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De l'égalité des chances à la diversité ? La politique dans l'enseignement supérieur français

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Academic year: 2021

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DE L’ÉGALITÉ DES CHANCES À LA DIVERSITÉ ?

LA POLITIQUE D’ÉGALITÉ DANS L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR FRANÇAIS

Cette contribution analyse les reformulations du problème des inégalités dans l’enseignement supérieur initiée au cours de la dernière décennie. Elle montre comment sa construction articule une logique procédurale d’égalité des chances à une norme de résultat formulée en terme de diversité. Nous étudierons comment se constitue une nouvelle catégorie d’action publique éducative articulant les deux terminologies dans une logique d’individualisation du traitement des inégalités. La contribution proposée s’appuie sur l’étude des dispositifs mis en place par les acteurs des grandes écoles françaises, qui sont parvenus à exclure – ou à tout le moins à marginaliser – l’université du périmètre de définition du problème. L’analyse de la construction progressive d’une politique d’égalité dans le supérieur par l’agrégation de dispositifs locaux dans les grandes écoles permet d’étudier les représentations et les pratiques qui définissent la reformulation de la catégorie.

La mise en place des conventions d’éducation prioritaire1 de l’IEP de Paris en 2001 et le lancement du programme « Pourquoi pas moi » de l’ESSEC deux ans plus tard ont contribué à mettre à l’agenda médiatique et politique la question des inégalités d’accès à et de succès dans l’enseignement supérieur en France. Grandes écoles et, très marginalement, universités ont mis en place des dispositifs variés de partenariat avec des établissements d’enseignement secondaire, formant ainsi une politique dite de d’ « égalité des chances » ou de « diversité ». Ces dispositifs reposent principalement dans des pratiques variées de tutorat effectuées par des enseignants ou des étudiants du supérieur, à destination d’élèves du secondaire. Les discours des acteurs sur les dispositifs, notamment des dirigeants de grandes écoles, articulent les notions de diversité et d’égalité sans faire de la terminologie un enjeu de lutte. Comme la notion de « discrimination » (D. Fassin et E. Fassin, 2006), la « diversité » est un concept labile, qui peut désigner des problèmes différents selon le qualificatif qui lui est attribué (M. Wieviorka, 2008), mais aussi et justement parce qu’elle peut ne pas être qualifiée.

Depuis 2001, les termes choisis par les journalistes, les responsables politiques et les acteurs du supérieur pour désigner les dispositifs de démocratisation de l’enseignement supérieur sont relativement changeants. Le caractère instable des rhétoriques utilisées est une

1 Voie de recrutement dérogatoire destinée aux élèves de lycées conventionnés avec l’IEP, sélectionnés selon principalement pour leur situation géographique en zone rurale ou urbaine « défavorisée » et la surreprésentation des élèves d’origine populaire.

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caractéristique connue des processus de construction des problèmes publics, notamment grâce aux analyses montrant les enjeux symboliques à l’œuvre dans les luttes sur le label.

Dans les discours sur ces dispositifs, le terme diversité est articulé à d’autres notions comme l’égalité des chances, la discrimination (positive ou non) et l’ouverture sociale. L’usage des différents termes n’est pas neutre socialement et politiquement. L’ouverture sociale est un terme principalement utilisé par les acteurs des grandes écoles favorables au modèle du tutorat. Ils voient dans cette notion un moyen de se différencier du dispositif très médiatisé de l’IEP de Paris. La notion de discrimination est assez large, mais tend à impliquer un traitement juridique du problème. L’égalité des chances constitue un principe d’action publique, un objectif à atteindre. Elle est également une terminologie largement investie par les acteurs se réclamant du républicanisme, qu’il s’agisse de la droite de tradition gaulliste ou chrétienne ou de la gauche socialiste traditionnelle ou chrétienne. La diversité est une terminologie plutôt portée par des acteurs acquis au néolibéralisme, initialement la droite sarkozienne au milieu des années 2000, et progressivement une partie des acteurs de gauche. Nicolas Sarkozy a ainsi grandement participé de l’expansion de la notion de diversité qui est aujourd'hui devenue un terme incontournable du débat. Elle tend à désigner une catégorie du monde social, et son usage se généralise dans tous les discours sur le problème des inégalités, non seulement dans l’enseignement supérieur, mais aussi dans d’autres secteurs sociaux. On parle en effet par exemple d’ « élu de la diversité » ou de « membre de la diversité ». Si la signification la plus courante de la « diversité » fait référence, implicitement ou par l’adjonction d’un qualificatif, à la dimension ethno-culturelle, elle peut également être qualifiée différemment, par exemple en désignant le genre, l’origine sociale ou le handicap. La diversité constitue donc une catégorie « à géométrie variable »2.

Le travail de catégorisation, de labellisation, est une activité fondamentale opérée par les acteurs sociaux dans la construction d’un problème public. Elle consiste à définir le problème, c’est-à-dire à sélectionner les dimensions pertinentes d’expression de ce qui est en jeu, à donner un sens, à proposer une interprétation du problème, qui comprend à la fois « les attributions de causalité, les imputations de responsabilité, les identifications d’acteurs, les configurations d’action, les évaluations de préjudice, les propositions de solutions »3. Le caractère flou de la catégorie diversité n’a rien d’inhabituel, et nombre de travaux d’analyse de l’action publique soulignent le « succès des catégories floues »4 : le flou assure la pérennité de la catégorie, permettant notamment des ajustements successifs.

