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Le siège de Tyr par Alexandre et la mémoire des vainqueurs

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(1)
(2)
(3)

Comité d’honneur (au 01.01.2015) :

Jean Andreau, Alexandre Farnoux, Ian Morris, Georges Rougemont, Catherine

Virlouvet

Comité de Rédaction (au 01.01.2015) :

Marie-Françoise Boussac, Roland Étienne, Jean-François Salles, Laurianne

martinez-sève, Jean-Baptiste Yon

Responsable de la Rédaction : Marie-Françoise Boussac

Adjoint : Jean-Baptiste Yon

Maison de l’Orient et de la Méditerranée — Jean Pouilloux 5/7 rue Raulin, F-69365 Lyon Cedex 07, France

marie-francoise.boussac@mom.fr www.topoi.mom.fr

www.persee.fr/web/revues/home/prescript/revue/topoi

Diffusion : De Boccard Édition-Diffusion, 11 rue de Médicis, F-75006 Paris

Topoi. Orient-Occident Supplément 13, Lyon (2015)

ISSN : 1764-0733

Illustration de couverture : statue votive du prince sidonien Baalshilem, Bostan ech-Cheikh, Musée National de Beyrouth, inv. 12454 (Ph. Archives Maurice Dunand, DGA, Beyrouth).

Illustration du dos : stèle funéraire de Sarapiôn, Borj al-Chamali (région de Tyr), Musée National de Beyrouth, inv. 3272 (Ph. Julien Aliquot).

Ouvrage publié avec le concours

de la Société des Amis de la Bibliothèque Salomon Reinach

Comité d’honneur (au 01.01.2015)

:

, Ian

arnoux

F

, Alexandre

ndreau

Jean A

M

orris

, Geor

ges R

ougemont

, Catherine

irlouvet

V

Comité de Rédaction (au 01.01.2015)

:

tienne

É

, Roland

oussac

Marie-Françoise B

, Jean-François

S

alles

, Laurianne

on

, Jean-Baptiste Y

ève

-s

artinez

m

Responsable de la Rédaction : Marie-Françoise B

oussac

Adjoint : Jean-Baptiste

Y

on

Maison de l’Orient et de la Méditerranée — Jean Pouilloux

5/7 rue Raulin, F-69365 Lyon Cedex 07, France

marie-francoise.boussac@mom.fr

www.topoi.mom.fr

www.persee.fr/web/revues/home/prescript/revue/topoi

Diffusion : De Boccard Édition-Dif

fusion, 11 rue de Médicis, F-75006 Paris

Topoi. Orient-Occident

Supplément 13, Lyon (2015)

ISSN : 1764-0733

Illustration de

couverture :

statue votive

du prince

sidonien Baalshilem,

Bostan

Maurice

(Ph. Archives

. 12454

Beyrouth, inv

National de

ech-Cheikh, Musée

Dunand, DGA, Beyrouth).

Illustration du

dos : stèle

funéraire de

Sarapiôn, Borj

al-Chamali (région

de Tyr),

Aliquot).

Musée National de Beyrouth, inv. 3272 (Ph. Julien

Ouvrage publié avec le concours

de la Société des Amis de la Bibliothèque Salomon Reinach

Comité d’honneur (au 01.01.2015) :

Jean Andreau, Alexandre Farnoux, Ian Morris, Georges Rougemont, Catherine

Virlouvet

Comité de Rédaction (au 01.01.2015) :

Marie-Françoise Boussac, Roland Étienne, Jean-François Salles, Laurianne

martinez-sève, Jean-Baptiste Yon

Responsable de la Rédaction : Marie-Françoise Boussac

Adjoint : Jean-Baptiste Yon

Maison de l’Orient et de la Méditerranée — Jean Pouilloux 5/7 rue Raulin, F-69365 Lyon Cedex 07, France

marie-francoise.boussac@mom.fr www.topoi.mom.fr

www.persee.fr/web/revues/home/prescript/revue/topoi

Diffusion : De Boccard Édition-Diffusion, 11 rue de Médicis, F-75006 Paris

Topoi. Orient-Occident Supplément 13, Lyon (2015)

ISSN : 1764-0733

Illustration de couverture : statue votive du prince sidonien Baalshilem, Bostan ech-Cheikh, Musée National de Beyrouth, inv. 12454 (Ph. Archives Maurice Dunand, DGA, Beyrouth).

Illustration du dos : stèle funéraire de Sarapiôn, Borj al-Chamali (région de Tyr), Musée National de Beyrouth, inv. 3272 (Ph. Julien Aliquot).

Ouvrage publié avec le concours

de la Société des Amis de la Bibliothèque Salomon Reinach

Comité d’honneur (au 01.01.2015)

:

, Ian

arnoux

F

, Alexandre

ndreau

Jean A

M

orris

, Geor

ges R

ougemont

, Catherine

irlouvet

V

Comité de Rédaction (au 01.01.2015)

:

tienne

É

, Roland

oussac

Marie-Françoise B

, Jean-François

S

alles

, Laurianne

on

, Jean-Baptiste Y

ève

-s

artinez

m

Responsable de la Rédaction : Marie-Françoise B

oussac

Adjoint : Jean-Baptiste

Y

on

Maison de l’Orient et de la Méditerranée — Jean Pouilloux

5/7 rue Raulin, F-69365 Lyon Cedex 07, France

marie-francoise.boussac@mom.fr

www.topoi.mom.fr

www.persee.fr/web/revues/home/prescript/revue/topoi

Diffusion : De Boccard Édition-Dif

fusion, 11 rue de Médicis, F-75006 Paris

Topoi. Orient-Occident

Supplément 13, Lyon (2015)

ISSN : 1764-0733

Illustration de

couverture :

statue votive

du prince

sidonien Baalshilem,

Bostan

Maurice

(Ph. Archives

. 12454

Beyrouth, inv

National de

ech-Cheikh, Musée

Dunand, DGA, Beyrouth).

Illustration du

dos : stèle

funéraire de

Sarapiôn, Borj

al-Chamali (région

de Tyr),

Aliquot).

