• Aucun résultat trouvé

Droit et valeurs: la reception de valeurs en droit

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Droit et valeurs: la reception de valeurs en droit"

Copied!
7
0
0

Texte intégral

(1)Conference Papers p 248 à 254. 29.11.2002. 8:57. Page 248. DROIT ET VALEURS: LA RECEPTION DE VALEURS EN DROIT Robert Kolb Webster University and Graduate Institute of International Studies This paper deals with the process of incorporating values into laws. All laws are essentially based, on the one hand, on material and real factors, and on the other hand, on ideas or ideals. It is not an either or situation. A legal order represents an attempt to turn societal values into reality. If, however, there is no sufficiently clear consensus about common values, there will be no law or it will be incomplete. All legal systems reflect the societal values, which have inspired them. These values can be contingent, as for example in the framework of a specific constitutional order. Or they can be more general and transcend time and space and be situated at the level of the general principles of law. These values also allow to judge a given legal system and to assess it from an ethical point of view. Values can influence laws in numerous ways. Professor Kolb describes four important examples in some detail: 1. The first one allows increasing the flexibility of the application of legal rules, through reference to “general principles of law” (e.g. public order, etc.). 2. The second case implies the adoption of new legal rules (and/or the abandoning of old ones) in response to new needs and values. 3. The spreading of an important value can lead, exceptionally, to the direct abrogation of positive law (as it happened in the case of antislavery movement in the 19th century). 4. If there is a very strong tension between values and positive law, the outcome may be actual revolution. Finally, the author discusses the gradual shift in the international legal order from a “system of coexistence”, based on the identity and interests of the state, towards the “law of the international community”, which includes concepts such as international public order, ius cogens, obligations erga omnes, the definition of international crimes, human rights (as superior rights), etc. While this “moralization of international law” is a sign of progress, one must not forget the need for common institutions in order to make it effective. Position du problème Comme l'a affirmé avec humour R. von Jhering 1, le sujet du rapport entre le droit et les valeurs (notamment morales) constitue le Cap Horn de la philosophie du droit; après les expériences du XXIème siècle, nous pouvons ajouter qu'il s'agit aussi, peut-être, du Cap de Bonne Espérance de 1. Cf. H. HENKEL, Einführung in die Rechtsphilosophie, 2.éd., Munich, 1977, p. 67.. Refugee Survey Quarterly, Vol. 21, No. 3, 2002. © UNHCR 2002.

(2) Conference Papers p 248 à 254. 29.11.2002. 8:57. Page 249. Refugee Survey Quarterly, Vol. 21, No. 3, 2002. 249. cette même philosophie du droit, libérée de la gangue positiviste qui l'avait confinée à la dogmatique juridique 2. Tout cela pour dire ceci: contrairement à nos collègues, nous avons choisi de traiter notre sujet sous l'angle de la philosophie du droit et non de considérations relevant des sciences politiques. Et aussi: il n'est pas possible d'offrir plus que quelques esquisses dans un sujet d'un vaste océanique. Tout droit repose dans sa genèse et dans son corps sur l'influence de deux séries de facteurs dont il est la résultante. D'un côté, il y a les facteurs qui viennent pour ainsi dire d'en bas, les facteurs matériels ou réels. Il s'agit des réalités économiques allant de la société féodale à la société post-industrielle; des aspects sociologiques, culturels et autres qui marquent une société et donc son droit; et de la distribution du pouvoir au sein de cette même société. D'un autre côté, il y a des facteurs qui viennent pour ainsi dire d'en haut d'en haut, les facteurs idéaux. Il s'agit avant tout de la raison et des valeurs. Dans l'histoire, on a souvent privilégié une série de ces facteurs sur l'autre, croyant pouvoir expliquer le droit suffisamment par l'une plutôt que par l'autre. C'est une erreur. Ce n'est que la synthèse des deux qui donne la pleine mesure des deux phénomènes. Ainsi, le marxisme s'est trompé en croyant tout pouvoir reconduire au facteur réel de l'économie. Certaines doctrines de droit naturel purement déductives se sont fourvoyées quand elles ont cru pouvoir déduire un ordre juridique complet pour tous les lieux et tous les temps de quelques postulats généraux, tenus exprimer la nature de l'homme. Cependant, si les facteurs réels expliquent bien les sources positives du droit, les facteurs réels expriment quelque part mieux son essence. En tant que réalité spirituelle et non tangible, le droit est lié avant tout à des valeurs. Et ce n'est pas par hasard si les théories qui ont surévalué les facteurs réels ont livré des résultats 3 moins satisfaisants que celles qui ont surestimé le rôle des facteurs idéaux. En effet, les théories déductivistes du droit naturel des lumières, avec les droits de liberté des hommes, la séparation des pouvoirs et les principes de l'Etat libéral, ont une modernité qui ne laisse de surprendre. Ce lien essentiel du droit avec les valeurs devient palpable dans le fait que toute tradition juridique d'une certaine hauteur a toujours lié le droit à une valeur: la justice. Ius / iustitia, la paire est inséparable. La justice est considérée comme la valeur suprême du droit, voire même son fondement, car l'une et l'autre touchent aux rapports de l'homme vers l'autre. Les deux sont des ordres d'altérité, de relation: ius est ad alterum, tout comme iustitia est ad alterum 4. Dès lors, on comprend la formulation classique d'Accurse dans la célèbre Glose 9 au Titre 1er du Digeste 5: “Est autem ius a iustitia, sicut a matre sua, ergo prius fuit iustitia quam ius”; “mais le droit se rapporte à la justice comme à sa mère, si bien que la justice précède le droit”. 2 3. Cf. A. KAUFMANN, Rechtsphilosophie, 2.éd., Munich, 1997, p. 95. C. S. PEIRCE, Collected Papers, vol. V, Cambridge, 1965, p. 317, no. 465..

