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Crime de guerre, crime contre l'humanité

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Crime de guerre, crime contre l'humanité

GARIBIAN, Sévane

GARIBIAN, Sévane. Crime de guerre, crime contre l'humanité. In: Guide juridique Dalloz . 2008. p. 185/1-185/6

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:46687

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Crime de guerre- crime contre l'humanité

Texte paru dans le Guide juridique Dalloz, 2008, pp. 185/1-185/6.

Sévane GARIBIAN

Définitions

En droit international, l'~volution historique des définitions des crime de guerre et crime contre l'humanité est «cristallisée» aux art. 7 et 8 du Statut de la Cour pénale internationale (Statut de Rome de 1998), première juridiction pénale internationale permanente pour la répression «des crimes les plus graves qui touchent l'ensemble de la communauté internationale ». La France ratifie le Statut le 9 juin 2000.

Le crime de guerre en cas de conflit armé international est :

-une infraction grave aux Conv. de Genève du 12 août 1949, à savoir l'un des actes énumérés à l'art. 8 § 2 (a) du Statut de Rome lorsque ces actes visent des personnes ou des biens protégés par les dispositions des Conv. de Genève ;

- ou une autre violation grave des lois et coutumes applicables aux conflits armés internationaux dans le cadre établi du droit international, à savoir l'un des actes énumérés à l'art. 8 § 2 (b) du Statut de Rome.

Le crime de guerre en cas de conflit armé non international est :

-une violation grave de l'art. 3 commun aux quatre Conv. de Genève du 12 août 1949, à savoir l'un des actes énumérés à l'art. 8 § 2 (c) du Statut de Rome commis à l'encontre de personnes qui ne participent pas directement aux hostilités, y compris les membres de forces armées qui ont déposé les armes et les personnes qui ont été mises hors de combat par maladie, blessure, détention ou par toute autre cause.

- ou une autre violation grave des lois et coutumes applicables aux conflits armés ne présentant pas un caractère international, dans le cadre établi du droit international, à savoir l'un des actes énumérés à l'art. 8 § 2 (e) du Statut de Rome.

Le crime contre l'humanité est constitué de l'un des actes énumérés à l'art. 7 § 1 du Statut de Rome, commis dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique lancée contre une population civile et en connaissance de cette attaque, à savoir : a) Meurtre ; b) Extermination ; c) Réduction en esclavage ; d) Déportation ou transfert forcé de population ; e) Emprisonnement ou autre forme de privation grave de liberté physique en violation des dispositions fondamentales du droit international ; f) Torture ; g) Viol, esclavage sexuel, prostitution forcée, grossesse forcée, stérilisation forcée et toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable ; h) Persécution de tout groupe ou de toute collectivité identifiable pour des motifs d'ordre politique, racial, national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste au sus du paragraphe 3, ou en fonction d'autres critères universellement reconnus comme inadmissibles en droit international, en corrélation avec tout acte visé dans le présent paragraphe ou tout crime relevant de la compétence de la Cour ; i) Disparitions forcées ; j) Apartheid ; k) Autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de

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grandes souffrances ou des atteintes graves à l'intégrité physique ou à la santé physique ou mentale.

En droit français, le crime de guerre incrimination à ce jour absente du C. pén. et dont la spécificité n'est pas reconnue dans l'ordre juridique interne - fait l'objet de définitions aux fondements épars et aux périmètres étroits : il est traditionnellement défini comme un acte contraire au droit interne et non justifié par les lois et coutumes de la guerre. La première incrimination en droit français d'actes qualifiés en droit international de «crimes de guerre»

·date de l'ord. de 1944 (texte transitoire limité à la répression des actes accomplis durant la Seconde Guerre mondiale). Certaines de ses dispositions sont ensuite reprises dans le CJM (v.

not. art. 427 s., 463 et 464) ainsi que dans le Règl. de discipline générale dans les armées (art.

7 à 9 bis).

Le crime contre l'humanité est quant à lui défini à l'art. 212-1 du C. pén. comme étant« la déportation, la réduction en esclavage ou la pratique massive et systématique d'exécutions sommaires, d'enlèvements de personnes suivis de leur disparition, de la torture ou d'actes inhumains, inspirées par . des motifs politiques, philosophiques, raciaux ou religieux et organisées en exécution d'un plan concerté à l'encontre d'un groupe de population civile».

