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NATURE, SCIENCE ET TECHNIQUE

par F. Chastellain

Notre Société, qui fête cette année le 100

e

anniversaire de sa fonda- tion, est vouée à l'étude des sciences naturelles dans le cadre de notre cher Canton. Au cours de ce premier siècle d'existence, les conditions de cette étude se sont grandement modifiées : en 1861, le Valais venait d'être relié par chemin de fer à Lausanne et par cette ville aux autres centres du Plateau Suisse, mais si la plaine du Rhône devenait ainsi facilement accessible, il n'en était pas de même de la partie haute de la vallée, non plus que des vallées latérales, qui exigeaient pour les par- courir du temps et une résistance physique satisfaisante. Il suffit pour s'en rendre compte de relire certains des « Voyages en zig-zags » de l'excellent Topffer. Aussi, seuls les premiers alpinistes — pressés d'en gravir les hautes cimes — ou de savants naturalistes hantaient-ils les sentiers muletiers qui conduisaient aux localités montagnardes éloignées de la plaine. C'était le beau temps des découvertes : celle de la montagne et celle de la nature vivante qui s'y rattache, plantes et animaux. Par les travaux publiés dans son Bulletin, notre Société a beaucoup contribué à faire connaître les trésors naturels de ce pays exceptionnel, alpin sans doute, mais déjà méridional par certaines particularités de sa faune et de sa flore.

On peut se contenter d'apprécier, d'admirer, d'aimer cette Nature

qui nous environne et qui sous ses aspects divers est toujours belle si

l'on sait la regarder et la contempler et si l'on évite de lui porter atteinte

et de la troubler. Mais l'homme est d'esprit curieux, il se pose volon-

tiers des questions sur le pourquoi et le comment des êtres et des choses,

il cherchera des explications aux faits qui le frappent ou l'étonnent,

il établira des relations entre des manifestations qui au premier abord

n'apparaissent pas toujours comme liées. C'est là qu'intervient la

Science, dont le but est de dévoiler les secrets de la Nature. Comme

la Nature est immensément vaste et extrêmement complexe, puisqu'elle

s'étend jusqu'aux espaces infinis de l'Univers et qu'elle comprend aussi

bien les particules élémentaires infiniment petites de la matière que les

mondes presque sans limites (à notre échelle humaine) que sont les

galaxies innombrables qui parsèment l'espace, la Science pour l'étudier

s'est divisée en un certain nombre de disciplines réparties entre les

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Sciences naturelles (Géologie et Minéralogie, Zoologie et Botanique), d'une part, et les Sciences physiques (Physique et Chimie), d'autre part.

Mais n'oublions pas que ces divisions sont interdépendantes et que si dans le détail il est déjà impossible à l'homme de science de connaître à fond le compartiment qu'il a choisi d'explorer, il est cependant absolument nécessaire que dans les grandes lignes il soit informé de ce qui se passe dans les autres branches de la Science, sous peine, sinon, de ne plus mériter son titre de savant.

C'est, à notre idée, dans la liaison entre admirateurs de la Nature et scientifiques, et dans la fonction d'intermédiaire entre savants de diverses spécialisations, que nos sociétés régionales de sciences naturelles peuvent rendre les plus grands services. L'homme cultivé — celui qu'au 18

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siècle on désignait comme « l'honnête homme » — ne peut plus aujourd'hui se tenir au courant des progrès et des découvertes de sa- vants de plus en plus spécialisés et parlant un langage en grande partie incompréhensible aux non-initiés. Aimant et admirant la Nature, il voudrait en connaître les secrets, il désire qu'on lui en explique ce qu'il considère de haut et de loin comme des mystères, mais s'il est prêt à faire un grand effort de compréhension, il faut que l'explication soit mise à sa portée. C'est le fond du grand problème de ce que l'on nomme

« la vulgarisation scientifique ». Notre vénéré Président s'est dès long- temps engagé sur cette voie et chaque Bulletin annuel de la Murithienne nous démontre par ses communications multiples et variées combien il sait mettre à la portée de chacun ses connaissances étendues dans les diverses sciences naturelles. Nous ne lui en serons jamais assez recon- naissants.

La Science que nous invoquons, on l'appelle aussi la Science pure

pour bien la différencier de ses applications à l'usage des besoins, des

commodités et du confort de l'homme — applications que gère et gou-

verne la Technique — a comme but premier et essentiel de découvrir

de pénétrer et de révéler les secrets de la Nature. Il n'en résulte aucune

conséquence obligatoire d'ordre moral ou humanitaire. Sans doute le

chercheur, le savant, sera-t-il inévitablement amené à se poser la grave

question de la finalité universelle, si souvent évoquée et soulevée par les

philosophes. Il ne pourra y répondre qu'à la lumière de ses convictions

intimes, religieuses et spirituelles, mais sa réponse ne l'empêchera pas

de continuer ses travaux de recherches passionnées. Car nous ne pensons

pas que le savant puisse ne pas être passionné par ses préoccupations

professionnelles : la joie de la découverte est l'une des plus pures et

des plus enivrantes qui sont données à l'homme.

