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Les grainothèques dans les bibliothèques publiques en France

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Academic year: 2022

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Master 1

Sciences de l’Information et des Bibliothèques

LES GRAINOTHEQUES DANS LES BIBLIOTHEQUES PUBLIQUES EN FRANCE

Enjeux et conséquences

T

INARD

E

LISE

Sous la direction de Mme Valérie Neveu

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A

VERTISSEMENT

L’université n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans les travaux des étudiant·es : ces opinions doivent être considérées comme propres à leurs auteurs.

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E

NGAGEMENT DE NON PLAGIAT

Engagement à signer et à joindre à tous les rapports, dossiers, mémoires ou thèse

Je, soussignée Elise Tinard

déclare être pleinement conscient·e que le plagiat de documents ou d’une partie d’un document publiée sur toutes formes de support, y compris l’internet, constitue une violation des droits d’auteur ainsi qu’une fraude caractérisée. En conséquence, je m’engage à citer toutes les sources que j’ai utilisées pour écrire ce rapport ou mémoire.

signé par l'étudiante le 08 / 06 / 2020

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R

EMERCIEMENTS

Je remercie Médéric pour m’avoir lue et pour avoir corrigé mes fautes et toute ma famille pour m’avoir encouragée. Je remercie aussi tous les bibliothécaires, bénévoles ou salariés d’associations qui ont pris le temps de répondre à mes questions, que ce soit par téléphone, par messages ou en face à face, malgré le confinement. Je remercie également Mme Neveu, ma directrice de mémoire, d’avoir toujours pris le temps de répondre à mes messages et à mes questions.

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L

ISTE DES ABREVIATIONS

ABF : Association des Bibliothécaires de France

ADEME : Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie AMAP : Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne COV : Certificat d’Obtention Végétale

EGA : Etats Généraux sur l’Alimentation

Egalim : Etats Généraux Agriculture et alimentation GES : gaz à effet de serre

GEVES : Groupe d’Etude et de contrôle des Variétés et des Semences GIEC : Groupe d’Experts intergouvernemental sur l’évolution du climat GNIS : Groupement National Interprofessionnel des Semences et des plants HQE : Haute Qualité Environnementale

INRA : Institut National de la Recherche Agronomique JTSE : Jardin dans Tous Ses Etats

ODD : Objectifs Développement Durable ONU : Organisation des Nations Unies

PNUE : Programme des Nations Unies pour l’Environnement PTEC : Plan Territoriaux Energie-Climat

RSE : responsabilité sociale des entreprises

UVED : Université Virtuelle Ecologie & Développement

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S

OMMAIRE

Avertissement ... 3

Engagement de non plagiat... 5

Remerciements ... 7

Liste des abréviations ... 9

Sommaire ... 11

Introduction ... 15

Une préoccupation grandissante pour l’écologie au niveau mondial : les répercussions sur le service public en France ... 19

Les initiatives des institutions pour la sauvegarde de la biodiversité : des « Sommets de la Terre » aux médiathèques ... 19

Les paradoxes de la biodiversité ... 19

Le développement durable à travers les institutions ... 24

L’implication des médiathèques ... 29

Les graines et les semences, de l’agriculture à l’enjeu citoyen ... 33

Un nouveau rapport au domaine végétal ... 34

Le contrôle du végétal par les institutions : les enjeux d’un support vivant. ... 39

Un renouveau de confiance envers la nature : vertu des semences paysannes et prise de position discrète des bibliothécaires. ... 44

L’implication des bibliothécaires. Le vivant comme nouveau « support » en bibliothèque. ... 49

Les semences : un bien au même titre que le savoir commun ... 49

Un nouveau modèle de la bibliothèque « lieu de vie » ... 54

Renforcement des missions du domaine public : un encouragement à participer à la vie politique ... 58

Bibliographie ... 63

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Les bibliothèques ... 63

Bibliothèques, développement durable, écologie et grainothèques. ... 63

Les grainothèques : associations, billets de blog ... 64

Biens communs et bibliothèques ... 65

Biodiversité : définitions, controverses ... 65

Les actions gouvernementales et intergouvernementales pour la sauvegarde de la biodiversité et le contrôle des semences ... 66

Définitions du service public ... 67

Désobéissance civile ... 68

Statistiques et populations ... 68

Documents consultés pour l’étude de cas ... 68

étude de cas : des grainothèques et des spécificités... 69

Méthodologie : ... 70

Contexte et données ... 71

Villes, quartiers ... 71

Les grainothèques ... 74

La grainothèque dans le métier de bibliothécaire ... 80

Une innovation qui fait partie du remaniement des bibliothèques et du métier de bibliothécaire ... 80

Convictions, militantisme ou engagement des bibliothécaires ? ... 82

Après la grainothèque : conséquences, souhaits, adaptations. Le rôle des usagers. 84 Des nécessités qui demandent à être respectées et qui ne le sont pas encore ... 84

Des conséquences sur l’environnement et la société invérifiables à l’échelle du métier, des répercussions visibles sur le comportement des individus ? ... 87

Conclusion ... 91

Annexes ... 93

Hybridation des plantes par le GNIS ... 93

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Graphiques de la revue Futurible, L’opinion des français sur le climat ... 94

Gnis et GEVES : quelles différences ? ... 96

Villes et nombre d’habitants : ... 97

Tableau permettant de comparer le nombre d’habitants dans chaque ville ... 97

Tableau graphique du nombre d’habitants par ordre croissant ... 99

Présentation de la grainothèque de la bibliothèque Floresca Guépin ... 100

Grainothèque de la bibliothèque Ormédo ... 108

Grainothèque de la bibliothèque de Mortagne-au-Perche ... 111

grainothèque de la bibliothèque d’Hérouville-Saint-Clair ... 114

guides d’entretien ... 114

Avec les bibliothécaires ... 114

Avec les associations ... 116

Table des illustrations ... 118

Table des tableaux et des graphiques ... 121

Table des matières ... 124

Abstract ... 128

Résumé ... 128

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(15)

I

NTRODUCTION

Notre mode de vie et de consommation en France est très différent de ce que les français connaissaient avant les révolutions industrielles. Emile Zola explore dans les Rougon- Macquart les changements que subit la société avec la naissance, par exemple, de la concurrence et de l’incitation à consommer, notamment avec Au bonheur des dames. Dans Le Ventre de Paris, Claude Lantier est un artiste pauvre dont l’une des occupations est de se promener dans les Halles, à l’époque l’immense marché de Paris, pour admirer la profusion des aliments, avec l’idée de les peindre dans des « natures mortes colossales ». Claude ne s’intéresse pas, lors de sa contemplation, au goût probablement authentique des produits de la terre, mais à leur esthétique : « Et il était évident que Claude, en ce moment-là, ne songeait même pas que ces belles choses se mangeaient. Il les aimait pour leur couleur. » Aujourd’hui, le marché des fruits et légumes est tout aussi esthétique, d’une certaine façon, mais il n’est pas fait pour attirer les artistes : ceux qui sont visés sont les « consommateurs » qui voudraient de beaux produits standardisés. Loin de ressembler à l’idée que l’on se fait du

« consommateur », l’artiste peintre Claude Lantier semble avoir les mêmes exigences : la beauté des aliments, qui est aujourd’hui l’une des priorités des industriels les plus puissants en France.

