Sélection
de
cotonniers
à
teneur
variable de
gossypol
dans
ses organes
Approche interspécifique
G. Mergeal1 G. Lognay2
A.Maqueti I. VrohBi1
H. BenBouza1 J.-P.Baudoin1
I
Introduction
Les cotonniersdiploïdessauvagesaustraliens appartenant aux sec¬
tions Sturtia et Hibiscoidea du genre Gossypium produisent des
grainessansterpénoïdes alors queleursparties aériennes sont pour¬
vues deglandesàgossypol(Brubaker et
al,
1996).L'
introgressionchez laprincipale espèce decotonnier
cultivé
du mécanismelimi¬tant laproduction degossypoldans les grainesesthautementsou¬
haitablecarcelapermettrait
l'exploitation
ducotonniercomme uneculture vivrière tout en préservant son principal mode de défense
naturel contre les insectes ravageurs.
Le
gossypol et les autres ter¬pénoïdesproduitsparlecotonniersonttoxiquespourla plupartdes
espèces animales
y
compris les insectes et, malheureusement, les1Unité dephytotechnie desrégions intertropicales,faculté universitaire
desSciencesagronomiquesdeGembloux,B-5030Gembloux,Belgique.
2Unitédechimiegénérale etorganique,faculté universitairedes Scien¬
112T Des modèles biologiques à l'améliorationdes plantes
hommes
(Altman
etal,
1990).Trois schémas de croisementpeu¬vent être suivis pour obtenir l'introgression de
l'inhibition
de lasynthèsedugossypol dans lagrainedu cotonnier (Mergeai, 1994).
Deux d'entre eux donnentnaissanceàdeshybridestrispécifiqueset
le troisième permet
l'exploitation
directed'hybrides bispécifiques.Comme la stratégie de croisementdirect entre G. hirsutum et une
espèceaustraliennesemblait particulièrement
difficile
àsuivrepourréussir
l'introgression
du caractère recherché (Dilday, 1986 ;Altman
etal,
1987 ; Rooney etal,
1991), nous avons décidé desuivrelavoietrispécifique. Dansdetelshybrides,tous les chromo¬
somes de l'espèce donneuse australienne sont confrontés au
génome deG.hirsutum avec unehauteprobabilitéderecombinai¬
son,grâceà
l'utilisation
decroisementsponts.Cescroisementsfontintervenirune espèce appartenant à un des deux génomes
ances-traux
(A
ouD)
deG.hirsutum.Nousavonschoisid'utiliser
l'espècediploïde sauvageaméricaine G.
raimondii
commepontpour créerunhybride trispécifique
ACDD
carlegénomeD
(auquelappartientG.
raimondii)
montre une fortedistancephylétiquepar rapportaugénome C alors que la distance phylétique entre le génome
A
(espèces diploïdes asiatiques) et le génome C estnettementmoins
grande(Endrizziet
al,
1985).Au
coursdesdernièresannées,denouvellesstratégies desélectionbaséessur
l'utilisation
demarqueursdel'ADN
moléculaire ontétéproposées pour réduirele tempset lesefforts nécessairesau déve¬
loppementdenouvelles variétés. Lesprincipes
d'utilisation
detelsmarqueursontété décritsen détailchez de multiplesplantes culti¬
véespardenombreuxchercheurs(Tanksleyet
al,
1989 ;Patersonet
al,
1991 ; Dudley, 1993 ; Lee, 1998). Cependant, les rapportsconcernant
l'utilisation
de tels marqueurs dansdestravaux d'amé¬lioration
génétique ducotonnierrestentrelativementraresquand onconsidèrel'importanceéconomiquedecetteculture.La
RAPD
aétéutilisée pour caractériser des cultivars de cotonnier
(Multani
etLyon, 1995), pour évaluer la variabilité au sein de variétés élites
(Tatieni et
al,
1996 ; Iqbaletal,
1997) etpourassisterlaréalisa¬tion
d'un
programme de sélection récurrente à partir d'hybridesinterspécifiques(Mergeaiet
al,
1998). La techniqueAFLP
est uti¬lisabledans lesmêmesconditionsd'application queles marqueurs
RAPD.
Elle
est en général considérée comme plus fiable et plusG.Mergeaiefal. Sélection de cotonniersàteneur variabledegossypoldans ses organes T 1 13
grandnombre demarqueurs générésparréaction(Voset
al,
1995).Peud'applicationsdesmarqueursRFLPsontmentionnées(Wanget
al,
1995 ; Shappley etal,
1996 ;MeredithetBrown, 1998). UnecarteRFLPducotonnierestactuellementenconstruction(Reinisch
etal. 1994)et
offre
unnouveloutil
pour analyserl'introgressiondematériel génétique.