Musée National de Beyrouth, inv. 3272 (Ph. Julien

Ouvrage publié avec le concours

(4)

Topoi Suppl. 13 (2015)

p. 3-4

Topoi Supplément 13

LA PhéniCie heLLéniStique

Actes du colloque international de toulouse

(18-20 février 2013)

édités par Julien a

liquot

et Corinne B

onnet

Sommaire

Julien aliquot et Corinne Bonnet, « Introduction » 5-7

Cités et royaumes, des Achéménides à Rome

Catherine apicella et Françoise Briquel chatonnet, « La transition institutionnelle

dans les cités phéniciennes, des Achéménides à Rome » 9-29 Sabine Fourrier, « Chypre, des royaumes à la province lagide :

la documentation phénicienne » 31-53 Catharine C. lorBer, « Royal Coinage in Hellenistic Phoenicia :

Expressions of Continuity, Agents of Change » 55-88 Jean-Baptiste Yon, « De Marisa à Byblos avec le courrier de Séleucos IV.

Quelques données sur Byblos hellénistique » 89-105

Villes et campagnes du pays phénicien

Hélène sader, « Les territoires des cités phéniciennes

entre continuité et changement » 107-121 Élodie guillon, « Les rapports entre les cités phéniciennes et leurs arrière-pays

en Phénicie du Nord » 123-153

Tomasz WaliszeWski et Urszula Wicenciak, « Jiyeh (Porphyreon).

Nouvelles découvertes sur le territoire de Sidon à l’époque hellénistique » 155-179 Rolf A. stuckY, « Dorf und Stadt. Griechische Präsenz an der phönizischen Küste

während der Perserzeit und im frühen Hellenismus » 181-205

Topoi Suppl. 13 (2015) p. 3-4

Topoi

Supplément 13

LA Phéni

Cie he

LLéni

Stique

Actes du colloque international de toulouse

(18-20 février 2013)

édités par Julien a

liquot et Corinne B onnet

Sommaire

Julien a liquot et Corinne B onnet , « Introduction » 5-7

Cités et royaumes, des Achéménides à Rome Catherine a picella et Françoise B riquel c hatonnet , « La transition ins

titutionnelle Achéménides à Rome » dans les cités phéniciennes, des

9-29 : , « Chypre, des royaumes à la province lagide ourrier Sabine F la documentation phénicienne

»

31-53 : , « Royal Coinage in Hellenistic Phoenicia orBer Catharine C. l Expressions of Continuity, Agents of Change

»

55-88 . , « De Marisa à Byblos avec le courrier de Séleucos IV on Jean-Baptiste Y Quelques données sur Byblos hellénistique »

89-105

Villes et campagnes du pays phénicien

Hélène s

ader

, « Les territoires des cités phéniciennes entre continuité et changement

»

107-121 re-pays , « Les rapports entre les cités phéniciennes et leurs arriè uillon Élodie g en Phénicie du Nord

»

123-153 , « Jiyeh (Porphyreon). icenciak et Urszula W ski aliszeW W Tomasz Nouvelles découvertes sur le ter

ritoire de Sidon à l’époque hellénistique »

155-179 hen Küste , « Dorf und Stadt. Griechische Präsenz an der phönizisc tuckY s Rolf A. während der Perserzeit und im frühen Hellenismus

» 181-205 Topoi Suppl. 13 (2015) p. 3-4

Topoi Supplément 13

LA PhéniCie heLLéniStique

Actes du colloque international de toulouse

(18-20 février 2013)

édités par Julien a

liquot

et Corinne B

onnet

Sommaire

Julien aliquot et Corinne Bonnet, « Introduction » 5-7

Cités et royaumes, des Achéménides à Rome

Catherine apicella et Françoise Briquel chatonnet, « La transition institutionnelle

dans les cités phéniciennes, des Achéménides à Rome » 9-29 Sabine Fourrier, « Chypre, des royaumes à la province lagide :

la documentation phénicienne » 31-53 Catharine C. lorBer, « Royal Coinage in Hellenistic Phoenicia :

Expressions of Continuity, Agents of Change » 55-88 Jean-Baptiste Yon, « De Marisa à Byblos avec le courrier de Séleucos IV.

Quelques données sur Byblos hellénistique » 89-105

Villes et campagnes du pays phénicien

Hélène sader, « Les territoires des cités phéniciennes

entre continuité et changement » 107-121 Élodie guillon, « Les rapports entre les cités phéniciennes et leurs arrière-pays

en Phénicie du Nord » 123-153

Tomasz WaliszeWski et Urszula Wicenciak, « Jiyeh (Porphyreon).

Nouvelles découvertes sur le territoire de Sidon à l’époque hellénistique » 155-179 Rolf A. stuckY, « Dorf und Stadt. Griechische Präsenz an der phönizischen Küste

während der Perserzeit und im frühen Hellenismus » 181-205

Topoi Suppl. 13 (2015) p. 3-4

Topoi

Supplément 13

LA Phéni

Cie he

LLéni

Stique

Actes du colloque international de toulouse

(18-20 février 2013)

édités par Julien a

liquot et Corinne B onnet

Sommaire

Julien a liquot et Corinne B onnet , « Introduction » 5-7

Cités et royaumes, des Achéménides à Rome Catherine a picella et Françoise B riquel c hatonnet , « La transition ins

titutionnelle Achéménides à Rome » dans les cités phéniciennes, des

9-29 : , « Chypre, des royaumes à la province lagide ourrier Sabine F la documentation phénicienne

»

31-53 : , « Royal Coinage in Hellenistic Phoenicia orBer Catharine C. l Expressions of Continuity, Agents of Change

»

55-88 . , « De Marisa à Byblos avec le courrier de Séleucos IV on Jean-Baptiste Y Quelques données sur Byblos hellénistique »

89-105

Villes et campagnes du pays phénicien

Hélène s

ader

, « Les territoires des cités phéniciennes entre continuité et changement

»

107-121 re-pays , « Les rapports entre les cités phéniciennes et leurs arriè uillon Élodie g en Phénicie du Nord

»

123-153 , « Jiyeh (Porphyreon). icenciak et Urszula W ski aliszeW W Tomasz Nouvelles découvertes sur le ter

ritoire de Sidon à l’époque hellénistique »

155-179 hen Küste , « Dorf und Stadt. Griechische Präsenz an der phönizisc tuckY s Rolf A. während der Perserzeit und im frühen Hellenismus

(5)

4 sommaire

Culture matérielle et koinè hellénistique

Jessica L. nitschke, « What is Phoenician about Phoenician material culture

in the Hellenistic period ? » 207-238 Ida oggiano, « Le sanctuaire de Kharayeb et l’évolution

de l’imagerie phénicienne dans l’arrière-pays de Tyr » 239-266 Sandrine Élaigne, « La vaisselle de table en Phénicie à l’époque hellénistique » 267-294

Hélène eristov, « Le décor des maisons hellénistiques de Beyrouth » 295-314

Mémoires de la Phénicie hellénistique

Corinne Bonnet, « Le siège de Tyr par Alexandre et la mémoire des vainqueurs » 315-334

Giuseppe garBati, « Le relazioni tra Cartagine e Tiro in età ellenistica.

