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Evaluation du comportement en milieu somatique : utilisation d’une méthode simple et fiable

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Texte intégral

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G. Gold L. Fazio J. Hua Stolz F. R. Herrmann P. Gattelet D. Zekry

introduction

Le vieillissement de la population a entraîné une augmentation du nombre de personnes hospitalisées pour une décompen- sation médicale aiguë avec, parmi leurs comorbidités, la pré- sence d’une démence. Le changement de lieu et surtout la pa- thologie aiguë sous-jacente mènent souvent à un état confu- sionnel et des troubles du comportement qui peuvent être sévères et rendent le maintien difficile en milieu somatique.

De plus, les symptômes psychiatriques et comportementaux, principalement l’agressivité et l’agitation, sont les complica- tions les plus fréquentes chez les personnes démentes hospi- talisées.1 Elles sont un facteur de risque important d’une durée de séjour prolongée et d’un placement en EMS.2

Pour faire face à cette situation, l’Hôpital des Trois-Chêne a créé, en 2000, l’Unité Somadem. Cette unité du service de gériatrie s’est spécialisée dans la prise en charge des patients déments chez qui un événement somatique aigu (par exemple : une in- fection, une décompensation cardiaque, un trouble métaboli- que) occasionne des troubles du comportement interférant avec la prise en charge médicale et infirmière. Les troubles les plus souvent rencontrés sont de types agitation, cris, refus de soins, agressivité verbale et/ou physique, déambulation et désinhibi- tion. Pour les mesurer de façon objective, une échelle d’appli- cation simple, fiable, reproductible et rapide d’utilisation s’est révélée indispensable.

exemples d

échellesd

évaluationducomportement Il existe plusieurs échelles permettant d’évaluer en détail les troubles du com- portement selon leur type et leur sévérité. Ces échelles sont régulièrement utili- sées en milieu psychiatrique, elles couvrent de multiples aspects du comporte- ment mais elles nécessitent un long délai d’observation par un même informateur et sont mal adaptées au milieu somatique.

Echelle de Cohen Mansfield

L’échelle de Cohen Mansfield évalue plus particulièrement des comporte- ments tels que l’agressivité physique, les déambulations et les cris. Elle com- prend 29 items. La fréquence de chaque symptôme est cotée de 1 (jamais) à 7 (plu- sieurs fois par heure). Il existe une validation française de cette échelle (9). Com- pléter l’échelle prend dix à quinze minutes pour des soignants entraînés et une Evaluating behavior in non psychiatric

settings : use of a simple and reliable method

Behavioral and psychological symptoms of dementia are the most common complication in hospitalized older people with dementia.

This article describes the development of a French version of a simple and reliable scale that is easy to use in somatic settings to foster clear and objective communication around this symptomatology.

Rev Med Suisse 2012 ; 8 : 2119-21

Les symptômes psycho-comportementaux sont une des compli- cations les plus fréquentes des personnes hospitalisées avec une démence. Cet article décrit le développement de la version française d’une échelle simple et fiable, facilement applica- ble dans des milieux somatiques et qui permet une communi- cation claire et objective autour de cette symptomatologie.

Evaluation du comportement

en milieu somatique : utilisation d’une méthode simple et fiable

pratique

Pr Gabriel Gold

Lara Fazio et Pierre Gattelet Drs François R. Herrmann, Julie Hua Stolz et Dina Zekry Service de gériatrie

HUG, Hôpital des Trois-Chêne 3, chemin du Pont-Bochet 1226 Thônex/Genève gabriel.gold@hcuge.ch lara.fazio@hcuge.ch julie.hua@hcuge.ch pierre.gattelet@hcuge.ch francois.herrmann@hcuge.ch dina.zekry@hcuge.ch

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période d’observation de deux semaines est recommandée par les auteurs.3,4

Inventaire neuropsychiatrique (NPI)

