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INTRODUCTION Enjeux du big data et identifications des données médicales

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DOI:10.3166/LCN.12.1‐2.9‐12  2016 Lavoisier 

INTRODUCTION

Enjeux du big data et identifications des données médicales

JOËL COLLOC

BRUNO HÉNOCQUE

L’utilisation d’Internet et des réseaux sociaux s’est considérablement développée dans toutes les couches de la société et dans tous les domaines d’activité, notamment celui de la santé. Il conduit les utilisateurs à partager des données personnelles, voire intimes, concernant leur vie privée et leur santé.

Cet usage permet de nouvelles applications pour mieux connaître les habitudes, les us et coutumes, les conduites à risque et offre ainsi de nouveaux outils au service de l’épidémiologie, de la recherche médicale pour améliorer la prévention et les soins. En revanche, il comporte également des risques de profilage des individus et des atteintes à la vie privée. Le cloud computing, les techniques de data mining, les très grandes bases de données, les moteurs de recherche, les robots d’indexation, les data center, les outils du web sémantique, les objets connectés, les dispositifs biométriques, la bioinformatique, les nanotechnologies informatiques constituent des éléments essentiels sur lesquels s’appuie le big data. Leur développement pose des questions épistémologiques aux informaticiens et aux médecins et personnels de santé en tant qu’utilisateurs en France comme à l’étranger. La réflexion s’étend au respect général des libertés individuelles et de la vie privée et de l’intimité, du secret de l’individu.

Les données constituent aujourd’hui une marchandise précieuse commercialisée et l’usage du big data constitue une nécessité pour la survie économique des

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entreprises. Les sciences humaines et sociales sont évidemment interrogées sur les aspects éthiques : les juristes, les chercheurs en sciences de l’information et de la communication, en sciences cognitives, les psychologues, les sociologues, les géographes, les gestionnaires et les économistes, les anthropologues, ethnologues, linguistes et les usagers, les patients dont le témoignage est précieux... Tous apportent des arguments essentiels à une réflexion éthique sur l’utilisation et l’expansion de ces nouveaux outils qui vont profondément modifier la société et la vie de chacun d’entre nous. Cette réflexion prend en compte l’environnement social et culturel de l’utilisation de ces outils dans les différents pays où ils sont exploités.

L’objectif de ce numéro est d’effectuer un panorama interdisciplinaire, le plus large possible des avantages et des conséquences de l’utilisation du big data et du cloud computing. L’article de deux chercheurs australiens met en perspective culture et perception du risque lié au big data. Les entraves au développement du dossier médical personnalisé (DMP) sont ensuite abordées.

Les trois articles suivants traitent de l’évolution des attitudes et des comportements éthiques visant une coresponsabilité patient-médecin-système d’information médicale. Ce numéro se termine en abordant les perspectives en matière d’intelligence artificielle et les risques pour les libertés individuelles liées aux recherches récentes concernant le développement d’une pensée artificielle.

La réflexion de Peters Summons et Brian Regan aborde la question des applications d’exploration de données (data mining) dans le contexte du big data en Australie. Ils s’appuient conjointement sur la recherche internationale relative au big data. Les auteurs soulignent les risques liés à l’agrégation des nombreux référentiels de données collectées sur un individu. Ils mettent surtout en lumière le lien entre la perception du risque et la culture nationale, entre le contexte juridique et le traitement, l’étendue et les effets du risque. Ils montrent enfin que l’importance de ce traitement dépend de l’anticipation du risque du big data dans le futur.

En France, Souad Odeh s’interroge sur l’image négative du dossier médical personnel (DMP). La question de la légitimité du DMP se trouve même posée parmi les acteurs de soins. L’auteure souhaite ensuite comprendre les raisons de cette méfiance. Elle les cherche tout d’abord dans les spécificités du DMP par rapport aux autres dossiers médicaux. Après avoir retracé les moments essentiels de son développement, l’auteure explicite les entraves à son déploiement, notamment les problèmes culturels de confidentialité, de masquage et de partage des données. Il évoque enfin la possible réussite du DMP comme dispositif de médiation documentaire.

