Thèse de doctorat de l’Université de Bretagne Occidentale
Spécialité: Electronique
Présentée par: Monsieur Gilles BUREL
RESEAUX de NEURONES en TRAITEMENT d’IMAGES:
Des Modèles Théoriques aux Applications Industrielles
Soutenue le 6 décembre 1991, devant la commission d’examen:
Président: G. Stamon Professeur à Paris V - Sorbonne Rapporteurs: L.C. Calvez Professeur à l’Université de Brest
C. Jutten Professeur à l’Université de Grenoble Examinateurs: P. Jarry Professeur à l’Université de Bordeaux
Directeur de thèse
J.Y. Catros Responsable du laboratoire RII de Thomson CSF-LER B. Dorizzi Professeur à l’INT (Evry)
J.P. Cocquerez Professeur à l’ENSEA (Cergy)
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à mes parents
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RESUME
Les travaux présentés portent sur les réseaux de neurones appliqués au traitement du signal et de l’image. On se place d’emblée du point de vue de l’industriel impliqué dans la recherche, c’est à dire que l’on s’intéresse à des problèmes réalistes, sans pour autant négliger la recherche théorique.
Dans une première partie, nous montrons l’intérêt des réseaux de neurones comme source d’inspiration pour la conception de nouveaux algorithmes. Nous proposons en particulier une structure originale pour la prédiction, ainsi que de nouveaux algorithmes de Quanti…cation Vectorielle. Les propriétés des algorithmes existants sont également éclaircies du point de vue théorique, et des méthodes de réglage automatique de leurs paramètres sont proposées.
On montre ensuite les capacités des réseaux de neurones à traiter un vaste champ d’applications d’intérêt industriel. Pour divers problèmes de traitement de l’image et du signal (de la segmentation à la séparation de sources, en passant par la reconnaissance de formes et la compression de données), on montre qu’il est possible de développer à moindre coût une solution neuronale e¢cace.
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REMERCIEMENTS
Je tiens en tout premier lieu à remercier Monsieur Boyer, Directeur de Thomson CSF-LER, et Monsieur de Couasnon, Directeur technique, pour m’avoir accueilli dans leur établissement, et m’avoir permis de réaliser ce travail.
Monsieur Stamon, Professeur à Paris V - Sorbonne, me fait l’honneur d’assurer la présidence du jury d’examen. Je voudrais lui exprimer ici ma plus sincère reconnaissance.
Monsieur Jarry, actuellement Professeur à l’Université de Bordeaux, et responsable du Laboratoire d’Electronique et Systèmes de Télécommunications de l’Université de Brest (L.E.S.T.) jusqu’en juillet 1991, a été mon Directeur de thèse, et a assuré le suivi de ce travail. Je lui adresse mes plus sincères remerciements, ainsi que pour la con…ance qu’il m’a témoignée en me con…ant le cours de traitement d’images du D.E.A. d’Electronique dont il a la responsabilité.
Mon intérêt pour le traitement du signal date de l’époque où j’ai eu la chance de suivre l’excellent cours de Monsieur Calvez, Professeur à l’Université de Brest.
Je voudrais le remercier vivement d’avoir accepté d’examiner ma thèse en tant que rapporteur.
Les travaux de Monsieur Jutten, Professeur à l’Université de Grenoble, ont toujours été à l’avant-garde de la recherche en réseaux de neurones. Je lui suis particulièrement reconnaissant de l’honneur qu’il me fait en acceptant de participer au jury en tant que rapporteur.
Monsieur Catros, responsable du laboratoire de Reconnaissance et Interprétation en Imagerie (RII) de Thomson CSF-LER, a constamment suivi l’évolution de ce travail, et m’a fait pro…ter de sa riche expérience du traitement d’images. Je voudrais ici lui exprimer ma plus vive gratitude.
J’adresse mes plus vifs remerciement à Madame Dorizzi, Professeur à l’INT, et responsable du département Intelligence Arti…cielle, pour sa participation au jury. Dans le cadre du projet Esprit II “Pygmalion”, sa rigueur scienti…que et ses qualités de management ont guidé mes premiers travaux en réseaux de neurones.
Monsieur Cocquerez, Professeur à l’ENSEA, anime une dynamique équipe de Traitement d’Images. Je voudrais lui exprimer ici mes plus sincères remerciements pour sa participation au jury.
Thèse G. Burel Remerciements
Je ne saurais oublier mes collègues des L.E.R., qui ont directement ou indirectement contribué à ce travail. Je voudrais remercier tout particulièrement Isabelle Pottier, pour sa contribution essentielle à ce travail par ses critiques constructives et son aide précieuse dans la réalisation des logiciels d’expérimentation, ainsi que Dominique Carel, pour sa contribution à l’application de reconnaissance de pièces industrielles 2D (notamment la comparaison avec une méthode symbolique), et Jean-Ronan Vigouroux pour diverses discussions enrichissantes.
