B. MARTIN,
J.B.
COULONSUACI
Montagne Alpes
du Nord1, rue du Château - 73000
Chambéry
*INRA Laboratoire de la Lactation et de
l’Elevage
des RuminantsTheix 63122
Saint-Genès-Champanelle
Aptitude à la
coagulation du lait
de vache : influence de l’alimentation
Etude réalisée dans
6 exploitations du Pays
de Thônes (Haute-Savoie)
L’évolution rapide des facteurs de production et des contraintes de
ramassage et de transformation du lait
aentraîné des modifications de
saqualité qui peuvent avoir des répercussions
surla quantité et la qualité des produits transformés. Ces modifications sont particulièrement importantes
dans les régions où la majeure partie du lait est transformée
enfromages,
ce
qui est notamment le
casdes Alpes du Nord.
Dans la
plupart
desrégions
de montagne, la valorisation du lait est exclusivement froma-gère
et l’ensemble del’agriculture
repose sur lafabrication,
dans depetites
unités deproduc-
tion, defromages
à base de lait cru enAppella-
tion
d’Origine
Contrôlée. Un cahier descharges
très strict,
qui garantit
laqualité
desproduits,
interdit les modifications artificielles de la com-
position
du lait. Or, les laits depetits mélanges
utilisés en
production fromagère
dans lesAlpes
du Nord
présentent
souvent unegrande
varia-bilité au cours de l’année. Ceci ne va pas sans poser des
problèmes
auxfromagers qui,
du faitde l’automatisation croissante des chaînes de
production,
ont du mal àadapter
leurs techni- ques de fabrication aux variations des caracté-ristiques
du lait :composition,
comportementvis à vis de la
présure, caractéristiques
rhéolo-giques
du caillé...Il est donc
primordial
de mieux connaître lescauses des variations de
l’aptitude fromagère
des
laits,
enparticulier
dans les conditionsspé- cifiques
desAlpes
du Nord(alimentation
àbase de
foin,
raceslocales..), afin,
pour les éle-veurs
d’agir
sur les facteurs de variabilité etproduire
un lait dequalité
laplus
constantepossible
au cours del’année,
et pour les froma- gers de mieux savoirgérer
cette variabilité etreconnaître les situations à
risque.
Un suivi en ferme réalisé en 1988 dans 41
exploitations
duPays
de Thônes(Haute-Savoie) (Coulon
et al1988)
a montréqu’il
existait d’im-portantes
variations de lacomposition
chimi-que et de
l’aptitude
à lacoagulation
du lait(mesurée
par le temps decoagulation)
bien quel’on se situe dans une zone
géographique
limi-tée avec des animaux d’une seule race
(Abon- dance),
recevant tous une alimentation à base de foin. Ces variations semblaient en relationavec la maîtrise du
système d’élevage
etplus particulièrement
de l’alimentation.Compte-tenu
de cespremiers résulats,
l’ob-jectif
de cette étude a été d’observer etd’analy-
ser, dans 6
exploitations
faisantpartie
de l’en-quête précédente,
l’évolution desprincipaux paramètres
del’aptitude
à lacoagulation
deslaits et de les relier aux
caractéristiques quanti-
tatives de l’alimentation hivernale des animaux.
Etude réalisée dans le cadre du programme de
Recherche-Développement des Alpes du Nord
Résumé
!.L’étude réalisée entre
janvier
etjuillet
1989 dans sixexploitations
laitières réali-sant du Reblochon fermier dans le
Pays
de Thônes(Haute-Savoie)
apermis
de décrire les variations desprincipaux paramètres
del’aptitude
à lacoagulation
des laits individuels et de
troupeau (temps
decoagulation,
vitesse de raffermis- sement, fermeté dugel)
et de les relier auxcaractéristiques quantitatives
de l’ali-mentation hivernale des animaux
(bilans énergétique,
azoté etminéral).
Cesmesures ont
permis
de montrer lesparticularités
des conduites alimentaires destroupeaux
de cetterégion
oùglobalement,
lesapports
alimentaires hivernaux ont étélargement supérieurs
aux besoins des animaux(+
1 à + 25%).
