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LA TOUR

DES MIRACLES

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Né en 1932, Michel Forgit est journaliste dans une station de radio. Son goût pour les problèmes scientifiques le pousse à

"couvrir" pour France-Inter un certain nombre d'événements : naissance de la base spatiale de Kourou en Guyane et tir de la première fusée Diamant. Il est à Cap Kennedy et à Houston pour Apollo 11 et la première marche sur la Lune.

La découverte du vaudou en Haïti, et celle de l'hypnose avec des médecins toulousains, lui ouvrent les portes du monde mysté- rieux, fascinant et inquiétant des pouvoirs cachés de l'homme.

Michel Forgit a publié quelques nouvelles. Son premier roman, Epreuves par neuf, a paru dans la collection S-F.

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Michel Forgit

LA TOUR DES MIRACLES

Illustration de couverture de Victor de la Fuente

Fernand Nathan

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© Editions Fernand Nathan, Paris, 1981

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Baby- Tilt

La nuit était plutôt fraîche pour un 20 juin et les quinze journalistes invités par le ministère des Armées regrettè- rent d'avoir refusé les parkas aimablement proposées par le fourrier de la base d'Évreux. Ils étaient installés sur une tribune ouverte à tous vents, quelque part entre la Neuve Lyre et Conches. Une épaisse nappe de brouillard se for- mait au-dessus de la Risle et son emprise ouatée gagnait peu à peu sur les herbages de la vallée.

Le colonel Leroy, responsable de la D.M.A. (Déléga- tion Ministérielle pour l'Armement) mit fin à leurs appré- hensions avant même que la question ne soit posée :

— Ne vous inquiétez pas pour le brouillard, il se lève toutes les nuits au-dessus de la rivière. Un léger vent d'ouest le dispersera vers trois heures du matin et la voûte étoilée vous apparaîtra dans toute sa splendeur.

L'envolée poétique de l'officier ne fit naître aucun sou- rire chez les journalistes. Il leur restait encore une heure et demie à attendre. L'humidité pénétrante avait eu raison de leur bonne humeur. Un bi-moteur les avait emportés de Villacoublay à Évreux pour un reportage dont ils igno- raient même le sujet. Pourtant tous étaient accrédités boulevard Saint-Germain, ils avaient déjà pénétré dans

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tous les sanctuaires de la Défense nationale, de l'Ile Lon- gue en Bretagne où sont tapis les sous-marins nucléaires, jusqu'au Plateau d'Albion où les fusées à têtes multiples reposent sous d'innocentes pâquerettes. Les reporters savaient seulement que l'armée les invitait à une démons- tration d'une nouvelle arme anti-char. Un briefing rapide à bord du Nord 262 avait tout de même éclairé leur lanterne.

— Vous savez, messieurs, qu'un simple char d'assaut peut décider du sort d'une bataille. Jusqu'à ces dernières années, son canon de 105 à longue portée n'en faisait qu'une pièce d'artillerie mobile. Aujourd'hui, un AMX transporte sur sa tourelle un missile Pluton à tête nucléaire. Sa portée est un secret d'État, mais vous savez comme moi qu'elle dépasse largement les cent kilomètres avec une marge d'erreur de quelques mètres seulement.

Nous ne sommes pas les seuls à disposer de tels engins;

c'est pourquoi les bureaux d'étude de la D.M.A. ont mis au point une parade. Elle permet d'anéantir le char adverse dès que nos éléments avancés l'ont repéré. Il s'agit d'un missile air-sol transportant une charge non nucléaire de cinquante kilos à géométrie creuse. C'est suffisant pour volatiliser n'importe quel char... pourvu que le coup au but soit assuré. Le nom de code de notre enfant est MTAC 01, Missile Tactique Anti-Char 01. Pour simplifier les choses, nous avons adopté le surnom trouvé par les tech- niciens : Baby-Tilt. L'ingénieur général Ganz, auteur du projet, vous exposera sur la base d'Évreux ce que les stra- tèges attendent de Baby-Tilt.

Ils étaient arrivés vers onze heures du soir, et après avoir reçu un badge portant leur photographie, les jour- nalistes avaient été admis dans un bâtiment de la Base aérienne 102, gardé comme un hangar de la Force aérienne stratégique: trois réseaux de barbelés, des

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chiens, des projecteurs, des gendarmes pistolet- mitrailleur en bandoulière, chargeur engagé. Les appa- reils photo et les caméras avaient été laissés au poste de garde, car aucune image de l'engin ne devait être publiée.

