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Les maladies rénales chroniques ne sont pas toutes silencieuses !

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Academic year: 2022

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Les maladies rénales chroniques ne sont pas toutes silencieuses !

Les affections touchant les reins sont fréquentes, mais restent longtemps asymptomatiques, ce qui peut mener à un retard diag­

nostique avec des conséquences sur la prise en charge du patient.

Toutefois, certains signes d’alerte, qu’ils soient cutanés, articu­

laires ou liés à des anomalies des électrolytes devraient mettre la puce à l’oreille et guider le praticien vers l’origine rénale de la pa­

thologie. Certaines maladies rares affectant les reins sont discu­

tées ici sur la base de vignettes cliniques, avec une emphase par­

ticulière sur les signes biologiques et cliniques qui mènent à leur diagnostic.

Chronic kidney diseases do not always pass unnoticed

Kidney diseases are frequent, but most of the time, they develop un­

noticed. This paucity of symptoms may lead to delayed diagnosis with important consequences on their outcome. Nevertheless, spe­

cific systemic signs such as skin lesions, joint pain or electrolytes disturbances may sometimes alert the clinician and direct the diag­

nosis to an underlying nephropathy. A high awareness of clinicians is warranted to recognize these red flags and diagnose these diseases early, as illustrated by two clinical cases discussed in this article.

IntroductIon

Les maladies rénales chroniques sont fréquentes dans la po­

pulation, mais restent souvent difficiles à mettre en évidence cliniquement, tant leur symptomatologie est fruste. Il n’est ainsi pas rare que des patients arrivent en insuffisance rénale terminale en n’ayant présenté que très peu de symptômes ou seulement une symptomatologie vague et peu spécifique (fati­

gue, inappétence…). Dans de grandes études populationnelles, en particulier l’étude NHANES, il a ainsi été constaté que seuls 23 % des personnes souffrant d’insuffisance rénale chro­

nique (IRC) étaient au courant de leur diagnostic.1

Les maladies rénales chroniques sont dans la majorité des cas secondaires à une hypertension, un diabète, une maladie im­

munologique, etc. Néanmoins, il existe plusieurs maladies ré­

nales qui, bien que rares, pourraient être diagnostiquées pré­

cocement grâce à des signes cliniques et / ou biologiques typi­

ques (red flags). Toutefois, même ces maladies sont souvent sous­diagnostiquées, prolongeant d’autant l’errance diagnos­

tique de ces patients et leur prise en charge précoce. Cet ar­

ticle fait le point sur deux de ces maladies dont l’absence de

prise en charge peut déboucher sur des complications majeures.

Des vignettes cliniques présentent ces cas qui sont ensuite discutés.

Vignette clinique 1

Madame T, 22 ans, consulte en raison d’une monoar­

thrite du premier orteil droit. Elle décrit plusieurs épi­

sodes du même type durant les quatre dernières années.

L’anamnèse personnelle révèle des céphalées occasion­

nelles, traitées par paracétamol. D’emblée, la patiente évoque la lourde charge en insuffisance rénale terminale présente dans la famille : une mère et une grand­mère décédées en urémie ; une tante décédée en hémodialyse et deux cousins transplantés rénaux. La pression arté­

rielle est à 180 / 100 mmHg. Le laboratoire montre une créatininémie à 143 µmol / l, correspondant à une insuffi­

sance rénale de stade III, ainsi qu’une hyperuricémie à 654 µmol / l. Le sédiment urinaire est propre mis à part 1­2 leucocytes par champ ; il n’y a pas de protéinurie. A quoi attribuez­vous l’insuffisance rénale et comment la mettre en relation avec les épisodes de monoarthrite et l’anamnèse familiale ?

Cette jeune patiente souffre d’une goutte précoce et d’une hypertension artérielle, associées à une insuffisance rénale mise en évidence durant les investigations. De plus, l’anamnèse familiale révèle une lourde histoire d’insuffisance rénale ter­

minale. Ce faisceau d’indices (goutte précoce, insuffisance rénale et anamnèse familiale chargée suggérant une transmis­

sion autosomique dominante) doit orienter le praticien vers le diagnostic de maladie rénale tubulointerstitielle liée à une ano- malie de l’uromoduline. Cette pathologie, anciennement nom­

mée néphropathie familiale juvénile hyperuricémique ou reins médullaires en éponge de type 2, fait maintenant partie du groupe des maladies rénales tubulointerstitielles à transmis­