La mutation du monde agricole a changé le goût et le mode de production des aliments, et, face aux changements climatiques et à l’appauvrissement de la biodiversité, des citoyens tentent d’agir, dans l’idée qu’il faut opérer une véritable transition qui concerne en grande partie le monde de l’agriculture. Dans certaines bibliothèques, on peut remarquer un meuble ou une boîte qui n’aurait a priori pas sa place puisqu’elle ne propose pas de document culturel, mais des graines : il s’agit d’une grainothèque, structure permettant aux usagers d’échanger des graines paysannes. Depuis 2013, elles se développent dans les médiathèques et ont été initiées par Graines de Troc, une association permettant les échanges de graines sur une plateforme numérique. Les grainothèques, meubles ou boites de graines, ne contiennent, dans l’idéal, aucune semence de type « F1 », c’est-à-dire, aucune semence non reproductible, dont les fruits et les légumes sont vendus dans les supermarchés. Les semences paysannes sont interdites à la vente et ce sont elles que l’on retrouve dans les grainothèques : elles sont nées dans des jardins ou des potagers et n’ont subi aucune hybridation. Fondées sur le troc,

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les grainothèques rendent possible l’engagement citoyen et proposent de nouveaux articles, en plus des livres, des DVD, de plateformes numériques ou de CD. L’échange de graines devient un enjeu important les bibliothèques se sont emparées. Chaque bibliothécaire considère de façon très différente la grainothèque, et chaque grainothèque est particulière. C’est pourquoi les études de cas permettent d’en dresser un tableau général, de comprendre les motivations communes, mais aussi les différents degrés d’engagement des bibliothécaires, le succès et les conséquences du succès des grainothèques.

La première grainothèque, la Bay Area Seed Interchange Library, est née dans les années 2000 aux Etats-Unis, suivie de près par Hudson Valley Seed Co., une branche d’une bibliothèque publique de jardiniers à New York1. Les créateurs de ces deux bibliothèques de graine se sont inspirés du livre de Gary Paul Nabhan, ethnobotaniste : Enduring Seeds: Native American Agriculture and Wild Plant Conservation, concernant la perte de la biodiversité aux Etats-Unis2. Aujourd’hui, les grainothèques sont disséminées un peu partout dans le monde.

Les sociétés ne les ont pas attendues pour que ses membres s’échangent les graines. C’est une pratique très ancienne, qui a participé à créer une biodiversité particulière à force de sélections. En revanche, l’hybridation et le monopole des industries sont très récents dans l’histoire de l’humanité : ils ne datent que des années 50. Ses conséquences sur l’environnement et la façon dont les consommateurs se nourrissent sont déterminantes : elles sont la principale raison pour laquelle ce que nous achetons n’a pas de goût.

Les grainothèques sont issues d’un mouvement civil en réaction à une règlementation qui peut paraître injuste : le mémoire sera donc partisan des idées qui les animent.

En quoi les grainothèques redéfinissent-elles le métier de bibliothécaire par l’engagement personnel qu’elles imposent, tout en renforçant les missions des bibliothèques, et en quoi complètent-elles les fonds culturels ?

L’importance du changement climatique est tel que l’ONU organise des réunions internationales afin d’y remédier : c’est là que naît la notion de « développement durable. » Le développement est remis en cause, car, parce qu’il est effréné, il détruit les ressources naturelles dans lesquelles il se sert, et appauvrit les populations les plus vulnérables. Le

1 « The Seed Library Movement from Roots to Bloom – Hudson Valley Seed Company », consulté le 10 mars 2020, https://hudsonvalleyseed.com/blogs/blog/the-seed-library-movement-from-roots-to-bloom.

2 « Enduring Seeds », consulté le 11 juin 2020, https://www.goodreads.com/work/best_book/985118-enduring-seeds-native-american- agriculture-and-wild-plant-conservation.

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développement durable a une influence sur les bibliothèques, car ses actions sont comprises de l’échelle mondiale à l’échelle locale. Les grainothèques répondent, en fait, aux mêmes interrogations que celles qui ont conduit les pays de l’ONU à trouver des solutions face aux dangers de la mondialisation. Mais les principes qui les ont fait exister permettent d’écarter les impasses du développement durable. Le partage des graines paysannes permet aux usagers de participer à l’amélioration de la démocratie. Les français ont des habitudes alimentaires déterminées par le marché mondial, mais il semble qu’ils aient été sensibilisés par des notions de développement durable et de sauvegarde de la biodiversité, dont les ressources ont été privatisées, arrachant aux agriculteurs et aux jardiniers le droit de multiplier leurs semences eux-mêmes. L’usage de graines paysannes est signe d’un renouveau de confiance envers la nature, alors que les entreprises semencières avaient calibré les semences dans l’idée qu’il était impossible que les plantes s’adaptent d’elles-mêmes. L’existence des grainothèques est le signe d’un engagement des bibliothécaires, au nom du savoir commun, et dans l’élan du tiers lieu, entre partage du savoir, entraide, et renouveau de la culture. Surtout, elle redéfinit les missions du service public et permet de mobiliser les citoyens pour qu’ils puissent retrouver une liberté qu’on leur avait ôtée.

(18)
(19)

U

NE PREOCCUPATION GRANDISSANTE POUR L

ECOLOGIE AU NIVEAU MONDIAL

:

LES REPERCUSSIONS SUR LE SERVICE PUBLIC

EN

F

RANCE

Les inquiétudes concernant la détérioration de la biodiversité et le réchauffement climatique ont touché les plus hautes sphères politiques : les membres de l’Organisation des Nations Unies ont mis en place des règles à respecter dans tous les pays, et inventé ce qu’on appelle en français le « Développement Durable » et l’agenda 21, harmonisant l’économie, le social et le respect de l’environnement. L’opinion publique n’ignore ni le réchauffement climatique ni les réformes proposées par l’ONU. L’effet de serre, par exemple, est un phénomène que l’on étudie au collège en France3, et les médias et réseaux sociaux relaient les informations relatives aux changements climatiques. Mais elles intensifient aussi certains faits, voire les déforment : la forêt d’Amazonie n’a pas autant brûlé que ce que l’on a cru en 20194. L’opinion publique, qui est visible sur les réseaux sociaux, prévient parfois avec trop de zèle ces changements et la détérioration de l’environnement. Quelles ont été les mesures prises par le gouvernement français après le premier « Sommet de la Terre », et quelle en a été la répercussion sur les médiathèques ? Les médiathèques ont-elle une répercussion sur l’environnement et sont-elles assez légitimes pour aborder un sujet demandant autant d’engagements ?

Les paradoxes de la biodiversité

Les fonds des grainothèques sont constitués uniquement, et dans l’idéal, de semences paysannes et locales. Les graines hybrides, c’est-à-dire les graines vendues par les firmes internationales comme Limagrain et promues par le GNIS, dont les semences sont stériles pour des raisons commerciales, ne sont pas autorisées. Les graines paysannes sont un élément de la biodiversité que les grainothèques tentent de protéger de son appauvrissement dû aux

3 « Programme SVT », consulté le 18 mars 2020, http://media.education.gouv.fr/file/special_6/52/9/Programme_SVT_33529.pdf.

