• Aucun résultat trouvé

LE PARTI COMMUNISTE FRANÇAIS

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "LE PARTI COMMUNISTE FRANÇAIS"

Copied!
6
0
0

Texte intégral

(1)

LE PARTI COMMUNISTE FRANÇAIS

ALBERT LEBACQZ

I

l y a plusieurs causes à l'absence des ministres commu- nistes : Moscou — la rigueur — la crise interne du

Tous les diplomates qui furent en poste à Moscou relèvent le dédain du Kremlin pour le P . C F . , son peu de considération pour la personne de M . Marchais, ou de tel autre leader du P.C., et le fait qu'il préférait traiter d'Etat à Etat avec le général de Gaulle, avec M . Pompidou, avec M . Giscard d'Estaing plutôt qu'avec les socialistes, considérés comme « atlantistes », « inféodés à Washington ».

Peu avant le changement de premier ministre, nous avons eu des conversations dans les milieux soviétiques les plus auto- risés où l'on nous a dit ceci, en substance :

« La politique extérieure de la France est exclusivement l'œuvre de M. Mitterrand, le P.C.F. ne pesant en rien.

Il n'y a pas de règle selon laquelle Moscou s'entendrait mieux avec des gens de droite qu'avec des gens de gauche, mais si l'on regarde l'histoire des relations de l'U.R.S.S. avec les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la France, on s'aperçoit de la diversité des situations, et que les choses, certes, allaient parfois beaucoup mieux avec des "conservateurs", même si ceux-ci ne bénéficient pas du monopole du réalisme.

De toute façon un "avis" donné par Moscou au P.C.F.

ferait du tort, et à tout le monde : P . C . F .

Moscou

(2)

a) d'abord aux relations interétatiques entre Paris et Mos- cou (où il a été répondu à M. Mitterrand qu'en parlant de M. Sakharov il faisait "ingérence") ;

b) au P.C.F., qui souffre tant de sa relation, "psychique"

comme disait Blum, avec Moscou. »

Nous avons pressé notre interlocuteur : « En tant que communiste, ne pensez-vous pas que le P.C.F. se diminue, et même s'altère, en collaborant à un gouvernement dont l'œuvre s'éloigne tant de l'idéologie marxiste?»

Il répondit, finalement :

« Certes l'idéologie n'exclut pas la politique... Et d'ailleurs le marxisme est tout à la fois une science et un art... La politique c'est l'art du possible. Au P.C.F. de savoir ce qui est possible..., mais aussi à l'intérieur de ce qui est possible ce qui est accep- table ! »

Pratiquement tous les membres du « groupe dirigeant » du P . C . F . ont reçu une formation en Union soviétique, ou ont entretenu des relations particulières avec Moscou. Ce qui structure le P . C . , ce qui l'empêche de se désagréger après s'être délité, c'est une ingérence soviétique fondamentale.

La rigueur Sa participation au gouvernement n'a pas été bénéfique pour le parti communiste, qui a dû assurer l'impopularité de « la pause, de "la rigueur", de la reconversion du socialisme dans la seule lutte contre les injustices sociales et "l'économie mixte" ».

Le pouvoir d'achat n'augmente plus, et i l baisse parfois ! Le chômage a considérablement augmenté. L e P . C . a dû être

« solidaire » dans un gouvernement qui procédait à des « restruc- turations » qui auraient suscité son opposition la plus extrême, si elles avaient été opérées par un pouvoir de droite.

L a C . G . T . a joué le double jeu, mais elle a perdu davan- tage encore de son audience par sa relative modération, tandis que M . André Bergeron marquait des points aux élections pru- d'homales, aux élections aux caisses de Sécurité sociale, et dans les élections professionnelles.

(3)

676 LA POLITIQUE INTERIEURE

La crise interne du P.C.F.

L a troisième raison du retrait du P . C . F . c'est la crise qui règne plus que jamais au sein de la Place du Colonel-Fabien, et qui porte sur le fonctionnement « totalitaire » du Parti, sur P « archaïsme » idéologique, sur l'équipe dirigeante.

Se refusant à n'être qu'une chambre d'enregistrement, le comité central du P . C . F . réclame au bureau politique « des progrès sensibles dans la vie démocratique et dans l'activité des organisations des partis ».