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Cette Science p u r e , désintéressée dans ses buts, q u e l'on cultive et enseigne dans nos Universités, ne p e u t c e p e n d a n t rester à l'écart des p r é o c c u p a t i o n s plus t e r r e à t e r r e , plus réalistes dira-t-on, de la plus g r a n d e p a r t i e des h u m a i n s qui e n t e n d e n t bien que la découverte des secrets de la N a t u r e serve en d e r n i è r e fin à la d o m i n e r et à améliorer le sort de ce « roseau p e n s a n t » — c o m m e le définissait P a s c a l — à l'origine si p a r f a i t e m e n t d é m u n i dans sa l u t t e contre des manifestations contraires, g é n é r a l e m e n t imprévisibles et souvent i m p a r a b l e s , engen- drées p a r cette m ê m e N a t u r e , insensible a u x souhaits et aux désirs des h o m m e s . I l en dérive donc nécessairement la Science a p p l i q u é e , la T e c h n i q u e .

Mais en a p p l i q u a n t les découvertes de la Science p u r e à la l u t t e contre la N a t u r e , ou t o u t au moins en i n t e r v e n a n t de m a n i è r e s m u l t i p l e s et diverses dans le m o n d e m a t é r i e l au sein d u q u e l nous sommes plongés, la T e c h n i q u e p a r un choc en r e t o u r inévitable s'oppose f a t a l e m e n t à la N a t u r e et t e n d à la modifier d'une m a n i è r e q u i n'est pas toujours h e u r e u s e et s o u h a i t a b l e .

Nous le savons, bien sûr, la N a t u r e q u i nous e n v i r o n n e n'est pas i m m u a b l e m e n t figée dans ses aspects. D e p u i s la Création du m o n d e , q u e l'on chiffre à q u e l q u e 5 m i l l i a r d s d'années, elle a m ê m e b e a u c o u p chan- gé et nos prédécesseurs de l'Age p a l é o l i t h i q u e vivant lors de la d e r n i è r e glaciation (celle de Wiirm, il y a 15 à 30 m i l l e ans) n e la reconnaî- t r a i e n t pas sous son a p p a r e n c e actuelle. Ces c h a n g e m e n t s inévitables à longue échéance et d ' u n e très g r a n d e e n v e r g u r e dans la suite des t e m p s , sont g é n é r a l e m e n t i m p e r c e p t i b l e s à l ' h o m m e dont la vie est bien t r o p brève p o u r qu'il puisse les enregistrer ou m ê m e en g a r d e r t r a d i t i o n - n e l l e m e n t la m é m o i r e . Des continents se sont formés, se sont divisés ou se sont soudés, des chaînes de m o n t a g n e s se sont élevées, l'érosion les a nivelées ou les a modelées, des glaciers immenses se sont é t e n d u s p u i s ont fondu en l i b é r a n t de grands territoires j u s q u e là i n t e r d i t s à l ' h o m m e . Les géologues p a r leurs études ont p u découvrir les grandes lignes de ces t r a n s f o r m a t i o n s ; les p r é h i s t o r i e n s ont r e t r o u v é les traces de l ' h u m a n i t é naissante e n t r e p r e n a n t sa l e n t e et difficile ascension vers u n avenir plus h e u r e u x q u e son présent, ses m e m b r e s — les h o m m e s de l ' é p o q u e des cavernes — c h e r c h a i e n t déjà à influencer les forces natu- relles p a r des opérations de caractère m a g i q u e (comme en t é m o i g n e n t les dessins gravés ou peints dans leurs grottes les plus secrètes).

Ainsi, dès les p r e m i e r s âges de l e u r présence sur la T e r r e , les h o m m e s sont entrés en conflit avec la N a t u r e , ils ont souhaité la plier à leurs désirs et à leurs volontés. Ils ne l'ont pas b e a u c o u p modifiée aussi long-

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t e m p s qu'ils n e se p r é o c c u p a i e n t — et p o u r cause — q u e de chasse et de p ê c h e .

Les cultivateurs et éleveurs de bétail de l'Age n é o l i t h i q u e (ou de la p i e r r e polie) p a r le d é f r i c h e m e n t ont c o m m e n c é à m o d e l e r leurs terres.

P l u s i m p o r t a n t e s ont été ensuite les interventions des p r e m i e r s in- dustriels p r o d u c t e u r s d ' a b o r d de b r o n z e et p l u s t a r d de fer : la réduc- tion des m i n e r a i s et la fusion des m é t a u x nécessitent de grandes quan- tités de c h a r b o n de bois et de vastes forêts ont d i s p a r u (dans les taillis actuels du pied du J u r a vaudois on a r e t r o u v é r é c e m m e n t les traces n o m b r e u s e s des anciens fondeurs de fer, q u i ont a n é a n t i de grandes étendues de futaies).

S o m m e t o u t e , c e p e n d a n t , l'action de l ' h o m m e n ' a p e n d a n t des m i l l é n a i r e s q u e très superficiellement modifié le cours des choses et la N a t u r e n ' e n a été q u e fort p e u bouleversée.

Seulement l ' h o m m e de m i e u x en m i e u x protégé contre les dangers p a r ses t r a v a u x , ses inventions, ses découvertes en u n m o t , a proliféré en suivant u n d é v e l o p p e m e n t en série g é o m é t r i q u e et a p e u p l é la T e r r e d'un n o m b r e toujours grandissant d'individus, de telle façon q u e le s u r p e u p l e m e n t q u ' i l faut envisager p o u r u n p r o c h e avenir pose de graves p r o b l è m e s d o n t nous avons eu l ' h o n n e u r et le plaisir de vous e n t r e t e n i r il y a d e u x ans. E n m ê m e t e m p s q u e cet « é c l a t e m e n t » de la p o p u l a t i o n d u globe, il s'est p r o d u i t — p a r voie de conséquence peut- ê t r e — u n d é v e l o p p e m e n t e x t r a o r d i n a i r e des sciences et o b l i g a t o i r e m e n t de leurs a p p l i c a t i o n s t e c h n i q u e s . C'est alors q u e les i n t e r v e n t i o n s de l ' h o m m e ont c o m m e n c é à m e n a c e r d ' u n e façon grave et p r o f o n d e l'inté- grité de la N a t u r e .