4 Le Point magazine, « Incendies en Amazonie : des photos spectaculaires mais inexactes », Le Point, 23 août 2019, https://www.lepoint.fr/people/incendies-en-amazonie-des-photos-spectaculaires-mais-inexactes-23-08-2019-2331204_2116.php.

L

ES INITIATIVES DES INSTITUTIONS POUR LA SAUVEGARDE DE LA BIODIVERSITE

:

DES

« S

OMMETS DE LA

T

ERRE

»

AUX MEDIATHEQUES

(20)

techniques d’agriculture. Mais peut-on protéger la biodiversité ? Quel sens donner à ce mot si souvent utilisé, et pourquoi peut-il être appliqué en particulier aux bibliothèques ? Les définitions du mot « Biodiversité » conviennent à la philosophie des grainothèques : ses usages et ses significations ont déterminé la construction de certaines bibliothèques et ont influencé les bibliothécaires lorsqu’ils ont pris l’initiative d’en placer.

Selon Patrick Blandin, professeur au Muséum national d’Histoire Naturelle, le mot

« biodiversité » a été inventé en 1986 à Washington D.C., dans un manifeste, Biodiversity, écrit par Edward O. Wilson et Francis M. Peter. Il est une contraction entre « Biological » et

« diversity »5. Les scientifiques qui s’y sont consacré ont peiné à en donner une définition.

Selon Christian Lévêque, les mots définissant la nature et la biodiversité sont le résultat d’une représentation culturelle.

Philippe Lebreton, biologiste et ornithologue, définit ce terme comme la « quantité et qualité de l’information contenue dans tout le biosystème, de l’ADN à la biosphère, en passant par l’espèce, la population mono-spécifique, les peuplements pluri-spécifiques, les écosystèmes et les éco-complexes ou paysages6 ». L’information, une « mise en forme, structuration », est un fonctionnement et un système aux échanges incessants, agissant sur toutes les échelles terrestres, du macrocosme au microcosme. Cependant, la biodiversité est trop complexe pour être étudiée sous un seul angle et les scientifiques doivent croiser leurs travaux (mycologie, ornithologie, géologie…). La biodiversité selon Philippe Lebreton est contenue dans les échanges et la multiplicité des liens entre les êtres vivants et entre les êtres vivants et leur environnement. Il met en avant la complexité de la biodiversité, qui à la fois empêche les scientifiques de la cerner, mais qui la définit.

La définition la plus célèbre, néanmoins, est celle du congrès International de Rio en 2012, qui a été extrêmement médiatisée7. Pour faciliter la compréhension du public, les Nations Unies y déterminent un « tissu de vie8 », acception assez vaste pour y définir la vie et sa diversité, que chacun peut comprendre sans analyser. La détermination politique du mot

5 Patrick Blandin, « Au leurre de la biodiversité ? », Vraiment durable n° 5/ 6, no 1 (2014): 19 à 41.

6 Idem

7 Idem

8 « La biodiversité, qu’est-ce que c’est ? | Biodiversité - Tous vivants », consulté le 11 juin 2020, https://biodiversitetousvivants.fr/la- biodiversite-quest-ce-que-cest.

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appartient à Julian Huxley, directeur général de l’Unesco en 1948 et fondateur de la WWF9. Elle inclut non seulement des recherches scientifiques pour tenter de comprendre les échanges entre chaque élément de la diversité, mais aussi des actions ou des règles en conséquences, face aux dangers occasionnés par les activités humaines. Les grainothèques s’inscrivent dans cette démarche, leur présence correspond à la définition de Julian Huxley car elles proposent une manière d’agir pour respecter la biodiversité, et non pas de participer à des recherches scientifiques, même si les fonds qui y sont associés peuvent s’y rapporter.

D’autres acteurs, très présents lors des Sommets de la Terre, ajoutent un aspect supplémentaire : les ONG, comme Greenpeace ou la WWF, pour citer les plus connues, évoquent une « extinction de masse » dont les activités humaines sont responsables.

Greenpeace, par exemple, n’hésite pas à afficher un discours sans nuance dans la page de son site1011 pour inciter le plus de personnes possible à l’action. Le versant politique du mot est intensifié, tandis qu’il ne reste pas de trace d’une définition scientifique. D’une analyse de la biodiversité à une injonction à l’action par un discours culpabilisateur, la portée du mot est étendue.

En outre, contrairement à ce que veulent faire comprendre certaines ONG, la nature est très rarement laissée à elle-même. Elle a été modifiée par les populations locales, notamment partout en Europe et en France,

À commencer par la Camargue, érigée en parc naturel régional, ainsi que le marais poitevin, les Dombes, la Sologne, etc. Nos forêts sont, pour l’essentiel, des plantations de chêne (forêt de Tronçais), de pin (forêt des Landes) ou de sapins. Sans parler du milieu rural et de ses bocages… Pratiquement tous nos

9 Blandin, « Au leurre de la biodiversité ? ». Patrick Blandin cite Julian Huxley : « All these other manifestations of life which, though all products of the same process of evolution, yet are something in their own rights, are alien from us, give us new ideas of possibilities of life, can never be replaced if lost, nor substituted by products of human endeavor.” (30 septembre 1948, conference d’ouverture de l’IUPN)

10 « Biodiversité », Greenpeace France (blog), consulté le 20 mars 2020, https://www.greenpeace.fr/biodiversite/.

11 « Selon les scientifiques, nous serions en train de vivre la sixième extinction animale de masse de l’histoire de la planète. Mais contrairement aux autres, celle-ci est exclusivement liées aux activités humaines : déforestation, surpêche et pollution des océans, réchauffement climatique… Par exemple, les espèces animales disparaissent environ cent fois plus rapidement que par le passé. Or, la biodiversité étant indispensable à la survie de l’espèce humaine, nous pourrions bien faire partie de cette nouvelle extinction de masse si rien n’est fait pour mettre un terme à cette catastrophe » (Greenpeace France)

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milieux dits naturels sont en réalité des milieux anthropisés et certains le sont même fortement12

De plus, la biodiversité n’est pas bienveillante et ne s’accorde pas avec la représentation du jardin d’Eden13. Les modifications humaines sont dues aux aléas de la nature : ravages des cultures, maladies, épidémies, tempêtes, etc. La culture actuelle applique à la nature une considération morale malgré cela. De fait, la biodiversité est indifférente au sort des hommes et peut même leur nuire, comme lors des épidémies.

Par conséquent, pour vivre bien, les hommes doivent modifier et adapter la nature à leur alimentation et leurs pratiques, ce que reflètent les grainothèques : les graines que s’échangent les usagers produisent des plantes nourricières ou ornementales, que nous pourrions qualifier de bénéfiques pour notre bien-être. Les plantes locales, même rares, ne feront pas partie de la grainothèque si elles sont inutiles (si elles ne sont pas mangeables ni belles), ou si elles ne sont pas agréables (si elles piquent, comme les orties et les chardons).