L'emploi
de ces différentestechniques est trèsutile pour évaluer ledegréde
similitude
génétiqueexistantentre lesmatérielsissusdurétrocroisementd'hybrides interspécifiquesetle
cotonniercultivé ainsiquepourcartographierlessegments
d'ADN
d'espèces diploïdes donneuses introgressés chez les différents
hybrides tétraploïdes obtenus dans le cadre de programmes d'hy¬
bridation interspécifique.
Matériel
et
méthode
Le matériel végétal comprend l'hybride trispécifique G. hirsutum x
G. raimondii
x
G. sturtianum et ses parents. Le schéma d'obtentiondétaillédel'hybridetrispécifiqueest présentédansMergeaietal.(1997).
Cethybrideaétérétrocroisépar lesvariétésC2et stam
F
de G. hirsu¬tum pour donner une descendanceBCt, BC2,BC2S1 etBC3(fig. 1).
HRSxG.hirsutum
I
BC1 xG.hirsutum\
autofécondation BC2 xG.hirsutum\
BC2S1 BC3 I Figure1Schémasuivi pour l'obtentiondu matériel analysé.
BC,,BC2, BC3=hybridesrétrocroisés de Ve,2eet3egénération.
BC2S,=matériel issu del'autofécondationd'unhybriderétrocroisé de2egénération.
114T Desmodèles biologiques à l'amélioration des plantes
Lescroisementsontétéréalisés en
utilisant
le mélanged'hormonesproposé par
Altman
(1988) : 100 mg.l-1 d'acide naphtoxyacétique+ 50
mg.H
d'acide gibberellique. La majorité des embryonshybrides a été cultivée in
vitro
après maturation complète de lagrainesurle
milieu
deStewartetHsu(1977)demanièreàgarantirleurbonnegerminationetun bon démarragedesplantules.Laden¬
sitédeglandesàgossypolsur lesgrainesproduitespar
rétrocroise-ment a été évaluée en utilisant une échelle variant de 0 pour les
grainestotalementdépourvuesdeglandeà 10pourlesgrainesdont
la densité de glandes était semblable à celle de l'espèce cultivée.
L'évaluationdeladensitéenglandesàgossypolaétéréaliséeaprès
élimination
des téguments et trempage de l'amande pendant uneheure dans de l'eau stérile. Lesanalyses méiotiques desmatériels
produits ont été réalisées sur des boutons floraux fixés pendant
72 heures dansla solutiondeCarnoy (ethanol95%:chloroforme:
acide acétiqueglacial,6:3:1
v
:v:v).Au
moins26cellulesmèredupollen ontétéanalyséespourchaquegénotype(Vrohet
al,
1998).La teneuren gossypol des graines a été évaluéepar
chromatogra-phie àhaute performanceen phase
liquide
en adaptantla méthodeproposée parMarquiéetBourély (1991) pour réaliserune analyse
graine pargraine.
Lateneurenterpénoïdesdesboutons
floraux
aétéévaluéeparchro-matographie à hauteperformanceen phase
liquide
aumoyen delaméthode proposéepar Stipanovic etal. (1988).
L'ADN
génomiquetotaldesplantes obtenues aétéextraitenutili¬santlaméthode développéeparVroh
Bi
etal. (1996).Les réactions
AFLP
ont été réalisées enutilisant
lekit
d'analyseAFLP
I
(Life
ScienceTechnologies, Merelbeke, Belgique)et selonle protocoleproposéparleproducteur.Les cinqcombinaisonssui¬
vantesde sondesontétéutilisées danscette étude:
Cl
= EcoRl +AAC/Msel
+CAA,
C2
=
EcoRl+
AAC/Msel +
CTT,C3 =EcoRl
+
AAG/Msel
+ CTT,C6 =
£coRI
+ACT/Msel
+CAG,C9 =EcoRl +
ACG/Msel
+ CTA.La présence (1)ou l'absence (0) des bandes
AFLP
a éténotée deG.Mergeaiefal. Sélectionde cotonniersà teneur variable de gossypol dans ses organes T 1 15
en utilisant le
coefficient
de Jaccard. Un dendrogramme basé surces coefficients a été construit en
utilisant
la méthodeUPGMA
(unweighted
pair
groupmethod average) surlelogiciel
Systatver¬sion 8.0 (SPSS Inc. Chicago,111.).
