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L'ESPACE RURAL COMME ENJEU SOCIAL (1) par M.MORMONT

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Academic year: 2022

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L'ESPACE RURAL COMME ENJEU SOCIAL (1)

par M.MORMONT

La recherche présentée ici s'appuie à la fois sur une théorie de l'espace - comme objet d'appropriation et comme milieu - et sur une théorie de la struc- ture sociale - position sociale et champs sociaux. Les observations sont menées parallèlement sur deux terrains: celui du tourisme en espace rural, et celui des formes de vie collective locale.

Leur analyse en termes de modes d'usage de l'espace et de logiques d'actions fondées sur l'interaction spatiale des groupes sociaux et des champs sociaux permet de comprendre comment, à travers des problèmes concrets comme celui d'une implantation touristique, l'espace rural devient un enjeu qui engage aussi bien la force économique, le pouvoir politique et symbolique des groupes sociaux.

INTRODUCTION

Cet article contribue à mettre à jour, et à expliquer quelques-unes des logiques sociales qui sous-tendent les utilisations de l'espace rural: on essayera ainsi de montrer comment cet espace constitue un enjeu social, c'est-à-dire un enjeu dans les rapports entre les groupes sociaux.

On commencera par exposer brièvement le problème qu'on a voulu poser et on introduira ainsi rapidement les instruments théoriques qui ont servi à l'étudier: on explicitera les notions d'espace, de position sociale et de champ de pratiques sociales.

Dans un deuxième temps, on systématisera les données d'observation à propos de nos objets d'étude: le tourisme et la vie collective locale. On y

(1) Le texte reprend l'exposé présenté lors de la thèse défendue sous le même titre à la Fondation Universitaire Luxembourgeoise (Arlon) dans le cadre du doctorat en sciences de l'environnement.

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verra comment s'élaborent différentes manières d'utiliser l'espace rural.

Dans un troisième temps et pour préciser que l'espace est bien un enjeu social, on montrera que ces différentes logiques d'usage de l'espace se combinent entre elles, autour d'enjeux concrets.

Ceci nous conduira, en conclusion, à montrer la pertinence de ces analyses tant du point de vue de l'environnement que de celui du dévelop- pement rural.

J. Éléments de théorie

Plutôt que de définir au départ, de manière abstraite et peut-être arbitraire, l'espace rural, on suppose que cet espace prend des significa- tions différentes selon le type d'acteurs sociaux, c'est-à-dire selon qu'il est utilisé par des agriculteurs, des touristes, des ruraux ou des urbains.

On voit, en effet, que l'espace rural est utilisé différemment par chacune de ces catégories, et que chacune tend par conséquent à le définir à sa manière, et même pourrait-on dire, selon son intérêt.

Il y a donc une diversité de définitions de l'espace rural parce qu'il y a une diversité de manières de l'utiliser, et une diversité d'acteurs sociaux face à l'espace rural. Cette diversité s'accroît à mesure que de nouveaux intérêts surgissent pour l'espace rural - le tourisme, le cadre de vie,- et aussi à mesure que le milieu rural se transforme - déclin de la population agricole, nouvelles activités et nouvelles institutions.

Cette prise de conscience de la diversité des appropriations de l'espace rural nous conduit à poser un premier instrument théorique ou un premier axe d'analyse.

L'espace auquel on a affaire n'est pas un espace neutre, un espace physique, c'est bien un espace avec lequel les acteurs entretiennent des relations: l'espace est social parce qu'il est significatif pour un acteur.

L'espace est étudié dans les rapports que les acteurs entretiennent avec lui.

Mais si l'espace a aussi une signification pour chacun des acteurs qui l'utilisent, s'il est donc un objet d'appropriation, l'espace est aussi un milieu (Remy, 1975).

En effet, à partir du moment ou plusieurs acteurs utilisent chacun à leur manière un même espace - le touriste qui contemple le paysage utilise à sa manière le même espace que l'agriculteur cultive, - il y a donc coexistence entre plusieurs acteurs dans le même espace.

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De plus, chaque activité tend à transformer l'espace: le tourisme implique des implantations particulières, le type d'activité agricole impo- se certaines contraintes.

Ceci a deux conséquences importantes; la première est que la coexistence de chacun des acteurs dans un milieu donné entraîne des interactions entre eux. On constatera par exemple que des ouvriers dans un villageàdominance agricole ne se comportent pas de la même manière que dans un villageà dominance ouvrière. Ici, ils peuvent, étant majori- taires, développer une vie collective propre à travers des organisations diverses où ils trouvent àaffirmer leur fierté propre et à développer leur mode de vie.

Dans un village agricole, au contraire, ils vont se diviser en deux groupes: ceux d'une part qui continuent à vivre comme des paysans, dans la vie sociale et dans les activités collectives; d'autre part certains, pour affirmer leur statut d'ouvriers, iront chercher àl'extérieur les formes de vie collective proprement ouvrières. Et cette division affecte le village tout entier.

