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Déterminisme génétique de la dynamique de croissance et de la composition isotopique du carbone chez l'Eucalyptus en réponse aux variations environnementales

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Academic year: 2021

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(1)

Délivrée par le

Centre international d’études supérieures en sciences

agronomiques

Montpellier

Préparée au sein de l’école doctorale Systèmes Intégrés en Biologie, Agronomie, Géosciences

Et de l’unité de recherche AGAP Spécialité : Biologie intégrative de la plante

Présentée par Jérôme BARTHOLOMÉ

Soutenue le 28 mars 2014 devant le jury composé de

Catherine BASTIEN, DR, INRA Orléans Rapporteur

René VAILLANCOURT, PR, UTAS Rapporteur

Thierry AMEGLIO, DR, INRA Clermont-Ferrand Examinateur Matthieu FALQUE, IR, INRA Versailles-Grignon Examinateur Patrice THIS, DR, INRA Montpellier Président Jean-Marc BOUVET, Chercheur, CIRAD Montpellier Directeur Jean-Marc GION, Chercheur, CIRAD Bordeaux Co-Directeur

Déterminisme génétique de la dynamique

de croissance et de la composition isotopique

du carbone chez l'Eucalyptus en réponse aux

variations environnementales

(2)
(3)

Déterminisme génétique de la dynamique de croissance et de la composition

isotopique du carbone chez l'Eucalyptus en réponse aux variations

environnementales.

Les différents scénarios sur l’évolution du climat prévoient une augmentation de la fréquence et de l’intensité des sécheresses. La croissance des arbres forestiers étant fortement conditionnée par la disponibilité en eau, ces changements devraient impacter de manière significative la productivité des forêts plantées. La compréhension de l'impact des facteurs génétiques et environnementaux sur la dynamique de croissance est donc un enjeu majeur pour assurer les niveaux de production des plantations de demain. L’Eucalyptus, grâce à sa croissance rapide et à la disponibilité de ressources génétiques et génomiques, est un modèle biologique idéal pour mener ces recherches.

L’objectif de cette thèse est de caractériser l’architecture génétique de la dynamique de croissance à différentes échelles de temps chez l’eucalyptus en relation avec : (i) les variations environnementales, et notamment l’évolution de la disponibilité en eau, et (ii) la composition

isotopique du carbone de l’arbre (δ13C), un caractère lié à l’efficience d’utilisation de l’eau. Pour

répondre à cet objectif, un croisement interspécifique Eucalyptus urophylla x E. grandis a été étudié dans quatre dispositifs expérimentaux en République du Congo. Notre approche se base sur la cartographie des loci à effet quantitatif (QTL) et combine : (i) un génotypage haut débit, (ii) une

caractérisation inter et intra-annuelle de la croissance et du δ13C, ainsi qu’un suivi en continu des

micro-variations du rayon et (iii) une caractérisation en continu des facteurs environnementaux. Ces travaux ont tout d'abord conduit à la construction des premières cartes génétiques à haute

résolution chez l’Eucalyptus. L'analyse de l’architecture génétique du δ13

C a ensuite permis de mettre en évidence des gènes candidats positionnels, potentiellement impliqués dans la variation de ce caractère. Enfin, la caractérisation inter et intra-annuelle de la dynamique de croissance a permis de montrer que l’architecture génétique de la croissance, au stade adulte, est structurée par les réponses à l’environnement au stade juvénile. Ces réponses ont ensuite été analysées grâce aux profils de micro-variations du rayon, permettant ainsi de préciser leurs déterminants génétiques

Nos résultats soulignent l'importance de considérer la croissance comme un caractère dynamique, non seulement pour la compréhension de ses bases génétiques, mais également à des fins de sélection de variétés adaptées à un environnement changeant.

Mots clés : dynamique de croissance, micro-dendromètre, δ13C, cartographie génétique, QTL, interaction génotype × environnement, Eucalyptus.

(4)

Genetic determinism of growth dynamics and carbon isotope composition in

Eucalyptus in response to environmental changes.

Scenarios of climate changes forecast an increase in frequency and intensity of droughts, related to an increase of global temperatures and changes in rainfall distribution. Growth of forest trees highly depends on water availability and will be significantly impacted by these changes. The understanding of the impact of genetic and environmental factors on the growth dynamics is a major challenge to ensure production levels of future planted forests. Eucalyptus, thanks to its rapid growth and the availability of genetic and genomic resources, is a perfect model to conduct this research.

The objective of this thesis is to characterize the genetic architecture of growth dynamics in Eucalyptus at different time scales, in relation with: (i) environmental changes, including changes in

water availability, and (ii) isotopic composition of carbon (δ13C), a character associated with water-use

efficiency. To this end, an interspecific cross between E. urophylla x E. grandis was studied in four experimental trials in the Republic of Congo. Our approach, based on mapping of quantitative trait loci (QTL), combines (i) a high-throughput genotyping, (ii) a characterization of inter and intra-annual

growth dynamics and δ13C, as well as a continual measurement of stem radial micro-variations and

(iii) a continual characterization of environmental factors.

First of all, this work led to the construction of the first high-resolution genetic maps in Eucalyptus, improving the sequence of the reference genome. Then, the analysis of genetic

architecture of δ13C enabled the identification of positional candidate genes, which might be involved

in the variation of this trait. Finally, inter and intra-annual characterization of growth dynamics highlight that genetic architecture of adult growth is structured by responses to the environment at the juvenile stage. These responses were then analyzed using daily profiles of stem radial micro-variations, which enabled the characterization of the genetic determinants of response to the environmental factors at the juvenile stage.

Our results highlight the importance of considering growth as a dynamic trait, not only to understand its genetic basis, but also to select in a changing environment.

Keywords: growth dynamics, micro-dendrometer, δ13C, genetic mapping, QTL, genotype by environment interaction, Eucalyptus

(5)

Les recherches effectuées dans le cadre de cette thèse ont été menées au sein de l’UMR Biodiversité Gènes et Communautés (BioGeCo) à Pierroton, et de l’UMR Amélioration Génétique et Adaptation des Plantes méditerranéennes et tropicales (AGAP) à Montpellier. Ces travaux ont été menés en partenariat avec le Centre de Recherches sur la Durabilité des Plantations Industrielles (CRDPI) à Pointe-Noire, en République du Congo. Ces recherches s’intègrent dans le cadre du programme d’amélioration de l’Eucalyptus, mené par le Centre International de Recherche Agronomique pour le Développement (CIRAD) et le CRDPI. Ces recherches ont été financées par le département BIOS du CIRAD, pour l’allocation de recherche sur trois ans, et par deux projets européens : le projet Abiogen (FEDER) et le projet 34Joule Project (ERANET Plant KBBE). Une partie des travaux a été réalisée en collaboration avec la plateforme bio-informatique de Toulouse (GenoToul) et avec Oliver Brendel de l’Inra de Nancy.

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Les remerciements, à la fois introductifs pour le lecteur et conclusifs pour l'auteur, permettent d'apercevoir les différentes dimensions d'une thèse, et sont également le reflet du travail collectif qu'elle représente.

Tout d'abord, je tiens à remercier le département BIOS du CIRAD pour le financement de mon allocation de recherche sur trois ans. Merci à Jean-Christophe Glaszmann, directeur de l'UMR AGAP, mon unité de rattachement, et à Rémi Petit, directeur de l'UMR BioGeCo, mon unité d'accueil.

Je remercie également Catherine Bastien et René Vaillancourt, d’avoir accepté d’être les rapporteurs de cette thèse, ainsi que Thierry Ameglio, Matthieu Falque, Patrice This, d’avoir accepté de faire partie du jury, car l'évaluation du travail de thèse est au moins aussi importante que le travail en lui-même.

Merci à Jean-Marc Bouvet mon directeur de thèse, pour l'autonomie qu'il m'a donnée dans mes recherches et pour la confiance qu'il m'a accordée.