sion autosomique dominante (ou ADTKD pour autosomal dominant tubulointerstitial kidney disease) et en représente le sous­groupe le plus fréquent. Elle est causée par des muta­

tions du gène UMOD codant pour l’uromoduline (ou protéine de Tamm­Horsfall).2 L’uromoduline est une protéine produite exclusivement dans la branche ascendante large de l’anse de Henlé et constitue la protéine la plus abondante dans l’urine d’un individu sain (environ 40 mg d’uromoduline sont excré­

tés chaque jour). Sa fonction reste partiellement incomprise, néanmoins, plusieurs rôles ont pu lui être attribués : en for­

mant un gel à la surface des cellules tubulaires rénales, elle protégerait contre les infections urinaires ; préviendrait la for­

mation de calculs rénaux en diminuant l’agrégation des micro­

Drs CYRIELLE ALVES a, MENNO PRUIJM a, SAMUEL ROTMAN b et Pr OLIVIER BONNY a Rev Med Suisse 2016 ; 12 : 382-6

a Service de néphrologie, Département de médecine, b Institut universitaire de pathologie, CHUV, 1011 Lausanne

cyrielle.alves@chuv.ch | menno.pruijm@chuv.ch | samuel.rotman@chuv.ch olivier.bonny@chuv.ch

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cristaux se formant dans l’urine ; et régulerait la fonction de certains transporteurs membranaires du tubule distal.3 En cas de mutations dans le gène UMOD, les protéines anor­

males qui sont synthétisées dans les cellules de l’anse ascen­

dante large de Henlé s’accumulent dans ces cellules et ne peuvent plus être sécrétées dans l’urine, menant à une diminution de l’excrétion d’uromoduline urinaire, qui peut être mesurée. La rétention d’uromoduline dans les cellules productrices mène à une atrophie et à une mort cellulaire qui provoquent une fibrose interstitielle, responsable de l’insuffisance rénale qui apparaît en général vers l’âge de 30 à 50 ans. La perturbation de la ré­

absorption du sodium dans cette partie du néphron (équiva­

lente à un traitement par furosémide) mène à une perte de sel, avec une augmentation de la réabsorption de l’acide urique dans le tube proximal secondaire à la déplétion volumique.

Ainsi, la fraction d’excrétion des urates est inférieure à 5 % chez ces patients (norme 5­10 %), ce qui conduit à une hyperuricémie, qui peut mener à une goutte précoce.

Le diagnostic d’ADTKD est suspecté en présence d’une histoire familiale avec une IRC d’origine autosomale dominante, asso­

ciée à certains signes clini ques et histologiques résumés dans le tableau 1.4 En l’absence d’histoire familiale, le diagnostic sera suspecté en présence de manifestations extrarénales de type hyperuricémie ou de crises de goutte à un âge précoce, ou devant une biopsie rénale montrant une fibrose intersti­

tielle, une atrophie tubulaire (figure 1), un épaississement et un feuil letage de la membrane basale tubulaire, la présence de microkystes, et une immunofluorescence négative pour le com­

plément et les immunoglobulines. Des dépôts abondants d’uro­

moduline dans les cellules tubulaires de l’anse ascendante large de Henlé peuvent être mis en évidence.

Le diagnostic sera définitivement posé par la mise en évidence d’une mutation dans le gène UMOD chez le malade ou chez un membre affecté de sa famille. A relever que le syndrome ADTKD est hétérogène et que des mutations touchant d’autres gènes (HNF1B, REN, MUC1) peuvent mener à des symptômes cli­

niques proches (mais en général sans l’hyperuricémie et la goutte précoce) et peuvent être recherchés en centres spécialisés.

Il n’y a pas actuellement de traitement causal disponible pour cette entité, mais les recommandations habituelles de préven­

tion de l’IRC s’appliquent par extension, sans que des études aient été conduites pour cette entité rare. Les patients ayant présenté des crises de goutte sont à haut risque de récidive et un traitement d’allopurinol leur est proposé en prévention. Il n’y a pas de données spécifiques concernant le bénéfice des inhibiteurs de l’enzyme de conversion / sartans dans la pro­

gression de l’IRC chez les patients atteints d’ADTKD­UMOD.

Néanmoins, si ces traitements doivent être utilisés, le losartan peut être privilégié en raison de son effet hypo­uricémiant.

