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Mélangeurs à bolomètres à électrons chauds sur membranes fonctionnant au-delà du THz pour l'instrument post-Herschel

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Academic year: 2021

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Submitted on 10 Apr 2014

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membranes fonctionnant au-delà du THz pour

l’instrument post-Herschel

Gregory Gay

To cite this version:

Gregory Gay. Mélangeurs à bolomètres à électrons chauds sur membranes fonctionnant au-delà du THz pour l’instrument post-Herschel. Instrumentations et Détecteurs [physics.ins-det]. Université Pierre et Marie Curie - Paris VI, 2013. Français. �tel-00976996�

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THÈSE

PRÉSENTÉE A

L’OBSERVATOIRE DE PARIS

ÉCOLE DOCTORALE : Astronomie et Astrophysique d'Île-de-France – ED 127

Par Grégory GAY

POUR OBTENIR LE GRADE DE DOCTEUR de l'Université de Paris 6

SPÉCIALITÉ : Méthodes Instrumentales en Astrophysique et leurs applications Spatiales

Mélangeurs à bolomètres à électrons chauds sur membranes

fonctionnant au-delà du THz pour l’instrument post-Herschel

Directeur de recherche : Laurent PAGANI Co-directeur de recherche : Yan DELORME

Soutenue le : 29 novembre 2013

Devant la commission d’examen formée de :

M. Emmanuel LELLOUCH LESIA Président du jury

M. Paul CROZAT IEF Rapporteur

M. Alessandro NAVARRINI IRAM Rapporteur

M. François PAJOT IAS Examinateur

M. Luc LAPIERRE CNES Examinateur Mme. Yan DELORME LERMA Co-directrice M. Laurent PAGANI LERMA Directeur

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Remerciements

Je tiens à remercier chaleureusement Yan Delorme et Laurent Pagani, mes directeurs de thèse, pour leur accueil et leur soutien tout au long de cette aventure qu'a été ma thèse. Merci à Paul Crozat et à Alessandro Navarrini d'avoir accepté d'être rapporteurs de mon travail.

Merci à Luc Lapierre, Emmanuel Lellouch et François Pajot d'avoir accepté d'être membre de mon jury.

Je remercie bien entendu l'ensemble des personnels du LERMA et en particulier les membres de l'équipe GEMO qui m'ont accueilli pendant ces trois années. Plus particulièrement, je voulais simplement dire à tous ceux que j'ai côtoyés quotidiennement dans le bâtiment Lallemand : Jean-Michel Krieg, Yan Delorme, Alexandre Féret, Roland Lefèvre, Thibaut Vacelet (même s’il n'est pas au bâtiment Lallemand), Michèle Ba-Trung, Fabien Defrance, Frédéric Dauplay, Maurice Gheudin, Jean-Marie Munier et Pierre Bonnay, que j'ai beaucoup apprécié leur accueil, leur aide, leur sympathie, leur humour et grâce à eux et leurs qualités humaines je suis toujours venu travailler avec enthousiasme.

Je remercie également les personnels de l'atelier de mécanique et en particulier Laurent Pelay pour avoir fabriqué mes blocs mélangeurs.

Je remercie Christine Chaumont, Florent Reix et Josiane Firminy, pour leur aide dans mes travaux en salle blanche.

Je remercie toute l'équipe administrative du LERMA et en particulier Valérie Audon, pour son aide dans la résolution des problèmes administratifs.

Je remercie le CNES de m'avoir donné la chance d'accomplir ce travail, merci en particulier à Luc Lapierre, mon responsable au CNES, pour avoir toujours suivi avec attention l'avancée de mes travaux.

Je remercie Alain Maestrini qui est venu m'aider pendant des expériences en me faisant profiter de ses connaissances.

Je remercie Faouzi Boussaha qui m'a donné de nombreux conseils et m'a beaucoup aidé dans ma recherche d'un postdoc.

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Un grand merci à mes parents qui m'ont toujours soutenu moralement et financièrement pour me permettre d'aller le plus loin possible dans mes études et surtout d'accomplir mon travail dans les meilleures conditions.

Enfin, mon dernier remerciement est pour ma charmante femme, Stéphanie, qui m'a toujours soutenue et m'a beaucoup aidé dans mon travail de rédaction de thèse, elle est aujourd'hui la seule professeure des écoles en maternelle qui sache ce qu'est un bolomètre à supraconducteur et qui connaisse bien le principe de la détection hétérodyne.

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SOMMAIRE

:

Chapitre 1 : Introduction ... 12

1.1)UN PEU D'HISTOIRE... ... 12

1.2)LE DOMAINE DES TERAHERTZ ... 15

1.3)RADIOASTRONOMIE THZ ... 19

1.3.1) Conditions d'observations ... 19

1.3.2) Quelle astronomie fait-on dans le THz ... 24

1.3.3) Méthodes et technologies pour la détection THz ... 28

1.3.3.1) Détection directe... 28

1.3.3.2) Détection hétérodyne ... 28

1.3.3.3) Supraconductivité ... 33

Chapitre 2 : Le bolomètre à électrons chauds "HEB" ... 39

2.1)LES BOLOMETRES ... 39

2.1.1) Principe de fonctionnement ... 39

2.1.1.1) Cas d'un bolomètre à semi-conducteur ... 42

2.1.1.2) Cas d'un bolomètre à supraconducteur ... 44

2.2)MELANGEUR A BOLOMETRE ... 45

2.3)HEB ... 46

2.3.1) Principe de fonctionnement ... 47

2.3.2) Refroidissement par diffusion des électrons vers un métal normal ... 50

2.3.3) Refroidissement par phonons ... 51

2.3.4) Modèle du Hot Spot ... 53

2.3.4.1) Effets de la réflexion d'Andreev et du courant critique ... 62

2.3.4.2) Modélisation numérique d'un HEB sur substrat épais ... 64

2.3.5) Modèle du hot spot pour les membranes ... 66

2.3.6) Analyse en régime petits signaux ... 71

2.3.7) Bruits du mélangeur HEB ... 74

2.3.7.1) Bruit Johnson ... 75

2.3.7.2) Bruit de fluctuation thermique ... 76

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2.3.8) Bandes passantes... 77

Chapitre 3 : Couplage du signal ... 81

3.1)STRUCTURE QUASI-OPTIQUE ... 82

3.1.1) Lentille et antenne intégrées ... 82

3.1.2) HEB sur membrane et miroir ... 83

3.1.2.1) Bloc mélangeur avec miroir axial ... 84

3.1.2.2) Bloc mélangeur avec miroir hors axe ... 86

3.2)ANTENNES PLANAIRES ... 87

3.2.1) Antenne log-spirale ... 88

3.2.2) Antenne double fente ... 90

3.3)DESIGN ET SIMULATION DES ANTENNES ... 93

3.3.1) Etude d'une antenne log-spirale ... 93

3.3.2) Etude de l'antenne double fente ... 101

3.3.3) Antenne + miroir ... 111

3.3.3.1) Miroir axial ... 112

3.3.3.2) Miroir hors axe ... 115

Chapitre 4 : Fabrication des composants et des blocs mélangeurs ... 119

4.1)FABRICATION DES HEB SUR MEMBRANE ... 120

4.1.1) Techniques de micro et nano-fabrication ... 120

4.1.1.1) Dépôt chimique en phase vapeur basse pression ... 120

4.1.1.2) Pulvérisation cathodique à magnétron ... 120

4.1.1.3) Evaporation par bombardement avec canon à électrons ... 121

4.1.1.4) La photolithographie ... 122

4.1.1.5) La lithographie électronique ... 123

4.1.1.6) Technique du lift-off ... 124

4.1.1.7) Gravure ionique réactive ... 125

4.1.1.8) Gravure humide ... 125

4.1.2) Procédé de fabrication ... 131

4.1.2.1) La membrane SiO2/Si3N4 ... 131

4.1.2.2) Le film supraconducteur de NbN ... 131

4.1.2.3) Réalisation de l'antenne et du nano-pont HEB ... 132

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4.2)REALISATION DES BLOCS MELANGEURS ... 143

4.2.1) Bloc mélangeur axial ... 143

4.2.2) Bloc mélangeur hors axe ... 147

Chapitre 5 : Caractérisations des mélangeurs HEB ... 151

5.1)CARACTERISATIONS DC ... 151

5.1.1) Mesures sous pointes à température ambiante ... 151

5.1.2) Mesures à la canne cryogénique ... 153

5.2)CARACTERISATIONS RF ET MESURES HETERODYNES ... 157

5.2.1) Présentation du cryostat ... 158

5.2.2) Préparation du banc de mesure hétérodyne ... 160

5.2.3) Caractérisation hétérodyne ... 164

5.2.3.1) Mesures de la température de bruit Trec ... 168

5.2.3.2) Gain de conversion et correction de la température de bruit ... 173

5.2.4) Mesures FTS ... 175

5.2.5) Mesure de la bande passante FI ... 178

Chapitre 6 : Conclusions et perspectives ... 183

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Chapitre 1 : Introduction

1.1) Un peu d'histoire...

