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Agriculture et environnement

Pierre Rainelli

To cite this version:

Pierre Rainelli. Agriculture et environnement. Colloque international : Environnement et économie : quels axes pour la recherche dans les années à venir ?, Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques (INSEE). FRA., Feb 1993, Paris, France. �hal-01517219�

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Institut National de la Recherche Agronomique

Station d'Economie et Sociologie Rurales

65, rue de St-Brieuc - 35042 Rennes cedex

Congrès International Ministère de l'Environnement - INSEE - !FEN

Environnement et Economie : QUELS AXES POUR LA RECHERCHE DANS LES ANNEES A VENIR ?

Agriculture et environnement

P. RAlNELLI, Directeur de Recherche, INRA,Economie Rennes

RESUME

Paris, 15-16Février 1993

DOCUMENTATION ÉCONOMIE RURAlE RENNES

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35042 RENNES C[:jEX Tél. : 99.23.54,tJ~d JJ

Les conséquences de la modernisation de l'agriculture sur l'environnement sont évoquées àpartir des systèmes de grandes cultures et des systèmes de production animale intensive. L'accent eSt ntis plus particulièrement sur les effets quantitatifs de l'érosion des sols et des nitrates sur l'eau potable.

La deuxième partie passe en revue les instruments de correction utilisés, ou envisageables, pour améliorer la situation. Les actions sur les inuants polluants sont dissociées des actions sur le prix des produits.

agricoles y compris dans le cadre de la réforme de la PAC. Les effets sont analysés en termes d'efficacité et de conséquences sur le revenu agricole.

En conclusion, les perspectives de recherche s'articulent autour d'optima de second rang, de la prise en compte des aménités positives et d'une meilleure définition des droits de propriété.

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Les gains considérables de productivité de l'agriculture se sont accomplis par un recours accru à des ~acteurs de production d'origine industrielle au détriment des facteurs d'origine agricole (terre, travail et auto-fournitures). Cela s'est traduit dans l'espace par un processus d'intensification-spécialisation (spécialisation des régions et des exploitations).

Compte-tenu d'une demande en très faible accroissement par rapport à l'offre, ce processus s'est accompagné d'un dépérissement de certaines zones du territoire, là où les potentialités naturelles sont les moins bonnes. D'où la coexistence de régions où prédomine une agriculture intensive produisant de fortes externalités négatives, et de régions plus au moins en déshérence auxquelles s'attachent des valeurs écologiques ou culturelles non négligeables.

Ce schéma peut servir de guide pour comprendre les mécanismes à l'origine des impacts de l'agriculture sur l'environnement. Il nous permet de voir comment les intrants d'origine industrielle interviennent sur les diverses composantes du milieu naturel, et à travers lui sur l'homme. Ceci fait l'objet d'une première partie. Ce schéma permet de voir sur quels mécanisme on peut agir, d'un point de vue économique si l'on veut rectifier la situation. Pour cela les mécanismes d'internalisation habituels sont évoqués sous l'angle de l'efficacité mais aussi en termes redistributifs. Une baisse du prix des produits agricoles est envisagée ce qui permet de voir quelles peuvent être les conséquences ce la réforme en cours de la PAC. Enfin, on examine les recherches à développer pour aboutir à une meilleure gestion de l'agriculture et de l'environnement.

1. CONSEQUENCES DE L'ACTIVITE AGRICOLE SUR L'ENVIRONNEMENT

Dans un souci de simplification il est possible de décrire les conséquences des modifications provoquées par l'agriculture moderne en considérant séparément les productions végétales à travers les systèmes de grandes cultures (céréales, oléo-protéagineux) et les productions animales intensives. En effet, ces deux formes de production représentent l'archétype de l'agriculture modernisée avec tous ses impacts sur le milieu naturel.

11. Les productions végétales (systèmes de grandes cultures)

Dans le tableau nOl nous avons récapitulé les diverses séquences phénomènes-effets- conséquences environnementales

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Tableau n01. Conséquences sur l'environnement des productions végétales (type "grandes cultures").

Elémentsàl'origine des

problèmes Effets Conséquences

1.Spécialisation des systèmes Perte de matière organique Menaces sur la fertilité

culturaux Morcellement des biotopes Perte de bio-diversité

Sol nu l'hiver Erosion éolienne et hydrique

2. Mécanisation Tassement des sols Perte de fertilité, érosion (engins lourds)

3. Irrigation Accumulation de sels Dégradation du sol

~.Engrais et ph)10-sanitaires Nitrates Dégradation de l'eau

Pesticides Effets sur la santé humaine

Destruction faune et flore

Dans les conséquences de l'évolution des systèmes de grandes cultures deux points assez peu étudiés en France sont à souligner: la dégradation du sol du fait de l'érosion, et la perte de bio-diversité.

En ce qui concerne les problèmes de dégradation du sol il n'existe aucune évaluation en France alors qu'aux Etats-Unis ainsi que dans d'autres pays, il est vrai plus sensible à ce phénomène que le nôtre, le coût des dommages est chiffré. Il convient de dissocier le coût supporté par l'agriculture elle-même avec la perte de fertilité et de récolte, et le coût subi par les autres secteurs du fait du transport des sédiments avec le colmatage des barrages, des canalisations, le traitement de l'eau. Le rapport entre ces deux types de dommages varie selon les caractéristiques agro-pédologiques et d'occupation de l'espace propre à chaque pays. Ainsi aux Etats-Unis les coûts hors de l'agriculture sont estimés à 3,2 milliard de dollars par an, contre 0,6 pour le coût proprement agricole de l'érosion, soit un rapport de 5 à 1. A l'inverse, en Australie avec une très faible densité de population et un réseau hydrographique très différent, le rapport est totalement inversé, de l'ordre 1 à 6, Hyberg et Pascoe, 1991. Les valeurs correspondantes se situant entre 20 et 30 millions de dollars par an pour les dommages hors agriculture contre 260 millions pour l'agriculture.