Presente e memoria nel tophet di Salammbô » 335-353 Julien aliquot, « Bibulus, fondateur de Byblos » 355-365

Maurice sartre, « Conclusions » 367-374

Julien aliquot, « Index » 375-396

4 sommaire

Culture matérielle et

koinè hellénistique

Jessica L. n itschke

, « What is Phoenician about Phoenician material cu lture ? » in the Hellenistic period

207-238 , « Le sanctuaire de Kharayeb et l’évolution ggiano Ida o de l’imagerie phénicienne dans

l’arrière-pays de Tyr »

239-266 stique » , « La vaisselle de table en Phénicie à l’époque helléni laigne Sandrine É 267-294 » , « Le décor des maisons hellénistiques de Beyrouth ristov Hélène e 295-314

Mémoires de la Phénicie hellénistique

Corinne B

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, « Le siège de Tyr par

Alexandre et la mémoire des vainqueurs »

315-334 Tiro in età ellenistica. , « Le relazioni tra Cartagine e ti arBa Giuseppe g Presente e memoria nel

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335-353 » , « Bibulus, fondateur de Byblos liquot Julien a 355-365 Maurice s artre , « Conclusions » 367-374 Julien a liquot , « Index » 375-396 4 sommaire

Culture matérielle et koinè hellénistique

Jessica L. nitschke, « What is Phoenician about Phoenician material culture

in the Hellenistic period ? » 207-238 Ida oggiano, « Le sanctuaire de Kharayeb et l’évolution

de l’imagerie phénicienne dans l’arrière-pays de Tyr » 239-266 Sandrine Élaigne, « La vaisselle de table en Phénicie à l’époque hellénistique » 267-294

Hélène eristov, « Le décor des maisons hellénistiques de Beyrouth » 295-314

Mémoires de la Phénicie hellénistique

Corinne Bonnet, « Le siège de Tyr par Alexandre et la mémoire des vainqueurs » 315-334

Giuseppe garBati, « Le relazioni tra Cartagine e Tiro in età ellenistica.

Presente e memoria nel tophet di Salammbô » 335-353 Julien aliquot, « Bibulus, fondateur de Byblos » 355-365

Maurice sartre, « Conclusions » 367-374

Julien aliquot, « Index » 375-396

4 sommaire

Culture matérielle et

koinè hellénistique

Jessica L. n itschke

, « What is Phoenician about Phoenician material cu lture ? » in the Hellenistic period

207-238 , « Le sanctuaire de Kharayeb et l’évolution ggiano Ida o de l’imagerie phénicienne dans

l’arrière-pays de Tyr »

239-266 stique » , « La vaisselle de table en Phénicie à l’époque helléni laigne Sandrine É 267-294 » , « Le décor des maisons hellénistiques de Beyrouth ristov Hélène e 295-314

Mémoires de la Phénicie hellénistique

Corinne B

onnet

, « Le siège de Tyr par

Alexandre et la mémoire des vainqueurs »

315-334 Tiro in età ellenistica. , « Le relazioni tra Cartagine e ti arBa Giuseppe g Presente e memoria nel

tophet di Salammbô

»

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Topoi Suppl. 13 (2015)

p. 315-334

Le Siège De tyR PAR ALexAnDRe

et LA MéMoiRe DeS VAinqueuRS

introduction

1

La périodisation traditionnelle de l’histoire hellénistique s’adosse à la

représentation de la conquête de l’Orient par Alexandre comme un tournant qui

conduit à l’« hellénisation » des régions placées sous la tutelle gréco-macédonienne

2

.

Une telle vision est aujourd’hui débattue

3

. En effet, que l’on adopte un point de

vue politico-institutionnel, économique ou culturel, on a de bonnes raisons de

remettre sérieusement en question l’idée d’une césure forte. Pour les mêmes

raisons, le concept même d’« hellénisation » ne satisfait plus guère les historiens

de l’époque hellénistique, à la recherche de nouveaux descripteurs pour rendre

compte des dynamiques évolutives qu’ils observent et s’efforcent d’interpréter

4

.

Il est vrai qu’évaluer la portée des conquêtes d’Alexandre n’est pas chose aisée

et appelle une analyse nuancée, faisant la part des éléments de continuité et de

rupture, appréhendant les interactions culturelles avec des outils d’une certaine

finesse que les historiens vont volontiers chercher du côté de l’anthropologie et

de la sociologie appliquées à d’autres périodes, même très récentes, de l’histoire

des sociétés. Les royaumes phéniciens, intégrés dans l’empire achéménide

depuis le

vie

siècle av. J.-C., mais ouverts sur le monde méditerranéen depuis

1. Les analyses ici présentées sont prolongées dans un livre paru en 2014 : Les enfants

de Cadmos. Le paysage religieux de la Phénicie hellénistique.

2. Pour une première discussion concernant cette question, voir grandjean et al. 2008.

Stimulant aussi pour réfléchir sur la texture de l’époque hellénistique, ma 2008.

3. Briant et joannès 2006.

4. Pour un état de la question, voir grandjean et al. 2008, p. 285-305. Pour une

approche plus approfondie, Bichler 1983 ; canFora 1987 ; Funck 1996.

Topoi Suppl. 13 (2015) p. 315-334

Le Siège

De

tyR

PAR

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intr oduction 1 La périodisation traditionnelle de l’histoire hellénistique s’adosse

à la tournant qui comme un par Alexandre de l’Orient la conquête représentation de

conduit à l’« hellé nisation » des régions placées sous la tutelle gréco-macédonienne 2

. point de adopte un que l’on effet, . En 3 aujourd’hui débattue vision est Une telle

vue politico-institutionnel, économique ou

culturel, on a de bonnes raisons

de mêmes Pour les césure forte. l’idée d’une en question remettre sérieusement

raisons, le concept même d’« hellénisation » ne satisfait plus guère les

historiens pour rendre descripteurs de nouveaux la recherche hellénistique, à de l’époque

compte des dynamiques évolutives qu’ils observent et s’ef forcent d’interpréter 4

. aisée pas chose d’Alexandre n’est des conquêtes la portée vrai qu’évaluer Il est

et appelle une analyse nuancée, faisant la part des éléments de continuité

et de d’une certaine des outils culturelles avec les interactions rupture, appréhendant

finesse que les historiens vont volontiers

chercher du côté de

l’anthropologie et très récen périodes, même à d’autres sociologie appliquées de la

tes, de

l’histoire pire achéménide dans l’em phéniciens, intégrés Les royaumes des sociétés.

depuis le vi e siècle av. J.-C., mais ouverts sur le monde médi terranéen depuis 1. Les analyse s ici présentées sont prolongées dans un livre paru en 2014 : Les

enfants de Cadmos. Le paysage religieux de la Phénicie hellénistique.

