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Priyan DIAS Est-ce que la science est très différente de la religion? Une perspective polanyienne

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Priyan DIAS

Est-ce que la science est très différente de la religion? Une perspective polanyienne

Polanyi a fait valoir que la science devait être poursuivie comme une passion personnelle dans un cadre fiduciaire. Ses écrits sont utilisés pour démontrer que la science n'est pas complètement différente de la religion, même si elle a été construite pour l’être. Science et religion se servent toutes deux de la foi pour agir. La science, comme la religion, a aussi des éléments subjectifs indispensables, mais cela n'empêche pas l'objectivité. En outre, la science elle-même est souvent dogmatique et dispose d'un ensemble d'engagements fondamentaux qui ne changent pas, ce qui est semblable aux croyances fondamentales dans les religions. Enfin, bien que la science cherche l'assentiment de tous ses praticiens alors que les gens sont divisés en de nombreuses religions, il ya des moments où la science est et peut-être même devrait être poursuivie dans différentes et écoles concurrentes de la pensée.

Mots clés: alternatives, détachement, dogmatisme, doute, foi, paradigme, Polanyi, religion, science, subjectivité

Introduction

Il a été soutenu de façon convaincante que la conception chrétienne du monde avait largement contribué à créer la révolution scientifique en Europe1 ; de nombreux scientifiques de renom ont été des chrétiens pratiquants et ont vu leur science comme faisant partie de leur dévotion à Dieu.

Cependant, depuis les Lumières européennes, la science a largement, mais pas complètement, remplacé la religion comme fondement de nos structures de plausibilité. En plus de cela, avec la montée de guerres et de conflits sur la base des identités religieuses, certains pensent aujourd'hui que la religion est positivement dangereuse plutôt que simplement inoffensive2.

Le présent document examine certaines des revendications formulées pour la science contre la religion. Il fera ensuite largement appel aux travaux de Michael Polanyi, entre autres, pour montrer que la plupart des affirmations faites pour la science sont un peu déplacées, et qu'il ya beaucoup de similitudes entre la pratique de la science et de la religion. Il fera valoir que la science et la religion sont des activités de l'homme pour la découverte et pour l'action.

Les quatre revendications à traiter sont les suivantes:

1. La science est basée sur des faits vérifiables, alors que la religion repose sur la foi qui est ne se prêtent pas à une vérification.

2. La science est réalisée de manière que le pratiquant est détaché de son enquête, alors que la religion est caractérisée par la subjectivité du pratiquant.

3. La science a vu ses théories renversées par de meilleures théories, tandis que la religion est caractérisée par des attitudes dogmatiques.

4. La science cherche l'assentiment de tous ses pratiquants, alors que les opinions sont très contrastées d'une religion à une autre.

Ce n'est pas l'objectif de ce document de faire valoir qu'il n'y a pas de différences du tout entre science et religion. Toutefois, compte tenu de la perception populaire selon laquelle elles sont aux antipodes, comme en témoignent les revendications ci-dessus, l'intention ici est de montrer que le fossé

1 Alexander, D. Rebuilding the Matrix: Science and Faith in the 21st Century, Oxford: Lion (2001).

2 Dawkins, R. The God Delusion, Boston: Houghton Mifflin Harcourt (2006).

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entre elles n'est pas infranchissable. Polkinghorne se réfère à une relation de «cousinage » entre la théologie et la science3, évitant peut-être délibérément l'adjectif «fraternelle» qui dépeint une relation plus étroite. Ce document suppose une définition de travail de la religion comme un système de croyance qui implique une réalité transcendantale et l'expérience personnelle. Il fait quelques références spécifiques au christianisme, la religion dans le cadre de laquelle Polanyi a écrit.

Michael Polanyi

Michael Polanyi est né en Hongrie en 1891 et a commencé sa carrière en tant que médecin au cours de la Première Guerre mondiale. Plus tard, il a poursuivi son véritable amour, qui était la chimie, comme physico-chimiste à l'Institut Kaiser Wilhelm à Berlin. Il a quitté l'Allemagne dans l'ombre du nazisme dans les années 1930 pour rejoindre l'Université de Manchester en Angleterre en tant que professeur de chimie physique. Après un certain nombre d'années dans ce poste, il a échangé cette chaire pour celle de professeur de sciences sociales, bien qu'il ait été élu membre (Fellow) de la Royal Society. Son dernier article scientifique a été publié en 1949, mais il avait publié en économie et en philosophie depuis 1935. Quand il a pris sa retraite de l'Université de Manchester, il a travaillé pendant deux ans en tant que chercheur au Merton College à Oxford, où il a vécu et a continué à écrire jusqu'à sa mort en 1976. Ses trois ouvrages majeurs sont nés de séries de conférences qu’il a été invité à donner, à savoir les conférences Riddell à l'Université de Durham en 1946 (Science, foi et société4), les conférences Gifford à l'Université d'Aberdeen en 1951-52 (Personal Knowledge5) et les conférences Terry en 1962 à l'Université de Yale (The Tacit Dimension6) . Les titres de ces livres sont un bon reflet de ses préoccupations.

