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Entièrement à base de plantes, Michel MIMO

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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Entièrement

à base

de plantes

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Sommaire

Chapitre 1 : Le pissenlit et autres histoires de salades

Chapitre 2 : Le séneçon, le trèfle et autres histoires d'herbes à lapins

Chapitre 3 : Les orties, les ronces et autres plantes qui piquent

Chapitre 4 : Le sureau, le prunus et autres histoires d'arbres

Chapitre 5 : La pomme de terre, la tomate et autres solanacées

Chapitre 6 : Le bois ; histoires de chênes, de troncs, de branches et de

racines

Chapitre 7 : La vigne et le tabac ; le vin et la cigarette

Plaisirs et vices de l'adolescence

Chapitre 8 : Le chiendent ; histoires de chiens, de dents et de mauvaises

herbes

Chapitre 9 : Le saule, le lilas et autres arbres joliment fleuris

Chapitre 10 : Souvenirs de fruits mélangés ; quelle salade !

Chapitre 11 : Le haricot et autres histoires de légumes verts

Chapitre 12 : Le coucou, la violette, la pâquerette et autres jolies fleurs

comme la jonquille

Epilogue

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Chapitre 1 : Le pissenlit et autres histoires de salades

Je ne me souviens pas à quel âge j’ai fait connaissance avec le pissenlit. Avec le mot pissenlit, d’abord, avant de savoir l’identifier comme plante, comme mauvaise herbe et plus tard comme salade.

Pissenlit … pissenlit …Je suis sûr que, dès ma petite enfance, j’ai aimé prononcer ce mot, en cueillant sans doute ses jolies fleurs jaunes éclatantes, en soufflant sur sa corolle de graines ailées qui s’envolaient avec légèreté.

C’est que, dans le mot pissenlit, il y avait un mot interdit ! un de ces gros mots que ma cervelle de jeune enfant enregistrait facilement, pour jouer avec, avant de savoir lire, avant de savoir que les mots se découpent en syllabes.

Pisse-en-lit. Maman avait dû m’expliquer, avec des mots simples et sûrement pédagogiques ( j’ai su plus tard qu’elle aurait voulu être institutrice ) que ce nom de plante tirait son origine de ses facultés à aider la vessie à mieux se vider, de ses vertus diurétiques, dirions-nous maintenant.

« Mais pourquoi : en-lit ? » devais-je certainement insister auprès d’elle, tout en devinant la réponse. Alors maman m’avait traduit à sa façon l’étymologie du mot "pisse-au-lit" car l’excès de consommation de ses feuilles, mangées en salade, pouvait provoquer une incontinence nocturne et des draps souillés … ça, ce sont mes mots d’adulte qui transforment, cinquante-cinq ans après, ses probables explications. Le verbe pisser, en effet, m’avait tout de suite plu. Plu, sans jeu de mots, car, en cas de fortes pluies, lorsque l’eau dégoulinait des gouttières des toits, il était autorisé de dire : l’eau pisse du toit, ou même : il pleut "à vache-qui-pisse". Et lorsque papa ou nos tontons s’isolaient dehors contre un coin de mur ou un tronc d’arbre, je n’avais que ce verbe pour évoquer mentalement leur petit besoin : les hommes, les adultes, ne font pas "pipi" ! Quant au verbe uriner, il n’en était pas question ! Pisser ! c’était tellement mieux ! …Un urinoir ? Derrière l’église et dans la cour de l’école, il y avait des pissotières, en bonne ardoise de Trélazé !

Et notre pissenlit, dans l’affaire ? Je me souviens non seulement de ses capitules jaunes ( capitule ! j’ai toujours aimé les mots savants du Petit Larousse !) et des ses aigrettes volantes ( aigrette, capitule, restons modeste ; ces deux mots-là, même pour un fouineur de dictionnaire comme moi, m’étaient alors inconnus ). Mais je me souviens très bien de papa et maman mangeant de la salade de pissenlits ; mes frères et sœur, je ne sais pas, mais moi, certainement pas car un certain nombre d’aliments étaient pour moi amers : les concombres, plus tard les endives et les feuilles de pissenlits.

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« Amer ? » disait et répétait maman avec espièglerie. « Si c’est amer, il faut l’aimer ! » Et pour que les jeux de langage me rentrent, nous rentrent, dans l’esprit, elle redisait à chaque occasion : « Si c’est-ta-mère, il faut l’aimer ! »

Je me souviens d’où venaient ces pissenlits comestibles. Lorsque papa passait la charrue ou la houe dans les rangs de vigne, au printemps, pour débarrasser la terre des mauvaises herbes, il enfouissait, du moins je le suppose, des graines de pissenlit prêtes à germer et celles-ci, pour pousser et remonter à la surface, produisaient de longues feuilles blanches et tendres et ce sont ces pissenlits-là, arrachés en profondeur avec un long couteau ( si, c’est vrai, je me souviens du couteau à longue lame dont maman se servait ) qui se retrouvaient dans le saladier. La vinaigrette, c’était le mélange du vinaigre maison de la bouteille au bouchon de liège fendu, aux trois-quarts moisi, et de l’huile de noix de l’Huilerie de la Croix Verte dont je relisais inlassablement l’étiquette, à table, dès que je sus les rudiments de la lecture.