2. Pour une première discussion concernant cette question, voir g randjean et

al. 2008. 2008. a Stimulant aussi pour réfléchir sur la texture de l’époque hellénistique, m

3. B riant et j oannès 2006. 4. Pour un état de la question, voir g randjean et al. 2008, p. 285-305.

Pour une 1996. unck 1987 ; F anFora 1983 ; c ichler approche plus approfondie, B

Topoi Suppl. 13 (2015)

p. 315-334

Le Siège De tyR PAR ALexAnDRe

et LA MéMoiRe DeS VAinqueuRS

introduction

1

La périodisation traditionnelle de l’histoire hellénistique s’adosse à la

représentation de la conquête de l’Orient par Alexandre comme un tournant qui

conduit à l’« hellénisation » des régions placées sous la tutelle gréco-macédonienne

2

.

Une telle vision est aujourd’hui débattue

3

. En effet, que l’on adopte un point de

vue politico-institutionnel, économique ou culturel, on a de bonnes raisons de

remettre sérieusement en question l’idée d’une césure forte. Pour les mêmes

raisons, le concept même d’« hellénisation » ne satisfait plus guère les historiens

de l’époque hellénistique, à la recherche de nouveaux descripteurs pour rendre

compte des dynamiques évolutives qu’ils observent et s’efforcent d’interpréter

4

.

Il est vrai qu’évaluer la portée des conquêtes d’Alexandre n’est pas chose aisée

et appelle une analyse nuancée, faisant la part des éléments de continuité et de

rupture, appréhendant les interactions culturelles avec des outils d’une certaine

finesse que les historiens vont volontiers chercher du côté de l’anthropologie et

de la sociologie appliquées à d’autres périodes, même très récentes, de l’histoire

des sociétés. Les royaumes phéniciens, intégrés dans l’empire achéménide

depuis le

vie

siècle av. J.-C., mais ouverts sur le monde méditerranéen depuis

1. Les analyses ici présentées sont prolongées dans un livre paru en 2014 : Les enfants

de Cadmos. Le paysage religieux de la Phénicie hellénistique.

2. Pour une première discussion concernant cette question, voir grandjean et al. 2008.

Stimulant aussi pour réfléchir sur la texture de l’époque hellénistique, ma 2008.

3. Briant et joannès 2006.

4. Pour un état de la question, voir grandjean et al. 2008, p. 285-305. Pour une

approche plus approfondie, Bichler 1983 ; canFora 1987 ; Funck 1996.

Topoi Suppl. 13 (2015) p. 315-334

Le Siège

De

tyR

PAR

AL

exAn

DRe

inqueuRS

VA

DeS

oiRe

éM

M

et LA

intr oduction 1 La périodisation traditionnelle de l’histoire hellénistique s’adosse

à la tournant qui comme un par Alexandre de l’Orient la conquête représentation de

conduit à l’« hellé nisation » des régions placées sous la tutelle gréco-macédonienne 2

. point de adopte un que l’on effet, . En 3 aujourd’hui débattue vision est Une telle

vue politico-institutionnel, économique ou

culturel, on a de bonnes raisons

de mêmes Pour les césure forte. l’idée d’une en question remettre sérieusement

raisons, le concept même d’« hellénisation » ne satisfait plus guère les

historiens pour rendre descripteurs de nouveaux la recherche hellénistique, à de l’époque

compte des dynamiques évolutives qu’ils observent et s’ef forcent d’interpréter 4

. aisée pas chose d’Alexandre n’est des conquêtes la portée vrai qu’évaluer Il est

et appelle une analyse nuancée, faisant la part des éléments de continuité

et de d’une certaine des outils culturelles avec les interactions rupture, appréhendant

finesse que les historiens vont volontiers

chercher du côté de

l’anthropologie et très récen périodes, même à d’autres sociologie appliquées de la

tes, de

l’histoire pire achéménide dans l’em phéniciens, intégrés Les royaumes des sociétés.

depuis le vi e siècle av. J.-C., mais ouverts sur le monde médi terranéen depuis 1. Les analyse s ici présentées sont prolongées dans un livre paru en 2014 : Les

enfants de Cadmos. Le paysage religieux de la Phénicie hellénistique.

2. Pour une première discussion concernant cette question, voir g randjean et

al. 2008. 2008. a Stimulant aussi pour réfléchir sur la texture de l’époque hellénistique, m

3. B riant et j oannès 2006. 4. Pour un état de la question, voir g randjean et al. 2008, p. 285-305.

(7)

316 c. Bonnet

toujours, constituent dès lors, pour l’historien désireux de ressaisir la portée des événements de l’année 332, un terrain d’enquête particulièrement stimulant, mais

aussi ardu 5. Que se passe-t-il au juste lorsqu’Alexandre, après la victoire d’Issos,

arrive aux portes d’Arwad et traverse la Phénicie pour se rendre en Égypte ? En quels termes peut-on restituer et évaluer la portée de ces événements ? Le premier écueil est documentaire : disparue la littérature phénicienne, et en l’absence de tout témoignage épigraphique pertinent, le silence des vaincus retentit comme un défi. Il oblige à bâtir l’enquête sur les seuls échos de la mémoire des vainqueurs : les Grecs, et dans leur sillage les Romains, ont en effet le monopole des récits de conquête de la Phénicie. Grecs et Romains parlent d’Alexandre en Phénicie, non pas comme les « poilus » de 14-18, dans leurs lettres ou carnets rédigés au cœur même des tranchées, ou encore dans des mémoires de guerre livrées peu après le retour de la paix, mais par le biais d’une historiographie tardive qui a des accents d’épopée. Certes, ces récits puisent parfois à des sources très proches d’Alexandre, mais ils participent, chacun à sa façon, à la fabrication d’une légende édifiante et

héroïsante qui prend des libertés avec l’histoire 6. En généralisant à peine, on peut

dire que la conquête de l’Orient par Alexandre est présentée comme un tournant politique et culturel majeur, qui confère à l’hellénisme une dimension universelle.