L'homme a depuis très longtemps observé le ciel, que ce soit dans un but scientifique ou religieux. L'histoire de l'astronomie remonterait à plus de 7 000 ans avant notre ère, ce qui fait d'elle la plus ancienne des sciences. En effet, d'après l'archéologie, certaines civilisations disparues de l'époque du Néolithique (entre 9 000 et 3 300 avant J.C.) devaient déjà avoir des connaissances en astronomie. Bien entendu, pendant ces premiers milliers d'années les observations astronomiques se faisaient à l'œil nu. Ce qui n'a pas empêché un grand nombre de découvertes, comme le caractère périodique des équinoxes et leur relation avec le cycle des saisons. Les Mayas avaient réussi à décrire les phases et les éclipses de Vénus. Les grecs ont progressivement élaboré des théories géocentrique et héliocentrique. En 1609, Galilée, qui travaille alors à l'amélioration d'une longue vue conçue par le Hollandais Hans Lippershey, crée une lunette et décide de la pointer vers le ciel. C'est la première fois qu'un instrument permettant de capter la lumière a été utilisé pour faire de l'astronomie, c'est la naissance de la lunette astronomique et avec elle, de l'astronomie moderne. Pendant les décennies qui ont suivies, de nombreux scientifiques ont utilisé cet instrument. En 1671, en plus de travailler sur les lois du mouvement qui donneront naissance à la théorie de la gravitation et de construire le premier télescope réflecteur, Isaac Newton fait imprimer cette année là, un texte décrivant ses expériences en optique. Il y fait mention d'une décomposition en plusieurs couleurs de la lumière blanche du Soleil en la faisant passer dans un prisme. Il nomme cette décomposition le spectre de la lumière. Il pensait que la lumière était constituée de corpuscules de différentes couleurs. En 1678, Christian Huygens propose une théorie ondulatoire de la lumière, qui ne sera publiée qu'en 1690. Pendant plus de 100 ans, la théorie corpusculaire de Newton sera préférée à l'approche ondulatoire de Huygens, cela en grande partie grâce à l'immense notoriété dont bénéficiait Newton. Mais surtout, ces théories ne traitent que de la lumière visible bien évidemment, le spectre au delà des frontières du visible restera tapi dans l'ombre encore plus d'un siècle. En 1786, une publication anonyme intitulée "Experiments and Observations on Lights and Colours" introduit de manière explicite l'existence d'un rayonnement au-delà des frontières du visible. Des recherches sur des articles rejetés, mais néanmoins conservés

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P a g e | 13 par la Royal Society, ont permis d'établir que l'auteur de ce document était John Elliot [1]. Ce n'est que 14 ans plus tard, en 1800, que William Herschel découvre le rayonnement infrarouge lors d'une expérience [2]. Alors qu'il était en train de mesurer avec un thermomètre à mercure la température propre de chaque couleur du spectre obtenu en dispersant la lumière du Soleil par un prisme, il se rendit compte que la température était plus élevée vers le rouge.

En déplaçant encore le thermomètre au-delà du rouge, la température continuait d'augmenter alors que cette zone n'était, à priori, pas éclairée. Il déduit dans un premier temps que ces rayons calorifiques (ancien nom donné par Herschel aux rayons infrarouges) étaient de même nature que la lumière visible et que l'œil n'y était pas sensible, mais il revint sur cette hypothèse. Cette découverte est le point de départ de l'exploration d'un monde invisible et cela inspire d'ailleurs d'autres chercheurs comme Johann Wilhelm Ritter qui en 1801 décide de faire des recherches de l'autre coté du spectre. Ritter utilise du chlorure d'argent (constituant des pellicules photos argentiques) qui était connu pour sa propriété à noircir en présence de lumière et ce d'autant plus fortement que la lumière se rapprochait du bleu. Il constate que le chlorure d'argent continue de noircir en dehors de la zone éclairée en bleu ; Ritter prouve ainsi l'existence d'un rayonnement au delà du bleu. Etant donné que ces rayons interagissent avec le chlorure d'argent, ils sont appelé rayons chimiques (ancien nom des rayons UV). En 1804, Thomas Young prouve, en les diffractant, que les rayons chimiques ont un comportement identique à la lumière visible. Mais il faudra attendre encore quelques décennies avant que ces rayons chimiques et calorifiques soient considérés comme faisant partie de la lumière, notamment grâce aux travaux de Macedonio Melloni et d'Alexandre Edmond Becquerel en 1842. Enfin c'est surtout James Clerk Maxwell qui va définir la lumière comme étant une onde électromagnétique dont le spectre est bien

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plus large que le visible. Il écrit dans son article de 1864, A Dynamical Theory of the Electromagnetic field: "L'accord des résultats semble montrer que la lumière et le magnétisme sont deux phénomènes de même nature et que la lumière est une perturbation électromagnétique se propageant dans l'espace suivant les lois de l'électromagnétisme". A présent, les ondes radio, le rayonnement infrarouge, la lumière visible, les UV, les rayons X et les rayons Gamma font tous partie de la même famille, ce sont des ondes électromagnétiques (figure 1-2).

Bien que l'existence de la lumière en dehors du domaine visible ait été dévoilée en 1800, l'astronomie a été étudiée presque uniquement par la fenêtre du visible pendant encore plus d'un siècle. Presque, car il y eu quelques tentatives de détection en infrarouge après 1830 mais sans avancée majeure pendant longtemps.

En 1931, un jeune ingénieur radio du nom de Karl Guthe Jansky travaille dans les laboratoires de Bell Telephone dans le New Jersey. La société souhaitait étudier la possibilité d'utiliser des ondes entre 10 et 20 m de longueur d'onde pour faire des communications radiotéléphoniques transatlantiques. C'est Jansky qui a la charge d'étudier les éventuelles sources pouvant parasiter les communications. Pour cela, il construit une antenne pouvant

Figure 1-2 : Spectre électromagnétique.

Figure 1-3 : L'antenne de Jansky est la première antenne à capter un signal radio extraterrestre.

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P a g e | 15 capter les ondes radio à 20,5 MHz (soit environ 14,6 m de longueur d'onde) (figure 1-3). Après plusieurs mois d'enregistrement, Jansky identifie des sources de parasites : des orages voisins, des orages lointains et un signal faible mais régulier d'origine inconnu. Il décide de continuer ses mesures sur ce dernier signal pendant plusieurs mois. Il se rend compte que le signal à une période de 23 h 56 min (un jour sidéral, ce qui est caractéristique des étoiles fixes) et que l'intensité est plus forte en direction du centre de la voie lactée, dans la constellation du Sagittaire. Jansky comprend alors qu'il vient de détecter un signal radio émis en dehors de notre planète. La nouvelle est rendue publique et est publiée par le New York Times le 5 mai 1933. La radioastronomie est née avec cette découverte et certains chercheurs comprennent alors qu'il y a d'autres choses à "voir" dans l'espace que ce que nos yeux peuvent entrevoir. Inspirés par cette découverte, deux hommes vont continuer les recherches dans ce domaine et vont grandement participer au développement de la radioastronomie, il s'agit de Grote Reber et de John Kraus. Les décennies qui suivent vont être animées d'un grand nombre de découvertes astronomiques, de la détection du fond diffus cosmologique (première lumière émise, 380 000 ans après le Big Bang) à la découverte des planètes extrasolaires, en passant par le sondage des atmosphères des planètes de notre système solaire, l'étude des nuages interstellaires ou encore l'évolution des étoiles. Toutes les longueurs d'ondes ont été mises à contribution pour nous offrir toujours plus d'informations sur le monde qui nous entoure. Tout cela est rythmé par les évolutions technologiques offrant des moyens de détection toujours plus performants dans chaque bande de fréquence de la lumière.

