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AMÉLIORER LES PRÉVISIONS À COURT ET MOYEN TERMES DES MODÈLES AGRONOMIQUES EN PRENANT MIEUX EN COMPTE L’INCERTITUDE DES PRÉVISIONS MÉTÉOROLOGIQUES Thèse d’Ivana ALEKSOVSKA

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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AMÉLIORER LES PRÉVISIONS À COURT ET MOYEN TERMES DES MODÈLES AGRONOMIQUES EN PRENANT MIEUX EN COMPTE L’INCERTITUDE

DES PRÉVISIONS MÉTÉOROLOGIQUES

Thèse d’Ivana ALEKSOVSKA1 Analysée par Philippe STOOP2

Directeurs de thèse :

Laure RAYNAUD (Ingénieur de recherche au CNRM-GAME Centre National de Recherches Météorologiques -France - Groupe d'étude de l'Atmosphère Météorologique)

Robert FAIVRE (Directeur de recherche INRAE) François BRUN (Ingénieur ACTA)

Le développement de l’agroécologie place beaucoup d’espoirs dans l’utilisation de modèles prévisionnels, qu’il s’agisse de modèles agronomiques permettant de prévoir le rendement potentiel et les besoins des cultures en intrants, ou de modèles épidémiologiques pour prévoir le risque d’attaque par des pathogènes. Pour être réellement pertinents, et aider à changer les pratiques agricoles, ces modèles doivent pouvoir fonctionner correctement en mode prédictif, c’est-à-dire en utilisant des prévisions météorologiques, en lieu et place des données météorologiques réelles connues a posteriori avec lesquelles ils ont été validés. Les progrès rapides des modèles météorologiques permettent maintenant d’obtenir des prévisions d’une fiabilité qualitative satisfaisante à l’échéance d’une à deux semaines. La thèse d’Ivana Aleksovska aborde cette question essentielle : l’incertitude de ces modèles, dits de prévision d’ensemble, permet-elle d’obtenir des simulations satisfaisantes à moyen terme (10 à 15 jours) avec les modèles épidémiologiques actuels ?

La doctorante a travaillé pour cela sur deux cas d’étude :

- le modèle EVA de l’IFV (Institut Français de la Vigne et du vin), qui prédit le développement des vers de la grappe, et permet d’en déduire les dates de traitement optimales,

- le modèle Septo-Lis d’Arvalis, pour la septoriose du blé.

Ces deux modèles étaient alimentés par les prévisions de trois modèles météorologiques : les modèles globaux IFS (CEPMMT3) et Arpège (Météo France), et le modèle régional Arome (Météo France).

1Thèse de doctorat de l’Université Toulouse 3 Paul Sabatier (UT3 Paul Sabatier), Ecole doctorale SDU 2E, Océan, Atmosphère et Surfaces Continentales, soutenue le 8 décembre 2020

2 Membre correspondant de l’Académie d’agriculture de France, section 9, « Agrofournitures »

3 Centre Européen pour les Prévisions Météorologiques à Moyen Terme

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Ce sujet est par essence interdisciplinaire, à mi-chemin entre la prévision météorologique et l’agronomie. Dans cette analyse, nous adopterons le point de vue de l’agronome, pour souligner les apports de ce travail aux concepteurs et aux utilisateurs de modèles agronomiques.

Dans la 1ère partie de sa thèse, I. Aleksovska introduit son sujet et définit ses objectifs. Elle rappelle dans le Chapitre 1 les fondamentaux de la prévision météorologique, la différence entre l’approche déterministe (où l’on calcule pour chaque point et chaque pas de temps une valeur unique de chaque variable modélisée, la plus probable) et l’approche ensembliste, où l’on réalise plusieurs simulations (appelées membres) avec de petites perturbations des variables d’entrée, pour obtenir une distribution de probabilités des variables calculées à chaque pas de temps. Elle présente ensuite les trois modèles utilisés, et leurs rôles respectifs dans la suite :

- IFS est le seul des trois modèles utilisés qui permette des prévisions au-delà de cinq jours : 10 jours en mode déterministe, 15 jours en mode ensembliste (IFS-EPS). Il sera donc utilisé dans toutes les simulations, au moins pour la fin d’échéance. Il a toutefois l’inconvénient d’une résolution spatiale relativement faible (9 km en mode déterministe, 18 en mode ensembliste jusqu’à J+15) ;