À bien des égards, la philosophie de Polanyi de la science était une critique du positivisme logique, qui tenait que l'observation sensorielle était le fondement de toute véritable connaissance. Le positivisme était un produit du siècle des Lumières européen, qui, à son tour a été considérablement influencé par René Descartes. Deux de ses idées clés ont trouvé leur expression dans le positivisme. La première est l'idée de détachement. Le scientifique était censé s'isoler de son enquête, afin de freiner les préjugés qu'il pourrait avoir. En fait ce détachement provient en partie de la doctrine cartésienne du dualisme cartésien (d’après Descartes), qui soutient que l'esprit et la matière sont strictement des entités séparées. Son autre idée était que le scepticisme, aussi appelé doute méthodologique, devrait être la marque d'un scientifique, afin de s'assurer que la connaissance était certaine. La culture scientifique à laquelle a fait face Polanyi à l’époque était obsédée par l'idée d’objectivité indépendante du pratiquant (chercheur).

Une grande préoccupation de Polanyi, c'était que les deux fondements de la science et les valeurs de la société avaient été érodées par une approche de l'épistémologie fondée sur ce détachement et ce doute méthodologique. Sa philosophie a été façonnée par son expérience en tant que scientifique, et sa thèse principale est que les connaissances scientifiques contiennent un élément tacite inexprimable, fourni par la formation (background) du scientifique, son imagination et sa compétence. Une telle connaissance personnelle, qui implique aussi un aspect fiduciaire (ou du domaine de la foi), n'est pas purement subjective, cependant, parce qu'elle compote une intention universelle, et est jugée par la communauté des scientifiques.

Malgré un intérêt évident de Polanyi pour le débat ou le dialogue science-religion, c’est un philosophe quelque peu oublié. Denis Alexander7 ne se réfère pas du tout à lui dans son livre volumineux. C’est la même chose pour Fraser Watts8, le premier Maître de conférences Starbridge en

3 Polkinghorne, J. Theology in the Context of Science, London: SPCK (2008), p. xv.

4 Polanyi, M. Science, Faith and Society, Chicago: University of Chicago Press (1946)

5 Polanyi, M. Personal knowledge: Towards a Post-critical Philosophy, Chicago: University of Chicago Press (1958).

6 Polanyi, M. The Tacit Dimension, New York: Doubleday & Co. (1966).

7 Alexander op. cit., (1).

8 Watts, F. ‘Are science and religion in conflict?’, Zygon (1997) 32(1), 125-138.

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théologie et en sciences naturelles à l'Université de Cambridge en sa conférence inaugurale. Lesslie Newbigin9 et Vinoth Ramachandra10, cependant, écrivant tous deux sur la mission chrétienne pour une culture scientifique, s’appuient fortement sur Polanyi. Il en va de même pour John Polkinghorne, qui le décrit comme «le philosophe de la science qui ... a offert la formulation la plus utile de la méthode et des résultats de la science. »11

Revendication 1 - La science est basée sur des faits vérifiables, alors que la religion repose sur la foi qui n'est pas susceptible d'une vérification

Cette revendication de la science est au moins partiellement fausse et constitue une diminution de sa stature intellectuelle. Le fait est que l'observation ou même le catalogage des faits ne constitue pas la science, qui se caractérise principalement par des théories. Polanyi a fait valoir que les théories sont plus objectives que l’expérience immédiate, parce que, (i) une théorie est quelque chose d'autre que soi-même, (ii) une théorie ne peut pas se laisser égarer par ses illusions personnelles et (iii) une théorie peut être construite sans tenir compte de la démarche normale de chacun à l’expérience.12 Nous devrions nous méfier de l'expérience quotidienne, car elle pourrait donner naissance à la subjectivité et même à l'erreur13: c'est une telle expérience qui nous donne à penser que le soleil tourne autour de la terre, par exemple.

En fait l'expérience quotidienne est très éloignée des frontières de la science à l'heure actuelle, avec les quarks, les supercordes, les multivers et l'énergie noire. De telles idées sont presque aussi difficiles à croire que, par exemple, l’affirmation religieuse centrale pour les chrétiens selon laquelle quelqu'un est ressuscité des morts! Comme Polkinghorne le dit: «Même les spéculations théologiques les plus audacieuses ne dépassent guère en audace les conjectures des théoriciens des cordes. »14 Il dit aussi que le critère de la vérité dans les sciences depuis le début du XXe siècle n'est pas de savoir si une proposition est «raisonnable», mais si un enchaînement logique peut être présenté pour elle15, et que les prétentions à la vérité de la théologie devraient être présentées de la même manière. En d'autres termes, les descriptions scientifiques du monde moderne sont très contre-intuitives et nécessitent un degré considérable de consentement intellectuel - consentement qui n'est pas sans rappeler la foi. Le conte d'Eddington des deux tables16 (cité par Lipton17) traduit cette différence entre la description scientifique et l'expérience quotidienne.

... J’ai tiré mes chaises vers mes deux tables. Deux tables! Oui, il ya des copies de tous les objets autour de moi - deux tables, deux chaises, deux stylos ... L’une d’elles m’a été familière depuis mes premières années .... Elle possède une extension, elle est relativement stable, colorée, et surtout elle est importante ....