Textes

Conv. de La Haye des 29 juillet 1899 et 18 octobre 1907 ; Statut du Tribunal militaire international de Nuremberg du 8 août 1945 (art. 6, 7 et 8); quatre Conv. de Genève du 12 août 1949 et deux Prot. Add. du 8 juin 1977; Conv. de New York du 26 novembre 1968 sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité (art. 1er) ; Conv.

européenne du 25 janvier 1974 sur l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre (art. 1er); Statut du TPI Yougoslavie du 25 mai 1993 (art. 2, 3 et 5); Statut du TPI Rwanda du 8 novembre 1994 (art. 3 et 4); Statut de la Cour pénale internationale du 17 juillet 1998 (Préambule, art. 7, 8, 29 et 124).

Ord. du 28 août 1944 relative à la répression des crimes de guerre; L. n° 64-1326 du 26 décembre 1964 constatant l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité ; CJM (art. 427 s., 463 et 464) et Règl. de discipline générale dans les armées (art. 7 à 9 bis) ; C. pén. (art. 113-1 s., 211-1, 212-1 à 3, 213-5) ; C. pr. pén. (art. 7 et 133-2) ; L. no 95-1 du 2 janvier 1995 et L. no 96-432 du 22 mai 1996 portant adaptation du droit français aux dispositions des. résol. 827 et 955 du Conseil de sécurité de l'ONU ; L. no 2002-268 du 26 février 2002 relative à la coopération avec la Cour pénale internationale; projet de loi no 107 portant adaptation du droit pénal à l'institution dè la Cour pénale internationale, adopté au Sénat le 10 juin 2008.

Crime de guerre

1. La notion de crime de guerre per se apparaît, semble-t-il, dans le code hindou de Manu (vers 200 avant J. C.); on en trouve aussi des traces dans le droit romain et européen. C'est le Code Lieber, préparé par Francis Lieber dans le contexte de la guerre civile américaine et promulgué par Lincoln le 24 avril 1863, qui constitue le premier effort moderne de codification du droit de la guerre : il exerce une influence considérable sur les efforts utlérieurs de codification du droit de la guerre au plan international. Ceux-ci s'intensifient surtout à partir de la seconde moitié du XIXe siècle et donnent lieu aux Conv. de La Haye de 1899 et de 1907 sur le règlement pacifique des conflits internationaux, au cœur dujus in bello (droit s'imposant aux belligérants en temps de guerre, encore appelé« droit de La Haye»). Le

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« droit de La Haye » est ensuite complété par le « droit de Genève » composé des quatre Conv. de Genève de 1949 (dites Conv. de la Croix-Rouge) relatives au droit humanitaire dans les conflits armés, ainsi que de leurs deux Prot. Add. de 1977 (Prot. I sur la protection des victimes des conflits armés internationaux ; Prot. II sur celle des victimes des. conflits armés non internationaux).

2. Si la répression pénale des violations du jus in bello est envisagée lors de la Conférence de Bruxelles du 27 août 1874, réunie sur l'initiative du Russe de Martens, la pénalisation de telles violations (c'est-à-dire la définition des crimes de guerre et des pénalités qui s'y rattachent) est laissée, jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale, à l'Etat belligérant et à son droit interne. Ce n'est qu'avec l'élaboration du Statut du Tribunal militaire international de Nuremberg de 1945 que le droit international prévoit expressément, pour la première fois, le principe d'une responsabilité pénale internationale des individus pour les crimes internationaux, dont les crimes de guerre (art. 6, 7 et 8 du Statut) . Les crimes de guerre y sont définis comme étant des « violations des lois et coutumes de la guerre [qui] comprennent, sans y être limitées, les mauvais traitements ou la déportation pour des travaux forcés, ou pour tout autre but, des populations civiles dans les territoires occupés, l'assassinat ou les mauvais traitements des prisonniers de guerre ou des personnes en mer, l'exécution des otages, le pillage des biens publics ou privés, la destruction sans motif des villes et des villages ou la dévastation que ne justifient pas les exigences militaires» (art. 6 (b) du Statut).