Les excé-dents se sont
accompagnés
dedéséquilibres
desapports
azotés(excès
de PDIEpar
rapport
auxPDIN)
et minéraux(excès
de calcium parrapport
auphosphore)
et ont surtout été
marqués (excédents énergétiques
de l’ordre de 20%)
dans lesexploitations
caractérisées par des laits dequalité beaucoup plus
variable aucours de l’année. A l’échelle des
troupeaux (n
=6)
comme à l’échelle de l’indi- vidu(n
=160),
il n’acependant
pas étépossible,
dans la limite des données dis-ponibles,
de mettre en relationl’aptitude
à lacoagulation
du lait avec les bilansalimentaires des animaux. L’étude des laits individuels a par contre
permis
de confirmer l’influence du stadephysiologique
des animaux et dupH
initial du laitsur ses
paramètres
decoagulation.
Lescaractéristiques
des laits destroupeaux
ont été très liées à
l’exploitation
et d’autresfacteurs, alimentaires,
ou non pour- raient être en cause pourexpliquer
les différencesd’aptitude
du lait à la coagu- lation.1 / Origine et analyse des données
Les 6
exploitations
sont localisées en Haute- Savoie dans le canton de Thônes etfabriquent
du Reblochon fermier. Les vaches sont toutes de race Abondance et l’alimentation hivernale
est à base de
foin,
acheté ouproduit
surplace.
Trois des 6
exploitations
faisaientpartie
dugroupe dont le lait
présentait
de fortes varia-tions du
temps
decoagulation
au cours de l’hi-ver
(groupe
« variable»-V-),
les trois autres fai-saient
partie
du grouped’exploitations
dont le temps decoagulation
du lait restait stable aucours de l’hiver
(groupe
« stable»-S-) (cf
Cou-Ion et al
1988).
1.
1
/ Données recueillies
a / Alimentation
Trois fois au cours de l’hiver 1989
(première quinzaine
dejanvier,
dernière semaine defévrier-première
semaine de mars, dernièrequinzaine d’avril),
lesquantités ingérées
ont étémesurées dans
chaque exploitation (individuel-
lement pour le concentré et à l’échelle du trou- peau pour les
fourrages). Chaque
série demesure
comprenait
troisjours
consécutifs depesée
desquantités
de foin(offert
àvolonté)
etde concentré distribuées et refusées. Les
mesures ont
toujours
été réalisées au moins5
jours après
unchangement important
de lot defourrage.
Le deuxième
jour
dechaque
série depesées,
un échantillon de
chaque
lot defourrage
distri-bué a été
prélevé
pour déterminer les teneursen matière sèche
(MS),
matièreorganique (MO),
cellulose brute(CB),
matières azotées totales(MAT),
et minéraux(phosphore
et cal-cium)
ainsi que ladigestibilité
de la matièreorganique (test pepsine-cellulase).
Ces donnéesont
permis
de déterminer la valeur nutritive des aliments distribués(teneurs
en UFL, PDIN, PDIE, P etCa) (tableau 1).
Lesfourrages
distri-bués ont été caractérisés par leur richesse en PDIE
(l’écart
PDIE-PDIN a été en moyenne de 11,4 gPDI/UFL)
et en calcium(9,4 g/kg MS).
Les foins distribués ont
généralement
été demeilleure
qualité
dans les 3exploitations
dugroupe S
(+
0,04UFL/kg
MS et + 8 gPDI/kg MS).
Les bilans alimentaires
(UFL,
PDI, P etCa)
ont été calculés pour
chaque
série de mesureen tenant compte des
phénomènes
d’interac-tions
digestives
etmétaboliques (Vermorel
et al1987).
Pour lefourrage,
seules lesquantités glo-
balement
ingérées
par letroupeau
étantconnues, la consommation totale a été ramenée à une consommation moyenne
égale
pour tous les animauxprésents.