Le flou de la catégorie tient tout d’abord à sa transversalité. La diversité, si elle est généralement qualifiée implicitement ou explicitement d’ethno-raciale, ou de culturelle – les deux termes étant en France utilisés dans un sens équivalent –, peut également englober la dimension du genre, ou de l’origine sociale, et plus rarement, de l’orientation sexuelle ou du

2 Michel Wieviorka, La diversité. Rapport à la Ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche, Paris, Robert Laffont, 2008, p. 19.

3 Daniel Defaï, « La construction des problèmes publics », Réseaux, n° 75, 1996.

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handicap. Comme dans le cas de la notion de « discrimination »5, c’est le qualificatif qui donne tout son sens à l’espace couvert par la diversité. Cette transversalité tendrait ainsi à devenir un trait marquant de l’évolution du problème des inégalités dans ses reformulations successives au cours des deux dernières décennies. Une seconde évolution marquante dans le passage de la formulation en terme de discrimination à celui en terme de diversité est un renversement dans la connotation sémantique : si la discrimination est connotée péjorativement, la diversité s’accompagne d’une connotation positive. La discrimination est un problème, la diversité est une, voire la solution.

Comment expliquer le succès de la diversité pour désigner un problème jusqu’alors défini en terme d’égalité des chances ? Comment le flou de la catégorie diversité opère-t-il dans la pratique ? Il s’agit d’interroger les enjeux de catégorisation et de labellisation qui sont à l’œuvre dans le recours devenu dominant de la notion de diversité pour penser le problème des inégalités dans l’accès aux grandes écoles. On analysera quels sont les enjeux, les usages et les effets de la mobilisation de la notion de diversité par les acteurs des politiques de l’enseignement supérieur. On se demande en quoi parler de diversité, plutôt que de discrimination ou d’inégalités constitue un changement de perspective, et pas seulement une substitution de termes et sur les implications politiques qui en découlent. On propose donc ici de repérer quelques traits caractéristiques d’une nouvelle configuration des politiques de traitement des inégalités dans l’enseignement supérieur. Les pratiques discursives de la diversité sont donc analysées non pas comme de simples jeux de langages, mais comme des pratiques ayant une signification politique et une efficacité sociale. On cherche à dégager les implications politiques et sociales qui sous-tendent les usages indigènes de la catégorie.

Dans les discours de la plupart des acteurs du supérieur, et notamment les responsables des grandes écoles, on repère la congruence d’une rhétorique peu stabilisée, relativement consensuelle dans la manière de définir le problème à grands traits. Tous n’investissent pas le terme comme un enjeu, et mobilisent alternativement tel ou tel terme, ou en donnent des représentations équivalentes au premier abord.

On s’interroge donc ici sur la manière dont la diversité est constituée en catégorie qui permet de faire exister un problème déjà ancien sous de nouvelles formes, de l’actualiser en rompant avec ses formulations antérieures. On s’intéresse à la fois aux discours et aux pratiques de l’égalité des chances et de la diversité, ainsi qu’aux principes de leur production. La politique de diversité dans l’enseignement supérieur se caractérise par l’articulation progressive d’une norme procédurale à une logique de résultat (I). Elle consacre l’invention d’une nouvelle catégorie d’action publique scolaire marquée par une logique d’individualisation du traitement des inégalités, et par une certaine flexibilité dans l’articulation des différents critères définissant la catégorie (II).

5 Didier Fassin, « L’invention française de la discrimination », Revue française de science politique, vol. 52, n° 4, août 2002, p. 403-423.

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Le propos s’appuie sur plusieurs séries d’entretiens réalisées en 2007 et 2008 d’une part auprès des principaux acteurs impliqués dans les dispositifs de les académies de Toulouse, Paris et Bordeaux (responsables administratifs locaux, dirigeants des grandes écoles et universités, proviseurs et enseignants de lycées, recruteurs), d’autre part auprès de personnels des administrations centrales ainsi que des mêmes types d’acteurs dans d’autres académies. La réflexion s’appuie également sur l’étude d’une revue de presse de 2001 à 2008, une analyse des documents et archives produites par les acteurs, ainsi que sur une observation de certaines phases des dispositifs.

I.

D’

UNE LOGIQUE PROCÉDURALE D

ÉGALITÉ DES CHANCES À LA DIVERSITÉ

COMME NORME DE RÉSULTAT

1. Comment la concurrence entre deux dispositifs précurseurs mène à la

consécration de la pratique du tutorat

« A la rentrée 2001, Sciences-po lançait un pavé dans la mare, en décidant d’ouvrir ses portes aux élèves d'une vingtaine de lycées situés en zone d'éducation prioritaire. […] Plus que le modèle des quotas de Sciences-po, qui permet d'ouvrir immédiatement les portes de l’établissement à un plus large éventail de population, c’est davantage la voie choisie par l’essec en 2002 qui emporte l’adhésion. Son fonctionnement ? Proposer une ouverture intellectuelle à des lycéens scolarisés dans une zep. Au programme : des ateliers d'expression orale, des sorties culturelles ou des visites d'entreprises, pour les aider à se projeter dans l'enseignement supérieur et même à préparer l'entrée en ‘‘prépa’’. […] L’expérience qui se voulait pilote va se généraliser. D’autres écoles se lanceront prochainement dans la même voie, en adaptant le modèle essec à leur propre environnement. […] En tout, une soixantaine d’établissements sont d’ores et déjà prêts à s’engager aux côtés de lycées. D’autres expérimentations sont à l'étude, qui pourraient être généralisées si elles se révélaient concluantes. » Le Figaro, 31 janvier 2005.