La Table N° 2 est ma table scientifique .... Elle n'appartient pas au monde mentionné ci-dessus.... Ma table scientifique est essentiellement vide. Clairsemées dans ce vide existent de nombreuses charges électriques qui se précipitent en tous sens à grande vitesse, mais leur volume combiné représente moins d'un milliardième du volume de la table elle-même. Malgré sa construction étrange elle s’avère être une table entièrement efficace. Elle supporte mon papier à écrire de manière aussi satisfaisante que la Table N° 1, car lorsque je pose le papier sur elle, ses petites particules électriques se précipitent la tête la première pour frapper la face inférieure, de sorte que le papier est maintenu en vol plané à un niveau presque stable.

Il faut dire cependant que les scientifiques s'attendent à ce que leurs théories soient vérifiées ou réfutées par des faits (par opposition à l'expérience quotidienne), et dans ce sens les faits pourrait être

9 Newbigin, L. Foolishness to the Greeks: The Gospel and Western Culture, London: SPCK (1986), pp. 65-94.

10 Ramachandra, V. Gods that Fail: Modern Idolatry and Christian Mission, Carlisle: Paternoster (1996), pp. 185-192.

11 Polkinghorne op. cit., (3), p. 23.

12 Polanyi op. cit., (5), p. 4.

13 13 ibid, p. 183.

14 Polkinghorne op. cit., (3), p. 99.

15 Polkinghorne op. cit., (3), p. 19.

16 Eddington, A. The Nature of the Physical World, Cambridge: Cambridge University Press (1928), pp. xi-xii.

17 Lipton, P. ‘Science and religion: The immersion solution’, in Moore, A. & Scott, M. (eds) Realism and Religion:Philosophical and Theological Perspectives, Aldershot: Ashgate (2007), pp. 31-46.

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considérés comme plus «fondamentaux» que les théories, malgré l'argument selon lequel les «faits»

pourraient être chargés de théorie et eux aussi accessibles uniquement à travers un appareil expérimental. La plupart des « théories » religieuses (par exemple l'existence de Dieu) ne se prêtent pas à être testées de cette manière. Toutefois, en ce qui concerne le christianisme, la résurrection du Christ est présentée comme une affirmation qui peut être testée par des évidences historiques (par exemple, le corps manquant).

Ici bien sûr, ce sera des critères historiques qui seraient nécessaires pour les évaluer (par exemple une preuve circonstancielle, des récits de témoins oculaires, l'intervalle de temps entre les événements et les premiers manuscrits), plutôt que des critères «scientifiques».

En plus d'être contre-intuitive, la grande entreprise de la science elle-même nécessite une extrapolation intellectuelle, encore une fois très proche de l'expérience de la foi - comment pouvons- nous croire que nous, qui avons évolué à partir de poussières d'étoiles, sommes en mesure de comprendre les étoiles? Ramachandra fait valoir que les hypothèses nécessaires pour la poursuite de la science sont comme des articles de foi18,

à savoir (1) qu'il existe un monde réel en dehors de nos esprits, et que le monde est structuré d'une manière ordonnée et intelligible; (2) que cet ordre rationnel est contingent, il ne peut être déduit à l'avance par un raisonnement logique, mais est à découvrir, appelant ainsi à une attitude fondamentale d'humilité devant le monde dont nous cherchons à exprimer la rationalité au moyen de nos théories et expériences; et (3) que l'intelligibilité de l'univers est accessible à l'esprit humain: nos capacités épistémiques, bien que limitées, sont suffisantes pour cette tâche.

De telles hypothèses ne peuvent pas être testées. Au contraire, elles sont vérifiées par le succès de la communauté scientifique. Ce n'est pas sans rappeler les affirmations des adeptes religieux prétendant que leurs systèmes de croyance sont authentifiés par leurs expériences mystiques ou pratiques partagées.

Les scientifiques ne se contentent pas de tenir à leurs théories, mais ils s’en servent aussi. Tout comme une canne devient une extension du bras d'un aveugle quand il l’utilise pour explorer une grotte, une théorie scientifique est intériorisée par un scientifique quand il l’utilise pour faire de nouvelles découvertes19. Une telle intériorisation est semblable au fait d’avoir une vision religieuse du monde. La prise de conscience focale du scientifique n'est pas centrée sur la théorie, mais sur la découverte. Néanmoins, il a une prise de conscience subsidiaire de la théorie, lui permettant d'être critique de la théorie si elle se trouve en défaut. Cette combinaison de prises de conscience focale et subsidiaire est ce que Polanyi appelle «connaissance tacite»20 .

De même, la vraie religion est aussi moins une question de croyance que d'action. Dans le Nouveau Testament, il est dit: «Montre-moi ta foi sans les œuvres, et je te montrerai ma foi par ce que je fais.

Vous croyez qu'il y a un seul Dieu. Bon! Même les démons le croient aussi - et ils tremblent. Vous, homme insensé, voulez-vous des preuves que la foi sans les œuvres est inutile? » (Jc 2: 18-20).