Seconde conséquence: chaque activité qui se déroule dans un espace modifie les conditions dans lesquelles s'exercent les autres activités.

L'espace est donc aussi un contexte particulier pour chacun. (Remy, 1972).

On ne peut pratiquer le même type de tourisme dans un espace à dominante agricole ou dans un espace urbain, ou encore dans un espace désertique. Et si on introduit dans un espace touristique, peuplé de résidences secondaires, un équipement touristique important, c'est tout l'espace qui en est affecté et ces résidences peuvent même en perdre leur valeur économique parce qu'il n'est plus possible d'y disposer du calme et de l'isolement requis pour ce type de tourisme.

On analyse donc l'espace non seulement comme espace physique, mais comme un espace utilisé par un acteur; non seulement comme un objet, mais aussi comme un milieu de coexistence et comme un contexte global, comme le résultat de l'existence simultanée de plusieurs activités et de plusieurs groupes.

Ceci nous donne une première idée de l'enjeu social. En effet, dans un même espace, deux activités différentes peuvent s'harmoniser, se favoriser mutuellement, mais elles peuvent aussi se nuire, être relative- ment incompatibles; de même deux groupes peuvent coexister ou s'op- poser. Chacun doit de toute manière imposer et légitimer son usage de l'espace. Se faire «admettre» dans le milieu, s'arranger du contexte existant.

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Comment un groupe ou un acteur social peut-il, dans un milieu donné, établir son activité et imposer sa présence? Il faut pour le comprendre recourir à un deuxième instrument d'analyse.

Chaque acteur se trouve en effet défini non seulement par son activité propre dans un espace, mais aussi par les moyens dont il dispose pour exercer son activité, et donc pour occuper cet espace. Les agricul- teurs ne sont pas seulement des occupants de l'espace rural, ils forment aussi un groupe social avec une force économique, une représentation politique, par lesquels ils ont un certain poids sur les décisions et les transformations qui affectent la société et l'espace en particulier. On parlera donc de position sociale pour désigner, non pas les individus concrets, mais les propriétés qui définissent un groupe dans sa relation aux autres groupes sociaux. (Bourdieu, 1966). C'est dans la mesure où un groupe dispose de certains biens - biens économiques, mais aussi politi- ques ou culturels - qu'il peut intervenir dans la vie sociale, c'est-à-dire dans les rapports entre tous les groupes qui forment la société, mieux la structure sociale.

Les acteurs qu'on trouve dans un espace donné ne sont pas seulement liés entre eux par une coexistence spatiale, ils sont aussi en relation parce qu'ils appartiennent à des groupes sociaux qui ont chacun une position dans la structure sociale, parce qu'ils ont accès pour leur part à ce qui permet d'agir sur la vie sociale et sur l'espace.

La notion de position sociale nous permet donc de situer chaque acteur par rapport aux autres à partir de sa capacité relative à agir sur les relations entre eux.

Ceci n'est cependant pas suffisant: parler de la société dans son ensemble est bien vague et général quand on a affaire dans un espace à des individus engagés dans des activités précises.

L'agriculteur, n'est pas seulement différent du touriste parce qu'il a une autre position. Il est aussi engagé dans un secteur d'activités qui a sa logique propre. De même le touriste, outre sa position sociale, est défini par son activité propre à un moment donné. On parlera de champ social (Bourdieu, 1975; Grignon, 1977), pour désigner un ensemble particulier de relations entre des acteurs: il y a des relations spécifiques entre les acteurs àpartir du moment où ils se définissent mutuellement par rapport à un enjeu social.

Cet enjeu peut être la compétence scientifique, on parlera du champ scientifique; ce peut être le champ économique si l'enjeu en est l'appro- priation des produits de l'activité économique.

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Ainsi, par exemple, des relations économiques et de leur impact sur l'espace villageois. Il peut exister des relations économiques propres au village dans la mesure où de petits agriculteurs ou des ouvriers-paysans dépendent pour leur exploitation de l'usage de machines possédées par des exploitants plus importants. Entre les deux s'établit une relation d'échange - machine contre travail - et souvent de dépendance. Quand, par la disparition des petites exploitations, ces relations disparaissent, c'est tout un ensemble de relations locales qui disparait et les uns ne peuvent plus utiliser ces relations dans la vie quotidienne ou dans la vie politique locale.

Chaque champ social est organisé selon une logique qui lui est propre, logique qui tient au type de bien social en jeu, et qui tient aussi à l'état des relations entre les différents acteurs situés dans ce champ.

Espace comme milieu et contexte, position sociale et champ social forment notre appareil théorique; grâce auquel nous allons étudier deux objets particuliers.