1.2) Le domaine des térahertz

Dans le cadre de cette thèse, nous allons présenter les derniers développements d'un détecteur dédié à la spectroscopie dans le domaine térahertz (THz). Dans ce paragraphe nous nous focaliserons sur cette bande de fréquence, expliquerons quels sont les moyens de l'observer et ce que nous pouvons apprendre à ces longueurs d'ondes.

La bande de fréquence THz est la région du spectre électromagnétique faisant le lien entre les domaines micro-onde et infrarouge ; c'est d'ailleurs pour cela qu'elle est également nommée domaine submillimétrique ou encore infrarouge lointain. Il n'y a pas de frontière

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franche entre les différentes bandes de fréquences, si bien que nous trouverons dans la littérature plusieurs définitions de l'étendue du domaine THz. La plupart du temps, les bornes sont choisies pour couvrir 1 ou 2 décades. Dans la suite de ce travail, la bande THz est définie arbitrairement comme étant l'intervalle situé entre 0,1 et 10 THz, ce qui correspond à des longueurs d'ondes allant de 3 mm à 30 µm. Dès 1925, de grands chercheurs se sont intéressés à cette bande de fréquence [3]. Cependant, cette portion du spectre électromagnétique est restée inexplorée pendant longtemps et pas uniquement en astronomie mais dans tous les domaines de recherche. Cela s'explique d'abord par un fort manque de sources suffisamment puissantes et fiables et ensuite par l'absence de détecteurs simples à employer. Pour bien comprendre cette problématique, il est important de noter que le THz constitue une passerelle entre deux mondes que sont l'électronique et la photonique, respectivement associés aux micro-ondes et aux infrarouges proches. Ainsi les techniques employées pour la détection ou l'émission dans le domaine THz sont des adaptations des techniques et technologies de chacun de ces deux mondes. C'est pourquoi, le guidage du signal peut être assuré aussi bien par des guides d'ondes, que par des lentilles ou des miroirs. La détection se fait, elle, soit par des antennes hyperfréquences, soit par des détecteurs photoniques à base de semi-conducteurs extrinsèques ou de bolomètres. Enfin, les sources THz peuvent être électroniques avec des diodes, Gunn ou Schottky associées à des multiplicateurs de fréquence, ou optique avec des lasers moléculaires ou des lasers à cascade quantique (QCL). Tout cela n'est qu'un bref exemple des technologies disponibles ou en développement. Malgré le fait que la bande THz bénéficie des techniques des deux domaines voisins, la tâche n'en est pas pour autant simplifiée, bien au contraire. En effet, pour ce qui concerne les sources, qu'elles soient issues du domaine optique ou électronique, leur efficacité chute fortement lorsque les sources sont extrapolées vers le THz. Il existe donc une sorte de "fossé" THz, comme le dit J.-L. Coutaz dans son ouvrage [4] (figure 1-4). Les avancées technologiques tendent à réduire ce "fossé". Au début des années 1990, l'arrivée sur le marché des lasers femtosecondes [5] fiables et performants, va permettre de faciliter l'accès aux infrarouges lointains et de nombreux laboratoires vont alors travailler dans le THz. Le tableau 1-1 tiré de [4], présente un résumé de différentes sources THz communément employées. Des détails sur chacune de ces sources sont disponibles sur cette même référence.

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Source Gamme

spectrale (THz)

Puissance Avantages Inconvénients

Corps noir Toute la gamme pW à 0,1 THz

µW à 10 THz Simplicité Large bande Peu puissant, incohérent Gunn 0,1 → 1 100 mW 0,1 mW Compact Fréquence limitée IMPATT (Impact

Avalanche And Transit Time diode) → 0,3 10 mW Compact Fréquence limitée TUNNETT, RTD (resonant tunneling diodes)

→ 0,4 10 µW Compact Peu puissant,

fréquence limitée

Smith-Purcell Toute la gamme 100 nW Accordable Gros appareil

FEL (Free Electron Lasers) Toute la gamme Très puissants → 100 W Puissance spectre Grands instruments BWO (Backward Wave Oscillator) → 0,2 10 µW Compact accordable Bruyant, peu puissant, fréquence limitée Lasers moléculaires

Raies spectrales Ex: CH3

100 mW à 2,52 THz

OH Pureté spectrale Stabilité, aucune accordabilité Lasers QCL (Quantum Cascade Lasers) 1,9 ← 10 mW Compact, rendement Cryogénie, puissance Optoélectronique Impulsionnel 0,1 → 60 µW Spectre cohérent, aspect temporel Puissance limitée, résolution spectrale CW battement optique → 3 µW Compact, pureté spectrale Puissance faible

Tableau 1-1 : Sources THz communes avec leurs puissances et les avantages et inconvénients de chacune [4]. Figure 1-4 : Décroissance de la puissance de différentes sources électroniques et

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En ce qui concerne la partie détection, il existe également des difficultés techniques à extrapoler les technologies des domaines électronique et optique. Les dimensions d'une antenne ou d'un guide d'onde sont inversement proportionnelles à la fréquence du signal, ainsi la montée en fréquence rend la fabrication des composants de plus en plus délicate. Ensuite, l'effet photoconducteur des détecteurs à semi-conducteur intrinsèque employés dans le visible et l'infrarouge proche, ne peut être utilisé ici car les photons THz ont une énergie assez faible, quelques meV (voir tableau 1-2). Les semi-conducteurs intrinsèques ont une bande interdite (énergie de gap) entre la bande de valence et la bande de conduction (figure 1-5) qui va de la centaine de meV à quelques eV. Pour qu'il y ait photoconduction, il faut que les photons arrivant sur le détecteur aient une énergie au moins égale à l'énergie de gap. L'énergie d'un photon est liée à sa fréquence par l'équation 1-1. Un semi-conducteur intrinsèque peut donc détecter des photons dont la fréquence est comprise entre 3000 et 30 THz, ce qui correspond à des longueurs d'ondes allant de 100 nm à 10 µm. Le tableau 1-2, présente l'énergie associée à un photon pour quelques fréquences.

� = ℎ� = ℎ� 1-1

Avec, h la constante de Planck (≈ 6,626 x 10-34 J.s, ou 4,134 x 10-15 eV.s), ν la fréquence (en Hz), c la vitesse de la lumière dans le vide (m.s-1) et λ la longueur d'onde (en m).

Fréquence (THz) Longueur d'onde (µm) Energie (meV)

0,1 3000 0,41

10 30 41,3

30 10 124

3000 0,1 12,4 (eV)

Tableau 1-2 : Niveaux d'énergie délivrés par un photon en fonction de sa fréquence. Figure 1-5 : représentation des bandes d'énergie dans un

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P a g e | 19 L'extension de cette technologie vers le THz a pu se faire par le développement de conducteurs extrinsèques. Des impuretés sont introduites dans la maille du cristal du semi-conducteur, ce qui a pour effet de réduire l'énergie de GAP nécessaire à l'effet photoconducteur. Ainsi, le germanium dopé au gallium peut détecter un signal THz [6]. Un autre moyen de détecter un signal THz est d'utiliser un bolomètre. Le chapitre suivant lui est consacré, mais en quelques mots, le bolomètre absorbe l'énergie électromagnétique qu'il reçoit, provoquant une élévation de sa température et une variation de sa résistance électrique. Ses caractéristiques très large bande le rendent attractif pour la spectroscopie THz.

Les ondes THz présentent des propriétés particulières qui les rendent potentiellement très prometteuses pour de nombreux domaines de recherche fondamentale et appliquée. En effet, l'infrarouge lointain excite des résonances mécaniques des molécules, dont les spectres d'absorption présentent des signatures uniques et complémentaires par rapport à des spectres en infrarouge proche ou visible. Ce qui en fait une bande de choix dans les domaines de la sécurité ou de la surveillance de l'environnement, car la spectroscopie THz permet la détection de substances chimiques difficilement identifiables, les explosifs, les drogues ou encore les gaz létaux. Une autre particularité intéressante des ondes THz est leur capacité à traverser certains matériaux totalement opaques à d'autres ondes électromagnétiques, comme les semi-conducteurs intrinsèques, le papier ou le béton. De nombreuses applications d'imagerie, bénéficiant d'une résolution spatiale proche de celle de l'oeil humain, dans le domaine biomédical ou de la sécurité (portails de sécurité des aéroports par exemple) sont possibles et commencent d'ailleurs à se développer.