Ces bilans n’ont donc designification
strictequ’à
l’échelle dutroupeau ;
à l’échelle
individuelle,
ilsrenseignent
cepen- dant mieux que la seule connaissance desquantités
de concentréingérées.
b / Production et
composition du lait
Sur les laits
individuels,
des mesures men-suelles ont été réalisées entre
janvier
etjuillet
1989:
chaque
série de mesurecomprenait
unprélèvement
sur le lait de la traite du soir direc- tement amené au laboratoire et conservé à 4’Cpendant
15 h(sans conservateur)
et unprélève-
ment sur celui de la traite du matin. Les taux
butyreux
etprotéiques
ont été déterminéssépa-
rément sur un échantillon de
chaque
traite(matin
etsoir).
La numération cellulaire et ledosage
du calcium ont été réalisés sur unéchantillon moyen des deux traites.
L’urée,
lepH,
ledegré
d’acidité Dornic, letemps
decoagulation
et l’indice decoagulation (rapport
entre le temps de
coagulation
de l’échantillon et letemps
decoagulation
d’un lait témoin reconstituéemprésuré
avec la même solution deprésure)
ont été mesurés sur les laits du matinseulement,
dès l’arrivée des échantillonsau laboratoire
(2
heuresaprès
latraite).
Sur les laits de
mélange,
deux fois par mois,entre
janvier
etjuillet inclus,
des échantillons des traites du matin et du soir ont étéprélevés
avant
l’ensemencement,
dans les cuves de cha-que
exploitation.
Toutes lescaractéristiques
mesurées sur les laits individuels l’ont
égale-
ment été sur les laits de
mélange
pourlesquels,
en
plus,
la teneur en caséines a été déterminée.Des mesures
rhéologiques
ont par ailleurs été effectuées environ 2 heuresaprès
latraite,
sur des laits du matin nonrefroidis,
à l’aide d’ungélographe (appareil qui
trace une courbe d’évolution de la viscosité du laitemprésuré).
Ces courbes
permettent
d’estimer letemps
decoagulation,
la vitesse maximum de raffermis- sement(plus grande
pente de lacourbe)
et lafermeté du
gel
30 minutesaprès l’emprésurage
ainsi
qu’à
deux fois le temps decoagulation.
1.
2 / Analyse des données
L’analyse
des données a été réalisée àplu-
sieurs niveaux :
après
avoir décrit les moyennes et les évolutions des variables caractérisant les laits des cuves et l’alimentation destroupeaux,
lescaractéristiques
du lait et de l’alimentation à l’échelle individuelle ont étéanalysées
enjan-
vier
(mesure
laplus proche
du début de la lac-tation),
en avril(juste
avant la mise àl’herbe)
eten
juin (en alpage :
les variables concernantl’alimentation des animaux n’étaient alors
plus disponibles).
Les donnéesindividuelles, qui permettent
de confirmer et depréciser
lesphé-
nomènes observés sur les laits des cuves ont été décrites par
analyse
factorielle des corres-pondances (AFC, Logiciel STAT-ITCF) (cf annexe).
Seules les variables caractérisant lacomposition physico-chimique
des laits indivi- duels ontpris
part à la construction des axesprincipaux ;
les autres variablesdisponibles (alimentation, poids, âge)
ont été introduitescomme variables
supplémentaires.
Les résultatsétant
identiques
lors dechaque période
étu-diée,
seules lesanalyses
effectuées en avril serontprésentées.
2 / Résultats
__________
2.i / Caractéristiques des laits de
cuve En moyenne, les tauxbutyreux
etprotéiques
ont été
respectivement
de 36,4 et 31,8g/kg
pour une
production journalière
de 17,3kg/
vache. Le taux
butyreux
aaugmenté
fortement lors de la mise à l’herbe(+
5,0g/kg
entre avrilet
juin)
contrairement au tauxprotéique qui
aété
beaucoup plus
stable au cours de lapériode
de mesure
(figure 1).
Le nombre de cellules aété
plus
élevépendant
lapériode
estivale(230 000/ml
contre 180 000/ml enhiver)
comme cela a
déjà
été observé par ailleurs(Coulon
et Lilas 1988 ; Coulon et al1988).