(3) Conference Papers p 248 à 254. 250. 29.11.2002. 8:57. Page 250. Conference Papers. Une valeur est une qualité susceptible d'être rattachée à un objet. Elle indique en principe un attribut positif, i.e. une dignité d'estime. Il est de nombreux types de valeurs. Le droit s'intéresse surtout aux valeurs d'ordre social. C'est d'abord la morale sociale, inextricablement liée aux usages. Mais c'est aussi des valeurs plus élevées. Parmi les valeurs spirituelles, qui sont de trois ordres (esthétique, éthique et religieux), le droit s'attache surtout aux secondes, les valeurs éthiques. La fidélité à la parole donnée, par exemple, sous-tend tout le droit des contrats, fondé sur l'impératif: pacta sunt servanda. Le respect de l'autre, valeur éthique, domine le droit civil et pénal. Et ainsi de suite. A bien regarder, il s'avère que la pesée de ces valeurs sur la droit est remarquable. L'influence des valeurs sur le droit Tout ordre juridique est une tentative de réaliser des valeurs sociales. Vice versa, quand des valeurs communes ne se sont pas encore cristallisées à un degré suffisant, le droit fera souvent défaut ou sera lacunaire; je pense au domaine des nouvelles technologies et de la bioéthique. Ce qui confirme l'importance du lien envisagé. Tout ordre juridique est également le reflet des valeurs sociales qui l'inspirent. Ces valeurs peuvent être plus contingentes, comme dans le cadre d'un droit constitutionnel précis, et elles peuvent être plus généralement humaines, traversant les âges, notamment au plan des principes généraux de droit. Ainsi, une Constitution (ou le droit pénal) est toujours un miroir de valeurs: par exemple celles de l'Etat de droit, de la séparation des pouvoirs, du principe de légalité, de l'égalité, de la démocratie, des droits fondamentaux de la personne, etc. Tous ces chefs, que sont-ils d'autre, en premier lieu, que des valeurs? En réalité, ces dispositionsvaleurs forment le centre de gravité d'un ordre juridique, centre de gravité à partir duquel l'opérateur juridique tirera les concrétisations les plus diverses, en faisant “parler” ces normes dans les contextes infiniment variables de la vie sociale.. 4 Il est trois formes de justice, la justice divine, la justice en tant que vertu générale et la justice particulière (sociale). Dans cette dernière, l'altérité (ou inter-subjectivité) devient la marque propre: la justice particulière concerne toujours un rapport avec l'autre placé sur un pied d'égalité. La justice est une projection vers l'extérieur, vers l'autre, ad alterum, selon une mesure rationnelle d'intégration mutuelle des deux subjectivités. St. Thomas d'Aquin dit très bien: “Justitiae (…) ordinet hominem in his quae sunt ad alterum. Aequalitas autem ad alterum est” (S.T., II, II, 57, 1). Et ailleurs il adopte une perspective d'oiseau: “Justitia (…) est communis radix totius ordinis ad alterum” (S.T. II, II, 58, 8, 2. Et: “iustitia ordinat hominem in comparatione ad alium” [II, II, 58, a.5]. Cf. déjà Aristote, Ethique de Nicomaque, V, 3, 1129b, 25 et 32; 1130 a 13; V, 4, 1130b, 1, etc.; Dante, De Monarchia, I, XI, 7.). La justice commande donc de se voir à travers les yeux de l'autre, de considérer la propre subjectivité comme fondue dans une pluralité de subjectivités, ce qui appelle une coordination relationnelle et donc rationnelle. 5 Glose 9 ad Dig., 1,1,1..