Le NPI 5 est un inventaire de douze symptômes (notam- ment l’agitation, l’apathie, les hallucinations, l’irritabilité) parmi les plus fréquents au cours de la maladie d’Alzheimer (MA) et des maladies apparentées, qui évalue leur fréquen- ce et leur sévérité, ainsi que le retentissement sur l’aidant ou le professionnel. Les informations sont recueillies auprès d’un accompagnant au cours d’un entretien structuré rendant sa réalisation longue. Son utilisation est particulièrement répandue dans les études thérapeutiques de la MA. Il existe aussi une version courte de passation plus rapide, le NPI- Réduit, et une version destinée aux équipes soignantes en établissement, le NPI-ES. Une version française du NPI-ES a été validée.6 Le temps de passation est relativement long (15 à 20 minutes) et l’application de cet outil nécessite la formation des soignants à cet inventaire.5

Echelle d’agitation de Pittsburgh

En 1994, Rosen et coll. ont développé à Pittsburgh (Etats- Unis) une échelle qui cote les symptômes de l’agitation as- sociée à la démence et aux états confusionnels par l’obser- vation directe du patient.7 Elle a été validée en anglais tant dans des services hospitaliers que dans des établissements d’hébergement pour personnes âgées. Elle s’applique à des patients atteints de démence dégénérative, quelle qu’en soit la sévérité. L’échelle de Pittsburgh prend en compte quatre aspects de l’agitation : les vocalisations, l’agitation motrice, l’agressivité et l’opposition aux soins :

• les vocalisations incluent les cris, les plaintes et les de- mandes répétées. Elles sont cotées de 0 (absentes) à 4 (cris forts, hurlements impossibles à canaliser) ;

• l’agitation motrice comprend la déambulation, les balan- cements sur une chaise, les mouvements inadaptés. Elle est cotée de 0 (absente) à 4 (mouvements intenses, déran- geants et impossibles à canaliser) ;

• l’agressivité comprend la violence verbale, la violence phy- sique, les comportements menaçants. Elle est cotée de 0 (absente) à 4 (violence physique envers lui-même ou autrui) ;

• la résistance aux soins concerne la résistance pour la toi- lette, l’habillage, la prise des repas ou des traitements. Elle est cotée de 0 (absente) à 4 (agression du soignant).

Le score de l’échelle d’agitation de Pittsburgh est coté de 0 à 16. Plusieurs évaluations peuvent être réalisées au cours d’une même journée. Les scores les plus élevés pour chaque item, relevés au cours de la période d’observation, sont retenus.

développementetfiabilitéd

uneversion française del

échelled

agitationde

pittsburgh

Afin d’adapter son utilisation à notre population hospi- talière, nous avons effectué une traduction de l’instrument avec un système de traductions itératives des textes obte- nus, de l’anglais au français et inversement jusqu’à l’obten- tion d’une équivalence entre les versions dans les deux langues (tableau 1).

Au total, 114 évaluations Pittsburgh ont été effectuées à double chez 24 patients par une personne de l’équipe soi- gnante (infirmière ou aide-soignante) et par une neuropsy- chologue durant une même période comprenant une ou plusieurs activités de soin (toilette, habillage, prise de mé- dicaments, etc.) auxquelles toutes les deux avaient active- ment participé. Les scores ont été établis de manière tout à fait indépendante par la neuropsychologue et le membre concerné de l’équipe soignante. La corrélation entre les deux scores s’est révélée excellente, avec des coefficients rhô de Spearman à 0,83 pour les vociférations, 0,84 pour l’agitation motrice, 1 pour l’agitation, 0,88 pour la résistance aux soins et 0,91 pour le score total.

L’échelle d’agitation de Pittsburgh présente plusieurs avantages :

• sa réalisation est rapide (une minute) ;

• elle est basée sur l’observation du soignant sans né­

cessiter la collaboration du patient et sans le besoin d’un

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Tableau 1. Version française de l’échelle de Pittsburgh Vociférations

Demandes itératives, vociférations non verbales telles que cris, gémissements

0 Absent

1 Faible volume, non dérangeant pour le milieu, inclure les pleurs 2 Volume plus élevé que celui de la conversation, légèrement dérangeant,

canalisable

3 Fort, dérangeant, difficile à canaliser

4 Crie très fort, hautement dérangeant, impossible à canaliser Agitation motrice

Déambulation, errance, remue sur sa chaise, se déshabille, cogne sa chaise, prend les affaires des autres. Dérangeant selon les normes sociales habituelles et non par rapport aux autres patients. Si dérangeant

du fait du bruit, noter sous vociférations 0 Absente

1 Déambule ou remue sur sa chaise à un rythme normal (semble chercher un réconfort, cherche son épouse, activités sans objet)

