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La répartition des compétences entre la Confédération et les cantons en situation de pandémie

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La répartition des compétences entre la Confédération et les cantons en situation de pandémie

BERNARD, Frédéric

BERNARD, Frédéric. La répartition des compétences entre la Confédération et les cantons en situation de pandémie. Revue de droit suisse , 2020, no. spécial, Pandémie et droit, p. 55-67

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:136019

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Frédéric Bernard

*

Mots-clés: droit constitutionnel, droit administratif, santé publique, répartition des compétences, fédéralisme, cantons

A. Introduction

En raison de sa propagation extrêmement rapide, le nouveau coronavirus et la maladie qu’il cause, le COVID-19, font peser, depuis le début du mois de mars 2020, une pression extrême sur la population et le système de santé helvé- tiques1. Simultanément, l’épidémie, devenue par la suite pandémie, met sous tension l’ensemble de l’ordre juridique suisse.

Si, contrairement à d’autres Etats2, la Suisse s’était juridiquement préparée pour faire face à une pandémie, en révisant intégralement, en 2012, la loi fédé- rale sur les épidémies3, l’apparition du nouveau coronavirus constitue un test grandeur nature pour les outils et solutions alors adoptés.

Dans le cadre de la présente contribution, nous nous concentrerons sur la question de la répartition des compétences entre la Confédération et les cantons dans le cadre des mesures de lutte contre l’épidémie. Nous laisserons donc de côté d’autres aspects de la loi, qui comportent aussi une facette fédéraliste, comme les mesures de prévention (programmes de vaccination, obligation de déclarer certaines maladies à l’Office fédéral de la santé publique [OFSP], etc.)4.

* Prof. Dr. iur., Professeur de droit public à lUniversité de Genève.

1 MICHELGUILLAUME, Dans les coulisses dune crise inédite, Le Temps, 4 mars 2020, p. 2.

2 Comme, par exemple, la France, qui sest dotée, le 23 mars 2020, de la loi no2020290 durgence pour faire face à lépidémie de COVID-19 ou le Royaume-Uni, dont le Parlement a voté le 25 mars 2020 le Coronavirus Act 2020.

3 FRÉDÉRICBERNARD, La loi sur les épidémies à lépreuve du nouveau coronavirus, Jusletter du 30 mars 2020.

4 Pour un panorama général de la structure de la LEp, voir THOMASGÄCHTER, Gesundheitsrecht:

Ein Grundriss für Studium und Praxis, 4eéd., Bâle 2018, p. 202 s.

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B. Historique

La question de la répartition des compétences entre la Confédération et les can- tons dans la lutte contre certaines maladies se pose en tout cas depuis la période de la Médiation (1803–1813)5. Conformément à un mouvement plus général6, ce domaine se caractérise depuis lors par un renforcement progressif des com- pétences fédérales, tempéré par des craintes de concentration excessive de pou- voirs en mains du Conseil fédéral7.

L’art. 118 Cst. prévoit que, dans les limites de ses compétences, la Confédé- ration prend des mesures afin de protéger la santé, en légiférant notamment sur la lutte contre les maladies transmissibles, les maladies très répandues et les ma- ladies particulièrement dangereuses de l’être humain et des animaux. Cette compétence fédérale ponctuelle8–les cantons étant généralement compétents en la matière9–est l’aboutissement d’une longue évolution qui a débuté avec la Constitution de 184810.

La mise enœuvre législative du mandat constitutionnel a aussi été progres- sive et s’est heurtée à certaines résistances. Ainsi, en 1882, le peuple a rejeté à une très large majorité (79% des votants) la loi fédérale concernant les mesures à prendre contre les épidémies offrant un danger général11, en raison notam- ment d’une centralisation jugée excessive12. Une loi fédérale moins ambitieuse a donc été adoptée en 188613, avec un champ d’application expressément limité à quatre maladies (variole, choléra asiatique, typhus pétéchial et peste).

En 1921, après les ravages de la grippe espagnole14, la loi a été modifiée pour permettre au Conseil fédéral d’étendre son applicabilité à d’autres mala-

5 ALESSANDROCAMPANELLI, Lémergence de lEtat helvétique entre unité et fédéralisme: lexem- ple des législations médicales et pharmaceutiques (17981900), Lausanne 2018.

6 ANDREASAUER/GIORGIOMALINVERNI/MICHELHOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, vol. I:

LEtat, 3eéd., Berne 2013, p. 330.

7 Voir SÉVERICYERSIN, Une lutte faible et décentralisée, Le Courrier, 15 mars 2020.

8 ATF 139 I 242 c. 3.1. Cf. OFK-BIAGGINI, BV 118 N 2.

9 FLORIANBERGAMIN/SIMONMAZIDI, Kompetenzabgrenzung zwischen Bund und Kantonen bei der Bekämpfung von Epidemien: Erste Einschätzungen unter besonderer Berücksichtigung der COVID-19-Verordnungen, Sonderausgabe Newsletter IFF 2/2020, p. 3.