(4) Conference Papers p 248 à 254. 29.11.2002. 8:57. Page 251. Refugee Survey Quarterly, Vol. 21, No. 3, 2002. 251. Enfin, ces valeurs permettent aussi de juger un ordre juridique. Elles permettent d'apprécier la hauteur éthique atteinte et les rechutes. Ainsi, dans certaines sociétés primitives d'Amérique centrale, à l'époque précolombienne, il avait été coutumier de sacrifier des enfants dans des grottes selon des rites étranges, car il était considéré que leurs larmes faisaient venir la pluie. Ces sociétés dépendantes de la pluie avaient centré une bonne partie de leur droit et de leur religion (encore indivis) sur cet aspect et sur ces sacrifices. C'est le témoignage d'une humanité encore peu avancée. Et quant aux rechutes d'ordres juridiques et sociaux, il suffit d'évoquer les totalitarismes, et l'un des plus célèbres d'entre eux, le national-socialisme, pour voir de quoi il s'agit. Les valeurs opèrent sur le droit une infinité de pesées concrètes qu'il n'est pas le lieu de tenter ici de retracer. Pour illustration, quatre types d'influences peuvent être mentionnés. a) L'influence intra legem. Le droit appelle ici l'opérateur à tenir compte des valeurs sociales changeantes à travers des termes vagues insérés dans les textes, termes qui ont pour but de flexibiliser l'application de la norme en ouvrant à des facteurs extra-juridiques. On parle, dans la science du droit, de clauses générales ou de standards juridiques. Par exemple: bonnes moeurs, bon père de famille, raisonnable, ordre public, choquant la conscience publique, etc. L'adaptation du droit aux changements des conceptions sociales et des valeurs se fait ici à travers l'interprétation. C'est ainsi, par exemple, que la Cour européenne des droits de l'homme a resserré les standards admissibles de punitions corporelles en application de la clause générale des “traitements dégradants” (affaire Tyrer c. RoyaumeUni 6) ou a libéralisé le régime relatif à l'homosexualité, en estimant qu'une punition de ces pratiques entre adultes même consentants, n'était plus “nécessaire dans les sociétés démocratiques” de l'Europe des années quatre-vingt du XXème siècle (affaire Norris c. Irlande) 7. 6 Cf. CEDH, sér. A, no. 26 (1978), p. 15-6., par exemple le § 31: “La Cour rappelle en outre que la Convention est un instrument vivant à interpréter – la Commission l'a relevé à juste titre – à la lumière des conditions de vie actuelles. Dans la présente espèce, la Cour ne peut pas ne pas être influencée par l'évolution et les normes communément acceptées de la politique pénale des Etats membres du Conseil de l'Europe dans ce domaine.” L'Attorney-General de l'île de Man a du reste signalé que depuis de longues années on révise les dispositions législatives mannoises concernant lesdits châtiments. 7 Cf. CEDH, sér. A, no. 142 (1988), § 39ss , publiée aussi dans ILR, vol. 89, p. 243ss. Voir par exemple le § 46: “Or le Gouvernement ne fournit aucun élément propre à établir l'existence de motifs de conserver les lois attaquées et qui s'ajouteraient aux raisons présentes dans l'affaire Dudgeon ou auraient plus de poids. Au paragraphe 60 de son arrêt du 22 octobre 1981 (ibidem, pp. 23-24), la Cour notait: ‘On comprend mieux aujourd'hui le comportement homosexuel qu'à l'époque de l'adoption [des lois en question] et l'on témoigne donc de plus de tolérance envers lui: dans la grande majorité des Etats membres du Conseil de l'Europe, on a cessé de croire que les pratiques du genre examiné ici appellent par elles-mêmes une répression pénale; la législation interne y a subi sur ce point une nette évolution que la Cour ne peut négliger.’ Elle constatait que ‘les autorités [avaient] évité ces dernières années d'engager des poursuites du chef d'actes homosexuels commis, de leur plein gré et en privé, par des hommes [adultes] capables d'y consentir’. Rien ne prouvait que cela eût ‘porté atteinte aux valeurs morales en Irlande du Nord, ni que l'opinion publique [eût] réclamé une application plus rigoureuse de la loi’.”.