I l est nécessaire de s'en r e n d r e c o m p t e si l'on veut p a r e r à t e m p s à ce q u e ces i n t e r v e n t i o n s p e u v e n t avoir d'excessif, voire de d a n g e r e u x . Le sujet est vaste, p o u r le t r a i t e r en détail et à fond il f a u d r a i t écrire de gros volumes. N o t r e p r o p o s n'est ici q u e d ' a t t i r e r l ' a t t e n t i o n p a r q u e l q u e s exemples.

I l n e s'agit plus d'actions individuelles et de peu d'envergure. Ce sont de manifestations collectives et généralisées q u ' i l sera question.

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Commençons p a r les actions é c h a p p a n t à la volonté p r é m é d i t é e de l ' h o m m e , mais dues à sa présence toujours plus n o m b r e u s e , à son agglo- m é r a t i o n en cités toujours plus populeuses. Des déchets de p l u s en plus v o l u m i n e u x , des résidus sans a u c u n e valeur et gênants s'accumulent, d e v i e n n e n t e n c o m b r a n t s , salissants et d a n g e r e u x q u a n t à la santé pu-

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b l i q u e et aux êtres vivants, a n i m a u x et plantes. Ce sont les o r d u r e s ménagères, d'une p a r t , et les e a u x d'égouts, d ' a u t r e p a r t . On a été très l o n g t e m p s sans s'en t r o p p r é o c c u p e r : les villes n ' é t a i e n t pas bien pro- pres, la voirie n'existait pas ou n ' o p é r a i t qu'occasionnellement et rudi- m e n t a i r e m e n t . C h a c u n se débarrassait à sa façon de ses déchets, d o n t le volume p a r h a b i t a n t était d'ailleurs bien faible p a r r a p p o r t à ce qu'il est devenu.

A u j o u r d ' h u i , les déchets m é n a g e r s récoltés dans les villes, petites ou grandes, forment de gros tonnages si l'on s'en réfère au t a b l e a u suivant :

Récolte annuelle de déchets ménagers, en kg. par hab.

Allemagne 1957-58 180-220 kg.

D a n e m a r k 1957-58 220-260 kg.

G r a n d e - B r e t a g n e 1955 210-240 kg.

Pays-Bas 1957-58 150-170 kg.

Suisse 1957-58 150-170 kg.

Les statistiques renseignent aussi sur la composition de ces d é c h e t s ; p o u r la Suisse, elle est en m o y e n n e la suivante :

Chiffons, cuir, c a o u t c h o u c . . . . 2,2 % P a p i e r , c a r t o n 22,6 % Déchets de cuisine ( d o n t os = 1 %) . 50,0 % F e r et m é t a u x divers 3,5 % Verre 3,8 % Cendres, scories, tessons 17,9 % 100,0 %

Il n'est plus possible d ' a c c u m u l e r ces résidus dans des décharges ou sur des t e r r a i n s incultes, l e u r f e r m e n t a t i o n dégage des odeurs nauséa- b o n d e s , ils p e u v e n t r e n f e r m e r des microorganismes d a n g e r e u x p o u r la santé p u b l i q u e , enfin les pluies e n t r a î n e n t dans le sol des m a t i è r e s solubles qui souillent les n a p p e s d'eau souterraines ( n a p p e s p h r é a - tiques). I l faut s'en débarrasser d ' a u t r e m a n i è r e . L e u r t e n e u r en matières organiques, q u i p e u t varier e n t r e 25 et 40 % suivant la saison, a fait penser q u ' o n p e u t en t i r e r u n a m e n d e m e n t agricole (compost) b o n m a r c h é et efficace. Divers procédés de compostage ont été proposés, on a construit des installations qui n ' o n t pas toujours d o n n é e n t i è r e satis- faction et l'on ne sait pas b i e n encore si le p r o d u i t destiné à l ' a g r i c u l t u r e

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— m a r a î c h è r e surtout — p e u t ê t r e utilisé à la longue en g r a n d e quan- tités sans inconvénient et s'il p e u t ê t r e placé chez les c o n s o m m a t e u r s d'une façon régulière évitant de forts stockages. Il semble bien cepen- d a n t que la m a n i è r e la plus r a t i o n n e l l e de destruction des déchets ménagers est l'incinération, p r o d u c t r i c e de v a p e u r utilisable. C'est la solution a d o p t é e à L a u s a n n e , en p a r t i c u l i e r , et qui p e r m e t à diverses localités voisines de se débarrasser également de ces d é t r i t u s encom- b r a n t s .