Les diurétiques et le régime pauvre en sel doivent être utilisés avec prudence, afin de ne pas aggraver l’hyperuricémie.4 La transplantation rénale permet la résolution de cette entité systémique à point de départ rénal.

En résumé, l’apparition d’une goutte précoce en conjonction avec une anamnèse familiale positive pour l’insuffisance ré­

nale doit faire rechercher une néphrite interstitielle liée à des mutations de l’uromoduline. Le diagnostic est établi par la mesure de l’uromoduline urinaire, la biopsie rénale et la re­

cherche de mutation.

Vignette clinique 2

Mademoiselle B, 23 ans, est connue pour une épilepsie néonatale qui ne nécessite plus aucun traitement actuel­

lement. Elle a eu un développement intellectuel normal.

Durant son adolescence, elle a développé des lésions cutanées sur le visage (figure 2) qui se sont étendues malgré les traitements tentés. Elle consulte pour des lombalgies sans irradiation et sans déficit. Durant les in­

vestigations, une IRM abdominale est pratiquée et met en évidence des lésions rénales hautement suggestives d’angiomyolipomes (figure 3). Quel est le point commun entre cette affection rénale, l’épilepsie et les lésions cutanées chez cette jeune patiente ?

La sclérose tubéreuse de Bourneville (STB) est une maladie génétique de transmission autosomale dominante, caractérisée par la croissance d’hamartomes au sein de divers organes (cerveau, peau, cœur, yeux, reins, poumons, foie). L’incidence de cette maladie rare est estimée à 1 pour 5000 à 10 000 nais­

sances.5 Il semble néanmoins que plus de la moitié des indivi­

Tableau 1 Néphrites interstitielles liées à des anomalies de l’uromoduline 4 Signes cliniques associés aux néphrites interstitielles liées à l’uromoduline

Transmission autosomique dominante

Perte de fonction rénale progressive

Sédiment urinaire non actif

Absence ou légère albuminurie ou protéinurie

Pas d’hypertension sévère dans les stades précoces

Pas d’exposition à des médicaments pouvant causer une néphrite interstitielle

Reins de taille normale ou petite à l’ultrason

Nycturie ou énurésie chez l’enfant (dues aux troubles de la concentration urinaire)

Signes histologiques retrouvés à la biopsie rénale

Fibrose interstitielle

Atrophie tubulaire

Epaississement et lamellation des membranes basales tubulaires

Possible dilatation tubulaire (microkystes)

Immunofluorescence négative pour le complément et les immunoglobulines

fig 1 Biopsie rénale

Atrophie tubulaire et fibrose interstitielle sur une biopsie rénale d’un patient porteur d’une mutation du gène UMOD. 100 x – FAOG.

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dus atteints ne soient pas détectés. Par ailleurs, plus de 70 % des cas seraient dus à des mutations de novo.

La STB est causée par une mutation des gènes STB1 ou STB2, présents sur les chromosomes 9 et 16 respectivement. Les pro­

duits de ces gènes font partie d’un complexe suppresseur de tumeur de la voie mTOR.6 A relever que les gènes STB2 et PKD1 (codant pour la polycystine 1, impliquée dans la polykystose rénale autosomique dominante) sont contigus sur le chromo­

some 16 et que des délétions emportant ces deux gènes peuvent se manifester par une double maladie chez certains patients : une polykystose et une STB simultanément. Plusieurs cas de ce syndrome contigu ont été mis en évidence au CHUV par une technique de détection d’anomalie chromosomique (FISH, Service de génétique médicale). Ces patients ont un pronostic rénal sombre.

L’expression de cette maladie varie de manière importante entre les individus touchés et cela même au sein d’une même famille. Les premières manifestations peuvent apparaître déjà dans l’enfance, mais certains cas ne sont diagnostiqués qu’à l’âge adulte. La morbidité et la mortalité de cette maladie sont liées à la localisation et à la taille des hamartomes et aux com­

plications qu’ils engendrent au cours du développement. Chez l’enfant, ce sont essentiellement les complications neurologi­

ques qui prédominent et qui peuvent engendrer une épilepsie difficilement contrôlable et fortement interférer avec le déve­

loppement intellectuel. Chez l’adulte, ce sont les lésions rénales qui vont grever la morbidité en augmentant le risque d’hémor­

ragie des reins.

