R EVUE DE STATISTIQUE APPLIQUÉE
R.-L. H ODARA
I. Utilisation pratique en usine de certains problèmes de la statistique. Application à l’atelier de battage du coton
Revue de statistique appliquée, tome 2, n
o4 (1954), p. 157-176
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II
UTILISATION PRATIQUE EN USINE
DE CERTAINS PROBLÈMES DE LA STATISTIQUE APPLICATION A L’ATELIER DE BATTAGE DU COTON
par
R.-L. HODARA
Ingénieur Conseil en OrganisationMonsieur le
Président, Mesdames, Messieurs,
Je vais vous
parler
maintenant d’un aspect un peu différent de celuiqu’a
traitéM.
le ProfesseurHENON.
Je vousparlerai
de l’utilisationpratique
en usine de certainsproblèmes
de lastatistique.
Toute nouvelle méthode en usine pose des
problèmes d’adaptation..
de diffusionet de
compréhension.
Lesresponsables
à tous les niveaux voient enrègle générale
avecune méfiance trop souvent
justifiée,
l’introduction de nouvellesméthodes, qu’elles
soientde
contrôle, d’organisation,
ou autre. Les résultats les meilleurs sont obtenuslorsque
lepersonnel
dont le travail va être affecté par la nouvelle méthode a pu recevoir uneformation préliminaire
luipermettant
de lacomprendre. Malheureusement,
enpratique,
il est donné au
personnel
très peud’opportunité
d’étudier les méthodes avant d’avoir à s’en servir.Quand
un filateur ou un tisseur faitappel
à unspécialiste pour
établir chezlui un
système
de contrôle de laqualité,
il n’est que très rarementpossible
de luidemander de former d’abord son
personnel
à une méthodedéterminée.
Enfait,
il fautd’abord établir toute la structure du contrôle de la
qualité,
fa!re fonctionner le servicependant
un certaintemps,
montrer les résultatsobtenus,
avant depouvoir
faire admettreque le
personnel
de l’usine nécessite une formation solide dans ce domaine.Cette manière d’aborder le
problème
semble àpremière
vueparfaitement
absurdemais,
en yréfléchissant,
oncomprendra
que si l’onenvisageait
lapossibilité
de formerd’abord le
personnel,
en raison même dugrand
nombre de nouvelles méthodesqui apparaissent continuellement
dansl’industrie,
certaines usinespas-seraient
leurtemps
à former dupersonnel
en usine sansjamais
avoir eu l’occasiond’appliquer
lesméthodes
souvent
périmées
avant d’avoir eu lapossibilité
d’êtreutilisables.
Ce que
je
vais vous montrer ici à l’aide de deuxexemples
concrets, c’est com-ment il est
possible
de substituer à des méthodesempiriques
decontrôle,
ouparfois
àune absence totale de
contrôle,
un contrôle rationnel utilisant unegrande partie
des élémentsdéjà
recueillis dans l’atelier etd’y
intéresser le contremaître et lesouvriers,
cecisans leur demander des connaissances
mathématiques quelles quittes
soient.Les deux
exemples
choisis concernent l’ateHer debattage.
Les chiffres et gra-phiques
queje
vais vous montrer concernent unbattage
de coton, mais enfait,
cetexemple pourrait
aussi bien être enfibranne,
encardé,
en carde fileuse ou toute autre fabrication textile où l’on forme une nappe au moyen de fibres.En
quelques
mots, lebattage consiste,
à l’aide de machinesvolumineuses,
bruyantes,
etqui,
croyezmoi,
tiennentplus
de la machineagricole
que du matérielindustriel - et ce n’est pas une
critique,
nous travaillons avec desmatières,
engénéral, agricoles
- à réunir les fibres venant de la matière brute en une nappe où elles se. trouvent
disposées
dans un état raisonnablement ouvert, raisonnablementhomogène,
etraisonnablement propre. Le
problème
est de savoirquel
est ce « raisonnable ».De
plus
enplus,
cesopérations
se font à la continue des ballesjusqu’à
la nappeou rouleau.