— Je compte sur vous, madame et messieurs, pour ne reproduire aucun dessin. Baby-Tilt est propulsé par un stato-réacteur dont le schéma intéresserait beaucoup les attachés militaires de toutes les ambassades occidentales ou socialistes... Je sais que Claire Mattei, spécialiste de l' Agence générale de Presse, a un fameux coup de crayon.

L'intéressée se confondit en dénégations sous les lazzis de ses confrères.

L'ingénieur général habillé en civil fit ouvrir la double porte du hangar. Un Jaguar de la 7e escadre de chasse lui- sait de mille feux sous la lumière crue d'une quinzaine de projecteurs. Le missile, accroché sous la carlingue, res- semblait à une caricature d'avion : quatre mètres de long pour une soixantaine de centimètres de diamètre, deux moignons d'ailes au milieu, et deux moteurs fusée fixés tout près du réacteur principal. L'ingénieur se glissa sous le Jaguar pour donner aux journalistes quelques rensei- gnements complémentaires.

— La portée de Baby-Tilt est voisine de celle de Plu- ton ; l'électronique est très compliquée. Le pilote prend son cap en vol supersonique et active à la dernière minute la centrale à inertie et les calculateurs du missile : il ne faut que quatre secondes à Baby-Tilt pour être opérationnel.

Dès que le "top" est donné, l'engin est largué et le stato- réacteur le maintient en vol. Son altitude est stabilisée à quatre cents mètres, ce qui lui permet d'échapper à une éventuelle poursuite radar. Grâce à ses propres antennes, Baby-Tilt prend conscience des irrégularités du relief et modifie sa trajectoire en conséquence. Il saute littérale- ment par-dessus les collines. Son calculateur déjoue les

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contre-mesures électroniques et choisit tout seul le che- min le plus sûr pour fondre sur son objectif dont les coor- données approximatives sont en mémoire dans la centrale à inertie. Un détecteur à infra-rouges entre en activité dans les dernières secondes de l'interception. C'est lui qui procède à la prise du char ennemi, même si ce dernier coupe son moteur, et se cache dans un boqueteau. Dans la phase finale, les deux fusées d'appoint impriment à Baby- Tilt une vitesse très largement supersonique de l'ordre de Mach 3, ce qui ne laisse aucune chance à une éventuelle DCA de proximité.

»... Voilà, vous savez tout, ou presque. Deux hélicop- tères Puma vont vous conduire au centre nerveux de l'ex- périence en pleine campagne, non loin de Laigle. Tout aurait pu se dérouler ici, mais nous avons choisi d'opérer en vraie grandeur, comme pour une opération véritable.

Le camion PC et les liaisons-radio reproduisent à peu de choses près ce qui se passerait réellement en cas de conflit.

Après avoir installé ses invités sur la tribune de cam- pagne, le colonel Leroy leur donna les dernières précisions :

— Le Jaguar piloté par le capitaine Tournier va décol- ler à trois heures d'Évreux. Il arrivera sur nous par le nord-est trois minutes plus tard. Pour des raisons que vous comprendrez aisément, nous avons renoncé au vol supersonique, l'armée de l'air a payé assez d'indemnités pour des veaux nés prématurément en raison des

"bangs"... Un radar monté sur une jeep simulera une acquisition ennemie quelques instants seulement après le largage. En principe, Baby-Tilt lui échappera grâce à un virage instantané.

» L'objectif se trouve dans une clairière communale près de Gisors, c'est un vieux half-track. Afin de donner

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à l'essai un réalisme total, le blindé sera en mouvement radio-commandé. Pour obtenir l'accord des autorités civiles, nous avons ajouté à notre enfant un circuit supplé- mentaire, la charge explosive ne sera armée que cinq secondes avant l'impact. Enfin, si la trajectoire devenait erratique, le chef de tir aurait la possibilité de détruire le missile en plein vol. Toute circulation automobile est interdite depuis hier soir dans un large périmètre autour de la clairière. Bien entendu, Baby-Tilt est programmé pour éviter toute agglomération, quels que soient les pièges disposés sur sa route.

» Je vous commenterai moi-même le déroulement du tir ; mon reportage sera bref : à raison de vingt kilomètres à la minute, la cible sera atteinte en trois cents secondes.

Comme l'avait prévu la météo, une légère brise venue de la mer dispersa les nappes de brouillard un quart d'heure avant le "top" du départ. Tous les journalistes avaient l'œil rivé sur le cadran phosphorescent de leur montre, lorsque le colonel annonça à trois heures précises que le capitaine Tournier venait de faire décoller son Jaguar. Un sourd grondement se fit entendre du nord-est, mais, malgré la transparence retrouvée de l'atmosphère, personne ne put apercevoir l'avion. Brusquement, une flamme orangée illumina le ciel, le stato-réacteur venait de se mettre en route tandis que le Jaguar, post- combustion allumée, amorçait une boucle pour rentrer à sa base.