(5) Conference Papers p 248 à 254. 252. 29.11.2002. 8:57. Page 252. Conference Papers. b) L'influence praeter legem. Le droit est ici appelé à évoluer à travers la création de nouvelles normes (ou la désuétude d'anciennes) pour faire face à des besoins nouveaux, à des valeurs nouvelles. Cette évolution peut être le fait du législateur ou du juge. On peut donner comme exemple général le grand virage opéré à la fin du XIXème siècle en allant de l'Etat libéral vers l'Etat social, avec toute la législation protectrice. Comme exemple ponctuel en droit interne, on peut évoquer l'ancien article 181 du Code pénal allemand en vigueur dans les années cinquante. Les parents y étaient menacés de prison s'ils permettaient à leur fils (ou leur fille) de pratiquer le coït sous leur toit sans que ceux-ci soient mariés, même s'ils étaient adultes. Cette disposition cessa d'être appliquée dès la fin des années soixante, comme en Suisse cessa d'être appliqué l'ancien article 211 du Code pénal qui menaçait de sanction celui ou celle qui faisait de la publicité pour des moyens de contraception. L'anachronisme de cette disposition avec les valeurs sociales modernes – notamment depuis l'épidémie du SIDA – saute aux yeux. Pour ce qui est de la société internationale, on peut évoquer la pénétration des droits de l'homme comme nouvelle branche au sein du droit international. C'était, en 1945, une réaction aux exactions des forces de l'Axe. Ou encore la tendance actuelle de rapprocher le droit des conflits armés internationaux du droit des conflits non-internationaux, afin de garantir une protection meilleure et égale aux êtres humains. Traditionnellement, seul le droit des conflits armés internationaux comportait de véritables garanties pour les personnes protégées, alors que le droit des conflits armés non-internationaux (guerres civiles) ne prévoyait qu'un minimum de garanties, laissant la question largement à l'Etat territorial. La rébellion était considérée une question de droit interne, voire de droit pénal interne. Les guerres modernes, notamment en ex-Yougoslavie, ont montré que ces approches ne suffisaient plus. D'où l'oeuvre d'une nouvelle valeur très active sur le droit, celle postulant le rapprochement des deux branches du droit à des fins de meilleure protection humanitaire. Le Tribunal ad hoc pour l'ex-Yougoslavie a ouvert la voie dans l'affaire Tadic (1995) 8, alors que d'autres institutions ont suivi, par exemple l'Institut de droit international 9. c) L'influence contra legem. Une valeur ressentie comme très urgente peut exceptionnellement se frayer directement un chemin en écartant une norme de droit positif. C'est un conflit hautement dramatique pour le droit. Dans la société internationale, on peut évoquer le cas du mouvement antiesclavagiste au XIXème siècle qui eut tendance à s'imposer contre un droit coutumier de l'époque encore permissif. C'est ainsi, entre autres, que le Département d'Etat américain renonça à faire exécuter certaines sentences 8. Arrêt du 2.10.1995, § 65ss. Cf. “L'application du droit international humanitaire et des droits fondamentaux de l'homme dans les conflits armés auxquels prennent part des entités non-étatiques”, Ann. IDI, vol. 68-II, 1999, p. 271ss, en particulier l'article 11 de la Résolution de l'Institut, ibid., p. 360. 9.