La triade historique permettant de poser le diagnostic de STB (épilepsie, retard mental et angiofibrome de la face), appelée triade de Vogt, n’est présente que chez moins d’un tiers des patients atteints de STB et ne couvre donc qu’une partie du large spectre de cette pathologie. Ceux diagnostiqués grâce à cette triade sont par ailleurs les patients les plus affectés. Ainsi,

il est essentiel que le clinicien d’aujourd’hui connaisse les dif­

férentes manifestations de la STB autres que celles de la triade de Vogt. Actuellement, le diagnostic de STB est posé sur la base des critères de Gomez révisés en 2012 (tableau 2).

Environ 90 % des patients souffrant de STB ont des lésions cutanées caractéristiques, définies par des macules hypopig­

mentées (en feuilles de sorbier), des angiofibromes habituel­

lement présents dans les régions malaires du visage, des lésions fibreuses sur le tronc, le bas du dos ou sur le front (peau de chagrin). Ils peuvent aussi présenter des lésions typiques des ongles (tumeurs de Könen) (voir 7 pour des illustrations plus générales de la maladie).

Les lésions rénales les plus fréquemment associées à la STB sont, dans l’ordre de fréquence, les angiomyolipomes, les kystes, et les carcinomes rénaux (3­5 % des patients). D’autres atteintes plus rares ont été rapportées, telles que des oncocytomes, une néphrite interstitielle ou une hyalinose segmentaire et focale.

La prévalence des atteintes rénales concerne jusqu’à 80 % des patients, et augmente avec l’âge.

Les angiomyolipomes sont les lésions rénales les plus fré­

quentes. Ces tumeurs bénignes à contenu variable en graisse et en cellules musculaires sont caractérisées par une proli­

fération anarchique en leur sein de vaisseaux sanguins très fragiles et contenant de multiples microanévrismes. Les ma­

nifestations cliniques des angiomyolipomes rénaux varient de la simple douleur du flanc au choc hémorragique sévère.

Plus la lésion est importante, plus le risque de développer une complication s’accroît : le risque d’hémorragie aug­

mente en présence de tumeurs de plus de 3 cm ou de micro­

anévrismes intratumoraux de plus de 5 mm de diamètre qui nécessitent alors une prise en charge. Certains patients dé­

veloppent une insuffisance rénale, par perte néphronique due aux angiomyolipomes ou par les interventions chirur­

gicales ou radiologiques répétées pour contrôler le risque hémorragique. Une IRM rénale est préconisée au moment du diagnostic, et sera répétée régulièrement en fonction de la taille des lésions.

fig 2 Lésions cutanées de la face typiques de la sclérose tubéreuse de Bourneville A. Angiofibromes de la région du nez et B. plaques fibreuses sur le front.

b a

fig 3 Multiples angiomyolipomes des deux reins IRM abdominale montrant les deux reins, sièges de nombreux angiomyolipomes, en particulier, volumineux angiomyolipome du pôle supérieur du rein D (en foncé dû au contenu lipidique).

Diagnostic clinique : 2 critères majeurs ou 1 critère majeur + 2 critères secondaires

Critères majeurs

Angiofibromes (≥ 3) ou plaques frontales

Taches hypomélaniques (≥ 3)

Fibromes unguéaux (≥ 3)

Plaques fibreuses ou collagénomes multiples

Multiples hamartomes rétiniens

Dysplasies corticales (y compris tubers et lignes de migration radiale de la substance blanche cérébrale)

Nodules sous-épendymaires (SEN)

Astrocytome à cellules géantes sous- épendymaire (SEGA)

Rhabdomyome cardiaque

Lymphangioléïomyomatose (LAM)

Angiomyolipomes rénaux (AML) (≥ 2)

Critères secondaires

Défauts de l’émail dentaire (> 3)

Fibromes intra-oraux (≥ 2)

Hamartomes non rénaux

Taches rétiniennes achromatiques

Lésions cutanées en confetti

Multiples kystes rénaux

Diagnostic génétique :

Une mutation pathogène des gènes TSC1 ou TSC2 suffit pour le diagnostic définitif d’une sclérose tubéreuse

Tableau 2 Critères de Gomez modifiés pour le diagnostic de la sclérose

tubéreuse de Bourneville 9

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Les kystes rénaux sont généralement asymptomatiques, en raison de leur petite taille et de leur faible nombre, sauf dans le cadre du syndrome des gènes contigus TSC2 / PKD1, comme discuté précédemment.

Les patients atteints de STB ont un risque accru de déve­

lopper un carcinome rénal.

