• Aucun résultat trouvé

Méthode naturelle de calcul

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Méthode naturelle de calcul"

Copied!
2
0
0

Texte intégral

(1)

14 L'

~l>UCA'JlW~

~'Enseignement des Sciences exactes

L'étude enlt·eprise pour définir une méthode na- tu1·elle d'enseignement des science·s exactes, et pe1·- mettre aux maîtres de s'en servil' convenablement exige un ex-amen critique de conceptions que l '01~

pourrait croire définitives. Il nous faut revenfr sur nos idées lm bit uelles relatives à la connaissance en général et ù la connaissance scientifique en parti- culier. Les notions de concrPt, (IP réalité, de vérité même, doivent être révisées.

C'est riue depuis moins d'u11 siècle, une nouvelle théorie de la connaissance s'élabo1·e lentement pour tenir compte des bouleversements eutnl.înés ci·ons IP domaine de la pensée par l'abondance et la 11ou- veaut6 des données sensorielles obtenues grâce ù l'utilisation toujours plus ample de terhniques expé- rimentales en incessante expansion.

A l'époque du microcospe électronique, on ne raisonne pas comme au temps lointain op l'hom- me ne disposait que de ses yeux pour analyser l'aspect des choses qui l'entouraient. ·

Cette nouvelle théorie s'oppose ù la théorie classi- que. Mais pourquoi s'en préoccuper dans Je domaine de la pédagogie ? Pour la raison que la théorie classique qui résulte d'un empirisme plusieurs fois millénaire est inscrite à l'insu de la plupart d'entre nous dans la subconscience contemporaine. Si on n'y prend garde, elle dicte donc les programmes sco- lail'es, détermine les méthodes et inspire les éclucn- teurs dans leur activité de chaque instant.

C'est d'elle que procède l'échec aujourd'hui recon- nu de l'enseignement du calcnl. ri me paraît, par c·onséquent, indispensable de l·a1·actériser l'une et l'autre des deux théories de la connaissance, par lesquelles se différencie la 11011velle philosophiP scientifique de la philosophie C'l11Rsique.

C'est le physicien viennois Emst Mach qui l'un

<ies premiers contribua à faire de la connaissance une invention souvent provisoire pl11tôt qu'mw dl'>- couverte dt'lfinitive.

« Son idée essentielle> était Lille toutes les affir111u- tions de la physique sont des énoncés sur los mp- ports qui existent entre des impressions sensihles, c'est-à-diœ qui trncluisent quelquE> chose sur cies expériences concrètement vécues. Tous les concepts romme atome, énergie, force, matière, 11e sont à ses yeux quP des notions auxiliaires permettant de for- muler plus simplerne11t el plus hl'irvernent lesdites af1irmations ... " (1).

u ..• Le philosophe t:lassique u subi d'autres assauts venant d'une direction différente ; je veux parler du « convenlionalisme "• d011t le partisan le plus éminent fut Henri Poincaré. Il a fait observer que les énoncés de la pltysiquP l'<1ntirnnent som ent des notions qui ne sont cléfinirs que- par ces énoncés eux-mêmes; de telle sorte qu'elles échappent à tout contrôle èxpérimental et nE> sont, de! cc fait, que des définitions déguisées, des « conveutions '" C'est le cas de l'énergie, en particulier, définie seulement par le théo1·ème même <le l'énergie ... ,,

u ... Le psychologue n.méricaiu Williarn James u déclenché, h1i aussi, une attaque directe cont1·e cettP philosophie, avec son livre u Le Pragmatisme u,

fu1'l répandu dans son pays. Pour lui, la vérité d'u11 système de propositions, d'une lhéol'ie physique par exemple, ne consiste pas du tout à êt.re ·une copie fidèle de la réalité. mais à nous être utile pour nous orient.el' dans le champ de nos (( erlebnisse " (3) et rie les régir selon nos convenances. Il est en plein accord avec Mach pour l'essentiel, en plein désac- cord' avec la doctrine de la vérité-au-fond-de-la-co- quille-de-noix. A ses yeux, toute solution de problè- me est construction d'un procédé utile pour le clas- sement et la maitrise de nos « erlebnisse ,, (3). Si, par exemple, nous connaissons les règles et si nous possédons les moyens de constrnction des machines, si nous savons les mouvements qu'elles exécutant dans telles et telles circonstances, peu nous importe ci'avoir, par surcroît, des idées SUI' l'essence de ln matière et de la force ; les questions cr1i la concer- nent. n'ont rien de scientifique. " (2)