L'analyse RFLPaété effectuéeen utilisant49 inserts sélectionnés
surlacarteRFLPdeReinisch et
al
(1994).Aprèsamplification
parPCR, ces inserts ont été utilisés comme sondes RFLP selon la
méthodedécriteparVroh biet
al.
(1999 b).L'introgression de fragments
d'ADN
en provenance des espècessauvages a été évaluée chez les hybrides en analysant les
profils
montrant un polymorphisme entre les espèces parentales pour la
combinaisonsonde/enzymetestée.Quandla dispositiondesbandes
de
l'hybride
et de leur descendance rétrocroisée était similaire àcelleobservéechezleparent sauvagepourlesmarqueursRFLP, les
résultatsontétéconsidéréscommeindiquant une introgression
d'un
fragment du chromosome du parent sauvage au niveau du locus
RFLPconcerné.LesmarqueursRFLP flanquants, du marqueursup¬
posé positif, ont ensuite été vérifiés quand ils étaient disponibles
pour déterminerla
taille
approximativedessegmentsintrogressés encentimorgans.Quandlesmarqueursadjacentsn'étaientpaspositifs,
il
a étésupposéquelarecombinaisonavaiteulieujusteaumilieu.
I
1
Résultats
Production
de plantes
introgressées
Lestableaux 1et 2 reprennentrespectivementlenombre
d'individus
obtenusàchaquegénérationderétrocroisementetla
distribution
defréquence des densités de glandes observées chez ces hybrides.
Surles51 grainesBC, issuesde
l'hybride
HRS,seulement3(6%)étaient totalement démunies de glandes à gossypol (niveau 0).
La distributiondefréquencedesdensitésdeglandesàgossypolchez
le restedesgrainesBC)présentait uneformeassymétrique avec une
116' Des modèlesbiologiques à l'amélioration des plantes
BC,,BC2,BC3 =hybrides rétrocroisésde1re,2° et3egénération.
BC2S,=matérielissude l'autofécondation d'un hybride rétrocroisé de2egénération.
Années 1994 1995 1996 1997 Total BC, Nombre Nombre graines plantes utilisées adultes 17 6 13 0 9 0 12 10 51 16 BC2 Nombre Nombre graines plantes utilisées adultes 6 0 3 3 21 11 30 14 BC2S, Nombre Nombre graines plantes utilisées adultes 18 11 18 11 BC3 Nombre Nombre graines plantes utilisées adultes 6 5 6 5 ITableau 1
Nombredeplantesproduites àpartirde graines
obtenuesenrétrocroisant l'hybride HRS.
Classes dedensité 0-3 4-6 7-10 Total BC, 23 19 9 51 BC2 6 10 1 17 BC2S1 10 5 3 18 BC3 4 11 4 19 ITableau 2
Distributionde ladensité de glandesà gossypoldesgraines chezladescendancedel'hybrideHRS.
(niveaux 2 à 5). Un nombre très variable de plantes adultes a été
obtenuà
partir
desgrainesBCj
enfonctiondeleurannée demiseenculture (tabl. 1). Après
l'obtention d'un
nombrerelativementélevédeplantes adultesla lre année, aucuneplanteadultene
fut
produitelesdeuxannéessuivantesmalgrélaculture
in vitro
systématiquedesembryonsmatures. Ceproblèmepeutsansdouteêtreattribuéà une
forte dormance des graines qui avaient été cultivées moins de six
moisaprèsleur récolte. Pouréliminercettedormance supposée, les
semis furent retardés de deux mois en 1997 et toutes les graines
furentplongées pendantdeux minutes dans un baind'eau à 70 °C
avantd'être cultivées in vitro.Ces mesurespermirentuneaugmen¬
tation considérabledu tauxdeproductiondeplantes adultesà
partir
de graines
BCj
(de 0 à 50 %).Toutes les plantesBC!