Cet extrait d’article illustre la manière dont est cadré le débat sur la question de l’égalité des chances dans les formations sélectives de l’enseignement supérieur depuis le début des années 2000. Elle se structure autour d’une opposition entre le programme des conventions d’éducation prioritaire (CEP) de Sciences-po Paris, mis en place en 2001, et le dispositif « Pourquoi pas moi ? » (PPM) de l’ESSEC, initié un an plus tard. Ces derniers sont définis comme des « expérimentations » parmi d’autres, ayant vocation à être généralisées. En quelques années, les dispositifs d’égalité des chances se multiplient : ils sont mis en place à l’initiative de responsables de grandes écoles, de manière localisée.

Ce foisonnement soudain de dispositifs de diversité trouve son origine dans le lancement d’initiatives par des établissements sélectifs, les pouvoirs publics n’intervenant qu’après coup. Ces

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initiatives occasionnent peu de débat politique. Les discussions portent assez vite sur les dispositifs eux-mêmes, dans un registre de technicisation des enjeux du problème de la démocratisation. Le problème de l’égalité des chances dans l’enseignement supérieur sélectif apparaît très souvent dans les discours des acteurs et des commentateurs, médiatiques, politiques voire scientifiques, comme une question consensuelle, faisant uniquement débat sur les modalités de son traitement. Les dispositifs sont généralement appréhendés comme des « expérimentations » de solutions.

Le caractère processuel de l’innovation6 incite à envisager les dispositifs comme incertains, fruits de nombreux ajustements, afin de comprendre les processus de légitimation et de construction des grandeurs de l’action publique. Nous étudierons tout d’abord les deux initiatives pionnières de Sciences-po Paris et de l’ESSEC. Le statut de précurseur est largement construit, et ne tient pas uniquement à la contingence temporelle, mais bien à la mobilisation de ressources, notamment politiques, et à des logiques de positionnement dans l’espace des formations supérieures. Leur consécration comme modèles de l’action publique d’égalité des chances dans le supérieur tient également à une logique de marginalisation des initiatives potentiellement concurrentes.

L’annonce par la direction de l’IEP de Paris, en février 2001, de la mise en place d’une procédure d’accès dérogatoire destinée à des lycéens de zones défavorisées met à l’agenda politico-médiatique le problème des inégalités d’accès à l’enseignement supérieur sélectif. Le directeur de Sciences-po met en avant la nécessité de « démocratiser l’accès aux élites »7, jouant ainsi le rôle de lanceur d’alerte8. Cependant, la dénonciation du risque social s’accompagne de l’annonce de la mise en place d’une solution, sur laquelle s’ancre la polémique. L’imputation de responsabilité est en effet clairement incluse dans le discours de la direction de l’IEP : elle propose un programme dérogatoire au concours, une désignation des victimes incarnés par les élèves des lycées partenaires ; la conférence de presse inclut l’intervention d’un sociologue réalisant une enquête sur les biais sociaux de l’ « examen d’entrée ». Un intense débat médiatique de plusieurs mois suit l’annonce de la création des CEP, débat qui est par la suite régulièrement réactivé jusqu’en 2010. La polémique est notamment rouverte deux ans après, à l’occasion de l’annonce par la direction de l’ESSEC de l’élaboration d’un dispositif concurrent : le programme « pourquoi pas moi ? » (PPM), fondé sur un tutorat d’accompagnement.

La mise en place de ces deux dispositifs au début des années 2000 peut être comprise comme la mobilisation d’entrepreneurs de cause qui travaillent à construire un problème politique. Ils « grandissent » ainsi leurs dispositifs localisés pour en faire des instruments

6 Madeleine Akrich, Michel Callon, Bruno Latour, « A quoi tient le succès des innovations ? », Gérer et comprendre, n°11 et 12, 1998.

7IEP de Paris, « Conventions ZEP.L’excellence dans la diversité », communiqué de presse, 20 février 2001. 8 Le terme est habituellement employé dans l’analyse des politiques du risque, à la suite de Francis Chateauraynaud, Didier Torny, Les sombres précurseurs. Une sociologie pragmatique de l’alerte et du risque, Paris, Editions de l’EHESS,1999.