10 La Confédération pouvait initialement prendre des mesures de police sanitaire lors dépidémies et dépizooties offrant un danger général (art. 59 aCst. 1848), puis elle a reçu une compétence législative (art. 69 aCst. 1874) qui a été élargie, en 1913, aux «maladies transmissibles, [aux]

maladies très répandues et [aux] maladies particulièrement dangereuses de lhomme et des ani- maux», ce qui a permis à la Confédération de lutter également contre certaines maladies endé- miqueset non épidémiquestelles que la tuberculose. Cf. Message du Conseil fédéral à lap- pui dun projet de loi fédérale sur la lutte contre la tuberculose, FF 1925 III 9, p. 9.

11 FF 1882 I 21.

12 JEAN-CHRISTIAN LAMBELET, Répertoire des votations fédérales depuis 1848, Genève 2018, p. 14.

13 RS 4 359.

14 Lépidémie de grippe espagnole a touché la Suisse entre juillet 1918 et mai 1919, entraînant en- viron 25000 décès. Cf. OFFICE FÉDÉRAL DE LA STATISTIQUE, La grippe espagnole de 1918: Un pic de mortalité exceptionnel pour la Suisse, novembre 1918. A léchelle de la planète, cette épi-

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dies transmissibles et de prendre, si les circonstances l’exigeaient, les mesures jugées nécessaires pour empêcher la propagation d’une épidémie15. Le Conseil fédéral faisait notamment valoir la nécessité d’une action rapide et unique contre la propagation de certaines maladies16, mais la révision visait également à faire rentrer dans le giron de la légalité des mesures prises par le Conseil fédé- ral pendant la Première Guerre mondiale, sous le régime des pleins pouvoirs, et qui avaient démontré leur efficacité17.

A la suite, en particulier, de l’épidémie de fièvre typhoïde ayant touché Zer- matt en 196318, la loi de 1886 a été remplacée, en 1970, par la loi fédérale sur la lutte contre les maladies transmissibles de l’homme19. La nouvelle loi a mis en place un système à deux échelons: en situation normale, les cantons prenaient les mesures propres à lutter contre les maladies transmissibles (art. 11) tandis que, dans des circonstances exceptionnelles, le Conseil fédéral pouvait ordon- ner les mesures nécessaires pour la totalité ou certaines parties du pays (art. 10).

A nouveau, c’est l’apparition de nouvelles maladies (en particulier le SRAS –syndrome respiratoire aigu sévère, appartenant déjà à la famille des corona- virus–en 2003 et la grippe pandémique H1N 1 en 2009) qui a mis en lumière les failles de la législation et déclenché le projet de révision totale qui a conduit à l’adoption, le 28 septembre 2012, de la loi fédérale sur la lutte contre les maladies transmissibles de l’homme (loi sur les épidémies; LEp)20, entrée en vigueur le 1erjanvier 2016.

démie a fait entre 50 et 100 millions de victimes. Cf. LAURASPINNEY, Pale Rider: The Spanish Flu of 1918 and How it Changed the World, Londres 2018.

15 Voir la loi fédérale du 18 février 1921 portant modification de la loi fédérale du 2 juillet 1886 concernant les mesures à prendre contre les épidémies offrant un danger général. Notons que, parallèlement, la Confédération sest dotée, en 1928, dune loi fédérale sur la lutte contre la tuberculose. Cf. RS 4 377.

16 Message du Conseil fédéral du 3 décembre 1920 à lappui du projet de loi portant modification de la loi fédérale sur les épidémies du 2 juillet 1886, FF 1920 V 329, p. 333.

17 Rapport du Conseil fédéral sur sa gestion en 1920, FF 1921 II 695, p. 777. En sappuyant sur les pleins pouvoirs qui lui avaient été conférés par larrêté de lAssemblée fédérale du 3 août 1914, le Conseil fédéral avait notamment, le 18 juillet 1918, autorisé les cantons et les communes à interdire toutes les manifestations susceptibles dentraîner la réunion dun grand nombre de per- sonnes dans un même lieu ou sur un même point et, le 11 octobre 1918, étendu à linfluenza lobligation de notification prévue par la loi. Cf. LAURAMARINO, La Grippe espagnole en Valais (19181919), Lausanne 2014, p. 149.

18 Cf. Message du Conseil fédéral du 11 février 1970 concernant le projet de loi fédérale sur la lutte contre les maladies transmissibles de lhomme (Loi sur les épidémies), FF 1970 I 389, p. 396. Sur lépidémie de fièvre typhoïde ayant touché Zermatt, voir MARIE-FRANCEVOUILLOZ

BURNIER, 1963, épidémie à Zermatt: La fièvre typhoïde à Zermatt, Sierre 2010.

19 RO 1974 1071.

20 Message du Conseil fédéral du 3 décembre 2010 concernant la révision de la loi fédérale sur la lutte contre les maladies transmissibles de lhomme, FF 2011 291, p. 292.

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C. La répartition des compétences dans la LEp révisée

L’un des objectifs de la LEp consistait à clarifier la répartition des tâches entre la Confédération et les cantons pour lutter contre les épidémies21.

I. Le système légal

L’un des points centraux de la révision de la LEp consistait à remplacer le modèle à deux échelons datant de 1970 (situation normale – circonstances exceptionnelles) par un modèle à trois échelons22: situation normale–situa- tion particulière–situation extraordinaire23.