Donc, ce qui est important, ce n'est pas l'intensité de la croyance, mais c’est plutôt d’agir avec le peu de croyance que l'on a. Plus tôt dans le Nouveau Testament, Jésus suggère également que la foi a juste besoin d’être de la taille d'une graine de moutarde: «Si vous avez de la foi comme un graine de moutarde, vous pouvez dire à ce mûrier, «Déracine-toi et plante-toi dans la mer», et il vous obéira » (Lc 17: 6).

Bien que cet accent mis sur l’agir plutôt que sur le simple consentement mental à un ensemble de croyances soit invoqué dans le christianisme, c’est probablement aussi le cas avec la plupart des autres religions.

En bref, on peut affirmer que la science comporte une composante de foi-comme la religion. En fait, Polanyi a beaucoup utilisé le mot «fiduciaire» pour décrire comment la science devrait être

18 Ramachandra, V. Subverting Global Myths: Theology and Public Issues Shaping our World, Downers Grove: IVP Academic (2008), p. 181.

19 Polanyi op. cit., (6), pp. 12-13 & 16-18.

20 ibid., pp. 12-13.

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pratiquée. Il a rejeté la méthodologie du doute de Descartes, en soulignant que dans l'histoire de la science, le scepticisme avait autant que la croyance conduit à l'erreur. Par conséquent, il n'y a pas de ligne directrice universelle permettant de décider si le doute ou la croyance est meilleur pour la découverte scientifique21; les actes tacites ne sont jamais ni critiques, ni non critiques, mais plutôt a- critiques22. Toutefois, Polanyi a déclaré que toute expérience, y compris celle des scientifiques, est basée sur une croyance23. Il a comparé cette croyance à la foi religieuse, et cité saint Augustin qui dit:

«nisi credideritis, non intelligitis » (si vous ne croyez pas, vous ne comprendrez pas)24 .

En résumé donc, bien qu'il ait été suggéré que certaines affirmations du christianisme puissent être testés par des preuves historiques, le principal argument pour contester la revendication 1 est que science et la religion utilisent touts deux la foi (la conviction des choses non vues) pour la découverte et l'action.

Revendication 2 – La science est conduite de manière que le pratiquant soit détaché de son enquête, tandis que la religion est caractérisée par la subjectivité du pratiquant

Polanyi dit que la connaissance est une activité de résolution de problème, et que nous y sommes poussés par une implication personnelle et une passion heuristique. C’est la passion qui dirige le choix d’un problème de recherche25. Même, les animaux dit-il, font preuve d'une passion pour résoudre un problème auquel ils sont confrontés, même sans recevoir de gratification26. Une des passions qui conduisent les êtres humains est un désir de beauté, ce qui s'est reflété dans de nombreux domaines d'activités27:

L'affirmation d'une grande théorie scientifique est en partie l'expression d'un plaisir. La théorie a une composante inarticulée acclamant sa beauté, et cela est essentiel à la croyance que la théorie est vraie ....

Une théorie scientifique qui attire l'attention sur sa propre beauté, et repose en partie sur elle comme justification pour représenter la réalité empirique, s'apparente à une œuvre d'art qui attire l'attention sur sa propre beauté comme un gage de la réalité artistique .... En enseignant ses propres canons d’excellence formelle, la science fonctionne comme l'art, la religion, la morale, le droit et d'autres constituants de la culture.

De grands scientifiques comme Kepler et Einstein avaient une grande passion pour la beauté intellectuelle dans leurs théories28. Polanyi a également déclaré que les scientifiques avaient une passion convaincante29 pour faire accepter leurs théories par les autres, ce qui avait parfois généré des controverses scientifiques.

Polanyi soutient donc non seulement que la science est basée sur la foi, mais aussi qu'elle est motivée par des passions personnelles. Cette position soulève deux problèmes. Le premier c’est la circularité, puisqu'on ne peut exprimer ses convictions ultimes qu’à partir de cette conviction. Cela ne semble pas déranger Polanyi, qui dit que même un dictionnaire est circulaire, puisqu’un mot est défini en utilisant une chaîne d'autres mots qui pourraient les ramener au mot de départ30. Le second problème est le dogmatisme qui s’ensuit. Ici, Polanyi cite Tillich, un théologien chrétien qui a dit: «La foi inclut elle-même et le doute sur elle-même »31, suggérant ainsi que la foi peut inclure un élément de doute. En outre, Polanyi a déclaré que le dogmatisme pourrait être corrigé par des contrôles à la fois

21 Polanyi op. cit., (5), pp. 274-277.

22 ibid., p. 264.

23 ibid., p. 283.

24 ibid., p. 266.

25 ibid., p. 159.

26 ibid., p. 98.

27 ibid., p. 133.

28 ibid., pp. 142-145.

29 ibid., p. 159.

30 ibid., p. 289.

31 ibid., p. 280.

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internes et externes. Toutefois, une science qui avancerait par une foi de facto tout en prétendant ne pas le faire, possèderait un dogmatisme qui ne pourrait pas être vérifié32.