- Arome a la meilleure résolution spatiale (1,3 km en mode déterministe, 2,5 dans sa version ensembliste Arome-EPS), mais n’est opérationnel qu’à courte échéance (48 à 51 heures) :

- Arpège est intermédiaire entre les deux, avec une résolution spatiale nettement meilleure qu’IFS, surtout en mode ensembliste (10 km en France), et une échéance de calcul jusqu’à 108 H

Le chapitre 2 est consacré à une présentation générale du fonctionnement des OAD (Outils d’Aide à la Décision) agricoles, suivi d’une description des deux modèles agronomiques utilisés :

- Le modèle EVA de l’IFV, qui calcule les dates d’apparition des différents stades phénologiques des générations successives d’Eudemis et de Cochylis, deux lépidoptères ravageurs de la vigne (vers de la grappe). Ce modèle permet de déterminer les dates optimales de traitement : quand 2% des œufs ont été pondus pour les produits classiques, 15% pour les produits de biocontrôle.

- Le modèle SeptoLIS d’Arvalis, utilisé pour positionner les premiers traitements contre la septoriose de blé. La date de ce premier traitement est décidée de façon à éviter que l’infestation de septoriose atteigne les deux dernières feuilles de la culture, ce qui implique que ce modèle est couplé à un modèle phénologique du blé.

Le choix de ces deux modèles parait a priori judicieux, car ils sont en quelque sorte aux deux extrêmes en ce qui concerne leur sensibilité aux incertitudes des prévisions météorologiques : - EVA utilise essentiellement des cumuls de température horaire. La température étant actuellement la variable la mieux prédite par les modèles météorologiques, et des cumuls étant par définition peu sensibles à des incertitudes de court terme, on peut supposer a priori qu’EVA sera donc un modèle assez robuste par rapport aux incertitudes météorologiques.

- A l’opposé, SeptoLis repose aussi sur les températures, mais elles jouent surtout par des effets de seuils qui rendent leur action plus complexe et non linéaire. De plus, la variable la plus déterminante est la pluviométrie quotidienne, une variable beaucoup

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moins bien prédite par les modèles météo. On peut donc s’attendre à ce que SeptoLIS soit beaucoup plus sensible qu’EVA aux erreurs éventuelles des prévisions météo.

De plus, ces deux modèles sont déjà disponibles pour les agriculteurs ou les conseillers agricoles (EVA sur la plateforme Epicure de l’IFV, SeptoLis sur la plateforme TAMEO d’Arvalis et Météo-France). Des améliorations dans leur fonctionnement prévisionnel pourraient donc être rapidement transférées sur le terrain.

Dans le chapitre 3, I. Aleksovska précise les objectifs de sa thèse, résumées en trois questions de recherche :

Q1 : Quels seront l’apport et le potentiel de la prévision d’ensemble sur la quantification de l’incertitude associée à la prévision de la date d’un traitement phytosanitaire par rapport aux approches existantes (simulations déterministes, ou simulations fréquentielles basées sur les historiques météo) ?

Q2 : Comment profiter de la richesse des différents modèles de prévision d’ensemble et comment améliorer leur exploitation au sein des OAD ?

Q3 : Quels seront la qualité et l’impact de la prévision d’ensemble cohérente d’un point de vue météorologique et de son impact sur les prévisions des OAD ?

L’horizon de prévision retenu par la doctorante est le moyen terme (10 à 15 jours), ce qui est pertinent pour viser à améliorer les pratiques phytosanitaires. Comme nous avons vu qu’aucun modèle n’est optimal sur l’ensemble de cette durée, cela l’amène à construire des prévisions d’ensemble composites, dans lesquelles elle devra enchainer deux opérations importantes :

- calibrer les modèles de prévision pour assurer leur cohérence avec les observations de terrain (en particulier pour pallier au fait que les modèles donnent une prévision moyenne à l’échelle de la maille, alors que l’on cherche à modéliser la situation d’une parcelle précise à l’intérieur de cette maille) ;

- assurer une jointure entre les différents modèles utilisés pour couvrir l’ensemble de la période de prévision.