La nature n’est pas stable ni équilibrée, contrairement à ce que pourraient affirmer certains scientifiques. Elle est résiliente : elle peut être endommagée mais elle a toujours connu des bouleversements qui l’ont changée, et, par la suite, elle a su retrouver une dynamique aussi fertile que précédemment. Les hommes ne sont pas les uniques bouleversements qu’a connus la nature. Vouloir la modifier n’est pas un vice, mais une nécessité, car elle peut être dangereuse pour la survie des hommes. « Protéger », « conserver » la biodiversité, n’a pas de sens, car cela viendrait à affirmer que les collectivités ou les acteurs de l’aménagement pourraient « piloter » la biodiversité. De surcroit, vouloir diriger la biodiversité est une considération culturelle, car il n’y a pas de trajectoire : il est donc impossible d’anticiper les évolutions d’un milieu naturel, et donc de savoir quelles sont les « meilleures » actions à mettre en place pour la « conserver »14.

D’une nouvelle matière scientifique en débat à une considération politique, les conséquences seront différentes. Les actions des gouvernements par rapport à la biodiversité sont le résultat d’une définition utilitariste : la définition du portail interministériel, dépendant du ministère de la Transition écologique et solidaire de France y mêle un élément propre au

12 Christian Lévêque, « Le mythe récurrent du jardin d’Eden », Essais, 2013, 51‑62.

13 Idem

14 Idem

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développement : la biodiversité est « une bibliothèque de connaissances et d’innovations technologiques, comme le biomimétisme. La biodiversité offre des biens irremplaçables et indispensables à notre quotidien : l’oxygène, la nourriture, les médicaments et de nombreuses matières premières (bois, fibres telles que laine, coton, chanvre…). » A cela s’ajoute, dans le 15e objectif du développement durable, une approche productiviste des forêts, tout à fait en accord avec la définition du ministère français de la transition écologique : « En protégeant les forêts, nous pourrons également renforcer la gestion des ressources naturelles et accroître la productivité des terres15 ». La Nature rend « service », elle est donc un moyen et pas une fin en soi16. Le programme que proposent les ODD est calqué sur la notion de croissance et de développement, et envisage surtout l’invention de nouvelles technologies : les « technologies vertes ». De fait, l’ONU ne propose pas d’alternative. Elle propose une application de ce qui existe déjà aux nouvelles thématiques écologiques.

La biodiversité est indispensable à l’humanité : selon Harold Levrel, Meriem Bouamrane et Lamine Kane dans la revue Développement humain et conservation de la biodiversité,

Un arbre peut ainsi avoir comme caractéristiques d’offrir du bois de chauffage, des fruits, de l’ombre, un lieu de rencontre, de participer à la purification de l’eau et de l’air, de stabiliser le sol…, qui fournissent de nombreux fonctionnements potentiels : pouvoir construire une maison, se chauffer, se nourrir, se protéger du soleil, avoir des relations humaines, avoir accès à de l’eau potable, respirer un air sain, limiter la vulnérabilité aux catastrophes naturelles telles que les glissements de terrain lors des inondations…17

15 Sophie Farigoul, « Objectif 15 : Préserver et restaurer les écosystèmes terrestres, en veillant à les exploiter de façon durable, gérer durablement les forêts, lutter contre la désertification, enrayer et inverser le processus de dégradation des terres et mettre fin à l’appauvrissement de la biodiversité », Développement durable (blog), consulté le 18 mai 2020, https://www.un.org/sustainabledevelopment/fr/biodiversity/.

16 Comme l’a officialisé l’Alliance des Gardien de mère Nature en septembre 2015 : « Cette déclaration est un appel énonçant des principes fondamentaux et universels avec pour objectif de parvenir à la reconnaissance des droits de la Terre Mère et de tous ses êtres vivants pour poser les fondations d’une culture du respect nécessaire au bien vivre (Buen Vivir), et unir tous les habitants de la Terre autour d'un intérêt commun et universel : la Terre Mère est vivante, elle est notre maison commune et nous devons la respecter, prendre soin d'elle pour le bien-être des générations futures. » Donner des droits à la nature et la sacraliser est totalement étranger à la logique des gouvernements membres de l’ONU, mais les autochtones proposent une révolution de leur opinion, ce qui n’a pas été accepté, car l’Alliance n’a pas été incluse au Sommet de la Terre de 2015.

17 Harold Levrel, Meriem Bouamrane, et Lamine Kane, « Développement humain et conservation de la biodiversité », Annales des Mines - Responsabilite et environnement N° 49, no 1 (2008): 92 à 101.

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La biodiversité est indispensable car elle est une réserve pour les hommes et un lieu qui participe à l’élaboration d’une société. Elle est un environnement dans lequel nous vivons et fait partie de la culture. Mais, comme le dit Christian Lévêque, « de quelle nature voulons- nous » ? Peut-être d’un « jardin planétaire »18.

Vouloir conserver la biodiversité est une question éthique et culturelle, qui a son fondement dans la morale, et qui se justifie : les activités humaines modifient l’environnement si vite que la biodiversité ne peut pas remplacer ce qui lui a été enlevé (la forêt d’Amazonie, par exemple, a perdu 20% de sa superficie). Respecter la biodiversité est donc un enjeu actuel, en proie à de nombreuses controverses, qui touche directement les bibliothèques par sa dimension politique. En tant qu’institution, elles doivent non seulement informer les usagers de ce qu’elle est, à l’aide de documents pertinent pour combattre les idées reçues, mais aussi montrer l’exemple.

Le développement durable à travers les institutions

Les grainothèques s’inscrivent dans un large mouvement écologiste, plus ou moins militant, encouragé par l’Organisation des Nations Unies lors des conférences internationales pour l’environnement. La notion de développement durable, inventée en 1972 lors de la Conférence de Stockholm organisée par l’Organisation des Nations Unies, est la note dominante des conférences et des politiques publiques et privées. Les pays du « Nord économique », ceux du « Sud économique » (ou pays émergents), et les ONG sont présentes lors de ce premier congrès international de lutte contre la pollution. Les pays développés montrent une préoccupation pour l’environnement, tandis que les pays émergents sont plus intéressés par un développement et une croissance semblable à celle dont ont bénéficié les pays du « Nord ». L’ « écodéveloppement » est un terme qui accordera le « Nord » et le

« Sud »19. Le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) est élaboré en 1982 à Nairobi, au Kenya, et l’ONU créé la Commission Mondiale pour l’Environnement, qui établira un rapport terminé en 1987 : c’est le célèbre rapport Bruntland, appelé en français

« Notre avenir à tous », prononcé par la ministre norvégienne de l’environnement et présidente de la commission mondiale sur l’environnement et le développement, Mme Gro Harlem Bruntland.

18 Christian Lévêque, « Écologie de la restauration. Quelles natures voulons-nous ? », Essais, 2013, 89‑102.

19 Le développement durable au sommet ? Les grandes conférences internationales de Stockholm à Rio+20, consulté le 4 avril 2020, https://www.youtube.com/watch?v=pAMGkcrzJ_Y.

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Il sert de base à tous les autres congrès internationaux pour l’environnement. Le résumé officiel est une définition du développement durable : « Le développement durable est un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs20 ». Il implique une solidarité entre le « Nord » et le

« Sud » et prévient le bien-être des générations futures, qui dépendront de la qualité de l’environnement et de la quantité de ressources disponibles. Le développement durable théorise une relation harmonieuse et dépendante entre le développement et l’environnement, entre les hommes et la nature.

En 1992, le Congrès International de Rio met en place l’agenda 21, qui est un ensemble de propositions non contraignantes. Le développement durable devient la solution face à la crise mondiale.