Sil’indice de
coagulation
n’apratiquement
pas varié au cours de l’année(4
% d’écart entre lespériodes
hivernale etestivale),
le raffermisse- ment du caillé a étéplus rapide
durant lapériode
estivale(de 14 %)
et legel obtenu,
30 mn
après l’emprésurage
et à deux fois le temps deprise, plus
ferme(respectivement
de19 et 12
%) (figure 1). Globalement,
les laits descuves ont donc
présenté
uneaptitude
à lacoagulation légèrement
meilleure durant lapériode
estivale.Ces valeurs moyennes cachent des écarts
inter-groupes
etinter-troupeaux
variables(tableau 2) :
le lait desexploitations
du groupe S a été caractérisé par un tauxbutyreux,
untaux de
calcium,
undegré
d’acidité et un rap-port
Ca/Nlégèrement plus
faibles que ceux du groupe V Par contre, lepH
et le taux d’urée ontété semblables et les différences de teneurs en
protéines,
en caséines et en cellules du lait ont été dûesuniquement
à des valeurs très diffé-rentes
enregistrées
dans uneexploitation (tableau 2).
De même, les différencesd’aptitude
à la
coagulation
moyenne entre les 2 groupes ont été faibles(à l’avantage
du groupeV) (tableau 2).
Par contre, la variabilité d’unequin-
zaine à l’autre de ces différentes caractéristi- ques a
toujours
étéplus
élevée dans lesexploi-
tations du groupe V
(figure 1),
que ce soit pour lacomposition chimique
du lait(l’écart
entreles valeurs bi-mensuelles extrêmes du taux pro-
téique
a été de 5,0g/kg
dans lesexploitations
du groupe V contre 2,2 dans celles du groupe
S),
la numération cellulaire(497
000 contre280 000
cellules/ml),
ou les variablesd’aptitude
à la
coagulation
des laits(pour
l’indice decoagulation,
l’écart entre ces valeurs extrêmes aété de 1,40 dans le groupe V contre 0,87 dans le groupe
S) (tableau 2).
2.a / Quantités ingérées et bilans
alimentaires
Les animaux des 6
exploitations
ontingéré
en moyenne sur les trois séries de mesure
Les
laits présentent
tune meilleure
aptitude à la coagulation
enpériode
estivale :raffermissement du
caillé plus rapide
etgel plus
ferme.12,0
kg MS/j
de foin et 4,8kg MS/j
d’alimentsconcentrés.
Compte
tenu de laproduction
lai-tière
qui
a varié de 17,9kg/vache/j
enjanvier
à 16,
7
kg/vache/j
enavril,
les bilans alimentairesont été
largement positifs (tableau 3) :
l’excé-dent
journalier
enénergie,
en azote, enphos- phore
et en calcium a étérespectivement
de 1,2UFL
(soit
10 % desbesoins),
217 g de PDI(soit
19 % des
besoins),
16 g dephosphore (30
% desbesoins)
et 89 g de calcium(94
% desbesoins).
Ces excédents ont été associés à des
déséquili-
bres au niveau de l’alimentation azotée
(excé-
dentaire en PDIE, l’écart moyen PDIE-PDIN a été de 9,6 g
PDI/UFL)
et minérale(excédentaire
en
calcium,
lerapport
Ca/P des apports étant de 2. fi).Ces valeurs moyennes cachent de grosses dif- férences
inter-groupes (tableau 3) :
bien que dans lesexploitations
du groupe V le stademoyen de lactation ait été moins avancé
(1 mois),
laproduction
individuelle inférieure de 3,4kg/j,
et les animaux deplus petit format,
lesquantités ingérées
defourrage
et de concentréont été
pratiquement égales
dans les 2 groupesd’exploitation.
