A NNALES DE L ’I. H. P., SECTION B
J. N EVEU
Convergence presque sûre de martingales multivoques
Annales de l’I. H. P., section B, tome 8, n
o1 (1972), p. 1-7
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Convergence presque sûre de martingales multivoques
J. NEVEU
Ann. Inst. Henri Poincaré, Section B :
Vol. VIII, n° 1, 1972, p. 1- 7. Calcul des Probabilités et Statistique.
SUMMARY. - An a. s. convergence theorem is
proved
formartingales
which take their values in the closed bounded convex subsets of the
(sepa- rable)
dual of a Banach space.Un théorème célèbre de Doob affirme que toute
martingale
réelle(Xm n
EN)
vérifiant supE(
oo converge p. s. Ce théorème a puN
être étendu aux
martingales prenant
leurs valeurs dans le dual d’un espace deBanach,
si ce dual estséparable,
la convergenceayant
lieu au sens fort dans ce dual.L’objet
de ce travail est degénéraliser
ce résultat et de montrercomment le théorème de Doob reste valable pour des
martingales
multi-voques
prenant
leurs valeurs dans lesparties
convexes,u(F’, F)-compactes
du dual F’ d’un espace de Banach
F,
si ce dual estséparable ;
la convergence est entendue au sens de la distanceclassique
de Hausdorff. La notion demartingale multivoque
s’estdégagée
dans les travaux[1] [6]
et[7] ;
enparti-
culier
[7, c]
contientplusieurs
théorèmes sur la convergence demartingales multivoques
filtrantes en relation avecl’équi-intégrabilité.
Le résultat
principal
de ce travail est le théorème3 ;
nous commençons parquelques rappels indispensables
à l’énoncé et à la démonstration dece théorème.
Soit F’ le dual
fort, supposé séparable,
d’un espace de Banach F(néces-
sairement
séparable).
Nous noterons ~f la classe des fonctions F -~ R sous-linéaires(c’est-à-dire
convexes etpositivement homogènes)
et forte-(*)
Équipe
de Recherche n° 1 « Processus stochastiques et applications » dépendant de la Section n° 2 « Théories Physiques et Probabilités » associée au C. N. R. S.2 J. NEVEU
ment continues.
Rappelons qu’une
fonction sous-linéaire F -~ R estfortement continue sur F si et seulement si la
quantité
=sup ~p( y) [
est
finie ;
cette condition entraîne en effet que 1et cette
lipschitzité
de la fonction cp assure sacontinuité ;
inversement unefonction
positivement homogène (~ :
F -~ R nepeut
être continue àl’origine
sans que oo. Nous noterons d’autrepart
Jf la classe desparties
convexes de F’qui
sontu(F’, F)-compactes
ou, cequi
estéquivalent, qui
sontu(F’, F)-fermées
et fortement bornées. Le théorème de Hahn- Banachpermet,
comme il est bien connu, d’établir unebijection
entre Jfet JT.
LEMME 1. - Les
applications
K - ~pK et ~p --~K~
de ~~ dans ~ etde Je dans .3f
respectivement qui
sontdéfinies
ci-dessous sont inverses l’une de l’autre :Pour tout
couple K1, K2
dansJf,
posonsil est facile de vérifier en utilisant le lemme
précédent
queCette formule
permet
à son tour de montrer très facilement que A est une distance sur Jf(distance
deHausdorff)
et quel’espace métrique (f, A)
estcomplet ;
par contre Jf n’est passéparable
engénéral.
Enfinnous poserons
Une variable aléatoire
(en abrégé
v.a.)
à valeurs dans Jf est par défini- tion uneapplication
mesurable del’espace
deprobabilité (Q, d, P)
dansl’espace métrique
~’ muni de sa tribu borélienne. Pour une telle v. a.X,
les
applications A[X(.)]
et( y
EF)
de Q dans R sont des v. a. réellespuisque
les fonctionsA(.)
etcp. (y)
sontlipschitziennes
surl’espace
métri-que Jf ; réciproquement
il est facile de déduire de la formule(4)
etde
laCONVERGENCE PRESQUE SURE DE MARTINGALES MULTIVOQUES 3
séparabilité
del’espace F,
que X : ~’ est mesurable dès que lesapplications y) ( y
EF)
le sont. Une v. a. X : SZ --~ ~’ est dite inté-grable
siE[A(X)]
oo et dans ce casd’après
la formule(5),
toutes lesv. a.
y)
sontintégrables ;
en outrel’application ~p( y)
=y)]
de F dans R est sous-linéaire et telle que
sup ~p( y) ~ [
~E[A(X)]
oo ;1
grâce
au lemme1,
il existe donc un élément deJf,
notéE(X),
tel queLa définition des
espérances
conditionnelles estanalogue
à celle desespérances ;
elle nécessitecependant
un lemme élémentaire dont nous~ aurons encore besoin ultérieurement.