En 2002, la Conférence de Johannesburg n’est pas focalisée sur l’environnement mais sur les attentats de 2001 aux Etats-Unis. Les entreprises sont au cœur des conférences et sont les seules intéressées par le développement durable, ce qui les rend actrices principales des objectifs. Cela touche directement et encore actuellement les secteurs publics, car, s’ils veulent appliquer l’Agenda 21, ils devront opérer comme les entreprises, sur les mêmes modèles21. En 2012, Rio +20 est le congrès le plus court : il ne dure que 3 jours, tandis que les autres congrès se déroulaient le temps de deux ou trois semaines. Le rapport Bruntland est remis en avant, et il n’y a ni de nouveauté, ni de bilan, à part le nouveau concept de

« l’économie verte » se focalisant sur la croissance, et, qui par définition, permet d’éviter de repenser la consommation, problème critiqué dès l’origine par le rapport du club de Rome22, car il ne propose pas d’alternative et s’avère dangereux aux niveaux social et environnemental. En 2015 sont signés les accords de Paris sur le climat lors de la COP 21.

L’objectif des 195 pays présents est de ne pas dépasser les 2°C de plus d’ici 2100.

La croissance est actuellement au cœur du débat du développement durable. Deux modèles s’opposent : le domaine de durabilité faible, considérant comme d’égale qualité les ressources créés par les hommes et les ressources naturelles, et le modèle de durabilité forte, qui s’engage pour la protection de l’environnement, et qui refuse l’idée que les ressources

20 UVED, L’incontournable rapport Brundtland, consulté le 4 avril 2020,

https://www.youtube.com/watch?v=anZ01EbGArY&list=PLeU78T5dtVW5A13XzfXdOSZPB4XfEn7af&index=4.

21 Le développement durable au sommet ?

22 « Club de Rome », in Wikipédia, 10 juillet 2020, https://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Club_de_Rome&oldid=172787085.

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artificielles puissent remplacer les ressources naturelles. Les économistes partisans de la durabilité faible ne considèrent pas que la destruction de l’environnement soit grave parce que la production humaine pourra remplacer la production naturelle.

Le modèle de la durabilité faible s’accorde pour la commensurabilité forte : il est possible de déterminer la valeur de chaque chose en monnaie, tandis que les économistes de la durabilité forte s’accordent sur une commensurabilité faible : la valeur des éléments de la nature ne peut pas se compter en monnaie23. Ce raisonnement a des limites car il est fondé sur le modèle de la macro-économie24 approche théorique de l’économie dont la conséquence est la conception du monde selon des équations spéculatives incluant les grands acteurs économiques (monnaie, consommation, marché, etc.), ne prenant pas en compte les facteurs sociaux ou locaux. Le capital amassé doit satisfaire toute la société, alors que les populations ne souhaitent pas toutes le même capital : la mosaïque des cultures et des biodiversités se situe à l’échelle de la localité. Envisager le monde selon un schéma global et général, c’est aussi nier les comportements et les habitudes locales. La focalisation du débat sur la macro- économie efface les autres piliers du développement durable et ne respecte pas les particularités de la biodiversité locale25.

A l’échelle mondiale, il existe aujourd’hui l’Agenda 2030, adopté par 193 pays, qui s’engagent à suivre les objectifs de l’Agenda en fonction de leurs situations et apporter chaque année un bilan des progrès devant le forum politique de haut niveau des nations unies.

Il s’agit de suivre les 17 objectifs et les 169 cibles décidées.

Ces 17 objectifs sont, dans l’ordre : « pas de pauvreté », « faim zéro », « bonne santé et bien-être », « éducation de qualité », « égalité entre les sexes », « eau propre et assainissement », « énergie propre et d’un coût abordable », « travail décent et croissance économique », « industrie, innovation et infrastructures », « inégalités réduites », « villes et communautés durables », « consommation et production responsable », « mesures relatives à la lutte contre les changements climatiques », « vie aquatique », « vie terrestre », « paix,

23 UVED, « Le développement durable vu par les économistes : durabilité faible ou durabilité forte ? », consulté le 18 mai 2020, https://www.youtube.com/watch?v=rQStb7NXRtQ&list=PLeU78T5dtVW5A13XzfXdOSZPB4XfEn7af&index=10.

24 « Macroéconomie », in Wikipédia, 26 avril 2020,

https://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Macro%C3%A9conomie&oldid=170061277.

25 UVED, « Le développement durable vu par les économistes : durabilité faible ou durabilité forte ? »

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justice et institutions efficaces », « partenariats pour la réalisation des objectifs »26. On constate que cette énumération d’objectifs correspond à une certaine vision du monde : la poursuite de la croissance, l’innovation et les industries, consommation, et partenariats sont des notions propres à l’économie et à la politique qui gouverne les Etats les plus puissants.

Le numéro de la 20è année d’Ecologie & Politique dénonce l’inutilité des « Sommets de la Terre » : Rio+20 est un « échec », et les décisions prises n’ont pas pour vocation de changer le mode de production et de distribution des richesses. L’Europe ne souhaite pas enrayer sa politique de libre-échange et les pays émergents entrent dans ce processus et considèrent le développement durable comme une entrave à leur propre développement27. Cet article accuse les « Sommets de la Terre », en particulier celui de 2012, d’avoir été inutiles et hypocrites, en faisant croire à une véritable inquiétude et à un engagement qui aurait permis de retrouver un environnement sain (tant au niveau de la nature que celui de la société). Mais il s’agit surtout de continuer sur la trajectoire déjà inscrite du libre-échange28. La conception de la richesse est économique, unilatérale, et, de fait, aucune révolution des modes de production et de consommation n’est advenue. Au niveau mondial, il s’avère que les Sommets de la Terre sont décevants.

A l’échelle de la France, certaines lois ont été votées en faveur de l’environnement : dans le premier chapitre de L’agenda 21 dans les bibliothèques29, Jean-Pierre Vosgin et Joachim Schöpfel résument les décisions prises durant les colloques mondiaux :

« En France, la démarche Agenda 21 pour le développement durable s’appuie sur des textes législatifs touchant avant tout l’environnement : la loi Voynet (loi d’orientation pour l’aménagement et le développement durable du territoire du 25 juin 1999), la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbain (2000), la loi relative à la démocratie de proximité (2002), mais surtout depuis le 1er mars 2005 le rajout, dans le Préambule de la Constitution de la Ve République, de la Charte de l’environnement. »

26 « Les objectifs de développement durable (ODD) », Ministère de la Transition écologique et solidaire, consulté le 7 avril 2020, https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/ODD.

27 Denis Chartier et Jean Foyer, « Rio+20 : la victoire du scénario de l’effondrement ? », Ecologie politique N° 45, no 2 (4 octobre 2012):

117 à 130.

28 Idem

29 Jean-Pierre Vosgin et Joachim Schöpfel, 1. Développement durable et bibliothèques. La performance globale, Vers la bibliothèque globale (Éditions du Cercle de la Librairie, 2014), https://www.cairn.info/vers-la-bibliotheque-globale--9782765414216-page-15.htm.