Nous allons d'abord étudier le tourisme, puisqu'il s'agit bien là d'un usage de l'espace nouveau et qui pose des problèmes biens actuels. Pour l'étudier, nous allons d'abord le considérer comme un champ, c'est-à-dire étudier les relations entre les différents groupes de touristes selon leur accès au bien dénommé vacances. Nous verrons alors à travers l'observa- tion ethnographique que la manière d'utiliser l'espace rural va se diffé- rencier selon la position des acteurs.

Enfin, nous verrons que si ces usages différents de l'espace rural doivent coexister, il en résulte une sorte de concurrence pour cet espace et que tout cela rend compte de certaines polémiques ou de certains discours sur l'espace rural.

Nous allons ensuite, à partir de monographies locales comparées, étudier le milieu rural en nous demandant comment il se transforme, comment il s'organise et comment cela le conduit àse situer comme un acteur collectif face à cet enjeu qu'est l'espace. Pour ceci, nous observons des milieux concrets, des villages, et nous tâcherons de montrer comment ce sont des contextes ou des milieux qui tendent àproduire des attitudes et des prises de position face à l'espace.

On aura vu d'un côté quel espace rural le tourisme tend à créer et à imposer; nous verrons ici entre autres comment le milieu rural réagit au tourisme, comment il l'utilise. Ceci nous permettra de comprendre les uns et les autres et leurs relations mutuelles.

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II. Dynamiques du tourisme et de la vie coUective en miUeu rural Ces outils théoriques permettent d'ordonner différentes observa- tions. Le tourisme, tout d'abord, n'est pas un phénomène homogène. Il suffit de constater les différences 'd'accès au tourisme pour se rendre compte qu'il s"agit d'une pratique avec laquelle les groupes sociaux ont des rapports différents.

Malgré les lacunes des données actuelles (Van Hove, 1969; West- vlaams Ekonomisch Studiebureau, 1971), il est aisé de montrer les disparités qui séparent les groupes sociaux depuis les agriculteurs, dont le taux de départ en vacances reste infime - quelques pour cent - jusqu'aux couches supérieures dont le taux de départ approche de 1000/0.

Combien plus si on passe des vacances d'été aux courtes vacances ou week-ends que seul un tiers de la population consomme, la plus grande part étant appropriée par une couche infime. Ces différences, dont on sait qu'elles évoluent avec le temps, sont importantes pour mettre en évidence la signification différente que le tourisme prend dans des groupes différents, selon leur position: ce qui chez les uns est pratique familière, courante et habituelle, bref normale, demeure pour certains un fait rare, peu ordinaire, bef qui conserve son caractère de moment exceptionnel.

Surtout, il y a d'un groupe à l'autre des différences importantes de familiarités avec l'espace rural comme espace de vacances. Un espace qui est pour les uns un espace de vacances parmi d'autres, un espace habituel des week-ends, presque un second chez-soi, représente au contraire pour d'autres un milieu neuf et étranger, qui garde donc sa valeur de rupture par rapport aux conditions quotidiennes de vie en milieu urbain.

Dans l'espace rural, nous allons donc trouver différents types de touristes selon leur origine sociale. Nous allons surtout avoir affaire à différents types de tourismes: il suffit d'opposer le propriétaire d'une résidence secondaire dont, en plus des vacances à l'étranger, les séjours à la campagne sont fréquents durant toute l'année, au campeur estival qui vient une fois l'an, à l'occasion des congés payés, dans ce même espace. Si le premier peut se sentir chez lui parce que cela fait partie - depuis le village jusqu'à son mobilier, de son univers quotidien, l'autre ne peut avoir la même familiarité avec un espace peu connu, fréquenté massive- ment, mais qui reste souvent le seul possible et dont il attend toutes les satisfactions promises par ce moment des vacances.

D'un groupe à l'autre, ce sont les conditions sociales globales d'accès à l'espace rural,' et non seulement les taux de départ ou le montant des

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dépenses, qui varient: c'est le fait de cumuler faible revenu, séjour obligé à certain moment, rareté des vacances et mode d'hébergement comme le camping qui est significatif plutôt que l'effet simple de chacun des facteurs. C'est pourquoi, contrairement aux analyses habituelles, on ne peut considérer seulement des critères comme celui du mode d'héberge- ment pour différencier la population touristique: c'est dans la manière dont vont se combiner position sociale, mode de tourisme et mode d'hébergement, c'est-à-dire structure sociale, schéma culturel et morpho- logie que vont se former des groupes significatifs.

Car, il faut ajouter que chaque groupe social, du fait de sa position, exige des vacances quelque chose de différent. Si on peut admettre qu'il existe une symbolique collective des vacances - articulée autour d'opposi- tions comme celles du travail au loisir, de la contrainte et de la liberté, de la ville et de la nature-, il n'en reste pas moins que chaque groupe réinterprète cette symbolique selon les règles implicites de son comporte- ment propre, selon la logique des perceptions, des goûts et des intérêts qui lui sont propres, bref selon son éthos de classe. Ceci peut déjà se lire à travers les budgets de vacances ou les dépenses touristiques.