3. Près d'un demi-siècle plus tard, la création des Tribunaux pénaux internationaux pour l'ex- Yougoslavie et le Rwanda est l'occasion d'actualiser la définition du crime de guerre héritée du« vieux» droit de Nuremberg. Les art. 2 («Infractions graves aux Conventions de Genève de 1949 ») .et 3 («Violations des lois ou coutumes de la guerre») du Statut du TPI Yougoslavie comprennent une liste d'infractions proches de celles énumérées à l'art. 6 (b) du Statut de Nuremberg sur les crimes de guerre. Néanmoins, les juges étendent leur compétence ratione materiae aux situations de conflits armés non internationaux, en incluant les violations graves de l'art. 3 commun des Conv. de Genève dans le champ de l'art. 3 relatif aux violations des lois ou coutumes de la guerre (v. aff. Dusko Tadic, arrêt de la Ch. d'appel, 2 octobre 1995, §§ 66 s.). Est ainsi créé un concept large de crime de guerre, que l'on retrouve à l'art. 4 du Statut du TPI Rwanda(« Violations de l'article 3 commun aux Conv. de Genève et du Protocole additionnel II»), ainsi qu'à l'art. 8 du Statut de la Cour pénale internationale.

4. Le crime de guerre s'entend désormais de toutes violations graves des règles du droit des conflits armés internationaux et non internationaux, susceptibles d'engager la responsabilité pénale de leur auteur.

5. Il est à préciser que selon l'art. 8 § 2 (d) et (f) du Statut de la Cour pénale internationale (en écho à l'article 1 § 2 du Prot. Add. II de 1977 aux Conv. de Genève de 1949), les« situations de troubles et tensions internes telles que les émeutes, les actes isolés et sporadiques de violence ou les actes de nature similaire» ne sont pas constitutifs d'un conflit armé non international.

6. Contrairement au droit français, le droit international prévoit l'imprescriptibilité du crime de guerre aux art. 1 ers des Conv. de New York de 1968 et Conv. européenne de 1974 (respectivement non signée et non ratifiée par la France), de même qu'à l'art. 29 du Statut de la Cour pénale internationale auquel la France est partie. A noter qu'au moment de sa ratification, la France fait jouer la déclaration prévue à l'art. 124 du Statut prée. («un Etat qui devient partie au présent Statut peut déclarer que, pour une période de sept ans à partir de

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l'entrée en vigueur du Statut à son égard, il n'accepte pas la compétence de la Cour en ce qui concerne [les crimes de guerre]»)- suspendant ainsi la compétence de la Cour jusqu'au 1er juillet 2009 pour d'éventuels crimes de guerre pouvant l'impliquer.

7. En droit français, le crime de guerre, crime de droit commun, se prescrit comme tel:

1 'action publique se prescrit par 10 ans à compter du jour où le crime est commis et si aucun acte d'instruction ou de poursuite n'est entrepris durant cet intervalle (art. 7 duC. pr. pén.) ; la peine se prescrit par 20 ans à compter de la date à laquelle la condamnation devient définitive (art. 133-2 duC. pr. pén.).

8. Les lois des 2 janvier 1995 et 22 mai 1996, qui adaptent le droit français aux résol. de l'ONU portant création des Tribunaux pénaux internationaux pour l'ex-Yougoslavie et le

· Rwanda, prévoient la compétence universelle du juge national pour le jugement des crimes entrant dans le champ d'application des Statuts des deux TPI- dont font partie les infractions graves aux Conv. de Genève de 1949. Mais cette extension de la compétence juridictionnelle traditionnelle est doublement limitée : elle est subsidiaire à celle des TPI, et elle est conditionnée par la présence de l'accusé sur le territoire français.

