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Revue Économie, Gestion et Société N 1 juillet Par:

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Texte intégral

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Construction et ancrage linguistiques de la notion de compétence dans le discours managérial

Par:

El Mostafa ABOUHASSANI, Professeur en linguistique théorique et formelle à l’Ecole Supérieure de Technologie de Meknès, Université Moulay Ismail, Département : Techniques de Management.

Résumé

La compétence professionnelle n’acquiert sa signification qu’en repérage par rapport à la compétence sociale personnelle et relationnelle (le collectif). D’où la conclusion qui fait que la compétence professionnelle ne peut être que la résultante d’un apprentissage social de l’individu, au préalable. Et, par conséquent la compétence en tant que maîtrise reste inégale d’un individu selon les capacités cognitives de tout un chacun ainsi que selon les capacités biologiques et physiques.

Mots- clés

Compétence professionnelle, Compétence sociale, apprentissage, individu, capacités cognitives.

Abstract

Professional competence acquires its meaning only in relation to identifying the personal and relational social competence (the collective). Hence the conclusion that professional competence can only be the result of a social learning of the individual first. And therefore the competence as mastery of an individual remains uneven according cognitive abilities of everyone as well as biological and physical abilities.

Keywords

Professional competence, social competence, learning, individual cognitive abilities.

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Il est certain que les discours convergent sur les visées de la notion de compétence en management, aussi divergentes soit-elles ; mais il n’en demeure pas moins que lesdites visées se trouvent liées par la force du discours lui-même et par celle de la construction du sens autour du processus de compétence en tant qu’activité. Ceci dit, la compétence reste toujours liée à l’activité et/ou l’exercice d’un savoir dans un domaine donné. Ainsi, cette notion semble être une évidence qui tire son essence du discours managérial et qui, d’ailleurs, l’institue avant même d’être appréhendée dans le contexte où elle se déploie ; mais ne faudrait-il pas quelques fois demander à ce qui semble évident de se justifier ? Donc, il serait nécessaire de voir « la compétence » dans sa raison d’être première, à savoir sa construction et son ancrage en tant que domaine notionnel au niveau du langage et à travers les discours qui l’organisent.

Les discours sur la compétence se développent conjointement dans plusieurs contextes, du discours scientifique, politique, pédagogique jusqu’au discours socioprofessionnel.

A propos du discours scientifique, et rien qu’à partir des années 80 jusqu’ aujourd’hui, il y a eu un foisonnement de littératures et de discours sur la compétence qui se sont surtout, développés davantage dans les années 1990.

Si Philippe Zarifian(1) nous dit avoir dès 1985 « avancé le concept de modèle de la compétence

», Pierre Bourdieu, quant à lui, a mis la notion de compétence au centre de sa théorie du champ ou il a focalisé sur la notion de « compétence spécifique » qu’il a relié à la composante économique.

Pour Bourdieu, la compétence est « loin d’être une simple capacité technique acquise dans certaines conditions, (…) comme toute compétence (linguistique, politique, etc.) ; elle est liée à un pouvoir tacitement reconnu à ceux qui ont un pouvoir (...), une sorte d’attribut statutaire »(2).

S’ajoute à cela que Bourdieu a attiré l’attention sur la compétence linguistique comme permettant elle aussi de comprendre la part socialement reconnue dans la capacité : elle « n’est pas une simple capacité technique mais une capacité statutaire qui s’accompagne le plus souvent de la capacité technique, ne serait-ce que parce qu’elle en commande l’acquisition par l’effet de l’assignation statutaire ("noblesse oblige"), à l’inverse de ce que croit la conscience commune, qui voit dans la capacité technique le fondement de la capacité statutaire ».(3)

(1) ZARIFIAN, P, Le modèle de compétence, p, 25, Ed. Liaisons, Paris, 2004.

(2) BOURDIEU, P, Le sens pratique, p. 107, Éditions de Minuit, Paris, 1980.

(3) BOURDIEU, P, Leçon sur la leçon, p, 64, Éditions de Minuit, Paris, 1982.

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L’enjeu de l’étude de la notion de « gestion des compétences » est de faire le rapprochement entre les discours qui la prennent en charge et les indices empirique de la réalité du mode de gestion par la compétence. Il faut pour ce faire, se baser sur un matériau empirique sur lequel il est nécessaire de s’appuyer entre autres, le contexte d’où émerge la notion de gestion des compétences comme réalité à savoir, les organisations et causalement le personnel comme l’un des objets de la gestion et de l’évaluation des compétences.