J’ai eu plaisir à encadrer les stages de Hugues Henocq (synthèse de textures), Isabelle Pottier (logiciel d’apprentissage supervisé, et compression d’images), et Jean-Paul Accarie (chi¤res manuscrits). Qu’ils soient remerciés pour l’aide qu’ils m’ont apportée.
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INTRODUCTION
On assiste depuis 1986, avec la parution de l’ouvrage collectif “Parallel Distributed Processing”[Rumelhart86], à un regain d’intérêt pour les modèles de traitement de l’information inspirés du fonctionnement du système nerveux. Cette voie de recherche n’est pourtant pas nouvelle, car elle a son origine dans des travaux conduits à la …n des années 40 (modèle de Hebb pour l’apprentissage[Hebb49]). Dès les années 60, un modèle connu sous le nom de “perceptron” [Rosenblatt62] a été appliqué à la reconnaissance de caractères. Mais les limitations de ces premiers modèles ont provoqué un rapide désintérêt.
Le succès de l’ouvrage “Parallel Distributed Processing” est dû à la présenta- tion de nouveaux algorithmes, plus performants, et à la mise en valeur des avantages et particularités des systèmes nerveux biologiques (parallélisme massif, capacités d’apprentissage, mémoire distribuée, résistance aux dégradations, ...). Des applica- tions à fort potentiel médiatique ont rapidement vu le jour, comme par exemple le système “NET-TALK” [Sejnowski87], qui apprend à lire à haute voix du texte en anglais. Les modèles de traitement de l’information inspirés du fonctionnement du système nerveux sont regroupés sous le nom générique de “réseaux de neurones” (ou
“modèles connexionnistes”).
De nombreuses conférences relatives à ce domaine ont déjà eu lieu, et un pro- jet Européen a débuté en 1989 (Esprit Project no 2059 “Pygmalion”). Le nombre de sociétés industrielles et de laboratoires universitaires s’intéressant aux techniques neuronales est également en constante augmentation. On assiste actuellement dans ce domaine à un foisonnement de modèles et d’applications.
La présente thèse a été réalisée aux Laboratoires Electroniques de Rennes de Thomson CSF, l’un des deux laboratoires centraux de Thomson, dont une des missions est de réaliser des recherches de pointe dans les domaines du traitement du signal et de l’image. Les remarquables performances du système visuel humain laissent entrevoir l’apport que l’on peut espérer de modèles d’inspiration biologique.
Pourtant, la plupart des modèles proposés ne sont pas exploitables au vu des performances technologiques actuelles (et ne le seront probablement pas avant des dizaines d’années). Par exemple, certains modèles proposés dans [Grossberg88]sont dé…nis par des équations di¤érentielles. Il sont donc intéressants pour comprendre certains aspects du fonctionnement cérébral, mais sont di¢cilement applicables à des problèmes réels du fait de la lenteur d’une telle simulation.
Notre objectif est ici de montrer la capacité de certains modèles neuronaux à
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traiter des problèmes réalistes de reconnaissance de formes ou d’analyse du signal, ainsi que leur intérêt comme source d’inspiration pour mettre au point de nouveaux algorithmes. Plus précisément, nous nous attacherons à répondre aux points suivants:
² Améliorer ces modèles pour faciliter le traitement d’une vaste panoplie d’applications.
² Contribuer à conforter leurs bases théoriques.
² Résoudre par une approche neuronale des problèmes de traitement d’image d’intérêt industriel.
² Proposer de nouveaux algorithmes. Par exemple, on proposera au chapitre 10 un nouvel algorithme de séparation de mélanges de signaux qui est capable de séparer des mélanges non-linéaires et ne nécessite aucune connaissance a priori sur les sources.
L’intérêt industriel ne peut être atteint qu’en gardant à l’esprit les limitations technologiques présentes. Ainsi, le nombre de neurones simulables sur un ordi- nateur de puissance moyenne se chi¤re en milliers, alors que le cerveau humain contient de l’ordre de 1011 neurones. C’est pourquoi, nous ne suivrons pas la voie préconisée par de nombreux auteurs, et qui consiste à traiter directement une image par un réseau de neurones, comme c’est le cas dans le système nerveux.
En e¤et, la “faiblesse numérique” des neurones simulés ne nous semble pouvoir être compensée qu’en faisant appel aux connaissances du traitement d’image pour réaliser des prétraitements qui permettent de réduire le volume de données à traiter et d’introduire certaines invariances. Nous verrons que pour les problèmes de classi…cation, la puissance des techniques neuronales permet de mettre en œuvre des prétraitements réversibles au sens du problème à traiter, ce qui élimine toute perte d’information pertinente dans le prétraitement (et tout risque de recouvrement de classes dans l’espace paramétrique lorsque l’on traite un grand nombre de données).
On pourrait objecter que la recherche concernant la réalisation matérielle de machines neuronales est actuellement très active. Mais il convient de ramener les espoirs à de justes proportions, car ces machines permettraient tout au plus de gagner quelques ordres de grandeur. De plus, la recherche dans ce domaine semble plutôt s’orienter [Saucier89] vers des machines neuronales qui ne réalisent pas l’apprentissage (celui-ci devant être réalisé à part sur un ordinateur classique).