En situation normale, les cantons sont seuls compétents pour prendre des mesures de lutte visant les individus (art. 30 et ss LEp: surveillance médicale, quarantaine, isolement, traitement médical, etc.) ou la population (art. 40 LEp:

interdiction des manifestations, fermeture des écoles, interdiction d’entrée et de sortie de certains bâtiments ou zones, etc.).

En situation particulière, le Conseil fédéral peut, après avoir consulté les cantons–ce qui peut être effectué dans le cadre de l’Organe de coordination de la loi sur les épidémies (OrC LEp)24ou d’une consultation de la Conférence suisse des directeurs de la santé25–, ordonner les mesures visant les individus ou la population susmentionnées (art. 6 al. 2 LEp). Une situation particulière est réalisée (art. 6 al. 1) lorsque les organes d’exécution ordinaires ne sont pas en mesure de prévenir et de combattre l’apparition et la propagation d’une ma- ladie transmissible et qu’il existe un risque élevé d’infection et de propagation, un risque spécifique pour la santé publique ou un risque de graves répercus- sions sur l’économie ou sur d’autres secteurs vitaux (let. a) ou lorsque l’Organi- sation mondiale de la santé (OMS) a constaté la présence d’une urgence sani- taire de portée internationale menaçant la santé de la population en Suisse (let. b). Le Message cite, à titre d’exemples, une pandémie modérée d’influenza et le SRAS26.

En situation extraordinaire –qui correspond aux circonstances exception- nelles de la loi de 1970–, le Conseil fédéral peut ordonner les mesures néces- saires pour tout ou partie du pays (art. 7 LEp). Il s’agit là d’une disposition de

21 Message (n. 20), p. 310.

22 Cf. THOMAS GÄCHTER/SARALÓPEZ, Entwurf zu einer Totalrevision des Epidemiengesetzes, Sicherheit & Recht 2/2011, p. 118121, p. 118; EVAMARIABELSER/ANDREASSTÖCKLI/BERN- HARDWALDMANN, Der schweizerische Föderalismus funktioniert auch im Krisenmodus, Son- derausgabe Newsletter IFF 2/2020, p. 3.

23 Message (n. 20), p. 343 s. Cf. BERGAMIN/MAZIDI(n. 9), p. 6 s.

24 Cf. art. 54 al. 1 LEp. Le Département fédéral de lintérieur coordonne, pour sa part, les mesures de la Confédération (art. 6 al. 3 LEp).

25 OFSP, Fiche dinformation: Situation normale, situation particulière, situation extraordinaire, 28 février 2020, p. 1.

26 Message (n. 20), p. 344.

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nature déclaratoire, qui reprend la compétence du Conseil fédéral, découlant de l’art. 185 al. 3 Cst., d’édicter des ordonnances et de prendre des décisions en vue de parer à des troubles existants ou imminents menaçant gravement l’ordre public, la sécurité extérieure ou la sécurité intérieure27. La LEp renonce à défi- nir la situation extraordinaire, mais, compte tenu des larges possibilités offertes par l’art. 6 LEp, cette notion doit être interprétée de manière très restrictive28. Le Message évoque une «pandémie obéissant au scénario du pire (grippe espagnole de 1918)»29.

Dans les trois échelons susmentionnés, l’exécution demeure en mains des cantons (art. 75 LEp)30, de même que les coûts–en tout cas directs31–des me- sures ordonnées (art. 71 LEp). Cela étant, la Confédération peut coordonner les mesures d’exécution des cantons si une exécution uniforme présente un intérêt (art. 77 al. 2 LEp).

II. Appréciation

La mise en place, dans la LEp, d’un système à trois échelons visait à clarifier la répartition des tâches et de la collaboration entre la Confédération et les can- tons32et il est vrai que celui-ci permet un renforcement des compétences fédé- rales à mesure que la situation s’aggrave. Cependant, le Message indique égale- ment que l’art. 6 P-LEp a pour fonction de décrire «les pouvoirs dévolus au Conseil fédéral dès lors que les conditions requises pour appliquer le droit d’urgence inscrit dans la Constitution et visé à l’art. 7 P-LEp ne sont pas (encore) remplies»33.

Ce faisant, il apparaît que le jeu des articles 6 et 7 LEp concerne avant tout les rapports entre le gouvernement et les autres autorités fédérales, conformé- ment à la doctrine classique de la séparation des pouvoirs (horizontale)34. Ces deux dispositions permettent, en effet, de déterminer quand le Conseil fédéral doit rester dans le cadre fixé par la LEp et quand la gravité de la situation justi- fie qu’il puisse s’en émanciper. Cette question faisant l’objet d’une contribution

27 Message (n. 20), p. 346. Ces ordonnances ont une durée de validité de six mois, sous réserve de démarches entamées pour obtenir lapprobation de lAssemblée fédérale, conformément à lart. 7d introduit en 2010 dans la loi fédérale du 21 mars 1997 sur lorganisation du gouverne- ment et de ladministration (LOGA; RS 172.010). Cf. OFK-BIAGGINI, BV 185 N 11a.