(6) Conference Papers p 248 à 254. 29.11.2002. 8:57. Page 253. Refugee Survey Quarterly, Vol. 21, No. 3, 2002. 253. judiciaires qui avaient relâché des navires pratiquant la traite, ou à endosser des réclamations d'individus ayant pratiqué ce commerce 10. Plus récemment, on peut évoquer les mouvements tendant à (ré)insérer dans le droit international l'ancienne institution de l'intervention humanitaire armée 11, contraire paraît-il au droit international moderne tel que posé par la Charte des Nations Unies, notamment à ses articles 4 et 51 12. d) L'influence contra ordo. Si la tension entre valeur et ordre positif devient insoutenable de manière généralisée, la tension finit par se relâcher par voie de révolution. Les Révolutions américaine et française en sont des exemples. Dans la société internationale, la “révolution” se manifeste par de grandes guerres, notamment la seconde guerre mondiale. On voit que les relations entre droit et valeurs sont intimes: il s'agit d'un parallélogramme de forces toujours en action. Le droit international et les valeurs du XXIème siècle Où en sommes nous avec l'influence des valeurs sociales actuelles sur le droit international? Plutôt que de dire que cet ordre juridique mondial est éclaté quant aux valeurs, allons à l'essentiel. A vol d'oiseau, il est possible de dire qu'il se dessine la grande tendance, du XIXème siècle au XXIème, d'un droit international de coexistence qui cède le pas à un droit international de communauté. Le premier, le droit de coexistence, est un droit centré sur l'Etat uti singuli et sur ses intérêts individuels. C'est un droit faible en valeurs communautaires. Il est basé sur l'utilitas singulorum, sur un corps de droit “privé”. En effet, il y domine une approche de propriété (territoire), contrat (traités, volonté) et responsabilité (neminem laedere). C'était surtout le droit international du XIXème siècle et d'une partie du XXème siècle. Non que ces aspects aient disparu, mais voici que depuis 1945 un autre pan juridique s'est adjoint à ce droit international ancien. Du “droit public” est venu encadrer l'ancien “droit privé”. Voici donc un nouveau droit international imprégné de 10 Sur les aspects historiques, cf. W. G. GREWE, The Epochs of International Law, Berlin, 2000, p. 554ss. Voir aussi L. OPPENHEIM (éd. par R. JENNINGS / A. WATTS), International Law, 9. éd., Londres, 1992, p. 978-983. Sur le refus des Etats-Unis d'Amérique d'endosser la protection d'un trafiquant d'esclaves, cf. l'affaire Pelletier (1885), dans: Papers Relating to the Foreign Relations of the United States, vol. 26, Washington, 1887, p. 607 et R. KOLB, dans: RBDI, vol. 36, 2000, p. 131-2. 11 Sur le problème de l'intervention humanitaire, voir par exemple les deux contributions récentes de B. SIMMA, “NATO, the UN and the Use of Force: Legal Aspects”, EJIL, vol. 10, 1999, p. 1ss. et de A. CASSESE, “Ex iniuria ius non oritur: Are We Moving Towards International Legitimation of Forcible Humanitarian Countermeasures in the World Community?”, EJIL, vol. 10, 1999, p. 23ss. Pour des renvois plus nourris à la littérature récente sur le sujet, cf. C. TOMUSCHAT, “International Law: Ensuring the Survival of Mankind on the Eve of a New Century”, RCADI, vol. 281, 1999, p. 218ss. 12 Pour un exposé classique, cf. A. RANDELZHOFER, “Article 2(4)”, dans: B. SIMMA (éd.), The Charter of the United Nations, A Commentary, Oxford, 1995, p. 106ss..