De manière plus détaillée Smith, 1992, indique en pourcentage de la valeur des récoltes comment se répartissent aux Etats-Unis le total des dommages selon le type de ressource affectée cf tableau 2

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Tableau nO 2. Montant des dommages provoqués par l'érosion selon les ressources affectées (en%de la valeur des récoltes en 1984 aux Etats-Unis)

Estimation

la plus probable basse haule

Valeur récréative des eaux douce 0,47 0,19 1.47

Valeur récréative de la mer 0,13 D,JO 0.53

Réservoirs el stockage de l'eau 0.25 0,15 0.34

Navigation 0.17 0,12 0.21

Inondations 0,22 0,15 0.35

Em'asement des fossés el rigoles 0.15 0.07 0.22

Pêche commerciale O.JO 0,09 0.14

Traitemenl des ealLX potables 0,22 D,Il 0,32

EalLx pour l'industrie 0.27 0.15 J.J3

Effet lotal 1.98 I.J3 4.7

Sources : SMITH, 1992

La perte de biodiversité se manifeste à travers la banalisation de la faune et de la flore en raison des techniques culturales, mais aussi des méthodes de sélection. Il y a régression, ou même disparition de certaines espéces au profit des plus courantes. L'arasement des haies et talus participe fortement au fractionnement des biotopes et donc à ce processus de banalisation. Ainsi, en Allemagne, ces biotopes constituent dans certaines régions àpeine 2 ou 3% de la surface agricole, et on a constaté qu'en moins d'une décennie le taux de destruction des haies était comparable à ce qui avait été enregistré en un siècle, de Haen et al, 1991.

Dans l'enchaînement sélection de variété productives effets sur l'environnement, l'exemple du blé est fort démonstratif L'adoption de variétés à haut rendement a nécessité des apports considérables d'engrais. Mais pour bénéficier à plein de ces effets, il a fallu lutter contre les ennemis des cultures, d'où d'importants traitements phytosanitaires avec des pratiques de "traitement d'assurance" pour limiter le risque. Ceci a conduit à la destruction généralisée de la faune, d'autant plus que la spécialisation régionale a favorisé les pullulations et donc les doses élevées de produits. L'apparition de souches résistantes a accru les problèmes.

De même le désherbage chimique a conduit à la disparition de certaines espèces rares nécessitant des conditions écologiques particulières pour exister.

A l'échelon mondial la transformation profonde des écosystèmes peut conduire à des pertes plus ou moins graves d'informations génétiques qui peuvent se révéler essentielles dans le domaine pharmaceutique ou alimentaire. Un ordre de grandeur de l'intérêt de ces services est

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donné par la valeur des prescriptions de médicaments comportant des ingrédients végétaux.

Elle s'élevait en 1980 à 40 milliards de dollars pour l'ensemble des pays de l'OCDE, dont 8 pour les Etats-Unis, OCDE, 1991, P 143.

12. Les productions animales intensil'es

Dans Je même esprit que pour les systèmes de grande culture on a fait figurer dans le tableau nO 3 un panorama des relations entre un certain nombre d'éléments clés des systèmes animaux intensifs et leurs conséquences sur l'environnement.

Tableau nO 3. Conséquences sur l'environnement des productions animales intensives

ElémentsàJ'origine des problèmes Effets Conséquences

1.Implantation des bâtiments et Bruit Problèmes de voisinage

installations Défiguration du paysage Aspects esthétiques

2. Action d'infiltration - Problèmes de voisinage

Opérations d'épandage Odeur • Gènes pour le tourisme

Infiltration d'azote Production de nitrates • Dégradation de J'eau potable

3. Action d'entraînement

• De matière organique Absorptiond'o~'Ygènedans les Penurbations des écosystèmes des

cours d'eau rivières

- De phosphore Eutrophisation des eaux intérieures Difficulté de traitement des eaux Penurbation des écosystèmes . D'azote Eutrophisation des eaux littorales "MaréesvertesIl

- De gennes pathogènes Contamination bactérienne des Effets sur la santé humaine et sur coquillages marins la vente des coquillages

4. Emission atmosphérique Acidilication du milieu par dépôt Effet toxique sur les plantes

d'ammoniac en infiltration Effet sur le sol

Le point sur lequel on doit faire porter l'attention est celui de la pollution par les nitrates dans la mesure où l'excédent de lisier des systèmes animaux intensifs va souvent de pair avec une fertilisation minérale azotée. La détérioration de la qualité de l'eau rend parfois celle- ci impropre à la consommation humaine et des investissements sont nécessaires, soit pour traiter les eaux brutes: soit pour s'approvisionner en ressource de meilleure qualité à une plus

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grande profondeur ou plus loin.

Une étude intéressante de Hanley, 1989, au Royaume-Uni donne des éléments de référence. A partir d'une enquête dans l'East Anglia, où une part notable de la population est approvisionnée en eau dépassant 50 mg de nitrates par litre, cet auteur a évalué le consentement à payer des consommateurs pour avoir une eau potable. Il est de l'ordre de 13 livres par ménage et par an avec des valeurs allant de zéro à cinquante livres. Si l'on prend en compte la population qui a, en moyenne durant 3 mois de l'année, une eau à plus de 50 mg le dommage collectif peut être évalué à 2,3 millions de livres. Une définition plus large de la population touchée (tous ceux qui ont eu au moins une fois une eau non potable) conduit àune perte de bien être de 10,8 millions de livres par an.

Par rapport à lm investissement de dénitratation s'élevant à 70 millions de livres, pour une durée de vie de30 ans et un taux d'actualisation de 5%, la valeur actualisée atteint presque 20 millions de livres pour la perte de bien-être de 10,8 millions de livres. Au taux de 5% pour que l'opération reste rentable il faut au moins 4,6 millions de gain annuel (et 5,6 pour un taux de 7%). En fait il serait intéressant de comparer la rentabilité sociale de cette opération de dénitratationàun traitement des pollutionsàla source.