L'Eucalyptus et le Congo n'étaient, avant cette thèse, que deux mots parmi d'autres. Ils me sont maintenant familiers. Pour cela, et pour m'avoir permis de faire cette thèse je remercie Jean-Marc Gion. Merci pour ton implication tout au long de cette thèse avec toujours la même conviction. Tu as su me faire partager ta vision de la recherche et tu m'as également laissé une très grande liberté dans la conduite de cette thèse. J'ai pu profiter du tabagisme passif (viens on va fumer!) durant de longues conversations sur l'analyse des données, l'écriture des articles et la thèse en général.

Merci également à tous mes collègues de BioGeCo, pour leur participation à ce travail ou tout simplement pour les bonnes conditions de travail à l'Artigua. Merci à la team Abiogen : Didier Bert, Régis Burlett et Raphaël Dulhoste pour leur participation à l'installation du dispositif sur Pin puis celui sur Eucalyptus. Nous sommes venus à bout de plusieurs kilomètres de câbles, de plusieurs milliers de branchements électriques ainsi que de quelques difficultés de régulation de tension. Et au-delà de l'installation, merci pour votre aide sur le suivi de l'essai ainsi que sur l'analyse de cette masse de données. Je remercie également Christophe Plomion pour ses conseils et son implication tout au long de cette thèse, sans qui le contenu aurait sans doute été moins pertinent. Merci également à Eric Mandrou pour les débuts au labo BM, pour les extractions d'ADN les plus longues jamais réalisées, puis pour le design de la puce Euca qui a donné de bons résultats, et enfin pour ta disponibilité même plus d'un an après ton départ. Merci à Marlène pour ta bonne humeur et les manips au labo avec notamment l'amélioration du protocole d'extraction de ces feuilles d'eucalyptus plutôt coriaces. Merci à Sébastien pour le rangement de tous les prélèvements de feuilles (2500) sur l'essai Abiogen, ainsi que la préparation des feuilles pour les analyses isotopiques. Merci à Patrick et à l'équipe de la plateforme (Franck, Sarah, Adeline et anciennement Thibaut et Christophe) pour m'avoir permis de réaliser mes manips dans de bonnes conditions et pour les conseils et l'aide reçus pendant ma période au labo. Merci également à Thierry, Jean-Marc et Yec'han pour leur aide sur Linux et SGE.

(7)

Je tiens à remercier l'ensemble de l'équipe GFP à Montpellier, notamment Marie Denis pour sa participation à mes comités de thèse et ses conseils en stats, ainsi que Roselyne Lannes pour sa disponibilité, son efficacité et sa gentillesse.

Je remercie également l'ensemble du personnel du CRDPI, à commercer par son directeur Philippe Vigneron et son directeur scientifique Aubin Saya, pour l'accueil qu'ils nous ont réservé à Pointe-Noire. Merci également à Louis Mareschal pour son aide sur place mais aussi pour les échanges de données météo et les conseils sur les sols de Pointe-Noire. Je remercie également les VI François, Gaël et plus particulièrement Blandine et Bastien pour leur accueil dans la case de passage et pour les bons moments lorsque j'étais en mission. Merci à également pour leur accueil chaleureux au CRDPI à Charles, Julienne, Crisley, Séraphin, Juste Daniel, Mélanie Prudence, Gerda, Arsène, ainsi qu'à tous les autres. J'adresse des remerciements particuliers à André Mabiala pour le travail fourni sur l'essai Abiogen et pour ton implication sans faille au cours de ces trois ans. Sans toi le dispositif Abiogen n'aurait sans doute pas aussi bien fonctionné. J'ai vraiment apprécié de travailler avec toi. Je te remercie également pour ton accueil lors de mes missions à Pointe-Noire, toujours très intenses mais sans doute parmi les meilleurs moments de ma thèse. Je me souviendrai encore longtemps du fameux sandwich au thon et à l'avocat partagé lors des repas sur le terrain.

Last but not least, Morgane merci pour tout. De la préparation du fameux cake (pour lequel je suis très envié) à la relecture de l'intégralité de ma thèse, en passant par la préparation des plaques d'extraction le week-end et le soutien tout au long de cette thèse. Tu as été essentielle dans la réalisation de ce document. Sans toi il n'y aurait sans doute pas eu de thèse merci de m'avoir permis de me dépasser.

(8)
(9)

Sommaire

Introduction ... 13

1

Contexte ... 17

1.1 Contexte général... 19

1.1.1 Un intérêt croissant pour les forêts plantées... 19

1.1.2 Le changement climatique et ses incidences sur la productivité des forêts ... 21

1.1.3 Gestion et adaptation des forêts plantées ... 30

1.2 Déterminisme génétique et environnemental de la croissance chez les arbres forestiers ... 33

1.2.1 La croissance, ses relations avec les variables environnementales et la composition isotopique de carbone ... 35

1.2.2 Les bases génétiques de la croissance ... 41

1.2.3 Stratégie d’intégration de l'interaction G×E pour l’étude de l’architecture génétique de la croissance ... 45

1.3 Objectif de la thèse et démarche adoptée ... 51

Références ... 53

2

Matériel et méthodes ... 67

2.1 Matériel végétal et essais ... 69

2.2 Site d’étude et conditions pédoclimatiques ... 71

2.3 Installation, suivi et traitement du dispositif P10 ... 73

2.3.1 Conception du dispositif ... 73

2.3.2 Mise en place du dispositif ... 75

2.3.3 Amélioration et suivi du dispositif Eucalyptus ... 83

2.3.4 Traitement des données ... 85

2.4 Caractères phénotypiques mesurés ... 87

2.4.1 Croissance ... 87

2.4.2 Mesures de δ13C ... 89

2.4.3 Micro-variations du rayon ... 91

2.5 Génotypage ... 91

(10)

2.5.2 Design de la puce SNP "Eucalyptus"... 93

2.6 Cartographie génétique ... 95

2.7 Détection de QTL ... 97

Références ... 99

3

Plasticity of primary and secondary growth dynamics in Eucalyptus

hybrids ... 103

4

High-resolution genetic linkage maps of E. grandis and E. urophylla .. 119

4.1 Introduction ... 121

4.2 Material and Methods ... 125

4.2.1 Plant material and DNA extraction... 125

4.2.2 SNP detection and array design ... 125

4.2.3 SNP genotyping ... 127

4.2.4 Linkage mapping ... 127

4.2.5 Linkage mapping accuracy... 128

4.3 Results ... 128

4.3.1 Resequencing, SNP selection and SNP-array design ... 128

4.3.2 Genotyping quality ... 129

4.3.3 Genetic Mapping ... 131

4.3.4 Comparison between genetic maps and the BRASUZ1 genome ... 135

4.4 Discussion ... 138

4.4.1 Performance of the SNP Array ... 138

4.4.2 Linkage mapping accuracy... 138

4.4.3 Validation and improvement of the Eucalyptus BRASUZ1 genome structure ... 140

4.4.4 Distribution and effect of SDRs ... 141

4.5 Conclusion and prospects ... 142

References ... 164

5

Genetic architecture of carbon isotope composition and growth in

Eucalyptus ... 169

(11)

5.2 Materials and Methods ... 173

5.2.1 Mapping population and field experiments ... 173

5.2.2 Environmental characterisation ... 173

5.2.3 Phenotypic measurements ... 175

5.2.4 Linkage map construction ... 177

5.2.5 QTL analysis ... 177

5.2.6 Functional enrichment analysis in 13C QTL-regions ... 179

5.3 Results ... 179

5.3.1 Climatic conditions ... 179

5.3.2 Trait variation and correlations ... 181

5.3.3 QTL for δ13C and growth traits ... 181

5.3.4 GO analysis of positional candidate genes... 185

5.4 Discussion ... 185

5.4.1 The phenotypic variability of δ13C is determined by environmental and ontogenic effects ... 185

5.4.2 Genetic architecture of δ13C in eucalyptus ... 187

5.4.3 Genes underlying δ13C-QTLs support differences in leaf δ13C between the dry and rainy seasons ... 188

5.4.4 Relation between δ13C, WUE and growth ... 190

References ... 201

6

Architecture génétique de la dynamique de croissance : de la croissance

totale à la réponse journalière ... 209

6.1 Introduction ... 211

6.2 Matériel et méthodes ... 213

6.2.1 Matériel végétal et essai au champ ... 213

6.2.2 Suivi des variables environnementales ... 213

6.2.3 Données phénotypiques : mesures ponctuelles et suivi en continu ... 217

6.2.4 Cartographie génétique et détection de QTL ... 219

6.3 Résultats : caractérisation de l’architecture génétique de la dynamique de croissance sur un large effectif ... 219

6.3.1 Variations et corrélations phénotypiques ... 219

(12)