Or, comme l’a bien montré Jan Assmann 7, la mémoire culturelle applique au

flux des événements divers filtres qui opèrent à partir d’un programme, que l’on qualifiera de mémoriel, susceptible d’induire des distorsions considérables dans la réception à long terme des événements. Dans le cas d’Alexandre, qu’il s’agisse d’Arrien, soucieux de précision, notamment dans les choses militaires, ou de Diodore, Plutarque, Quinte-Curce et Justin, pour ne citer que les principaux relais des faits qui nous intéressent, ils adoptent tous un point de vue unilatéralement grec et donnent à voir un conquérant légitime, voire exemplaire. Certaines de ces sources concèdent davantage que d’autres à la rhétorique et à la morale, à l’anecdote et à l’héroïsation du grand conquérant, sans renoncer à montrer les aspérités ou excès du personnage, mais aucune ne prend véritablement en compte

le point de vue des « autres » 8. Face à une telle situation documentaire, il ne reste

5. L’ouvrage de grainger 1992 ne répond pas vraiment aux attentes. Cf. le sévère

compte rendu de macadam 1993. Voir la problématisation de millar 1983 et 1987

(repris dans millar 2006, p. 3-50).

6. La question de la Quellenforschung des témoignages relatifs à la conquête de la Phénicie par Alexandre ne sera pas approfondie ici ; elle l’est dans le chapitre concerné du livre cité à la n. 1. Sur ces sujets, on consultera pearson 1960 ; hamilton 1969 ;

goukosWkY 1978-1981 ; atkinson 1980 ; pÉdech 1984 ; prandi 1985 ; BosWorth

1988 et 1996 ; BaYnham 1998 ; Bounoure et serret 1992 ; hammond 1993 ; YardleY

et heckel 1997 ; auBerger 2001 ; jouanno 2002 ; squillace 2004 ; prandi 2013.

7. assmann 2010 (édition originale allemande de 1992).

8. Sur la manière dont les modernes, aux xviie-xviiie siècles, ont envisagé la question

des sources relatives à Alexandre, voir le récent ouvrage de Briant 2012.

316 c . Bonnet

toujours, constit

uent dès

lors, pour

l’historien désireux

de ressaisir

la portée

des

stimulant, mais

d’enquête particulièrement

un terrain

l’année 332,

événements de

aussi ardu

5

. Que

se passe-t-il

au juste

lorsqu’Alexandre, après

la victoire

d’Issos,

Égypte ?

rendre en

pour se

la Phénicie

et traverse

portes d’Arwad

arrive aux

En

premier

? Le

événements

de ces

la portée

et évaluer

peut-on restituer

quels termes

écueil est

documentaire :

disparue la

littérature phénicienne,

et en

l’absence de

vaincus retentit

silence des

pertinent, le

oignage épigraphique

tout tém

comme un

vainqueurs :

mémoire des

de la

seuls échos

sur les

bâtir l’enquête

oblige à

défi. Il

les Grecs,

et dans

leur sillage

les Romains,

ont en

effet

le monopole

des récits

de

Phénicie, non

d’Alexandre en

Romains parlent

Grecs et

la Phénicie.

conquête de

pas comme

les « poilus

» de

14-18, dans

leurs lettres

ou carnets

rédigés au

cœur

peu après

guerre livrées

mémoires de

dans des

ou encore

tranchées,

même des

le

accents

a des

tardive qui

d’une historiographie

le biais

mais par

la paix,

retour de

d’épopée. Certes,

ces récits

puisent parfois

à des

sources très

proches d’Alexandre,

fabrication d’une

à la

sa façon,

chacun à

participent,

mais ils

légende édifiante

et

on peut

généralisant à peine,

. En

6

l’histoire

libertés avec

prend des

héroïsante qui

dire que

la conquête

de l’Orient

par

Alexandre est

présentée comme

un tournant

une dimension

confère à l’hellénisme

majeur, qui

culturel

politique et

universelle.

applique au

mémoire culturelle

, la

7

Assmann

montré Jan

l’a bien

Or, comme

flux des

événements

divers filtres

qui opèrent

à partir

d’un programme,

que l’on

distorsions considérables

d’induire des

mémoriel, susceptible

qualifiera de

dans

qu’il s’agisse

des événements. Dans le cas d’Alexandre,

la réception à long terme

d’Arrien, soucieux

de précision,

notamment dans

les choses

militaires, ou

de

principaux relais

que les

ne citer

Justin, pour

Quinte-Curce et

Diodore, Plutarque,

des faits

qui nous

intéressent, ils

adoptent tous

un point

de vue

unilatéralement

voire exemplaire.

conquérant légitime,

voir un

donnent à

grec et

Certaines de

et à

la rhétorique

d’autres à

e que

concèdent davantag

ces sources

la morale,

à

montrer les

renoncer à

conquérant, sans

du grand

à l’héroïsation

l’anecdote et

aspérités ou excè

s du personnage, mais aucune ne prend véritabl

ement en compte

documentaire, il

telle situation

à une

. Face

8

»

des « autres

de vue

le point

ne reste

5. L’ouvrage de g rainger 1992 ne répond pas vraiment aux attente s. Cf. le

sévère et 1987 1983 illar la problématisation de m Voir 1993. dam a ac m compte rendu de (repris dans m illar 2006, p. 3-50). 6. La question de la Quellenforschung des témoignages relatifs à la conquête de

la concerné le chapitre l’est dans ; elle approfondie ici sera pas Alexandre ne Phénicie par du livre cité à la n. 1. Sur ces sujets, on consultera p earson 1960 ; h amilton 1969

; orth osW ; B 1985 randi ; p 1984 Édech ; p 1980 tkinson ; a 1978-1981 kY oukosW g 1988 et 1996 ; B aYnham 1998 ; B ounoure et s erret 1992 ; h ammond 1993 ; Y ardleY et h eckel 1997 ; a uBerger 2001 ; j ouanno 2002 ; s quillace 2004 ; p randi 2013. 7. a ssmann

2010 (édition originale allemande d e 1992). 8. Sur la manière dont les modernes, aux xvii e -xviii e siècles, ont envisagé

la question 2012. riant B des sources relatives à Alexandre, voir le récent ouvrage de