issues degraines présentant unefaibledensitédeglandes(niveaux0à3)ont
G.Mergeaiétal. Sélectiondecotonniersàteneur variabledegossypoldans ses organes 117
densité de glandesnormale. Parmi toutes les plantes issues deces
rétrocroisements, un seul génotype a produit des graines BC2. La
majorité de celles-ci montraientunedensité de glandes àgossypol
faible à intermédiaire (tabl. 2). Seulement6 plantes adultes furent
obtenuessurun
total
de21 graines BC2. Deuxdeces6plantesontdonné 18 graines BC2Si et 19 graines BC3, avec à nouveau une
majorité d'entrés elles présentant une densité de glandes faible à
intermédiaire. La
fertilité
du matériel rétrocroisé s'est amélioréesensiblement à mesure de l'avancement dans les générations. La
colorationdupollenàl'acéto carmin (tabl. 3)adonnédesrésultats
très bas chez
l'hybride
trispécifique et chez sa descendanceBCi
(moins de 10 % de grains colorés). Ces résultats sesont sensible¬
ment améliorésen BC2(jusqu'à60 % de grainscolorés) et en BC3
(jusqu'à80% de grains colorés). Enmoyenne, quatre croisements
ont éténécessaires pour obtenir une graine BC2 tandis
qu'un
seulrétrocroisement d'une plante BC2 a donné environ 5 graines BC3
(donnéesnonmontrées). Les plantesBC^S, ontproduitenmoyenne
moinsd'une graineparrétrocroisement ;leurniveau de
fertilité
estdonc nettementplusfaiblequeceluidumatérielBC3.
BC,,BC2,BC3=hybrides rétrocroisés de1re,28et3egénération. BC2S, = matériel issudel'autofécondationd'unhybriderétrocroisé
de2egénération/nombre = numéro du génotype analysé au sein dechaque génération. Génotypes HRS BC1/1 BC2/1 BC3/1/1 BC3/1/4 BC3/1/5 BC3/1/8 BC3/1/12 BC2S1/6 BC2S1/8 BC2S1/13 BC2S1/14
Configurations chromosomiquesàla MétaphaseI I 14,40 6,45 3,83 3,01 3,33 1,10 2 4,50 4,83 1,71 15,80 II 17,03 22,56 3,83 23,55 25,30 23,90 25,43 24,60 22,66 22,73 24,72 15,80 III 0,93 0,3 23,61 0,30 0,14 1 0,10 0,23 0,70 0,60 0,21 1,60 IV VI 0,10 0,07 0,10 0,31 0,51 0,07 Nombrede chromosomes 52 53 52 52 54 54 52 54 52 52 52 52 Tétrades normales 124 808 820 807 980 1000 850 252 854 910 823 1000 Tétrades anormales 876 192 180 193 20 0 150 748 146 90 177 0 %pollen fertile 8,9 9,5 60,5 67,5 54,0 95,0 47,5 79,6 45,3 78,9 96,2 88,4 ITableau 3
Microsporogenèse et fertilité polinique chezl'hybrideHRSet sadescendance.
118T Desmodèlesbiologiquesà l'amélioration des plantes
Certaines plantes BC3 et
BC^
sont auto-fertilesmême sansl'ap¬plication
derégulateursdecroissanceaumomentdelapollinisation.Leur
descendanceserautilisée pourévaluerle déterminismedel'in¬hibition
de la synthèse du gossypol dans la graine. Les résultatsobtenus
jusqu'à
présent laissent penser que ce caractère est sansdoutesousla dépendance
d'un
nombrerestreintde gènesdominants.Plus des deux tiers des graines produites à chaque génération de
rétrocroisement présentent une
diminution
importantede leurden¬sité de glandes à gossypol alors que le restedes grainesproduites
montreunedensité de glandessimilaireàcelledel'espècecultivée.
Analyse cytogénétique
du
matériel
produit
L'analyse cytogénétique de la descendance de
l'hybride
trispéci¬fique
amisenévidenceune trèsgrandevariationdanslenombredechromosomes chez les plantes
BCi
etBC2.Suruntotalde 8plantesBC]
analysées, 3présentaient entre2 et4chromosomes surnumé¬raires et uneplante secaractérisait par l'absencedetrois chromo¬
somes(donnéesnonmontrées). Les autresplantes étaienteuploides
avec2n = 4x =52 chromosomes (Vroh
bi
etal., 1998). La planteBCj
qui
aproduitune descendanceBC2secaractérisaitpar un hautniveaud'association chromosomique(bi,
tri,
quadriethexavalents)enmétaphaseI.Elle montraitégalementun nombre moyenélevéde
chiasmata, indice de fréquents échanges de matériel génétique
(tabl. 3). Deux des trois individus BC2 que nous avons analysés
cytogénétiquement étaient euploides. Le dernier présentait seule¬
ment49 chromosomes etétait complètement stérile. Les premiers
résultats de l'analyse cytogénétique des individus
BC^
et BC3montrent que la grande majorité de ces génotypes est euploïde
(2n
= 4x =
52)mais que certainsd'entre euxprésententégalementdeschromosomesadditionnels (tabl. 3).