6.4 Résultats : La plasticité des micro-variations radiales ... 225

6.4.1 Caractérisation du climat ... 225

6.4.2 Caractérisation phénotypique des paramètres du cycle circadien ... 227

6.4.3 Architecture génétique des micro-variations du rayon ... 237

6.5 Discussion ... 239

6.5.1 La croissance ponctuelle et les paramètres du cycle circadien ... 239

6.5.2 Relations entre les paramètres du cycle circadien et les variables environnementales ... 240

6.5.3 L’architecture génétique de la croissance et de la plasticité des micro-variations radiales ... 241

6.5.4 Lien entre l'architecture génétique des micro-variations et celle du δ13C ainsi que celle des propriétés du bois ... 245

Figures et tableaux additionnels ... 247

Références ... 260

7

Conclusion et perspectives ... 263

7.1 Synthèse des résultats obtenus ... 264

7.1.1 Les apports des cartes génétiques haute résolution ... 264

7.1.2 Architecture génétique de la dynamique de croissance ... 265

7.1.3 Architecture génétique de la composition isotopique du carbone ... 267

7.1.4 Architecture de la plasticité des micro-variations du rayon aux variations environnementales ... 269

7.1.5 Limites associées à ces travaux ... 270

7.2 Perspectives ... 271

7.2.1 L'étude de la recombinaison ... 271

7.2.2 D'autres approches d'analyse des variations journalières du rayon ... 272

7.2.3 Le lien entre micro-variations et propriétés du bois ... 272

7.2.4 Vers la sélection/prédiction génomique ... 273

Références ... 274

(13)
(14)

Une forte production de bois, résultat de la croissance apicale et radiale, est un objectif essentiel des programmes d'amélioration des arbres forestiers. Sa dynamique de formation résulte d'un large éventail de processus écophysiologiques, dont certains sont fortement dépendants des variations environnementales. C’est le cas par exemple de la photosynthèse, qui dépend notamment de la demande évaporatoire et de la disponibilité en eau du sol pour l’entrée du carbone atmosphérique dans la plante. Dans le cadre de l’évolution du climat, l’augmentation des températures moyennes combinée à un changement du régime des précipitations va accroitre la fréquence et l’intensité des sécheresses, notamment en Amérique centrale, en Afrique et en Australie. Cette baisse de la disponibilité en eau devrait s’accompagner d’une réduction de la productivité des forêts plantées dans les régions concernées. Le maintien de la productivité dans un environnement plus limitant est donc un axe majeur des programmes d’amélioration des espèces forestières. Pour répondre à cet enjeu, des recherches en génétique, dont un front de science qui porte sur l’utilisation de l’information génomique pour augmenter l’efficacité de la sélection et les gains génétiques par unité de temps, sont en fort développement chez les arbres forestiers. Les travaux réalisés au cours de cette thèse sur la caractérisation de l’architecture génétique (nombre de gènes, leur localisation sur le génome et leurs effets sur la variation phénotypique) de la dynamique de croissance et de la composition isotopique du carbone de l’arbre s'intègre dans ce cadre.

Cette thèse s’inscrit également dans le cadre du programme d’amélioration génétique des eucalyptus mené conjointement par le Centre International de Recherche Agronomique pour le Développement (CIRAD) et le Centre de Recherches sur la Durabilité des Plantations Industrielles (CRDPI) en République du Congo. Depuis 1989, un schéma de sélection récurrente réciproque a été mis en place pour obtenir des combinaisons hybrides entre

Eucalyptus urophylla et Eucalyptus grandis. Les premiers travaux de cartographie génétique

entre ces deux espèces datent de 1992. Le croissement interspécifique utilisé lors de ces premiers travaux constitue le croissement de référence utilisé dans cette thèse. Au-delà de son importance économique, le genre Eucalyptus présente deux atouts pour étudier l’architecture génétique de la dynamique croissance et son interaction avec les variables environnementales. En effet, sa croissance rapide en conditions tropicales (rotation entre 6 et 7 ans) permet un accès rapide à des arbres matures. De plus, le développement récent des ressources génomiques pour ce genre (génome de référence pour E. grandis, catalogues de séquences exprimées et de polymorphismes) ouvre la voie à une caractérisation fine de l’architecture

(15)

génétique de la croissance et des caractères associés, grâce à l’identification des gènes sous-jacents aux loci à effets quantitatifs (QTL).

Dans ce contexte, les recherches présentées dans ce manuscrit portent sur l’étude du déterminisme génétique et environnemental de la dynamique de croissance dans une descendance de plein-frères d’Eucalyptus. Elles s’appuient sur des dispositifs au champ installés en République du Congo.

Le premier chapitre décrit le contexte global et scientifique des travaux et aborde les concepts utilisés dans les chapitres suivants. Il présente également l’objectif de la thèse ainsi que les questions de recherche associées.

Le second chapitre présente le croisement biparental de référence E. urophylla x E.

grandis utilisé, ainsi que les essais au champ dans lesquels le croisement a été suivi. Un focus

est fait sur l’installation du dispositif de suivi en continu des micro-variations du diamètre du tronc. Les méthodes utilisées pour le traitement du signal de micro-variations, la cartographie génétique et la détection de QTL sont également décrites.

Le troisième chapitre traite de l’effet de la disponibilité en eau sur l’évolution temporelle du déterminisme génétique de la croissance, ainsi que de l’interaction QTL×E. Les résultats de ce chapitre proviennent de l’analyse de trois dispositifs, pour lesquels des mesures de hauteur et circonférence ont été réalisées sur 5 ans, à une échelle intra-annuelle (au cours de la saison de pluie et de la saison sèche) et interannuelle. Ce chapitre a été publié dans la revue

BMC Plant Biology en 2013.

Le quatrième chapitre se focalise sur la cartographie génétique à haute résolution et son utilisation, pour mieux comprendre la structure du génome de référence de l’eucalyptus « BRASUZ1 », grâce à la comparaison entre carte physique et carte génétique. L’effet du nombre d’individus et de marqueurs sur la précision et la résolution des cartes est abordé. Ce chapitre fait l’objet d’un article préparé pour le numéro spécial "Eucalyptus Genome" de la revue New Phytologist, une fois que le génome de cette espèce sera publié. Les cartes génétiques produites servent de base pour la détection de QTL des chapitres 5 et 6.

Le cinquième chapitre s’attache à disséquer l’architecture génétique de la composition isotopique du carbone (δ13C), un indicateur de l’efficience d’utilisation de l’eau chez les plantes. L’analyse porte sur trois dispositifs, pour lesquels des mesures de δ13

C ont été réalisées à partir de la cellulose extraite du bois ou des feuilles formées, en saison sèche et en

(16)

saison des pluies. Le contenu en gènes des QTL majeurs de ce caractère est étudié grâce à l’alignement des cartes génétiques sur la séquence de référence du génome. Ce chapitre est également présenté sous forme d’un article à soumettre. Il traite également de la comparaison de l’architecture génétique du δ13C et de la croissance.

Dans le sixième chapitre, l'analyse de l’architecture génétique de la croissance est étendue à un effectif important (960 individus). En parallèle, le signal de micro-variations du rayon sur un sous-ensemble de 222 individus est analysé à différentes échelles de temps (jour, semaine, mois). L’effet des variations environnementales sur celui-ci est décrypté. L’architecture génétique des différentes composantes de la croissance radiale est ensuite décrite.