Les animaux desexploitations
du groupe V ont donc
présenté
des bilans éner-gétiques
et azotéslargement positifs, quelle
que soit lapériode
de mesure : + 1,9UFL/j
et + 360g
PDI/j
soitrespectivement
+ 18 et + 34 % parrapport aux besoins. Dans les
exploitations
dugroupe S, ces bilans ont
également
étépositifs
mais l’excédent n’a
représenté
en moyenne que 5 et 9 % desbesoins, respectivement
pourl’énergie
et l’azote. Ces résultats ont été peu variables à l’intérieur d’un même groupe, maisassez différents d’un mois à l’autre dans le groupe S, en liaison avec l’évolution du stade moyen de lactation
(tableau 3).
En
définitive,
lesexploitations
du groupe V, par leurs besoins faibles et leurs bilans très excédentairess’opposent
auxexploitations
dugroupe S dans
lesquelles
laproduction
indivi-duelle est
plus
élevée et l’alimentation des ani-maux
plus équilibrée malgré
des variationshivernales
importantes.
2.s / Liaison entre l’aptitude fromagère
du lait et les bilans nutritifs
A l’échelle des troupeaux, les bilans
énergéti-
ques, azotés ou minéraux ne permettent pas
d’expliquer
les variationsd’aptitude
à la coagu- lation des laits des cuves(figure 2),
tout aumoins dans la
plage
de variation des bilans dis-ponibles (les
bilansnégatifs
sont très peu nom-breux).
Dans les conditions de bilanspositifs,
ilsemblerait que les
plus
forts excédents soient à mettre en relation avec lesaptitudes
à la coagu- lation lesplus
favorables.Cependant, lorsque
l’on se
place intra-exploitation,
bien que les bilansénergétiques
aient pu varier de - 1 à + 2UFL/VL/jour (cas
dutroupeau 3), l’aptitude
àla
coagulation
des laits de cuve est restée constante.Globalement,
cetteaptitude
a sur-tout été liée à
l’exploitation (figure 2).
L’étude àl’échelle du
troupeau
acependant
été limitéepar le faible nombre de données
qui
ne permetpas de s’affranchir de l’effet de
l’exploitation
etdu stade
physiologique
des animaux.2.
4 / Liaisons
entreles laits de
cuveet les laits individuels
a / Effet
du
nombre de cellules et des variantsgénétiques
deslacto-protéines
Dans une des
exploitations,
du fait de la tailleimportante
du troupeau, le lait était travaillé dans deux cuvesséparées.
Le lait d’une descuves
(petite cuve)
aprésenté
une moins bonneaptitude
à lacoagulation
que celui de l’autrecuve
(l’indice
decoagulation
a étéplus
élevé(de
8%),
la vitesse maximum de raffermisse- mentplus
faible(de
26%)
et legel
obtenu30 mn
après l’emprésurage
moins ferme(de
46
%))
bien que le taux de matièreutile,
et enparticulier
de caséines ait étéplus
élevé que dans lagrande
cuve(0,6 g/kg).
D’autre part, lepH,
le tauxd’urée,
l’acidité du lait et le stadephysiologique
moyen des animaux ont été sem-blables dans les deux cuves
(tableau 4) ;
le laitde la
petite
cuve s’est différencié seulement parun nombre de
leucocytes
moyen nettementsupérieur (336 000
contre 100 000cellules/ml)
et un taux de Ca
légèrement
inférieur(-
0,04g/
1).
Un n
ctialume W
noté des différences derépartition
des variantsgénétiques
de lacaséine
kappa
et de laB-lactoglobuline
entreles deux cuves : les animaux de
type
BB pour la caséinekappa
ontproduit
31 % de la matièreprotéique
dans lagrande
cuve contre 7 % dansla
petite.
Pour labéta-lactoglobuline,
les ani-maux de type BB ont
produit
23 % des pro- téines de lagrande
cuve contre 8 % dans lapetite.
Ces différentesrépartitions
des variants deslacto-protéines,
enparticulier
du variant Bde la caséine
kappa,
ont pu contribuer aux dif- férencesd’aptitude
à lacoagulation
des laitsdes deux cuves
(Grosclaude
1988, Aleandri etal
1990).
b / Effet des
caractéristiques
deslaits
individuels
Au mois
d’avril,
156 vaches ont été contrô- lées dont 28 % deprimipares.