(7) Conference Papers p 248 à 254. 254. 29.11.2002. 8:57. Page 254. Conference Papers. valeurs communautaires, fondé sur l'idée d'un intérêt commun, d'une utilitas publica. L'Etat n'est plus sa seule finalité: à côté et au-dessus de l'Etat il y a la Communauté internationale. On peut évoquer ici des concepts qui ont essaimé dans tous les sens, presque comme feux follets, pour réaliser ces orientations nouvelles: l'ordre public international, le ius cogens, les obligations erga omnes, les crimes internationaux, la compétence universelle, les droits de l'homme (comme droits hiérarchiquement supérieurs et intransgressibles), etc. On peut dire que cette “moralisation” du droit international, comme un auteur l'a appelée 13, que cette ouverture aux valeurs humaines, est une bonne chose. Mais il ne faut pas se fermer les yeux devant un problème aigu. Ce droit communautaire a besoin d'organes communs pour être administré correctement. Personne en droit interne ne serait très convaincu si tout citoyen pouvait prendre en ses propres mains la fiscalité ou la police, en affirmant qu'il agit dans l'intérêt collectif. Il n'en va pas autrement dans la société internationale. Un substratum de droit public a besoin d'organes publics pour vivre. Sinon il s'expose à être gravement détourné de ses fins propres, et, à travers les sélectivités et les inégalités, de se discréditer. C'est là qu'est le noeud du problème. On aime aujourd'hui à faire du “communautaire” et de “l'humanitaire”, mais en laissant le soin de sa mise en oeuvre aux Etats. La mise en oeuvre du communautaire y relève, pour reprendre les termes de R.J. Dupuy 14, du relationnel et non de l'institutionnel. C'est à ce niveau qu'il faudra des progrès qui seront cruciaux. De vrais organes internationaux, dotés d'importants pouvoirs, devront être créés pour servir de support à ce droit international nouveau, à visées communautaires. Sans eux, ces visées risqueront de péricliter. Or comment ne pas voir les énormes obstacles qui se dressent contre de tels transferts de pouvoir vers des organes supranationaux? Comment ne pas voir qu'il s'agit ici de rien de moins que l'ancien postulat de l'Etat mondial, pour le moins embryonnaire? Dès lors, si le droit international du XXIème siècle pourra être plus proche des valeurs sociales, communautaires et humanitaires, l'effectivité de son volet communautaire (contrairement à celui de coexistence) dépendra essentiellement de l'existence d'un essor institutionnel parallèle15. Il est difficile de dire s'il faut être optimiste, – mais peut-être tout autant de dire s'il faut être pessimiste.. 13 J. A. PASTOR RIDRUEJO, “Le droit international à la veille du XXIème siècle: normes, faits et valeurs. Cours général de droit international public”, RCADI, vol. 274, 1998, p. 296. 14 R. J. DUPUY, La Communauté internationale entre le mythe et l'histoire, Paris, 1986, p. 39ss er R. J. DUPUY, “Communauté internationale et disparités de développement”, RCADI, vol. 165, 1979-IV, p. 45ss. 15 Voir à cet égard aussi les réflexions dans: R. KOLB, “Du droit international des Etats et du droit international des hommes”, Revue africaine de droit international et de droit comparé, vol. 12, 2000, p. 226-239..

(8)

Références

Documents relatifs

Tout d’abord, en ce qui concerne le droit de vote, l’alinéa 4 de l’article 778-1 de l’Acte uniforme, prévoit que les actions de préférence sans droit de vote

Cette immixtion du terme provient à la fois des principes européens de droit des contrats (qui comportent très fréquemment une terminologie équivalente) mais encore

D'autre part, si les bons de jouissance ne sont pas acquis par la société en vue de leur annulation, mais à titre de placement, les titres sans valeur nominale

L’existence d’œuvres scandalisant les mœurs publiques et le pouvoir religieux, tout comme le débat sur les abus dans l’expression artistique, n’ont rien de

(DEHOUSSE F., VINCENT P. , « Les règles d’origine de la Communauté Européenne, Pratique du droit Communautaire », Bruylant, Bruxelles 1999 p. 12) Dans une zone de

S’opposant à une conception d’un ordre juridique conçu comme ensemble de règles, et que le positivisme aurait contribuée à forger, le constitutionnalisme contemporain

174. - Les règles régissant les actes de concurrence déloyale et l’ordre public de direction – Si un lien de filiation existe entre le droit de la concurrence déloyale et le droit

Il s'agit du Règlement relatif à la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale des enfants