28 GÄCHTER(n. 4), p. 205.

29 Message (n. 20), p. 344.

30 Voir également Message (n. 20), p. 343.

31 Les mesures ordonnées pour lutter contre une épidémie ont, au-delà de leur coût direct, un im- pact économique potentiellement considérable qui, lui, peut être pris en charge, au moins par- tiellement, par la Confédération. Voir notamment EMANUELGEORGTSCHANNEN, Das Corona- Massnahmenpaket des Bundesrats, Jusletter du 14 avril 2020.

32 Message (n. 20), p. 318.

33 Message (n. 20), p. 344 s. Voir également GÄCHTER(n. 4), p. 204 s.

34 PASCALMAHON, Le principe de la séparation des pouvoirs, in: Daniel Thürer/Jean-François Aubert/

Jörg Paul Müller (éd.), Droit constitutionnel suisse, Zurich 2001, p. 10111025, p. 1013 s.

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spécifique dans le présent numéro35, nous ne l’aborderons pas plus avant, si ce n’est pour rappeler que le régime de l’art. 185 al. 3 Cst. n’est pas comparable à celui des «pleins pouvoirs» qui a prévalu pendant les deux guerres mondiales36. La séparation des pouvoirs possède cependant aussi une dimension verticale, qui consiste à répartir des compétences entre les différents degrés d’autorités qui composent l’Etat, en particulier dans un Etat fédéral37. Or, sur ce volet, les articles 6 et 7 LEp, tout comme le reste de la loi, sont muets38. En conséquence, lorsque le Conseil fédéral décrète une situation particulière ou extraordinaire et ordonne des mesures de lutte, il lui revient de déterminer le régime applicable aux compétences cantonales.

D. La répartition verticale des compétences et le nouveau coronavirus

En l’absence de solution fixée directement dans la LEp, la question de la répar- tition verticale des compétences a donné lieu, dans le cadre de la lutte contre le nouveau coronavirus, à un certain nombre d’incertitudes.

I. Situation normale

Le 25 février 2020, le nouveau coronavirus a été détecté, pour la première fois, sur le territoire helvétique, dans le canton du Tessin39. En l’absence d’interven- tion du Conseil fédéral, la situation était alors «normale» au sens de la loi, de sorte que les cantons étaient seuls compétents pour ordonner des mesures de lutte. C’est ainsi sur la base de l’art. 40 LEp que le Tessin a interdit, le 26 février 2020 et jusqu’au 1er mars, le carnaval et les matchs de hockey sur glace en présence de public40.

35 Pour davantage de développements sur cet aspect de la problématique, voir, dans ce numéro, ANDREASSTÖCKLI, Regierung und Parlament in Pandemienzeiten, p. 953.

36 ATF 122 IV 258 c. 2.a. Cf. FRÉDÉRICBERNARD, Etat de droit et situations extraordinaires, in:

Oliver Diggelmann/Maya Hertig Randall/Benjamin Schindler (éd.), Droit constitutionnel suisse, vol. II: Volume II: Etat de droit, droits fondamentaux et droits humains, 2eéd., Zurich 2020, p. 7594.

37 JEAN-PHILIPPEFELDMAN, La séparation des pouvoirs et le constitutionnalisme: Mythes et réali- tés dune doctrine et de ses critiques, Revue française de droit constitutionnel 2010, p. 483496, p. 496. Voir également AUER/MALINVERNI/HOTTELIER(n. 6), p. 603.

38 PIERRE-YVES BOSSHARD, Le fédéralisme à lépreuve de la crise sanitaire, Domaine public no2281 du 13 avril 2020: «[L]e but de clarification des compétences recherché par la nouvelle loi nest pas atteint.» Le Message (n. 20), p. 345, laisse toutefois entendre quen situation parti- culière, les cantons conservent certaines de leurs compétences ordinaires.

39 OFFICE FÉDÉRAL DE LA SANTÉ PUBLIQUE, Nouveau coronavirus COVID-19: premier cas con- firmé en Suisse, 25 février 2020.

40 Risoluzione governativa del Consiglio di Stato n. 1033 du 26 février 2020.

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II. Situation particulière

Le 28 février 2020, le Conseil fédéral a décrété l’existence d’une situation par- ticulière au sens de l’art. 6 al. 1 let. b LEp (voir le préambule de l’ordonnance sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus [COVID-19]41) et a in- terdit les manifestations publiques ou privées accueillant plus de 1000 per- sonnes simultanément (art. 2). Le 13 mars 2020, le Conseil fédéral a remplacé cette ordonnance, en restant dans le cadre de la situation particulière, par l’or- donnance 2 sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus (COVID-19) (ordonnance 2 COVID-19)42. Le Conseil fédéral a alors prononcé la fermeture des écoles, hautes écoles et autres établissements de formation (art. 5) et interdit les manifestations publiques ou privées de plus de 100 personnes (art. 6).

Pendant cette période, le Conseil fédéral a autorisé librement les mesures cantonales plus strictes43: ainsi, le canton du Tessin a abaissé la limite pour les manifestations sur son territoire à 150 personnes (le 6 mars 2020)44, le canton de Genève à 100 (le 11 mars 2020)45. De son côté, le canton de Saint-Gall a soumis à autorisation les manifestations de plus de 150 personnes (le 10 mars 2020)46. Le canton du Tessin a même prononcé la fermeture des lieux de diver- tissement tels que les cinémas, théâtres, musées, fitness, piscines, discothèques, etc. (le 11 mars 2020)47.