Même s'il y a de nombreux éléments personnels impliqués dans la connaissance scientifique, Polanyi dit qu'elle est sous-tendue par une intention universelle. En d'autres termes, les scientifiques réalisent les « intégrations » de leurs indices pour arriver à des conclusions au sujet d'une réalité extérieure dont ils sentent que d'autres pourraient aussi arriver à la cerner. Ceci requiert un engagement équivalent à une responsabilité morale personnelle, qu’un processus mécanique d'induction scientifique ne demanderait pas33. Il a comparé cela à la décision rendue par un juge34:

Nous pouvons regarder le mécanisme de l'engagement fonctionner sur une petite échelle, et pourtant révéler toutes ses caractéristiques, dans la façon dont le juge décide sur un cas nouveau. Sa discrétion s'étend sur les alternatives possibles laissées ouvertes à lui par le cadre explicite existant de la loi, et dans ce domaine il doit exercer son jugement personnel. Mais la loi n'admet pas qu'il ne parvienne pas à couvrir tous les cas possibles et imaginables. En cherchant la bonne décision le juge doit trouver la loi, censée être en vigueur – même si elle est encore inconnue. C'est pourquoi finalement sa décision devient exécutoire comme loi. La discrétion du juge est donc ramenée à zéro par la mainmise de sa propre intention universelle - par la puissance de sa responsabilité sur lui-même.

Nous voyons ici que la liberté de la personne subjective de faire comme il lui plaît est annulée par la liberté de la personne responsable d'agir comme il se doit. Remarquez cependant, qu'il n'y aurait pas eu de responsabilité s’il n'y avait pas indépendance. Une autre façon de le dire est que le progrès scientifique a besoin d'une conscience scientifique en plus de pulsions créatives et de précaution critique35. Polanyi a déclaré que les critères tels que la simplicité, la symétrie et l'économie, bien que tenus comme des normes objectives pour évaluer les théories, ont toujours impliqué des jugements subjectifs36. Il existe une similitude ici avec les critères de Kuhn concernant le choix d’une théorie37, auxquels nous nous référons ci-dessous dans le présent document. Le travail d'un scientifique est alors comparable à celui d'un interprète doué qui joue en accord avec des critères que pour l’essentiel il s’est donné à lui-même38. .

Dans la description que fait Polanyi de l'engagement du juge et de la responsabilité, semble se dissoudre la distinction qu'il fait entre le détachement et la passion. Néanmoins, il est clair que la science exige l'implication personnelle du scientifique, non seulement pour interpréter les données, mais aussi pour postuler des «conjectures audacieuses ».

Bien que la connaissance soit donc de nature personnelle, Polanyi a déclaré qu'elle n'était pas purement subjective, parce que (i) elle fait référence à une réalité extérieure et (ii) elle est affirmée avec la conviction que d'autres pourraient y arriver aussi. Il a dit, cependant, qu’une telle croyance pourrait être erronée. En outre, même si elle vraie, sa portée et sa signification futures sont largement indéterminées, ce qui est une caractéristique de la connaissance théorique39. En tout cas, Polanyi a affirmé que «l'homme peut transcender sa propre subjectivité en s'efforçant avec passion à remplir ses obligations personnelles à des normes universelles »40

Fraser Watts41, aussi, résonne fortement avec Polanyi, en précisant que «Le fait que la subjectivité est impliquée ne veut pas dire que l'objectivité est impossible à atteindre. Cette idée que la subjectivité et l'objectivité sont des pôles opposés s'inscrit dans le cadre de notre héritage intellectuel de l'époque

32 ibid., p. 268.

33 ibid., p. 153

34 ibid., pp. 308-309.

35 Polanyi op. cit., (4), p. 41.

36 Polanyi op. cit., (5), p. 16

37 Kuhn, T.S. The Essential Tension: Selected Studies in Scientific Tradition and Change, Chicago:University of Chicago Press (1977), pp. 321-322.

38 Polanyi op. cit., (5), p. 63.

39 ibid., p. 316.

40 ibid., p. 17.

41 Watts op. cit., (8)

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moderne, un vestige dont je crois que nous devons nous débarrasser », et encore, « le développement d'une représentation scientifique est une question d'interprétation, et pas seulement de l'accumulation de faits ».

Selon Popper, cependant, la subjectivité en science est souhaitable principalement au stade de la

«conjecture audacieuse», alors que la phase de test critique appelle à un grand degré d’objectivité »42.C’est à peu près parallèle à la tension entre la passion personnelle et la vocation universelle pour Polanyi. Là où la religion est concernée, toutefois, de nombreux arguments pour l'authentification sont fondés sur l'expérience personnelle, mais partagée.

En résumé donc, il faut admettre que la religion est sans doute moins objective que la science.

Toutefois, la revendication 2 peut être contestée parce que nous voyons que la science a aussi d’indispensables éléments subjectifs, comme la religion ; mais ceci ne doit pas faire obstacle et ne fait pas obstacle à l'objectivité.