Aujourd'hui le monde du THz est en pleine effervescence, un grand nombre de publications sont faites autour des activités de recherche dans le domaine THz et l'astronomie et l'astrophysique n'y font pas exception.

1.3) Radioastronomie THz

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La bande de fréquence THz est une région du spectre électromagnétique relativement inexplorée en astronomie. Comme expliqué précédemment, il y a une véritable difficulté à fabriquer des détecteurs de photons THz, et la réalisation de structures quasi-optiques ou de guides d'ondes à ces fréquences est un défi en soi. Mais en plus de ces difficultés technologiques, l'observation du ciel à travers notre atmosphère est pratiquement impossible dans cette bande de fréquences, puisque la vapeur d'eau et l'oxygène moléculaire absorbent la quasi totalité du signal. Les observatoires dédiés à la radioastronomie millimétrique au sol sont souvent basés en altitude et dans des endroits où l'atmosphère est très sèche. L'humidité de l'atmosphère est mesurée en "mm" de vapeur d'eau précipitable (Precipitable Water Vapor, PWV), cette mesure donne la hauteur d'eau qu'il y aurait dans une colonne d'atmosphère si toute la vapeur était condensée. Prenons l'exemple du site de Mauna Kea à Hawaï. Cet ancien volcan culmine à 4200 m au-dessus du niveau de la mer et abrite un grand nombre de télescopes, tels que l'Observatoire Canada-France-Hawaï (CFHT), le Caltech Submillimeter Observatory (CSO) et bien d'autres. L'université de Caltech a mis à disposition sur son site internet [7] un calculateur de la transmission atmosphérique en fonction de la quantité de vapeur d'eau pour des fréquences allant jusqu'à 3 THz. Le calcul est basé sur le modèle "ATM" de J.R. Pardo [8]. J'ai utilisé ce site pour tracer le graphique de la figure 1-6. Les jours les plus secs, le ciel de Mauna Kea peut atteindre un PWV de l'ordre de 0,5 mm. La simulation nous montre que les fréquences au-delà de 1 THz ne seront pas accessibles sur ce site. J'ai effectué la simulation avec un PWV de 0,5 mm, cette valeur pourrait représenter un pic lors d'une nuit d'observation. Mais en pratique, il faut considérer une valeur moyenne de l'ordre de 1 mm de vapeur d'eau précipitable. Dans tous les cas, Mauna Kea ne peut être un site d'observation pour des fréquences de plus de 1 THz.

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P a g e | 21 Il existe d'autres sites sur Terre présentant des niveaux de PWV meilleurs qu'à Mauna Kea. Chajnantor dans le désert d'Atacama au Chili, situé à environ 5000 m d'altitude, où est installé, entre autres, L'Atacama Large Millimeter Array (ALMA) [9], ou encore, les Dômes A et C en Antarctique, qui sont des lieux très prisés depuis ces dernières années pour faire des observations dans le domaine submillimétrique. Mais aucun de ces sites ne permet d'ouvrir suffisamment la fenêtre pour offrir un véritable accès aux fréquences au-delà de 1 THz (figure 1-7).

Figure 1-6 : En rouge, simulation de la transmission atmosphérique du ciel de Mauna Kea situé à 4200 m d'altitude, avec un PWV de 1 mm. En bleu, la valeur de 0,5 mm de vapeur d'eau précipitable.

Figure 1-7 : Simulation de la transmission de l'atmosphère sur les sites de Chajnantor (en gris) et du Dôme C (en bleu).

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La meilleure solution pour observer le rayonnement THz est de prendre de la hauteur et réduire ainsi la quantité d'atmosphère nous séparant de la voûte céleste. Bien entendu, le plus simple pour résoudre ce problème serait d'aller dans l'espace, mais les missions spatiales sont extrêmement coûteuses et compliquées à mettre en œuvre ; elles ne peuvent en aucun cas être appliquées pour toutes les missions d'observations. Heureusement, il existe des solutions intermédiaires. C'est le cas des missions embarquées à bord d'avion, comme l'a été le projet KAO jusqu'en 1995, et qui a été remplacé aujourd'hui par le projet SOFIA, tous deux de la NASA (National Aeronautics and Space Administration). L'avion monte jusqu'à une altitude de 13 700 m, s'affranchissant ainsi d'une bonne partie de l'atmosphère et de sa vapeur d'eau. A cette altitude, la transmission atteint les 70% au-delà de 2 THz, mais est toujours entachée de profondes raies d'absorption (Figure 1-8).

Une autre possibilité est d'embarquer l'instrument sous un ballon stratosphérique montant à près de 40 km d'altitude. C'est le cas par exemple de la mission CIDRE (Campagne d'Identification du Deutérium par Récepteur hEtérodyne) dont le but est de faire de la spectroscopie autour de 2,5 et 2,7 THz. A 40 km d'altitude, la quantité de vapeur d'eau devient extrêmement faible et cela s'en ressent dans la transmission des ondes supérieures à 1 THz. Si nous regardons le spectre entre 2400 et 2800 GHz (figure 1-9), certaines raies provoquent une extinction complète du signal sur des bandes de plusieurs GHz, même encore à 20 km d'altitude. Ces mêmes raies voient leur largeur fortement s'atténuer en passant à 40 km.

Figure 1-8 : Transmission de l'atmosphère dans des conditions de ciel exceptionnelles au Dôme A en Antarctique, courbe bleue (75 µm de vapeur

(24)

P a g e | 23 Enfin, l'ultime solution pour détecter les signaux THz est la mission spatiale. L'altitude minimale d'un satellite artificiel est de 200 km. Les satellites d'observation dédiés au domaine submillimétrique et infrarouge vont souvent bien au-delà pour ne pas être perturbés par des rayonnements parasites venant de la Terre. Ainsi, des satellites sont envoyés au point de Lagrange "L2"; les points de Lagrange sont des points d'équilibre gravitationnel. Le système "Terre-Soleil" possède 5 points de Lagrange. Le point "L2" est situé à 1,5 million de km de la Terre à l'opposé du Soleil. A cette distance, l'atmosphère n'est plus un problème. Ces dernières années ont été particulièrement riches pour le domaine submillimétrique, puisque deux satellites de l'ESA (European Space Agency), Planck et Herschel ont été mis en orbite par la fusée Ariane 5 le 14 mai 2009. Ces deux missions sont aujourd'hui terminées puisqu'elles ont consommé tout leur hélium liquide nécessaire au refroidissement des détecteurs.

Le satellite Planck a été très médiatisé grâce à son "œil" observant la première lumière de l'Univers, le fond diffus cosmologique. Planck est constitué de deux instruments, l'un LFI (Low Frequency Instrument), et l'autre HFI (High Frequency Instrument) ; le premier étant destiné à la détection basse fréquence (entre 30 et 70 GHz), le second ayant observé le ciel entre 100 et 857 GHz.

Le satellite Herschel, embarque 3 instruments : PACS, SPIRE et HIFI. PACS (Photodetector Array Camera and Spectrometer) est une caméra et un spectromètre infrarouge

Figure 1-9 : Evolution de la transmission de l'atmosphère en fonction de l'altitude entre 2,4 et 2,8 THz. Les courbes bleue et verte correspondent à l'altitude de

l'avion SOFIA. Entre 20 et 40 km, certaines raies très absorbantes de l'eau, s'atténuent fortement pour ne laisser que de fines raies d'absorption.

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P a g e| 24

cartographiant l'émission des grains de poussière entre 60 et 210 µm. SPIRE (Spectral and Photometric Imaging REceiver) remplit les mêmes fonctions que PACS mais à des longueurs d'ondes comprises entre 200 et 600 µm. HIFI (heterodyne Instrument for the Far Infrared) est un spectromètre à haute résolution pour étudier la chimie de l'Univers à travers les signatures spectrales des composés entre 480 et 1910 GHz.

Je n'ai donné ici que les dernières missions marquantes pour le monde du submillimétrique, mais il y a eu bien d'autres missions spatiales, à bord de ballons ou encore au sol pour observer et analyser le ciel dans cette gamme de longueurs d'ondes.