Retenons ici un seul aspect des manières d'être en vacances des différents groupes sociaux, parce que cet aspect a un impact sur les usages de l'espace. Chaque groupe social manifeste en effet en vacances une sociabilité qui lui est propre: cette sociabilité va s'inscrire dans l'espace, dans l'utilisation des équipements et même dans le paysage, de même qu'elle va conditionner les perceptions mutuelles des divers groupes de touristes.

L'analyse du comportement touristique en termes d'éthos de classe devrait permettre de dépasser les oppositions arbitraires et abstraites entre le tourisme comme activité en continuité ou activité en rupture avec le monde quotidien (Burch, 1969: Cheek, 1972) tant il est vrai que les acteurs, à des degrés divers, tendent à faire de leurs vacances un temps où le style de vie s'affirme et donc les valeurs du groupe par opposition aux contraintes matérielles et/ou symboliques de la vie quotidienne.

Pour les membres des couches supérieures, cet espace rural ne constitue guère qu'un espace de loisir ou de vacances parmi d'autres: il tend donc à répondre à un besoin spécifique de vacances. A côté d'un ou plusieurs jours à l'étranger, à côté des voyages, l'espace rural et la résidence secondaire sont partout des lieux proches, des autres chez-soi, mais des chez-soi réservés. Espace où on va se mettre à l'écart des relations sociales imposées par la vie quotidienne, par la vie profession- nelle, par la vie urbaine et son agitation ou sa promiscuité. C'est donc un

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espace de la famille, et des relations sociales privilégiées, bref d'une sociabilité élective.

C'est aussi, et par conséquent, un espace de loisir électif où il doit être possible d'être soi-même dans des activités qui répondent à l'origina- lité individuelle de chacun. Espace d'isolement donc et espace de préfé- rence vide, peu socialisé ou peu équipé pour répondre à la capacité de découverte et de «création» propre à chacun. Cela explique le goût prononcé des membres de ces groupes pour un environnement naturel, authentique, vierge autant que possible de l'intervention de la société technique et organisée. Goût donc pour le paysage qui répond à ces caractéristiques.

On peut facilement opposer cette manière d'être à celles des couches populaires pour qui les vacances sont au contraire un moment privilégié de vie sociale, moment de retrouver la famille étendue, moment de vivre en groupes larges formés de voisins, ou de collègues ou de connaissances nouvelles, moment de retrouver une sorte de voisinage animé et chaleu- reux que la vie urbaine interdit souvent. Ce sera donc aussi le temps des activités collectives, des bons repas, des divers sports - pratiqués comme des jeux. Comme c'est aussi le seul séjour de vacances, c'est un moment où il importe que la vie soit intense. L'espace touristique va donc valoir par sa capacité à servir de support à un dépaysement et à une vie sociale active et intense.

Les couches moyennes, entre lesquelles il faudrait distinguer diverses fractions, se caractérisent généralement par le resserrement des liens familiaux et par une propension à ce qu'on peut appeler les consomma- tions culturelles, qu'il s"agisse selon le cas de variantes historiques, folkloriques ou naturalistes ... Comment des différences de sociabilité et d'intérêts sont-elles vécues, comment s'inscrivent-elles dans l'espace et comment sont-elles perçues?

Comme le montre l'ethnographie d'un camping, la densité est la condition normale de vie en vacances des milieux populaires: imposée en partie par des conditions économiques, cette manière de vivre est vécue sans grands problèmes, précisément parce qu'elle permet une vie sociale décontractée et intense et permet l'accès à quelques équipements où peut se réaliser la sociabilité propre aux milieux populaires.

Au contraire, cette densité est perçue négativement par les membres des couches supérieures qui disposent des moyens économiques et symbo- liques de l'isolement et qui exigent de l'espace rural une distance d'avec les situations de foule, de promiscuité et d'avec l'animation propre au

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camping. (voir aussi pour l'usage de la forêt par exemple: Ballion et Bellan, 1974).

Il Y a donc bien des différences d'exigence à l'égard de l'espace:

d'isolement et d'authenticité pour les uns; de densité, d'activités animées pour les autres. Et ces différences deviennent des oppositions à partir du moment où la coexistence spatiale rapproche des membres de chacun de ces groupes. Il y a en effet contradiction entre un espace naturel, préservé et peu fréquenté et un espace touristique équipé et fréquenté massive- ment.

Et elle apparaît d'abord dans les perceptions mutuelles des touristes, ne fut-ce que dans une incompréhension mutuelle des manières de vivre en vacances.

Cette opposition est réelle ou potentielle selon les lieux: mais elle est d'autant plus probable que la densité globale s'accroît. (Remy, 1972:

1011). Ceci va nous permettre d'interroger le discours dominant sur le paysage rural. N'est-ce pas un langage qui, s'appuyant quelquefois sur celui de l'environnement joue un rôle dans ces oppositions? Il se présente comme la revendication d'un cadre de vie authentique et préservé; il correspond donc particulièrement aux goûts des couches supérieures et il tend à présenter les comportements populaires, dont nous avons montré la logique, comme des comportements incompétents et incompréhen- sibles.