2. LES MECANISMES CORRECTEURS SUSCEPTIBLES D'ETRE MIS EN OEUVRE

En simplifiant, on peut distinguer ce qui relève d'une action sur les intrants polluants, des actions par le biais du prix des produits, ce qui inclut les effets de la réforme de la P AC.

21. Les actions sur les intrants polluants

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Divers mécanismes sont à la disposition de la puissance publique tels que les taxes, les subventions, les quotas de pollution, les permis de pollution négociables, ou les réglementations. On peut juger l'intérêt de chacun en fonction de son efficacité, mais il convient aussi de tenir compte des coûts administratifs, de l'applicabilité des mesures ainsi que des effets redistributifs.

Andréasson, 1990, propose un cadre d'analyse assez simple qui permet de comparer les divers types d'effet de la taxation, des quotas et des droits à polluer. Cet auteur décompose pour chaque instrument ses conséquences en termes de baisse des rendements, et en termes de renchérissement du coût de l'intrant. Le premier effet correspond à un coût social tandis que le second s'apparenteàun transfert entre agents. Le tableau n04 illustre les différences d'action de ces trois outils économiques en se basant sur les éléments chiffrés obtenus à partir de résultat

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d'enquête dans l'île suédoise de Gotland.

Tableau n04. Efficacité et action redistributive d'une taxe, de quotas et de permis négociables visant à réduire la consommation d'azote.

Quotas Taxe Pennis

Penes liées aux baisses de

rendement (millions de 34.2 21.2 21,2

couronnes)

Diminution du revenu

agricole (en% du revenu) -15.4 -J2A -9.0

Source: Andréasson, 1990. p. 295.

Le tableau n04 montre que les pertes liées aux baisses de rendement sont identiques pour les permis négociables et la taxe, et inférieures à celles provoquées par les quotas. Pour ce qui concerne l'effet sur le revenu agricole c'est le système de permis négociables qui s'avère plus avantageux, devant la taxe et les quotas.

En pratique les droits àpolluer sont émis par J'autorité publique en fonction du montant des déversements que l'on juge acceptable. Les pollueurs disposent ou se procurent après enchères d'un montant initial de permis qui peuvent s'échanger sur un marché. Toutefois les non convexités des préférences des agents rendement difficile l'équilibre du marché. Par ailleurs ces marchés sont étroits par nature ce qui encourage des comportements stratégiques.

L'expérience américaine dans le domaine de la pollution atmosphérique montre la difficulté de fonctionnement de ce système.

En conséquence la taxation, théoriquement moins favorable, apparaît beaucoup plus facile d'emploi. Toutefois, certains auteurs arguant d'une très faible élasticité prix de la demande d'engrais rejettent cette mesure. Pour eux cette caractéristique obligerait à fixer des taux de taxation prohibitifs, pouvant aller jusqu'au doublement du prix, afin d'avoir des résultats significatifs. Dans ces conditions il faudrait créer un fonds spécial permettant d'aider les exploitants les moins favorisés, d'où des coûts administratifs élevés.

Or les travaux conduisant à ces très faibles élasticités (de -0,10 à -0,20) reposent sur des résultats de programmes linéaires, où l'on suppose par hypothèse que les exploitants sont à l'optimum. Par conséquent l'élasticité de la courbe de réponse à l'utilisation d'une dose plus importante d'engrais est faible. Mais, tout le monde n'est pas à l'optimum ce qui conduit à

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d'autres comportements. Par ailleurs, il s'agit d'une approche de court terme où le travail familial et surtout la terre sont fixés. Un raisonnement à long terme donne des chiffres plus élevés (-0,66) et fait aussi apparaître la possibilité de substitution entre le foncier et les engrais, Vermersch, 1989.

Une analyse plus fine met en évidence une sensibilitéà la taxation d'autant plus élevée que les exploitants sont inefficaces par rapport aux engrais. Lorsque ces inefficacités sont résorbées l'effet de la taxation diminue et l'on retrouve des chiffres comparablesàceux obtenus en recourant à des méthodes d'optimisation. Les différences de sensibilité constatées par Andréasson, 1990, dans ses estimations économétriques auprès de six catégories d'exploitants s'expliquent par ce phénomène. Alors que pour l'ensemble de l'échantillon d'exploitants du Gotland l'élasticité s'établit à -0,5 on observe des valeurs variant selon les catégories de -0,15 à -1,09.

En pratique, l'action de la taxation peut s'avérer encore plus complexe en raison des aléas climatiques qui rendent la réponse d'une culture en termes de rendement à l'apport d'une dose donnée d'engrais incertaine. Répandu avant de fortes pluies l'azote sera très peu efficace car entraîné par les eaux de ruissellement. Dans ce cas il y a aussi accroissement de la pollution par les nitrates. Le même apport peut même avoir un effet négatif si il s'agit d'une dose élevée et qu'une forte sécheresse survient. Adda et al., 1992, modélisent ces effets à partir d'une fonction de production où le choix de l'input affecte aussi bien l'espérance du rendement que sa variance. L'effet du climat sur une culture donnée est caractérisé par une variable aléatoire. La maximisation du profit pour un agriculteur qui a de l'aversion pour le risque montre que la taxation de l'engrais n'aboutit pas forcément àune diminution de son utilisation.

22. Actions sur le prix des produits agricoles

Toute diminution du prix des produits agricoles va se traduire par une réduction du profit marginal que procurent les facteurs de production utilisés, et notamment les intrants polluants. Par le jeu de la demande dérivée on aboutit donc à une baisse de la consommation d'engrais. L'ampleur et les modalités d'action de cette politique sont évidemment liés aux possibilités de substitution technique entre les facteurs de production.