P l u s dangereuses sont les eaux usées t r a n s p o r t é e s p a r les égouts j u s q u ' a u lac ou au cours d'eau le plus p r o c h e . L ' h a b i t a n t des villes est un g r a n d u t i l i s a t e u r d'eau (on p o u r r a i t m ê m e d i r e qu'il en gaspille u n e b o n n e p a r t i e !) et sa r a t i o n j o u r n a l i è r e est de plusieurs centaines de litres p a r j o u r . L'eau usée est chargée de matières diverses se répartis- sant en m o y e n n e c o m m e suit :

Composition moyenne des eaux usées (en gr./hab. et j . )

Matières organiques se déposant 40

en suspension 20 en solution 50

minérales

20 10 50

totales

60 30 100

110 80 190 L e u r composition i n d i q u e bien q u ' i l est difficile de les clarifier et de les é p u r e r à peu de frais. C o m m e elles c h a r r i e n t de grandes q u a n t i t é s de m a t i è r e s o r g a n i q u e s , riches surtout en substances azotées (près de 5 gr. N p a r h a b . et p a r j . ) , le pouvoir r é g é n é r a t e u r n a t u r e l des lacs et des cours d'eau dû à l'oxygène dissous ne suffit plus à l e u r destruction, l'azote se dégage c o m m e a m m o n i a c , le soufre c o m m e hydzogène sulfuré et dans les lacs il se forme des couches profondes l i t t é r a l e m e n t empoi- sonnées où la vie n'est plus possible; en m ê m e t e m p s les couches plus superficielles s'appauvrissent en oxygène et les poissons s'y raréfient.

Les lacs de Baldegg et de Hallwil ont été les plus atteints, ceux de M o r a t et de Z u r i c h m o n t r e n t u n e souillure grandissante, le L é m a n à son t o u r est t o u c h é .

La c o n s o m m a t i o n d'eau p u r e toujours grandissante ne p e u t plus dans les grandes villes être assurée p a r la c a p t a t i o n de sources, on doit puiser l'eau des lacs ou des rivières. Non seulement la p r o t e c t i o n de la N a t u r e est en cause, mais aussi l'hygiène p u b l i q u e . La législation fédérale

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impose l'obligation d'une r é g é n é i a t i o n des e a u x usées avant l e u r évacua- tion dans les lacs et les cours d'eau. C'est u n e o p é r a t i o n qui est coûteuse et qui doit se faire dans des installations à échelle industrielle, peut-on dire. Ici aussi les résidus sont i m p o r t a n t s et leur destruction s'impose : on p e u t les a d d i t i o n n e r aux déchets m é n a g e r s en compostage ou les i n c i n é r e r avec eux. Là encore, le choix du p r o c é d é est difficile.

Un p r o b l è m e intéressant est lié à la question de l ' é p u r a t i o n des eaux usées. Depuis un q u a r t de siècle environ, on a mis au p o i n t des p r o d u i t s c h i m i q u e s détergents, c'est-à-dire susceptibles de r e m p l a c e r le savon dans les nettoyages. Avec l'extension de ce que l'on a p p e l l e la pétroléo- c h i m i e (l'industrie des dérivés du pétrole) la consommation des déter- gents s'est c o n s t a m m e n t accrue, au d é t r i m e n t du savon q u e ces p r o d u i t s sont en t r a i n de s u p p l a n t e r .

E n Suisse, où la c o n s o m m a t i o n de p r o d u i t s de nettoyage est p a r h a b i t a n t l ' u n e des plus élevées d u m o n d e (ex-aequo avec les Etats-Unis, avec 12,8 kg. p a r an, après le D a n e m a r k et la G r a n d e - B r e t a g n e ) , il a été utilisé en 1959 près de 30 000 t. de savon, soit 6 kg. p a r h a b i t a n t , et près de 35 000 t. de détergents, soit 7 kg. p a r h a b i t a n t . Mais si les savons, qui sont p r é p a r é s à p a r t i r de graisses animales ou d'huiles végétales, p e u v e n t ê t r e facilement décomposés p a r le pouvoir auto-régénérateur des eaux courantes, il n ' e n va pas de m ê m e p o u r les détergents d o n t la persistance est b e a u c o u p plus longue et qui en s'accumulant p r o d u i s e n t des mousses e x t r ê m e m e n t gênantes. L'effet de mousse est accru dans les e a u x sales, où il suffit, p a r e x e m p l e , de 0,3 mg de m a t i è r e active p a r l i t r e p o u r p r o d u i r e u n e mousse persistante, alors q u e dans l'eau p u r e il en faut 10 mg. E n Allemagne et en G r a n d e - B r e t a g n e , où l ' e m p l o i des détergents s'est plus r a p i d e m e n t généralisé q u ' e n Suisse, le p r o b l è m e de l e u r persistance et des mousses qu'ils p r o d u i s e n t a été très sérieuse- m e n t é t u d i é . On en a r e t r o u v é des traces dans l'eau p o t a b l e puisée dans les fleuves, m ê m e a p r è s é p u r a t i o n soigneuse des e a u x usées q u e l'on y déverse.

Les fabricants de détergents, q u i n ' a v a i e n t pas prévu u n e telle incidence de l ' e m p l o i de leurs p r o d u i t s , se sont ingéniés à en découvrir de moins persistants, r e t e n u s p a r les installations d ' é p u r a t i o n et n ' y p r o v o q u a n t p a s la f o r m a t i o n de q u a n t i t é s de mousses gênantes. Les études publiées r é c e m m e n t p a r les hygiénistes m o n t r e n t q u ' o n y est p a r v e n u dans u n e m e s u r e r e l a t i v e m e n t satisfaisante.