Les spectateurs purent suivre la lueur orangée jusqu'à la limite de l'horizon. Le colonel leur expliqua qu'un stato-réacteur n'était en fait qu'une lampe à souder amé- liorée ; qu'il n'y avait aucune pièce tournante à l'intérieur, ce qui permettait de gagner quelques dizaines de précieux kilos sur un devis de poids très serré.

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— Top ! Interception par le radar mobile ! Les contre- mesures entrent en action, le missile vient d'obliquer plein nord. Dans une quarantaine de secondes, il approchera de Brionne et reprendra son cap d'origine, après avoir vérifié qu'il n'est suivi par aucun faisceau.

Le colonel plaqua soigneusement les écouteurs sur ses oreilles pour mieux entendre les informations que lui communiquait le chef de tir.

— ... Baby-Tilt arrive à l'ouest de Gisors, altitude:

trois cent seize mètres, vitesse : mille deux cent vingt kilo- mètres à l'heure.... Le censeur à infra-rouges vient d'ac- quérir le half-track.... Allumage des fusées de proximité et armement du percuteur de charge.... Trois mille six cents kilomètres à l'heure ; heureusement que la popula- tion a été prévenue de la possibilité d'un "bang" superso- nique ! ... Anomalie de trajectoire, le missile dévie de sa route.... Plus rien sur les écrans, Baby-Tilt s'est écrasé au sol... C'est un échec. Pourvu qu'il ne soit pas tombé sur une zone habitée !

Les deux Puma décollèrent immédiatement tandis que l'alerte retentissait chez les gendarmes et à la Protection civile de Beauvais et de Rouen. Les pilotes des hélicoptères furent les premiers à repérer un gros incendie près de Neauphle-St-Martin : le prototype 01 du MTAC avait terminé sa carrière dans une formidable déflagration à six kilomètres de Gisors. L'impact s'était produit à moins de cent mètres d'une ferme, au pied d'une grande tour moye- nâgeuse qui s'était à demi-effondrée sous l'onde de choc.

Il n'y avait pas eu de victime, mais c'était un vrai miracle.

A Évreux, on affirma aux journalistes que l'accident était inexplicable, qu'une première analyse des téléme- sures par ordinateur ne mettait en évidence aucune anomalie.

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Une puissante émission de chaleur avait dû tromper le censeur à infra-rouges et diriger "feu" Baby-Tilt vers un objectif fantôme.

Effectivement, le fermier déclara aux enquêteurs et aux journalistes de FR.3 Normandie qu'il s'était levé au milieu de la nuit pour mettre le feu à un grand tas de mauvaises herbes.

L'affaire fit scandale et la presse à sensation s'en empara.

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Il

Une tour infernale

— Pauline ! Viens vite voir la télé ! Il s'est passé quel- que chose à Neauphle, c'est la Musaraigne qui est interviewée !

La jeune fille en abandonne ses spaghetti de saisisse- ment et se précipite vers le salon. Maxime son jeune frère est à plat ventre sur la moquette devant un minuscule récepteur noir et blanc.

Ils sont originaires de Nice et tout le soleil du Midi est resté dans leur voix. Depuis toujours, la famille Pousse- rand a vécu sur la Côte d'Azur. Le père est employé muni- cipal, la mère reste à la maison en améliorant l'ordinaire grâce à des heures de ménage par-ci, par-là. C'est Pauline qui a brandi la première le fanion de l'indépendance. Son bachot passé, elle s'est prise de passion pour le reportage photographique. Après un stage sans avenir dans une feuille locale, elle a gagné un concours organisé par un grand quotidien parisien et elle s'est retrouvée dans la capitale en compagnie de son frère, pour y recevoir son prix, un 24 X 36 japonais de grande valeur. La rédaction en chef du journal fut séduite par la détermination de la jeune fille, par son talent naissant, ainsi que par sa curio- sité tous azimuts. On lui offrit un emploi d'assistante

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Mais qu'a-t-elle donc cette tour en ruines du Moyen Age pour faire dévier de sa trajectoire le plus sophis- tiqué de nos missiles tactiques ?

Pauline et Maxime Pousserand veulent en avoir le cœur net. Leur antipathique voisin, propriétaire de la tour, y est-il pour quelque chose ? Il dirige une secte d'illuminés qui se réunissent la nuit, au pied de la tour, justement. Maxime, caché dans les bois, assiste à une cérémonie des "Fervents de Deimos."

Un rite désuet, presque naïf, et le jeune homme s'ap-

prête à en rire lorsque l'irrationnel se p r o d u i t .

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