Quantification de l'expression
du
caractère recherché
Lestableaux4et5donnentlesteneursenterpenoïdes observéesau
G.Mergeaiefal. Sélectiondecotonniersàteneurvariabledegossypoldansses organes T 119 Génotype Parents G.hirsutum G.raimondii G.sturtianum Allohexaploide intermédiaire [G.hirsutum xG.sturtanum]2 Descendance rêtrocroiséede HRS BC2S,/9 BC3/9 Nombre boutons analysés 6 3 3. 2 5 1 Teneur totaleen terpénoTdes mg.kg-' 254 1164 23 304 254 236 G mg.kg-' 60 1056 9 81 160 166 H1 mg.kg-' 38 28 22 21 H2 mg.kg-' 64 24 24 H3 mg.kg-' 25 53 8 6 H4 mg.kg-' 30 66 15 16 HGQ mg.kg-' 36 108 13 76 26 4 ITableau4 Teneuren terpénoides (G=gossypol,H1,H2, H3,H4 =Heliocides,
HGQ=hémigossypolone)desboutonsflorauxdes parents
etde ladescendance rêtrocroiséedel'hybrideHRS.
BC3=hybride rétrocroisé de3egénération.
BC2S, =matériel issu del'autofécondation
d'unhybride rétrocroisé de2egénération/nombre=numéro
dugénotype analysé
auseindechaque génération.
Génotype Parents G.hirsutum G.raimondii G.sturtianum Allohexaploide intermédiaire [G.hirsutumxG.sturtianum]2 Descendance rêtrocroiséede MRS BC2S,/1/9 BC3/9 Nombre degraines analysées 16 6 5 9 16 9 Teneur moyenne mg.kg-' 9 700 23300 6 300 3300 4 500 Teneur minimale mg.kg-' 6 700 19150 <6 70 480 1500 Teneur maximale mg.kg-' 14000 26940 13 570 8750 6000 Ecart-type mg.kg-' 1800 3400 6 100 2200 1400 Coefficient devariation % 18,4 14,8 100 56,6 66,2 31,2 ITableau 5
Teneurtotale en gossypol desgrainesdesparents
et de ladescendancerêtrocroiséedel'hybride HRS.
BC3=hybride rétrocroisé de3egénération.
BC2S, =matériel issudel'autofécondation
d'unhybride rétrocroisé de2egénération/nombre=numéro
dugénotype analysé
120 Des modèles biologiquesàl'amélioration desplantes
matériels BC3 et BC2Sj sélectionnés à Gembloux. Toutes les
plantes analyséesprésentent une teneurtotale enterpénoïdes dans
lesboutons
floraux
similaire
àcelledel'espèce cultivée.Lateneuren gossypol a été évaluée dans un nombre
limité
de graines pargénotype (de5 à 16). Les résultats obtenus montrentque leméca¬
nisme inhibantlasynthèsedegossypol dans lesgraines de G.stur¬
tianumfonctionneaussi dansdesstructures synthétiquestelles que
l'allohexaploïde [G. hirsutum x G. sturtianum] 2. Environ un
dixième des graines (2 sur20) produites parle meilleur génotype
BC2Sj issudel'autofécondation d'une planteBC2contenait moins
de 500 mg de gossypol par kg. Selon le groupe consultatifde la
FAO etde
l'OMS
responsabledel'établissementdesnormes rela¬tives à la valeur alimentaire des protéines, la teneuren gossypol
libre
desproduits comestibles issus degraines decotonniernedoitpas dépasser 600 mg.kg-' pour que ces produits soient consom¬
mables sans risque parles populations humaines. Les plantes que
nous avons obtenues constituent donc un matériel très intéressant
pour développerdescotonniersprésentantunetrèsfaible teneuren
gossypoldans
la
graineetune hauteteneurenterpénoïdes danslesorganesreproducteursdela plante.
Utilisation
des marqueurs
de
l'ADN
moléculaire
Le nombre de bandes généréespar chaquecombinaisonde sondes
AFLP
chezlesespècesparentalesvariaitde72pour la combinaisonC6
(EcoRl
+ACT/Msel
+ CAG) à 132 pour la combinaison C2(EcoRl
+AAC/Msel +
CTT),avecun nombre moyende96 bandespar combinaison.Lescinqcombinaisonsde sondesont
amplifié
unnombretotalde477 fragments
d'ADN
parmilesquels417(87,4%)étaient polymorphes. L'introgression de bandes
AFLP
spécifiquesdechaqueparentapermisdeconfirmer
l'origine
interspécifiquedel'hybride
HRS. Sur les 70fragments spécifiques de l'espècedon¬neuse G. sturtianum, 45 étaientprésentschez
l'hybride
HRS et43seretrouvaientdanssadescendance
BC,.