Enfin, une conclusion générale ainsi que les perspectives de ces travaux sont abordées dans un septième chapitre.

(17)
(18)

Figure 1.1 : Estimation des stocks de carbone dans les forêts par région en 2005 (d'après [1, 2]).

(19)

1.1 Contexte général

1.1.1 Un intérêt croissant pour les forêts plantées

Les forêts ont deux rôles majeurs aux objectifs parfois contradictoires : un rôle écologique et un rôle socio-économique.

En effet, les forêts qui recouvrent actuellement environ 30% des terres émergées, soit quatre milliards d’hectares [4], sont considérées comme le réservoir de 80% de la biodiversité terrestre. Ainsi, 12% des forêts du monde sont principalement assignées à la conservation de la diversité biologique [5, 6]. Par ailleurs, les forêts contribuent également à la protection des sols contre l’érosion [7], à la lutte contre la désertification et à la préservation des ressources en eau. Enfin, les forêts jouent un rôle essentiel dans le cycle du carbone, d’une part en fixant une partie du carbone atmosphérique par photosynthèse et d’autre part parce qu’elles représentent environ 45% du carbone terrestre (652 Gt) contenu majoritairement dans la biomasse (289 Gt) et dans les sols (291,5 Gt, Figure 1.1) [5]. Compte tenu de leurs différentes fonctions, les forêts sont donc au centre des préoccupations environnementales sur l’évolution du climat (réduction de l’émission de gaz à effet de serre) [8] et sur la conservation de la biodiversité (réduction de la déforestation).

Parallèlement, 30% des forêts de la planète sont affectées en premier lieu à la production de bois et 24% sont destinées à des usages multiples, comprenant la production de bois et de produits forestiers non ligneux (fruits, champignons, gibiers) [5]. Environ la moitié du bois récolté correspond à du bois de feu, l’autre moitié à du bois rond à usage industriel (bois de trituration, bois d’œuvre,…). La production de bois au niveau mondial représentait en 2005, 3,4 milliards de m³ soit 0,7% de la totalité du matériel sur pied. La valeur des extractions de bois était estimée à 97 milliards de dollars US. Quant à la valeur totale des produits non ligneux extraits des forêts en 2005, elle se chiffrait à 18,5 milliards de dollars US. Outre la valeur marchande de produits forestiers, les différentes étapes de la chaîne de production du bois emploient 10,5 millions de personnes dans le monde, majoritairement en Asie [4]. On estime qu’environ 1,2 milliard de personnes dépendent de la forêt pour subsister [4, 9].

L’exploitation importante du bois et la conversion des forêts en surfaces agricoles, conjuguées à des phénomènes naturels (feu, ravageur,…), tendent à diminuer les surfaces forestières, notamment celles des forêts naturelles [5] (Figure 1.2). Bien que cette tendance ne soit pas récente [10], elle s’est accélérée au cours des dernières décennies avec une

(20)

Figure 1.3 : Production mondiale de bois rond industriel (issu de [11])

Figure 1.4 : Evolution des températures moyennes à la surface globe: à l’échelle annuelle (à gauche) et décennale (à droite). Les données issues de l’étude de Berkeley Earth sont en noir et celles issues d’un modèle utilisant les émissions volcaniques de sulfate et la teneur atmosphérique en CO2 sont en rouge. La teneur en CO2

est responsable de la montée progressive et le sulfate d’origine volcanique est responsable des courtes réductions. L'inclusion de l'activité solaire n’améliore pas de manière significative l'ajustement du modèle. La zone grise est l'intervalle de confiance à 95%. (d'après [12])

(21)

diminution de 13 millions ha/an de 2000 à 2010. Ces pertes ne sont qu’en partie compensées par l’augmentation des surfaces de forêts plantées (+ 4,9 millions ha/an de 2000 à 2010) [4] et l’expansion naturelle des forêts (+ 2.9 millions ha/an de 2000 à 2010), donnant des pertes nettes évaluées à environ 5.2 millions ha/an entre 2000 et 2010 [5]. L’augmentation de la demande en bois, poussée par la croissance démographique mondiale et les politiques environnementales, incitant à augmenter la part des énergies et des matériaux renouvelables tels que le bois, devrait accentuer cette tendance au cours des prochaines années. Ainsi, la consommation de bois rond à usage industriel est estimée à 2,44 milliards de m³ pour 2030 (Figure 1.3), contre 1,68 milliards de m³ en 2005 [5, 11]. En 2005 les forêts plantées satisfaisaient 66% de la production de bois rond industriel [13]. Les forêts plantées représentaient 264 millions d’hectares en 2010, soit 6,6 % des surfaces de forêts, et devraient atteindre 300 millions ha d’ici 2020. Cette hausse de la superficie devrait permettre de satisfaire la majeure partie de la demande en bois, atténuant ainsi la pression qui s’exerce sur les forêts naturelles [14].

Les forêts plantées sont composées aux trois quarts par des essences indigènes, le reste correspondant à des espèces introduites [5]. La majorité des surfaces plantées le sont en conifères (54% en 2005), le genre Pinus représentant à lui seul 32% des surfaces. Pour les feuillus (39% en 2005), le genre Eucalyptus est majoritaire avec 8% des surfaces. Il est essentiellement planté en régions tropicales, avec d’importantes surfaces en Inde, au Brésil et en Chine qui représentent 56% des plantations d’Eucalyptus. Certaines espèces plus résistantes au froid sont plantées en régions tempérées. En république du Congo, les plantations industrielles de la région de Pointe-Noire représentent la quasi-totalité des boisements d’Eucalyptus du pays soit environ 36 000 ha.

1.1.2 Le changement climatique et ses incidences sur la productivité des forêts Le climat de la Terre est un système complexe en constante évolution, sous l’influence de différents facteurs internes (composition atmosphérique, volcanisme,…) et externes (rayonnement solaire, rotation de la Terre,…) qui agissent à différentes échelles de temps et d’espace sur les différents compartiments de la terre (atmosphère, hydrosphère, biosphère). Les changements climatiques récents, observés au cours des dernières décennies montrent une accélération de ces évolutions, avec notamment une augmentation de la température moyenne de la surface terrestre de 0.6 à 0.9 °C sur les 50 dernières années [12, 15-19] (Figure 1.4).

(22)

Figure 1.5 : À gauche : Évolution des températures moyennes à la surface du globe par rapport à la période 1980-1999. Différents scénarios sont représentés (A2, A1B et B1). Ces scénario sont basés sur la production de GES selon différentes hypothèses d’évolutions des sociétés [16]. Les barres au milieu de la figure indiquent les valeurs les plus probables (zone foncée) et les fourchettes probables selon les six scénarios étudiés. À droite : Évolution projetée de la température en surface pour le début et la fin du XXI siècle par rapport à la période 1980-1999, pour les scénarios A2 (en haut), A1B (au milieu) et B1 (en bas). (d'après [16])

Figure 1.6 : Variations relatives du régime des précipitations (%) pour la période 2090-2099, par rapport à la période 1980-1999. Les valeurs indiquées sont des moyennes tirées de plusieurs modèles pour des périodes allant de décembre à février (à gauche) et de juin à août (à droite). Les zones en blanc correspondent aux régions où moins de 66 % des modèles concordent sur le sens de la variation, et les zones en pointillés à celles où plus de 90 % des modèles concordent sur celui-ci. (d'après [16])

(23)

L'impact des activités humaines (production de gaz à effet de serre (GES), notamment le CO2)

sur ces changements a clairement été mis en évidence par différentes études [12, 15-17] (Figure 1.4). Compte tenu de la progression constante des émissions de GES au niveau mondial, avec une prévision de 59 Gt équivalent CO2/an en 2020 [20], et de la longue durée

de vie du CO2 dans l’atmosphère, l’augmentation des températures moyennes devrait donc se

poursuivre. Les différents modèles prévoient une hausse globale entre 1 et 2°C pour la période 2020-2029, et entre 1 et 3,7°C pour la période 2090-2099, par rapport à la période 1980-1999 (Figure 1.5). Cette hausse des températures va entraîner une augmentation de l’évaporation et des précipitations de façon hétérogène à la surface du globe [21]. Les latitudes élevées recevront des précipitations plus importantes en raison de la capacité supplémentaire de transport d’eau de la troposphère. De nombreuses régions arides et semi-arides des latitudes moyennes verront une diminution des précipitations. Les changements les plus importants de précipitations portent sur le nord de l'Eurasie et de l'Amérique du Nord, et devraient survenir surtout en hiver (Figure 1.6). Contrairement à l’augmentation de la concentration atmosphérique en CO2 qui sera globalement homogène à la surface du globe, les

températures et les précipitations ne changeront pas de manière uniforme, impliquant une variabilité régionale forte.