Crime contre l'humanité

9. La notion de crime contre l'humanité fait son apparition officielle, au plan international, le 24 mai 1915 dans une Déclaration conjointe de la France, de la Grande-Bretagne et de la Russie condamnant les «nouveaux crimes de la Turquie contre l'humanité et la civilisation»

commis à l'encontre des Arméniens de l'Empire ottoman. Mais le crime contre l'humanité n'est juridiquement défini que beaucoup plus tard, à l'art. 6 (c) du Statut de Nuremberg de 1945, comme suit:« l'assassinat, l'extermination, la réduction en esclavage, la déportation, et tout autre acte inhumain commis contre toutes populations civiles, avant ou pendant la guerre, ou bien les persécutions pour des motifs politiques, raciaux ou religieux lorsque ces actes ou persécutions, qu'ils aient constitué ou non une violation du droit interne du pays où ils ont été perpétrés, ont été commis à la suite de tout crime rentrant dans la compétence du Tribunal, ou en liaison avec ce crime ». Si une nouvelle incrimination internationale est née, sa portée reste toutefois fort limitée au regard de l'exigence d'un lien de connexité avec «tout crime rentrant dans la compétence » du Tribunal de Nuremberg, à savoir avec un crime contre la paix ou un crime de guerre.

10. L'art. 5 du Statut du TPI Yougoslavie maintient la condition d'un nexus entre le crime contre l'humanité et un conflit armé, tout en entendant ce dernier au sens large ( « conflit armé de caractère international ou interne ») ; par ailleurs, de nouveaux actes sont ajoutés à la liste des actes constitutifs de crime contre l'humanité au sens du droit de Nuremberg (soit la torture, le viol et l'emprisonnement), élargissant d'autant le champ de l'incrimination. Le lien de connexité avec un conflit armé disparaît à l'art. 3 du Statut du TPI Rwanda pour être remplacé par l'exigence d'une «attaque généralisée et systématique» à caractère discriminatoire («dirigée contre une population civile quelle qu'elle soit, en raison de son appartenance nationale, politique, ethnique, raciale ou religieuse ») ; en outre, les actes constitutifs de crime contre l'humanité sont ici identiques à ceux prévus dans le texte de l'art.

5 du Statut du TPI Yougoslavie.

11. La disparition logique de la condition de l'existence d'un lien entre le crime contre l'humanité et un conflit armé, condition jusqu'alors purement circonstancielle ayant pour fonction initiale de justifier la compétence du Tribunal de Nuremberg, est confirmée par les

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juges du TPI Yougoslavie (v. aff. Dusko Tadic, arrêt de la Ch. d'appel, 2 octobre 1995, § 141). De plus, le caractère alternatif- et non cumulatif comme dans le texte de l'art. 3 du Statut du TPI Rwanda dans sa version française - des exigences de généralité et de systématicité de l'attaque (élément constitutif clé du crime contre l'humanité), est souligné dans la jurisprudence des deux TPI (v. par exemple : aff. Mile Mrksic, Miros/av Radie et Veselin Slivjancanin, décis. de la Ch. de première instance I du TPI Yougoslavie, 3 avril 1996, § 30 ; aff. Jean-Paul Akayesu, jugement de la Ch. de première instance I du TPI Rwanda, 2 septembre 1998, § 579). Enfin, la population civile victime du crime contre l'humanité est à appréhender plus largement que celle victime du crime de guerre: les juges affirment en effet la nécessité d'interpréter de manière extensive les définitions des civils prévues par le droit des conflits armés afin de les appliquer, par analogie, aux situations de

«paix relative » (v. par exemple : aff. Dusko Tadic, jugement de la Ch. de première instance II du TPI Yougoslavie, 7 mai 1997, § § 639 et 643 ; aff. Jean-Paul Akayesu, jugement de la Ch. de première instance I du TPI Rwanda, 2 septembre 1998, § 582).

12. L'art. 7 § 1 du Statut de la Cour pénale internationale consacre à la fois l'autonomie du crime contre l'humanité relativement au crime de guerre ou à toute situation de conflit armé, et le caractère alternatif des exigences de généralité et de systématicité de l'attaque constitutive de crime contre l'humanité - laquelle n'a plus à être nécessairement discriminatoire (« dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique lancée contre une population Civile et en connaissance de cette attaque » ). De nouveaux actes sont de surcroît pris en considération, not. les crimes sexuels autres que le viol, les disparitions forcées et 1' apartheid.