1.3.2) Quelle astronomie fait-on dans le THz

Pourquoi s'intéresser à cette bande de fréquence? Comme cela a déjà été mentionné dans les paragraphes précédents, un très grand nombre d'atomes et de molécules présentent des signatures spectrales caractéristiques dans le domaine THz. Ces atomes et molécules sont des indicateurs importants dans la formation et l'évolution des étoiles ou des systèmes planétaires, dans l'évolution de la matière dans les galaxies ou encore de la complexité de l'astrochimie au sein des nuages interstellaires. Le tableau 1-3, issu de [10] présente une liste non exhaustive des espèces atomiques et moléculaires importantes du domaine THz. Cette liste comprend des raies rotationnelles de molécules diatomiques, des modes vibrationnels de molécules lourdes et des transitions de structure fine d'atomes et d'ions élémentaires, comme le carbone, l'azote ou l'oxygène. Il est également indiqué sur ce tableau, si ces raies sont observables depuis le sol ou non.

(26)

P a g e | 25 Observer la lumière THz, c'est également, observer les objets relativement froids de l'univers. En effet, tous les corps émettent un rayonnement électromagnétique en fonction de leur température. C'est le rayonnement du corps noir, dont la luminance énergétique en fonction de la fréquence a été définie par Planck, comme étant :

�0(�) = 2ℎ�3 �2 ∗ 1 �� ℎ�����− 1 �. �−2.��−1.��−1 1-2

Avec, h la constante de Planck, ν la fréquence, c la vitesse de la lumière dans le vide, kB la

constante de Boltzmann (=1,38.10-23 J.K-1

Il n'est pas rare de trouver cette équation en fonction de la longueur d'onde exprimée en micromètres. Il faut alors procéder au changement de variable suivant :

) et T la température en Kelvin.

� = 106

� 1-3

Ici, c est en m.s-1

On en déduit la luminance par µm en notant : , ν en Hz et λ en µm.

Tableau 1-3 : Quelques espèces chimiques observables dans le THz. Les trois colonnes de droite précisent dans quelles conditions il est possible d'observer ces raies. "Typical Ground" fait référence à des sites d'observation basés au sol et ayant un PWV d'environ 500 µm. "Best Ground" fait référence à des sites tels que Chajnantor ou les hauts plateaux de l'Antarctique où le PWV peut descendre à 110 ou 75 µm, respectivement, les meilleurs jours. "Airborne" représente le ciel vu depuis l'avion SOFIA, avec un PWV de 8 µm. La notation "Y" implique une transmission de 25% ou plus, "M" une transmission de l'ordre de 5 à 25%, et un "N" indique que la transmission est inférieure à 5%. Les transmissions atmosphériques ont été calculées par le modèle "am" [103].

(27)

P a g e| 26 �0(�) �� = �0(�) �� 1-4 �0(�) = �0(�) ����=�0(�) ∗ 106∗2 1-5 On obtient alors : �0(�) = 2. 1024ℎ�2 �5 ∗ 1 ��10 6ℎ� ����²�− 1 �. �−2.µ�−1.��−1 1-6

En traçant cette fonction pour plusieurs valeurs de températures (figure 1-10) nous pouvons suivre l'évolution du maximum d'émission avec la température. La loi du déplacement de Wien donne un lien très simple entre la longueur d'onde du maximum d'émission et la température:

����.� = 2898 µ�. � 1-7

La bande térahertz inclut donc un grand nombre d'atomes et de molécules présentant des raies rotationnelles et vibrationnelles, ainsi que les objets émettant comme des corps noirs à une température comprise entre une dizaine et une centaine de Kelvin. Une très grande majorité de la matière du milieu interstellaire est justement dans cette gamme de température. Notre système solaire abrite de nombreux objets pouvant être observés par la fenêtre térahertz. L'étude des atmosphères planétaires et cométaires est directement liée à la spectroscopie térahertz. Des molécules comme l'eau, sous sa forme H2O, ou ses formes

deutérées, HDO et D2

Figure 1-11

O, sont des espèces qui suscitent beaucoup d'intérêt. L'eau a été détectée sous forme gazeuse dans toutes les atmosphères des planètes et des comètes [11]; sous forme solide à la surface de Mars, des comètes et sur de nombreux satellites. Il existerait peut-être de l'eau liquide sous la surface glacée de Europa [12], Encelade et sur d'autres satellites. La mesure du ratio deutérium sur hydrogène donne des informations précieuses sur l'histoire de la formation des étoiles. Le deutérium a été créé dans les premiers instants de l'Univers, et est constamment détruit dans les étoiles depuis sa création. Dans le milieu interstellaire, le deutérium est en grande partie inclus dans la molécule HD. Cette molécule peut être détectée par sa transition rotationnelle à 2,7 THz. L'observation d'un spectre d'un nuage interstellaire d'environ 30 K ( ) montre qu'il

(28)

P a g e | 27

Figure 1-10 : Spectre d'émission de quelques corps noirs à différentes températures. Le fond diffus cosmologique (CMB) avec une température d'environ 3 K, présente un maximum d'émission vers 1 mm de longueur d'onde. Le Soleil qui a une

température de surface de 5700 K a un maximum d'émission dans le domaine visible et émet aussi des fréquences THz. Les corps ayant une température entre 30 et 100 K ont un maximum d'émission dans la bande THz.

Figure 1-11 : Spectre d'un nuage interstellaire d'environ 30 K. Le spectre inclut le continuum et des raies d'émission d'atomes et de molécules qui composent

(29)

P a g e| 28

existe encore beaucoup d'autres atomes et molécules à observer dans le domaine THz. La lecture des articles de Phillips [13] et de Kulesa [10], donne un bon aperçu de l'étendue des possibilités qu'offre le domaine térahertz aux astronomes, astrophysiciens et cosmologues.

1.3.3) Méthodes et technologies pour la détection THz

Il existe deux différentes façons de capter l'information de la lumière THz :

- La détection directe, également appelée détection incohérente car elle ne donne pas accès à la phase du signal reçu.

- La détection hétérodyne, ou cohérente, où le signal reçu est transposé à plus basse fréquence avant d'être analysé par un spectromètre.

1.3.3.1) Détection directe

Dans le cas de la détection directe, le détecteur réagit au rayonnement incident par une variation d'une de ses caractéristiques physiques. Cette variation peut être lue par la production d'une tension ou un courant proportionnels à l'intensité du rayonnement reçu. Ces détecteurs sont caractérisés par leur sensibilité exprimée en V.W-1 (ou en A.W-1) ou encore leur puissance équivalente de bruit (Noise Equivalent Power "NEP"). Le NEP est le bruit du détecteur exprimé en puissance de rayonnement détecté dans une bande de fréquence de 1 Hz. Le NEP est exprimé en W.Hz-1/2. Les détecteurs directs employés dans les missions spatiales récentes atteignent des NEP de l'ordre de 10-18 W.Hz-1/2, ce niveau de bruit est obtenu en les refroidissant à 0,1 K [14]. Les détecteurs directs peuvent être placés derrière une grille ou un interféromètre de Fabry-Perrot pour faire de la spectroscopie, mais ces techniques sont limitées à des résolutions spectrales modérées (R = ν/Δν ≈ 103) [15], [16]. La mesure des raies spectrales des molécules ou encore des décalages Doppler, nécessitent souvent des résolutions plus élevées, de l'ordre de R ≈ 106.

(30)

P a g e | 29 A ce jour, il n'existe pas d'électronique suffisamment fiable et rapide pour traiter les signaux THz en conservant l'information sur la phase. La méthode de détection hétérodyne est une technique de détection cohérente qui transpose le signal THz à plus basse fréquence, de l'ordre du GHz. Ce signal GHz est ensuite traité par des techniques d'amplification classiques. Le récepteur hétérodyne conserve toute l'information sur la phase du rayonnement. La détection hétérodyne est réalisée en mélangeant deux signaux : le signal à détecter, que nous appellerons par la suite le signal radiofréquence "RF", de fréquence νRF et un signal monochromatique produit par un oscillateur local de fréquence

νOL, très proche.

Figure 1-12 : Principe d'un récepteur heterodyne "Double SideBand" (DSB). Les signaux RF et OL sont placés sur le même chemin optique et couplés à un composant non-linéaire, le mélangeur. Le mélangeur combine les deux signaux et

produit un signal de fréquence intermédiaire qui est ensuite amplifié avant d'être analysé.