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d’action publique. Ils tirent de leur situation et de leurs appartenances particulières (sociales, territoriales, culturelles, religieuses…) une capacité à « voir ce que les autres acteurs n’ont pas encore vu »9, et à en tirer profit, par le biais de transactions avantageuses. Le grandissement des deux dispositifs et leur consécration comme les deux modèles de dispositifs possible pour traiter le problème de l’égalité des chances tient d’une part au cadrage technique10 du débat établi par les journalistes spécialistes de l’éducation. Pour des raisons qui tiennent à leurs pratiques professionnelles routinières11, notamment liées à la nature des sources d’information12, ils présentent le problème de la démocratisation de l’enseignement supérieur comme structuré autour d’une opposition irréductible entre les deux dispositifs de Sciences-po et de l’ESSEC, qui deviennent des modèles : la voie d’accès dérogatoire au concours, et le tutorat d’accompagnement. D’autre part, la mobilisation d’appuis politiques (principalement au ministère de l’Éducation nationale pour l’IEP de Paris, de la Ville pour l’ESSEC) jouent également un rôle dans la pérennisation des dispositifs, et leur consécration comme modèles.

Les ressources mobilisées par les deux précurseurs, ainsi que l’inscription des dispositifs dans les logiques de concurrence entre grandes écoles, sont déterminantes dans la consécration du tutorat comme nouvel instrument de la démocratisation de l’enseignement supérieur. La direction de l’IEP de Paris recourt à la voie législative pour assurer la pérennité des conventions d’éducation prioritaire, menacée par des recours judiciaires déposés par le syndicat étudiant UNI. Ce faisant, si elle assure l’assise légale de son dispositif, elle empêche – ou du moins rend très incertaine - sa duplication : l’article de loi autorise nommément l’établissement à procéder à des recrutements dérogatoires au concours13. Le dispositif paraît ainsi impossible à reproduire aux yeux de nombre de dirigeants d’autres grandes écoles, sauf à prendre le risque d’annulation du concours en cas de recours devant le tribunal administratif.

En revanche, l’extension du dispositif de tutorat de l’ESSEC à d’autres établissements est actée dès l’élaboration du dispositif et la première convention établie avec le ministère de la Ville, qui s’engage à financer à terme d’autres dispositifs de tutorat. La Conférence des

9 Pierre-Paul Zalio, Mondes patronaux et territoires. Esquisse d’une théorie sociologique de l’entrepreneur, thèse pour l’obtention de l’habilitation à diriger les recherches en sociologie, Institut d’Etudes Politiques de Paris, 9 décembre 2005.

10 Sur les effets de technicisation/politisation du traitement de l’information selon la division du travail entre journalistes spécialisés et généralistes, voir Dominique Marchetti, « La division du travail journalistique et ses effets sur le traitement de l’ ‘‘événement’’. L’exemple du ‘‘scandale du sang contaminé’’ », in Ivan Chupin, Jérémie Nollet (dir.), Journalisme et dépendances, Paris, L’Harmattan, 2006.

11 Sur les journalistes spécialisés dans l’éducation, voir Jean-Gustave Padioleau, « Système d’interaction et rhétoriques journalistiques », Sociologie du Travail, vol. 76, n° 3, 1976.

12 Dominique Marchetti, Contribution à une sociologie des transformations du champ journalistique dans les années 80 et 90. A propos d’ « événements sida » et du « scandale du sang contaminé », Paris, thèse de sociologie, Ecole des hautes études en sciences sociales, 1997 ; Dorine Bregman, « Le cadrage du débat public. Le projet de CSG », Réseaux, n°75, 1996.

13 Loi n° 3175, 3200 portant diverses dispositions d’ordre social, éducatif et culturel, J.O n° 164 du 18 juillet 2001.

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grandes écoles (CGE) joue également un rôle déterminant dans le processus de généralisation du tutorat comme instrument de démocratisation. La charte pour l’égalité des chances dans l’accès aux formations d’excellence signée en janvier 2005 (qui donne un cadre règlementaire à ces dispositifs) incite les établissements du supérieur à opter pour le tutorat. Le financement de sa mise en œuvre par la délégation interministérielle à la Ville prend une dimension plus contraignante, les fonctionnaires en charge du dossier refusant d’allouer des crédits à d’autres types de dispositifs.

Au début des années 2000, l’IEP et l’ESSEC ne sont pas les seuls établissements à mettre en place des initiatives locales d’égalité des chances. Nombre d’écoles amorcent ainsi des réformes dans leurs modes de fonctionnement, dont la diversité est une dimension parmi d’autres. Les IEP sont particulièrement actifs, que ce soit à Lille, à Aix-en-Provence ou à Bordeaux. L’INSA de Lyon et l’ENSAM ont également mis en œuvre des programmes. Jusqu’en mai 2004, le programme « pourquoi pas moi ? » de l’ESSEC n’est qu’une initiative parmi d’autres, qui n’a pas encore pris le statut de modèle alternatif à la voie dérogatoire au concours de Sciences-po Paris. La consécration des deux dispositifs comme modèles s’explique par un différentiel de ressources évident. Les écoles les plus réputées sont aussi celles qui cumulent l’accès aux postes de pouvoir économique, politique ou administratif, soit par le biais d’anciens élèves, soit par celui des enseignants. Mais il s’agit également d’un processus de marginalisation des initiatives concurrentes, qui tient notamment à l’action des acteurs de l’ESSEC au sein de la CGE.

Les mesures d’incitation à l’égalité des chances dans l’enseignement supérieur sont largement ainsi procédurales, et ne font pas référence aux contenus des pratiques de tutorat ni aux résultats attendus, en dehors de principes larges comme l’ « ouverture » et la « démocratisation ». Cependant, ce mode de régulation publique fondé sur l’incitation évolue progressivement, à la fin des années 2000, vers une logique plus contraignante formulée en terme d’objectifs par le personnel politique.