La prise en charge des patients souffrant de STB est complexe et multidisciplinaire, dirigée sur le suivi des complications neurologiques (incluant l’épilepsie, les troubles neuropsychia­

triques, les tumeurs cérébrales), les lésions cutanées (angiofi­

bromes de la face), les atteintes rénales (angiomyolipomes), pulmonaires (lymphangioléïomyomatose), cardiaques (rhab­

domyome) et le risque accru de tumeurs malignes.

Pour la prise en charge des angiomyolipomes des reins, on distingue la prise en charge préventive de la phase de saigne­

ment aigu. En cas d’hémorragie rénale aiguë, l’embolisation sélective, voire la chirurgie, sont au premier plan. La prise en charge préventive, en présence d’angiomyolipomes de plus de 3 cm de diamètre et / ou présentant des microanévrismes de plus de 5 mm de diamètre, se discute entre la chirurgie d’épargne néphronique, l’embolisation sélective, la destruction sélective par cryoablation ou un traitement systémique. En effet, l’étude randomisée en double aveugle EXIST­II a démontré l’efficacité d’un traitement systémique inhibiteur de la voie mTOR (évé­

rolimus) chez les patients atteints de STB présentant aussi bien des atteintes rénales (angiomyolipomes), que cérébrales

spécifiques (astrocytomes à cellules géantes) ou pulmonaires (lymphangioléïomyomatose).8 Ce traitement, enregistré en Suisse depuis 2014 dans cette indication, permet une diminu­

tion conséquente (> 50 %) de la taille des angiomyolipomes dans la plupart des cas. Il amène une alternative bienvenue et sys­

témique à la prise en charge de cette maladie. Les risques et bénéfices de ce traitement doivent toutefois être soigneuse­

ment évalués. Au CHUV, une équipe multidisciplinaire regrou­

pant pédiatres et spécialistes adultes de la STB a été mise en place et est à disposition le cas échéant.

En résumé, cette jeune patiente avec des lésions cutanées carac téristiques et des lombalgies souffre d’une STB, avec très peu de signes neurologiques, mais une maladie rénale avan­

cée. Elle a développé des hémorragies rénales mettant en péril sa vie et ayant nécessité des embolisations itératives. Elle est actuellement sous traitement d’évérolimus, avec une bonne évolution. Le clinicien devrait reconnaître les lésions et les signes typiques de cette affection pour laquelle un traitement systémique existe depuis peu.

SIgneS d’appel d’autreS maladIeS rénaleS chronIqueS

Une discussion exhaustive de tous les signes d’appel de cau­

ses rares d’IRC n’est pas possi ble dans cet article ; certaines constellations cliniques propres à des atteintes rénales spéci­

Signes d’appel Maladies Atteintes rénales Pathophysiologies

Angiokératomes cutanés, pallesthésies douloureuses au niveau des mains, IRC, protéinurie non néphrotique, événements cardiovasculaires précoces

Maladie de Fabry Glomérulaire Maladie liée au chromosome X, causée par un déficit de l’enzyme a-galactosidase, induisant l’accumulation de globotriaosylcéramide aux niveaux glomérulaire et vasculaire

Troubles auditifs et / ou visuels, perte d’ouïe neurosensitive , lenticone antérieur, hématurie microscopique, IRC

Syndrome d’Alport Glomérulaire Maladie liée au chromosome X (80 %) ou autosomale récessive ou dominante causée par des mutations dans les chaînes du collagène IV

Absence de rotule, ongles dystrophiques, IRC Syndrome « Patella-nail » Glomérulaire Maladie autosomale dominante causée par des mutations dans le gène LMX1B, causant des anoma- lies du développement des reins et des extrémités Surdité neuro-sensitive, calculs rénaux,

néphrocalcinose Acidose rénale tubulaire

distale Tubulaire Maladie autosomique récessive causée par des

mutations des gènes codant pour la V-ATPase des cellules intercalaires du tubule collecteur Crampes des membres, hypotension

artérielle, chondrocalcinose Syndrome de Gitelman Tubulaire Maladie autosomale récessive, caractérisée par une hypokaliémie, alcalose métabolique, hypocalciurie et parfois hypomagnésémie, causée par des mutations du gène codant pour le cotransporteur sodium-chlore SLC12A3 (« récepteur » aux thiazides).