Ces deux signaux sont guidés vers le mélangeur, il s'agit d'un composant présentant une caractéristique courant-tension non-linéaire, c'est cette non-linéarité qui permet de mélanger les signaux. Considérons l'exemple d'un récepteur hétérodyne double bandes latérales (Double SideBand DSB) (Figure 1-12), qui dans notre cas, sera un détecteur de puissance quadratique. Notons gRF(t) le signal RF en entrée et gOL(t) le signal d'OL, définis

par :

���(�) = ���cos(����) 1-8

���(�) = ���cos(����) 1-9

Avec, VRF et VOL les amplitudes respectives des signaux et ωRF et ωOL leurs pulsations

(ω=2πν). Ainsi, le mélangeur va capter une puissance variant au cours du temps, telle que :

(31)

P a g e| 30

=(VOLcos(ωOLt))2+(VRFcos(ωRFt))2+2VOLVRFcos(ωOLt) cos(ωRFt) 1-11 En continuant le développement de cette équation des termes en (2ωOL, 2ωRF et ωOL+ωRF)

apparaissent, mais en pratique ces derniers varient trop rapidement pour être pris en compte par le mélangeur. Nous pouvons donc simplifier la puissance vue par le détecteur en écrivant :

�(�) =12(���² +���²) +�����cos((���− ���)�) 1-12 Le terme de puissance VOL² est constant dans le temps et est beaucoup plus grand que la

puissance du signal à détecter VRF². Le mélangeur va donc suivre une puissance variant au

cours du temps selon la pulsation : �� = |���− ���|.

P(t)≈1

2VOL²+VOLVRFcos(ωFIt) 1-13

Le mélangeur produit un battement en sortie, de fréquence intermédiaire νFI = | νOL - νRF |.

Le signal d'oscillateur local est une référence pour cette mesure, il est donc important qu'il soit très stable en puissance et en fréquence afin de conserver toute l'information du signal RF d'origine. La sensibilité d'un récepteur hétérodyne THz est essentiellement due à la sensibilité du mélangeur. Le signal est d'abord injecté dans le mélangeur, c'est donc le niveau de bruit du mélangeur qui domine. Il existe différents composants électroniques permettant de faire le mélange hétérodyne.

Figure 1-13 : La détection hétérodyne transpose le signal RF à plus basse fréquence. La pulsation de fréquence intermédiaire est égale à ωFI = |ωOL - ωRF|.

(32)

P a g e | 31 En radioastronomie, les diodes Schottky [17] ont été les premiers composants utilisés pour la détection hétérodyne THz. Elles présentent l'avantage de fonctionner à température ambiante et de couvrir une large bande de fréquence jusqu'à plusieurs THz. Mais ce composant est peu sensible et nécessite une forte puissance d'OL (typiquement plusieurs mW) [18], qui est d'ailleurs difficile à obtenir lorsque nous nous rapprochons des fréquences THz. Les composants supraconducteurs apparus dans les années 90, comme les jonctions Supraconducteur-Isolant-Supraconducteur "SIS" [19] et les bolomètres à électron chaud "HEB" (Hot Electron Bolometer) [20], ont remplacé les diodes Schottky dans les détecteurs hétérodynes THz car ils sont beaucoup plus sensibles et nécessitent nettement moins de puissance d'OL (quelques centaines de nW).

Une diode Schottky est constituée d'une jonction entre un métal et un semi-conducteur, souvent de l'Arséniure de Gallium (GaAs). L'application d'une tension positive sur le métal provoque une augmentation non-linéaire du courant I :

� = ��. e� ������� 1-14

où Is est le courant de saturation, e la charge de l'électron, V la tension appliquée, η le facteur d'idéalité, kB la constante de Boltzmann et T la température.

Les jonctions SIS sont constituées de deux électrodes supraconductrices séparées par une très fine couche isolante de quelques nanomètres d'épaisseur. En appliquant une tension de polarisation jusqu'à une tension de gap, les paires de Cooper (voir paragraphe 1.3.3.3) peuvent se briser en deux électrons (des quasiparticules). Le passage des quasiparticules de l'autre côté de l'isolant est alors possible par effet tunnel, ce qui se traduit par une forte augmentation du courant. La caractéristique I(V) d'une jonction SIS est fortement non-linéaire (Figure 1-14), beaucoup plus qu'une diode Schottky.

(33)

P a g e| 32

Lorsque la jonction SIS est polarisée légèrement en dessous de la tension de gap et est pompée par un rayonnement d'oscillateur local, une quasiparticule peut alors franchir la barrière isolante en absorbant un photon THz. L'effet supraconducteur et la forte non linéarité des SIS font d'eux des mélangeurs hétérodynes extrêmement sensibles. Mais les jonctions SIS sont limitées en fréquence à cause de l'énergie de gap du supraconducteur utilisé. La fréquence maximale (fréquence de gap) est définie par νgap=Δ/h, avec Δ l'énergie

de gap et h la constante de Planck. Les jonctions à base de niobium (Nb) qui ont une énergie de gap peu élevée, seront limitées aux environ de 700 GHz, alors que les jonctions à base de nitrure de niobium (NbN) qui ont une énergie de gap plus importante, seront limitées à une fréquence de 1,21 THz. Au-delà de la fréquence de gap le bruit devient trop important et le mélange devient impossible.

Les mélangeurs HEB sont des détecteurs thermiques fonctionnant très près de la température de transition supraconductrice (température critique TC). Un HEB est un

nano-pont supraconducteur reliant les deux électrodes d'une antenne planaire. Le HEB ne présente pas de limitation en fréquence comme c'est le cas pour les SIS, il peut donc fonctionner à plusieurs THz. Ce sont des composants très sensibles dans le domaine THz et ils nécessitent peu de puissance d'oscillateur local (de l'ordre de la centaine de nW). La bande passante de la fréquence intermédiaire est assez limitée par rapport aux Schottky et aux jonctions SIS. Malgré cela, les mélangeurs HEB sont aujourd'hui les plus prometteurs pour la détection dans le domaine THz.

Figure 1-14 : Caractéristique I(V) d'une jonction SIS non pompée (en bleu) et pompée

(34)

P a g e | 33

1.3.3.3) Supraconductivité

La supraconductivité est un phénomène physique caractérisant l'absence de résistance électrique et le diamagnétisme parfait, c'est à dire la répulsion du champ magnétique en dehors du matériau supraconducteur.

En 1908, Kamerlingh Onnes réussit à liquéfier de l'hélium pour la première fois, et atteint alors une température de 4,2K. En 1911, Kamerlingh Onnes dirige une expérience menée par un étudiant, Gilles Holst, sur les propriétés du mercure à très basse température. Lors de cette expérience, ils ont mis en évidence le fait que la résistivité du mercure devenait brutalement nulle en dessous d'une certaine température, que nous appelons maintenant la température critique TC. Ils venaient de découvrir l'effet supraconducteur, ou plus

exactement un des effets de la supraconductivité. Car en 1933, Meissner et Ochsenfeld découvrent la répulsion magnétique des supraconducteurs [21].

Lorsqu’un métal est plongé dans un champ magnétique, les lignes de champ traversent le métal tant qu'il est dans son état normal (T > TC

figure 1-15

), si la température est inférieure à la température critique, le métal est alors supraconducteur et les lignes de champ magnétique

sont repoussées à l'extérieur du métal ( ).

Figure 1-15 : Dans un métal normal (T>TC) le champ magnétique le traverse. Lorsque T<TC, le métal devient supraconducteur, il se crée alors des courants à la surface du supraconducteur induisant un champ magnétique qui repousse le champ magnétique

(35)

P a g e| 34

L'effet Meissner est expliqué en 1935 par London qui décrit l'état supraconducteur comme étant une disparition du champ électrique (��⃗ = 0) du fait de la conductivité infinie, mais également une disparition du champ magnétique (��⃗ = 0) à l'intérieur du supraconducteur. Des courants électriques se forment à la surface du matériau induisant un champ magnétique s'opposant au champ magnétique extérieur. C'est ce comportement qui permet de faire léviter un aimant au-dessus d'un supraconducteur (figure 1-16).