On dénoncera ainsi l'animation insolente que le camping multicolore met dans le paysage, on dénigrera les chalets de tous genres qui représentent aux yeux de leurs auteurs la liberté et la rupture avec le quotidien. Ce langage sur le paysage rural les présente comme relevant du mauvais goût, comme des atteintes à l'esthétique, c'est-à-dire à un patrimoine commun. La manière de décrire les auteurs de ces fautes (cinsolence», m'as-tu-vu-isme», «imitation prétentieuse») et les exemples pris désignent bien les classes moyennes et populaires comme de mauvais occupants de l'espace rural.

Ce discours, qui se donne comme neutre parce que fondé sur des valeurs universelles, légitime certains usages, et dévalorise certains autres:

il tend à assurer à certains le monopole de cet espace, et dans une certaine mesure aussi à instituer l'espace rural comme espace exclusivement réservé à cet usage, dans la mesure où toute activité qui menace cette qualité du paysage devrait être proscrite.

La manière de définir l'espace constitue donc un enjeu parce que les différentes catégories de touristes, du fait de leurs conditions d'accès à l'espace et du fait de leur éthos de classe, s'approprient différemment

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l'espace et sont donc inégalement intéressées àtelle ou telle manière de le définir, d'en fixer les usages légitimes surtout parce que la diversité des usages tend à une concurrence pour l'espace. Le milieu rural est donc concerné aussi puisque c'est son espace qui est en jeu. On va montrer dans une seconde analyse comment le milieu rural se transforme et réussit à se poser comme un facteur face à cet enjeu.

Comment le milieu rural réussit-il à se poser lui-même en acteur face à l'espace?

On se demandera d'abord comment se transforme le milieu rural, comment il change. Avant que ce ne soient les habitants du village qui changent, c'est le village lui-même qui se transforme, comme espace situé par rapport à d'autres espaces: c'est la position de l'espace villageois qui change.

De manière générale, il y a dans l'espace local de moins en moins de bases pour fonder une vie sociale qui soit particulière au groupe villa- geois. De plus en plus, ce qui détermine les conditions de vie et de mode de vie des villageois se trouve à l'extérieur du village, sans que le village ne joue un rôle dans ces conditions. Le marché strictement local - même celui de la terre - ne joue plus un rôle décisif dans les conditions de fonctionnement d'une exploitation agricole de plus en plus liée à un marché vaste, à des conditions macroéconomiques et à un crédit finan- cier, bref à des facteurs face auxquels le village comme groupe n'est ni signifiant, ni surtout un acteur pertinent. (Remy, 1971). Même l'école locale, quand elle subsiste, ne présente plus qu'une partie d'un cursus scolaire souhaité d'autant plus ardemment que l'avenir local paraît sombre: on en attend de moins en moins un rôle dans la vie locale, une -éducation morale dans la vie sociale et de plus en plus une somme d'acquisitions scolaires (Mougenot et Mormont, 1974): pour cela on est prêt de plus en plus à mettre en concurrence l'école locale et d'autres écoles dont le modernisme urbain peut apparaître comme une garantie supplémentaire pour l'avenir.

Comme le montrent les aires de mariages, il y aàla fois extension de l'espace vécu à une échelle plus large que le village, et une moindre dépendance de la vie quotidienne à l'égard de la vie sociale locale, de voisinage et de l'espace lui-même.

Cette transformation, ce déplacement de l'espace local dans l'en- semble des espaces significatifs, affecte bien sûr différemment les indivi- dus selon leur position: certains, comme les petits agriculteurs âgés, peuvent encore vivreàl'intérieur d'un espace local limité, le seul qui leur soit bien connu, accessible, le seul aussi où leur pouvoir technique autant

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que social devrait avoir valeur, alors qu'on comprend que pour ceux dont le travail comme la famille se situent à l'extérieur, le village est un espace moins décisif. (Champagne, 1975).

Mais cette transformation affecte le milieu dans son ensemble, comme contexte global. La connaissance mutuelle, qui dans un groupe clos est un savoir nécessaire et un moyen de pouvoir, perd de son poids et de son utilité. Ceux qui assuraient la circulation de l'information ou son stockage et sa transmission voient leur fonction sociale réduite et dévalorisée. Cette dévalorisation, quand elle est vécue comme la perte de quelque chose d'essentiel, quand elle n'est pas compensée par l'accès àde nouvelles sources de satisfaction, ce qui supposerait de sortir du village, cette dévalorisation peut provoquer un sentiment de démoralisation, pousser par exemple à une critique acerbe de l'innovation et de la jeunesse, mettre en opposition avec d'autres groupes et diviser d'autant le groupe local entre ceux de la tradition qui n'est plus respectée et ceux de l'innovation qui n'est pas comprise. Ainsi peuvent se produire des ambiances locales particulières qui obèrent les possibilités d'action.