2 Rythme accru des mouvements, faiblement dérangeants, facilement canalisables

3 Mouvements rapides, modérément dérangeants, difficiles à canaliser 4 Mouvements intenses, extrêmement dérangeants, impossibles à canaliser

verbalement

Agressivité 0 Absente

1 Violence verbale

2 Comportement menaçant, n’essaie pas de frapper 3 Violence physique envers les objets

4 Violence physique envers les personnes, y compris soi-même NB : si l’agressivité survient uniquement lors des soins, le score est 0

Résistance aux soins 0 Absente

1 Evitement, repousse l’échéance ou procrastination 2 Refus verbal ou geste de refus

3 Repousse le soignant pour éviter la tâche 4 Agresse physiquement le soignant

Entourer la ou les activités en rapport avec un score L 0 dans une ou plusieurs des rubriques ci-dessus

• Se laver • S’habiller • Manger

• Prise de • Activités techniques (phlébotomie, • Autre médicaments pansements…)

Entourer les interventions effectuées durant la période d’évaluation

• Isolement • Médicaments de réserve • Contention • Autre

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proche pour l’interrogatoire ;

• elle est réalisable par toute personne en charge du pa- tient ;

• elle est d’une grande simplicité ;

• la fiabilité interjuge est excellente.

Elle peut être répétée à différents moments de la prise en charge, même plusieurs fois dans la même journée afin d’assurer le suivi d’une intervention pharmacologique ou non pharmacologique. La validation de la version dévelop- pée en langue française reste encore à faire.

conclusion

Les services de médecine somatique qui prennent en charge des personnes âgées doivent développer des stra- tégies d’évaluation et de traitement des troubles du com- portement. Une communication interdisciplinaire objective autour de cette problématique pourrait grandement béné-

ficier de l’utilisation d’échelles simples, fiables et repro- ductibles, dont l’échelle d’agitation de Pittsburgh est un exemple.

Remerciements

Les auteurs remercient chaleureusement tout le personnel médico- soignant de l’Unité Somadem.

1 ** Soto ME, Andrieu S, Villars H, et al. Improving care of older adults with dementia : Description of 6299 hospitalizations over 11 years. J Am Med Dir Assoc 2012;13:486.e1-6.

2 * Wancata J, Windhaber J, Krautgartner M, et al.

The consequences of non-cognitive symptoms of de- mentia in medical hospital departments. Int J Psychiatry Med 2003;33:257-1.

3 Cohen-Mansfield J, Billig N. Agitated behavior in the elderly I. A conceptual review. J Am Geriatr Soc

1986;34:711-21.

4 Cohen-Mansfield J. Agitated behavior in the elderly II. Preliminary results in the cognitively deteriorated. J Am Geriatr Soc 1986;34:722-7.

5 Cummings JL, Mega MS, Gray K, Rosenberg- Thompson S, Gornbein T. The neuropsychiatric inven- tory : Comprehensive assessment of psychopathology in dementia. Neurology 1994;44:2308-14.

6 Sisco F, Taurel M, Lafont V, et al. Troubles du comportement chez les sujets déments en institution :

évaluation à partir de l’inventaire neuropsychiatrique pour les équipes soignantes. L’Année Gérontologique 2000;14:151-71.

7 * Rosen J, Burgio L, Kollar M, et al. A user-friendly instrument for rating agitation in dementia patients.

Am J Geriatr Psychiatry 1994;2:52-9.

* à lire

** à lire absolument

Bibliographie

Implications pratiques

Il faut s’attendre à une augmentation de la prévalence des troubles du comportement en milieu hospitalier somatique Une communication objective et comprise par tous est gran- dement facilitée par l’utilisation de scores appropriés L’échelle de Pittsburgh est un exemple d’une échelle rapide et facile à utiliser avec une version française fiable

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