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La Charte de l’Environnement a été placée dans la constitution et les lois Grenelles 1 (en 2009) et 2 (en 2010) ont placé un cadre juridique concernant les bâtiments publics et du secteur tertiaire. Ce sont, selon l’Etat, « des acteurs pionniers sur les territoires » qui pourront se consacrer à la transition énergétique au moyen d’ « Investissements d’Avenir » dont les

« quatre domaines clef » sont : « énergies décarbonées et chimie verte, véhicules et mobilité du futur, réseaux intelligents, économie circulaire. »30

Cela signifie que la transition est prise en main par l’Etat et l’ADEME, par les grands acteurs des territoires au niveau national. Mais comment prendre des initiatives si l’Etat se porte garant des changements les plus importants, plus focalisés sur les technologies

« vertes » que sur un nouveau mode de vie ? Selon Sylvère Angot, sociologue intervenant et docteur en sociologie, l’Agenda 21 local et les PTEC « sont les deux outils majeurs des politiques locales de développement durable de ces quinze dernières années ». Contrairement à l’Agenda 21, le PTEC est obligatoire. Les deux organismes sont mis en place par les collectivités (les communes, départements et régions) et doivent être partagés par tous les acteurs de la société : les citoyens, les associations, et les acteurs du territoire. L’Agenda 21 n’est pas obligatoire, ce qui a pour conséquence que son adoption par une collectivité est une preuve de motivation, tandis que le PTEC est très institutionnalisé et ne demande pas de volontarisme. Parce qu’il est obligatoire, il prime, dans la politique des collectivités, sur l’Agenda 21 et il n’est pourtant qu'un aspect de la transition écologique.31.

D’autre part, dans son essai L’écologie est-elle encore scientifique, Christian Lévêque explique que les différents acteurs de la société ne s’entendent pas sur les mêmes notions, notamment celle de biodiversité. Les différents acteurs de la société ou d’une collectivité ont des conceptions différentes de l’écologie et de la nature, ce qui aura pour conséquence qu’ils n’auront pas les mêmes objectifs et ne privilégieront pas les mêmes moyens pour la sauvegarde de la biodiversité.

Les initiatives que proposent ou imposent les décisions des PNUE ne sont donc pas satisfaisantes : trop normées, pas assez stratégiques, elles sont même, pour certains, une preuve de l’inutilité des sommets de la terre. C’est pourquoi les citoyens sont peu investis

30 « Les lois Grenelle et Transition énergétique pour la croissance verte », ADEME, consulté le 3 avril 2020, https://www.ademe.fr/expertises/batiment/elements-contexte/politiques-vigueur/lois-grenelle-transition-energetique-croissance-verte.

31 Sylvère Angot, « Plans climat-énergie territoriaux et Agendas 21. Des outils institutionnels au service de la transition ? », Mouvements n° 75, no 3 (16 septembre 2013): 125‑ 34.

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dans les Objectifs du Développement Durable, et certains préféreraient, s’ils veulent agir, se consacrer à une association dont les idées ne sont pas en adéquation avec la théorie du développement durable. Les grainothèques sont, tout en s’inscrivant dans la démarche globale du développement durable, un moyen d’agir directement pour l’environnement.

L’implication des médiathèques

Les interventions des collectivités et des médiathèques dans le cadre des décisions internationales

Le développement durable est un système mis en place de l’échelle mondiale à l’échelle locale. Les bibliothèques, en tant qu’institutions locales, sont concernées par le développement durable et les initiatives des collectivités. Certaines sont appelées bibliothèques de troisième lieu, concept hérité de la théorie de Ray Oldenburg par Mathilde Servet dans son mémoire intitulé Bibliothèque de troisième lieu, en 2009. Le troisième lieu (ou tiers lieu) n’est ni une maison, ni un lieu de travail, mais un espace de débat et de discussion. L’architecture est un élément important du tiers lieu. Les bibliothèques vertes, en suivant les normes de HQE ou une rénovation sur le plan énergétique deviennent des lieux confortables, parce qu’ils éludent les bruits de l’extérieur, dispersent la lumière du jour (matériaux réflexifs), utilisent peu de chauffage et permettent de respirer un air renouvelé. Les médiathèques vertes associent le social (le confort) à l’environnemental (normes HQE), ce qui est un pas de plus vers le développement durable de la part des acteurs des collectivités.

Même s’il n’y a pas de loi imposant aux bibliothèques de respecter le développement durable, la loi de la règlementation thermique de 2012 les concerne parce que ce sont des bâtiments spécifiques avec beaucoup de passages et parfois un patrimoine fragile à conserver dans des pièces climatisées : les bibliothèques peuvent être très consommatrices d’énergie. La réglementation thermique n’est pas obligatoire mais elle encouragée. Selon Véronique Heurtematte32, dans le quotidien Livre Hebdo, l’absence de vraie règlementation des bibliothèques, que ce soit par les lois ou les associations professionnelles, empêche les collectivités, qui sont à l’origine de ces projets, de faire construire des bâtiments avec des normes pertinentes. En outre, construire selon les normes HQE coûte très cher et les collectivités manquent de moyens : Jean Schepman évoque dans la préface de L’Agenda 21

32 Véronique Heurtematte, « Bibliothèques : le défi HQE », Livres Hebdo, 27 novembre 2015, https://www.livreshebdo.fr/article/bibliotheques-le-defi-hqe.

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dans les bibliothèques « un cadre budgétaire contraint ». L’application des normes HQE demande à être justifiée par des animations autour du développement durable, comme c’est le cas à la médiathèque Marguerite Yourcenar à Paris ou celle du Grand M à Toulouse. Les animations et les fonds appropriés sont indispensables dans ces médiathèques. Les normes HQE exigent de respecter des points précis : une « relation harmonieuse des bâtiments avec leur environnement immédiat, [des] choix intégré des procédés et des produits de construction [un] chantier à faible nuisance, [une] gestion de l’énergie, [de] de l’eau, [des] déchets d’activités, [de] de l’entretien et de la maintenance, [du] confort hygrothermique, […]

acoustique, […] visuel [et] olfactif, [la] qualité de l’air [et] de l’eau.33 » Il faut faire de nombreux contrôles pour vérifier que les bibliothèques respectent toujours les normes, car le bâtiment peut se détériorer, ce qui impose d’avoir une équipe municipale intéressée, mais aussi des techniciens formés à la gestion d’un bâtiment écologique34.

D’après Jean-Pierre Vosgin et Joachim Schöpfel dans le chapitre 1 de La Bibliothèque globale, les bibliothèques ont un intérêt à intégrer le développement durable à leur cadre de fonctionnement. En effet, la culture est le « quatrième pilier » du développement durable. Les auteurs soulignent que les bibliothèques doivent intégrer les normes du privé : la

« performance globale », par exemple, est l’adaptation du concept de développement durable aux entreprises car la Responsabilité Sociale des Entreprises. Elle « est devenue un concept- clé de la gestion stratégique et du marketing des organisations ». La « performance globale » est donc l’application concrète du développement durable des entreprises dans le contexte des bibliothèques. Le marketing, dont l’objectif est de gagner de nouveaux clients par la communication et les mesures de la satisfaction des clients actuels, devrait être appliqué aux bibliothèques dans le sens où elles doivent répondre aux attentes des usagers, qui sont de plus en plus préoccupés par la biodiversité, le réchauffement climatique, les inégalités sociales et la crise. Il s’agit donc de l’aspect social du développement durable. D’autre part, le marketing permet aux bibliothèques « crée[r] de la valeur dans leur secteur spécifique, que ce soit la culture, l’éducation ou la recherche35 », ce qui leur permettrait de valoriser leur rôle au sein de la société. L’aspect « sociétal », qui définit la relation de la bibliothèque à la société, est une préoccupation des bibliothécaires depuis que les usagers ont acquis une nouvelle importance.