A
côtédes bandesspéci¬fiques de chaque espèce parentale (G. hirsutum, G. sturtianum,
G.
raimondii),
quelques bandesAFLP
polymorphes étaient com¬munes àun ou deuxparents. Lesmarqueursqui nesontpas trans¬
G.Mergeaietal. Sélectiondecotonniersàteneur variable de gossypol dans sesorganes T 121
deschromosomes
qui
nesontpasinclusdans lesgamèteslorsdelaméiose, ou constituent des marqueurs
qui
subissent des recombi¬naisonsmodifiantles sitesdeliaisondessondes. Quatremarqueurs
spécifiques de G.sturtianum(génomeC) étaient systématiquement
présents chez toutes les plantes obtenues par rétrocroisement de
l'hybride
HRS. De tels fragments peuvent provenir de chromo¬somesquisontpréférentiellement transmisàladescendancedu
fait
de leur haute
affinité
d'appariement avec les chromosomes desautres parents, ou correspondentà des séquences répétées
d'ADN
distribuées dansl'ensembledugénome de l'espècedonneuse.
Ledegréd'apparentementdesgénotypesétudiésa étéévaluépar une
analysedesimilaritéenutilisantlecoefficientdeJaccard(1908).Le
tableau 6montre la matricede similaritéobtenue entreles espèces
parentales,
l'hybride
trispécifiqueetlesdescendances obtenuesparrétrocroisement. Tous les individus BC2, BC2Sj et BC3 repris au
tableau 6 proviennent d'uneseule plante
BCj
obtenue en croisantHRS parle
cultivar
C2de G. hirsutum. La similaritéentre l'espècecultivéeetlesparentssauvagesétait respectivementde29,5 %pour
G. sturtianum etde43,2 %pourG.
raimondii
cequiestconformeauxdonnéesdisponibles concernantl'apparentement existantentre
le sous-génome D de G. hirsutum et le parent diploide américain
(Endrizziet
al,
1985).Avec un tauxdesimilaritéde 66,2 %, l'hy¬bride trispécifique HRS est plus proche du parent
cultivé
que lesdeuxespècesdiploidessauvagesutiliséespoursacréation.Le
den-drogramme générépar l'analyse
UPGMA
desprofils
demarqueursobtenus pourles génotypes analysés est présenté dans la figure 2.
Lespositionsdesespècesparentales danscedendrogrammesont en
accord avec la classification phylogénique actuelle du genre
Gossypiumbaséesurdesdonnéesmorphologiquesetcytogénétiques
(Endrizzi
étal,
1985). L'espècediploïdeaustralienne estlapremièreà être séparée, suivie par G. raimondii. Le cotonnier cultivé est
groupé avec
l'hybride
trispécifiqueet sadescendance obtenue parrétrocroisement. L'examendesgénérations obtenuespar
rétrocroise-ments successifsde l'hybride trispécifique montreque l'augmenta¬
tion du degré de similarité chez ces matériels n'est pas évidente,
surtoutdans le casdessouches obtenues parautofécondation
d'un
individu
introgressé issud'un rétrocroisement. L'analysedelasimi¬larité génétique au moyen de marqueurs
AFLP
devrait donc per¬122' Des modèles biologiques à l'amélioration des plantes
1
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Relationsgénétiques entre lesespècesparentales (G. hirsutum,
G.raimondii, G.sturtianum),l'hybrideHRS et sadescendance
obtenueparrétrocroisement:dendrogrammeétablisurbase
del'analysedesdonnéesAFLPgrâceàl'utilisationde la méthode
UPGMAetlecoefficientdesimilaritéde Jaccard.
STURT =G.sturtianum,RAIM=G.raimondii, HIRS =G.hirsutum,
HRS =hybride trispécifique G.hirsutumxG.raimondii
xG.sturtianum. BC,,BC2, BC3=hybridesrétrocroisés
de1re,2eet3egénération, B^Sj =matériel issudel'autofécondation
d'unhybriderétrocroiséde2egénération/nombre=numéro dugénotypeanalysé ausein dechaquegénération.
124' Des modèles biologiques à l'amélioration des plantes
à
la
foislesplusintéressantsauniveau del'expressiondu caractèrerecherchéetgénétiquement les plus proches de l'espècecultivée.