Le discours sociologique et le discours gestionnaire se veulent initiateurs de la notion de compétence ; le discours politique, de son côté, à travers l’institution de l’enseignement, tend à légitimer les notions de compétence et de capacités (voir Hirtt, N, 2009 (1)). A un certain moment se trouvent même « associées officiellement, et pour la première fois, deux idées : celle de viser le développement des «compétences» et celle d’utiliser plus efficacement l’enseignement obligatoire au service de la « vie économique (…) même si en 1996 on les place encore sur le même pied que les «savoirs») » (voir Hirtt, N, ibid) (2).

Et, c’est ainsi qu’il y a eu un pullulement conjugué d’un déploiement de jeux linguistiques : « approche par compétences », « évaluation par compétences », «compétences de base »,

«compétences transversales », «socles de compétences », « compétences terminales »... Le concept de «compétences» est devenu omniprésent dans la littérature pédagogique.

La notion de compétence, ainsi, issue de la pédagogie et de la psychopédagogie va se trouver dès lors, confrontée à d’autres logiques au sein des organisations. Ce, et même si le vocable compétence est devenu une réalité ne serait-ce qu’au niveau de l’expression et du jargon gestionnaire et entrepreneurial, le passage de cette notion du domaine pédagogique à celui du management ne va pas sans se faire sentir force de blocages de par l’apparition d’autres notions qui vont lui être associées.

Aussi la notion de compétence va-t-elle se heurter à la logique de poste, de profil de poste, et d’aptitude(s) et/ou qualification(s)…et enfin à la logique de statut. On ne rémunère pas par le savoir faire ni par la compétence mais par le statut (voir Gilbert, P, 2011) (3).

1) HIRTT, N, « L’approche par compétences : une mystification pédagogique », in L’école démocratique, n°39, septembre 2009.

(2)HIRTT, N, Ibid.

(3) GILBERT P., "La gestion des compétences : du discours à la construction de nouvelles pratiques sociales"

in C. Piganiol-Jacquet (dir.), Analyses et controverses en gestion des ressources humaines, L'Harmattan, 1994, pages 213-230.

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De ce fait, la notion de compétence va connaître un glissement de sens dans le discours gestionnaire. Il ne s’agit plus d’assimilation, adaptation, équilibration et évaluation comme en pédagogie et en psychopédagogie, mais il est question d’effectuation, de tache, de formation et de rémunération. La gestion des compétences ou ce qui est appelé la démarche compétence est une réalité commune au sein des organisations. Il est donc entendu que les compétences constituent « un savoir-faire opérationnel validé » (Meignant, A, 1995) (1) et que la démarche compétence s’inscrit dans la perspective d’une organisation qualifiante.

La diversité des formes concrètes prises par la démarche de gestion des compétences peut sans doute se comprendre par les tensions que son introduction fait naître inévitablement et par la manière dont l’équipe dirigeante y fait face, de manière plus ou moins appropriée (Grimand, 2004) (2), c’et pourquoi les gestionnaires ont essayé de mettre en place une structuration procédurale : le carnet de développement, le tableau rémunération compétences, le référentiel des compétences, les grilles d'évaluation individuelles, l'entretien de fonctionnement et de développement, etc.

Une fois le matériel de base élaboré (identification et répartition des compétences, référentiel, outils de gestion, niveau salarial par compétence, etc.), le problème de compétitivité, de concurrence, d’avantages et de mobilité surgissent en générant des facteurs d’hygiène - souvent- pour relancer le débat sur la démarche compétence (le problème de l’individuel et du collectif).

D’où une relance de la discussion au sujet de ou des démarches compétences porteuses de présupposés trajectoriels implicites, en fonction de la combinaison contenu contexte-processus qui définit chacune d’elles. En tous cas, cette évanescence, ce malaise est apparent au niveau du discours à propos de « la compétence ». Certes, c’est par et dans le langage que le discours managérial essaye de construire le sens de la notion de compétence, malgré bon gré son caractère contingent.

Pourquoi contingent ? Car la notion de compétence impossible à être ramenée à un domaine notionnel langagier où les gradients qui la constituent soient tournées vers un centre organisateur et /ou attracteur(3) qui ferait que l’on ne pourrait dire « *ça c’est la compétence »

1) MEIGNANT, A, Les compétences de la fonction ressources humaines. Diagnostic et action, 1994, Paris, Liaisons.

2) GRIMAND, A., “l’évaluation des compétences : paradoxes et faux-semblants d’une instrumentation », dans Simard, G. et Levesque, G. (éds), La GRH mesurée, Actes du XVè congrès de l’AGRH, Montréal, tome 3, 2004.