33 « Certification HQE (Haute Qualité Environnementale) », consulté le 17 mars 2020, https://www.isover.fr/mon-projet/logements- collectifs/reglementation-en-vigueur/certification-hqe.

34 Heurtematte, « Bibliothèques ».

35 Vosgin et Schöpfel, 1. Développement durable et bibliothèques. La performance globale.

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La conservation de l’environnement est, comme le suggère l’article, un aspect difficile à satisfaire, mais elle est « de plus en plus présente dans les bibliothèques tout en étant très contrastée selon l’ancienneté du bâtiment, le milieu rural ou urbain de la bibliothèque, le type de communautés de communes, l’implication ou non du département dans la problématique du développement durable36. »

Le développement durable semble avoir une influence positive sur les bibliothèques : Joachim Schöpfel et Alain Caraco listent les initiatives et les réussites de nombreuses bibliothèques pour le respecter : des « petits gestes », comportement civil dont la pertinence ne pourra prendre son essor que si tous les citoyens les pratiquent, à la construction d’une bibliothèque selon les normes HQE. Les bibliothèques sont des bâtiments qui doivent montrer l’exemple, en tant que lieux de démocratie :

« La bibliothèque est un établissement culturel, qui peut aider la population à entrer dans la société du développement durable, comme elle a contribué à son entrée dans la société de l’information. Elle doit d’abord le faire par l’exemplarité de ses choix et de ses comportements. Elle doit ensuite le faire dans le cadre des ressources documentaires qu’elle propose à son public, qu’il s’agisse de collections imprimées, de vidéos ou de ressources en ligne. Elle doit enfin le faire dans le cadre de sa mission de médiation, en aidant son public à repérer et à interpréter l’information dont il a besoin. »

Si les bibliothèques peuvent obtenir un bâtiment respectueux de l’environnement, elles doivent correspondre, dans leur fonctionnement, dans leur gestion et dans leurs fonds, à cette décision37.

La littérature professionnelle concernant directement les grainothèque n’est pas très développée, sûrement parce que le phénomène est récent : l’article Proposer des

« grainothèques » en bibliothèque pour favoriser le partage des semences libres de Calimaq38 (Lionel Morel), juriste et bibliothécaire, semble être le premier à les évoquer. Le thème

36 Vosgin et Schöpfel.

37 Joachim Schöpfel et Alain Caraco, 4. La performance écologique des bibliothèques, Vers la bibliothèque globale (Éditions du Cercle de la Librairie, 2014), https://www-cairn-info.buadistant.univ-angers.fr/vers-la-bibliotheque-globale--9782765414216-page-65.htm.

38 calimaq, « Proposer des « grainothèques » en bibliothèque pour favoriser le partage des semences libres », - S.I.Lex - (blog), 18 décembre 2013, https://scinfolex.com/2013/12/18/proposer-des-grainotheques-en-bibliotheque-pour-favoriser-le-partage-des-semences- libres/.

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principal concerne les biens communs, rapprochant les thématiques du numérique avec celle des graines et des semences. Il interroge Sébastien Wittevert, aujourd’hui directeur de Graines de Troc. Il publie sur son blog un autre article en mai 2013, Open Source Seeds Licence : une licence pour libérer les semences39 et en octobre 2013, Le domaine public des semences : un trésor menacé40. En avril 2015, l’ENSSIB publie un article sur le site web, nommé Qui sème la grainothèque récolte la bibliothèque et qui propose un compte-rendu des grainothèques établies à Lille, Toulouse et Paris. En 2016, un nouvel article apparaît, basé sur une grainothèque particulière : Une grainothèque à la médiathèque de la Canopée la fontaine. Il s’agit d’une description des événements qui auront lieu par la suite dans cette bibliothèque. Il ne semble pas y avoir d’autres articles, mis à part quelques lignes consacrées à cette installation par Anne-Marie Bock, directrice de la bibliothèque départementale du Bas-Rhin dans le numéro 85/86 de la revue Bibliothèque(s)41. L’article est intitulé 1, 2, 3, Lectures locales ! Marion Le Guennec en a aussi consacré une partie (partie II.B.1) dans son mémoire de diplôme de conservatrice de bibliothèques datant de mars 201842, intitulé Bibliothèques et écologie : les bibliothèques de lecture publique françaises et les enjeux environnementaux.

Son directeur de mémoire est Joachim Schöpfel, qui a donc participé à la rédaction de La bibliothèque globale, livre consacré au développement durable dans les bibliothèques.

Les grainothèques dans le développement durable

Pour ces raisons, mis à part la rareté des interventions à ce sujet dans la littérature professionnelle officielle (car les articles de Calimaq à ce sujet sont nombreux mais il n’agit pas dans le cadre professionnel), les grainothèques ont une place privilégiée dans ces bibliothèques. Pourtant, elles ne sont pas institutionnalisées comme le développement durable. Leur présence est cohérente avec, mais elle est plus ambitieuse : comme l’agenda 21 ou 2030, les grainothèques demandent d’être volontaires. Mais elles ne sont pas une injonction d’une collectivité et ne soutiennent pas le pilier économique puisque les graines ne

39 calimaq, « Open Source Seeds Licence : une licence pour libérer les semences », - S.I.Lex - (blog), 3 mai 2013, https://scinfolex.com/2013/05/03/open-source-seeds-licence-une-licence-pour-liberer-les-semences/.

40 calimaq, « Le domaine public des semences : un trésor menacé », - S.I.Lex - (blog), 5 octobre 2013, https://scinfolex.com/2013/10/05/le-domaine-public-des-semences-un-tresor-menace/.

41 « n° 85/86 : Innover | Enssib », consulté le 18 août 2020, https://www.enssib.fr/bibliotheque-numerique/index-des- revues?id_numero=67665&type_numero=PDF.

42 « Bibliothèques et écologie : les bibliothèques de lecture publique françaises et les enjeux environnementaux », consulté le 5 février 2020, https://www.enssib.fr/bibliotheque-numerique/documents/68275-bibliotheques-et-ecologie-les-bibliotheques-de-lecture-publique- francaises-et-les-enjeux-environnementaux.pdf.

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s’achètent pas. En revanche, elles sont durables parce que la condition de leur existence réside dans la fidélité et l’engagement des bibliothécaires et surtout des usagers et les semences sont, dans l’idéal, renouvelables. Elles privilégient le domaine social parce qu’elles sont des lieux de rencontre et d’échange : planter des graines demande un savoir-faire parfois oublié. Les usagers ont autant de connaissance que les bibliothécaires à ce sujet, voire plus. Enfin, elles répondent à une demande croissante des usagers et des citoyens : les grainothèques permettent de faire des actions concrètes pour prendre soin de l’environnement.