316 c. Bonnet

toujours, constituent dès lors, pour l’historien désireux de ressaisir la portée des événements de l’année 332, un terrain d’enquête particulièrement stimulant, mais

aussi ardu 5. Que se passe-t-il au juste lorsqu’Alexandre, après la victoire d’Issos,

arrive aux portes d’Arwad et traverse la Phénicie pour se rendre en Égypte ? En quels termes peut-on restituer et évaluer la portée de ces événements ? Le premier écueil est documentaire : disparue la littérature phénicienne, et en l’absence de tout témoignage épigraphique pertinent, le silence des vaincus retentit comme un défi. Il oblige à bâtir l’enquête sur les seuls échos de la mémoire des vainqueurs : les Grecs, et dans leur sillage les Romains, ont en effet le monopole des récits de conquête de la Phénicie. Grecs et Romains parlent d’Alexandre en Phénicie, non pas comme les « poilus » de 14-18, dans leurs lettres ou carnets rédigés au cœur même des tranchées, ou encore dans des mémoires de guerre livrées peu après le retour de la paix, mais par le biais d’une historiographie tardive qui a des accents d’épopée. Certes, ces récits puisent parfois à des sources très proches d’Alexandre, mais ils participent, chacun à sa façon, à la fabrication d’une légende édifiante et

héroïsante qui prend des libertés avec l’histoire 6. En généralisant à peine, on peut

dire que la conquête de l’Orient par Alexandre est présentée comme un tournant politique et culturel majeur, qui confère à l’hellénisme une dimension universelle.

Or, comme l’a bien montré Jan Assmann 7, la mémoire culturelle applique au

flux des événements divers filtres qui opèrent à partir d’un programme, que l’on qualifiera de mémoriel, susceptible d’induire des distorsions considérables dans la réception à long terme des événements. Dans le cas d’Alexandre, qu’il s’agisse d’Arrien, soucieux de précision, notamment dans les choses militaires, ou de Diodore, Plutarque, Quinte-Curce et Justin, pour ne citer que les principaux relais des faits qui nous intéressent, ils adoptent tous un point de vue unilatéralement grec et donnent à voir un conquérant légitime, voire exemplaire. Certaines de ces sources concèdent davantage que d’autres à la rhétorique et à la morale, à l’anecdote et à l’héroïsation du grand conquérant, sans renoncer à montrer les aspérités ou excès du personnage, mais aucune ne prend véritablement en compte

le point de vue des « autres » 8. Face à une telle situation documentaire, il ne reste

5. L’ouvrage de grainger 1992 ne répond pas vraiment aux attentes. Cf. le sévère

compte rendu de macadam 1993. Voir la problématisation de millar 1983 et 1987

(repris dans millar 2006, p. 3-50).

6. La question de la Quellenforschung des témoignages relatifs à la conquête de la Phénicie par Alexandre ne sera pas approfondie ici ; elle l’est dans le chapitre concerné du livre cité à la n. 1. Sur ces sujets, on consultera pearson 1960 ; hamilton 1969 ;

goukosWkY 1978-1981 ; atkinson 1980 ; pÉdech 1984 ; prandi 1985 ; BosWorth

1988 et 1996 ; BaYnham 1998 ; Bounoure et serret 1992 ; hammond 1993 ; YardleY

et heckel 1997 ; auBerger 2001 ; jouanno 2002 ; squillace 2004 ; prandi 2013.

7. assmann 2010 (édition originale allemande de 1992).

8. Sur la manière dont les modernes, aux xviie-xviiie siècles, ont envisagé la question

des sources relatives à Alexandre, voir le récent ouvrage de Briant 2012.

316 c . Bonnet

toujours, constit

uent dès

lors, pour

l’historien désireux

de ressaisir

la portée

des

stimulant, mais

d’enquête particulièrement

un terrain

l’année 332,

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aussi ardu

5

. Que

se passe-t-il

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d’Issos,

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et traverse

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premier

? Le

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la portée

et évaluer

peut-on restituer

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écueil est

documentaire :

disparue la

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l’absence de

vaincus retentit

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seuls échos

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bâtir l’enquête

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défi. Il

les Grecs,

et dans

leur sillage

les Romains,

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le monopole

des récits

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Phénicie, non

d’Alexandre en

Romains parlent

Grecs et

la Phénicie.

conquête de

pas comme

les « poilus

» de

14-18, dans

leurs lettres

ou carnets

rédigés au

cœur

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mémoires de

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ou encore

tranchées,

même des

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tardive qui

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le biais

mais par

la paix,

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d’épopée. Certes,

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à des

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proches d’Alexandre,

fabrication d’une

à la

sa façon,

chacun à

participent,

mais ils

légende édifiante

et

on peut

généralisant à peine,

. En

6

l’histoire

libertés avec

prend des

héroïsante qui

dire que

la conquête

de l’Orient

par

Alexandre est

présentée comme

un tournant

une dimension

confère à l’hellénisme

majeur, qui

culturel

politique et

universelle.

applique au

mémoire culturelle

, la

7

Assmann

montré Jan

l’a bien

Or, comme

flux des

événements

divers filtres

qui opèrent

à partir

d’un programme,

que l’on

distorsions considérables

d’induire des

mémoriel, susceptible

qualifiera de

dans

qu’il s’agisse

des événements. Dans le cas d’Alexandre,

la réception à long terme

d’Arrien, soucieux

de précision,

notamment dans

les choses

militaires, ou

de

principaux relais

que les

ne citer

Justin, pour

Quinte-Curce et

Diodore, Plutarque,

des faits

qui nous

intéressent, ils

adoptent tous

un point

de vue

unilatéralement

voire exemplaire.

conquérant légitime,

voir un

donnent à

grec et

Certaines de

et à

la rhétorique

d’autres à

e que

concèdent davantag

ces sources

la morale,

à

montrer les

renoncer à

conquérant, sans

du grand

à l’héroïsation

l’anecdote et

aspérités ou excè

s du personnage, mais aucune ne prend véritabl

ement en compte

documentaire, il

telle situation

à une

. Face

8

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des « autres

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ne reste

5. L’ouvrage de g rainger 1992 ne répond pas vraiment aux attente s. Cf. le

sévère et 1987 1983 illar la problématisation de m Voir 1993. dam a ac m compte rendu de (repris dans m illar 2006, p. 3-50). 6. La question de la Quellenforschung des témoignages relatifs à la conquête de

la concerné le chapitre l’est dans ; elle approfondie ici sera pas Alexandre ne Phénicie par du livre cité à la n. 1. Sur ces sujets, on consultera p earson 1960 ; h amilton 1969

; orth osW ; B 1985 randi ; p 1984 Édech ; p 1980 tkinson ; a 1978-1981 kY oukosW g 1988 et 1996 ; B aYnham 1998 ; B ounoure et s erret 1992 ; h ammond 1993 ; Y ardleY et h eckel 1997 ; a uBerger 2001 ; j ouanno 2002 ; s quillace 2004 ; p randi 2013. 7. a ssmann

2010 (édition originale allemande d e 1992). 8. Sur la manière dont les modernes, aux xvii e -xviii e siècles, ont envisagé

(8)

lesiègedetYrparalexandreetlamÉmoiredesvainqueurs 317

à l’historien qu’à faire le deuil d’une histoire qui, comme l’a fait Nathan Wachtel

pour les Indiens du Pérou

9

, aurait l’ambition de bousculer la logique et la vision

des vainqueurs, et à s’armer pour questionner les procédés narratifs et idéologiques

qui sont à l’œuvre dans les sources grecques et romaines. En d’autres termes, ce

sont les représentations de la conquête de la Phénicie qu’il s’agit d’explorer et de

comprendre.