Les méthodologies employées sont décrites dans la IIème partie de la thèse :

Les principales méthodes de calibration sont décrites dans le chapitre 4, I. Aleksovska utilisant dans la suite la méthode paramétrique dite EMOS (Ensemble Model Output Statistics) pour chaque variable individuellement. EMOS donnant une distribution continue, alors que les modèles agronomiques utilisés en aval fonctionnent à pas de temps discret, cette étape doit être suivie d’un échantillonnage de cette distribution de probabilité, suivi d’une étape de réarrangement des prévisions d’ensembles ainsi obtenue, afin d’assurer leur cohérence temporelle (c’est ce qui est décrit dans la suite), et éventuellement spatiale et multivariée.

Le chapitre 5 décrit ensuite les procédures employées pour la construction des prévisions d’ensemble cohérentes (la cohérence traitée ici étant la cohérence temporelle). En effet, ces prévisions d’ensemble vont associer des simulations réalisées par Arome (pour les 48 premières heures), complétées par des simulations IFS en fin de période, avec éventuellement une période intermédiaire traitée par Arpège. Il faut donc ne retenir que des enchainements où la jointure de ces modèles ne présente pas de rupture temporelle incohérente.

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Cette partie méthodologique se conclut par le chapitre 6, qui présente les différentes méthodes d’évaluation d’une évaluation probabiliste qui seront utilisées dans la suite.

Nous passons aux résultats dans la IIIème partie. Le chapitre 7 décrit les expériences réalisées.

Les situations traitées dans cette thèse couvrent deux campagnes agricoles (2017/2018, et 2018/2019) sur huit sites pour EVA, et seize pour SeptoLIS, les parcelles simulées représentant les principales zones de production françaises des deux cultures considérées (la vigne pour EVA, le blé tendre d’hiver pour SeptoLIS). Pour ces situations, on étudie dans la suite les résultats des modèles agronomiques comparés aux observations de terrain, avec différents modes de prévision :

- prévisions déterministes - prévisions d’ensemble brutes

- prévisions d’ensemble post-traitées (calibrées) - prévisions d’ensemble cohérentes

Les différentes prévisions d’ensemble sont également comparées à des simulations fréquentielles, c’est-à-dire basées sur les historiques météorologiques des sites concernés.

Dans le chapitre 8, on compare les résultats des simulations ensemblistes brutes d’IFS aux simulations fréquentielles. Pour EVA, les prévisions ensemblistes donnent des résultats significativement meilleurs que les simulations fréquentielles pour pratiquement tous les critères d’évaluation. Leur avantage est moins net pour SeptoLIS, avec lequel les simulations ensemblistes sont souvent significativement moins bonnes que les fréquentielles à partir de J+8.

Dans le chapitre 9, I. Aleksovska passe à la construction de prévisions d’ensemble cohérentes, sur l’exemple des températures à 2 m. Son analyse des modèles ensemblistes calibrés lui montre qu’Arome-EPS est, logiquement, le modèle le plus performant pour les 48 premières heures. L’analyse des prévisions ensemblistes obtenues confirme la nécessité d’une phase de calibration pour obtenir des prévisions temporellement cohérentes (sans discontinuité trop marquée lors de la jointure de deux modèles), et l’intérêt de la méthode de jointure dite hongroise, par rapport à la méthode des plus proches voisins, qui tend à sélectionner trop souvent les mêmes membres dans le modèle utilisé en aval de la jointure.

Enfin, le chapitre 10 permet d’évaluer l’apport des prévisions d’ensemble cohérentes calibrées, par comparaison avec les prévisions ensemblistes basées sur IFS-EPS seul. L’évaluation porte sur la performance de prévision de la température à 2 m, et sur la prévision de la date optimale de traitement dans le modèle EVA. Il en ressort que l’apport d’Arome par rapport aux prévisions d’IFS-EPS est surtout sensible pendant les 24 premières heures de simulation. Pour les résultats agronomiques d’EVA, on retrouve une amélioration sensible apportée par la calibration des prévisions météorologiques à partir de J+4, par rapport à IFS-EPS brut. Par contre, il est difficile d’identifier des différences entre IFS-EPS calibré et les différentes prévisions ensemblistes cohérentes, quelle que soit la méthode de jointure employée. Il est vrai que, comme le fait remarquer I. Aleksovska, EVA n’est probablement le modèle le plus apte à valoriser l’apport des prévisions d’ensembles cohérentes, compte-tenu de sa faible sensibilité aux incertitudes de court terme. SeptoLIS aurait peut-être permis d’obtenir des résultats plus concluants sur le court terme (4 à 5 jours). Toutefois, nous avons vu au chapitre 8 que, en revanche, il valorisait peu l’apport des prévisions ensemblistes au-delà de l’échéance d’une semaine, après laquelle les simulations fréquentielles étaient plutôt plus performantes. Il apparait que finalement, aucun des deux modèles retenus n’était vraiment optimal pour montrer

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l’intérêt de prévisions ensemblistes de moyen terme, mais on ne pouvait le prévoir avant la réalisation de ce travail.