Malformation des oreilles (externe et moyenne), kystes branchiaux, dysplasie des reins

Syndrome branchio-oto-rénal Malformative Maladie autosomique dominante, avec mutations des gènes EYA1, SIX1 et SIX5

Malformation de l’iris (colobome), laxité ligamentaire, surdité partielle, malformations urinaires

Syndrome rein-colobome Malformative Maladie autosomique dominante due à des mutations du gène PAX2

Photophobie, syndrome de Fanconi,

myopathie, hypothyroïdie, insuffisance rénale Cystinose Glomérulaire et tubulaire Maladie autosomique récessive due à des mutations du gène CTNS et menant à une accumulation lysosomale de cystine

Dégénérescence rétinienne, fibrose

hépatique, hypoplasie du cervelet, IRC Néphronophtise Tubulaire et interstitielle Maladie autosomique récessive du cil primaire menant à la formation de kystes rénaux et de fibrose interstitielle. Plus de 10 gènes sont impliqués

Tableau 3 Signes d'appel de certaines néphropathies chroniques rares IRC : insuffisance rénale chronique ; V-ATPase : pompe à protons vacuolaire.

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La plupart des maladies rénales sont silencieuses et ne mènent à des signes cliniques que tardivement

Certaines affections peuvent toutefois se manifester précocement par des signes cliniques qu’il est opportun de reconnaître

Par exemple, en cas de goutte précoce et d’une anamnèse familiale d’insuffisance rénale, une néphrite interstitielle autosomique dominante à anomalie de l’uromoduline doit être évoquée

Ou encore, des lésions cutanées et unguéales pathognomoniques de la sclérose tubéreuse de Bourneville doivent faire rechercher les complications rénales de cette affection qui peuvent être sévères. La prise en charge doit se faire en centre spécialisé. Un traitement systémique est disponible

implicaTions praTiques

1 Shah a, et al. associations between access to care and awareness of cKd. am J Kidney dis 2012;59(Suppl. 2):S16-23.

2 hart tc, et al. mutations of the umod gene are responsible for medullary cystic kidney disease 2 and familial juvenile hyper- uricaemic nephropathy. J med genet 2002;

39:882-92.

3 devuyst o, Bochud m. uromodulin, kidney function, cardiovascular disease, and mortality. Kidney Int 2015;88:944-6.

4 * eckardt Ku, et al. autosomal domi-

nant tubulointerstitial kidney disease : diagnosis, classification, and management – a KdIgo consensus report. Kidney Int 2015;88:676-83.

5 hallett l, et al. Burden of disease and unmet needs in tuberous sclerosis complex with neurological manifestations : Syste- matic review. curr med res opin 2011;27:

1571-83.

6 dabora Sl, et al. mutational analysis in a cohort of 224 tuberous sclerosis patients indicates increased severity of tSc2,

compared with tSc1, disease in multiple organs. am J hum genet 2001;68:64-80.

7 * Serra a, et al. la sclérose tubéreuse de Bourneville : pathogenèse, clinique et nouvelles options thérapeutiques. Forum med Suisse 2013;13:696-702.

8 * Bissler JJ, et al. everolimus for angio- myolipoma associated with tuberous scle- rosis complex or sporadic lymphangio- leiomyomatosis (eXISt-2) : a multicentre, randomised, double-blind, placebo-con- trolled trial. lancet 2013;381:817-24.

9 * northrup h, Krueger da. Internatio- nal tuberous sclerosis complex consensus group. tuberous sclerosis complex diag- nostic criteria update : recommendations of the 2012 Iinternational tuberous Scle- rosis complex consensus conference.

pediatr neurol 2013;49:243-54.

* à lire

** à lire absolument fiques sont toutefois résumées dans le tableau 3, mais restent

limitées aux choix des auteurs.

concluSIon

Si les affections rénales sont en général silencieuses ou sont détectées dans le cadre du suivi d’une hypertension artérielle ou d’un diabète et exigent un bilan biologique pour être mises en évidence (mesure de la créatininémie par exemple), cer­

taines entités plus rares doivent orienter l’attention du clini­

cien vers les reins.

Conflit d’intérêts : Le Pr O. Bonny est corécipiendaire d’une bourse de la Fondation Gebert-Ruef pour les maladies rares sur les maladies tubulo-intersti- tielles liées à l’uromoduline (GRS-038-12). Il a égalementi reçu une rétribution d’orateur de Novartis pour un symposium sur la sclérose tubéreuse de Bourne- ville. Les autres auteurs n’ont pas de conflit d’intérêts en lien avec cet article.

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