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Parmi les changements liés au big data, trois contributions ont pour point commun de souligner les évolutions en cours sur les notions de responsabilité médicale et de confidentialité des données.

Céline Battaïa décrit l’évolution des pratiques d’information dans les forums de santé sur Internet et les motivations des usagers d’y participer. Elle s’interroge sur la fiabilité scientifique des informations médicales qui sont présentées tout en soulignant qu’il s’agit d’un lieu où sont également échangées des expériences de vie et des émotions des participants confrontés à la maladie.

Christine Sybord déplace ainsi la réflexion relative à la responsabilité des praticiens vers l’hypothèse d’une responsabilité médicale étendue au patient, dans le contexte des systèmes d’informations partagées. La prise de décision est alors conjointe, co-construite. La gestion de la responsabilité médicale devient sociocognicielle. Elle traduit bien une évolution de la relation patient-soignant.

Jérome Béranger de son côté s’interroge sur le sentiment d’angoisse ressenti par les acteurs de la santé vis-à-vis de l’e-santé, de la télémédecine, des m- Health, des big data médicaux et des évolutions juridiques. La manipulation et l’utilisation de l’information médicale se trouvent en effet en perpétuelle équilibre entre le secret médical et la transparence. Dans ce contexte, les principes et les règles éthiques qui entourent la relation patient-médecin ne peuvent qu’évoluer.

La communication de Hadi Saba Ayon présente les résultats d’une étude ethno-méthodologique relative à un groupe de personnes en situation de handicap psychique en 2013-2014. Leur profilage (qui peut être aussi une source de controverse) les sort de l’isolement en leur permettant d’accéder à une sociabilité numérique. L’utilisation qu’ils font des données concerne d’ailleurs surtout les loisirs et le contact social. Cet exemple est tout à fait emblématique des risques de généralisation des discours négatifs sur les empreintes numériques.

L’article le plus original est celui d’Alain Cardon. L’auteur apporte un éclairage très intéressant sur l’avancée des recherches relatives aux systèmes informatiques générant des représentations mentales artificielles. On se dirige vers des prothèses sensorielles intégrant l’état attentionnel et affectif de l’utilisateur et susceptible de s’intégrer à un système global de données. Deux aspects originaux sont développés dans cet article :

Le premier concerne les risques de surveillance sur les humains par ses systèmes et a contrario la question du contrôle des humains sur ces systèmes.

La façon dont par exemple ces applications de vie artificielle capteront nos préférences. Il convient et il conviendra à cet égard de distinguer les

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applications utiles, inutiles et nuisibles dans le domaine si sensible de nos libertés.

Le second est la réflexion menée par l’auteur sur la structure de la conscience artificielle et sur les liens entre une pensée produite dans le cerveau d’un organisme vivant et celle qui émane d’un système artificiel. Avec la théorie freudienne, la recherche sur la conscience artificielle dispose d’un modèle assez complet sur l’appareil psychique humain qui nous conduit, avec tous les risques liés aux privilèges dont disposera économiquement une minorité, à accéder à ces nouvelles prothèses sensorielles.

Joël Colloc présente un modèle de comparaison de la pensée humaine avec une pensée numérique du type de celle proposée par Alain Cardon. Il fonde cette évaluation sur quatre hiérarchies : la classification des systèmes d’information, la pyramide cognitive, la pyramide langagière et la hiérarchie informationnelle numérique. Les aspects éthiques et les conséquences pour l’humanité de l’apparition de systèmes dotés d’une pensée artificielle sont évoqués. Ils conduisent actuellement à une réaction de la communauté scientifique correspondant à l’apparition de systèmes d’armes autonomes. Les perspectives de ce travail concernent les conséquences de la coexistence dans un futur proche des humains avec des êtres artificiels autonomes ayant accès à l’ensemble des données issues du big data.

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