13. Le crime contre l'humanité s'entend désormais de tout actes inhumains causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l'intégrité physique ou à la santé physique ou mentale, commis dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique lancée contre une population civile et en connaissance de cette attaque.

14. Tout comme le crime de guerre en droit international, le crime contre l'humanité est un crime imprescriptible (v. art. lers des Conv. de New York de 1968 et Conv. européenne de 197 4 ; art. 29 du Statut de la Cour pénale internationale).

15. En droit français, un titre entier du C. pén. est consacré aux crimes contre l'humanité (le premier du livre II portant sur les « Crimes et délits contre les personnes » ). Le « crime contre l'humanité» désigne alors une catégorie générique (objet du titre I), enfermant des infractions distinctes: le génocide (art. 211-1, disposition unique du chap. premier du titre I) et les

«autres crimes contre l'humanité» (art. 212-1 à 212-3 formant le chap. II du même titre). Ces derniers sont constitués, d'abord, de crimes contre l'humanité stricto sensu (art. 212-1 : v.

définition supra) et, ensuite, de crimes contre l'humanité commis en temps de guerre, encore appelés « crimes de guerre aggravés» (art. 212-2 : «Lorsqu'ils sont commis en temps de guerre en exécution d'un plan concerté contre ceux qui combattent le système idéologique au nom duquel sont perpétrés des crimes contre l'humanité ( ... ) » ). Enfin, la participation aux crimes contre l'humanité fait l'objet de l'art. 212-3.

16. Dans tous les cas, la peine prévue est la réclusion criminelle à perpétuité, et l'imprescriptibilité de l'action publique et des peines est réaffirmée (art. 213-5, directement inspiré de la L. du 26 décembre 1964 constatant l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité).

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17. Les règles de compétences traditionnelles (v. art. 113-1 s. C. pén.) du droit commun sont applicables c aux crimes contre l'humanité: le C. pén. maintient en effet la solution jurisprudentielle de la Ch. crim. adoptée lors de l'aff. Touvier, qui consistait à appréhender les crimes contre l'humanité comme des «crimes de droit commun commis dans certaines circonstances et pour certains motifs » (Crim. 6 février 1975 :Bull. crim. n° 42). Toutefois, les lois d'adaptation des 2 janvier 1995 et 22 mai 1996 étendent la compétence juridictionnelle nationale au jugement des personnes présumées responsables des crimes - parmi lesquels les crimes contre l'humanité- entrant dans le champ d'application des Statuts des TPI Yougoslavie et Rwanda. Il s'agit en l'espèce d'une compétence universelle accordée, à titre subsidiaire, au juge interne, si et seulement l'accusé se trouve sur le territoire français (v. aussi supra n° 8).

Adaptation du droit pénal français à l'institution de la Cour pénale internationale

18. Le droit français des crime de gùerre et crime contre l'humanité est à plusieurs titres différent du droit du Statut de la Cour pénale internationale de 1998 en la matière. Or le Statut fait entièrement peser la responsabilité « initiale » de réprimer sur les Etats parties (au regard du principe de complémentarité de la compétence de la Cour), tout en les engageant à s'assurer de la conformité de leur droit interne à ses dispositions. Se pose alors la question de l'adaptation du droit pénal français au droit du Statut de 1998- étant précisé que chaque Etat partie reste libre de prendre les mesures nationales qu'il juge utile pour répondre à l'obligation de résultat découlant du Statut.

19. La France a d'ores et déjà intégré la partie procédurale du Statut de 1998 dans son ordre juridique, en adoptant la L. du 26 février 2002 relative à la coopération avec la Cour pénale internationale. En revanche il n'en est encore rien s'agissant du droit pénal de fond, censé faire l'objet du second volet de la loi. Un projet de loi, déposé à l' Ass. nat. le 26 juillet 2006 sans jamais être inscrit à l'ordre du jour, est finalement retiré le 15 mai 2007 et déposé au Sénat qui l'adopte le 10 juin 2008 (projet de loi n° 107 portant adaptation du droit pénal à l'institution de la Cour pénale internationale). Reste encore à l'Ass. nat. de se prononcer sur ce texte.