Toutes ces transformations, qu'on décrit ici isolément, réagissent les unes sur les autres: quand la religion perd son sens collectif, ce sont aussi les fêtes qui perdent leur coloration religieuse, et les querelles politiques et rivalités ne peuvent plus guère s'en réclamer ...

Cette évolution de l'espace villageois s'accompagne-t-elle d'une disparition de la vie collective? En fait, la vie collective se transforme, elle prolifère même si on se borne à compter les groupements et les activités.

La vie collective connaît un développement autre. Sous l'impulsion des jeunes, scolarisés plus longtemps, des couches moyennes travaillant à la ville, quelquefois des femmes plus sensibles à la pression culturelle de la société globale (Remy, 1971), la vie collective ne consiste plus tellement en fêtes collectives, en rituels sociaux et religieux, mais elle tend à devenir un ensemble d'activités significativement appelées socio-culturelles; ces acti- vités sont le plus souvent des diffusions dans le groupe local de messages, d'idées, de biens culturels et de compétences qui sont valables bien en-dehors de l'échelle locale. Dans cet univers, raconter les choses du passé n'a plus guère de sens parce que cela n'éclaire guère le présent. On continuera parfois à le faire mais en réservant ces veillées traditionnelles aux vieux, comme un loisir qui leur serait propre mais qui ne concernerait plus personne d'autre. C'est que cette vie collective est vécue autrement:

elle n'a plus un caractère obligatoire, la participation y est facultative; les groupes ne sont plus fermés selon les alliances familiales ou politiques, ils se veulent ouverts et indépendants de tout autre critère que celui de 19

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satisfaire une clientèle ou un public. Pareille vie collective met forcément en évidence des acteurs nouveaux.

A la hiérarchie sociale ancienne fondée sur la position sociale locale - le pouvoir économique, le prestige - c'est-à-dire sur la maîtrise de biens locaux se substitue une hiérarchie de leaders fondée sur la capacité à assurer les relations à l'extérieur." Les leaders anciens sont réduits à cautionner, bon gré, mal gré, les innovations qui se présentent toujours comme la défense du village, la promotion du groupe villageois.

Il y a les leaders culturels, qui, dans une activité, peuvent par leur compétence apporter à leur public ce que celui-ci demande, "qu'il s'agisse de cinéma, de sport, ou d'autres activités. Il y a ensuite les leaders qui peuvent assurer des médiations avec l'extérieur, c'est-à-dire surtout avec les champs administratif et politique de manière à obtenir soit des avantages individuels (jusqu'en matière d'emplois dans les services pu- blics, importants en milieu rural) soit des avantages collectifs, c'est-à-dire surtout de quoi assurer matériellement l'organisation de la vie collective.

Il persiste donc une forte intégration locale de la vie collective fondée à la fois sur la gestion des bases matérielles de la vie collective et sur les médiations par le champ politique où l'ensemble du village peut se présenter comme une clientèle. La vie collective s'appuie sur un réseau local d'organisations et de personnes, réseau au sommet duquel on peut mettre les acteurs qui sont impliqués dans le champ politique.

Les transformations du milieu villageois et de sa vie collective permettent de comprendre la logique d'action des individus et des groupes, leurs attitudes à l'égard de l'avenir et de l'espace.

Pour ceux qui se sentent marginalisés par cette évolution, le temps apparaît comme une dégradation sociale et morale parce qu'ils voient disparaître ce en quoi ils avaient investi dans le passé. Il ne peuvent à la fois que se replier sur l'espace local, sur le village et en même temps laisser l'initiative à ceux qui, au nom de ce même groupe villageois, créent ces nouvelles activités; mais en même temps ils refusent toute initiative qui leur apparaît comme l'intrusion dans le groupe local d'acteurs nouveaux, qu'il s'agisse de touristes, de nouveaux habitants ou d'intégra- tion dans la vie collective d'acteurs extérieurs au village.

Ceux que nous appellerons les leaders culturels, qui assurent l'ani- mation de la vie collective, doivent l'essentiel <le leurs attitudes à leur trajet social. Généralement issus du village, ayant accompli une mobilité sociale relative mais demeurés au village, ils considèrent celui-ci comme un environnement agréable à préserver et les changements qu'ils promeu- vent se limitent à ces activités nouvelles où ils trouvent à la fois la 20

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reconnaissance sociale et la satisfaction de leurs goûts culturels. Soucieux de préserver leur terrain d'action, ils sont 'également jaloux de l'autono- mie locale et de leurs organisations: pour eux l'espace local doit rester clos, un chez soi où il doit être possible de jouir des mêmes avantages qu'à la ville, perçue à la fois comme un milieu riche au plan culturel et pauvre au plan social (anonyme) et matériel (l'environnement).