Lamajorité
desanimaux
(78 %)
étaient au delà de leur 3&dquo; mois de lactation. Lesproductions
individuellesjournalières
ont étécomprises
entre 3 et 35kg.
Le taux
butyreux
a été environ deux foisplus
variable que le taux
protéique
et 45 % des ani-maux ont
présenté
des tauxprotéiques
faibles( <
30g/kg)
et/ou des tauxbutyreux
très faibles( <
33g/kg) (figure 3).
L’indice decoagulation
a varié du
simple
auquintuple,
lepH
de 6,6 à 6,9 et le taux d’urée de 200 à 500mg/1.
Le nom-bre de
leucocytes
a été peu variablepuisque
93 % des laits ont
présenté
un nombre de leu-cocytes
inférieur à 300 000/ml et 2 % seule-ment ont
dépassé
1million/ml.
Lamajorité
desanimaux étaient en bilans
énergétique
et azotépositifs (respectivement
82 et 90%).
Ces bilansont été
compris
entre - 3,9 et + 5,0UFL/j
etentre - 290 et + 500 g
PDI/j.
L’AFC
(cf paragraphe 1.2)
réalisée sur l’en-semble de ces animaux
(figure 4)
apermis
demettre en évidence 4 associations de facteurs discriminants pour l’indice de
coagulation
deslaits. L’axe 1 oppose les laits de fin de lactation dont le taux
protéique
estélevé,
aux laits de début de lactationplus
pauvres enprotéines.
L’axe 2 permet
d’opposer
les laits en fonction de leurpH
et de leurdegré
d’acidité Dornic.Les animaux
produisant
un laitqui coagule
vitesont en début de
lactation,
leur lait estplutôt
pauvre en
protéines
et est caractérisé par unpH
faible.Dans un deuxième temps, une AFC sembla- ble a été réalisée sur les animaux en milieu de lactation
uniquement,
de manière à éliminer l’effet du stadephysiologique
des animaux surl’indice de
coagulation (Coulon
et al1991).
L’étude du
plan principal
de cette AFC(figure 4)
nepermet
de mettre en évidence que deux associations de facteurs discriminants pour l’indice decoagulation :
seul l’axerepré-
sentant le
pH
du laitpermet
deséparer
les dif-férentes modalités. Les variations de l’indice de
coagulation apparaissent indépendantes
decelles du taux
protéique
du lait.Les deux
analyses précédentes
ne permettent pas derapprocher
les bilans alimentaires des animaux et l’indice decoagulation
des laits : dans les deux cas, les différentes modalités des divers bilans calculés sont très malreprésen-
tées sur le
plan principal
et sont toutes regrou-pées
autour del’origine.
Les bilans alimentaires des animaux et les critères deq ualile li ’L )Illdgui’L’,
du lait semblent donc évoluer de
façon
indé-pendante.
L’étude des corrélations entre les variables, sur lapopulC1tion
entière(figure 5)
ainsi que wr dps
popuhtions
triées(intra
stadephysiologique
et/ou intraexploitation),
permetde confirmer l’absence de liaison entre le niveau d’alimentation des animaux et l’indice de
coagulation
de leur lait. Ces résultats confir- ment ainsi les observations réalisées à l’échelle du troupeau.Les laits
de début de
lactationprésentent
tun taux
protéique
etun
pH plus faibles,
et leur
coagulation
est
plus rapide.
Indépendamment
dustade de
lactation, l’indice de
coagulation
estessentiellement lié
au
pH
du lait.Les variations des
bilans
alimentaires des animaux n’ont tpas
permis d’expliquer
celles del’indice de
coagulation.
c / Liaisons entre les différentes
caractéristiques du lait
L’étude des liaisons entre les critères indivi- duels de
qualité
du laitpris
deux à deux a per- mis de confirmer que l’indice decoagulation
était d’autant
plus
faible que lepH
du lait étaitplus
bas(r
= 0,57, P <0,01) (figure 5)
et le rap- port Ca/Nplus
élevé(r = -
0,31, P <0,01).