Pour étudier une
opération
dupoint
de vuequalité,
nous avons besoin descinq
éléments suivants :La matière alimentée : Ici ce sont des balles de coton
pressées cerclées.
Le matériel : Il est
complexe,
deprécision
trèsvariable;
dans notre casparticulier,
il se compose d’une
ligne
d’alimentation formée de 4 brise-balles et d’unechargeuse
àdéchets,
duneligne
denettoyage unique,
et d’uneligne
debattage
formée de 2 batteurs alimentés enparallèle.
La méthode : Un ouvrier situé à l’arrière des machines pose des fractions de balles sur des tabliers d’ouvreuse. Un ouvrier situé à l’avant lève les rouleaux finis.
Le
produit
fini : Il seprésente
sous forme de rouleaux mesurant 40 mètres delongueur
et pesant 17kilos,
’soit unpoids
au mètre linéaire de nappe de 425 gr. environ.Les moyens de contrôle : Une balance
enregistreuse
ou non,automatique
ou non,permettant
de peser les rouleauxproduits,
et une machine permettant de dérouler cesrouleaux pour couper et peser
chaque
mètreindividuellement.
Il est évident que le
premier
contrôle est un contrôlesystématique qui
ne détruitpas la matière. Le second contrôle ne
peut
être que limité.Dans toutes les
filatures,
lepersonnel
et la direction sontparfaitement
convaincusde
l’importance
de larégularité
dupoids
desrouleaux,
et engénéral
tous les rouleaux sontpesés
au fur et à mesure de laproduction
et ceuxqui
s’écartent dupoids
normalsont
refoulés,
c’est-à-direqu’ils
’sontrenvoyés
aux brise-balles où ils seront remis à laligne
d’ouvraison.L’ouvrier des batteurs peut
régler
sa machine de manière à influencer lepoids
duprochain
rouleaugrâce
à un organeappelé régulateur.
Il le fait engénéral lorsqu’il s’aperçoit
que le rouleauprécédent
est soit troplourd,
soittrop léger.
Il est intéressant designaler
tout de suite que ceréglage
est une desplus grandes
sources d’ennuis aubattage,
étant donné que très souventl’ouvrier,
s’il necomprend
pas bien leproblème,
aura tendance à aiouter la variation
qu’il produit
lui-même en touchant aurégulateur,
àla variation
intrinsèque qui
estproduite
par la machine et l’alimenteuret,
parconséquent,
le
problème
humainjoue
un trèsgrand
rôle dans cetteopération.
Les tolérances sont de ± 200 grammes parrou!eau,
et la balance esttarée,
de manière à ce que la lecture directe ne montre que les écarts par rapport aupoids
standard.Lorsqu’il s’agit
d’étudier un contrôlesystématique
dans cetatelier,
le contre-maître de
préparation
essaya de nous démontrer que ceci était tout à faitinutile,
étantdonné que le contrôle existant était
parfait. Essayer
de le convaincre par le65 chiffres aurait été absolument du tempsperdu.
Nous avonsessayé
de le convaincre et cela aété,
enfait,
du tempsperdu.
Nous avons donc été chercher dans les
graphiques
de sesbalances, graphiques qui
étaient donnés à raison d’un par batteur 2journées.
Je vais vous montrer le
premier graphique (graphique
1) : nous remarquons sur celui-ci que l’on ajuste quatre
rouleauxqui
sortent des limites de 200 gr. établies parl’usine,
limitespratiques qui
sont considérées commeacceptables.
Par
conséquent,
le contremaîtrejugea
que ceci était uneproduction
normaleacceptable,
étant donné que laproportion
de rouleaux sortant des limites n’excédait pas 5%.
C’est,
dans lapratique
desusines,
une choseparfaitement
normale. Notezcependant
que presque tous les rouleaux se situent dans la zone 150 à 200 gr. Le contremaître nous déclara donc que si tous lesgraphiques journaliers
étaient aussibons,
il serait
satisfait,
tout enacceptant
le fait quepeut-être
l’ouvrier aurégulateur
aurait puapporter
unelégère
amélioration sur la dernièrepartie
de lajournée.
