Progrèsenurologie(2018)28,405—406
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ÉDITORIAL
L’infectiologie urinaire, un métier d’avenir ?
Urinary tract infection, what else?
MOTSCLÉS Infectionsurinaires; Microbioteurinaire; BLSE
KEYWORDS Urinarytract infection;
Urinarymicrobiota;
ESBL
Les défis auxquels font face les chirurgiens urologues sont aujourd’hui nombreux. À l’heure de l’avènement de l’immunothérapie,dontlapartdansletraitementdescan- cersvagrandissante,lapartmédicaledenotreprofession s’étoffepeuàpeuetnotretitredespécialitémédicochirur- gicaleprendalorstoutsonsens.Denouvellesperspectives apparaissentchaqueannéeetlaphilosophiedutraitement évolueaveccelles-ciamenantlesjeunesurologuesàétoffer leursavoiretleurscompétencespardenouveauxdiplômes commeleDESCd’oncologie.Laplacepriseparlacancéro- logiedansnotremétierestàjustetitreprépondérantemais il convientde ne pas oublier lesautres champs de notre professionquieuxaussichangent.
L’infectiologieurinaireaparfoismauvaiseréputationau seindenotrecommunautépourdiversesraisonscommesa complexité,son éloignementdu cœurde notre métier et l’absencedesupportparl’industriepharmaceutique.Mais cette sous-spécialité, parfois loin des préoccupations des chirurgiensquenoussommes,présentepourtantunpoten- tielimmense!
Depuis de nombreuses années déjà, les rapports alar- mantsconcernantl’avenirdel’efficacitédesantibiotiques sesuccèdent,leplusmarquantétantceluidel’Organisation mondialedelasantéparuen2014[1].Alorsquel’oncroyait ce problème résolu depuis des décennies, le spectre de voirànouveaula mortalité dueauxmaladies infectieuses
https://doi.org/10.1016/j.purol.2018.04.002
1166-7087/©2018ElsevierMassonSAS.Tousdroitsr´eserv´es.
406 Éditorial augmentée plane au-dessus de nous. Les antibiotiques
représententaujourd’huinotreuniquearmethérapeutique vis-à-visdesinfections etcettearmenecesse dedevenir moinsforte.
En 2015, dans notre pays, 11 % des souches d’E. coli responsablesd’infectionsinvasives étaientrésistantesaux céphalosporines de 3e génération (C3G, tous mécanismes derésistanceconfondus)làoùcesrésistancesétaientquasi inexistantesaudébutdesannées2000.EnGrèceouenBul- garie,70%dessouchesdeK.pneumoniaesontrésistantes auxC3G.Enfin,certainspayscommel’Indeprésenteparfois destaux d’entérobactéries productricesde -lactamaseà spectreélargie(EBLSE)deplusde80%[2,3].
Entre 2000 et 2015, la consommation mondiale d’antibiotiques a augmenté de 65 % [4], alors que l’ensemble des experts mondiaux s’accordent pourtant à dire que la prescription d’antibiotiques doit être réduite etlimitée.Ces messagessont écoutés partiellementdans lespays«riches»oùlaconsommationresterelativement stable,maisl’améliorationduniveaudevieetdessystèmes desanté de payscomme laChine ou l’Inde entraîneune explosiondelaconsommationd’antibiotiques.
Ilesteffectivementindispensable aujourd’huid’alerter les prescripteurs que nous sommes sur ces réalités. Mais n’est-cepasdéjàtroptard?Nedevons-nouspasdèsàpré- sentchangernotrevision del’infectiologieurinaire ?Pour prendreunexemple,l’arsenalthérapeutiqueenoncologie urologiqueestaujourd’huiimmense:chirurgie,radiothéra- pie,surveillanceactive,chimiothérapie,hormonothérapie, antiangiogéniques,immunothérapiesont autant detraite- ments à la disposition de l’urologue et de ses patients.
Lesvaccins n’ayant pas encore d’utilité pratique à court terme en infectiologie urinaire en dehors de la cystite récidivante[5,6],commentpeut-onaujourd’huiencompa- raisonsecontenterdesseulsantibiotiquesquenousutilisons depuis 1928, date de la découverte de la pénicilline parAlexander Fleming, pour traiterdes infections parfois mortelles?