Ceux qui maîtrisent le mieux la vie collective parce qu'ils sont engagés dans la vie politique, doivent à cette position particulière de percevoir le village par comparaison avec d'autres espaces sociaux et d'en envisager l'avenir: ainsi sont-ils les seuls à s'interroger sur des innovations telles que le développement touristique, et à rechercher des nouvelles activités propres à sauvegarder le niveau de la population, de l'emploi ou des services.

Contraints par les précédents à ne s'engager qu'avec prudence, ils doivent aussi à leur position qui est limitée au champ politique de n'envisager l'avenir que comme un ensemble d'aides de l'extérieur de manière à s'assurer la survie de la population locale. Bref, leurs projets se limitent à réclamer pour leur espace local un ensemble de services de type urbain, de manière à mettre en concurrence l'espace local avec la ville, mais ce par seule référence à celle-ci.

Ces trois types d'attitudes étant forcés de coexister et de composer, on voit se dessiner le mode d'action qu'engendrent et l'évolution du village et l'organisation de sa vie collective. L'espace local reste l'espace de référence privilégié, c'est-à-dire le destinataire de toute action et de toute initiative; mais ce groupe local n'est plus celui qui fournit les critères qui orientent l'action: ceux-ci sont de plus en plus des critères extérieurs, il s'agit de vivre comme ailleurs, comme à la ville le plus souvent.

Particularisme local et dépendance symbolique se combinent avec le poids relatif croissant du champ politique qui apparaît comme le seul où le groupe local, par l'intermédaire de ses élus ou de ses médiateurs, peut agir, intervenir et obtenir. Ceci correspond à une sorte de surévaluation de la vie politique, et de son impact sur l'avenir.

Ainsi, le tourisme n'est accepté que si les touristes sont peu nom- breux, s'ils interviennent peu dans la vie locale: s'ils ne mettent pas en cause le groupe villageois, ni sa manière de vivre, ni ses habitudes.

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m.

Logiques sociales et mattrise de l'espace

Le tourisme, nous l'avons vu, n'est pas un phénomène homogène:

des oppositions apparaissent quant à la manière d'utiliser l'espace rural.

Le milieu rural, quant à lui, organise son action collective de manière toujours locale bien que le village cesse d'être le groupe qui fournit les critères de l'action à entreprendre.

Étant donné l'usage de la méthode ethnographique, on ne peut guère préciser la distribution quantitative des comportements observés. Mais on peut comprendre comment ces différentes logiques d'action vont se combiner, s'organiser entre elles.

A propos d'un exemple, on va tâcher de montrer comment ces groupes et leurs manières de faire vont se combiner dans l'action.

* * *

L'analyse distincte du tourisme et du milieu rural nous permet d'abord de constater que l'intérêt pour l'espace rural comme cadre de vie, comme espace résidentiel est commun à la fois à certains ruraux et à certains touristes.

Dans le milieu rural, ce sont surtout les couches moyennes qui manifestent cet intérêt, c'est-à-dire les groupes instruits, travaillant à la ville; pour eux le village est un environnement agréable, un chez soi qu'il faut aménager et protéger. Parmi les touristes ce sont surtout les couches moyennes et supérieures qui vont défendre le paysage rural et lutter contre toute atteinte qui en modifierait le caractère habituel, authentique.

Les grandes implantations touristiques sont un objet sur lequel une alliance, une connivence va s'établir entre les deux groupes. On les verra s'opposer ensemble à la «promotion touristique» considérée comme une atteinte à l'environnement, une violation du milieu, une destruction du caractère rural.

Cette connivence, fondée sur un intérêt commun à l'espace, va s'appuyer sur deux autres faits, Alliance avec les couches populaires rurales, absence d'action collective des couches populaires urbaines.

La majorité des ruraux va en effet partager cette opposition pour deux raisons. La première c'est que, comme on l'a vu, les couches moyennes ont réussi à occuper le leadership dans le milieu rural: elles sont

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déjà quasiment mandatées à défendre le village, les villageois et leur espace. De plus, les résidents secondaires sont eux aussi admis dans cette action parce que leur petit nombre, leur discrétion, leur ascétisme presque les font percevoir comme de bons touristes, quasiment comme des notables respectables et agréables.

Dans cette perspective, la défense de l'environnement prend facile- ment aux yeux de la plupart la place d'une défense des ruraux, des villageois contre tout l'anonymat, contre la puissance économique des promoteurs immobiliers, sur qui peut se reporter tout le sentiment d'infériorité et de dépendance des ruraux face au pouvoir économique, et à la ville en général.

L'opposition au promoteur va donc pouvoir réaliser une alliance locale entre tous ces groupes.

Face à eux, le promoteur dispose de deux atouts: de force économi- que d'abord, mais surtout l'appui d'une demande sociale de tourisme dense, bien équipé: derrière lui donc des couches populaires urbaines qui ne peuvent jouer un rôle que comme cela, qu'à travers un marché, et nOI) comme un acteur collectif qui pourrait, comme tel, faire valoir son point de vue, sa manière de vivre.