03C3=157 g Fig.l
Voici maintenant un second
graphique
obtenuquelque temps après (graphique
2).Vous pouvez vous rendre
compte qu’ici
aussiquatre points
sortent des limites. Vousavez 5
%
despoints
hors des limites et, parconséquent,
vous avez, dupoint
de vue ducontremaître,
une mêmequalité
deproduits (de
la manière dont il mesuraitjusqu’à présent).
Quand
le contremaître examinait ceci à deuxjours d’intervalle,
ilvoyait
donc dans les deux cas, uneproportion
de 5 % de rouleaux sortant des limites et, dans les deux cas, ilpensait :
nous avons uneproduction satisfaisante;
nous n’avons pas faitplus
de 5
%
de rebut.C’est de là que nous avons
pris
leproblème.
Enfait,
le contremaître nous aconcédé que l’ouvrier aurait pu,
malgré
tout, s’éveiller un peuplus
tôt et rectifier cettetrès
longue
série depoints.
Les
points
vous semblent trèsréguliers,
parcequ’ils
ont été dessinésainsi,
maisvous avez une marge de 50 gr. et une certaine
dispersion
à l’intérieur. Ne croyez pais que vous ayez des batteursqui
fassent despoints qui
soient exactement comme ceux-ci.Nous voyons dans le 2d
graphique
que !espoints
sontbeaucoup plus groupés
autour de l’axe
0;
nous avionsprécédemment (graphique 1) beaucoup
de rouleaux dans la zone150/200
gr., et n’en avons presque pas ici.Lorsque
nous montrâmes ceci aucontremaître,
il reconnut que,malgré tout,
il semblait que laproduction correspondant
au 2dgraphique
étaitmeilleure;
et il s’em-pressa de nous en donner
quelques
raisons : selonlui,
tepremier graphique provenait
d’unejournée
où l’alimenteur était unremplaçant qui
ne savait pasdisposer
la matièrebrute,
ou d’un batteurayant
une mauvaiseventilation.
cf - 63,5 9
Fig.2
Ceci est
important
car nous voyons ici que si nous mettons en évidence des différences dequalité,
le technicien que lecontrôle
ne doitjamais
niremplacer
niéliminer
peut
résoudre leproblème technique
et améliorer la situation.Ce
qui
est intéressant maintenant est de voirpourquoi
unequalité peut
être meilleure que l’autre. Je croisqu’il
faut pour celaenvisager
la suite desopérations;
vousverrez ainsi toute
l’importance
de ce facteur.Ces rouleaux
passent
sur des cardesqui
fournissent un ruban pesant environ 4 à 5 gr. aumètre,
c’est-à-direqu’un
mètre de rouleau donne environ 100 mètres de ruban. La carde par sa naturereproduit
assez fidèlement lesirrégularités
du rouleau.Ensuite,
les rubans de carde ’sont assemblés par 6 ou 8 (unepremière, plus
une deuxièmefois) pour que le
poids
moyen du ruban sortant de la machine suivante ouétirage
soitainsi
régularisé.
En somme, nous avons combiné 6 à 8 rouleaux de batteur à la sortie des
étirages.
On voit donc sans
grande
difficulté et sans calculqu’il
y aplus
derisque
d’obtenir des rubansd’étirage irréguliers
en combinant les rouleaux dugraphique
1 - ’surlequel
vous avez
beaucoup plus
de rouleauxqui
se trouvent entre+ 150
et 200 - que les rouleaux dugraphique
2où, pratiquement,
vous n’avez pas de rouleaux dans lesparties
extrêmes.
Ceci peut demander
quelques explications plus
ou moins laborieuses suivant le nive’au d’instruction etd’intelligence
ducontremaître,
etparfois
il est nécessaire de faire réellement le calcul de ladispersion
que l’on peut trouver en assemblant les rouleaux 6 à6,
mais il estpossible
de convaincrequelqu’un
avecquelques
efforts que lesecond graphique
donne uneproduction plus
intéressante que lepremier.