Si la p o l l u t i o n croissante des eaux pose u n p r o b l è m e p r é o c c u p a n t p o u r les p r o t e c t e u r s de la N a t u r e et p o u r les hygiénistes, la p o l l u t i o n de l ' a t m o s p h è r e au voisinage des entreprises industrielles et dans les

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grandes villes est, elle aussi, u n sujet d ' a c t u a l i t é et d'études très déve- loppées. On en a b e a u c o u p p a r l é , et avec passion, dans nos régions à p r o p o s de raffinage de p é t r o l e . La p o l é m i q u e a été a b o n d a m m e n t alimentée p a r des a r g u m e n t s et des indications d o n t b i e n souvent l'ob- jectivité laissait f o r t e m e n t à désirer, p r i n c i p a l e m e n t de la p a r t des partisans de l'industrialisation de la basse p l a i n e du R h ô n e . Peut-on sérieusement soutenir que des dizaines de tonnes de gaz sulfureux évacuées j o u r n e l l e m e n t dans l ' a t m o s p h è r e , dans u n espace restreint confiné p a r d e u x chaînes de m o n t a g n e s assez élevées, ne p r o v o q u e r a i e n t a u c u n dégât, ni i n c o n v é n i e n t ? P o u r le faire il ne faut avoir a u c u n e n o t i o n des éléments scientifiques du p r o b l è m e , et il est très r e g r e t t a b l e q u e finalement on ne paraisse pas avoir t e n u suffisamment c o m p t e de l'avis et des objections de ceux q u i les connaissaient.

La p o l l u t i o n de l ' a t m o s p h è r e va croissant dans les villes : il suffit d'aller dans u n e g r a n d e ville p o u r s'en r e n d r e c o m p t e ; elle aggrave les b r o u i l l a r d s de L o n d r e s , elle p r o v o q u e la d é t é r i o r a t i o n e x t é r i e u r e des m o n u m e n t s (la m a l a d i e de la p i e r r e ! ) , la salissure accélérée des vête- m e n t s et d'autres inconvénients encore.

B e a u c o u p d'entreprises industrielles souillent aussi l ' a t m o s p h è r e p a r des poussières ou p a r des é m a n a t i o n s gazeuses. Déjà le seul e m p l o i de c h a r b o n ou d ' h u i l e de chauffage d é t e r m i n e l'émission de p a r t i c u l e s de c h a r b o n et de gaz sulfureux p r o d u i t p a r la c o m b u s t i o n d u soufre q u e contient i n é v i t a b l e m e n t la h o u i l l e ou le p é t r o l e . Les dégâts à la végé- t a t i o n dans les régions voisines de grands centres industriels, c o m m e la R u h r en A l l e m a g n e , on été étudiés depuis près d'un siècle et les m a n i - festations d ' u n e t e n e u r e x t r ê m e m e n t faible en gaz sulfureux ( S 0 2 ) , inférieure au m i l l i o n i è m e , sont b i e n connues. D ' a u t r e s é m a n a t i o n s ont fait l'objet de n o m b r e u s e s é t u d e s ; on se souvient q u e dans le F r i c k t a l on s'est b e a u c o u p p l a i n t des dégâts dûs a u x gaz fluorés s ' é c h a p p a n t d ' u n e usine d ' a l u m i n i u m é t a b l i e sur la rive a l l e m a n d e du R h i n . Il s'agit dans ce cas d ' u n e intoxication q u i ne t o u c h e pas s e u l e m e n t les plantes, mais q u i s'étend aux a n i m a u x h e r b i v o r e s atteints alors de cachexie fluorée et d o n t les os d e v i e n n e n t cassants.

Dans le m ê m e o r d r e de manifestations fâcheuses p a r leurs répercus- sions sur les êtres vivants, on p e u t r a n g e r celles dues à la r a d i o a c t i v i t é à la suite de la découverte de la fission du n o y a u de l ' a t o m e d ' U r a n i u m 235 et de l'utilisation à b o n et s u r t o u t à m a u v a i s escient de l'énergie e x t r ê m e m e n t g r a n d e ainsi libérée. C'est u n d o m a i n e d o n t il a a b o n d a m - m e n t été p a r l é , les conséquences d ' u n e p o l l u t i o n a t m o s p h é r i q u e p a r des résidus radioactifs p e u v e n t ê t r e de la plus h a u t e gravité p o u r l ' h o m m e

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et p o u r le m o n d e vivant et l'on ne c o m p r e n d v r a i m e n t pas q u e de grands pays, q u i devraient d o n n e r l'exemple, puissent poursuivre sans r é p i t des expériences aux conséquences dangereuses p o u r l ' h u m a n i t é tout entière.

Mais l'utilisation à des fins pacifiques de l'énergie nucléaire pose elle aussi de graves p r o b l è m e s , p a r c e que les résidus radioactifs sortant des réacteurs et des installations qui les e n t o u r e n t sont eux-mêmes e x t r ê m e m e n t d a n g e r e u x et q u ' a u c u n e disposition t o t a l e m e n t efficace n'a été jusqu'ici trouvée p o u r p a r e r à leur action nocive.

Un des éléments radioactifs artificiels les plus d a n g e r e u x est le S t r o n t i u m 90, dont la p é r i o d e (demi-vie) est de 30 ans environ. Il a c c o m p a g n e le Calcium, élément fertilisant indispensable à la vie des p l a n t e s et nécessaire au d é v e l o p p e m e n t de l ' h o m m e et des a n i m a u x . On le r e t r o u v e r a donc à u n e dose accrue dans les plantes, dans le lait, dans les os qui de son fait p r é s e n t e r o n t u n e certaine radioactivité.