Rester au pouvoir ne facilitait pas la reprise en main par le « groupe dirigeant », lequel s'est résigné, pour conserver son emprise, à aller contre le sentiment de la majorité des électeurs communistes hostiles, quant à eux, au retour au « ghetto ».

\Jaggiornamento est impossible au parti communiste : les leaders ne parlent de « changement » que pour en fournir l'impression. O n « préfabrique » des débats, on « récupère » des oppositions, et finalement tout demeure en l'état.

M . Marchais a déclaré qu'il « fallait conserver le centralisme démocratique», et il engageait ainsi la direction collégiale.

Le P . C . F . n'est pas prêt de s'italianiser, et de toute façon le parti communiste italien n'est quand même pas ce que d'aucuns croient.

On éprouve de la sympathie pour l'intelligence toute latine des dirigeants du P . C L , de l'admiration pour les conceptualisa- tions de Gramsci, de l'intérêt pour l'acceptation de l ' O . T . A . N . et une propension au titisme, ainsi que pour la réaction extraor- dinairement libre à l'égard de Moscou à la suite de la procla- mation de l'état de siège à Varsovie :

« Une période s'achève, proclama Berlinguer. La force popu- laire qui a eu pour origine la révolution d'Octobre s'est désor- mais épuisée, comme s'est épuisée la capacité du renouvellement des sociétés de l'Est européen — et comme s'est éteinte la II1 Internationale. »

Tout cela, ainsi qu'une certaine mise au jour de divergences internes généralement brillantes, enveloppe le P.C.I. d'une sorte d'illusion lyrique, mais la vérité demeure sombre, comme l'indi- quait dans la Revue de juillet l'ambassadeur François Puaux.

(4)

« M. Berlinguer en mourant aura laissé une belle machine politique [...], trop avancée sur la voie du compromis pour rede- venir révolutionnaire, trop attachée, d'autre part, à la famille communiste pour rompre avec Moscou. »

Et M . Puaux de préciser que le P.C.I. n'est pas prêt à renoncer, d'une part, au centralisme démocratique, et, d'autre part, au principe d'hégémonie selon lequel, une fois au pouvoir, le Parti en prend le contrôle total sous des formes plus ou moins démocratiques.

M . Georges Marchais sera-t-il prochainement écarté au bénéfice de M . Fiterman ? On parle de l'éviction de M . Marchais depuis 1977.

On sait qu'un secrétaire général d'un parti communiste n'est jamais « renversé », ce qui serait contraire au « centra- lisme démocratique ». Tout se passe dans des règlements de comptes à l'intérieur de ce clan non institutionnellement établi, mais qui règne, qui sévit, appelé le « groupe dirigeant », et où

l'U.R.S.S. pèse sur une tendance, ou sur plusieurs tendances.

Le vice fondamental du P . C . n'est pas tant le centralisme démocratique — qui s'analyse comme un consensus « public » par ralliement de la minorité après un débat secret — que le processus de désignation des membres des instances dirigeantes : les nominations viennent d'en haut par des propositions faites par l'échelle suprême et qui sont ratifiées aussitôt, car i l n'est pas d'autres candidats...

Le congrès du P . C . ne choisit pas le secrétaire général, mais le comité central, lequel désigne le bureau politique d'où émane le secrétaire général (et le secrétariat). Mais tout se passe au cours d'un processus allant de haut en bas, et non pas inver- sement comme i l se devrait.

Le noyau central du militantisme est composé de 20 000

« p e r m a n e n t s » , les «révolutionnaires professionnels» comme disait Lénine, qui encadrent les autres... Ils sont à la botte du

« g r o u p e dirigeant», parce qu'ils en dépendent matériellement.

Pour beaucoup d'entre eux, i l n'est pas de reclassement possible.

Pratiquement, le secrétaire général est choisi dans le secret par le « g r o u p e dirigeant»... et il est écarté lorsque ce « g r o u p e dirigeant » n'en veut plus, avec accord de Moscou.

Dans l'histoire des partis communistes, i l y eut l'exception de Novotny écarté par le comité central tchécoslovaque, avec

(5)

678 LA POLITIQUE INTERIEURE

Dubcek qui lui succède, mais on connaît la suite : la convocation au Kremlin, les chars soviétiques à Prague.