Malgré les incertitudes liées aux scénarios et aux modèles de projection, sur l’intensité, le rythme et la répartition spatiale des changements climatiques [16], il est désormais certain que l’évolution du climat affectera toute la biosphère. Les forêts, qu’elles soient naturelles ou plantées, seront touchées par l’évolution du climat [22], notamment par l’augmentation de la concentration atmosphérique en CO2, l’augmentation des températures et le changement de la

distribution des précipitations. Par ailleurs, sous l’effet du changement climatique, les dynamiques des bio-agresseurs risquent d’être modifiées et les phénomènes extrêmes, tels que les feux de forêts ou les tempêtes risquent d’être plus fréquents. L’effet de ces différents facteurs sur la productivité des forêts est détaillé par la suite. Il est important de noter qu’ils interagissent bien qu’ils soient présentés séparément.

1.1.2.1 Effet de l’augmentation de la concentration en CO2

La concentration atmosphérique actuelle en CO2 (≈ 385 ppm) ne permet pas à la RuBisCo

(enzyme qui permet la fixation du CO2) de fonctionner en condition saturante en CO2. En

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(25)

aux prévisions de concentration atmosphérique en CO2 pour 2100 (≈ 700 ppm).

L’augmentation de la concentration en CO2 permettra donc, pour les plantes en C3 (tous les

arbres), une meilleure activité photosynthétique, une réduction de la conductance stomatique et donc une meilleure efficience d’utilisation de l’eau (WUE) [23-25]. Des expériences d’enrichissement en CO2 (FACE = free-air CO2 enrichment, OTC = open-top chamber) à

moyen et long termes ont montré une augmentation de la croissance des arbres [24-27]. Cette tendance générale masque des différences parfois fortes. En effet, en relation avec plusieurs facteurs : la région, l’espèce, l’âge et la durée de l’expérience, les gains en croissance peuvent être nuls [28-31] ou s’élever jusqu’à 23% (en moyenne) sur Pinus taeda, Liquidambar

styraciflua et Populus tremuloides, alba, nigra [32], 27% sur Pinus taeda [33], ou 33% sur Larix decidua [29]. Outre les effets sur la croissance, l’élévation de la concentration en CO2

peut avoir un effet sur les propriétés du bois comme la densité, la taille des vaisseaux ou le pourcentage de cellulose [34-36].

Ces études FACE sur les arbres forestiers ont été conduites en régions tempérées ou boréales, mais à ce jour aucune expérience n’a été conduite en régions tropicales, bien que la compréhension des effets d’une augmentation de CO2 sur les forêts tropicales soit cruciale

[37, 38]. Toutefois, des modèles ont été développés afin de prédire l’effet d’une augmentation de CO2 dans ces régions [39]. Par exemple, Almeida et al. [40] ont montré une augmentation

de 26% de la productivité sur plantation d’Eucalyptus au Brésil, à l’horizon 2050. Une étude FACE sur Eucalyptus a débuté en 2012 dans la région de Sydney en Australie [41], et devrait permettre de mieux comprendre et prédire les effets d’une augmentation de la concentration en CO2 sur ce type de végétation.

Les gains de productivité observés sont néanmoins plus faibles que les gains sur l’activité photosynthétique [42, 43]. Différentes hypothèses ont été formulées pour expliquer cette différence. Une acclimatation peut survenir après une exposition sur le long terme à une concentration élevée en CO2, avec notamment une réduction de l’activité et de la quantité des

enzymes photosynthétiques (RuBisCo) [44]. Le transfert vers les puits de carbone de l’arbre (racine, tronc) étant limité, cette acclimatation peut être reliée à une accumulation de carbohydrates dans les feuilles, ce qui entraîne une régulation négative de la photosynthèse [45]. Néanmoins, différentes espèces comme le peuplier [46] ou le chêne sessile [47] ne présentent pas d’acclimatation sur le long terme. Une autre hypothèse est la limitation de la

(26)

Figure 1.7 : Représentation schématique de la réponse des arbres à une augmentation des températures en fonction de leur localisation géographique. La région colorée indique la fourchette de réponse. Les espèces provenant d’un environnement froid (en bleu) sont susceptible d’avoir une meilleure croissance si l’eau et les nutriments ne sont pas limitant. Les espèces provenant d’un environnement chaud (en rouge) devraient présenter une diminution de la croissance avec une variabilité moins importante entre génotypes ou entre espèces (D’après [48])

(27)

productivité par d’autres facteurs jouant un rôle dans la croissance, comme la disponibilité en eau et en nutriments [25, 27, 42].

1.1.2.2 Effet de l’augmentation des températures

La température ayant un rôle dans la plupart des processus biologiques et chimiques, son augmentation aura notamment un effet sur la photosynthèse, la transpiration et la respiration [48-50], ce qui pourrait avoir un effet positif sur la croissance. De plus, l’augmentation des températures moyennes aura des conséquences sur la phénologie foliaire et/ou cambiale [51-54], conduisant un allongement de la saison de croissance. Enfin, la minéralisation du carbone et de l'azote du sol et de la litière devrait être accélérée par la hausse des températures [55, 56].

Une hausse des températures se traduira différemment en termes de croissance selon la latitude, les espèces considérées et l’interaction avec d’autres facteurs, notamment la disponibilité en eau et en nutriments [56, 57]. Pour les hautes latitudes ou altitudes, la température est un facteur limitant pour la croissance. Une hausse des températures devrait permettre, au moins à court terme, une augmentation de la productivité en améliorant la photosynthèse et en allongeant la période de croissance [56, 58]. Par exemple, Rossi et al. [53] ont montré qu’une augmentation des températures moyennes allongera la période de croissance du xylème de 8 à 11 jours/°C sur Picea mariana. Néanmoins, une plus grande variabilité de réponse à une augmentation des températures est attendue pour les espèces de ces régions, comparées à des espèces tropicales ou de climats chauds (Figure 1.7). En effet, l’augmentation des températures peut avoir un effet neutre ou négatif selon les espèces étudiées [48, 59, 60]. À l’opposé, les espèces de climats plus chauds seront en majorité pénalisées par la hausse des températures. Différentes études ont montré que la croissance de différentes espèces d’arbres est négativement corrélée avec les températures minimales dans les régions chaudes [61, 62].

Ces résultats, de l’effet à long terme d’une hausse des températures sur la croissance, sont issus de l’analyse des relations entre le climat passé et la croissance, mais aussi d’approches expérimentales d’augmentation de la température au champ, ces dernières ayant tendance à sous-estimer les effets de la température. Ces deux types d’approches tendent à donner des résultats convergents [63].

(28)

Encadré 1 : L’eau dans la plante

L’eau absorbée par la plante sert à assurer des fonctions physiologiques majeures comme [64]:

─ Le transport de solutés (sève brute et élaborée) au niveau cellulaire et entre organes, et le refroidissement par transpiration,

─ La photosynthèse, où l’eau intervient comme donneur d’électrons, et d’autres réactions métaboliques où l’eau sert de réactif ou de substrat.