2. L’articulation tardive à une norme de résultat explicite

Les dispositifs reposant sur une modification des voies d’admission dans les filières sélectives sont initialement définis comme des expérimentations marginales. L’intervention du personnel politique qui s’en saisit dans le cadre d’un débat sur la discrimination positive contribue à redéfinir les frontières du pensable et du faisable dans l’action publique de démocratisation de l’enseignement supérieur.

En 2009, la politique d’égalité des chances dans l’enseignement supérieur connaît une nouvelle impulsion sous l’égide de du cabinet et de la DGES (direction générale de l’enseignement supérieur) du ministère de l’Enseignement supérieur. La mise en place d’un label unique, baptisé « cordées de la réussite », tend à unifier les différents dispositifs des grandes écoles comme des universités. Mais il constitue aussi un moyen d’évaluer les multiples programmes. La mise à l’agenda administratif et politique de la question de

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l’évaluation participe de l’initiation de mesures plus contraignantes, définies en termes de quotas14.

La mise en place des « cordées de la réussite » est annoncée par voie de presse en mai 2008 par la ministre de l’Enseignement supérieur et la secrétaire d’État à la Politique de la ville. La mesure vise à unifier les différents dispositifs de partenariat entre établissements du supérieur et du secondaire encadrant des pratiques de tutorat étudiant-lycéen. Cent établissements sélectionnés sont labellisés à la fin de l’année 2008. La mesure bénéficie d’un budget de deux millions d’euros, dont les trois quarts sont fournis par le Secrétariat d’État à la Ville. La ministre de l’Enseignement supérieur Valérie Pécresse trouve également là une mesure consensuelle, sur laquelle elle peut communiquer, après une période de réforme des politiques de l’enseignement supérieur ayant suscité de nombreuses mobilisations de contestation.

Le lancement des cordées s’apparente largement à une logique de recensement et d’évaluation des multiples mesures incitatives mises en place jusqu’en 2008 dans le cadre de la charte pour l’égalité des chances signée en 2005. En effet, la « fiche » que doivent fournir les recteurs demande de préciser les établissements du secondaire et du supérieur participant au partenariat, le nombre d’élèves concernés et celui d’élèves scolarisés dans des lycées des quartiers prioritaires, ainsi que les modalités concrètes du partenariat, comme le montant et les sources de financements. L’un des enjeux de la mise en place de cette nouvelle dotation financière est l’évaluation des usages qui ont été faits des crédits publics distribués depuis 2005.

Les « cordées » sont reconduites en 2010, dans une logique incitative : l’objectif fixé par le personnel ministériel est de 300 dispositifs labellisés à la fin de l’année. La relance est dotée d’un budget de cinq millions d’euros (un million sur le budget du ministère de l’Enseignement supérieur, et quatre fournis par les politiques de la ville). L’accroissement des financements tient une fois de plus à l’articulation de la mesure aux politiques de la ville : les « cordées de la réussite » sont intégrées au volet éducatif de la politique de « dynamique espoir banlieues » initiée en février 2008.

Parallèlement à la mise en place d’une politique incitative d’égalité des chances, des propositions relevant de mesures contraignantes sont mises à l’agenda médiatique puis politique. L’idée de mettre en place des percentage plans15 est avancée par Patrick Weil lors d’un colloque sur la « reconnaissance des minorités » le 28 octobre 2004. Sa proposition de mettre

14 La technique du quota est un outil de discrimination positive consistant à soustraire à la concurrence un volume global de biens qui sont alloués à un groupe spécifique. Elle se distingue de la technique des places réservées, qui consiste à définir un nombre de places réservées dans des organismes ou des secteurs d’emploi précis. Voir Gwénaële Calvès, La discrimination positive, Paris, PUF, 2004.

15 Pour une présentation de ces régimes d’admission mis en place dans certains Etats américains, voir Saul Geiser, « Berkeley’s top 4percent plan : design, implementation and outcomes » , Guy Lavergne, « The Texas top 10% law : implementation and results », interventions au séminaire EducElites, 14 avril 2008.

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en place « un droit d’accès des meilleurs élèves des lycées de France aux classes préparatoires »16 et aux filières sélectives de l’enseignement supérieur comme les IEP ou Paris-Dauphine, est reprise dans une dépêche AFP puis dans la presse nationale. Celle-ci ouvre un débat, régulièrement alimenté par les journalistes et le personnel politique. Entre autres, Nicolas Sarkozy, ministre de l’Economie et des finances, la soutient en novembre 2005. Elle est reprise dans une proposition de loi déposée par des députés socialistes en décembre 200517, puis dans une seconde déposée par des sénateurs socialistes en janvier 200618, qui ne sont pas adoptées.