3) CENTRE ATTRACTEUR est définit par A. Culioli 2003, « comme une valeur idéale, une représentation qui renvoie en dehors de toutes valeurs empiriques que l’on pourrait se représenter ».

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ou « *ça y est, il y a compétence », par contre on peut dire : « ça, c’est de la compétence » ce qui renvoie en termes de partitif à la quantité et non pas à la qualité !? C’est d’ailleurs, ce qui fait que le vocable « compétence » ne se réalise comme occurrence(1) qu’avec un repère qui est généralement un « nom » : gestion des compétences, gestion par les compétences, développement des compétences, démarche compétence, évaluation des compétences etc. Cela revient au fait que « L'occurrence divise la notion en des égards de notion, ce qui fait qu’on a une forme de division de la notion en zones correspondant à plusieurs façons d'être « compétence », à du plus ou moins « compétence ». L'attracteur fonde une double singularité : la singularité de la notion, en tant qu'indicible ; la singularité des individus qui ne sont héritiers de la notion qu'à tel ou tel égard et qui la divisent. D’ailleurs, c’est la magie par laquelle la notion, en général, et la notion de « compétence », ici, en particulier se trouve appréhendée à travers des réalisations particulières qui en sont des occurrences. Et, c’est à la base de cela que se jouent tous les discours sur « la compétence ».Ceci est dû aussi au fait qu’ « une occurrence n'a pas de rapport stabilisé à la notion dont elle constitue une réalisation particulière. Sa détermination passe par la mise en place de deux pôles organisateurs. »(2) (voir Paillard, D. et De Vogué, S. (1986).

Aussi est-il que chaque occurrence de la notion « compétence » donne lieu à un sens dont la singularité la distingue de toutes les autres ; la relation au type de compétence selon le type d’occurrence : la démarche compétence ; le développement des compétences ; la gestion par les compétences ; etc.

(1) De VOCUÉ S. et PAILLARD D., 1986. « Modes de présence de l'autre »

Paillard, D. et De Vogué, S. (1986) ; « Representation, referential processes, and regulation.

Language activity as form production and recognition », in Culioli, A. (1990), p. 177-213; De Vogué, S. (1992a).

(2) « DOMAINE NOTIONNEL : Construit à partir d’une NOTION, le domaine notionnel permet de structurer la CLASSE D'OCCURRENCES qui est associée à cette dernière. Le domaine notionnel s’organise ainsi autour d’une OCCURRENCE de référence, d’une occurrence type, nommée CENTRE ORGANISATEUR. ». in « Glossaire français-anglais de terminologie linguistique du SIL » : Théorie des opérations énonciatives : définitions, terminologie, explications. », Bearth, Thomas, and Charles Fennig, eds. 2004. Glossaire français-anglais de terminologie linguistique [www.sil.org/linguistics/glossary_fe].

Dallas, Texas: SIL International.

(*) : énoncé agrammatical.

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Une occurrence est donc un sens singulier correspondant à un égard particulier d'une notion, en même temps qu'il en est une réalisation conforme. Il s'agit de deux modes de stabilisation indissociables qui s'établissent avec des pondérations variables ; ce qui est le cas pour la ou plutôt les occurrences de « compétence ». Le domaine notionnel /compétence / correspond à la diversité des occurrences de la notion en fonction de l'articulation singularité / exemplarité.

La notion de compétence se trouve éclatée de par ses réalisations dans les discours qui lui sont associés. Le « sens » de celle-ci dépend dès lors, de deux modes de repérage distincts: un repérage lié à sa construction dans son rapport au repère qui détermine son existence en termes de localisation « il y a compétence »; ensuite, un repérage de type spécification, où le repéré est spécifié par sa relation. Exemple : « le développement des compétences » où le complément de nom « des compétences » est repéré par rapport au repère « le développement ».

Et, c’est ainsi dire, cette malléabilité de la notion de /compétence/ et son éclatement en tant que signification dans différents discours et disciplines qui la réduit à un objet facile de discours évanescents, entre autres le discours gestionnaire. D’où son ancrage dans des perspectives idéologiques. Effectivement, n’est-il pas vrai qu’actuellement, le concept d’idéologie a cédé place au concept de discours? Bref, ceci explique cela.