En raisonnant à partir d'une fonction de production type Cobb-Douglas à rendements décroissants où tout e~t fixe, sauf les consommations intermédiaires, on montre que l'élasticité de la demande d'engrais par rapport au prix du produit est plus élevée que l'élasticité propre de la demande d'engrais, Mahé et RainelIi, 1987. Ce résultat est valable de façon générale si la complémentarité brute domine, entre engrais et autres facteurs de production, et correspond à ce que l'on observe d'un point de vue empirique (-0,49 pour l'élasticité propre et plus du double

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pour ce qui est de l'élasticité par rapport au prix des produits végétaux).

Mais avant de conclure à la supériorité de ce type d'action il convient là aussI d'examiner ses effets redistributifs. Or, avec des facteurs fixes une taxe sur les engrais est moins lourde sur les revenus agricoles ce qui rejoint l'idée qu'il vaut mieux agir à la source de la pollution. Pour donner un ordre de grandeur, une taxe de 10% sur les engrais équivaut à une baisse du prix des céréales de 5,8 %, laquelle correspond à une baisse de la consommation d'engrais de 4,2%. Or le premier instrument conduit à une baisse de valeur ajoutée de 1% alors que la baisse du prix des céréales se traduit par une diminution de valeur ajoutée de 2,1 %, Bonnieux et Rainelli, 1'988.

Au vu de ces résultats on peut penser que la réforme de la PAC aura des effets particulièrement favorables sur l'environnement, d'autant plus que la substitution d'aides directes semi-découplées à une partie du soutien par les prix des céréales va de pair avec un gel des terres. En réalité, les conséquences risquent d'être moins marquées qu'on ne pourrait le croire. Signalons que la baisse du prix des céréales en termes réels est déjà entrée dans les faits depuis plusieurs années et ce n'est que depuis peu que la consommation d'intrants polluants a fléchi. D'autre part, l'effet prix dans la diminution des quantités produites va être freiné non seulement chez les céréaliers les moins efficaces, mais aussi chez les exploitants les plus efficaces, Vermersch et al., 1992.

Il existe par définition d'importants gains potentiels de productivité chez les moinS efficaces, donc une baisse de prix constitue une incitation à la résorption des inefficacités et à un accroissement des rendements. Globalement cet accroissement peut se faire sans augmenter le recours aux conso~mationsintermédiaires, mais comme ces quantités seront obtenues sur des surfaces moins importantes, des conséquences environnementales négatives sont envisageables.

En ce qui concerne les agriculteurs les plus efficaces on peut craindre que la baisse des rendements soit moins forte que prévue car ily a plusieurs effets amortisseurs:

- Le premier tient au fait que par hypothèse ces exploitants qui maximisent leur profit sont en phase d'économies d'échelles décroissantes En conséquence si le prix du blé diminue l'offre de ces producteurs diminue aussi, mais moins que proportionnellement puisqu'ils vont retrouver une situation plus intéressante en termes d'économies d'échelles. Donc ils feront relativement plus appel aux consommations intermédiaires.

- Le second amortisseur tient aux modalités propres de la réforme qui prévoient pour les agriculteurs professionnels (ceux qui produisent plus de 92 tonnes), un gel de 15% de leurs terres labourables. Ce gel est une incitation à accroître les rendements dans les 85 % de terres

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utilisables, ce qui revient à une intensification relative de la partie non gelée. Cette mesure constitue en soi un frein àl'e>.1ensification.

- Le troisième frein est lié aux structures agricoles qui sont à l'origine d'une sous- optimalité de la combinaison productive. Les calculs montrent (dans certains cas) l'existence d'un surplus de travail d'environ 10% dans les exploitations de grande culture susceptible de conduire àune plus grande intensification du foncier, et cela au détriment de la rémunération du travail.

Au total, on voit que les conséquences environnementales de la réforme de la PAC a priori positives, risquent de ne pas avoir l'ampleur que l'on pourrait en attendre compte-tenu du comportement des producteurs et des particularités de la technologie agricole.

3. CONCLUSION: QUELLES PERSPECTIVES DE RECHERCHE ?

L'agriculture apparaît comme un secteur des plus complexes en matière d'environnement dans la mesure où elle est source d'externalités négatives de type diffus et aussi d'externalités positives.

Le caractère diffus des pollutions agricoles engendre des difficultés particulières dans la mise en place de procédures d'internalisation. En effet, selon le type de sol, les conditions climatiques et hydrographiques le même niveau d'intrant polluant va avoir des conséquences différentes, certaines pouvant même prendre des décennies pour se manifester. La divergence entre coût marginal social et coût marginal privé ne peut donc être réduite que par un système individualisé. La mise en oeuvre de celui-ci par l'autorité publique suppose donc la possibilité de faire révéler par l'agriculteur son volume de pollution. Ceci n'est pas forcément praticable sans compter la nature de la relation entre externalité et technologie qui peut rendre la solution indéterminée.

Par ailleurs, l'agriculture est, et restera plus encore après la réforme de la PAC, un secteur fortement administré. Cela entraîne des distorsions importantes par rapport aux principes théoriques du fonctionnement optimal des marchés. Ces distorsions rendent inopérants les instruments d'internalisation appliqués à un intrant et qui visent à l'optimalité parétienne. De toutes façons, ce ne sont pas les solutions de marchandage à la Coase qui permettraient ce résultat. Quoiqu'il en soit, on se situe toujours dans une perspective de second rang, ce qui signifie concrètement un "traitement pigouvien" sur un ensemble de biens. Dans cet esprit il convient d'orienter les recherches vers de meilleurs rapports de prix entre biens agricoles (prix tenant compte de leur nocivité sur l'environnement) et facteurs de production.

L'outil fiscal a un rôle important àjouer dans ce domaine.

