et HOPFENBECK, T. (2017) : Progress in International Reading Literacy Study (PIRLS): National Report for England, Londres : Department for Education. En ligne [https://assets.publishing.service.gov.uk/government/uploads/system/uploads/

attachment_data/file/664562/PIRLS_2016_National_Report_for_England-_BRANDED.pdf]

RÉSUMÉS

Nonobstant l’importance reconnue d’autres effets de la scolarisation, les responsables politiques anglais considèrent que la qualité du système éducatif national se reflète principalement dans le niveau de performance académique des élèves – les résultats obtenus dans l’enquête PISA faisant actuellement office de premier indicateur de qualité. L’Angleterre a une longue histoire de suivi interne de son propre système, préexistant aux enquêtes internationales. Cette histoire a commencé par des études relativement ponctuelles, menées périodiquement par échantillonnage entre les années 1950 et 1980 afin d’observer le niveau de maîtrise atteint. Puis, à la fin des années 1980, le gouvernement a instauré une évaluation annuelle de cohortes liée à l’introduction d’un Curriculum national et des modalités d’évaluation nationale obligatoire y afférentes, ainsi qu’une nouvelle priorité accordée à la reddition de comptes des établissements scolaires en tant que vecteur pour « relever le niveau » (« drive up standards »). L’article décrit brièvement l’évolution de la situation jusqu’à l’heure actuelle.

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Notwithstanding the acknowledged importance of other outcomes of schooling, the quality of England’s education system is considered by its national politicians to be reflected primarily in students’ standards of academic attainment, with PISA survey results currently serving as the primary quality indicator. The country has a very long history of domestic system monitoring, that predates the international survey programmes. It began with relatively benign periodic sample-based attainment surveys through the 1950s to 1980s, evolving in the late 1980s into annual cohort assessment, with the introduction of a national curriculum and associated statutory assessment, and a new focus on school accountability as a vehicle for ‘driving up standards’. The article briefly charts developments to the present day.

INDEX

Mots-clés : résultats de l’éducation, évaluation, évaluation des étudiants, programme d’études, réforme de l’enseignement, résultat scolaire, performance, curriculum

Palabras claves : resultados de la educación, evaluación, evaluación del estudiante, plan de estudios, reforma de la educación, resultado escolar, rendimiento, curriculum

Keywords : education outcomes, evaluation, student evaluation, curriculum, educational reform, school scores, performance

Index géographique : Angleterre

AUTEURS

SANDRA JOHNSON

Assessment Europe, Royaume-Uni

Consultante indépendante en évaluation, elle a été directrice technique adjointe de l’Unité d’évaluation de la performance (Assessment of Performance Unit, APU), programme de suivi scientifique mis en place en Angleterre dans les années 1980. Depuis près de vingt ans, elle assume les fonctions de conseillère technique auprès du gouvernement écossais en ce qui concerne les programmes nationaux successifs d’évaluation. Elle a été membre de comités consultatifs sur les questions d’évaluation au Royaume-Uni et en Suisse, et collaboré en tant qu’experte en évaluation à plusieurs projets internationaux. Elle est membre de l’Association pour l’évaluation en éducation (Association for Educational Assessment – Europe) et membre d’honneur du Réseau 9 de l’Association européenne pour la recherche en éducation (European Educational Research Association) : Analyse, Évaluation, Examens et Mesure. Elle est membre du comité de rédaction des revues Assessment in Education : Principles, Policy and Practice et Educational and Psychological Measurement.

Sandra.Johnson@Assessment-Europe.com

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