III. Situation extraordinaire

Le 16 mars 2020, le Conseil fédéral a décrété l’état de situation extraordinaire au sens de l’art. 7 LEp, en modifiant le préambule de l’ordonnance 2 COVID-1948. Sur cette base, il a notamment interdit toutes les manifestations publiques ou privées et prononcé la fermeture des établissements publics et commerces tels que les magasins, marchés, restaurants, musées et cinémas, mais a expressé- ment maintenu certaines activités ouvertes, parmi lesquelles les magasins d’alimentation, les banques, les stations-service et les hôtels (art. 6 al. 2 et 3).

Le 20 mars 2020, le Conseil fédéral a encore durci ces mesures, en interdisant

41 RO 2020 573. Au sujet de cette ordonnance, voir BENJAMINMÄRKLI, Die «Corona-Verord- nung» des Bundesrats vom 28. Februar 2020, Jusletter du 9 mars 2020.

42 RO 2020 773.

43 ALAINBERSET, Infrarouge, RTS, 4 mars 2020: «On doit constater que le fédéralisme, cest 26 cantons, avec des tailles très différentes, avec des réalités sociales très différentes, et évidem- ment cest logique quil y ait aussi des différences dans lapplication pour cette limite en des- sous de 1000 personnes.»

44 Risoluzione governativa del Consiglio di Stato n. 1257 du 6 mars 2020.

45 Arrêté du Conseil dEtat du 11 mars 2020.

46 Weisung vom 10. März 2020 des Gesundheitsdepartementes über Massnahmen zur Bekämp- fung des Coronavirus: Veranstaltungen im Kanton St.Gallen.

47 Risoluzione governativa del Consiglio di Stato n. 1262 du 11 mars 2020.

48 RO 2020 783.

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les rassemblements de plus de cinq personnes dans l’espace public (art. 7c ordonnance 2 COVID-19)49. Au total, depuis son adoption le 13 mars 2020, l’ordonnance 2 COVID-19 a été modifiée seize fois en un peu plus d’un mois50.

Il est intéressant de relever que la déclaration de la situation extraordinaire a semblé répondre non seulement à l’aggravation de la situation épidémiologique en Suisse, mais également à la demande, exprimée par la population et par plu- sieurs cantons (notamment latins, plus touchés par l’épidémie), que Berne prenne le contrôle de la lutte51. Bien évidemment, le changement d’échelon a aussi eu un impact sur la répartition horizontale des compétences, puisque le Conseil fédéral a pu dès lors légiférer par voie d’ordonnance, en modifiant au besoin des règles figurant dans des lois fédérales, par exemple en matière de perte de gain52ou de suspension des délais dans les procédures civiles et admi- nistratives53.

Du point de vue de la répartition verticale des compétences, le Conseil fédé- ral a pris soin, dès la proclamation de la situation extraordinaire le 16 mars 2020, de réserver les compétences cantonales, pour autant que l’ordonnance ne contienne pas de disposition contraire (art. 1a ordonnance 2 COVID-19: «Sauf disposition contraire de la présente ordonnance, les cantons conservent leurs compétences»)54. Cette disposition a été reformulée le 1eravril 2020 («..., les cantons demeurent compétents»55). Le même jour, un nouvel art. 1b a été intro- duit: «Les cantons surveillent le respect des mesures sur leur territoire, dans la mesure où la Confédération n’est pas compétente pour l’exécution».

La délimitation des compétences fédérales et cantonales a cependant néces- sité certaines clarifications.

Ainsi, dans la matinée du 16 mars 2020, le canton du Valais a décrété l’état de situation extraordinaire (cantonal) et prononcé notamment, dans ce cadre, la fermeture des hôtels dans le canton dès le 17 mars à minuit56. Le même jour, dans l’après-midi, le Conseil fédéral a modifié l’ordonnance 2 COVID-19, en prévoyant expressément que les hôtels pouvaient rester ouverts (art. 6 al. 3

49 RO 2020 863.

50 Voirhttps://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/20200744/history.html(consulté le 22 avril 2020).

51 BERNARD(n. 3), N 55.

52 RS 830.31.

53 RS 173.110.4. Pour un panorama général des ordonnances adoptées par le Conseil fédéral, voir NICOLASSCHMITT, Etude comparative sur les réglementations cantonales durgence relatives au Coronavirus/COVID-19, Sonderausgabe Newsletter IFF 2/2020, p. 25.

54 «Soweit diese Verordnung nichts anders bestimmt, behalten die Kantone ihre Zuständigkeiten.»;

«Per quanto la presente ordinanza non disponga altrimenti, i Cantoni mantengono le loro com- petenze.»

55 «Soweit diese Verordnung nichts anderes bestimmt, bleiben die Kantone zuständig.»; le texte italien na pas été modifié.

56 Présidence du Conseil dEtat, Coronavirus (COVID-19): Le Conseil dEtat décrète létat de situation extraordinaire, communiqué de presse, 16 mars 2020.