On ne p e u t s'empêcher de penser que les découvertes des savants qui p e n d a n t un demi-siècle — depuis H e n r i B e c q u e r e l et les époux P i e r r e et Marie Curie j u s q u ' à Otto H a h n , F r é d é r i c et I r è n e Joliot-Curie, E n r i c o F e r m i ( p o u r ne citer que q u e l q u e s grands noms) — ont e x p l o r é le d o m a i n e nouveau de la radioactivité ont été bien m a l utilisées et q u ' u n e g r a n d e p a r t d'inconscience est à m e t t r e au c o m p t e des techniciens qui s'en sont e m p a r é s p o u r des b u t s militaires, et m ê m e encore lorsqu'il s'agit de b u t s pacifiques p a r c e q u ' a u c u n e urgence n'obligeait à en h â t e r i n c o n s i d é r é m e n t l ' a p p l i c a t i o n à la p r o d u c t i o n d'énergie, d o n t les sources t r a d i t i o n n e l l e s suffiraient encore p e n d a n t bien des années à couvrir les besoins. On c o m p r e n d le dépit, l'angoisse, la p e r p l e x i t é de n o m b r e u x savants devant les conséquences possibles des t r a v a u x magnifiques q u i nous ont d o n n é la clé de la s t r u c t u r e i n t i m e de la m a t i è r e .

N o t r e civilisation industrielle d é v e l o p p e j u s q u ' à la h a n t i s e , la c r a i n t e d'une p é n u r i e d'énergie. Il est bien certain que la p o p u l a t i o n croissante du globe e n t r a î n e des besoins toujours plus considérables de p r o d u i t s m a n u f a c t u r é s et q u ' o n est loin de la s a t u r a t i o n . Mais l'on p e u t se d e m a n d e r si les mesures prises ne Font pas parfois été d'une m a n i è r e d é s o r d o n n é e ou tout au moins très éloignée de l'économie bien com- prise. Si l'on considère que l'énergie c o r r e s p o n d a n t à u n k i l o w a t t h e u r e é q u i v a u t dans u n a u t r e système d'étalons à 400 tonnes-mètres environ, c.à.d. à la c h u t e d ' u n e t o n n e d'eau ( = 1 m3) avec u n e dénivellation de 400 mètres (ou de 400 t. t o m b a n t d'une h a u t e u r de 1 m . ) , on c o m p r e n d combien est précieuse l'énergie h y d r o é l e c t r i q u e en t a n t que force motrice. Mais si l'on évalue en calories l'équivalence d'un k i l o w a t t h e u r e , on constate que ses 860 calories p e u v e n t ê t r e p r o d u i t e s p a r la combus-

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tion de 110 gr. de h o u i l l e ou de 70 gr. d ' h u i l e l o u r d e , ce q u i économi- q u e m e n t ne justifie pas l ' e m p l o i de l'électricité p o u r le chauffage, p o u r la cuisson des aliments et p o u r la p r é p a r a t i o n d'eau c h a u d e . Sans d o u t e , il y a à envisager la question de commodité... mais est-elle v r a i m e n t essentielle ?

On a fait de gigantesques efforts p o u r l ' é q u i p e m e n t h y d r o é l e c t r i q u e . Nous assistons c o n s t a m m e n t à la c a p t a t i o n de cours d'eau d o n t le débit a p p r o v i s i o n n e des lacs d ' a c c u m u l a t i o n , créant des réserves d'énergie utilisables à volonté. Il n'est pas certain, toutefois, que la généralisation de ces a c c u m u l a t i o n s , r e m p l a ç a n t les rivières au l i b r e cours, n'influence pas à la longue le climat. Il semble bien qu'ici ou là, h o r s de n o t r e pays, cela soit incontestable. On a déjà fait, sans a r g u m e n t s tout à fait p r o b a n t s , u n r a p p r o c h e m e n t e n t r e ces a c c u m u l a t i o n s d'eau et les chutes de grêle a u p a r a v a n t inconnues de m é m o i r e d ' h o m m e dans le Valais central.

Ce dont il faut se r e n d r e c o m p t e , et ce q u e l'on oublie t r o p facile- m e n t , c'est que le m o n d e qui nous e n v i r o n n e a acquis au cours des t e m p s un certain é q u i l i b r e qui assure u n e r é p a r t i t i o n h a r m o n i e u s e des espèces de la faune et de la flore, mais qui est très facilement p e r t u r b é , en p a r t i c u l i e r p a r de faibles modifications du climat. Or. lors de réali- sations t e c h n i q u e s à g r a n d e échelle, on e x a m i n e très à fond les données et les difficultés du p r o b l è m e posé à l'ingénieur et l'on ne se p e n c h e pas, ou pas assez, sur les conséquences — i m p o r t a n t e s ou restreintes, proches ou lointaines — du b o u l e v e r s e m e n t q u i p e u t en résulter.

Le p r o b l è m e de l'eau, que nous envisagions p l u s h a u t sous l'angle de la p o l l u t i o n toujours croissante des lacs et des cours d'eau, a d'autres aspects qu'il ne faut pas négliger. Les réalisations t e c h n i q u e s p r e n n e n t peu en considération les nécessités agricoles. On n e se souvient pas assez qu'il faut à u n e p l a n t e d'énormes q u a n t i t é s d'eau p o u r se d é v e l o p p e r . Un k i l o g r a m m e de m a t i è r e sèche nécessite l ' a b s o r p t i o n de 600 litres d'eau en m o y e n n e , ce q u e l'on p e u t i m a g e r en disant q u e le b l é corres- p o n d a n t à u n e m i c h e de p a i n exige 600 litres d'eau des semailles à la

•écolte, c'est-à-dire p e n d a n t u n e p é r i o d e de l ' a n n é e q u i n'est pas particu- l i è r e m e n t pluvieuse. Un k i l o g r a m m e de bon foin r é c l a m e 800 litres d'eau, q u a n t i t é qui à raison d ' u n e récolte de 10 t. à l ' h a c o r r e s p o n d à u n v o l u m e global de 8 millions de litres absorbé d'avril à octobre, soit à u n e h a u t e u r de pluies de 800 m m . M ê m e en H o l l a n d e , pays h u m i d e , les pluies n ' a t t e i g n e n t pas ce chiffre dans la p é r i o d e considérée, l ' a p p o i n t est prélevé dans les eaux des cours d'eau et souterraines.