Le président Jacques Chirac prend également position sur la question en janvier 2006, demandant que les classes préparatoires augmentent progressivement la proportion de boursiers parmi leurs étudiants, avec un objectif à atteindre de 30% en 200919. Pour autant, cet objectif fixé par le chef de l’État ne donne pas lieu à une traduction législative ou règlementaire. Il est ensuite repris début 2008 par son successeur, Nicolas Sarkozy, dans le cadre du lancement de la « dynamique espoir banlieues », auquel est articulé un percentage plan d’accès aux classes préparatoires de 5 à 8% des élèves volontaires « les plus méritants de chaque établissement ». La mise en œuvre des deux mesures à la rentrée de septembre 2008 est actée par le comité interministériel des villes du 20 juin 2008. L’objectif d’intégration des 5% des meilleurs élèves des lycées ne s’accompagne pas, en 2008, de mesures systématiques spécifiques, et se révèle difficile à mettre en œuvre ainsi qu’à évaluer20. Les discours politiques de la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Secrétaire d’État à la Ville se recentrent en 2009 sur l’objectif des 30% de boursiers en CPGE. Il s’agit d’un objectif global, sur l’ensemble des effectifs des classes préparatoires, et non par établissement ou par classe. Il est atteint à la rentrée 2009, en partie grâce à une réforme des plafonds de revenus du niveau 0 d’attribution de bourses en 200821. Les dirigeants des lycées à

CPGE incitent également activement leurs étudiants à solliciter des bourses22. Enfin, l’objectif chiffré est également atteint grâce à la mise en place de classes préparatoires à l’enseignement supérieur (CPES23) sur le modèle des

16 « Patrick Weil pour l’accès en classes prépa des meilleurs de chaque lycée », AFP, 28 octobre 2004. La proposition est reprise dans La République et sa diversité, Paris, Seuil, coll. « La République des idées », 2005. 17 Proposition de loi n° 2688, 2708, première séance, 1er décembre 2005, session ordinaire 2005-06, Assemblée nationale.

18 Proposition de loi n° 182, séance du 31 janvier 2005, session ordinaire 2005-06, Sénat. 19 Discours des vœux à la presse, le 4 janvier 2006.

20 Les proviseurs de lycées ne disposent pas d’informations sur les futurs boursiers du supérieur. Ils se fondent donc sur les informations disponibles concernant les bourses de l’enseignement secondaire, en extrapolant sur cette base. Intervention d’une proviseure de lycée, réunion du groupe « ouverture sociale » de la CGE, 14 octobre 2008.

21 Le plafond du revenu parental pris en compte pour l’attribution de bourses sur critères sociaux a été élevé de près de 5000 euros.

22 Entretien avec un enseignant de CPGE,Henri IV, le 14 février 2008.

23 Les CPES sont des classes préparatoires expérimentales d’un an, recrutant des bacheliers issus de lycées situés dans les zones des politiques de la ville, afin de leur permettre d’entrer ensuite dans les filières préparatoires « classiques ».

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expérimentations lancées en 2006 par le lycée Henri IV à Paris, Thiers à Marseille ou Camille Jullian à Bordeaux.

L’objectif de 30% de boursiers est alors étendu aux grandes écoles par une injonction présidentielle en décembre 2009, reprise par la ministre de l’Enseignement supérieur en janvier 2010. Cette demande se heurte aux résistances de la plupart des grandes écoles les plus prestigieuses, et du bureau de la CGE. Cependant, des écoles de gestion de la « petite porte » ont mis en place en 2009 un concours commun destiné aux diplômés de premiers cycles technologiques. Par ailleurs, l’ESCP a également instauré en 2009 un concours spécifique destinés à des diplômés de BTS ou de DUT, qui suivent une année de licence 3 d’économie à l’université Paris XIII complétée d’heures de cours à l’ESCP, avant de passer un concours d’entrée spécifique. Par ailleurs, les dirigeants de plusieurs écoles, qui se regroupent au sein d’une même structure avant de fusionner, ont établi en 2008 un groupe de travail sur la question de l’égalité des chances, dont le cahier des charges prévoit une réflexion sur un élargissement des voies de recrutement « au-delà des prépas traditionnelles ».

L’inflexion vers des mesures contraignantes, initiée en 2008 par le personnel politique gouvernemental, rejoint et s’appuie ainsi sur des initiatives déjà mises en place par certaines grandes écoles. Nombre d’entre elles ont également élaboré des mesures de gratuité – ou de tarifs préférentiels – des inscriptions au concours pour les boursiers. Valérie Pécresse a demandé une généralisation des mesures de dispense des frais d’inscription pour les boursiers du supérieur. La ministre de l’Enseignement supérieur demande également aux écoles de la CGE de « rénover » les épreuves des concours, en modifiant les « épreuves qui pourraient se révéler socialement discriminantes ».

II.

U

NE NOUVELLE CATÉGORIE D

ACTION PUBLIQUE ÉDUCATIVE

1. Les lycéens de la diversité : l’individualisation du traitement des inégalités

scolaires

La catégorie est construite sans adversaire24 et sans mobilisation de victimes. Ce sont les chargés de mission des grandes écoles mettant en œuvre les dispositifs qui définissent la catégorie des lycéens sélectionnés dans les lycées partenaires. Si le choix des lycées partenaires est largement opéré en collaboration avec l’administration déconcentrée de l’Éducation nationale, la sélection des lycéens est généralement opérée par les chargés de mission. Le succès de la politique de diversité dans l’enseignement supérieur tient paradoxalement à la marginalisation des acteurs de l’enseignement secondaire, et notamment des enseignants et des chefs d’établissement.