LEMME 2. - Si y -
Z( y)
est uneapplication
sous-linéaire de F danset si en outre E
[ sup Z( y) ~ ] oo, il
existe une v. a.intégrable
X :~y~1
SZ --~ ~’ telle que
({Jx( y)
=Z( y)
p. s. pourtout y
E F.Démonstration. Dans
F,
soitFo
unQ-vectoriel,
dénombrable et dense(Q désigne
la droite desrationnels).
SiZ(., y) (y E F 0)
est une v. a. réelle choisie dans la classed’équivalence Z( y),
lesapplications
y -~Z(cv, y)
de
Fo
dans R sont alorsQ-sous-linéaires
et telles quesup Z(cv, y)
o0Fo
pour un ensemble
Qo
de cc~ deprobabilité 1 ;
pour tous ces cv, lesapplica-
tions
précédentes
seprolongent
par continuité à F enapplications
sous-linéaires sur
F,
bornées sur la boule unité de F. Il existe donc pour toutm E
oo,
un élément E ~’ tel que~pX~~,~( y)
=y)
si y EFo ;
il estalors facile de vérifier que X est mesurable et
intégrable
et queCPx( y)
=Z( y)
p. s. pour tout y E F.
~
Pour toute sous-tribu B de A et toute v. a.
intégrable
X : 03A9 ~Jf, l’application y - y)]
vérifie leshypothèses
du lemmeprécédent
et il existe donc une v. a.
~-intégrable
à valeurs dans 3i que nous note-rons
E~(X)
telle quey)
=y)]
pour tout y E F. Enfin étant donné une suite croissante(Blm
n EN)
de sous-tribus de j~ dansl’espace
de
probabilité (Q, ~, P),
une suite(X", n
EN)
de v. a. à valeurs dans ~~sera
appelée
unemartingale intégrable
si évidemment :a) X"
est~"-mesurable
etintégrable, quel
que soit n EN ; b) X"
=1]
pour tout n E N.Voici alors le résultat
principal
de ce travail.THÉORÈME 3. - Soit
(Xm n
EN)
unemartingale intégrable définie
surl’espace [(S2, ~, P) ;
nEN)]
et à valeurs dansl’espace métrique
~’des
parties
convexes,6(F’, F)
compactes du dual F’supposé séparable
d’un4 J. NEVEU
espace de Banach F. La condition de Doob sup oo
suffit
alors àN
entraîner l’existence d’une v. a.
intégrable Xoo :
S2 --> ~’ telle que lim p. s.y) = y)
pour tout y E F’. En outre siX~ prend
p. s. ses valeurs dans unepartie séparable
de~’’,
nous avons lim p. s. = 0..
Démonstration. Pour tout y E
F,
la suitey),
nEN)
est une mar-tingale intégrable réelle ; grâce
à laséparabilité
deF,
la suiteest alors une
sous-martingale positive. L’hypothèse
du théorèmeprécédent
et le théorème de Doob
classique
entraînent l’existence etl’intégrabilité
des limites p. s.
Z( y)
= lim( y
EF)
et U = lim0(Xn) :
en outre|Z(y)|U~y~
. Commel’application y - Z( y)
de F dans estmanifestement
sous-linéaire,
le lemme 2 établit l’existence d’une v. a.intégrable X~ :
S2 -~ .3f telle que ’Pour continuer nous aurons besoin du lemme suivant.
LEMME 4.
- Étant
donné unefamille
dénombrable desous-martingales
réelles
intégrables (U;,, nEN) (iEI) vérifiant
la condition sup E[sup (Un)+]
oo,n i
les limites p. s.
Il) =
limU;,
existent et nous avons :n-oo
Les
sous-martingales
n EN) (i
EI)
satisfont toutes à la conditionde Doob
sup E[(Un) +
oogrâce
àl’hypothèse ;
l’existence etl’intégra-
bilité des limites p. s.
Il)
est .donc assurée par le théorème de Doob. La suite(Un
= supU;,,
n EN)
est aussi unesous-martingale
telle queI
sup E(U" )
oo parhypothèse,
de sorte que la limite p. s.U ~ -
limUn
N n
existe et est
intégrable.
Il est clair queU ~
> supU ~
p. s. ; montrons queI
E[U~]
E[sup U~]
cequi
suffira à établir queU~ -
supU~
p. s.I I
Soit
(Ip, pEN)
une suite departies
finies de I croissant vers Ilorsque
p ~ ~.
L’application
n, p - E[sup U;,]
définie surN2
est croissante en nIp
et en p ; elle est bornée dans R par
hypothèse puisque
sup
E[sup Un]
=sup
E[sup Un]
sup E[sup (Un)+]
~ ;5 CONVERGENCE PRESQUE SURE DE MARTINGALES MULTIVOQUES
il existe donc pour tout ~ > 0 deux
entiers nE
et pE tels queAppliquons
alors le lemme de Fatou à la suite des v. a. r.positives (sup
ï supU;,,
n EN) qui
converge p. s. versU~ -
supU~ ;
nous. p Ip
trouvons
ainsi, si p
estchoisi ~
pE, queNous avons ainsi établi que E
[sup U~]
et le lemme est doncdémontré. *
Soit maintenant
Q
un élément fixé de Jf.Appliquons
le lemmeprécé-
dent aux
sous-martingales positives { ~ y) - y) 1
, n corres-pondant
à des y variant dans un sous-ensemble dénombrable dense D de la boule unité deF ;
nous trouvons ainsi quelorsque n -
oopuisque sup E[LB(Xm Q)] A(Q)
+ supE[0(Xn)]
+ oo.Si la v. a.