Parcontre, l’indice de
coagulation
n’a été lié defaçon significative,
ni au tauxd’urée, (figure 5)
ni aux niveaux de
production,
ni au nombre decellules du lait
(dans
laplage
de variationobservée).
D’autre part, comme cela adéjà
étéobservé par ailleurs
(Delacroix
1985 ; Coulon etal
1988),
le tauxprotéique
a varié dans le mêmesens que l’acidité du lait
(r
= 0,60, P <0,01). J.
Discussion - Conclusion
Cette étude a mis en évidence les
particulari-
tés des conduites alimentaires des troupeaux du
Pays
de Thônes où les apportsénergétiques,
azotés et minéraux ont été
généralement large-
ment
supérieurs
aux besoins des animaux. De tels niveaux d’alimentation ontdéjà
été obser-vés dans les
Alpes
duNord,
vraisemblablementen raison du
rapport
très favorable :prix
lait/prix
du concentré(Liénard
et Baud1981).
Lesforts excédents observés ont en effet été liés à
une distribution
importante
d’aliments concen-trés
(30
% de la matière sèchetotale,
40 % des apportsénergétiques)
compte tenu du niveau deproduction
des animaux et de laqualité
desfoins distribués. Ces forts niveaux d’alimenta- tion hivernale peuvent
expliquer
que, dans laplupart
desexploitations,
les variations du tauxprotéique
à la mise à l’herbe restent faiblescontrairement à ce
qui
est souvent observé par ailleurslorsque
les niveaux alimentaires hiver-naux sont
plus
faibles(Coulon
et Binet 1987 ;Agabriel
etal 1990).
La sur-alimentation
hivernale,
trèsmarquée
dans les trois
exploitations
où le niveau de pro- duction a été leplus
faible(groupe V)
ne s’esttraduite ni par des
quantités
de laitproduites plus importantes
ni par des tauxprotéiques plus
élevés que ceux desexploitations
dugroupe S. Cette absence d’effet est certaine- ment
dûe,
enpremier lieu,
à des niveauxgéné- tiques
très différents d’un groupe à l’autre. Ellepeut
d’autrepart
illustrer la loi des rendementsmarginaux (Coulon
et Rémond1991) ;
au delàde la couverture des
besoins,
laréponse
de laproduction
laitière à un apport alimentaire sup-plémentaire
devient deplus
enplus faible,
auprofit
de la reconstitution des réserves corpo-relles,
dont on nedisposait
pas d’indicateur(note
d’étatd’engraissement)
dans cette étude.Les forts
déséquilibres enregistrés
au niveau de l’alimentation azotée et minérale ont aussi puse traduire par une moins bonne utilisation
digestive
del’énergie ingérée.
Elle doit enfin êtreinterprétée
avecprudence :
ils’agit
ici d’observationsinter-exploitations
sur un effectiftrès faible et non inter-individus sur une
large population.
Les résultats obtenus à l’échelle du troupeau
et de l’individu vont dans le même sens et met- tent en évidence l’absence de liaison entre les bilans alimentaires des animaux
(UFL,
PDI, P etCa)
et lesparamètres
decoagulation
des laits(indice
decoagulation
mais aussi, vitesse deraffermissement ou fermeté du
gel).
Ils confir-ment ainsi les résultats obtenus dans des situa- tions
expérimentales
et sur desplages
de varia-tion des bilans alimentaires différentes
(Mache-
boeuf et
Coulon,
nonpublié).
Ces observationsvont
également
dans le même sens que cellesde Vertès et al
(1989) qui
n’ont pas observé de liaison entre le niveau de l’alimentation hiver- nale et laphase primaire
de lacoagulation
bienque la fermeté du
gel
ait été améliorée(parallè-
lement à une
augmentation
de la teneur encaséines du
lait)
par desapports
alimentairesaccrus, mais de nature différente.