Ils travaillent à construire une catégorie nouvelle qui constitue un public spécifique de

24 Philippe Juhem, « La logique du succès des énoncés humanitaires : un discours sans adversaires », Mots, n° 65, 2001, p. 9-27.

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leur activité : le lycéen de milieu modeste à fort potentiel. Il incarne une figure idéologique dans le sens où il est une « construction agissante sur le groupe professionnel »25 : l’identification de l’activité, sa délimitation et sa légitimation passent principalement par cette catégorisation d’un usager spécifique. Cette catégorie est construite par distinction avec la figure de l’élève en difficulté, caractéristique des politiques éducatives fondées sur le problème de l’échec scolaire26, mais également avec celle de l’élève brillant des lycées de centre ville. Il s’agit d’établir une sorte de figure alternative, entre le modèle de l’élève de milieu défavorisé en échec scolaire et celui de l’enfant de catégorie favorisée qui réussit. On met en avant le promu social potentiel comme catégorie cible des dispositifs de diversité.

Les représentations des chargés de mission à l’égard de la figure du lycéen défavorisé prometteur sont marquées du sceau du misérabilisme en tant que membres de catégories sociales populaires et/ou immigrées. On retrouve donc ici le biais intellectuel analysé par J.-C. Passeron et C. Grignon27 dans les travaux de sciences sociales et les œuvres littéraires traitant de la culture populaire. Les lycéens des catégories populaires sont perçus relativement aux groupes dominants, dont sont issus la plupart des étudiants auxquelles ils sont confrontés en tant que personnel d’une grande école. Les discours sur les lycéens s’articulent autour du caractère déficitaire et hétéronome de leurs culture et pratiques. Les représentations produites des lycéens se structurent autour de conceptions en terme de manque et de privation.

Les « jeunes issus de milieux modestes à fort potentiel » sont caractérisés par un mécanisme psychosociologique d’ « autocensure ». Le terme désigne un manque d’information et d’ambition, qui serait au fondement de leur non-orientation vers les filières sélectives longues comme les grandes écoles. La socialisation familiale et scolaire des enfants de catégories défavorisées serait responsable d’un « manque d’ambition », d’une « incapacité à se projeter dans un avenir à long terme et donc dans des études longues », et d’une méconnaissance des différentes filières d’enseignement supérieur dont les grandes écoles28. Une seconde privation caractérise les représentations des chargés de mission sur les lycéens : leur « manque de capital culturel ». Par ailleurs, les chargés de mission mettent en avant une absence de sens et de goût du travail chez le public visé : « C’est des jeunes qui ne savent pas travailler »29. Ils soulignent leur « attitude face à la difficulté. Ils travaillent beaucoup, mais

25 Valérie Boussard, Marc Loriol, Sandrine Caroly, « Catégorisation des usagers et rhétorique professionnelle : le cas des policiers sur la voie publique », Sociologie du travail, vol. 48, n° 2, 2006, p. 209-225.

26 Voir Bertrand Ravon, L’échec scolaire, op.cit.

27 Jean-Claude Passeron, Claude Grignon, Le savant et le populaire. Populisme et misérabilisme en sociologie et en littérature, Paris, Le Seuil, coll. « Hautes études », 1989.

28 Le rapport du Sénat sur la « Diversité sociale dans les classes préparatoires aux grandes écoles » présente une bonne synthèse des discours tenus sur le problème par l’ensemble des acteurs : Jacques Legendre (président), Yannick Bodin (rapporteur), Diversité sociale dans les classes préparatoires aux grandes écoles : mettre fin à une forme de ‘délit d’initié’, Rapport d’information fait au nom de la commission des Affaires culturelles par la mission d’information portant sur la diversité et l’égalité des chances dans la composition des classes préparatoires aux grandes écoles, n° 441, 2006-07, p. 60 et suiv.

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face à un problème de maths, ils vont abandonner au bout de quinze minutes. Ils ne sont pas capables de rester trois heures sur le même problème, simplement par fierté, parce qu’on est un bon élève et qu’on s’acharne. Ils ne le font pas. »30

Le processus de normativation du public s’articule avec une absence de prise en compte de l’espace de production des discriminations que sont les dispositifs de recrutement des grandes écoles. Le problème de l’inégalité des chances est ainsi envisagé comme individuel, lié aux lycéens eux-mêmes. Il se définit par son public, non comme un processus intégré au système de sélection scolaire ou des grandes écoles. On retrouve donc ici les logiques qui président à l’action publique de lutte contre les discriminations à l’embauche telle que mise en œuvre par les associations d’insertion professionnelle à l’encontre des « jeunes diplômés de quartier difficile »31.

Le public des « potentiellement victimes » constitue une nouvelle catégorie visible de l’action publique. Cette visibilité de la catégorie permet d’obtenir des financements spécifiques. D’une part, il s’agit de financements clairement fléchés sur ce type de dispositifs. D’autre part, cela permet également d’obtenir des financements des collectivités territoriales. La catégorie ainsi constituée est « mesurable », et permet de produire une évaluation à destination des financeurs. Et elle est communicable, c’est-à-dire qu’elle peut donner lieu à production de données sur lesquelles l’institution peut s’appuyer pour communiquer sur son action, à travers l’organisation de colloques, rencontres ou journées d’études sur le thème.