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let. n)57. Le Conseil d’Etat valaisan a donc pris acte de la règle fédérale et an- nulé sa décision initiale58.

Le 19 mars 2020, le canton d’Uri a décrété le confinement strict des per- sonnes âgées de plus de 65 ans59. Toutefois, le 20 mars 2020, le Conseil fédéral a modifié l’ordonnance 2 COVID-19 pour interdire les rassemblements de plus de cinq personnes dans l’espace public (art. 7c)60. Le 21 mars 2020, le Conseil d’Etat uranais a ainsi levé son interdiction générale de sortie, au motif que l’usage du domaine public était désormais exhaustivement réglementé par le droit fédéral61.

A partir des 18 et 20 mars 2020, les chantiers ont été fermés, de manière générale, dans les cantons de Genève et du Tessin (de même que, dans ce der- nier, les industries)62. Le 20 mars 2020, le Conseil fédéral a inséré dans l’ordon- nance 2 COVID-19 un nouvel art. 7d spécifiquement consacré aux mesures de prévention sur les chantiers et dans l’industrie63. Dans celui-ci, le Conseil fé- déral a exigé que les chantiers et les industries respectent les recommandations de l’OFSP en matière d’hygiène et d’éloignement social (al. 1), sous peine de fermeture (al. 3). Les autorités cantonales genevoises ont donc autorisé la réou- verture des chantiers64, tout en faisant valoir qu’en l’absence de réglementation fédérale spécifique, leur fermeture avait été légale entre le 18 et le 20 mars 202065.

Le cas du Tessin, canton alors le plus touché par l’épidémie, a conduit à l’insertion, le 27 mars 2020, d’une disposition spécifique, l’art. 7e, dans l’or- donnance 2 COVID-19 (dotée d’un effet rétroactif partiel au 21 mars 2020).

Celle-ci permet à un canton soumis à un risque spécifique («Krisenfenster»66), c’est-à-dire remplissant des conditions cumulatives énoncées à l’art. 7e al. 2 (parmi lesquelles le fait que son système de santé arrive à saturation, même après avoir obtenu le soutien d’autres cantons) de demander au Conseil fédéral, de manière motivée, l’autorisation d’ordonner, pour une durée limitée et pour certaines régions, la restriction ou l’arrêt des activités dans certaines branches

57 RO 2020 783.

58 Présidence du Conseil dEtat, Coronavirus (COVID-19): Les hôtels valaisans restent ouverts, communiqué pour les médias, 16 mars 2020.

59 Informationen aus dem Kantonalen Führungsstab, communiqué de presse, 20 mars 2020.

60 RO 2020 863.

61 Regierungsrat, Der Regierungsrat akzeptiert den Entscheid des Bundesrats und appelliert an die Urner Bevölkerung, sich zu schützen, communiqué de presse, 21 mars 2020.

62 Arrêté du 18 mars 2020 concernant les chantiers sur le territoire de la République et canton de Genève et Risoluzione governativa del Consiglio di Stato n. 1570 du 20 mars 2020.

63 RO 2020 863.

64 Arrêté no2 dapplication de lordonnance fédérale 2 sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus (COVID-19) et sur les mesures de protection de la population et de soutien aux entreprises face à la propagation du coronavirus COVID-19 du 25 mars 2020.

65 Voir Conseil dEtat, communiqué de presse du 25 mars 2020.

66 BERGAMIN/MAZIDI(n. 9), p. 17.

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de l’économie. Sur cette base, le canton du Tessin a donc pu maintenir fermés ses chantiers et ses industries.

L’OFSP a synthétisé, dans un rapport explicatif, l’interprétation qu’il convient de donner à l’art. 1a de l’ordonnance 2 COVID-19, c’est-à-dire à la répartition verticale des compétences67, en appliquant le système des compé- tences dites concurrentes68. Ainsi, si le Conseil fédéral a adopté une réglemen- tation explicite sur un sujet, les cantons ne peuvent plus édicter de dispositions contraires. A défaut, il convient de recourir aux règles habituelles d’interpréta- tion pour déterminer si le Conseil fédéral a souhaité laisser les cantons libres d’agir (p.ex. visites dans les maisons de retraite) ou s’il a consciemment choisi de ne pas réglementer un point, de sorte que son silence doit être considéré comme qualifié (p.ex. interdiction générale de sortie)69.

E. Analyse critique

Avec le léger recul permis par l’écoulement de quelques semaines depuis la mise enœuvre des art. 6 et 7 LEp, il est possible de procéder à une première appréciation de la solution appliquée, dans le silence de la LEp, en matière de répartition verticale des compétences et d’analyser, en particulier, si l’applica- tion générale du système des compétences concurrentes est justifiée.

A cet égard, il n’est pas satisfaisant de laisser les cantons mettre en place des interdictions éphémères dans le silence du droit fédéral–par exemple, la ferme- ture des chantiers genevois pendant quarante-huit heures–ni d’en être réduits à interpréter les ordonnances du Conseil fédéral pour déterminer si elles laissent place à une réglementation cantonale plus stricte–il n’est ainsi pas évident, à la lecture de l’ordonnance 2 COVID-19, que l’interdiction des rassemblements de plus de cinq personnes sur l’espace public exclut une interdiction générale de sortie pour les personnes âgées de plus de soixante-cinq ans. Cette situation porte atteinte aux principes de la sécurité et de la prévisibilité du droit70.