─ La turgescence et la croissance des différents organes.

La majeure partie (99%) de l’eau absorbée par la plante ne fait que transiter par celle-ci. L’eau passe du sol au végétal (via les poils absorbants) et du végétal vers l’atmosphère (via les stomates) constituant ainsi le continuum sol-plante-atmosphère [65]. Cette circulation s’effectue en suivant un gradient de potentiels hydriques décroissants (théorie de la tension-cohésion [66]). La transpiration, en abaissant le potentiel hydrique des parties aériennes crée une différence de potentiel entre le système aérien et le système racinaires ce qui permet à l’eau d’être absorbée au niveau des racines puis de circuler dans la plante. Afin de maintenir son statut hydrique, la plante régule ce flux grâce aux stomates, qui en fonction de leur degré d’ouverture, opposent une résistance plus ou moins forte aux échanges gazeux entre la plante et l’atmosphère. Au niveau de ses stomates la plante perd de l’eau,

mais fait également rentrer du CO2 nécessaire à la photosynthèse. La transpiration et la photosynthèse

sont donc deux mécanismes intrinsèquement liés.

En conditions de déficit hydrique (quantité d’eau transpirée supérieure à la quantité d’eau absorbée) le métabolisme de la plante est perturbé, ce qui provoque notamment une réduction de la croissance et du développement des organes [67-69]. Un stress hydrique peut être dû à deux facteurs distincts :

─ Une forte demande évaporatoire à un instant donné (échelle de temps courte). ─ Une disponibilité en eau du sol insuffisante (échelle de temps plus longue).

Figure 1.8 : Représentation schématique de l’effet de l’évolution du climat sur la mortalité des arbres. Le seuil de résistance à la sécheresse ne variant pas, la diminution des précipitations et l’augmentation des températures vont conduire à des dépassements plus fréquents de ce seuil, et donc à une mortalité plus élevée. D'après [70]

(29)

1.1.2.3 Effet du changement des précipitations

Parmi les changements climatiques prévus, l’évolution des précipitations (volume et répartition) est celui qui aura la plus grande incidence sur la productivité des forêts naturelles et plantées. En effet, l’eau est un constituant cellulaire majeur et joue un rôle dans de nombreux processus physiologiques (Encadré 1). Le volume des précipitations, ainsi que leur distribution au cours de l'année, conditionnent la disponibilité en eau pour la plante et ont une influence forte sur la croissance des arbres [71-77]. Pour des plantations d’Eucalyptus au Brésil, suivant un gradient de pluviométrie, la production de bois varie entre 12 t/ha/an en moyenne pour les sites les plus secs (897 mm) et 24 t/ha/an pour les sites les plus humides (1411 mm) [73]. Par ailleurs, il a été montré qu’une part importante des forêts du globe sont sensibles aux sécheresses, entrainant une mortalité pouvant aller jusqu’à 100% dans certains cas [70, 78]. Cette sensibilité des arbres forestiers à la sécheresse peut s’expliquer par un fonctionnement proche de leur limite hydraulique en conditions contraintes [79, 80]. En effet, un stress hydrique peut provoquer une embolie gazeuse (cavitation) dans le xylème, ce qui réduit la capacité des arbres à fournir de l'eau aux feuilles pour les échanges gazeux photosynthétiques et peut entraîner la mort. La réduction des précipitations dans plusieurs régions [21] du monde va accentuer les risques de sécheresse, et donc entraîner une diminution de la croissance des arbres et une augmentation de la mortalité (Figure 1.8).

Les propriétés du bois peuvent elles aussi être modifiées par la disponibilité en eau. Wimmer et al. [81] ont montré une réduction de l’angle des microfibrilles lorsque les arbres subissent un stress hydrique. La densité du bois est également modifiée selon la disponibilité en eau : elle augmente avec le déficit hydrique [82, 83]. D’autres propriétés, comme le pourcentage de lignine ou de cellulose peuvent varier. Suivant l’utilisation finale du bois (bois d’œuvre, pâtes à papier, charbon), ces variations des propriétés du bois peuvent-être importantes pour les procédés de transformation.

1.1.2.4 Effet des évènements extrêmes et des bio-agresseurs

Bien que leur prévision ne soit pas aisée du fait de leur caractère aléatoire, les phénomènes extrêmes, comme les tempêtes ou les feux, augmenteraient avec l’évolution du climat [84-86]. Flannigan et al. [87] ont modélisé, en relation avec le changement climatique, une augmentation de 74 à 118% de la superficie brûlée au Canada à la fin du 21ème siècle. Ces évènements extrêmes peuvent avoir une incidence importante sur la productivité des forêts et

(30)

des conséquences néfastes au-delà du seul domaine forestier [88]. Les feux de forêts représentaient environ 350 millions d'hectares de pertes dans le monde en 2000. Le vent cause lui aussi des dommages importants : les tempêtes de décembre 1999 en France avec 140 millions de m3 de bois endommagés en sont un exemple.

Par ailleurs, il est généralement admis que le changement climatique est susceptible d'augmenter l'activité de différentes espèces de ravageurs et de pathogènes, et de modifier leurs aires de répartition [89-91]. Les températures plus chaudes ont déjà amélioré les possibilités de propagation des insectes thermophiles [92]. Les conséquences varient d'une défoliation et perte de croissance ponctuelles à des dommages à l’échelle de l’ensemble du massif forestier. Toutefois, la modélisation des impacts du changement climatique sur les épidémies d'insectes et de pathogènes reste limitée [93, 94].

1.1.3 Gestion et adaptation des forêts plantées

Les forêts plantées sont par définition le produit de l’intervention humaine. Contrairement aux forêts naturelles, une adaptation planifiée face au changement climatique est donc plus facilement envisageable [95]. La connaissance des effets de l’évolution du climat sur la productivité des forêts plantées est un prérequis indispensable pour réduire leur vulnérabilité face au changement climatique. Différentes échelles d’action (massif forestier, bassin versant, parcelle, arbre) peuvent être combinées, afin d’apporter des solutions aux différents risques, mais également pour tirer parti de certains bénéfices du changement climatique.

La gestion à grande échelle (massif) est plutôt associée à la gestion de la productivité des forêts plantées sur le long terme [96]. Des moyens sont déjà mis en œuvre pour adapter le matériel forestier de reboisement en fonction des potentialités des sites. Les principaux critères pris en compte sont la production et la qualité du bois, la résistance aux bio-agresseurs et la tolérance au déficit hydrique et au froid (notamment dans le cas de l’eucalyptus) [97, 98]. L’évolution du climat nécessite de prendre en compte les contraintes futures, grâce à des modèles de production intégrant l’effet de la réduction de la disponibilité en eau [40] ou des dynamiques de ravageurs[93]. Cette anticipation des risques permet de privilégier une espèce ou un génotype plutôt qu’un autre dans des conditions changeantes. Le changement climatique n’a pas que des effets néfastes. Par exemple l’augmentation des températures moyennes permet d’envisager l’utilisation d’espèces ou de génotypes plus sensibles au froid mais plus productifs.

(31)

La gestion de la ressource en eau passe également par une gestion à l’échelle du bassin versant, afin de minimiser l’impact des changements de couverts (coupe rase, boisement) sur le cycle hydrologique [99, 100]. L’adaptation à grande échelle doit également tenir compte des prévisions d’augmentation des risque d’incendies et d’attaques de bio-agresseurs, afin de structurer le massif pour minimiser les pertes [101]. La mise en place de ces pratiques de gestion planifiée à grande échelle peut cependant être limitée par l’acquisition des données et le suivi régulier nécessaire pour mener à bien ce type de gestion.