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Il

Mais les divergences entre coûts privés agricoles et coûts sociaux trouvent leur source également dans le caractère de bien public des externalités produites par ce secteur. Le cas le plus évident est celui 'des paysages produits par les générations passées de paysans et dont l'accès est libre en général. Ainsi au Royaume-Uni le Foot Path Act reconnaît aux citoyens ce libre accès de manière formelle. Si la quantité de ce bien est donnée, par contre le prix attribué par chacun n'est pas connu en l'absence de système de révélation des préférences,

Le deuxième axe de recherche à développer concerne donc les méthodes d'évaluation des aménités positives fournies par l'agriculteur, notamment tout ce qui a trait aux méthodes d'évaluation contingente. Il s'agit de chiffrer, à partir d'études de cas menées en profondeur. les diverses fonctions écologiques assurées par les agriculteurs dans le passé et que l'on souhaite voir perdurer. De telles études peuvent servir de base à des soutiens individualisés aux agriculteurs tenant compte des services rendus àla collectivité.

Il importe de concevoir des contrats standards entre la collectivité et les agriculteurs qui assument ces fonctions non rémunérées. En fait, le problème est d'établir le prix fictif de nouvelles pratiques agricoles produisant ces services en même temps que les biens destinés au marché (marché traditi,onnel, mais aussi marché pour les "produits touristiques"). Une fixation correcte de ces prix fictifs permettra une gestion au moindre coût, àla différence des politiques d'achats publics, ou des systèmes anglais trop rigides. Dans ces derniers un contrôle très lourd du respect des pratiques agricoles réellement utilisées conduit à des coûts administratifs atteignant dans certains cas 60%du montant total des contrats, Whittaker et al., 1991. On voit ici l'importance d'une formule basée sur la libre adhésion des agriculteurs suffisamment incitative, mais où l'on puisse disposer d'un système simple de suivi pour effectuer éventuellement des corrections.

Le problème des externalités positives reconnues par la société et qui font l'objet d'une rémunération, par opposition à un "traitement pigouvien" sur un sous-ensemble suppose résolue la question des droits de propriété. Si l'on reconnaît àl'agriculteur le droit d'exploiter à sa guise les terres dont il dispose ("usus et abusus") toute mesure contraignante revient à le dessaisir d'une partie de ses droits, et ouvre donc la voieàdes mesures compensatrices. Celles- ci n'excluent pas des rémunérations à des fins de protection de l'environnement s'il s'agit d'un supplément demandé aux agriculteurs.

..

La modification du contrat social qui liait l'agriculture à la société à laquelle on assiste aujourd'hui passe par la mise à plat des droits de propriété des agriculteurs et de ce que l'on attend aujourd'hui d'eux. Moins traditionnel en France ce champ de recherche s'avère tout aussi important que les précédents permettant en outre de mieux préciser l'articulation entre réglementations et incitations économiques.

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BffiLIOGRAPHIE

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INSTITUT NATIONAlDtLA RECHERCHE AGRUNUMIUUt Stationd'Ecünom~ at Socillklgie Rilaies

DOCUMENTATION

65, Rue de St Brieuc 35042 RENNES CEDEX Tél. : 99.28.54.08et09

AGRICULTURE ET ENVIRONNEMENT

Pierre RAINELLI

Les conséquences de la modernisation de l'agriculture sur l'environnement sont évoquées, à partir des systèmes de grandes cultures et des systèmes de production animale intensive. L'accent est mis plus particulièrement sur les effets quantitatifs de l'érosion des sols et des nitrates sur l'eau potable.

La deuxième partie passe en revue les instruments de correction utilisés, ou envi- sageables, pour améliorer la situation. Les actions sur les intrants polluants sont dissociées des actions sur le prix des produits agricoles, y compris dans le cadre de la réforme de la PolitiqL/e Agricole Commune (PAC). Les effets sont analysés en termes d'efficacité et de conséquences sur le revenu agricole.

En conclusion, les perspectives de recherche s'articulent autour d'optima de second rang, de la prise en compte des aménités positives et d'une meil/eure défi- nition des droits de propriété.

Les gains considérables de producti vité de l'agriculture se sont accomplis par un recours accru à des facteurs de production d'origine industrielle, au détriment des facteurs d'origine agricole (terre. travail et autofournitures). Cela s'est traduit dans l'espace par un processus d'intensification-spécial isation (spécialisation des régions et des exploitations). Compte tenu d'une demande en très faible accroisse- ment par rapport à l'offre, ce processus s'est accompagné d'un dépérissement de certaines zones du territoire, là où les potentialités naturelles sont les moins bonnes.

D'où la coexistence de régions où prédomine une agriculture intensive produisant de fortes externalités négatives. et de régions plus au moins en déshérence auxquelles s'attachent des valeurs écologiques ou culturelles non négligeables.

Ce schéma peut servir de guide pour comprendre les mécanismes à l'origine des impacts de l'agriculture sur l'environnement. Il nous permet de voir comment les intrants d'origine industrielle interviennent sur les diverses composantes du milieu naturel, et, à travers lui, sur l'homme. Ceci fait l'objet d'une première partie. Ce schéma permet de voir sur quels mécanismes on peut agir, d'un point de vue économique si l'on veut rectifier la situation. Pour cela les mécanismes d' interna- . lisation habituels sont évoqués sous l'angle de l'efficacité, mais aussi en termes

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Les questions sectorielles

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201

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redistributifs. Une baisse du prix des produits agricoles est envisagée, ce qui permet de voir quelles peuvent être les conséquences de la réforme en cours de la Politique Agricole Commune. Enfin, on examine les recherches à développer pour aboutir à .une meilleure gestion de l'agriculture et de l'environnement.

Conséquences de l'activité agricole sur l'environnement

Dans un souci de simplification, il est possible de décrire les conséquences des mo- difications provoquées par l'agriculture moderne en considérant séparément les productions végétales à travers les systèmes de grandes cultures (céréales, oléo- protéagineux) et les productions animales intensives. En effet, ces deux formes de production représentent l'archétype de l'agriculture modernisée, avec tous ses im- pacts sur le milieu naturel.

Les productions végétales (systèmes de grandes cultures)

Dans le tableau nO}. nous avons récapitulé les diverses séquences phénomènes- effets-conséquences environnementales.