En 1957, trois physiciens, Bardeen, Cooper et Schrieffer élaborent la théorie BCS [22] qui est une approche microscopique de la supraconductivité. La physique quantique nous apprend que dans un métal, les électrons se comportent comme des ondes périodiques indépendantes les unes des autres, car les électrons sont des fermions et que le principe d'exclusion de Pauli leur interdit d'être dans un même état quantique. L'idée de la théorie BCS est qu’en dessous de la température critique du métal, les électrons forment un condensat (une onde collective) circulant sans résistance dans le réseau cristallin. La formation d'un tel condensat est impossible pour des fermions à cause du principe d'exclusion de Pauli. Ce problème a mis 40 ans avant de trouver une solution finalement apportée par Léon Cooper. Sa proposition est que des électrons de spin opposés peuvent s'associer par paires, formant ainsi des bosons, qui ne sont pas soumis au principe d'exclusion de Pauli. L'explication est la suivante : lorsqu'un électron se déplace dans le réseau d'ions d'un supraconducteur, il provoque des vibrations du réseau que nous appelons les "phonons". Après le passage de l'électron, les ions ne reviennent pas tout de suite dans leur position de base à cause de leur inertie, cela crée localement un excès de charges

Figure 1-16 : Une plaque de Cuprate (alliage supraconducteur à haute température critique, ≈100 K) est refroidie avec de l'azote liquide (77 K). Le courant induit à la surface du supraconducteur génère un champ magnétique s'opposant à celui de l'aimant (cube doré), ce dernier est donc en lévitation.

(36)

P a g e | 35 positives qui entraine un second électron dans la course du premier et ce malgré la répulsion coulombienne (figure 1-17). Deux électrons peuvent alors se lier par l'interaction électron-phonon formant ainsi une paire de Cooper. La distance entre les électrons d'une paire de Cooper, que nous appelons la longueur de cohérence (notée ξL) est en moyenne de 10-6 m.

Cette distance est relativement grande comparée à la distance entre les atomes, si bien que les différentes paires de Cooper se superposent pour ne former qu'une seule onde quantique occupant tout le supraconducteur. Cette onde est insensible aux défauts dans le matériau ce qui provoque la disparition de la résistance électrique. L'énergie d'interaction d'appariement d'une paire de Cooper est assez faible, de l'ordre de 10-3 eV. L'énergie thermique (Eth≈kBT, avec kB de l'ordre de 10-4 eV.K-1) peut facilement briser les paires de

Cooper, c'est pour cette raison que l'effet supraconducteur se produit à basse température (≈10 K) dans un supraconducteur classique (à basse température critique). Depuis la fin des années 80, de nouveaux matériaux synthétisés artificiellement en laboratoire présentent un effet supraconducteur à des températures supérieures à 20 K [23], certains dépassant même les 130 K [24]. La théorie BCS "classique" ne permet pas de décrire l'effet supraconducteur pour ces matériaux, il est possible que l'origine de leur supraconductivité soit différente de celle du plomb ou du mercure mais il convient de rester prudent sur ce point. Ces nouveaux supraconducteurs à haute température critique font l'objet de nombreuses recherches dans les laboratoires et la liste des matériaux présentent un effet supraconducteur s'allonge régulièrement [25].

Dans les paires de Cooper chaque électron possède une énergie d'excitation notée Δ. Si une énergie égale à 2Δ est fournie, cela brise la paire de Cooper en produisant deux particules appelées quasiparticules. Ces quasiparticules peuvent être assimilées à des électrons, mais

Figure 1-17 : Le passage d'un électron (en bleu) provoque une déformation du réseau d'ions (en rouge) créant localement un excès de charges positives qui

(37)

P a g e| 36

elles ne le sont pas vraiment car leur durée de vie est beaucoup plus courte. Cette énergie de 2Δ est l'énergie de gap séparant l'état supraconducteur de l'état normal. La théorie BCS donne une expression de l'énergie d'excitation E possible des quasiparticules :

� = ��2+2 1-15

Avec, ε l'énergie de l'état normal des quasiparticules mesurée à partir du niveau de Fermi. La densité d'état du métal normal ne change pas lors de la transition vers l'état supraconducteur:

��(�). �� = ��(�). �� 1-16

Avec, NS(E) et NN(ε) les densités d'états des quasiparticules d'énergie E dans le

supraconducteur et d'énergie ε dans le métal normal. Lorsque la température est juste au-dessus de la température critique, nous pouvons écrire que pour une énergie ε proche de l'énergie de Fermi :

��(�) ≈ ��(0) 1-17

Où NN(0) représente la densité d'état du niveau de Fermi après la transition de l'état

supraconducteur vers l'état normal. A partir des deux équations précédentes, nous pouvons en déduire la densité d'état des quasiparticules dans le supraconducteur:

��(�) = ��(0)���� = ⎩ ⎨ ⎧��(0) � √�2− ∆2,� > ∆ 0,� < ∆ 1-18

Cette relation indique que les quasiparticules ne peuvent pas exister si l'énergie est inférieure à l'énergie de gap. Pour une énergie E = Δ, la densité d'état croît très rapidement vers l'infini (figure 1-18).

(38)

P a g e | 37

Figure 1-18 : Densité d'état en fonction de l'énergie dans un supraconducteur à température nulle.

D'après la théorie BCS, il existe une relation entre la température critique TC et le gap à T=0:

∆(0) = 1,76 ���� 1-19

L'énergie de gap varie en fonction de la température selon l'équation ci-dessous : ∆(�) ∆(0) ≈�cos � �� 2�� 2 1-20

Cette variation (figure 1-19) montre que l'énergie de gap est très proche du gap maximal lorsque T ≤ TC/2. Prenons l'exemple du niobium dont la température critique est de 9,2 K et

∆(0) = 3 meV, en le refroidissant à la température de l'hélium liquide, soit 4,2 K, l'énergie de gap sera très proche de sa valeur maximale.

N

S

(E)

E

NN(0)

(39)

P a g e| 38

Figure 1-19 : Evolution de l'énergie de gap en fonction de la température.

0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 Δ(T)/Δ(0) T/TC

(40)

P a g e | 39

Chapitre 2 : Le bolomètre à électrons chauds "HEB"

Le Bolomètre à électrons chauds (HEB en anglais) est un type particulier de bolomètre. Ce chapitre détaille le fonctionnement général d'un bolomètre et son utilisation en tant que mélangeur. Ensuite, le cas particulier des mélangeurs HEB sera traité.

2.1) Les bolomètres

Le bolomètre est un détecteur thermique de rayonnement électromagnétique. Il a été inventé par l'astronome S.P. Langley en 1881, dans le but de détecter le rayonnement infrarouge provenant du Soleil. Le principe de fonctionnement du bolomètre est basé sur l'interaction entre le rayonnement incident et la matière constituant le bolomètre. Cette interaction engendre des fluctuations de température qui sont mesurée par un thermomètre. Le thermomètre est un élément résistif dont l'impédance varie en fonction de la température. Il est caractérisé par un coefficient de variation � = 1

� ��

��. Dans le cas d'un

bolomètre à base de semi-conducteur le coefficient α est négatif, alors que pour les bolomètres à supraconducteurs α est positif. Les bolomètres sont des détecteurs très large bande et très sensibles ; leur gamme d'utilisation s'étend du millimétrique à l'infrarouge et certains bolomètres peuvent être optimisés pour la détection de rayons X. Dans le cadre de cette thèse, on s'intéressera particulièrement au cas du bolomètre pour la détection submillimétrique et à son fonctionnement en tant que mélangeur pour la détection hétérodyne.

2.1.1) Principe de fonctionnement

Un bolomètre est généralement constitué de trois sous-ensembles (voir figure 2-1): • Un absorbeur de rayonnement.

• Une résistance variant en fonction de la température et couplée thermiquement à l'absorbeur.

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P a g e| 40

Les bolomètres sont des détecteurs sensibles au carré de l'amplitude du signal entrant, on parle de détecteurs quadratiques. Considérons le cas d'un bolomètre classique dont le schéma thermique est représenté ci-dessus. Un rayonnement incident de puissance Pray, est

absorbé provoquant une élévation de la température. Le bolomètre est également soumis à une puissance électrique Pel du fait de sa polarisation. Sous l'influence de cette puissance

P=Pray+Pel, le bolomètre atteint une température notée TB. L'absorbeur perd également de

la puissance par le biais de son lien avec un réservoir de température T0, cette puissance de

fuite Pfuite est égale à �(�)(�− �0). La conductivité G est fortement dépendante de la

température et varie en Tβ. Selon la nature du lien thermique entre l'absorbant et le

réservoir, β est généralement égale à 2 ou 4 suivant que le lien est métallique ou diélectrique. Le principe de conservation de l'énergie nous permet d'écrire la relation suivante à l'équilibre thermique :

�� �� = � ��� �� =� − ������ 2-1 Avec ΔT=TB-T0 D'où,

et C la capacité calorifique de l'absorbeur.