À l’échelle de la parcelle, c’est l’ensemble de l’itinéraire technique qui peut être adapté. Les effets des pratiques sylvicoles (préparation du sol, densité de plantation, fertilisation initiale, élagage, éclaircies, irrigation,…) sur la croissance à moyen terme sont bien connus et ont permis des gains de productivité importants au cours des dernières décennies [97, 102-106]. Par contre, les interactions entre ces pratiques et les contraintes environnementales sont encore peu connues, sauf pour la contrainte hydrique [107-109]. En effet, différentes études se sont focalisées sur les pratiques sylvicoles permettant de réduire l’impact d’une sécheresse sur la croissance, notamment par une diminution de la densité de plantation ou par des éclaircies [107].

Quelle que soit l’échelle de gestion, la sélection variétale est un élément central pour l’adaptation des forêts plantées au changement climatique. En effet, le maintien de la productivité par l’adaptation des pratiques sylvicoles présente des limites. La durée de rotation importante des espèces forestières favorise leur exposition aux contraintes environnementales changeantes. Les rotations pour des espèces à croissance rapide restent relativement longues : 25 à 30 ans pour le Pinus radiata, 7 à 10 ans pour les hybrides E.

grandis x E. urophylla. Les variétés améliorées présentent généralement de bonnes

performances sur plusieurs caractères d’intérêts [97], c’est pourquoi elles présentent un avantage important dans les systèmes de production que sont les forêts plantées. Dans ce contexte, l’amélioration génétique pour la croissance en condition contrainte est incontournable pour le maintien de la productivité à moyen et long terme.

(32)

Encadré 2 : Principe fondamental de la génétique quantitative.

La génétique quantitative se base sur la décomposition du phénotype (P) d'une population donnée en une somme des effets génétiques (G) et de l’effet de l’environnement (E) :

Si on s’intéresse à la variance phénotypique (VP) au sein d'une population, elle aussi peut-être

décomposé par la somme de la variance génétique (VG) et de la variance environnementale (VE) ainsi

que 2 fois covariance entre G et E. En expérimentation, la répartition aléatoire des génotypes dans

l’environnement permet de considérer l’indépendance entre G et E et donc leur covariance comme nulle. On obtient ainsi [110].

On peut ensuite décomposer VG (sur la base du modèle infinitésimal [111]) en variance additive (VA),

variance de dominance (VD), et variance épistatique (VI) :

L'héritabilité au sens large (H²) donne la part de variance phénotypique d’origine génétique :

L’héritabilité au sens strict (h²) caractérise la part de variance phénotypique qui se transmet (variance additive) à la descendance :

L'héritabilité (H2, h²) varie ainsi théoriquement entre 0 et 1. Plus l’héritabilité d’un caractère est proche

de 1, plus le déterminisme génétique de ce caractère est important. Inversement un caractère qui ne dépend pas du génotype des individus a une héritabilité proche de 0.

(33)

1.2 Déterminisme génétique et environnemental de la croissance chez

les arbres forestiers

La sélection vise à optimiser les valeurs d'un ou plusieurs caractères d’intérêt, grâce à la variabilité génétique naturelle présente au sein des espèces. Chez les arbres forestiers, cette variabilité génétique est importante du fait de leur régime de reproduction préférentiellement allogame et de leur faible domestication [112, 113]. Les caractères cibles de la sélection varient selon les espèces et le contexte environnemental et socio-économique, mais les principaux sont : la croissance, les propriétés du bois (densité, % de lignine, % de cellulose) et la résistance aux bio-agresseurs (ex : rouilles, chancres, … [114]). Les stratégies de sélection dépendent de la biologie de l’espèce, de la variabilité et de l’héritabilité du caractère étudié (Encadré 2) et éventuellement de la possibilité d’hybridation entre espèces phylogénétiquement proches. Cependant, quelle que soit l’espèce, il existe des contraintes intrinsèques à la sélection chez les arbres forestiers : i/ L’espace nécessaire à un programme d’amélioration est généralement important. Les différents tests (provenance, descendance, clonal,..) au champ couvrent souvent plusieurs dizaines d’hectares. De plus, la mise en place d’une pépinière est indispensable pour l’élevage des plants. ii/ Le temps nécessaire pour obtenir les phénotypes des caractères d’intérêt économique est relativement long, car ce sont majoritairement ceux de l’arbre adulte (croissance, propriétés du bois). En effet les corrélations juvénile-adulte pour ces caractères sont relativement faibles [115-117], et ne permettent pas une efficacité de la sélection satisfaisante avant le tiers de la durée de rotation en général. Pour les espèces d’eucalyptus plantées dans les tropiques, la sélection s’opère à partir de 3-4 ans. Elle est de l’ordre de 10-12 ans pour le pin maritime en France. Par ailleurs, même si des méthodes favorisant la floraison précoce ont été mises au point (notamment chez l’eucalyptus, [118, 119]) plusieurs années sont souvent nécessaires avant la maturité sexuelle et donc l’obtention de descendants, que ce soit par croissement contrôlé ou non. iii/ L’effet de l’environnement est relativement important sur les caractères d’intérêt économique du fait de la pérennité des espèces. L’héritabilité au sens strict pour ces caractères est en général faible à moyenne (0,1 à 0,6) [120, 121] et varie en fonction de l'âge [122, 123].

Afin de réduire ces contraintes, des recherches utilisant des prédicteurs précoces moléculaires sont en cours, pour améliorer la connaissance du fonctionnement du génome des

(34)

Figure 1.9 : Principaux caractères en relation avec la croissance des arbres et approches génomiques utilisées pour les étudier. Les flèches indiquent le sens de l’approche : génétique directe (du phénotype au gène) vs génétique inverse (du gène au phénotype). Sont indiqués en gras les caractères étudiés et l’approche utilisée dans le cadre de cette thèse. Adapté de [124].

Architecture et forme de la plante

Phénologie des méristèmes ③Efficience d’utilisation de

l’eau

Allocation et stockage du carbone

Résistance aux stress abiotiques et biotiques Vitesse de Croissance Micro-variations du

rayon

Absorption des nutriments

Gènes Phénotype

Approches directes

Approches inverses

I.Analyse QTL

II.Génétique d’association

IV. Transcriptomique et approches de génétique

génomique (eQTL) V. Activation / extinction de

gène par transgénèse

III. Génétique et génomique

(35)

arbres forestiers [125-129]. L’objectif de ces recherches est, d’améliorer l’efficacité de la sélection en augmentant les gains génétiques par unité de temps grâce à la sélection assistée par marqueurs au sens large. Cela passe par l’indentification des bases génétiques et environnementales des caractères d’intérêt [124-126]. Les différentes méthodes utilisées pour y parvenir sont présentées dans la Figure 1.9. Dans cette thèse, la méthode utilisée pour identifier les bases génétiques de la croissance est l’analyse de liaison dans une descendance de plein-frères entre la variabilité phénotypique et le polymorphisme génétique au niveau de marqueurs moléculaires (analyse QTL).

1.2.1 La croissance, ses relations avec les variables environnementales et la composition isotopique de carbone

Parmi les différents caractères cibles de la sélection, la croissance est un caractère majeur. La plupart du temps, elle est estimée par des mesures de circonférence et de hauteur, qui permettent d’estimer le volume du tronc et celui à l’hectare. C’est cette grandeur (m3

/ha ou m3/ha/an) qui intéresse directement l’exploitant forestier et que la sélection vise à augmenter.

1.2.1.1 L’impact des variables environnementales sur la croissance

La croissance est notamment déterminée par la vitesse de la division cellulaire au niveau des méristèmes primaires (méristème apical) et secondaires (cambium) [130, 131]. Dans le cas des eucalyptus tropicaux, la croissance est continue, que ce soit au niveau du cambium ou des méristèmes apicaux. En effet, contrairement à la plupart des arbres forestiers, ils ne présentent pas d’endodormance. On n’observe donc pas de cernes annuels, contrairement à des espèces de climat tempéré qui présentent un arrêt de croissance pendant l’hiver. Cette croissance continue permet d’obtenir des niveaux de productivité élevés (jusqu’à 40 m3/ha/an) en conditions tropicales pour des hybrides entre E. urophylla et E. grandis [105]. Ces hauts niveaux de croissance sont souvent associés à des prélèvements de ressources importants [69, 132-134] et à une activité photosynthétique élevée [69]. Par exemple, pour une plantation d’eucalyptus au Brésil, la consommation d’eau annuelle par les arbres (transpiration) a été évaluée à 1394 mm, soit environ 67% des apports en eau (pluie) [135]. Dans le même type de plantation, la consommation en nutriments lors de la première année a été estimée à : 155, 10, 52, 55 et 23 kg/ha de N, P, K, Ca et Mg [134].