Revendication 3 - La science a eu ses théories renversées par de meilleures théories, tandis que la religion est caractérisée par des attitudes dogmatiques

Une autre similitude très intéressante entre la science et la religion, à laquelle font allusion à la fois Kuhn et Polanyi, est l’éducation rigoureuse dans une tradition (ou le paradigme dominant comme Kuhn l’a appelé) et l'idée de l'apprentissage au sein d’une communauté (décrite par Polanyi).

La communauté est très importante pour l'épistémologie de Polanyi. Un de ses rôles principaux est d’être le support de la tradition. Si la connaissance tacite dépend de la capacité à habiter ou intérioriser un cadre de connaissances, une communauté est nécessaire pour maintenir ce cadre. Ceci, selon Polanyi, est réalisé grâce au processus de l'éducation, où la connaissance est transmise, et l'autorité, à la fois de cette connaissance et de ses pratiquants, a été reconnue par les étudiants. Polanyi compare l'éducation scientifique avec l'enseignement religieux d'une part et avec l'apprentissage artisanal de l'autre. Ils ont lieu tous deux au sein de communautés. La comparaison avec l'enseignement religieux souligne l’aspect de la soumission volontaire à un ensemble de valeurs ultimes ; c'est une telle soumission de fait qui à son tour soutient la communauté43 et donne lieu à une coopération entre ses membres dans un esprit de convivialité44.

Kuhn, lui aussi, décrit la façon dont les scientifiques sont formés. L'étudiant est formé essentiellement par des manuels, qui contiennent des corpus de la connaissance établie. Les étudiants en sciences ne sont pas exposés à des connaissances de pointe (dans des revues par exemple) jusqu'à très tard dans leur formation. En outre, les manuels de sciences contiennent peu ou pas de description de l'évolution historique de leur objet d’étude. Les paradigmes ou les cadres qui avaient fonctionné auparavant, ne sont pas considérés comme importants et seule la conception dominante est présentée45. Il y a très peu de place pour enseigner aux élèves à distinguer entre les différents points de vue, parce que tous les manuels scientifiques dans un domaine donné ont le même point de vue - à savoir, celui fondé sur le paradigme dominant46. L'objectif est d’éduquer les élèves dans un moule bien défini - celui du paradigme dominant. Cette éducation a été décrite par Kuhn comme «une éducation étroite et rigide, sans doute plus que tout autre, sauf peut-être dans la théologie orthodoxe »47.

Un enseignement scientifique, donc, induit en fait un esprit de dogmatisme.

42 Popper, K.R. Conjectures and Refutations: The Growth of Scientific Knowledge, 5th edn., London: Routledge (1989), pp.

242-245.

43 Polanyi op. cit., (4), p. 64.

44 Polanyi op.cit., (5), p. 212.

45 Kuhn, T.S. The Structure of Scientific Revolutions, 2nd edn., Chicago: University of Chicago Press (1970), pp. 165-166.

46 Kuhn op. cit., (37), p. 229.

47 Kuhn op. cit., (45), p. 166.

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Des mots tels que «foi», «confiance» et «tenu pour acquis» figurent dans les écrits de Kuhn48, ces mots sont plus souvent associés à la foi religieuse. Cependant, Kuhn a fait valoir qu’une telle foi et un tel dogmatisme créent le contexte dans lequel une erreur ou anomalie peut « surgir »49 et conduire à un changement de paradigme. La rigidité même de la tradition permet l'éclatement de cette même tradition. Il a fait sienne la maxime de Bacon «la vérité émerge plus facilement de l'erreur que de la confusion »50 en préférant un paradigme unique pour gouverner la science normale plutôt que d'avoir plusieurs alternatives simultanées, comme préféré par Feyerabend51 et Lakatos52.

Les arguments ci-dessus tendent donc à montrer que le dogme, au moins d'un type particulier, fait tout à fait partie de la science, à la fois avec Polanyi et Kuhn faisant allusion à la manière dont cet aspect rend une communauté scientifique semblable à une communauté religieuse.

Il est clair, cependant, qu'il y a eu de nombreux changements dans le paradigme dominant concernant la science. Kuhn les a appelé des révolutions scientifiques. Popper a utilisé la notion de réfutabilité pour distinguer entre science et non-science. Il a été profondément influencé par l'attitude d'Einstein pour arriver à son épistémologie et a écrit ceci dans son autobiographie intellectuelle53: Mais ce qui m'a impressionné le plus a été la propre déclaration claire d'Einstein qu'il considérerait sa théorie comme insoutenable si elle devait échouer dans certains tests. Ainsi il a écrit par exemple: «Si le décalage vers le rouge des raies spectrales en raison du potentiel gravitationnel n’existe pas, alors la théorie de la relativité générale va être intenable ». Il y avait là une attitude tout à fait différente de l'attitude dogmatique de Marx, Freud, Adler, et plus encore celle de leurs disciples. Einstein a été à la recherche d'expériences cruciales dont l'accord avec ses prédictions ne pourrait en aucun cas établir sa théorie, tandis qu'un désaccord, comme il a été le premier à le souligner, montrerait sa théorie intenable. Ceci, je l’ai senti, était la véritable attitude scientifique. C’était tout à fait différent de l’attitude dogmatique qui sans cesse proclame trouver des

« vérifications » pour ses théories préférées. Ainsi je suis arrivé ... à la conclusion que l'attitude scientifique est l’attitude critique, qui ne recherche pas des vérifications, mais des tests cruciaux; des tests qui pourraient réfuter la théorie testée, mais ne pourraient jamais l’établir.