En
définitive,
cette étude a confirmé l’exis-tence de différences
importantes
d’uneexploi-
tation à l’autre des
caractéristiques
du lait et apermis
derelever,
dans certaines decelles-ci,
de fortes variations de cescaractéristiques
aucours de l’hiver. Elle a ainsi confirmé les résul-
tats
qualitatifs
del’enquête précédente
concer-nant la
plus grande
variabilité des caractéristi- ques du lait desexploitations
où la maîtrise dusystème d’élevage
étaitmédiocre,
le niveau deproduction
leplus
faible et la valorisation dufromage
la moins bonne. C’est cette variabilité que lesproducteurs
fermiers ont du mal àgérer
et
qui
se traduit sur lesfromages
par unedépré-
ciation de la
qualité
et donc de la valorisation du lait(Coulon
et al1988).
Les facteursgénéti-
ques,
qui jouent plus
sur le niveau des varia-bles que sur leur
variabilité,
ne sont donc apriori
pas en cause, sauf s’ilsagissent
en inter-action avec des facteurs du milieu. Cette étude montre que les bilans alimentaires ne
permet-
tent pas non
plus
à eux seulsd’expliquer
lesvariations brutales de
l’aptitude
à lacoagula-
tion des laits de cuve.
Cependant,
dans cetteétude,
le choix des variablesexplicatives (concernant
exclusivement le niveau desapports nutritifs),
lafréquence
des mesures(tous
les 15jours
pour les laits de cuve mais seulement tous les mois pour les laits indivi-duels,
cequi
n’a paspermis
de relier de manière fiable les variations de ces 2 sourcesd’information)
et la finesse des observations n’ont paspermis d’appréhender
des variables de conduite des animaux autresqu’alimen-
taires
(mouvements d’animaux,
traite, facteurssanitaires
...)
ou d’ordreplus qualitatif (nature
de la ration, méthode
d’apport
et de transition,...). D’autre part,
seules des variables décrivant lacoagulation
du lait ont été étudiées. Afind’essayer
depréciser
l’influence réelle descaractéristiques
dusystème d’élevage
sur lesvariations de
l’aptitude fromagère
du lait aucours de l’année
(et
enparticulier
sur laqualité
des
fromages affinés),
des travauxspécifiques
sont actuellement
entrepris,
en situationexpé-
rimentale et dans des
exploitations
desAlpes
du Nord.
Remerciements
Nous tenons à remercier X. Folliet, le Contrôle Laitier de Haute-Savoie, le Syndicat
Interprofessionnel
duReblochon
(Y. Burnet-Merlin),
la coopérative de Reblochon Fermier de Thônes et L’ITG pour leur par-ticipation aux
prélèvements
et mesures et leursconseils.
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Summary
Renneting properties
ofdairy
cows milk :influence of nutritional level.
This
study
was carried out betweenJanuary
andJuly
1989, in 6dairy
farmsmaking
cheese(Reblochon),
located in the Th6nes area(Haute-Savoie). Coagulation properties (coagu-
lation time, curdfirming
rate and curd firm-ness)
were described and related to the feed-ing
characteristics of the cows(energy, nitrogen
and mineralbalances)
and with the chemical characteristics of the milk(fat
andprotein
content,pH, etc).
In all the farms the nutritional balances werepositive,
more so inthose where milk characteristics were the
more variable
throughout
the year.Using
herdvalues
(n
=6)
or individual values(n
=160),
it was not
possible
to relate the variations incoagulation properties
with those of nutri- tional balances of the cows. The variations incoagulation properties
were well related with those of milkpH
or with thephysiological
stage of the cows. Otherfeeding
factors(feed type etc)
ornon-feeding
factors(milking, health, genetic factors)
may beresponsible
forthese variations.
MARTIN B., COULON J.B.,1991.
Aptitude
a la coagu- lation du lait de vache : Influence de 1’alimentation.Etude r6alis6e dans 6
exploitations
du Pays deThônes
(Haute-Savoie).
INRA Prod. Anim., 4(3),
209-217.