20. Le projet de loi adopté au Sénat tend à intégrer certains acquis du Statut de 1998 en droit français sans procéder toutefois à une transposition intégrale de ses dispositions. Le texte complète les incriminations existantes en introduisant not. dans le C. pén. un nouveau livre consacré aux crimes de guerre et en précisant la définition du crime contre l'humanité.

21. L'art. 7 du projet de loi prévoit l'insertion dans le C. pén. d'un livre IV bis intitulé «Des crimes et des délits de guerre». Leur définition serait la suivante : «Constituent des crimes ou des délits de guerre les infractions définies par le présent livre commises, lors d'un conflit armé international ou non international et en relation avec ce conflit, en violation des lois et coutumes de la guerre ou des conventions internationales applicables aux conflits armés, à l'encontre des personnes ou des biens visés aux articles 461-2 à 461-31 » (art. 461-1, section 1, chap. 1er du livre IV bis). Les crimes et délits de guerre communs aux conflits armés internationaux et non internationaux, ainsi que les crimes et délits de guerre propres à chaque type de conflit armé, seraient ensuite définis précisément aux art. 461-2 s.

22. L'art. 2 du projet de loi prévoit le remplacement du premier alinéa de l'art. 212-1 duC.

pén. par douze alinéas ainsi rédigés : «Constitue également un crime contre l'humanité et est puni de la réclusion criminelle à perpétuité l'un des actes ci-après commis en exécution d'un

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plan concerté à l'encontre d'un groupe de population civile dans le cadre d'une attaque généralisée ou systématique: 1° L'atteinte volontaire à la vie; 2° L'extermination; 3° La réduction en esclavage; 4° La déportation ou le transfert forcé de population; 5°

L'emprisonnement ou toute autre forme de privation grave de liberté physique en violation des dispositions fondamentales du droit international ; 6° La torture ; 7° Le viol, la prostitution forcée, la grossesse forcée, la stérilisation forcée ou toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable ; go La persécution de tout groupe ou de toute collectivité identifiable pour des motifs d'ordre politique, racial, national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste ou en fonction d'autres critères universellement reconnus comme inadmissibles en droit international; 9° L'arrestation, la détention ou l'enlèvement de personnes, suivis de leur disparition et accompagnés du déni de la reconnaissance de la privation de liberté ou de la dissimulation du sort qui leur est réservé ou de l'endroit où elles se trouvent dans l'intention de les soustraire à la protection de la loi pendant une période prolongée ; 10° Les actes de ségrégation commis dans le cadre d'un régime institutionnalisé d'oppression systématique et de domination d'un groupe racial sur tout autre groupe racial ou tous autres groupes raciaux et dans l'intention de maintenir ce régime; 11° Les autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de grandes souffrances ou des atteintes graves à l'intégrité physique ou psychique».

23. Le projet de loi ouvre également la possibilité de mettre en cause la responsabilité pénale du supérieur hiérarchique militaire et civil du fait de sa complicité passive à l'égard d'un crime contre l'humanité ou d'un crime de guerre commis par un subordonné. En outre, il porte de 10 à 30 ans le délai de prescription pour les crimes de guerre, en réservant l'imprescriptibilité au seul crime contre l'humanité.

24. Enfin, le texte présenté par le Gouvernement (art. 7 bis) prévoit l'insertion dans le C. pr.

pén. d'un art. 689-11 rédigé comme suit : «Peut être poursuivie et jugée par les juridictions françaises toute personne qui réside habituellement sur le territoire de la République et qui s'est rendue coupable à l'étranger de l'un des crimes relevant de la compétence de la Cour pénale internationale ( ... ), si les faits sont punis par la législation de 1 'État où ils ont été commis ou si cet État ou l'État dont il a la nationalité est partie à la convention précitée. La poursuite de ces crimes ne peut être exercée qu'à la requête du ministère public si aucune juridiction internationale ou nationale ne demande la remise ou l'extradition de la personne ( ... ) ». Cette disposition fait l'objet de la critique la plus importante exprimée à l'encontre du projet de loi par la Coalition française pour la Cour pénale internationale.

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