(36)

Figure 1.10 : Sensibilité de différents paramètres physiologiques à la diminution du potentiel hydrique foliaire (d'après [136]).

Figure 1.11 : Micro-variations de la croissance radiale pour deux espèces d’Eucalyptus. L’évolution temporelle est différente entre les deux espèces. Les auteurs définissent trois phases pour caractériser ces différences : une phase de contraction (S), une phase de reprise (R) et une phase d’évolution nette du rayon (I). D'après [137]

(37)

Comme évoqué dans le paragraphe 1.1.2, les processus physiologiques (photosynthèse, absorption de nutriments, transport d’assimilas,…) qui permettent cette croissance dépendent des variables environnementales, et notamment de la disponibilité en eau [64]. La réduction de la croissance fait partie des premières réponses phénotypiques observées suite à l’apparition d'un déficit hydrique (Figure 1.10). La disponibilité en eau et sa variabilité temporelle est donc l’une des principales limitations de la croissance. Des expérimentations au champ sur eucalyptus ont montré un gain de croissance de 30% au Brésil [138] et 40% en République du Congo [139] en levant cette contrainte grâce à l’irrigation. Cette différence de productivité souligne l’importance de la saison sèche notamment dans le cadre des plantations d’eucalyptus en République du Congo.

1.2.1.2 La dynamique de croissance

Bien que la mesure que l’on en fait soit la plupart du temps ponctuelle, la croissance est un processus dynamique. De ce fait, de nombreuses études ont cherché à modéliser la trajectoire de croissance en fonction du temps et de l’environnement [140-143]. Ces modèles sont utilisés pour des échelles de temps longues (durée de rotation), afin d’améliorer la gestion et les pratiques sylvicoles, et de prédire la production de biomasse. Les premiers modèles utilisés sont des modèles empiriques basés sur des mesures du diamètre à différents âges [142]. Avec l'amélioration de la compréhension du fonctionnement physiologique de l’arbre et de son interaction avec les facteurs climatiques, des modèles mécanistes ont ensuite été élaborés. Ils tiennent principalement compte de l’allocation du carbone, de l’interception de la lumière, de la disponibilité en eau et en nutriments, des effets du climat et de la sylviculture [74, 144, 145]. Ces modèles nécessitent de nombreuses mesures pour être calibrés puis validés, et sont souvent adaptés à un type de plantation donné.

À une échelle beaucoup plus fine, la croissance est également étudiée à travers les variations journalières du rayon du tronc (Figure 1.11). L’acquisition de mesures à cette échelle se fait directement au niveau du tronc grâce à des micro-dendromètres. Ces variations, qui sont de l’ordre de la centaine de µm, ont été mises en relation avec le statut hydrique de l’arbre et les flux d’eau dans le tronc [146-152]. Il existe une latence entre la variation du potentiel hydrique foliaire (ou des branches) et les variations du rayon du tronc. Cette latence est notamment expliquée par la capacité de stockage (capacitance) du tronc [147, 151].

(38)

Encadré 3 : Les isotopes stables du carbone et l’efficience d’utilisation de l’eau

La composition en isotope stable du carbone (12C et13C) d’un échantillon (δ13C) est définie de manière

relative par rapport à un standard qui est en général la Pee Dee belemnite (PDB, [153]) et est exprimée en pour mille (‰) : ( ⁄ ⁄ )

Du fait de la différence de taille entre le 12CO2 et le 13CO2, il existe une discrimination par les plantes

en faveur de la molécule la plus petite (12CO2). Cette discrimination isotopique du carbone (Δ) est

définie par l’équation suivante [154]:

avec une composition isotopique de l’air (δair) d’environ -8‰. Pour les plantes en C3 (la majorité des

arbres), deux étapes principales intervient dans la discrimination à l’égard 13C : (a) la diffusion du CO2

à travers les stomates et (b) la carboxylation du ribulose bisphosphate par la RuBisCO [155-157]. D'autres processus interviennent dans la formation de Δ mais sont en général négligés: la dissolution et

diffusion du CO2 dans la phase liquide et la photorespiration [155-157]. L’équation résultante est la

suivante [156]:

avec Ca la concentration en CO2 de l’atmosphère et Ci celle de l’espace intercellulaire. Farquhar et al.

[156] ont mis en lien Δ et l’efficience d’utilisation de l’eau intrinsèque (water use efficiency, WUEi)

qui est défini comme le rapport entre l'assimilation de CO2 (A) et la conductance stomatique pour l'eau

(gS) [158]. De manière simplifiée, cela donne l’équation suivante :

Δ est donc négativement relié à la WUEi. D’abord mise en évidence chez les plantes annuelles [154,

158], cette relation a également été chez les arbres forestiers bien qu’il existe une variabilité

importante du δ13

(39)

L’arbre représente l’interface entre le sol et l’atmosphère dans le continuum sol-plante-atmosphère. Son tronc sert de tampon entre les feuilles qui transpirent et les racines qui absorbent de l’eau. Au début de la journée, l’arbre transpire et mobilise l’eau contenue dans le tronc, ce qui provoque la réduction de son rayon. Lorsque la transpiration s’arrête, l’arbre retourne à un équilibre hydrique grâce à l’absorption racinaire, on observe alors une augmentation du rayon. (Figure 1.11) Le signal des micro-variations du rayon est donc un indicateur du contenu en eau du tronc, mais il intègre également la croissance radiale (division du cambium, élongation cellulaire). Selon l’échelle d’analyse, l’information apportée par le signal sur le statut hydrique et la croissance radiale n’est pas la même. Sur un pas de temps journalier, bien que de la croissance ait lieu, le signal traduit majoritairement le fonctionnement hydrique. Sur une échelle de temps plus longue (semaine, mois), il traduit essentiellement la croissance.

1.2.1.3 La composition isotopique du carbone de l’arbre, un indicateur de l’efficience d’utilisation de l’eau et son lien avec la croissance

Le lien entre la croissance de l’arbre et l’eau peut également être abordé sous l’angle de l’efficience d’utilisation de l’eau (water use efficiency, WUE). En effet, la WUE est définie à l’échelle de l’arbre comme le rapport entre la quantité de biomasse et la quantité d’eau transpirée pour la produire [132]. La WUE est principalement liée à l'absorption de lumière, à la capacité photosynthétique des feuilles, à la transpiration de la canopée et à la conductance stomatique, qui est en partie déterminée par les caractéristiques hydrauliques des différents compartiments de l’arbre (racines, tronc et feuilles) [69, 161]. À l’échelle de la feuille, la WUE intrinsèque peut être définie comme le rapport entre l'assimilation du CO2 (A) et la

conductance stomatique pour l'eau (gs). Cette grandeur a été mise en relation avec la

discrimination par les plantes entre les deux isotopes stables du carbone (12C et 13C) et par extension avec la composition isotopique du carbone (δ13C) de la plante (Encadré 3, [154, 156, 158]). De ce fait le δ13C a été utilisé comme un indicateur intégré et robuste de la WUE dans de nombreuses études [158, 162-164].

Chez les arbres forestiers, la relation entre croissance et δ13C (et par extension la WUE) a été étudiée chez de nombreuses espèces, mais aucune tendance claire ne se dégage. En effet, des corrélations phénotypiques positives (Eucalyptus globulus [165], Pinus pinaster [166, 167], Pinus elliottii [168], Populus deltoides×Populus trichocarpa [169]), nulles (Araucaria

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