Figure 2-1 : Représentation d'un bolomètre conventionnel. L'absorbeur assure le couplage avec le rayonnement incident et le thermomètre

(42)

P a g e | 41

������ − �(�)(�0− �) =� 2-2

A l'état stationnaire nous avons, ���

�� = 0 et �� = � ��.

�� = ���������, est la conductance dynamique autour de la température de fonctionnement du

bolomètre �. La solution de l'équation 2-2 est alors: �� =�0+

��−�� 2-3

τ = C/Gd

A présent, détaillons ce qui se produit dans le bolomètre lorsque celui-ci varie autour de son point de fonctionnement. Pour cela nous supposons que le rayonnement incident est composé d'un état stationnaire et d'une composante dépendante du temps variant selon la pulsation � = 2��, ν étant la fréquence du signal. On réécrit l'équation

, est la constante de temps du bolomètre, c’est-à-dire le temps que met la température pour atteindre son état stationnaire.

2-2 en ne prenant en compte que les grandeurs perturbées au premier ordre du système, on obtient alors l'équation d'équilibre thermique dynamique :

������ +��� − ����= ����� 2-4

Le thermomètre est polarisé avec un courant ou une tension continus, le choix entre les deux modes de polarisation est guidé par le coefficient de variation α du thermomètre. Il convient ici de distinguer les deux cas suivants :

• � < 0, cas des semi-conducteurs. Le bolomètre est polarisé par un courant constant I et on mesure les variations de tension. Le courant de polarisation dissipe dans le bolomètre une puissance �� = ��². Le signal incident provoque une augmentation de la température, ce qui fait diminuer R et donc diminue la puissance dissipée par effet joule entrainant ainsi un refroidissement du bolomètre, c'est ce qu'on appelle la contre-réaction électrothermique.

• � > 0, cas des supraconducteurs. Ici, une polarisation en courant n'est pas envisageable, car une augmentation de la température engendrerait une augmentation de la résistance ce qui entrainerait alors une augmentation de la puissance dissipée dans le bolomètre. Ceci aboutirait à un manque de stabilité du

(43)

P a g e| 42

système. Le bolomètre supraconducteur est donc polarisé en tension continue, la puissance dissipée devient �� = �²

�, on retrouve alors un régime de contre-réaction

électrothermique, la puissance dissipée diminue lorsque la résistance augmente. Dans un supraconducteur le coefficient α est supérieur de 1 à 2 ordres de grandeur par rapport au semi-conducteur (figure 2-2), ce qui lui confère une très grande sensibilité à de petites variations de température et une contre-réaction électrothermique élevée.

Figure 2-2 : Caractéristiques R(T) d'un semi-conducteur et d'un supraconducteur. Dans un semi-conducteur, l'augmentation de la température fait diminuer la résistance. Dans un supraconducteur, l'augmentation de température

engendre une augmentation de la résistance (voir texte).

La variation de la puissance du signal incident crée des fluctuations de température de l'absorbeur qui sont suivies par la résistance du thermomètre. La puissance électrique dissipée évolue avec la résistance en fonction des fluctuations de température.

2.1.1.1) Cas d'un bolomètre à semi-conducteur

Pour un bolomètre à semi-conducteur on obtient alors :

���� = ���� ��� � = �2���� �� = ������ 2-5

d'où,

(44)

P a g e | 43 On a alors la constante de temps du bolomètre, que nous appelons ici la constante de temps efficace : ���� = � � − ����= � 1− ���� � 2-7

La contre-réaction électrothermique a un effet important sur la conductivité du bolomètre, nous pouvons exprimer cet effet en un terme de conductivité thermique effective �� =��− ����. Dans la mesure où α est négatif dans ce cas précis, Ge > Gd

On considère que la fluctuation de puissance du rayonnement absorbé a une variation sinusoïdale, ����� = ���������, la variation de température du bolomètre devient �� = ������.

, cela a comme conséquence de réduire la constante de temps du bolomètre, ��� <�. Cette constante de temps ���� caractérise le temps nécessaire au bolomètre pour suivre une modification de la puissance du signal entrant, en d'autres termes, ��� détermine quelle est la fréquence maximale que le bolomètre peut suivre si la puissance du rayonnement absorbée est modulée. Nous verrons par la suite que lorsque le bolomètre est utilisé comme mélangeur, c'est cette constante de temps qui détermine la bande passante de la fréquence intermédiaire.

En injectant ces termes dans l'équation 2-6, cela donne :

����� = (��− ����+���)�� 2-8

Le bolomètre étant polarisé en courant, le suivi de la température se fait en mesurant la tension aux bornes du thermomètre :

� = �� ⟹ �� =���� �� = � ���� �� = ���� 2-9

On en déduit une caractéristique importante du bolomètre : sa réponse en tension. Celle-ci s'exprime en (V.W-1) et est définie par :

��(�) = ���� ��� 2-10 ��(�) = �� �− ����+��� = �� ��+��� 2-11

(45)

P a g e| 44

Ce qui nous donne la valeur absolue de la sensibilité, on retiendra donc :

��(�) = ��

���1 + �²����²

2-12

Lors du développement d'un détecteur, on cherche à obtenir le temps de réponse le plus petit et la sensibilité la plus grande possible. Or en regardant les équations de la constante de temps (éq. 2-7) et de la réponse en tension du bolomètre (éq. 2-12), il est évident que la réduction du temps de réponse passe par une augmentation de Ge, mais cela conduit à une

diminution de la réponse en tension. Il faut donc toujours faire un compromis entre vitesse et sensibilité.

2.1.1.2) Cas d'un bolomètre à supraconducteur

Dans le cas du bolomètre à supraconducteur, peu de choses changent par rapport au cas précédent : le coefficient α est désormais positif et pour des raisons de stabilité évoquée précédemment, la polarisation se fait en tension constante. La fluctuation de puissance dissipée s'écrit alors :

���� =���� ��� � = − �

² �²

��

�� �� = −������ 2-13

Le signe "-" devant α, rappelle qu'il y a bien un effet de contre-réaction négatif. En injectant la variation de puissance électrique dissipée dans l'équation 2-4, nous retrouvons la constante de temps efficace du bolomètre :

���� =

� +����

2-14

Comme cela a été mentionné plus haut, la contre-réaction électrothermique d'un supraconducteur est beaucoup plus forte que celle d'un semi-conducteur, ce qui a pour effet de réduire le temps de réponse pour un supraconducteur.

Le signal mesurant les fluctuations de température est cette fois une variation de courant : � =�

� ⇒ �̃ = ���� �� = − ��2

��

(46)

P a g e | 45 La réponse en courant du bolomètre supraconducteur, s'exprime en A.W-1 et s'écrit:

��(�) =���̃ ��� 2-16 ��(�) = −�� �+����+���= −�� ��+��� 2-17

En prenant la valeur absolue, la sensibilité devient :

��(�) = ��

���1 + �²����²

2-18

Les supraconducteurs présentent une très forte dépendance entre la résistivité et la température dans la zone de transition entre l'état normal et l'état supraconducteur. Il est alors possible de se placer dans un état de contre-réaction thermique dominante ���� ≫ �, l'expression de la réponse en courant devient alors :

��(�) ≈ 1 � 1 �1 + �²����² 2-19

De la même manière que pour les semi-conducteurs, il existe un compromis entre vitesse et sensibilité du bolomètre.

2.2) Mélangeur à bolomètre

Un bolomètre est capable de fonctionner comme un mélangeur pour la détection hétérodyne grâce à sa capacité à suivre de petites fluctuations d'un signal. Si le rayonnement incident est constitué de deux signaux de fréquences très proches, νOL et νRF

1.3.3.2)

, le bolomètre est alors plongé dans un signal modulé. Tant que sa constante de temps est inférieure à la période de la fréquence intermédiaire, �� = |���− ���|, le bolomètre produit un signal variant au rythme de la fréquence intermédiaire. Reprenons les considérations énoncées dans le chapitre ( , à savoir que le bolomètre baigne dans un signal de tension V(t)

Figure

Figure 1-18 : Densité d'état en fonction de l'énergie dans un supraconducteur à température nulle
Figure 2-1 : Représentation d'un bolomètre conventionnel. L'absorbeur  assure le couplage avec le rayonnement incident et le thermomètre
Figure 2-3 : Exemple d'un nano-pont HEB entre les électrodes d'une antenne planaire.
Figure 2-8 : Schéma des échanges d'énergie pour une boite élémentaire dx du pont HEB.
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