«Bergson traduit avec beauooup d'exactitude et de précision ces vues de James clans l'introduction au

u Pragmatisme ,, ùe W. James. 11 Les autrf;lS doctri- nes font de la vérité quelque chose d'antérieur à l'acte bien déterminé de l'homme qui la formule pour la première fois. I 1 a été le premier à la voir,

clisons-no~1s, mais elle \'attendait, comme l'Amérique nttenclait Christophe Colomb. Quelque chose la cachait à tous les regards, et, pour ainsi dire, la couvrnit : il l'a découverte. Tout autre est la concep- tion de William James. Il ne nie pas que la vé1ité

~oit indépendante en grande pat'(ip au moins, de ce que nous disions ou pensions d'elle ; mais la vérité, crui ne peut s'attacher qu'à ce que nous disons de ln réalité, lui paraît être créée par notre ·affirma- tion. Nous inventons la vérité pour utiliser la réa- lité, comme nous créons des dispositifs mécaniques pous utiliser les forces de la nature. On pourrait, ce me semble, résumer tout l'essentiel de la conception pragmatiste de )a vél'ité dans une formule telle que celle-ci : tandis que pour les autres doctrines, une vérité nouvelle est une découverte, pour le pragma- tisme, c'esl une invention ,, ... (4)

La pédagogie trnclitionnelle place ù la base de toute initiation scientifque crs notions dont EJ'Jlsl :\Iach a souligné le caractère accessoire de moyens destinés à relier les signaux sensoriels fournis par nos cxpé1·iences et elles y prennent le caractère cl 'en- tités agissantes et non point. de liaisons d'états sen- so1·iels. Par 1111 singulier renversement de l'ordre des faits il est enseigné par exemple que les aiguilles aimantées prennent une position déterminée en chaque point rl'u11 champ magnétique grâce aux lignes de "force de ce champ ; alors que ces lignes de force sont tracées en partant des positions prises par les aigui!les placées dans le champ. C'est lù dans notre t'lre scientifique, un curieux retour il.

(1) Extrait du livre u Théorie de la Connaissance el Physi- que moderne" de Philipp Frank (page 23).

(2) Exlrait du me livre (page 25). (3) Expériences vécues.

(4) Extrait du livre u Thforie de 111 Conna\ssance et Physi- que moderne » de Philipp Frank dpage 26).

(2)

L'EDUCATEUR

15

l 'aui.misme des primitifs. Pourtant les ma,n uels ac-

tuels de physique en sont p!eins.

L'enseignem.ent des mathématiques 1 ui-mème n 'é- chappe pas à ce primitivisme. En effet, on pouvait lire dans !'Ecole Libératrice au sujet de lu notion de nombre :

« Si l'on considère les données sur l'évolution dt' la notion clu nombre chez l'enfant, 011 constate qu'il

" compte " avant même l'àge scolaire. De 4 à 5 ans, il a, d'une façon générale, acquis la notion de 4, et il peut. dénombrer jusqu'à 10. !\fais res u nombres ,, rnnt-ils vraiment <ies nomhres? 1 'enfant. possède les noms, arrive à dénombrer, nrnis peut-on clin) qu'il soit en possession d'un outil qui va enrichir ot fortifier sa pensée, lui permettre de quantifier son univers ? M. Piaget ne le pense pas. ,, (1)