Le développement durable est créé dans le but d’une modification du mode de production, mais pas dans une révolution. La production ne correspond pas aux valeurs des grainothèques, en raison de l’échange libre de semences reproductibles, de la culture vivrière et non pas dans le but de s’enrichir… C’est pourquoi il est important de souligner que les grainothèques s’inscrivent dans les rouages du développement durable, qui est une réponse des plus grands acteurs face aux inégalités, aux changements climatiques et aux crises financières. Mais elles dépassent la conception productiviste des promoteurs du développement durable, en proposant un mode alternatif de production et une économie sobre, basée sur le troc.

Les grainothèques répondent à « l’urgence climatique », en donnant aux usagers les moyens d’agir concrètement pour l’environnement. En plus d’être bénéfiques pour la biodiversité, elles permettent des interactions sociales entre les usagers. Elles pourraient être intégrées à la thématique du développement durable, mais elles en dépassent la notion, qui néglige une véritable prise de conscience. Les grainothèques paraissent moins remarquables que chacun des 17 objectifs de l’ONU, mais les possibilités qu’elles offrent aux citoyens sont plus efficaces, puisqu’elles permettent de reprendre en main une production actuellement intensive et trop éloignée d’eux pour qu’ils puissent y prendre part et l’apprécier.

Les grainothèques sont un élément de la démocratie, bien que les graines soient d’apparence anodine. Le potentiel qu’elles offrent est plus déterminant pour la citoyenneté que l’on pourrait le croire. En fournissant un accès facile aux graines paysannes, les bibliothèques s’impliquent dans un mouvement social plus étendu, qui privilégie l’accès pour tous aux ressources, tout en respectant la biodiversité.

L

ES GRAINES ET LES SEMENCES

,

DE L

AGRICULTURE A L

ENJEU CITOYEN

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Un nouveau rapport au domaine végétal

Le rapport que nous avons au domaine végétal a évolué depuis la découverte des cycles climatiques, mais aussi depuis que l’innovation technologique a conditionné l’agriculture. Le développement contemporain de l’agriculture s’accompagne d’une certaine méfiance à l’égard de tout ce qui peut atteindre la production des ressources agricoles. La semence du blé, par exemple, est calibrée et vendue avec engrais et pesticides. Actuellement, les rendements agricoles sont évalués dans des laboratoires, qui approuvent la commercialisation des semences selon un critère de stabilisation43. Mais cette homogénéisation des semences cultivées intensivement est corrélée avec « l’augmentation de l’usage des intrants chimiques, engrais minéraux et pesticides, […] provoqu[ant], en trente ans, une contamination croissante des ressources en eaux souterraines et superficielles du bassin parisien (emblématique des grandes cultures en France) qui s’est aggravée dans la quasi-totalité des rivières et des masses d’eau, atteignant parfois des seuils critiques dans les régions spécialisées en grandes cultures44 » Elle est aussi responsable de la perte de la biodiversité et du goût des aliments.

Les perceptions de la nature, de l’agriculture et du réchauffement climatique deviennent une préoccupation pour les bibliothèques, dans la mesure où les collections répondent aux envies et aux interrogations des usagers. Pour savoir quelles sont les fausses informations à propos de la dégradation ou des conceptions de la biodiversité, pour réapprendre à jardiner, à cultiver, à faire soi-même, les usagers des bibliothèques doivent avoir la possibilité de consulter un fonds pertinent et sélectionné, mais aussi de découvrir de nouvelles pratiques et activités.

La France est le pays pionnier de l’hybridation 45 et l’utilisation des machines dans l’agriculture intensive baisse considérablement les dépenses des français dans l’alimentation :

« Ainsi, ils [les français] y affectent 20,4 % de leur dépense de consommation. Il y a un demi- siècle, cette part était beaucoup plus élevée (34,6 % en 1960) et l'alimentation constituait le principal poste de dépense des ménages46. » Durant l’entre-deux-guerres, la France est

43 « Questions / Réponses sur le GNIS et la filière semences », GNIS, consulté le 26 mai 2020, https://www.gnis.fr/questions-reponses- gnis-filiere-semences/.

44 Julie Hermesse, Corentin Hecquet, et Pierre M. Stassart, « Verrouillage du système semencier et enjeux de sa réappropriation », Etudes rurales n° 202, no 2 (2018): 8 à 17.

45 « Biodiversité : les semences hors-la-loi », consulté le 20 mai 2020, https://www.franceinter.fr/emissions/la-terre-au-carre/la-terre-au- carre-19-novembre-2019.

46 « Cinquante ans de consommation alimentaire : une croissance modérée, mais de profonds changements - Insee Première - 1568 », consulté le 10 juin 2020, https://www.insee.fr/fr/statistiques/1379769.

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dépendante de l’importation et les agriculteurs refusent de moderniser leurs pratiques. Les campagnes sont distantes de l’Etat et de la politique du Front Populaire. Les exploitations familiales, poly-culturales et vivrières, ont tendance à agrandir les fermes et ignorent le capitalisme présent dans les villes. Après 1945, le monde agricole intègre peu à peu l’économie capitaliste, les investissements, les crédits et l’économie de marché. L’agriculture s’industrialise et se mécanise. Economiquement, l’agriculture s’ouvre au monde, mais socialement, les agriculteurs ne seront intégrés à la société contemporaine que bien plus tard47. Entre 1950 et 1980, l’agriculture française est intensifiée par l’utilisation de plus en plus importante d’intrants, c’est-à-dire de produits de synthèse ajoutés pour augmenter la production. Les céréales et surtout le blé sont devenues les produits les plus exploités, tandis que les légumineuses à graines (pois, pois chiches, lentilles, haricots…) ont été délaissées.

Les cultures de céréales ont besoin d’engrais parce qu’elles ne fixent pas d’azote (un aliment nutritif indispensable pour les plantes) sur le sol, or, « près de la moitié des émissions de GES du secteur agricole sont dues à l’épandage des engrais qui émet du protoxyde d’azote. » Il est apparu en France un « verrouillage » technique en faveur d’une agriculture fondée sur un

« usage intensif des intrants chimiques (fertilisants, herbicides, pesticides, etc.) associé à une faible diversité des espèces végétales cultivées. » Mais ce verrouillage n’est pas hérité de la solution la plus efficace : il est une évolution de la première innovation technologique choisie par la majorité des agriculteurs. L’avancée des semis de blé, par exemple, dans les années 1980, a permis de multiplier les récoltes, mais a demandé un usage beaucoup plus important d’engrais et de pesticides. L’usage de plus en plus répété des engrais à cause de la hausse de fréquence des rotations des cultures a augmenté aussi les maladies racinaires, ce pour quoi les doses d’engrais ont encore été augmentées. Les exploitations de céréales occupent 60% des terres cultivables en France. La pollution des eaux et la perte de la biodiversité dues à l’utilisation d’intrants a demandé, de fait, encore plus d’intrants, ce qui augmente encore la mauvaise qualité de la terre, des eaux, et l’utilisation toujours plus importantes de ce qui crée un appauvrissement des terres, très étendues. Les pesticides ont un rôle très important dans cette production peu diversifiée, et ne remplissent pas un rôle préventif que pourrait réaliser une rotation plus lente des cultures contre l’invasion des « bio-agresseurs. »

47 Alain Leménorel, « VI / L’agriculture : ni crise, ni révolution », Reperes, 1997, 66 à 78.

Références

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