C’est d’ailleurs, « Foucault qui a le mieux réfléchi ce délaissement du concept d'idéologie. Il lui a préféré dès le départ celui de discours, car l'idéologie comportait, selon lui, le triple désavantage de renvoyer nécessairement à une problématique de la vérité, du sujet et de l'infrastructure (Foucault : l'Arc) ». De ce fait, « Il est évident que l'idéologie, comme horizon herméneutique, est beaucoup plus appropriée dans l'analyse des espaces discursifs plus larges, en tant qu'ils contribuent aux divers procès d'institutionnalisation. ». Ici, il faut souligner que c’est le cas pour le discours sur « la ou les compétence(s) » (1).

Les discours gestionnaires sur la gestion des compétences requière sa force voire même sa stabilisation grâce à son institutionnalisation d’un côté, et l’obéissance des « salariés » dictée par les perspectives inscrites dans un système objectivé de classification.

(1)Gilles Bourque et Jules Duchastel : Texte, discours et idéologie(s), p. 606 et 617, In: Revue belge de philologie et d'histoire. Tome 73 fasc. 3, 1995. Langues et littératures modernes – Moderne taalen letterkunde.

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La gestion du personnel comme socle à la gestion des compétences se traduit par une gestion de flux normée par la procédure des classifications professionnelles, elles-mêmes dictées par la politique de rémunération liée à la logique de poste. Cette logique se détermine et s’explique par la contractualisation de la notion de compétence qui par ricochet doit se plier aux normes de ladite logique.

Cette logique est celle qui génère ce qui est communément appelé « logique de poste » et qui par ailleurs converge et se dédouble d’une logique de « qualification », où les compétences professionnelles se résument en une qualification à produire et à concrétiser en adéquation avec le « poste ». Tout ceci est objectivé par le principe de certification.

A ce niveau, il faut repenser toutes les logiques liées à la notion de gestion par les compétences en se penchant sur le sens et la référence de la locution de gestion par les compétences(GPC) que l’on peut traduire comme suit :

 Sens et/ou contenu = (objectifs, appréciation de l’environnement et les disponibilités des ressources),

 Référence et/ou processus = (structure, systèmes, culture et valeurs), afin d’augmenter la performance de l’organisation. (voir Mejri, M.)(1)

C’est sur cette base à savoir le sens, la référence et le ou les processus que le champ d’investigation de la GPC s’est constitué voire même institutionnalisé via le discours politico- socioprofessionnel.

Mais, n’est-il pas vrai que :

- un processus ne peut être que contingent du fait qu’il se caractérise par un début, des actions spécifiques, et une fin, alors que la notion de pratique est liée à la continuité des actions qui se déroulent au quotidien dans une organisation (les compétences) ;

(1) Mejri, M « L’approche discursive, une nouvelle perspective pour la recherche en stratégie », FSJEG de Jendouba, Université de Jendouba, UR : Traitement Informatique du Lexique, 00/UR/0201,Centre de NIMEC, Université de Caen.

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- les processus ont tendance à s’appliquer aux organisations alors que la pratique est liée aux individus et donc s’adapte aux objectifs dans leur dynamicité d’où le fait de parler de compétence comme état, n’est plus de mise car il s’agit d’un continuum logico-causal : toute compétence ne se définit que par une performance à atteindre et toute performance atteinte devient une compétence.

L’approche de la pratique vise à étudier ce que les praticiens font concrètement dans le sens de cette relation compétence/performance.

Ici, la formation (f. continue) trouve sa validation et fait surgir la raison d’être de la GPC à savoir la pédagogie sauf lorsqu’il s’git d’un détournement d’une politique qui survient et qui s’institue à brûle-pourpoint accompagnant des réforme à double vitesse (référentiels pédagogiques, normes pédagogiques, grille d’évaluation pour les enseignants et les appels à projets …).

Pour une véritable gestion de compétence dans les organisations, il faut que le gestionnaire soit impliqué dans le processus et dans la pratique en termes de situation d’apprentissage bilatérale avec les unités d’action dans un processus d’assimilation des situations, d’adaptation et enfin d’équilibration.

Cette facette cachée de l’appréhension de la notion de compétence est noyée par l’inscription sociale des discours stratégiques eux-mêmes.

Les contenus des discours stratégiques doivent être analysés en référence aux lieux de détermination sociale dans lesquels ils trouvent leur ancrage. Le repérage des lieux de détermination du discours n'est pas une catégorisation conduisant à une analyse de contenu par comptage et généralisation d'un ensemble d'expressions par un mot générique : la compétence. A l'inverse, c'est une démarche descendante par la recherche des marques de présence des lieux de détermination dans les discours. Le codage de lieux de détermination se fait en relation avec l'analyse des discours circulants et des dynamiques sociales. Trois dimensions peuvent être étudiées : Politico-historique, pédagogico-idéologique et pratico-processive :

- Processif ; économie, facteur de progrès social.