X~ prend
p. s. ses valeurs dans unepartie séparable f 0
deK,
il est alorspossible
de trouver un événementnégligeable Qo
en dehorsduquel
-
lorsque
n - ~; enprenant Q
= nous trouvons ainsi queX~(03C9)] ~
0lorsque
n - oo et03C9~ Qo,
cequi
établit le théo-rème.
Il
Le corollaire suivant est maintenant très
simple
à établir.COROLLAIRE 5. Pour toute
martingale intégrable (Xn,
nEN)
à valeursdans
~,
les trois conditions suivantes sontéquivalentes :
1)
Il existe une v. a.intégrable
X : S2 -~ ~’ telle queXn
= pour toutnEN;
2)
La suite de v. a. n estéqui-intégrable ;
3)
sup N oo et il existe une v. a.Xoo :
SZ -~ ~’intégrable
telleque
lim y)
dansL1,
pour. tout y E F’.Lorsque
la condition(3)
estréalisée,
nous avonsX"
= pour tout n E N.6 J. NEVEU
Démonstration
(1)
~(2).
Parhypothèse y)
=y)]
pour tout n E N ettout y
EF ;
la formule(5)
entraîne alors queE~n[~(X)].
Mais la
martingale
réelle(E~n[0(X)], N)
estéqui-intégrable puisque A(X)
E la suite de v. a. r.positives
EN)
l’est donc afortiori.
(2)
=>(3).
- Si la suiteN)
estéqui-intégrable,
elle est bornéedans
L~
et le théorème 3 montre donc que lim p. s. pourune v. a.
intégrable X~ ; comme y Il 0(Xn),
lesmartingales
nE
N)
sontéqui-intégrables
et ellesconvergent
donc aussi dans L 1vers leurs limites p. s.
(3)
=>(1).
-Puisque
lamartingale
réellenE N)
converge dansL~
versy)
elle coïncide avec la suite nEN).
Ils’ensuit bien par définition que
Xn
= pourtout n E N. Il
Nous terminerons par une remarque et un
exemple.
Pour un espace de Banach G de dimensionfinie,
unemartingale intégrable
n EN)
à valeurs dans
l’espace
Jf desparties
convexescompactes
de G est tou-jours
essentiellement p. s.convergente,
au sens où il existe au moins unemartingale intégrable
réelle EN)
telle que lamartingale (Xn - fm n E N) [obtenue
par translation des ensembles de - soit p. s. conver-gente.
En effet il suffit de choisir lamartingale
réelle EN)
telle que p. s. pour toutn E N,
cequi
esttoujours possible ;
alors la suiteest une
martingale intégrable
réellepositive,
donc p. s.convergente, quel
que
soit y
E G’. Comme G est de dimensionfinie,
il est facile d’en déduireque la
martingale {Xn-fn, n~ N}
converge p. s. dans Jf. Ce résultatne s’étend pas en dimension infinie comme le montre
l’exemple
suivant.Exemple :
Surl’espace [(Q, ~, P) ; (~n,
nEN)],
soit[(~n,
nEN), pEN]
une suite de
martingales intégrables
réellespositives.
La formuledéfinit alors une
martingale intégrable
à valeurs dans lesparties
convexes, faiblementcompactes
del’espace
de Hilbertl2(N)
pourvu que les v. a.réelles
positives
soient
intégrables ;
cela se vérifie facilementaprès
avoirremarqué
que7 CONVERGENCE PRESQUE SURE DE MARTINGALES MULTIVOQUES
D’autre
part
lesmartingales positives (~n,
n EN) (p
EN) convergent
néces- sairement p. s. vers des v. a.intégrables
réellespositives ~ ~ (p
EN) respecti-
vement ; mais la formule
ne définit pas nécessairement pour presque tout m, une
partie
convexefaiblement
compact
del2(N)
car ilpeut
se faire que la v. a.ne soit pas finie p. s.
(ni a fortiori intégrable),
même si les v. a.0(Xn)
sontintégrables (n e N).
Il est doncpossible
que lamartingale intégrable (Xn, nEN) (ni
aucune de sestranslatées)
ne converge pas presquepartout.
Je remercie M. VALADIER de m’avoir
signalé
une erreur dans lapremière
rédaction de ce travail.
BIBLIOGRAPHIE
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[2] S. D. CHATTERJI, Martingale convergence and the Radon Nikodym theorem in Banach spaces. Math. Scand., t. 22, 1968, p. 21-41.
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Sci. Paris, t. 269, 1969, p. 429-432.
[7, c] 2014 Thèse, Grenoble, 1971.
(Manuscrit reçu le 8 octobre 1971 et revu le- 6 décembre 1971 ) .