Ainsi donc, clans la citation qui précède, la notion de nombre telle Cfll6 l'a analysée J. Piaget est don née comme un concept agissant inclispensaMe ù l'enfant pour u qunntifier son univers "· Nous sorn- rnes ici bien loin de la 1héorie cie la connaissance d'après les vues de Ernst. Mach et selon lesquelles les concépts traduisent u quelque chose sur des expé- riences concrètement vécues "· Bien plus, selon la théorie classique de la connaissance les notions, loin d'être le résulLat d'une invention permettant de nous

u Ol'ienter dans Le champ de nos expériences vécues et de les régler selon nos convenances ,,, seraient des réalités vivantes capables de réagir les ·unes sur les autres de se modifier réciproquement; en effet, on lit un peu plus loin, dans l'article plus haut cité de ! 'Ecole Libérat1·ice que le u nombre est contaminé par l'espace "·

Je n'insiste donc pas sans raison sui· le conflit t(Lli divise actuellement les philosophes an sujet de l'analyse de la connaissance. Ainsi que je l'ai dit plus haut, par le fait crue la théol'ie classique de la connaissance est inscl'iie clans la subconscience contemporaine, la pédagog·ie courante place à la base de son enseig·nement scientifique des notions variées indispensables selon elle à toute initiation valable. C'est une démarche aussi déraisonnable que celle qui consisterait à obliger l'enfant qui dé- sire apprendrn à marcher à bicyclette, de s'assimiler préalablement les lois mécaniques relatives ù cetü•

11arche.

Cependant beaucoup d'élèves épuise11l vainement leur activité intenectuelle à vouloir comprendre ces fameuses notions, se rebutent et finalement deviennent imperméables à toute pensée scientifiquo venue du dehors. Réduits 0aux seules idées scienti- fiques que leurs expériences pal'liculières leur nnl permis rie forme1·1 leur niveau intellectuel dans IP domaine scientifique reste médiocre et la plupal't du temps insuffisant, e11 ég-ani aux exigences de la vie contemporaine.

J'espère que les lecteul's t rouvero11t .

.i

ust.ifiées par les consiclérn tians précédentes, ! 'aspect théorique que j'ai donné il mon ét11cle sur l'enseignement tles sciences exactes. l l ron vient, en eïfet, de œ délia r- rassel' d'une théorie périmée de la connaissance scientifique et tout d'abord de la l'eeonnaitre dp.ns la pédag·ogie courante dont l'échec auprès de la grnnde majorité des élèves est incontestable. Cet échec est particulièrement apparent il est vrni .dans l'enseignement, du calcul, c'est.-à-clire clans l'initiation au langage numérique; mais ce lan- gage devient Je langage indispensable dès que l'on dépasse le niveau de la leçon de choses. En sorte que l'échec de l'enseignement de ce langage entraînP celui cle l'enseignement dr toutes les sciences ex.actes.

S'il m'est apparu esse11liel de développer des r·onf!irlérntions q11i sr.111blP11I rp1elq11<' pe11 .nnl11es

par.ce qu'inhabituelles, je ne perdrai pas de VIH'

l'aspect pralique de la question.

En particuliel', en précisa.nt 1<1 méthode naturelle cle calcul qui précèdera celle qui se rapporte à la géométrie, je donnerai une salut.ion longueme111 éprouvée de la difficulté majeure rencontrée dans l'enseignement du calcul ù l'émie primaire.

Quelle est <'eUe diffirnlté?

Beaucoup d'élèves, aya11t acquis la technique des quatre opérai.ions ne savent pas les uti'.iser. Tls nc· sont pas mis en possession d'une méthode il leu!' portée, leur pern10t.tant. de trouver facilement la nature et la SLLite des opérations qui donnent la solution numérique des prohlèllles qui leur sont posés, dès que ces problèmes pol'tent sm· des ~véne­

ments nouveaux ou même lorsqu'ils sont, énoncés en termes inaccoutumés. Au surplus, la struct,ur1• mentale qui a été conférée aux é!èves pa 1· l'école t.raditionnelle, s'oppose ù ce qu'ils aient recours aux tàtonnements (expériences tâtonnées, calculs dr tâtonnements) qui pounaient les amene1· au but che1·ché. Les réflexes dont ils sont dotés ne leur ouvrent pas de voie capable de les mener au succès.