Le travail relaté dans cette thèse a donné lieu à plusieurs brevets et publi- cations. Les lecteurs qui ne sont pas familiers avec les techniques neuronales pourront lire en introduction notre article “Réseaux de neurones en traitement d’images”[Burel90], qui donne un bref aperçu de ce domaine et d’une partie des
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études décrites ci-après.
Les chapitres 1 et 2 situent le contexte. Dans le chapitre 1 nous présentons certains aspects des connaissances actuelles concernant le fonctionnement du système nerveux. Les modèles neuronaux que nous utilisons peuvent être décrits en termes purement mathématiques, et ne sont pas directement calqués sur la réalité biologique.
Il eût toutefois été injuste de passer sous silence ces connaissances biologiques, qui ont été une source d’inspiration importante au début de nos travaux. Le chapitre 2 décrit les modèles neuronaux que nous utiliserons et leurs algorithmes d’apprentissage associés. Il tente également de situer ces modèles par rapport à des théories plus classiques.
Le chapitre 3 présente les améliorations que nous avons apportées aux modèles et algorithmes utilisés pour faciliter le traitement de problèmes réels. Il s’agit princi- palement de méthodes de réglage automatique des paramètres de l’apprentissage, et de méthodes de controle de la saturation.
Dans le chapitre 4 nous proposons de nouveaux algorithmes et résultats théoriques.
La première partie du chapitre présente une nouvelle approche pour les réseaux de neurones multi-couches: la Représentation Scalaire Distribuée. Cette approche permet d’accroître de façon importante la capacité du réseau à traiter des prob- lèmes non-linéaires. Puis, dans une seconde partie, nous proposons de nouveaux algorithmes de Quanti…cation Vectorielle qui présentent d’intéressantes propriétés de conservation de la topologie.
Les chapitres 5 à 9 présentent diverses applications de traitement d’images.
Ces applications ont été choisies pour couvrir un vaste champ de problèmes : la segmentation (chap. 5), la reconnaissance de formes (chap. 6 et 7), la reconnaissance de l’écriture (chap. 8), et la compression d’images (chap. 9):
- Le chapitre 5 présente une nouvelle approche pour la discrimination de texture, qui met en œuvre un prétraitement réversible au sens de la texture suivi d’un classi…eur neuronal. Cette approche est validée dans les domaines visible et Infra-Rouge.
- Les chapitres 6 et 7 présentent des applications de reconnaissance de forme (en 2D avec occlusions, et en 3D) dans le domaine de la robotique. En 3D, on utilise un prétraitement réversible au sens de la forme.
- Dans le chapitre 8, on présente une application à la reconnaissance de chi¤res manuscrits. Une méthode neuronale très performante a déjà été proposée an- térieurement [LeCun89]. Nous montrerons comment il est possible de réduire considérablement la complexité du système de reconnaissance en mettant en œu-
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vre un prétraitement quasi-réversible au sens du chi¤re. Comme ce prétraitement est quasi-réversible, il n’introduit pas de perte d’information signi…cative.
- L’objet du chapitre 9 est la compression d’image. Nous montrerons comment les propriétés topologiques d’un algorithme neuronal particulier peuvent être ex- ploitées pour améliorer les taux de compression.
En…n, dans le chapitre 10, nous proposons un nouvel algorithme pour un problème fondamental en traitement du signal : la séparation de mélanges de signaux. Cet algorithme est capable de traiter des mélanges non-linéaires, et ne nécessite aucune connaissance a priori sur les sources.
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Références
[Burel90] Gilles BUREL, Jean-Yves CATROS
“Réseaux de neurones en traitement d’images”
Bulletin d’information des Laboratoires Centraux de Thomson CSF, no 4, décembre 1990
[Grossberg88] Stephen GROSSBERG
“The adaptative Brain”
North-Holland (Amsterdam), 1988
[Hebb49] D.O. HEBB
“The organization of behavior”
J. WILEY and Sons, 1949
[LeCun89] Yann LE CUN et al.
“Handwritten Digit Recognition :
Applications of Neural Network Chips and Automatic Learning”
IEEE Communications Magazine, November 1989
[Rosenblatt62] F. ROSENBLATT
“Principles of neurodynamics”
Spartan, New York, 1962
[Rumelhart86] D.E. RUMELHART and J.L. Mc CLELLAND
“Parallel Distributed Processing”
Bradford book - MIT Press - 1986
[Saucier89] G. SAUCIER, J. OUALI, J.L. PATRY, P. SILVESTRE
“Design of the VLSI demonstrator architecture”
Esprit Projectno 2059 “Pygmalion”, Report R211 (M12), December 1989
[Sejnowski87] T.J. SEJNOWSKI - C.R. ROSENBERG
“Parallel networks that learn to pronounce English text”
COMPLEX SYSTEMS 1 , pp145-168 , 1987
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