Sur les 49 marqueurs RFLP analysés, 10 combinaisons sonde/
enzyme ontdétecté une introgression de segments
d'ADN
de l'es¬pècedonneuseG. sturtianum chez
l'hybride
trispécifiqueetchezsadescendanceobtenuepar rétrocroisementparG. hirsutum(tabl.7).
Groupes de liaison Chrsl Chrs10 Chrs15 Chrs 22 A07-U07 D04-Chrs10 D07-Chrs 5A U01 Marqueurs RFLP A1204 A1794 A1183 A1109 A1310 G1074 A1135 A1163 1535 M16-40 Enzymes de restriction EcoRl EcoRl Hindlll EcoRV Cfol EcoRl EcoRV EcoRl Xbal EcoRl
Présence (+),absence(-)desmarqueursG.sturtianum dans la descendance de l'hybride HRS
BC,(12) BC2(4) BCzS^IO) BC3(12)
+ + + + + + + + + +++ +- + + - +
ITableau 7
Distributiondesmarqueurs RFLPintrogressés
àpartirdel'espècedonneuseG.sturtianum
dansla descendanceobtenueparrétrocroisementdel'hybrideHRS.
Lenombre degénotypesanalysés àchaquegénération
estindiquéentreparenthèses.
Lesgroupesdeliaisons correspondent à ceux de Reinishétal.(1994).
L'analyse des
profils
RFLP indique que ces segmentsd'ADN
ontété introgressés à
partir
de 8 groupes de liaison de G. sturtianumprésents chez HRS. Les individusdes générations de rétrocroise¬
ment présentent une ségrégation pour ces marqueurs et aucune
descendancerêtrocroisée nelescontient tous.Enconsidérantl'en¬
intro-G.Mergeaiet al. Sélectiondecotonniers àteneur variable de gossypol dans ses organes T 125
gressés en provenance de G. sturtianum représente approxima¬
tivement50
cM
pourles 10combinaisons sonde/enzyme détectantune introgression. Une importantevariation est observéeentre les
sondes au niveaude la détection de segments introgressés dans la
descendancedeHRS.Parexemple,lasondeA1204duchromosome
1apermisdedétecteruneintrogression chez 13
individus
delades¬cendanceobtenue parrétrocroisement de HRS alors que la sonde
M
16-40du groupe deliaisonU01n'a
permisdedétecter une intro¬gression quechezunseulgénotype.
Le
nombredefragmentsintro¬gressés varie également fortement entre les générations. Tous les
10fragments
d'ADN
étaient présents parmi lesindividus
issus du1er rétrocroisement de HRS, alors queleur nombre étaitbeaucoup
plus faible dans les générations ultérieures (BC2, BC2S! et BC3).
L'analysedesintrogressionsenprovenancedel'espècepont montre
la présencede
huit
segmentsdechromosomede G.raimondii
chezHRS. En BC3, nous avons retrouvé 5 des 8 marqueurs de cette
espèce.
L'introgressiondesegments
d'ADN
àpartir
des espècessauvagesaétédedeux types. Dansla plupartdescas, lesallèles RFLPcarac¬
téristiquesde l'espèce cultivée etdel'espèce diploïde étaientpré¬
sents et les individus de la descendance étaient hétérozygotes au
niveau du locus introgressé. Exceptionnellement, un des allèles
RFLPde G. hirsutumaétéremplacépar
l'allèle
correspondantdel'espèce sauvage cequiestunindicederecombinaison réciproque.
1
Discussion
Nos résultats montrentque les espèces diploïdes australiennes du
génomeCpeuventêtreexploitées avecsuccès pour
l'amélioration
dela principaleespèce decotonniercultivégrâceàla création d'hy¬
brides trispécifiques incluant une espèce
diploide
américaine(génomeD) commepont. Chezdetelshybrides,lenombre
d'appa-riements observés entreleschromosomesdesgénomesAh etC est
suffisantpour permettrel'échange dematériel génétique etle pro¬
126T Desmodèlesbiologiques à l'amélioration desplantes
Cette méthode nous a permis
d'obtenir
par rétrocroisement del'hybride
trispécifique HRS des plantes introgressées présentant unediminution
drastiquedeleurteneur engossypoldanslagraine(moins de 600mg.kg-1 degossypol)et une teneuren terpénoïdes
normaledansleursboutons floraux. Uneamélioration sensiblede
l'appariement
chromosomique et de lafertilité
des génotypesintrogressés a été constatée au
fur
et à mesure de l'avancementdans les générations de rétrocroisement. Un nombre restreint de
gènes dominants semble contrôler
l'inhibition
de la synthèse dugossypol dans la graine. Ces plantes constituent un matériel très
intéressant pour le développement de variétés commerciales de
cotonnier présentant une très faible teneur en gossypol dans la
graine etuneteneurnormaleenterpénoïdes danslesorganesrepro¬
ducteursde
la
plante.Les marqueursmoléculaires de
l'ADN
sont desoutilsprometteurspour suivrel'introgressiondesegmentsdechromosomes d'espèces
sauvagesliés àdescaractères intéressantschezdeslignées amélio¬
réesdela principaleespèce decotonnier
cultivé.