Parmi les conséquences de l'évolution des systèmes de grandes cultures, deux points assez peu étudiés en France sont à souligner: la dégradation du sol du fait de l'érosion, et la perte de biodiversité.

En ce qui concerne les problèmes de dégradation du sol. il n'existe aucune évalua- tion en France, alors qu'aux États-Unis ainsi que dans d'autres pays (il est vrai plus sensible à ce phénomène que le nôtre). le coût des dommages est chiffré. Il convient de dissocier le coût supporté par l'agriculture elle-même avec la perte de fertilité et de récolte, et le coût subi par les autres secteurs, du fait du transport des sédiments avec le colmatage des barrages. des canalisations. le traitement de l'eau. Le rapport entre Tableau 1

Conséquences sur l'environnement des productions végétales (type "grandes cultures").

Élémentsproblèmesà l'origine des Effets Conséquences

1 Spécialisation des Perte de matière organique Menaces sur la fertilité systèmes culturaux Morcellement des biotopes Perte de bio-diversité

Sol nu l'hiver Érosion éolienne et hydrique 2 Mécanisation Tassement des sols Perte de fertilité. érosion

(engins lourds)

3 Irrigation Accumulation de sels Dégradation du sol

4 Engrais et Nitrates Dégradation de l'eau

phyto-sanitaires Pesticides Effets sur la santé humaine Destruction faune et flore

?O? Insee Méthodes39-40

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1

1 1

ces deux types de dommages varie selon les caractéristiques agro-pédologiques et d'occupation de l'espace propre à chaque pays. Ainsi, aux États- Unis, les coûts hors de l'agriculture sont estimés à3,2 milliards de dollars par an, contre 0,6 pour le coût proprement agricole de l'érosion, soit un rapport de 5 à l. A l'inverse, en Australie, avec une très faible densité de population et un réseau hydrographique très diffé- rent, le rapport est totalement inversé, de l'ordre 1à 6 [Hyberg et Pascoe, 1991] ; les valeurs correspondantes se situant entre 20 et 30 millions de dollars par an pour les dommages hors-agriculture, contre 260 millions pour l'agriculture.

De manière plus détaillée, Smith [1992] indique en pourcentage de la valeur des récoltes comment se répartissent aux États-Unis le total des dommages selon le type de ressource affectée: cf. tableau 2.

La perte de biodiversité se manifeste à travers la banalisation de la faune et de la flore, en raison des techniques culturales, mais aussi des méthodes de sélection. II y a régression, ou même disparition de certaines espèces, au profit des plus couran- tes. L'arasement des haies et talus participe fortement au fractionnement des bioto- pes et donc à ce processus de banalisation. Ainsi, en Allemagne, ces biotopes constituent. dans certaines régions, à peine 2 ou 3% de la surface agricole, et on a constaté qu'en moins d'une décennie, le taux de destruction des haies était compa- rable à ce qui avait été enregistré en un siècle [de Haen et al, 1991].

Dans l'enchaînement sélection de variété productives-effets sur l'environnement, l'exemple du blé est fort démonstratif. L'adoption de variétés à haut rendement a nécessité des apports considérables d'engrais. Mais pour bénéficier à plein de ces effets, il a fallu lutter contre les ennemis des cultures, d'où d'importants traitements Tableau 2

Montant des dommages provoqués par l'érosion selon les ressources affectées.

En % de la valeur desrecoltesen 1984 auxEtats-Unis

Estimation la plus

basse haute

probable

Valeur récréative des eaux douces 0,47 0.19 1,47

Valeur récréative de la mer 0,13 0.10 0.53

Réservoirs et stockage de l'eau 0,25 0.15 0,34

Navigation 0,17 0.12 0,21

Inondations 0,22 0,15 0.35

Envasement des fossés et rigoles 0,15 0,07 0,22

Pèche commerciale 0,10 0,09 0,14

Traitement des eaux potables 0.22 0,11 0,32

Eaux pour l'industrie 0,27 0,15 1,13

Effet total 1,98 1,13 4,70

Source: SMITH, 1992

Les questions sectorielles 203

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phytosanitaires avec des pratiques de "traitement d'assurance" pour limiter le ris- que. Ceci a conduit à la destruction généralisée de la faune, d'autant plus que la spécialisation régionale a favorisé les pullulations et donc les doses élevées de pro- duits. L'apparition de souches résistantes a accru les problèmes. De même, le désherbage chimique a conduit à la disparition de certaines espèces rares néces- sitant des conditions écologiques particulières pour exister.

A J'échelon mondial, la transformation profonde des écosystèmes peut conduire à des pertes plus ou moins graves d'informations génétiques qui peuvent se révéler essentielles dans le domaine pharmaceutique ou alimentaire. Un ordre de grandeur de J'intérêt de ces services est donné par la valeur des prescriptions de médicaments comportant des ingrédients végétaux. Elle s'élevait en 1980 à 40 milliards de dollars pour J'ensemble des pays de J'OCDE, dont 8 pour les États-Unis [OCDE. 1991, P 143].

Les productions animales intensives

Dans le même esprit que pour les systèmes de grande culture, on a fait figurer dans le tableau 11°] un panorama des relations entre un certain nombre d'éléments-clés des systèmes animaux intensifs et leurs conséquences sur l'environnement.

Tableau 3

Conséquences sur l'environnement des productions animales intensives.