Il semblerait de façon superficielle que les religions ne sont pas mises à réfuter leurs croyances fondamentales de la même manière que Popper le préconise pour la science. Cependant, presque toutes les religions comportent une interprétation, et de nombreuses religions, en particulier le christianisme, ont subi des changements majeurs dans la façon dont leurs enseignements et leurs pratiques sont promus parmi les adhérents. Par exemple, il y a eu des changements importants dans les attitudes sur des questions telles que l'esclavage, les droits des femmes et la protection de l'environnement. L'Eglise catholique romaine a connu des changements significatifs dans la théologie après le Concile Vatican II. Polkinghorne donne un exemple de la façon dont l'Eglise a largué une théorie du troisième siècle d'Origène sur l'œuvre expiatoire du Christ54. Ces changements pourraient être considérés comme résultant d’un « test critique» et du «renversement» d hypothèses religieuses, ce qui n'est pas sans rappeler ce qui se passe dans la science.

Qu’en est-il des croyances religieuses fondamentales, cependant? Dans le christianisme, par exemple ce serait l'idée d'un Dieu créateur qui s'est révélé lui-même à l'homme. Pour la religion en général, une croyance fondamentale commune serait probablement l'affirmation d'une réalité transcendantale ultime. Il est peu probable que de telles croyances vont changer, parce que cela constituerait un abandon de l'ensemble du projet. Cependant, la science aussi a des phénomènes immuables, non pas tant dans ses théories ou paradigmes que dans ses hypothèses implicites (comme

48 Hoyningen-Huene, P. Reconstructing Scientific Revolutions: Thomas S. Kuhn’s Philosophy of Science, Chicago:

University of Chicago Press (1993).

49 Kuhn op. cit., (37), pp. 234-237.

50 Kuhn op. cit., (45), p. 18.

51 Feyerabend, P. ‘How to defend society against science’, in Hacking, I. (ed.) Scientific Revolutions,Oxford: Oxford University Press (1981), pp. 156-167.

52 Lakatos, I. ‘History of science and its rational reconstructions’, in Hacking, I. (ed.) op. cit., (51), pp. 107-127.

53 Popper, K.R. Unended Quest: An Intellectual Autobiography, Glasgow: Fontana, 1976, p.38.

54 Polkinghorne op. cit., (3), p. 26.

(9)

en témoigne par exemple la citation de Ramachandra ci-dessus p. 5 dans le présent document) et dans ses critères de définition. Ces critères sont souvent utilisés pour décider entre des paradigmes concurrents, tout comme les croyances fondamentales d'une religion seront utilisés pour décider entre des croyances périphériques.

Kuhn, par exemple, a proposé cinq critères55 sans prétendre être exhaustif, à savoir:

(i) précision: en ce qui concerne les prévisions faites par la théorie;

(ii) cohérence: en ce qui concerne les éléments à la fois internes à la théorie et externes à elle (par exemple, la façon dont elle s'inscrit dans le cadre d'autres théories en science, même dans des domaines différents, ou même avec une position métaphysique);

(iii) étendue: ce qui est la quantité de phénomènes expliqués par la théorie;

(iv) simplicité: ce qui est presque une idée esthétique et donc métaphysique, mais à laquelle presque tous les scientifiques souscriraient

(v) fécondité: qui se rapporte à la promesse de continuer l’activité scientifique, et pas nécessairement associée à la correspondance avec le monde (comme le sont les trois premiers critères).

Donc, en résumé, la revendication 3 est contestée en faisant valoir que la science elle-même est souvent dogmatique et qu'elle a aussi un ensemble d'engagements fondamentaux qui ne changent pas;

aussi que les changements dans les enseignements, les pratiques ou encore les orientations d'une religion peuvent être semblables au renversement des hypothèses.

Revendication 4 - La science cherche l'assentiment de tous ses pratiquants, tandis qu’il ya des opinions très contrastées d'une religion à une autre

La distinction décrite dans cette revendication n'est pas aussi claire qu'il y paraît. L’idée que la science a l'assentiment de tous ses pratiquants a été le mieux présenté par Kuhn. Kuhn définit la science pré-normale56 comme une science immature, où les différentes écoles concurrentes avaient chacune leur propre cadre de recherche. Une science passe d'un stade pré-normal à un stade normal lorsque l'un des écoles concurrentes l'a emporté sur les autres. Ceci se passe lorsque l'école victorieuse peut montrer que son cadre a expliqué les problèmes fondamentaux dans le domaine mieux que les autres, et a réussi à attirer les scientifiques principaux pour suivre son exemple. C'est cette convergence de vues sur un paradigme qui fait de la science normale un tel exercice productif avec de nombreux scientifiques axés sur la résolution de divers problèmes, mais tous dans le même paradigme global. C’est-aussi cette unanimité qui crée une communauté de scientifiques, qui transcende les identités nationales et autres.