Au final, les résultats montrent donc un avantage net des prévisions ensemblistes d’IFS-EPS par rapport aux analyses fréquentielles (tout au moins pour EVA, les résultats étant plus mitigés pour SeptoLIS sur la 2ème semaine de prévision). Par contre, la construction de prévisions ensemblistes cohérentes, joignant des prévisions d’Arome-EPS et/ou d’Arpège EPS à celles d’IFS-EPS, n’a pas amélioré significativement les résultats par rapport à IFS-EPS utilisé seul après calibration, malgré la meilleure résolution spatiale de ces modèles (tout au moins dans le cas d’EVA, le seul des deux modèles agronomiques pour lequel cette comparaison a pu être faite). Ce résultat peut paraître décevant par rapport à l’important travail méthodologique entrepris pour la construction de ces prévisions ensemblistes composites. Mais ce sont là les aléas de la recherche, surtout de haut niveau comme c’est le cas ici. Il est apparu a posteriori que les deux modèles pris comme cas d’étude n’étaient finalement pas les plus pertinents pour valoriser de tels scenarios : Eva parce qu’il est trop peu sensible aux incertitudes, dès lors que les prévisions météorologiques sont correctement calibrées ; et SeptoLIS, probablement parce qu’il est au contraire très sensible à des variables difficiles à représenter correctement dans des approches ensemblistes, comme la fréquence des jours sans pluie. Mais on ne saurait en faire le reproche à la chercheuse, car ce choix de modèles paraissait judicieux a priori, et il a fallu son important travail méthodologique pour se rendre compte que ce n’était finalement pas le cas.

En l’état, ces résultats suggèrent deux réflexions intéressantes pour les concepteurs et utilisateurs de modèles agronomiques, à confirmer dans la suite :

- pour les modèles sensibles surtout à des cumuls de leurs variables d’entrée, comme EVA, la calibration semble une étape plus déterminante que l’utilisation de modèles à haute résolution spatiale, contrairement à l’intuition de la majorité des utilisateur de terrain. C’est un peu décevant par rapport aux questions scientifiques de départ, mais c’est plutôt une bonne nouvelle pour les utilisateurs de ce type de modèles, pour lesquels il sera probablement possible de bénéficier de façon assez simple des apports des modèles d’ensemble, même à résolution spatiale (relativement) faible.

- A la lecture des résultats, on peut supposer que des modèles de bilan hydrique, sensibles à l’incertitude sur les quantités de précipitations, mais peu à leur répartition temporelle, contrairement à SeptoLIS, seraient probablement de meilleurs candidats pour bénéficier de prévisions ensemblistes composites. En effet, ils sont plus sensibles à la résolution spatiale de la prévision. Cela fait d’ailleurs partie des pistes travaillées dans un stage présenté en annexe de la thèse, qui bénéficie donc du travail préliminaire réalisé par I. Aleksovska.

Au final, le grand intérêt de cette thèse est son apport méthodologique : la doctorante a brillamment vulgarisé, et adapté aux besoins des modèles agronomiques, des méthodes très complexes, mises au point pour des applications purement météorologiques. Elle a ainsi constitué une « boite à outils » précieuse pour les modélisateurs agronomiques qui prolongeront ses travaux. Pour l’instant, il semble que ces méthodes soient un peu surdimensionnées par rapport aux caractéristiques actuelles des modèles épidémiologiques utilisés sur le terrain. Mais le travail pionnier d’I. Aleksovska permettra sans doute sur le long terme d’améliorer ces modèles, souvent anciens, pour bénéficier des progrès impressionnants de la météorologie.

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C’est à ce titre que l’analyse de cette thèse est publiée sur le site de l’Académie d’agriculture de France, à titre de valorisation de ces travaux.

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