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Il existe heureusement dans le sous-sol des réserves d'eau (nappes phréatiques et artésiennes). Des puits creusés plus ou moins profondé- ment permettent d'y accéder et d'y prélever leur eau par pompage. Mais ces réserves ne se renouvellent que très lentement, il faut donc éviter d'y puiser exagérément (ce que pensaient pouvoir faire impunément cer- tains techniciens du pétrole en plein Sahara). Des infiltrations partant de la surface les souillent facilement, mais une fois polluées elles le restent longtemps. La pratique des puits perdus par lesquels on évacue les eaux usées dans le sous-sol est assez courante, mais elle est dange- reuse à bien des égards.

Le développement des cultures intensives, les conditions d'existence précaires des oiseaux insectivores dans des campagnes toujours davan- tage dépouillées de haies et de buissons, ont entraîné une pullulation croissante de parasites s'attaquant aux récoltes. La lutte engagée contre ces hôtes indésirables utilise un arsenal complexe de produits chimiques, généralement très toxiques. Ce faisant, on a involontairement porté atteinte à l'équilibre biologique naturel, les poisons tuant indifférem- ment aussi bien l'insecte utile que le parasite et causant bien des sur- prises au naturaliste et à l'agriculteur. Nous les avons relatées dans une causerie faite lors d'une réunion de la Murithienne il y a quelques années et qui a été reproduite dans notre Bulletin. Nous n'y reviendrons donc pas.

D'autres conséquences imprévues et fâcheuses pour la Nature peu- vent résulter de réalisations techniques trop audacieuses ou imprudem- ment réalisées. L'affaire du barrage de Malpasset et de la catastrophe qui s'est abattue sur la ville de Fréjus est encore dans toutes les mé- moires. On en connaît d'autres: citons celles du Rio Negro (Uruguay 1959) et d'Oros (Brésil 1960) provoquées par des prévisions climatiques beaucoup trop optimistes.

La mise à disposition de sources d'énergie facilement transportable

(l'essence de pétrole) et aisément transformable en force motrice

(moteurs à explosion) a grandement contribué depuis un demi-siècle à

modifier les conditions d'existence des humains. On se déplace facile-

ment à grande distance et des routes toujours améliorées et plus nom-

breuses permettent d'atteindre aisément des localités autrefois bien

à l'écart de la circulation. D'autres moyens de transport, les téléphé-

riques en particulier, amènent en pleine montagne les citadins amateurs

de distractions autres que celles plus au moins lassantes des villes. Mais

ces nombreux visiteurs et hôtes, bienvenus pour l'industrie hôtelière et

touristique, sont trop souvent sans gêne, laissant des marques visibles

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de leur passage, cueillant sans modération les plus jolies fleurs, sans se rendre compte que leur comportement est susceptible de porter un préjudice irréparable à cette Nature qu'ils prétendent chérir.

Par des mesures appropriées, par la création de réserves territoriales où il est interdit de toucher à la flore et d'inquiéter la faune, on évitera la disparition totale des espèces les plus rares ou les plus précieuses.

Mais la lutte pour la protection de la Nature doit continuer sans trêve, ni repos. Les autorités les plus hautes l'appuient et le peuple suisse sera prochainement appelé à se prononcer sur l'introduction dans la constitution fédérale d'un article 25 sexies destiné à donner une base légale à l'aide de la Confédération.

Le message y relatif du Conseil Fédéral est remarquablement bien rédigé, ce dont fait foi le pararaphe suivant (cité par le dernier bulletin de la Ligue pour la protection de la Nature - No 5 - 1961) :

« L'évolution stupéfiante qui a été celle de l'économie, de la science et de la technique ces dernières décennies se poursuivra; elle ne peut ni ne doit être retardée, étant donné qu'elle est une manifestation accessoire, à la fois inévitable et nécessaire, de l'expansion démogra- phique et du développement de la civilisation. Plus les hommes sont, dans leur travail et leur rythme quotidien, astreints à une vie contraire à la nature, ou au moins étrangère à celle-ci, plus le contact avec une nature encore intacte est indispensable à la restauration de leurs forces physiques et psychiques. Ce fait est généralement reconnu aujourd'hui.

C'est pourquoi ceux qui ont des responsabilités doivent, dans l'intérêt du peuple et de la santé publique, veiller à ce que les espaces propices à la détente des esprits et à la récupération des forces physiques soient conservés et que des barrières soient dressées contre la recherche du gain et le besoin d'action des techniciens. Il faut contenir ces forces, ennemies ou dédaigneuses de la nature. Nous devons aussi mieux protéger le patrimoine d'un pays si riche et si divers dans ses paysages comme dans sa culture ».

Il est hors de doute que notre civilisation, axée sur un développement

technique et industriel toujours croissant doit, sous peine de périr des

conséquences de ses excès, parvenir à un plus grand respect de l'homme

et de la nature, en un mot à ce que l'on a appelé « un nouvel huma-

nisme ». Notre cher Président a montré dans le Bulletin de la Muri-

thienne de l'année dernière toute la part que l'école peut et doit prendre

à cet effort collectif. On ne peut qu'approuver ses vues et applaudir à

sa clairvoyance.