Cependant, chaque fois qu'il y a des différents dans les principes fondamentaux d'un domaine, la science est caractérisée par des points de vue divergents. Bien que Kuhn appelle ceci science pré- normale ou crise dans une discipline scientifique existante, Lakatos57 et Feyerabend58 évoquent des alternatives simultanées à tout moment. En fait, Feyerabend considère la science dangereuse, car elle exclut des explications alternatives59. Récemment, le physicien théoricien Lee Smolin60 a fait appel aux idées de Feyerabend pour obtenir que des scientifiques poursuivent des alternatives au paradigme dominant de la théorie des cordes, décrivant comment des scientifiques avec des opinions divergentes ont eu du mal à obtenir des postes de professeurs dans des universités américaines, malgré le fait que la théorie des cordes n'a pas produit de résultats significatifs depuis un quart de siècle.

55 Kuhn op. cit., (37), pp. 321-322.

56 Kuhn op. cit., (45), pp. 10-22.

57 Lakatos op. cit., (52).

58 Feyerabend, P. Against Method: Outline of an Anarchistic Theory of Knowledge, London: NLB (1975).

59 Feyerabend op. cit., (51).

60 Smolin, L. The Trouble with Physics, London: Penguin (2006), pp. 289-307.

(10)

Les religions sont bien sûr largement acceptées comme ayant des doctrines contrastées, mais au moins un des objectifs de la discipline de la religion comparative est l'identification de thèmes d’enseignements communs dans les différentes religions, en dépit de leurs visions du monde très différentes. Ainsi les questions du bien et du mal, et de la vie et de la mort sont traitées dans toutes les religions, bien que de manière différente. Polkinghorne suggère que de telles différences peuvent être considérées comme similaires à la façon dont les physiciens ont maintenu à la fois les théories ondulatoire et particulaire de la lumière de 1900 à 1925, jusqu'à ce que le paradoxe ait été résolu par la théorie quantique61. Dans le même temps, les adeptes de nombreuses religions recommandent leur foi à d'autres de confession différente, sans doute parce qu'ils estiment que ces autres ont besoin d'être conduits à leur vérité - en d'autres termes, ils cherchent un assentiment universel. À certains moments la propagation de la foi a malheureusement été associée à la séduction ou même à la violence.

C’est peut-être pour cette raison que les sociétés modernes ont consigné la religion à une sphère relativement privée, ce qui suggère que ce qui importe, ce n'est pas ce que vous croyez, mais plutôt si votre croyance est capable de vous aider ou de vous ennoblir. Cette position est évidemment rejetée par beaucoup, mais en aucun cas par tous les adhérents, qui soutiennent que les prétentions à la vérité des religions sont importants et «réels», au moins dans la mesure où les scientifiques attribuent une position réaliste pour la science. Ceci fait qu’il est important de débattre de ces prétentions à la vérité sur la place publique, de manière similaire à la façon dont le sont des théories scientifiques contrastées.

Ainsi, la revendication 4 peut être contestée, car il y a des moments où la science est et peut-être devrait être poursuivie dans des écoles de pensée différentes et même en compétition, bien que l'objectif de la science soit de converger sur un consensus. Les religions ont aussi des similitudes contrastées par rapport à la science - d'une part montrant un terrain d'entente à une sorte de méta- niveau, et d’autre part cherchant à défendre leurs prétentions à la vérité sur la place publique tout en adoptant une position réaliste.

Clôture

Malgré son énorme succès, Polanyi estime que l'approche surcritique de la science, caractérisée par le détachement et le doute, a détruit ses fondements mêmes. Ainsi il a écrit62:

Le mouvement critique, qui semble être presque à la fin de son cours aujourd'hui, était peut-être l'effort le plus fructueux jamais soutenu par l'esprit humain. Les quatre ou cinq derniers siècles, qui ont progressivement détruit ou éclipsé tout le cosmos médiéval, nous ont enrichi mentalement et moralement dans une mesure inégalée par toute période de même durée. Mais son incandescence s'est nourrie de la combustion de l'héritage chrétien dans l'oxygène du rationalisme grec, et quand ce carburant a été épuisé le cadre critique lui-même s’est consumé.

Ce document a utilisé le travail de Polanyi, et aussi ceux d'autres philosophes des sciences bien connus du XXe siècle pour prétendre que la science et la religion ne sont pas aussi différents qu'ils ont été faits pour l'être, même (ou surtout?) pour une religion fortement basée sur la foi comme le christianisme. La principale approche a été de montrer que la science est similaire à la religion, bien que la similitude inverse a également été traitée. La principale contribution de Polanyi à ce débat, c'est son argument selon lequel la science doit être poursuivie comme une passion personnelle au sein d'un cadre fiduciaire.

Priyan Dias est un professeur principal de génie civil à l'Université de Moratuwa, Sri Lanka et un membre de Sri Lanka National Academy of Sciences.

Source : Science & Christian Belief, (2010),Vol 22, No. 1, 43-55.

61 Polkinghorne op. cit., (3), p. 101.

62 Polanyi op. cit., (5), pp. 265-266.

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