Parlons salade encore. Je ne me souviens manger ni pissenlits ni endives ni même chicorée, je crois : en effet, pour moi, la chicorée, c’était la Chicorée Leroux, cette espèce d’additif au café que maman moulait … euh, moudait … ah !ce verbe moudre ! … bref que maman broyait énergiquement dans son moulin à café à manivelle. La chicorée frisée ? Non, pas de souvenir de ce genre, encore moins de scarole et de batavia… Mais n'oublions pas la bourcette, salade "sauvage" et gratuite qui sera ensuite …"domestiquée", cultivée dans le pays nantais sous le nom de mâche… Non, je crois que je nommais simplement "salade" ce qui était la laitue… et laitue, ça, c’était encore un mot magique pour moi !

En effet, lorsque l’un de nos tontons jardiniers arpentait avec papa le potager, qu’on appelait le jardin tout simplement, pour évaluer si ça poussait vite et bien, tout en comparant leurs semis, leurs plantations et leurs cultures, mes oreilles, si elles rôdaient dans les environs, se dressaient et transmettaient à mon jeune cerveau à l’affût cette phrase mystérieuse et extraordinaire que l’un d’eux prononçait : « Tes laitues naissent-elles ? Yes, mes laitues naissent. Si tes laitues naissent, mes laitues naîtront. » Ah ! quel plaisir j’avais à entrer dans cette connivence de langage et d’humour avec les grandes personnes, comme on disait !

Salades encore et drôles de phrases de mon enfance : « L’amour, ça ne se mange pas en salade. » Sous-entendu : apprends qu’un mariage sans amour, ça peut le faire quand même, dirait-on à notre époque ; ça, c’était une des phrases préférées de ma tante d’Angers, celle qui adorait ses neveux, mais aussi ses nombreux beaux-frères. Quant à la salade de fruits, je n’en ai pas souvenir. Nous mangions des fruits, épluchés ou non, surtout moi qui étais et suis encore un grand fructivore ; je ne savais pas que mélanger des fruits différents, ça faisait de la salade !… jusqu’au jour où, vers mes dix ans, fit irruption le tube de l’année : « Salade de fruits, jolie, jolie, jolie,

tu plais à mon père, tu plais à ma mère … » Ah ! J’ai aimé la fredonner, cette

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parlait à la fois de fruits, exotiques et rares à l’époque, et d’affection pour son papa et pour sa maman.

Et la salade de tomates de ma grand-mère de La Bardinière, parlons-en aussi. Toujours accompagnées d’un œuf dur coupé en deux et de rondelles d’oignons rouges, tous les midis de tous les mois d’août que j’y ai passés avec un de mes frères … et avec ma cousine de Saumur, la citadine qui charriait gentiment le campagnard de Martigné que j’étais.

J’aurais aimé placer, dans cette chronique saladière, le mot cucurbitacée … Ah ! mais si, voilà le lien : puisque le concombre a été cité, parlons de sa famille, les cucurbitacées. Encore aujourd’hui, je ne m’en lasse pas, de cette syllabe redoublée qui va si bien avec mon "pipissenlit" ( excusez-moi, je n’ai pas pu me retenir ).

L’anecdote liée aux cucurbitacées est la suivante : je me revois, un midi d’été, debout devant le "poste" ( le poste de télé attendra encore quelques années). J’écoutais attentivement Le Jeu des Mille Francs ; j’avais quatorze ans. Le candidat séchait désespérément devant la question superbanco : « A quelle famille de plantes appartiennent la citrouille, le melon et le concombre ? » Alors moi, quelques secondes avant le gong fatal, j’ai soufflé à mi-voix : « Les cucurbitacées ! » - « Les cucurbitacées ! » a annoncé et confirmé Lucien Jeunesse.

Maman, qui a toujours eu l’oreille fine, m’avait entendu dire la bonne réponse. Elle a lâché sa cuiller de bois dans sa béchamel, elle s’est précipitée à la fenêtre grande ouverte de notre merveilleuse maison des Varannes que nous allions quitter quelques mois plus tard et elle a crié à l’intention de son neveu qui enfourchait sa mobylette en remontant du jardin avec son Tonton Paul : « Ton filleul aurait gagné trois mille francs si … » - « Je t’entends pas, Tante Jeanne, et je file, on m’attend ! » L’homme pressé, cependant, coupe les gaz de son engin, écoute la question répétée par maman ainsi que la réponse érudite qu’elle m’oblige à redire comme un singe savant et il me crie ceci : « Tu diras ça à tes oncles jardiniers de Maurepart et de La Genevraie, ça leur en bouchera un coin ! » Le mot a été oublié, sauf par moi ; je n’ai pas eu à ramener ma science avec nos "tontons flingueurs", ni ces deux-là ni les deux autres. Je suis persuadé, de toute façon, qu’ils en connaissaient un sacré rayon en vocabulaire, botanique et même argotique : sans avoir jamais lu San Antonio, ils savaient très certainement que les macchabées, les truands qui ont cassé leur pipe, ceux qui ont avalé leur bulletin de naissance, bouffaient les pissenlits par la racine.

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