En
fait,
dans notre casparticulier,
le contremaître fut assez vite convaincu. II suffit de lui montrerqu’il
étaitpossible
dans lepremier graphique
de trouverplusieurs
fois 6 rouleaux dont la moyenne s’écartait de 150 gr. de la moyenne
théorique,
alorsqu’avec
la meilleurevolonté,
nous nepouvions jamais
trouver dans le secondgraphique
6 rouleaux
pareils.
Nous sommes donc arrivés au
point
crucial où nous pouvons proposer à cecontremaître une mesure de cette
irrégularité
de manière à cequ’il
sachelorsque
laproduction
se détériore ous’améliore,
car lesgraphiques
ne sont pastoujours
aussi extrêmes que ceux que nous avons choisis.La mesure
qui
vient naturellement àl’esprit
du statisticien estl’écart-type
de laproduction
de la machine.Jusqu’à
nouvel ordre il suffitd’expliquer
au contremaître que ce nombre (et ce n’estqu’un
nombre pour lui) mesure ledegré
dedispersion
des rouleauxacceptables.
Ceci est d’autant
plus
facile que comme les limites sont de ± 200 gr. nous pouvons (à des facteurs d’incertitudeprès)
dire que laproduction
seraacceptable
sil’écart-type
sesitue autour de 67 gr.
Si
l’écart-type
se situe autour de 67 gr., le niveau derégularité
des rubans d’éti- rage, et si nous ne détériorons pas laqualité,
en cours de route, dufilé,
le niveau de laqualité
du filécorrespondra
réellement à ce que nous avons demandé pour des limites de ± 200 gr.Si ce nombre est
beaucoup plus bas,
tantmieux,
mais s’il estplus fort,
et cecimême si l’on élimine les rouleaux s’écartant de
plus
de 200 gr. de la moyenne, le niveau total derégularité
du fil sera moins bonpuisque
le hasard fera que legroupement
6 à 6 des rouleaux donne dans le fil des écartsbeaucoup plus grands
queprécédemment.
Pour
frapper
encoreplus l’imagination
dupersonnel,
nous calculons pour chacune de ces feuillesl’écart-type,
noustraçons
des limitesprobable.:;
de cettevaleur,
et nous comparons le chiffre trouvé à ceslimites.
Voici
l’écart-type
calculé pour ces deuxgraphiques :
pour lepremier graphique,
il est de 157 grammes; pour le
second,
i! est de 63 grammes 1/2.La distribution
correspondant
aupremier graphique
sort des limites de tolérances :ses limites naturelles sont de ± 450 gr. au lieu de ± 200 gr. Pour le second
graphique,
les limites naturelles sont un peu en
deçà
de db 200 gr., cequi correspond
à uneproduction acceptable.
Ceci
dit,
il se pose leproblème
de savoir dansquelle
mesure unécart-type
calculé de 63 gr. estacceptable
ou non.Nous
devons doncparler
à ce contremaître de limiteprobable
de cetécart-type
en fonction du nombre de rouleaux.J’ai ici une table
(malheureusement, je
n’ai pasl’original)
donnant les limitesprobables
del’écart-type
en fonction du nombre de rouleaux àpartir duquel
le calcul aété fait. Ici encore, il faut
expliquer
au contremaître ce que celasignifie.
Dans notre cas,ce ne fut pas très difficile.
Cette table montre que, pour
vingt
rouleaux et unécart-type
moyen de67, l’écart-type
observépeut
varier entre 102 et 48 sans que cela veuil!e dire que lels résultatsne sont pas
significatifs,
alors que, pour un nombre de rouleaux de l’ordre de100,
leslimites de
l’écart-type
seront 57 et122.
Comment
expliquer
ceci au contremaître ? !! est facile de lui fairecomprendre
sans se servir de chiffres que
si,
pour 10.000 ou 20.000rouleaux,
nous devons trouver unécart-type
très voisin de67,
il estpossible
que sur un nombre restreint de rouleaux cetécart-type
soit sensiblementplus grand
ouplus petit
sans que l’écart soitsignificatif.