Une tâche de cette nature suppose de se doter d’une boîte à outils pour

décoder les récits de conquête, qui déploient tantôt le registre de la diplomatie et

des négociations, tantôt celui de la violence, entre prouesses et cruautés. Comme

l’a récemment souligné Pascal Payen, dans son livre sur Les revers de la guerre

10

,

l’écriture de la guerre fait référence à une activité ressentie à la fois comme naturelle

et pathologique, à savoir l’exercice de la violence des hommes sur les hommes.

Elle investit le champ de l’action politique, qui se veut rationnelle, et celui des

sentiments, qui basculent aisément dans le tragique. C’est pourquoi les vaincus,

même si l’historiographie ne leur prête pas voix, sont présents dans les récits et

posent même cruellement la question de la légitimation de la violence, en première

instance celle des envahisseurs, mais aussi celle des résistants. Dans le cas de la

conquête de la Phénicie par Alexandre, même si les sources classiques tendent à

la présenter comme une libération du joug perse, le long et apocalyptique siège

de Tyr, sur lequel nous allons revenir, est là pour rappeler qu’Alexandre incarne

bien l’impérialisme des Grecs, qu’il s’agit effectivement d’annexer et de coloniser

un territoire et un peuple étrangers. L’irruption de nouveaux maîtres venus de

l’extérieur, parlant une autre langue, vénérant d’autres dieux, ayant d’autres usages,

entraîne nécessairement des mutations d’une certaine profondeur et ce que Serge

Gruzinski, en travaillant sur le Mexique espagnol, entre

xvie

et

xviiie

siècle, appelle

une « colonisation de l’imaginaire »

11

. Ses travaux très stimulants, qui constituent

un terme de comparaison nécessairement imparfait, mais néanmoins instructif,

invitent à ne pas figer le regard sur la nouvelle hégémonie qui se met en place,

mais à scruter aussi les nouveaux agencements culturels qui très vite émergent.

La recomposition du tissu politique, social et culturel après la conquête donne

ainsi naissance à de nouveaux paysages, originaux et imprédictibles

12

. On glissera

donc aussi, dans notre boîte à outils, le concept de middle ground, si brillamment

illustré par Richard White dans son étude des rapports entre « Indiens, empires et

9. Wachtel 1971. Pour un renversement de perspective analogue, voir aussi Briant

2003 et, dans le cadre de la région des Grands Lacs au Canada, White 2009 (édition

originale parue à Cambridge en 1991).

10. paYen 2012. Du même auteur, voir aussi paYen 2002.

11. gruzinski 1988. Voir aussi, dans une perspective similaire, gruzinski 1999, 2008 et

2012.

12. Pour approfondir cette question et la notion de paysage, je renvoie à mon livre :

Bonnet 2014. le siège de tYr par alexandre et la mÉmoire des vainqueurs 317 à l’historien qu’à faire le deuil d’une histoire qui, comme l’a fait Nathan W

achtel la vision logique et bousculer la l’ambition de , aurait 9 Pérou Indiens du pour les

des vainqueurs, et à s’armer

pour questionner les procédés

narratifs et

idéologiques En d’autres et romaines. sources grecques dans les à l’œuvre qui sont

termes, ce s’agit d’explorer Phénicie qu’il de la la conquête de représentations sont les

et de comprendre. Une tâc he de cette nature suppose de se doter d’une boîte à outils

pour diplomatie et de la le registre déploient tantôt conquête, qui récits de décoder les

des négociations , tantôt celui de la violence, entre prouesses et cruautés.

Comme guerre de la revers sur Les son livre Payen, dans souligné Pascal l’a récemment

10

, naturelle fois comme à la activité ressentie à une fait référence la guerre l’écriture de

et pathologique, à savoir l’exerc ice de la violence des hommes sur les

hommes. rationnelle, et se veut politique, qui de l’action le champ Elle investit

celui des pourquoi les tragique. C’est dans le basculent aisément sentiments, qui

vaincus, dans les sont présents pas voix, leur prête l’historiographie ne même si

récits et première violence, en de la la légitimation question de cruellement la posent même

instance celle des envahisseurs, mais aussi celle des résistants. Dans le cas

de la tendent à classiques les sources même si par Alexandre, la Phénicie conquête de

la présenter comme une libération du joug perse, le long et apocalyptique

siège incarne rappeler qu’Alexandre là pour , est allons revenir lequel nous , sur de Tyr

bien l’im périalisme des Grecs, qu’il s’agit ef fectivement d’annexer et de

coloniser maîtres venus de nouveaux L’irruption peuple étrangers. et un un territoire

de usages, ayant d’autres d’autres dieux, langue, vénérant une autre l’extérieur, parlant

entraîne nécessairement des mutations

d’une certaine profondeur et

ce que

Serge appelle siècle, e xviii et e xvi espagnol, entre le Mexique travaillant sur Gruzinski, en

une « colonisatio n de l’imaginaire » 11 . Ses travaux très stimulants, qui

constituent mais néanmoins nécessairement imparfait, de comparaison un terme

instructif, se met hégémonie qui la nouvelle regard sur figer le ne pas invitent à

en place, vite émer qui très agencements culturels les nouveaux scruter aussi mais à

gent. conquête donne après la et culturel ique, social tissu polit position du La recom

ainsi naissance à de nouveaux paysages, originaux et imprédictibles 12 . On

glissera brillamment , si ground de middle le concept boîte à outils, dans notre donc aussi,

illustré par Richard White dans son étude des rapports entre « Indiens, empires et 9. W achtel 1971. Pour un renversement de perspective analogue , voir aussi B

riant Canada, W Lacs au des Grands la région cadre de dans le 2003 et,

hite

2009

(édition originale parue à Cambridge en 1991).