- Processus ; ensemble de phénomènes consécutifs.

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En termes de dimension politico-historique, l'ancrage de la notion de compétence est lié à la définition de cadres de pensée dont les conditions de production sociales et politico-historiques donnent lieu à des étiquettes comme ladite notion de compétence moulée dans des discours d’institualisation et de propagande pour un ancrage effectif dans la culture entrepreneuriale à des fins économiques. C’est, d’ailleurs, aussi le cas pour ce qui est pour cette même notion dans le champ de l’enseignement comme médium instituant et ancrant des valeurs à finalités diverses…

Au niveau pédagogique de par certains enseignants via des structures bien précises, entre autres, le syndicat, cela donne lieu à une résistance. Il est cependant possible de d'organiser le sens de la notion de compétence de manière significative autour de l'existence d'une idéologie dominante et d'une contre-idéologie. (1)

Ceci s’explique par le fait que l'idéologie peut aussi s'énoncer sur le mode de l'évidence lorsqu’il y a un état neutre de la représentation et du discours, autrement dit, lorsqu’il n’ya pas une construction de contre représentation. Là, l’organisation d’une signification unifiée est prise en charge par l’idéologie en place (développement humain..etc.) en dehors de toute tentative de justification et de rationalisation. Bref, ceci valide cela, d’où l'emprise du système "managinaire"

en général.

Pratiquement, la compétence s’établie dans un rapport à l’autre. Elle implique la notion de relation et celle-ci implique la notion de professionnalisme qui se dédouble d’une compétence sociale. Dès lors cette notion de compétence à double charge à savoir « le socioprofessionnalisme », renvoie à la capacité générale d’intervention dans divers contextes d’interactions qui valide les capacités conjuguées lesquelles à leur tour valideraient la compétence et sa légitimation sociale. Certes, la compétence professionnelle n’acquiert sa signification qu’en repérage par rapport à la compétence sociale personnelle et relationnelle (le collectif). D’où la conclusion qui fait que la compétence professionnelle ne peut être que la résultante d’un apprentissage social de l’individu, au préalable. Et, par conséquent la compétence en tant que maîtrise reste fort inégale d’un individu à l’autre force de conséquences affectives de la relation à l’autre ; des capacités cognitives de tout un chacun ainsi que des capacités biologiques et physiques (Ici, je renvoie au socioconstructivisme).

(1) GRIZE J.B. & alt. (1987), Salariés face aux nouvelles technologies, vers une socio-logique des représentations, Éditions du CNRS, Paris.

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La compétence dès lors, ne peut trouver son vrai sens et signification que via les questions suivantes :

- La compétence peut-elle être prévisible et/ou prévisionnelle ? - La compétence peut-elle être intentionnelle ?

Ces questions renvoient à un problème plus ardu à savoir le rapport de l’individu à l’action (1).

Donc, la réponse à ces questions est: « pas tout-à-fait ». L’individu est un être de désirs qui agit aussi en fonction de motivations inconscientes. Et, c’est ici qu’apparaît le facteur psychologique…

Entre autres motivations, il ya ce jeu de pouvoir explicité dans le jargon gestionnaire par la notion de maîtrise. Maîtrise de quoi ?!

C’est ce qui fait que l’utilisation de la notion de compétence professionnelle dans les multiples interactions qu’effectuent les individus permet l’ouverture de différents jeux de langage à partir desquels se tisse le contrôle de l’autre (les attitudes transactionnelles ne serait-ce !!).

Parmi et dans les pratiques discursives, l’interaction avec une insistantance sur le caractère contextuel du langage fait que cette notion de par son ancrage et usages renvoie automatiquement au caractère socialement construit de la compétence elle-même.

Enfin, le langage et les conversations (exemple des vocables : action ; missions ; tâches…) impliquent une dimension de normalisation agissant comme contrainte ou comme moteur de la compétence, qui s’enracine dans le mode d’organisation via le vocable « la compétence » laquelle par compromis institutionnalise par sélection et différenciation voire individualisation, les rapports sociaux dans l’organisation. Et, n’est-il pas vrai que la seule valeur qui démocratise les rapports sociaux dans les organisations et qui s’adresse au collectif, c’est la fonction injonctive : « Il n’y a qu’à.. ! » ou encore « Soyez positifs ! ».

(1) Giddings, A, La constitution de la société, Paris, PUF, 1987.

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Références bibliographiques

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