S’il
permettait
5 % derebut,
cela voulait dire que sur 100rouleaux,
il avait5 rouleaux
qui pouvaient
êtrerejetés. Si,
à ce momentlà,
il calculait son pourcentage, ilpouvait
le trouver inférieur à unvingtième;
s’il faisait alors soncalcul,
ce n’était passignificatif
parcequ’il
n’avait pas assez de rouleaux.On obtient donc un
graphique qui
montre comment secomporte l’écart-type journalier.
Dans l’état actuel dutravail,
le service de contrôle trace tous lesjours
surune feuille
l’écart-type
des rouleaux. On a une fiche pour chacun des batteurs. On a, le 1erjanvier,
unécart-type
de67;
le 2janvier,
unécart-type
de83;
le 3janvier,
unécart-type
de50,
et ainsi de suite.Pour savoir si ces chiffres sont valables ou non autour de la moyenne de
67,
onconsulte la table et l’on obtient les limites
indiquées
sur legraphique.
Nous voyons que lajournée
du 4 est une mauvaisejournée,
étant donné quel’écart-type
est sorti des limitesprobables.
Le contremaître va alors voir surplace
s’ilpeut expliquer
la raison de cetteanomalie ou non.
Inutile de vous dire
qu’il
nel’explique
pastoujours,
mais ill’explique
un certainnombre de fois et cherche à
l’expliquer.
Par le faitmême,
il s’intéresse auxproblèmes
deses ouvriers au lieu de dire « cela ira mieux demain ».
La
période
suivante consiste à donner à la direction une vuegénérale
duproblème,
c’est-à-dire que l’on calculel’écart-type
moyen mensuel. Onpeut
ainsi fairesavoir à la direction si la situation a
changé
en fonction ducoton,
en fonction desbatteurs,
ou de tout autre facteur.En
fait,
legraphique
quej’avais
l’intention de vous montrersignalait
unedifférence assez
caractéristique
à quatre moisd’intervalle;
ce résultat avait été obtenu essentiellement par uneaugmentation
de lapuissance
des ventilateurs et une formation des ouvriersqui
ontappris
à ne toucher aurégulateur qu’en
fonction d’une série derouleaux anormaux, c’est-à-dire
lorsque
la tendance montre uneposition
stable trop lourde ou troplégère
de l’ensemble des rouleaux (comme dans le cas dupremier graphique)
et nonplus
en fonction d’un seul rouleau défectueux.Ceci a
conduit, malgré
les balancesenregistreuses,
à faire tenir legraphique
par l’ouvrier lui-même pourqu’i
l suive la situation deplus près.
Lesgraphiques
sont unpeu moins
beaux,
maisbeaucoup plus utiles,
parce que l’ouvrier lui-mêmes’y
intéresse.Le second
exemple
estpris
dans la même usine et dans le même atelier. Danscette
usine,
le contrôlesystématique
une foisétabli,
il a étépossible
de passer aucontrôle mètre par
mètre.
Ici encore, il existait un contrôlequi
consistait à dérouler toutes les semaines deux rouleaux debatteur,
à établir des limites de --t 10 gr. autour dupoids
moyen de 425 gr., et à
compter
le nombre de mètres dechaque
rouleaux(après
élimi-nat ion du
premier
et du dernier) sortant des limites de manière à mesurer lepcurcentcge
à l’intérieur de ces limites. Les normes recommandées par le constructeur del’appareil
decontrôle
prévoient
que 95%
au moins des mètres doivent se trouver à l’intérieur des limites.La discussion sur cette méthode avec le même
contremaître, engagée
deux moisaprès
la mise en route du contrôlesystématique,
s’avérabeaucoup plus
facile. Le contre-maître
accepta
facilement que lepourcentage
à l’intérieur des limites. n’était pas une mesure trèsprécise.
Eneffet,
ceci groupe à la fois une notion de moyenne et une notiond’irrégularité.
Voyons
cepremier graphique (fig. 3) :
la distribution des différents 40 mètres du rouleau de batteur est assez bonne. Lespoints
sont assezconcentrés;
on obtient deslignes
assezconstantes; plusieurs
mètres de suite font le mêmepoids.