Nous avonsutilisélesmarqueurs
AFLP
pour déterminerlasimilarité
existantentre dif¬férents génotypes introgressésetla variété de G. hirsutum utilisée
dansunprogrammede sélection récurrenteréalisé à
partir
del'hy¬bride trispécique HRS. La classification des espèces parentales
obtenue au moyen des données généréespar les marqueurs
AFLP
estcohérente avec lesconnaissancesactuellesrelatives àlaphylo¬
génie du genre Gossypium. Seulementcinq combinaisonsde sondes
ont
suffi
pourobtenir 477 fragment AFLP,cequiestnettementplusélevéqueles375 bandesproduites sur le mêmematérielvégétalen
utilisant
30sondes RAPD(Mergeai etal,
1998).Bienquelepour¬centage de bandes
AFLP
polymorphes (87,4 %) soit légèrementplus faible que dans le cas de laRAPD (90,4 %), les marqueurs
AFLP
sontplus efficacespourdétecterdesbandesspécifiques chezles espèces diploïdes sauvages. Ainsi, 70 marqueurs
AFLP
spéci¬fiques de l'espèce donneuse (G. sturtianum) ont été détectéspour
seulement 49 marqueurs RAPD spécifiques de cette espèce. Nos
travaux confirment donc
l'intérêt
de ce type de marqueurs pourassister la sélection de génotypes introgressés issus d'hybrides
G.Mergeaiétal. Sélection decotonniers àteneur variabledegossypol danssesorganes T 127
L'utilisation
demarqueursAFLP
etRFLP spécifiquesa permisdemontrerquelacompositiongénomique de
l'hybride
trispécifiqueetde la majoritédesdescendances obtenuespar rétrocroisementétait
du type
ACDD,
les chromosomes D provenant de G. hirsutum (2(AD)i)
ou del'espècepontG.raimondii
(2D5).Aucunedistinc¬tion
entre lesdeux types dechromosomesD n'était
possibledansnosrecherchescytogénétiques précédentes du
fait
deleur similarité
de forme et de
taille
(VrohBi
et al., 1998). Le polymorphismegénérépar les sondesRFLPnous apermis
d'identifier
assezfacile¬mentlessegments de chromosome introgressés.
L'hybridation
desmarqueursRFLPa également montréque lamajorité des descen¬
dancesétaienthétérozygotespourlesallèlesparentaux.Cetteobser¬
vation est cohérente avec
l'inclusion
de chromosomes entiers desparents sauvages et/ou avec une introgression par translocation.
Néanmoins, sur les 11 combinaisons sonde/enzyme détectant une
introgression à
partir
desparents sauvages,trois combinaisons ontmisenévidence desrecombinaisonsréciproques.Le nombreimpor¬
tant d'univalents,de multivalents et de chiasmata observé lors de
l'analyse cytogénétiquedecematériellaissaitprévoir l'existencede
ces deux typesd'introgression.
Nostravaux constituent la première tentativedecaractérisationde
l'introgressionauniveaumoléculairede segments dechromosomes
d'une espèce
diploide
australienne chez la principale espèce decotonnier cultivé.
La
capacité de suivre des régions de chromo¬somessurplusieursgénérations dansladescendance decroisements
dirigés devrait permettre
d'identifier
les liens existant entre cesfragments etdescaractèresagronomiquesimportants.
Le
constatauniveau des plantes analysées d'une ségrégation à la
fois
pour desmarqueurs RFLP caractéristiques de segments de chromosomes
connusetpour lecaractèrerecherché,devrait permettre
d'aboutir
àterme àla cartographiedu caractère« faible teneurengossypolde
lagraine, hauteteneurengossypol dela plante».
Remerciements Cetravailaétéfinancéparla convention2.4565.95 du«Fondsdelarecherchefondamentalecollective»deBelgique.
128T Des modèlesbiologiques à l'amélioration desplantes
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