Il serait donc préférable d’adopter un cadre différent qui permettrait d’ac- croître la sécurité juridique et la cohérence des actions gouvernementales71, en s’inspirant des types de compétences reconnus en droit constitutionnel72.De lege ferenda, ce cadre pourrait être intégré dans la LEp, dans son ordonnance d’exécu- tion (OEp) ou dans les ordonnances de lutte adoptées par le Conseil fédéral.

67 OFSP, Rapport explicatif concernant lordonnance 2 du 13 mars 2020 sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus (ordonnance 2 COVID-19), version du 3 avril 2020, p. 2 s.

68 BELSER/STÖCKLI/WALDMANN(n. 22), p. 4.

69 Sur la notion de «silence qualifié», voir THIERRYTANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2eéd., Genève 2018, p. 151.

70 Pour lopinion contraire, voir BERGAMIN/MAZIDI(n. 9), p. 29.

71 Dun autre avis, BELSER/STÖCKLI/WALDMANN(n. 22), p. 6.

72 Voir, de manière générale, OFK-BIAGGINI, Vorbem. Art. 42-135 N 11.

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I. Proposition

En situation particulière, la Confédération et les cantons doivent disposer de compétences concurrentes73. En d’autres termes, les compétences cantonales ne se réduisent qu’à mesure que la Confédération légifère et les cantons de- meurent libres d’adopter des mesures plus strictes s’ils le souhaitent. C’est ainsi à bon escient que le Conseil fédéral a laissé une marge de manœuvre aux can- tons au début du mois de mars 2020 (cf.supraD.II).

En situation extraordinaire, en revanche, la Confédération doit disposer d’une compétence exclusive74. Autrement dit, dès sa proclamation, la Confédé- ration devient seule compétente et les réglementations cantonales sont effacées, même en l’absence de règle fédérale spécifique sur un sujet. Seule une autorisa- tion expresse du Conseil fédéral, soumise ou non au respect de certains critères, permet alors aux cantons d’ordonner des mesures spécifiques75. Avec une telle règle, l’annonce avortée de la fermeture des hôtels valaisans aurait été évitée.

Dans le domaine économique, c’est précisément ce système qui a été mis en place, dans un deuxième temps, par l’art. 7e de l’ordonnance 2 COVID-19 (cf.

supraD.III).

II. Argumentation

A première vue, cette proposition pourra sembler très centralisatrice. Toutefois, elle ne s’écarte de la manière dont la lutte contre le nouveau coronavirus a été concrètement menée qu’en ce qui concerne la situation extraordinaire.

Par ailleurs, cette proposition parachève le projet initié dès 1882 de per- mettre au Conseil fédéral, face à une épidémie, d’apporter «une intervention rapide et surtout une absolue unité d’action»76. Elle garantit, en particulier, que, compte tenu de l’impact potentiellement considérable de certaines mesures de lutte sur les autres secteurs de la vie du pays (au premier rang desquels l’éco- nomie), le Conseil fédéral puisse procéder à une minutieuse pesée de l’ensem- ble des intérêts en présence, sans craindre que l’équilibre choisi ne soit réduit à néant par des mesures cantonales hétéroclites. Elle répond aussi au besoin qui peut être exprimé par la population et les cantons que le Conseil fédéral prenne le contrôle de la situation (cf.supraD.III).

En tout état, dans le cadre d’une situation extraordinaire, il ne se justifie pas que les cantons puissent adopter des solutions différentes. Une telle manière de procéder mettrait à mal la solidarité confédérale, qui requiert, par exemple, que les cantons préservés viennent en aide aux cantons davantage touchés, ce qui

73 OFK-BIAGGINI, Vorbem. Art. 42135 N 11 («mitnachträglichderogatorischer Wirkung»).

74 OFK-BIAGGINI, Vorbem. Art. 42135 N 11 («mitursprünglichderogatorischer Wirkung»).

75 Voir la notion de délégation de compétences, AUER/MALINVERNI/HOTTELIER(n. 6), p. 365 ss.

76 Rapport (n. 17), p. 777. Cf. également GÄCHTER/LÓPEZ(n. 22), p. 121.

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n’est possible que si les premiers ne sont pas submergés à leur tour. En outre, des réglementations hétérogènes seraient difficilement compréhensibles pour la population et pourraient favoriser un tourisme intercantonal contreproductif du point de vue de la maîtrise de l’épidémie (par exemple, pour se rendre dans un canton voisin qui aurait, par hypothèse, décidé de laisser les salons de coif- fure ouverts)77.

Au surplus, le rôle des cantons ne serait nullement réduit à néant, puisque le système de la LEp garantit leur implication institutionnelle dans la gestion de la crise et dans le choix des mesures ordonnées, tant par l’organe de coordination OrC LEp (cf.supraC.I) que par le fait qu’ils restent en charge de l’exécution des mesures78.