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Qu'on ne se méprenne pas sur nos propos: à la fin d'une carrière vouée à la science et à l'industrie, nous serions malvenu de nous lancer dans des critiques malveillantes et stériles. Mais comme beaucoup d'autres qui ont parfois le loisir de réfléchir à la destinée de l'homme et qui s'inquiètent devant certains développements fâcheux — dont nous avons évoqué quelques-uns — nous pensons qu'entre la Nature, qu'il faut savoir respecter, la Science qui en sonde les secrets et la Technique qui utilise ces découvertes à faciliter la vie de l'homme, il peut et il doit se réaliser un certain équilibre harmonieux qui assurera à l'humanité un avenir heureux.

Un grand ingénieur, qui est aussi un grand humaniste, M. Gilbert Tournier, directeur-général de la Compagnie Nationale du Rhône à Lyon, a intitulé « Babel ou le vertige technique » un fort volume paru en 1960 aux Editions Arthème Fayard, qui exprime fort bien ce senti- ment. On pourrait en citer d'autres, hommes de science ou auteurs litté- raires, naturalistes ou techniciens. Leurs avis sont concordants.

Exprimons donc en terminant le vœu qu'au cours de son second siècle d'activité, récemment entamé, la MURITHIENNE — bien guidée par de dignes successeurs de ses présidents passés — contribue comme elle l'a fait jusqu'ici et dans la mesure des forces et de la volonté de ses membres au maintien de l'équilibre harmonieux si souhaitable entre Nature, Science et Technique.

BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE

DECHETS MENAGERS : La communauté de travail des municipalités allemandes (AKA), à Baden-Baden, a publié en 1960 un petit volume, riche en renseignements précis, sous le titre: Sammlung, Aufbereitung und Verwertung von Siedlungsabfällen;

le Groupe international d'études pour les recherches sur les ordures ménagères (G.I.R.O.M.), dont le secrétariat est assuré par l'Institut fédéral pour l'aménagement, l'épuration et la protection des eaux, à Zurich, publie un excellent Bulletin d'infor- mation.

POLLUTION DES EAUX : L'excellent périodique mensuel Eau, air, santé, édité à Lausanne, publie des articles ayant en particulier trait au lac Léman.

Inconvénients des détergents synthétiques: Article de Chimie et Industrie 85, 246-251 (février 1961), reproduisant un travail du Water Pollution Research Labora- tory de Grande-Bretagne; travail de E. Jaag, Der heutige Stand der Waschmittel- chemie, dans Chimia 15, 450-461 (septembre 1961).

POLLUTION DE L'ATMOSPHERE : La presse romande s'est abondamment étendue en cette année 1961 sur les dangers et inconvénients des émissions de gaz sulfureux. Une publication de G. Bredemann, Biochemie und Physiologie des Fluors

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und der industriellen Fluor-Rauschschäden (Akad.-Verlag, Berlin 1951), donne une liste de 518 references relatives aux problèmes des émissions da gaz fluorés.

RADIOACTIVITE : Ce sujet — brûlant si l'on peut dire, au propre et au figuré — est largement débattu dans la presse. Les travaux et les scrupules des savants cpii ont participé à la libération de l'énergie nucléaire sont évoqués par Robert Jungk dans des volumes très bien documentés, d'un grand intérêt et d'une lecture facile, parus en traduction de l'anglais chez Arthaud: L-J futur a déjà com- mencé (1953) et Plus clair que mille soleils (1958). L'aspect purement scientifique de la question est envisagé par Otto Hahn dans Neiv Atoms (Elsevier 1950), et dans n i e multitude de publications moins facilement assimilables.

PROGRES TECHNIQUE ET NOUVEL HUMANISME : Outre le volume de Gilbert Tournier, Babel ou le vertige technique, cité plus haut (Fayard 1960), on pourra consulter avec profit les publications dont G. Rigassi a fait état dans une série d'articles parus dans la Gazette de Lausanne, en particulier: Dr Paul Chau- chard, L'Humanisme et la science (SPES, Paris) et Edouard Salés, Résurrection ou chut? de l'Occident (La Baconnière).

Travaux parus dans le Bulletin de la Murithienne :

Ignace Mariétan, Comment renouveler l'enseignement secondaire et le mettre sur le plan de notre civilisation actuelle bassée sur les sciences (Bull. 77, 34-41, 1960).

A. Vandel, Humanisme scientifique (id., 30-34).

F. Chastellain, De quelques problèmes posés par l'intervention de la Chimie dans la Nature (Bull. 72, 66-79, 1955).

F. Chastellain, Après un siècle de fertilisation minérale, où en sommes-nous ? (Bull. 76, 52-62, 1959).

LE FOEHN DU 9 DECEMBRE 1954

par Max Bouët

Résumé. Description détaillée d'un coup de fœhn violent en Valais.

Le vent a soufflé dans la vallée du Rhône, dans le Bas-Valais et dans les vallées latérales. Les mesures de température permettent le calcul de l'altitude des déversoirs principaux ou cols d'accès du fœhn. Une masse d'air froid a pénétré en Valais par deux chemins différents et a mis fin au fœhn.

Le 9 décembre 1954 un fœhn particulièrement violent a sévi dans

toutes les Alpes suisses. Son étude détaillée en Valais fait apparaître

quelques faits intéressants qui débordent le cadre régional.

Références

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