Quand
on calcule lepourcentage
de mètrescompris
dans leslimites,
on trouveque, du fait que les rouleaux étaient
trop lourds,
seulement 52%
des mètres se trouvent dans les limites.Quand
le contremaître s’enaperçoit,
il se dit : mes batteurs ne marchentpas.
Fig. 3
Sur l’autre
graphique 4,
vous pouvez voir que larégularité
étaitbeaucoup
moinsbonne;
lespoints
sont très variables de l’un à l’autre. Lerégulateur
semblebouger
d’une fois à1"autre.,
et il y a certainementirrégularité
d’alimentation. Plusieurs facteurs viennent troubler leproblème.
Ici encore, nous avons 52%
dans les limites.Ayant
donc 52%
dans les limites dans les deux cas, le contremaître dit : notrerégularité
de batteurs est la même.Le
problème
étantprésenté ’ain’si,
il fautajouter qu’au
lieu de tracer ungraphique, l’employé
de laboratoire n’avait que leschiffres.
On peut maintenant se rendre
compte qu’il
y a deuxproblèmes
différents. Dans lepremier
cas(graphique 3),
ils’agit
decorriger
lepoids
moyenqui
est mauvais. Unpoids
moyen se
corrige
enchangeant
certainsréglages.
Enfait,
vous voyez que dans lepremier
cas le
poids
moyen est de 11 grammes, alorsqu’i!
était dans le 2d cas(graphique
4) de0,35
gramme. Mais dans lepremier
casl’écart-type
est de 4 gr. 35 et dans l’autre il est de 14 gr. 15. Il semble donc que laproduction correspondant
augraphique
3 soit infini-ment meilleure que 1"autre.
Là encore, nous sommes
obligés
de donner au contremaître des notions de valeur del’écart-type
en fonction des limites. Ces valeurs s’obtiennent tacitement si l’on revient à ladéfinition.
Nous voulons que 95 % au moins des mètres soient à l’intérieur des limites pour que l’onpuisse appeler
le rouleau« acceptable
». Si la distribution est à peuprès
normale (dans desopérations semblables,
nous pouvons lesupposer),
ceci veut direque 2 a =10 gr., c’est-à-dire que 03C3 = 5 gr
Fig.4
D’autre
part,
si tous lespoints
sontbons,
nousdevrons
avoir 303C3=10 gr., ou03C3
== 3,3
gr., d’où larègle :
Rouleau excellent : (1
3,3
gr.Rouleau bon :
3,3
gr. a 5 gr.Rouleau mauvais: c > 5 gr.
L’usine calcule à l’heure actuelle le c de deux rouleaux par
batteur,
parqualité
et par
semaine,
etprésente
à la direction un tableau donnant ces différentes valeurs de a et leur évolution parrapport
à lapériode précédente,
etj’ai
vu récemment unouvrier
qui
sait àpeine
écrire et certainementguère compter,
me dire fièrement en mevoyant
approcher
de ses batteurs : 4: Iln’y
a que trois mois queje
suislà,
et ilparaît
que mon a est
déjà
meilleur que celui de moncoéquipier :
ilparaît qu’on
va établir uneprime
au a ». Je n’ai pas osé lui demander s’il savait ce que c’étaitqu’un
a...En
conclusion, je pourrai
dire que ces deuxexemples
montrentqu’il.
estpossible
de faire absorber aux gens une
quantité importante
de contrôlessystématiques
et mêmestatistiques
pourvuqu’on
ne les noie pais dans undéluge
dechiffres,
dedéfinitions,
etc...Il convient
d’ajouter
que cecontremaître, qui
a une formation absolument élémentaire(c’est
un ancien manoeuvre) estprêt
à faire un stage de formationcomplémentaire,
demanière à
pouvoir
utiliser lastatistique
defaçon plus
cohérentequ’il
ne l’a faitprécé-
demment.
Ceci estpeut-être
un peu en contradiction avec ce que M. le Professeur HENON a dit. Je crois pourtant que si nous avionsessayé
de lui faire un cours destatistique
il y a un an, il n’aurait pas pu enaccepter
leprincipe,
alorsqu’à
l’heureactuelle il est
capable
de mettre immédiatement en 0153uvre cequ’il
aappris.