Si nécessaire, les gouvernements cantonaux peuvent évidemment réclamer l’autorisation d’adopter des mesures plus strictes, à l’image de la demande du canton du Tessin qui a conduit à l’insertion de l’art. 7e dans l’ordonnance 2 COVID-19. La crainte de mesures fédérales inadaptées car pas assez spéci- fiques79s’en trouve donc atténuée, ce d’autant qu’il n’y a pas lieu de craindre un manque de réactivité du Conseil fédéral, comme le montre le fait que l’or- donnance 2 COVID-19 a pu être modifiée et «affinée» non moins de seize fois en un peu plus d’un mois (cf.supraD.III).

Sur le plan technique, il est vrai que le système de la compétence exclusive fait courir un risque de vide juridique80qui est absent en cas de compétences concurrentes: si le Conseil fédéral adopte une liste de commerces qui doivent fermer et une liste de commerces qui peuvent rester ouverts, la situation des commerces qui ne figureraient sur aucune des deux listes sera incertaine81. Ce risque ne justifie toutefois pas le rejet de la proposition; il doit simplement être pris en compte lors de la rédaction de l’ordonnance, qui privilégiera, par exemple, une clause de fermeture générale des commerces assortie d’une liste d’exceptions.

Enfin, il convient de rappeler le caractère rarissime de la situation extra- ordinaire (deux occurrences en cent ans) et l’interprétation restrictive qu’il convient d’en faire. Elle devra ainsi être décrétée seulement si la situation épi- démiologique, outre sa gravité intrinsèque, exige une concentration accrue des pouvoirs et être levée dès que les compétences cantonales concurrentes peuvent être restaurées sans mettre en péril la lutte. Pendant la durée de la situation extraordinaire, la Confédération ne devra, de surcroît, porter atteinte à la répartition horizontale ou verticale des compétences que dans la stricte mesure nécessaire82.

77 Dans le même sens, voir BELSER/STÖCKLI/WALDMANN(n. 22), p. 2.

78 Voir, dans un sens analogue, GÄCHTER/LÓPEZ(n. 22), p. 120.

79 Voir, sur ce point, BELSER/STÖCKLI/WALDMANN(n. 22), p. 6.

80 AUER/MALINVERNI/HOTTELIER(n. 6), p. 360.

81 BELSER/STÖCKLI/WALDMANN(n. 22), p. 5.

82 BELSER/STÖCKLI/WALDMANN(n. 22), p. 4.

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Résumé

La question de la répartition des compétences entre la Confédération et les can- tons en matière de lutte contre les épidémies se pose depuis le 19esiècle. En 2012, la révision intégrale de la LEp a cherché à clarifier cette question, en met- tant en place un système à trois échelons (situation normale–situation parti- culière –situation extraordinaire) qui prévoit un renforcement progressif des compétences fédérales à mesure que la situation s’aggrave. Cependant, la LEp n’indique pas précisément le sort des compétences cantonales après une inter- vention fédérale. Dans la lutte contre le nouveau coronavirus, les autorités ont considéré que, de manière générale, Confédération et cantons disposaient de compétences dites concurrentes. Or, parce qu’il permet aux cantons d’agir dans le silence du droit fédéral et qu’il nécessite inévitablement de recourir à l’interprétation, ce système a engendré nombre d’incertitudes (fermeture géné- rale des chantiers, interdiction générale de sortie pour les personnes âgées de plus de 65 ans, etc.). Si les compétences concurrentes sont ainsi adaptées en cas de situation particulière, la situation extraordinaire requiert une délimitation plus claire des tâches et une centralisation plus affirmée. Elle doit donc donner lieu à une compétence fédérale exclusive.

Zusammenfassung

Die Frage der Kompetenzverteilung zwischen Bund und Kantonen bei der Bekämpfung von Epidemien stellt sich seit dem 19. Jahrhundert. Bei der umfas- senden Revision des EpG im Jahr 2012 wurde versucht, diese Frage zu klären, indem ein dreistufiges System (Normalsituation–besondere Situation–ausser- ordentliche Situation) eingeführt wurde, das eine schrittweise Stärkung der Be- fugnisse des Bundes vorsieht, wenn sich die Situation verschlechtert. Das EpG weist jedoch nicht ausdrücklich auf das Schicksal der kantonalen Zuständig- keiten nach einem Bundeseingriff hin. Im Kampf gegen das neue Coronavirus vertraten die Behörden die Auffassung, dass Bund und Kantone im Allgemeinen über sogenannte konkurrierende Kompetenzen verfügten. Da es den Kantonen jedoch erlaubt, im Schweigen des Bundesrechts zu handeln, und zwangsläufig eine Auslegung erfordert, hat dieses System zu einer Reihe von Unsicherheiten geführt (allgemeine Schliessung von Baustellen, generelles Ausgangsverbot für Personen über 65 Jahre usw.). Während die konkurrierenden Kompetenzen im Stadium der besonderen Lage angemessen erscheinen, erfordert die ausser- ordentliche Lage eine klarere Abgrenzung der Aufgaben und eine durch- setzungsstärkere Zentralisierung. Sie muss daher eine ausschliessliche Bundes- kompetenz begründen.

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