Élémentsdes problèmesà l'origine Effets Conséquences

1 Implantation des bâtiments Bruit Problèmes de voisinage et installations Défiguration du paysage Aspects esthétiques 2 Action d'infiltration Odeur - Problèmes de voisinage

Opérations d'épandage Production de nitrates - Gênes pour Je tourisme

Infiltration d'azote - Dégradatiorl de J'eau potable

3 Action d'entraînement

- de matière or~anique Absorption d'oxygène Perturbations des

dans les cours d'eau écosystèmes des rivières . de phosphore Eutrophisation des eaux Difficulté de traitement des eaux

intérieures Perturbation des écosystèmes - d'azote Eutrophisation des eaux 'Marées vertes'

littorales

. de germes pathogènes Contamination bactérienne Effets sur la santé humaine et des coquillages marins sur la vente des coquillages 4 Émission atmosphérique Acidification du milieu par Effet toxique sur les plantes

d'ammoniac dépôt en infiltration Effet sur le sol

3

204 Insee MéthodesnO39-40

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r

Le point sur lequel on doit faire porter l'attention est celui de la pollution par les nitrates, dans la mesure où l'excédent de lisier des systèmes animaux intensifs va souvent de pair avec une fertilisation minérale azotée. La détérioration de la qualité de l'eau rend parfois celle-ci impropre à la consommation humaine, et des investis- sements sont nécessaires, soit pour traiter les eaux brutes, soit pour s'approvision- ner en ressource de meilleure qualité à une plus grande profondeur ou plus loin.

Une étude intéressante de Hanley [1989] au Royaume-Uni donne des éléments de référence. A partir d'une enquête dans l'East Anglia, où une part notable de la po- pulation est approvisionnée en eau dépassant 50 mg de nitrates par litre, cet auteur a évalué le consentement à payer des consommateurs pour avoir une eau potable.

II est de l'ordre de 13 livres par ménage et par an, avec des valeurs allant de 0 à50 livres. Si l'on prend en compte la population qui a, en moyenne durant trois mois de l'année, une eau à plus de 50 mg, le dommage collectif peut étre évalué à2,3 millions de livres. Une définition plus large de la population touchée (tous ceux qui ont eu au moins une fois une eau non potable) conduit à une perte de bien-être de

10,8 millions de livres par an.

Par rapport à un investissement de dénitratation s'élevant à 70 millions de livres, pour une durée de vie de trente ans et un taux d'actualisation de 5 %, la valeur actualisée atteint presque 20 millions de livres pour la perte de bien-être de 10,8 millions de livres. Au taux de 5 %, pour que l'opération reste rentable, il faut au moins 4,6 millions de gains annuels (et 5,6 pour un taux de 7 %). En fait, il serait intéressant de comparer la rentabilité sociale de cette opération de dénitratation à un traitement des pollutions à la source.

Les mécanismes correcteurs susceptibles d'être mis en oeuvre

En simplifiant, on peut distinguer ce qui relève d'une action sur les intrants po lIuants, des actions par le biais du prix des produits, ce qui inclut les effets de la réforme de la PAC.

Les actions sur les intrants polluants

Divers mécanismes sontà la disposition de la puissance publique tels que les taxes, les subventions, les quotas de pollution. les permis de pollution négociables. ou les réglementations. On peut juger l'intérêt de chacun en fonction de son efficacité.

mais il convient aussi de tenir compte des coûts administratifs, de l'applicabilité des mesures ainsi que des effets redistributifs.

Andréasson [1990] propose un cadre d'analyse assez simple qui permet de compa- rer les divers types d'effet de la taxation, des quotas et des droits à polluer. Cet auteur décompose, pour chaque instrument, ses conséquences en termes de baisse des rendements, et en termes de renchérissement du coût de l'intrant. Le premier

(19)

Tableau 4

Efficacité et action redistributive d'une taxe, de quotas et de permis négociables visantàréduire la consommation d'azote,

Quotas Taxe Permis

Pertes liées aux baisses de rendement 34,2 21,2 21,2

(millions de couronnes)

Diminution du revenu agricole - 15,4 - 12,4 - 9,0

(en % du revenu)

Source: ANDRÉASSON, 1990, p. 295.

effet correspond à un coût social tandis que le second s'apparente à un transfert entre agents. Le rablealil/04 illustre les différences d'action de ces trois outils éco- nomiques, en se basant sur les éléments chiffrés obtenus à partir de résultat d'en- quête dans l'île suédoise de Gotland,

Le rab/eau1/°4 montre que les pertes liées aux baisses de rendement sont identiques pour les permis négociables et la taxe, et inférieures à celles provoquées par les quotas. Pour ce qui concerne l'effet sur le revenu agricole, c'est le système de per- mis négociables qui s'avère le plus avantageux, devant la taxe et les quotas.

En pratique, les droits à polluer sont émis par l'autorité publique en fonction du montant des déversements que l'on juge acceptable. Les pollueurs disposent ou se procurent après enchères d'un montant initial de permis, qui peuvent s'échanger sur un marché. Toutefois les non-convexités des préférences des agents rendent dif- ficile l'équilibre du marché. Par ailleurs, ces marchés sont étroits par nature, ce qui encourage des comportements stratégiques. L'ex péri ence améri cai n e dans le domaine de la pollution atmosphérique montre la difficulté de fonction- nement de ce système.

En conséquence la taxation, théoriquement moins favorable, apparaît beaucoup plus facile d'emploi. Toutefois, certains auteurs arguant d'une très faible élasticité- prix de la demande d'engrais rejettent celte mesure. Pour eux, celte caractéristique obligerait à fixer des taux de taxation prohibitifs, pouvant aller jusqu'au double- ment du prix, afin d'avoir des résultats significatifs. Dans ces conditions, il faudrait créer un fonds spécial permettant d'aider les exploitants les moins favorisés, d'où des coûts administratifs élevés.

Or, les travaux conduisant à ces très faibles élasticités (de - 0,10 à - 0,20) reposent sur des résultats de programmes linéaires, où l'on suppose par hypothèse que les exploitants sont à l'optimum. Par conséquent, l'élasticité de la courbe de réponseà l'utilisation d'une dose plus importante d'engrais est faible. Mais tout le monde n'est pas à l'optimum, ce qui conduit à d'autres comportements. Par ailleurs, il s'agit d'une approche de court terme où le travail familial et surtout la terre sont fixés. Un raisonnement à long terme donne des chiffres plus élevés (- 0,66) et fait

• • , . n ... .r.

(20)

aussi apparaître la possibilité de substitution entre le foncier et les engrais [Vermersch, 1989].