DISCUSSION
M.
VOGEL.
- Je vais donner laparole
à M.BENSON;
il va vousparler
enanglais,
et nous avons la bonne fortune d’avoir uninterprète qui
va traduire sapensée.
M.
BENSON.
- Les deuxexposés
que nous venons d’entendre étaient fortementintéressants,
non seulement aupoint
de vuetechnique proprement dit,
mais parce qu ilsnous ont révélé que le textile était un domaine où
l’application
des donnéesstatistiques
était extrêmementagréable,
extrêmementplaisante.
On
peut
sepermettre
dans le textile de faire de nombreusesanalyses statistiques
et de se livrer à de nombreuses
expériences
sans engagement considérable decapitaux.
J’ai travaillé moi-même dans de nombreux
domaines,
et il m’arrive d’êtreobligé
dedemander à notre Gouvernement une
prévision budgétaire
de 100.000 dollars pour la destruction des matériauxéprouvés.
Dans le cas de
M. HODARA,
il est extrêmement facile depouvoir prendre
autantqu’on
veut de la nappequi
sort,puisqu’aus’si
bien on la remettra à !’autre bout et quecela reviendra. Une direction d’usine sera certainement
beaucoup plus disposée
àaccepter qu’on
fasse des tests de ce genrelà, qui
ne coûtent pasgrand’chose, plutôt
que desacrifier une matière
première
extrêmement coûteuse.Il y a
également
un autre aspectplaisant
desépreuves statistiques
dans le textile : c’estqu’on
n’a pas à attendrelongtemps
avant d’avoir le résultat del’analyse
à
laquelle
on s’est livrée. Je pense à ce programme de tests quej’ai
discuté avec leMinistère de la Marine américaine et
qui
doit être en cours en ce moment. J’ai collaboréau lancement du programme. On est en train de mettre en
place
ledispositif d’épreuves.
On ne pourra tirer les
premières
conclusionsqu’en
1964. Vous voyez que c’est lointain.Et,
deplus,
cela coûte très cher.Par
conséquent,
lesapplications statistiques
dans le textile sont non seulementaisées,
non seulementplaisantes,
maiségalement
on a une gamme très étendued’appli- cations,
que ce soit enproduction
continue comme dans le cas desbatteurs,
ou que ce soit pour toutes lesépreuves possibles
etimaginables,
les essais derésistance,
etc.Personnellement, j’ai beaucoup
travaillé avec desvariables;
dan’s letextile,
on aà travailler d’une
façon
intensive avec lesvariables, quand
ils’agit,
parexemple,
del’évaluation d’une nouvelle matière
première.
Lecoton,
parexemple, change
dequalité.
Il
s’agit
de savoirquelle qualité
vous pouvez avoir.Mes relations avec le textile sont un peu
particulières
et se bornent à la fabrica- tion det’entoitage
des pneus. Mais c’estmalgré
tout unproblème.
Vous avez vu le
petit
dessinqui représentait
lafaçon
dont la banded’entoilage
est constituée : elle est formée par deux fils arrivant de
chaque
côté pour se réunir aurouleau central.
Il y a aussi un
diagramme qui
a été construit au tableau pour l’étude de la résis- tance de la bande à la traction. L’étude était faite à l’aide d’undiagramme
danslequel
on faisait varier
expérimentalement
larésistance,
le coefficient de résistance à latraction,
et on
traçait
la courbe suivant les différentes résistances. Onpouvait
introduireégalement
la notion de variation de
température.
Il y a doncplusieurs
variables dans ungraphique
de
comparaison
comme celui-là.C’est un cas où
l’expérimentation pratique
est extrêmementagréable,
parce quen’importe qui peut
se livrer à ce travail dans son propre domaine. On peut aller ensuitetrouver son patron et lui dire : voilà tes résultats
qu’on
obtient avec lastatistique.