10. p

aYen

2012. Du même auteur, voir aussi p aYen 2002. 11. g ruzinski 1988. Voir aussi, dans une perspective similaire, g ruzinski 1999, 2008 et 2012. 12. Pour approfondir cette question et la notion de paysage, je renvoie à mon livre : 2014. onnet B

lesiègedetYrparalexandreetlamÉmoiredesvainqueurs 317

à l’historien qu’à faire le deuil d’une histoire qui, comme l’a fait Nathan Wachtel

pour les Indiens du Pérou

9

, aurait l’ambition de bousculer la logique et la vision

des vainqueurs, et à s’armer pour questionner les procédés narratifs et idéologiques

qui sont à l’œuvre dans les sources grecques et romaines. En d’autres termes, ce

sont les représentations de la conquête de la Phénicie qu’il s’agit d’explorer et de

comprendre.

Une tâche de cette nature suppose de se doter d’une boîte à outils pour

décoder les récits de conquête, qui déploient tantôt le registre de la diplomatie et

des négociations, tantôt celui de la violence, entre prouesses et cruautés. Comme

l’a récemment souligné Pascal Payen, dans son livre sur Les revers de la guerre

10

,

l’écriture de la guerre fait référence à une activité ressentie à la fois comme naturelle

et pathologique, à savoir l’exercice de la violence des hommes sur les hommes.

Elle investit le champ de l’action politique, qui se veut rationnelle, et celui des

sentiments, qui basculent aisément dans le tragique. C’est pourquoi les vaincus,

même si l’historiographie ne leur prête pas voix, sont présents dans les récits et

posent même cruellement la question de la légitimation de la violence, en première

instance celle des envahisseurs, mais aussi celle des résistants. Dans le cas de la

conquête de la Phénicie par Alexandre, même si les sources classiques tendent à

la présenter comme une libération du joug perse, le long et apocalyptique siège

de Tyr, sur lequel nous allons revenir, est là pour rappeler qu’Alexandre incarne

bien l’impérialisme des Grecs, qu’il s’agit effectivement d’annexer et de coloniser

un territoire et un peuple étrangers. L’irruption de nouveaux maîtres venus de

l’extérieur, parlant une autre langue, vénérant d’autres dieux, ayant d’autres usages,

entraîne nécessairement des mutations d’une certaine profondeur et ce que Serge

Gruzinski, en travaillant sur le Mexique espagnol, entre

xvie

et

xviiie

siècle, appelle

une « colonisation de l’imaginaire »

11

. Ses travaux très stimulants, qui constituent

un terme de comparaison nécessairement imparfait, mais néanmoins instructif,

invitent à ne pas figer le regard sur la nouvelle hégémonie qui se met en place,

mais à scruter aussi les nouveaux agencements culturels qui très vite émergent.

La recomposition du tissu politique, social et culturel après la conquête donne

ainsi naissance à de nouveaux paysages, originaux et imprédictibles

12

. On glissera

donc aussi, dans notre boîte à outils, le concept de middle ground, si brillamment

illustré par Richard White dans son étude des rapports entre « Indiens, empires et

9. Wachtel 1971. Pour un renversement de perspective analogue, voir aussi Briant

2003 et, dans le cadre de la région des Grands Lacs au Canada, White 2009 (édition

originale parue à Cambridge en 1991).

10. paYen 2012. Du même auteur, voir aussi paYen 2002.

11. gruzinski 1988. Voir aussi, dans une perspective similaire, gruzinski 1999, 2008 et

2012.

12. Pour approfondir cette question et la notion de paysage, je renvoie à mon livre :

Bonnet 2014. le siège de tYr par alexandre et la mÉmoire des vainqueurs 317 à l’historien qu’à faire le deuil d’une histoire qui, comme l’a fait Nathan W

achtel la vision logique et bousculer la l’ambition de , aurait 9 Pérou Indiens du pour les

des vainqueurs, et à s’armer

pour questionner les procédés

narratifs et

idéologiques En d’autres et romaines. sources grecques dans les à l’œuvre qui sont

termes, ce s’agit d’explorer Phénicie qu’il de la la conquête de représentations sont les

et de comprendre. Une tâc he de cette nature suppose de se doter d’une boîte à outils

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des négociations , tantôt celui de la violence, entre prouesses et cruautés.

Comme guerre de la revers sur Les son livre Payen, dans souligné Pascal l’a récemment

10

, naturelle fois comme à la activité ressentie à une fait référence la guerre l’écriture de

et pathologique, à savoir l’exerc ice de la violence des hommes sur les

hommes. rationnelle, et se veut politique, qui de l’action le champ Elle investit

celui des pourquoi les tragique. C’est dans le basculent aisément sentiments, qui

vaincus, dans les sont présents pas voix, leur prête l’historiographie ne même si

récits et première violence, en de la la légitimation question de cruellement la posent même

instance celle des envahisseurs, mais aussi celle des résistants. Dans le cas

de la tendent à classiques les sources même si par Alexandre, la Phénicie conquête de

la présenter comme une libération du joug perse, le long et apocalyptique

siège incarne rappeler qu’Alexandre là pour , est allons revenir lequel nous , sur de Tyr

bien l’im périalisme des Grecs, qu’il s’agit ef fectivement d’annexer et de

coloniser maîtres venus de nouveaux L’irruption peuple étrangers. et un un territoire

de usages, ayant d’autres d’autres dieux, langue, vénérant une autre l’extérieur, parlant

entraîne nécessairement des mutations

d’une certaine profondeur et

ce que

Serge appelle siècle, e xviii et e xvi espagnol, entre le Mexique travaillant sur Gruzinski, en

une « colonisatio n de l’imaginaire » 11 . Ses travaux très stimulants, qui

constituent mais néanmoins nécessairement imparfait, de comparaison un terme

instructif, se met hégémonie qui la nouvelle regard sur figer le ne pas invitent à

en place, vite émer qui très agencements culturels les nouveaux scruter aussi mais à

gent. conquête donne après la et culturel ique, social tissu polit position du La recom

ainsi naissance à de nouveaux paysages, originaux et imprédictibles 12 . On

glissera brillamment , si ground de middle le concept boîte à outils, dans notre donc aussi,

illustré par Richard White dans son étude des rapports entre « Indiens, empires et 9. W achtel 1971. Pour un renversement de perspective analogue , voir aussi B

riant Canada, W Lacs au des Grands la région cadre de dans le 2003 et,

hite

2009

(édition originale parue à Cambridge en 1991).

10. p

aYen

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