Par ailleurs, M . Khrouchtchev, destitué par la direction collégiale, réussit à se maintenir grâce au concours de l'armée, le maréchal Joukov envoyant immédiatement chercher par avion tous les membres du comité central qui permit à M . K . . . de demeurer au Kremlin.

e parti communiste se réduit à près de 10 % de JLv l'électorat, mais le parti socialiste ne peut espérer couvrir l'ensemble de la gauche, et le confesse...

Récemment, nous avons interrogé à ce sujet M . Pierre Mauroy, lequel va rejouer à la rentrée un grand rôle au parti socialiste. L'ancien premier ministre dresse le constat suivant :

« La France restera la France dans sa diversité. A droite, il y aura toujours les ultras, la droite néo-bonapartiste, la droite libérale. Eh bien ! à gauche deux courants subsisteront toujours parce qu'il y a deux sensibilités. »

Dans son for intérieur M . Mauroy ne doit pas se réjouir du tout de ce pluralisme puisqu'il nous rappelle aussitôt que, s'il se rattache à la tradition guesdiste, c'est-à-dire marxisante, de la Fédération du Nord marquée par la longue prépondé- rance de Jules Guesde, cette Fédération fut une des rares en

1920, au congrès de Tours, à refuser l'option bolchevique.

Contrairement à sa voisine, la Fédération du Pas-de-Calais, elle opta désormais pour la voie de Jean Jaurès, prolongée par Léon Blum, défenseur de la « vieille maison », et pour la S.F.I.O., produit du rejet catégorique d'un parti organisé selon le mode totalitaire et subordonné à Moscou.

Le P.S., parti trop bourgeois pour récupérer l'électorat d'extrême gauche !

M . Henri Lefebvre, grand spécialiste de la philosophie marxiste, et qui eut des démêlés sérieux avec le P . C . auquel i l appartient, considère que « la disparition ou la marginalisation du P.C.F. serait catastrophique pour la vie politique en France : le prolétariat traditionnel se tournerait vers des formes diverses de Vanarchisme, car, contrairement à l'opinion répandue, le P.C.F. ne s'est pas constitué seulement contre la social-démo- cratie, les évolutionnistes et les réformistes, il s'est formé avec

(6)

et contre les courants libertaires » dont ¡1 aurait calmé le jeu

« en les accablant de dogmatisme ».

Ainsi le P . C . éviterait-il 1' « action directe » !

Il y aurait encore un problème de canalisation du courant jacobiniste révolutionnaire, traditionnel en France, dès lors qu'il se détourne de l'impasse de la Place du Colonel-Fabien...

A prochain terme va se poser, en tout cas, un problème politique pour la gauche. N ' y a-t-il pas un impératif électoral d'alliance, au moins défensive, entre le P.S. et le P . C . F . ?

Quelle sera la loi électorale ?

Le système de la proportionnelle aiderait le P . C . F . à se maintenir, en « sauvant » ses leaders menacés. Avec le système actuel, le scrutin majoritaire à deux tours, le P . C . perdrait des sièges, par obligation de report au second tour sur le candidat socialiste arrivé en tête. M . Joxe, ministre de l'Intérieur, procé- derait à un « redécoupage » des circonscriptions, notamment dans la région parisienne...

A L B E R T L E B A C Q Z

Références

Documents relatifs

Centre d’histoire sociale du XXe siècle (CHS), Université Paris I - Panthéon-Sorbonne,

Au cours des années quatre-vingt intervient une deuxième vague d’extension, avec la création d’une équipe de nuit, pour le même personnel de fabrication,

b) Car ils ne veulent pas vexer les parents. 2 - Que font les parents de Bellaninou pour la rendre laide ? c) Ils lui mettent des produits sur le visage. 7 - Pourquoi fait-il

Trop belle sorcière ! Un prince pas du tout charmant 1 - Pourquoi les oncles et tantes de. Bellaninou ne disent pas qu’ils la trouvent

L'allongement progressif à 40 années (terme en 2003) de la durée de cotisation requise dans le régime général pour ouvrir droit à la retraite à taux plein et, simultanément,

D'un poème à l'autre — mais plus largement, aussi, dans cette lente filiation des poèmes : L'Enclos, puis Les personnages de théâtre meurent dans la rue, puis le Contre-Opéra,

« Le plus fort, le plus costaud, le plus beau, c’est assurément vous, Grand Méchant Loup.. » répondent ensemble les trois

« Le plus fort, le plus costaud, le plus beau, c’est vous, Grand Méchant