Evi-demment,
lepatron
dira :Monsieur,
c’est trèsbien, je comprends,
continuez.Il est évident que sans connaissances de
statistique,
l’établissement degraphiques
comme ceux-là ne veut pas dire
grand-chose. Mais,
avec un minimum de connaissancesstatistiques,
en faisant depetites expériences
chacun dans sondomaine,
on arrive àavancer de
plus
enplus
d’unefaçon
extrêmementvalable.
M. HODARA a très bien
souligné
la nécessité de fairecomprendre
aupersonnel
de tous les
échelons,
de lafaçon
laplus simple possible,
l’utilisation des méthodesstatistiques.
Je peux citer un
exemple qui
s’estproduit
dans le servicetechnique, lorsque j’étais
à laCompagnie
du Caoutchouc Hoover. Il est venu au laboratoire unstatisticien,
extrêmementcompétent d’ailleurs,
mais dont les a coulaient de la bouchelorsqu’il
l’ouvrait pour
parler.
C’est un hommequi
neparlait qu’en
formules. Cela n’a pas été très bien vu dansl’usine,
parce que celamanquait d’applications pratiques.
Il a étéobligé
dequitter rapidement
sonposte,
laplaisanterie
courante étant que,lorsqu’il
estparti,
on arempli
defumigène
ledépartement
d’études pour être bien sûr que tous les a étaientmorts et avaient
disparu !
Il s’est
posé
un autreproblème
en cequi
concernel’entoilage
despneus.
Ils’agissait
du contrôle à laréception
des bandes de toile destinées àl’entoilage qui
nousparvenaient
à lafabrique
de pneus, venant d’une autre usine située àquelque
distance.Ces bandes étaient
transportées
par wagons.Il
s’agissait
de déterminer l’échantillonqui
soit teplus représentatif
de laqualité
du wagon, tout en étant le
plus économique.
Vous aviez des bobines d’environ 7kg, qui
constituaient des balles d’environ 85 à 90kg.
Il fallait ouvrir la
balle, prélever
les rouleaux detoile.
Dans lefond,
le coût étaitindépendant
du nombre deprélèvements effectués,
étant donné que dans tous les cas, la manutention était la même. Il fallait ouvrir le paquet.Il s’est
agi,
parconséquent,
de déterminer la taille laplus économique
du lotd’échantillons,
c’est-à-dire la valeur laplus économique
de N. On a fait deux choses enparallèle,
c’est-à-direqu’on
a construit undispositif expérimental,
l’unpratique
et l’autrethéorique,
en même temps.On a
pris
mille bobines pour ledispositif expérimental
et on a fait desexpériences
de résistance à la traction. On a donc eu une courbe de distribution des résistances à la traction. On a ensuite ventilé les échantillons.
On a d’abord
pris
25 « cônes » et un échantillonpar « cône »
pour établir unecourbe de
fréquence
de la distribution.(J’emploie
le mot « cônes », mais c’est le mot« rouleaux »
qu’it
fautemployer.)
M.
VOGEL.
- « Cônes », aussi...M. BENSON
(Interprète).
- Cecidonnait, évidemment,
40 échantillons de25,
on arrivait à 1.000. Ceux d’entre vous
qui
sont familiers avec latechnique
textileont pu suivre ce
qu’a
fait M. le ProfesseurBENSON.
Cette courbe a étéintégrée,
elle aété calculée. Comme vous le voyez, on en a déduit une droite
qui
a donné une certaineprobabilité.
On a vérifiél’expérience théorique
avec le calculqui
avait été faitprécé- demment,
et on a obtenu queta
valeurexpérimentale
parrapport
à la valeurthéorique
donnait une
ligne
enpaliers qui
suivait de trèsprès
laligne
calculée.On a recommencé
l’expérience
avec deuxprélèvements
surcinquante cônes,
cequi
faisaittoujours
cent. On a la courbethéorique
et on s’est aperçuqu’elle
étaitlégère-
ment
supérieure.
On a vu de nouveau que cela « collait » entre la courbethéorique
etcelle
qui
étaitcalculée.
On a décidé de continuer encore
plus
loin et deprendre
75 à125,
avec 5tests,
et on a constaté que dans les valeurs