Ce bref exemple indique bien comment, dans une conjoncture donnée, des logiques d'action viennent se combiner, comment les groupes s'associent et s'opposent, et comment l'action s'engage.

Notre analyse des logiques sociales permet donc de rendre compte non seulement des comportements de chacun, mais, comme dans cet exemple, des effets globaux sur un milieu; de l'interaction dans un espace et autour d'un sujet de l'ensemble des logiques. Ainsi va se créer en effet tout un mouvement social d'opposition au tourisme de masse et toute une problématique du tourisme en milieu rural qui peuvent constituer une force réelle dans la négociation des implantations touristiques.

IV. Conclusions

En faisant cela, on pense avoir réalisé une étude théorique et empirique des relations de la structure sociale à l'espace rural et on va tenter de montrer l'importance de ces relations tant du point de vue de l'environnement que du développement rural.

Si on ne s'est pas préoccupé des impacts sur le milieu naturel, des nuisances du tourisme par exemple, on a par contre tenté de dégager la logique des faits sociaux qui expliquent les différentes formes de tou- risme, les utilisations de l'espace qui en découlent, et les éventuels conflits

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qui les sous-tendent. Ce faisant, on a contribué, nous semble-t-il, à ce qu'on pourrait appeler une écologie générale qui incorporerait aussi bien les relations propres au milieu naturel que celles entre celui-ci et la société.

Ce n'est pas un homme abstrait qui est en relation avec la nature, c'est un ensemble de groupes sociaux liés entre eux par des rapports sociaux déterminés. Ce sont des groupes sociaux qui font du tourisme, et chacun d'eux a des exigences à l'égard de l'espace rural: et c'est tout un champ touristique qui explique les stratégies des différents acteurs. Il est dès lors impossible, sauf à reprendre la définition dominante, de négliger ces utilisations différentielles de l'espace; il est difficile de favoriser ou d'interdire tel type d'usage sans entrer dans le jeu de la concurrence sociale autour de l'espace. Ne faudrait-il pas dès lors aussi s'interroger sur les effets sociaux de chaque politique de l'environnement, interroger aussi la «science de l'environnement» en se demandant si on peut se borner à poser les problèmes soulevés par ceux qui sont socialement portés à le faire, ou à les poser seulement dans les termes où ils sont posés par des groupes qui ont des intérêts explicites ou implicites à les poser ainsi.

On retiendra en effet avant tout de notre analyse que l'espace, dont l'aménagement est souvent pensé en termes techniques et spécialisés, constitue un enjeu social complexe, autour duquel différents acteurs dé- veloppent chacun leur logique propre: l'étude du milieu c'est cela plutôt que la simple reprise du discours de celui de ces acteurs qui se réclame de l'environnement.

Quant au milieu rural on soulignera d'abord qu'il n'apparaît guère comme un acteur unifié et actif faceàcete enjeu. On le voit se diviser face au problème du tourisme. Et on voit que les transformations qu'il subit font en sorte que le milieu local demeure le mode d'organisation collective privilégié alors même qu'il a cessé d'être pour les ruraux un groupe de référence, et qu'il cesse d'être un interlocuteur ou un intermédiaire obligé dans les transactions sociales importantes. On voit bien en effet que le problème du tourisme ne peut se poser en termes strictement locaux, qu'il s'agit d'une question qui concerne le milieu et l'espace dans leur ensemble; face à la tendance dominante à réduire l'espace rural à une fonction résidentielle, à un cadre de vie, chacune des composantes du milieu rural devrait pouvoir situer ses intérêts propres, sa vision de l'avenir, ses exigences et les formuler dans un langage qui leur donnent une efficacité sociale.

On pourrait en effet montrer qu'en plus de la légitimité dont elles disposent pour définir l'espace, les couches supérieures disposent d'une compétence symbolique qui leur permet d'exprimer dans un langage

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explicite et systématique la conception de l'espace qui répond à l'usage qu'elles en font; qu'au contraire les couches populaires en sont souvent réduites à ne s'exprimer que dans un langage d'opposition (inversion des slogans) et d'ironie mais parviennent difficilement à développer des images positives qui répondrait à leur manière de vivre, à leur système de valeurs et à l'objectiver dans des formes concrètes et explicites.

Notre analyse nous paraît utile, non par les solutions techniques et immédiates qu'on pourrait en déduire, mais par la manière de poser le problème. Elle devrait permettre aux acteurs de prendre conscience de cet enjeu, de comprendre sa dimension et de percevoir à la fois leurs propres réactions et leurs raisons sociales. Comme telle, elle peut permettre à ces acteurs de récupérer la première condition de la maîtrise de leur avenir, de récupérer la conscience de leur situation et de leur position dans les rapports de forces.

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