Une analyse plus fine met en évidence une sensibilité à la taxation d'autant plus élevée que les exploitants sont inefficaces dans leur utilisation d'engrais. Lorsque ces inefficacités sont résorbées, l'effet de la taxation diminue et l'on retrouve des chiffres comparables à ceux obtenus en recourant à des méthodes d'optimisation.

Les différences de sensibilité, constatées par Andréasson [1990] dans ses estima- tions économétriques auprès de six catégories d'exploitants, s'expliquent par ce phénomène. Alors que pour l'ensemble de l'échantillon d'exploitants du Gotland l'élasticité s'établit à - 0,5, on observe des valeurs variant selon les catégories de - 0,15 à - 1,09.

En pratique, l'action de la taxation peut s'avérer encore plus complexe, en raison des aléas climatiques qui rendent la réponse d'une culture en termes de rendement à l'apport d'une dose donnée d'engrais incertaine. Répandu avant de fortes pluies, l'azote sera très peu efficace, car entraîné par les eaux de ruissellement. Dans ce cas il y a aussi accroissement de la pollution par les nitrates. Le même apport peut même avoir un effet négatif s'il s'agit d'une dose élevée et qu'une forte sécheresse survient. Adda et al. [1992] modélisent ces effets à partir d'une fonction de produc- tion où le choix de l'input affecte aussi bien l'espérance du rendement que sa va- riance. L'effet du climat sur une culture donnée est caractérisé par une variable aléatoire. La maximisation du profit pour un agriculteur qui a de l'aversion pour le risque montre que la taxation de l'engrais n'aboutit pas forcément à une diminution de son utilisation.

Actions sur le prix des produits agricoles

Toute diminution du prix des produits agricoles va se traduire par une réduction du profit marginal que procurent les facteurs de production utilisés, et notamment les intrants polluants. Par le jeu de la demande dérivée, on aboutit donc à une baisse de la consommation d'engrais. L'ampleur et les modalités d'action de cette politi- que sont évidemment liées aux possibilités de substitution technique entre les fac- teurs de production.

En raisonnant à partir d'une fonction de production type Cobb-Douglas à rende- ments décroissants où tout est fixe, sauf les consommations intermédiaires, on montre que l'élasticité de la demande d'engrais par rapport au prix du produit est plus élevée que l'élasticité propre de la demande d'engrais [Mahé et Rainelli, 1987]. Ce résultat est valable de façon généralesi la complémentarité brute domine, entre engrais et autres facteurs de production, et correspond à ce que l'on observe d'un point de vue empirique (- 0,49 pour l'élasticité propre, et plus du double pour ce qui est de l'élasticité par rapport au prix des produits végétaux).

Mais avant de conclure à la supériorité de ce type d'action, il convient là aussi "

d'examiner ses effets redistributifs. Or, avec des facteurs fixes, une taxe sur les en- grais est moins lourde sur les revenus agricoles, ce qui rejoint l'idée qu'il vaut

Les qI/estions sectorielles 207

(21)

mieux agir à la source de la pollution. Pour donner un ordre de grandeur, une taxe de 10 % sur les engrais équivaut à une baisse du prix des céréales de 5,8 %, laquelle correspond à une baisse de la consommation d'engrais de 4.2%. Or. le premier ins- trument conduit à une baisse de valeur ajoutée de 1 %, alors que la baisse du prix des céréales se traduit par une diminution de valeur ajoutée de 2,1 % [Bonnieux et Rainelli, 1988].

Au vu de ces résultats, on peut penser que la réforme de la P.A.C. aura des effets particulièrement favorables sur l'environnement, d'autant plus que la substitution d'aides directes semi-découplées à une partie du soutien par les prix des céréales va de pair avec un gel des terres. En réalité, les conséquences risquent d'être moins marquées qu'on ne pourrait le croire. Signalons que la baisse du prix des céréales en termes réels est déjà entrée dans les faits depuis plusieurs années et ce n'est que depuis peu que la consommation dïntrants polluants a fléchi. D'autre part, l'effet- prix dans la diminution des quantités produites va être freiné, non seulement chez les céréaliers les moins efficaces, mais aussi chez les exploitants les plus effica- ces [Vermersch et al., 1992].

Il existe par définition dïmportants gains potentiels de productivité chez les moins efficaces, donc une baisse de prix constitue une incitation àla résorption des ineffica- cités et à un accroissement des rendements. Globalement, cet accroissement peut se faire sans augmenter le recours aux consommations intermédiaires, mais comme ces quantités seront obtenues sur des surfaces moins importantes, des conséquences environnementales négatives sont envisageables.

En ce qui concerne les agriculteurs les plus efficaces, on peut craindre que la baisse des rendements soit moins forte que prévue, car il y a plusieurs effets amortisseurs:

le premier tient au fait que, par hypothèse, ces exploitants qui maximisent leur profit sont en phase d'économies d'échelles décroissantes. En conséquence, si le prix du blé diminue, l'offre de ces producteurs diminue aussi, mais moins que proportionnellement, puisqu'ils vont retrouver une situation plus intéressante en termes d'économies d'échelles. Donc ils feront relativement plus appel aux con- sommations intermédiaires;

le second amcrtisseur tient aux modalités propres de la réforme qui prévoit pour les agriculteurs professionnels (ceux qui produisent plus de 92 tonnes), un gel de 15 % de leurs terres labourables, Ce gel est une incitation àaccroître les ren- dements pour les 85 % de terres utilisables, ce qui revient à une intensification relative de la partie non gelée. Cette mesure constitue en soi un frein à l'ex tensification ;

le troisième frein est lié aux structures agricoles qui sont à l'origine d'une sous- optimalité de la combinaison productive. Les calculs montrent (dans certains cas) l'existence d'un surplus de travail d'environ 10%dans les exploitations de grande culture susceptible de conduire à une plus grande intensification du fon- cier, et cela au détriment de la rémunération du travail.

208 Insee Méthodes nO 39-40

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