Biopsieenfusiond’imagesIRM,TEP-PSMA,TEP-choline, IRM sont autant d’exemples de systèmes d’imageries uti- lisésdanslecancerdelaprostatetandisquelediagnostic d’infectionurinairesefaittoujoursparlesmêmesméthodes antédiluviennesqu’ilya100ans.Doit-onencores’échinerà vouloirprouverquelabandeletteurinairepourraitavoirun intérêtdansladétectiondesinfectionsurinairesalorsque nousensommesàl’heuredelagénétiqueencancérologie? Il semble donc aujourd’hui important de revoir et de repensernotrestratégiequantànosmoyensdedétections, detraitementsetà la manièredont nous devons aborder cespathologies.L’avènementdenouveauxconceptscomme lemicrobioteurinaireetlanonstérilitédesvoiesurinaires sontentraindecomplètementchangernotreapprochedans lacompréhensiondelapathologieinfectieuseurinairemais aussidesautrespathologies[7].Lesnouvellesthéoriesphy- siopathologiquesqui endécoulent vont àn’en pasdouter êtrelesvecteurs denouveauxmoyens dedétectionetde traitementdesinfectionsoùlagénétiqueaussibienbacté- riennequ’humaineaurauneplaceprépondérante.
L’infectiologieurinaire doitàson tourprendre le train del’innovationetlesjeunesurologuesdoivent yapporter leurcontributionetleursidéesmodernesquipermettrontde changernotreapprocheetnotrevisiondecespathologies.
Carnousseulsaujourd’huisommescapablesdecomprendre touslesenjeuxquecelareprésentepournotreprofession.
Qu’onleveuilleounon,l’infectiologieurinairereprésente une partquotidiennede notre activitécliniqueaussi bien lorsdenosconsultationsquedansnotreactivitéchirurgicale etilnousappartientdoncderelevercesnouveauxdéfis!
Déclaration de liens d’intérêts
MaximeValléeeffectueactuellementuneannéerecherche avec le soutien financier de l’Association franc¸aise d’urologie(vialeslaboratoiresGSK)etdel’associationeuro- péenned’urologie(EAU).
Références
[1]World Health, Organization. Antimicrobial resistance: global reportonsurveillance.Geneva,Switzerland:WorldHealthOrga- nization;2014.p.232.
[2]ValléeM,BruyèreF,RoblotF,BrureauL.Temocillinandurinary tractinfections.ProgUrol2017;27(12):609—17.
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[4]KleinEY,VanBoeckelTP,MartinezEM,PantS,GandraS,Levin SA,etal.Globalincreaseandgeographicconvergenceinanti- bioticconsumptionbetween2000and2015.In:Proceedingsof theNationalAcademyofSciences.2018.p.201717295.
[5]HuttnerA,HatzC,vandenDobbelsteenG,AbbanatD,Horna- cekA,FrölichR,etal.Safety,immunogenicity,andpreliminary clinicalefficacyofavaccineagainstextraintestinalpathogenic Escherichiacoliinwomen witha historyofrecurrenturinary tractinfection:arandomised,single-blind,placebo-controlled phase1btrial.LancetInfectDis2017;17(5):528—37.
[6]YangB,FoleyS.FirstexperienceintheUKoftreatingwomen withrecurrenturinarytractinfectionswiththebacterialvac- cineUromune®.BJUInt2018;121(2):289—92.
[7]WhitesideSA,RazviH,DaveS,ReidG,BurtonJP.Themicro- biomeoftheurinarytract—arolebeyondinfection.NatRev Urol2015;12(2):81—90.
M.Valléea,∗,F.Bruyèreb,c
aServiced’urologieetdetransplantations rénales,CHRUNantesHôtelDieu,1,placeAlexis Ricordeau,44093Nantescedex1,France
bServiced’urologie,CHRUdeBretonneau,2, boulevardTonnelle,37044Tourscedex,France
cUniversitéFranc¸oisRabelaisdeTours,PRES CentreValdeLoire,Université,37000Tours, France
∗Auteurcorrespondant.
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