Enfermés dans des const.ruclions verbales coupées des l'éalités sensibles, ils t.e.nclent à cJ1ercher exclu- sivement la nature des opérations à. faire, clans les textes des problèmes. C'est ce qui explique qu'en usant habilement des termes «reste" et <<eu plus ''. on parvient .à leur faire poser une soust.rac- lion où il fallait une addition et vice-versa.

Quant à la détermination Llo la suite des opél'a- lions à effectuer, 1 'école traditionnelle ne donne également aucun moyen pratique pou1· la grande majorité des enfants. Certains pédagog·ues préconi- sent Les méthodes pl'ogressives ou régressives-. Tou- tes les deux sont basées sur la connaissance lH'éala- hle des relations numériques qui constituent le but ù atteindre et non un point de clépa.rt.

En fait, les élèves d·ans leurs recherches de cette suite d'opérations se basent sur les textes des énon- cés. Aussi, rn donnant. tt ces énoncés des formes inaccoutumées, on les met dans le plus grand embarras. Ajoutons que même si l'on parvenait, auprès de tous les élèves, i1 leur fait'e déduire cl 'em- hléP- de l'énoncé cles problèmes, la suite et. la nature des opémiions arithmétiques ù effert11el'1 c'est-à-dire :'t li rnr do pri111e a hol'd, de ces énn11<'és, les formules 11nmériques donnant les solutions, il faudrait recher- cher une autre manière de faire ; car, munis de cette méthode YCJ'bale, les élèves resteraient -impuis- sants devant les problèmes, nécessairement sans énoncés, posés pal' les circonstances inconnues des faits de la vie.

L'échec s11bi par l'école traclitiow1ellc en cc• qui concerne la question de la s11ifr et de la nat1ll'e des opémtions nécessitées pOUI' la solution numériq~e

des, problèmes est reconnu pa1· certains centres d'examens pou1r le moins, où 1'.on é~ite l'i!1s_u~cès des élèves en posant des t1uest.1011s mtermecl1a1res qui précisent· Io l'rnint de départ rt jalonnent. la

rout.e d'accès ù la quest.ion finale.

La méthode naturelle de calcul pern1el de résou- c.lre le problème difficile clon1 je viens de parler : 111ais, pour la . pleine compré•he~·1sion de cette mé- thode les maitres devront faire un gros effort pour 'se défaire des réflexes acqt1is et en, construire de nouveaux. Sur ce point, je m'attends à un~

résistance au moins aussi opiniâtre que celle qui s'est manifestée ù l'encontre di> la diffusion cle ln technique du textP libre.

noGEHll:: (S:1l'llte).

(1) Ecole Libératrice du 6-11-53. Extrait d'un article de Lucienne T ruillet et Madeleine Au douze.

Références

Documents relatifs

Mais, si ces unités quittent la Croatie, les zadrougas fournissent de quoi constituer, dans chaque circonscription régimentaire, un troisième bataillon

On déplace R, si utile, pour qu’il ne soit pas du même côté que r de la ligne T1T2.. On peut ensuite écarter les tours suffisamment l’une de l’autre pour que les

L’objectif est de mettre les deux rois en opposition en réduisant coup après coup la longueur L du couloir où le Roi noir peut circuler sans se mettre en opposition avec le Roi

Chez certains, parmi les dirigeants techniques, les connaissances acquises à l'école, trop livresques, restaient inopérantes, car elles ne s urgissaie11t pas dans

Nous pensons que, pour cet enseignement, nous ne parvenons pas à nous dégager du formalisme des problèmes. Tout comme pour l'enseignement du français, où l'on

Motivons le calcul libre comme nous avons motivé le texte libre ; mettons au point une technique de travail qui permette cette éclosion ; répétons l'expérience

ment tous considèrent qu'il .met trop l'accent sur le rendement d'autant que la méthode employée {( implique beaucoup de travail et dans une section comptable on

« dans ce contexte, la société Amazon qui aurait pu solliciter des conseils extérieurs pour l’accompagner dans sa démarche ne justifie pas de sa volonté de procéder à