En pratique, les bénéficiaires des dispositifs sont sélectionnés à double titre : d’abord en tant qu’élèves de lycées situés en « zones défavorisées », et ensuite en tant qu’individus « prometteurs » ou « méritants ». Les modalités de ciblage des lycéens tutorés varient d’un dispositif à l’autre, notamment en fonction de la marge d’autonomie face aux administrations scolaires dont dispose la grande école dans la mise en place de son dispositif. La pratique même de sélection des élèves est parfois absente de certains dispositifs. On peut cependant repérer des caractéristiques communes aux dispositifs.

Les responsables de projet de l’ESSEC et ceux de l’IEP de Paris ont définis des critères très précis et largement semblables de sélection des établissements et des élèves. Un premier critère de sélection des établissements susceptibles d’être conventionnés est territorial et s’appuie sur les découpages des politiques de zones d’éducation prioritaire (ZEP), plus fréquemment, des politiques de la ville : les lycées doivent être classés en ZEP, en zone sensible, ou en zone de prévention de la violence. Ces critères sont complétés par deux autres : la proportion d’enfants des CSP défavorisés, définies comme chômeurs, ouvriers, employés et retraités, et la proportion d’élèves issus de collèges classés en ZEP. Pour l’ESSEC, et pour la plupart des autres grandes écoles qui ont adapté son dispositif, les critères de sélection des établissements sont relativement

30 Ibid.

31 Voir Fabrice Dhume, « De la discrimination du marché au marché de la discrimination. Les fausses évidences de la lutte contre les discriminations », Mouvements, n°49, 2007, p. 128-137.

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objectivés, bien que rarement rendus publics : la condition première est la proximité géographique de la grande école, à laquelle s’ajoute la localisation en « zones défavorisées », zones dont la définition est relativement fluctuante : elle peut s’appuyer sur des critères semblables à ceux retenus par l’IEP de Paris, mais relever aussi des représentations que les responsables de la grande école ont des territoires locaux ; enfin, cette définition peut tout simplement être opérée par des responsables des administrations décentralisées de l’éducation, selon des logiques objectivées statistiquement ou selon leur propre vision de ce que sont les lycées « défavorisés ».

L’IEP de Paris délègue la sélection des élèves aux enseignants du lycée, mais impose les modalités de cette sélection (le type d’épreuve). Cette procédure met donc principalement l’accent sur des critères scolaires, et n’est pas véritablement discriminante au plan socio-professionnel au sein d’un lycée. À l’inverse, l’ESSEC et des grandes écoles membres de la CGE portent avant tout une plus grande attention au critère social et à la sélection des lycéens plus qu’à celle des lycées. Dans ces cas, qui sont les plus nombreux, la notion de mérite scolaire est compensée voire dépassée par la prise en compte des conditions sociales des « lycéens prometteurs de la diversité ». Un autre élément vient ajouter au caractère variable de la définition de la catégorie ciblée. Il s’agit de la prise en compte ou non du critère ethnique et de son degré de publicité. Les pratiques de valorisation des origines ethno-culturelles des candidats sont présentées comme publiquement indicibles par les acteurs. L’IEP de Paris a publié, dans le rapport de 2006 des conventions d’éducation prioritaire, un bilan statistique sur les origines sociales et « géographiques » des candidats32.

Le critère ethno-culturel, même présenté sous l’angle de la nationalité, est rarement exposé publiquement par les acteurs. Il apparaît en filigrane dans les discours de certains acteurs des grandes écoles, à travers l’exotisation de la représentation qu’ils se font des lycéens tutorés. « Pugnaces », « tenaces », ces lycéens ont une « épaisseur forgée dans les difficultés qu’ils ont rencontrées ». L’intégration de ce type de critère rappelle l'ambiguïté caractéristique du ciblage territorial des politiques de ZEP, appuyées sur celui des politiques de la ville, qui peuvent être analysées comme des politiques indirectes de discrimination positive ethnique (Morel 2002 ; Doytcheva 2007).

Il s’agit donc pour les grandes écoles d’intégrer dans l’enseignement secondaire certaines logiques de sélection d’un groupe d’« élus » considérés comme pouvant prétendre à un meilleur avenir scolaire que celui auquel les prédestine leur appartenance sociale. En 2008, une cinquantaine d’écoles a mis en place des dispositifs de tutorat en partenariat avec en moyenne quatre à cinq lycées, soit quelques milliers de lycéens impliqués (3000 à 5000) sur un total de 1,5 million de lycéens recensés en 2008-2009 par le ministère de l’Éducation nationale33. Si ces dispositifs restent de faible ampleur par le nombre de lycées et de lycéens impliqués, ils

32 Sciences Po, Conventions éducation prioritaire. Bilan de l’année 2006, octobre 2006, site de l’

IEP de Paris,

novembre 2006 : http://www.sciences-po.fr/upload/Espace_presse/Dossiers_thematiques/bilancep_annee06.pdf

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A titre indicatif, le ministère de l’Enseignement supérieur dénombre 79 000 étudiants en CPGE. Source : site

du ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche. http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/

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constituent pour autant ce qui est devenu une politique de diversité dans l’enseignement supérieur.

La notion de « diversité » se généralise pour désigner cette catégorie nouvellement définie, dans la bouche des acteurs des grandes écoles comme dans celle des commentateurs. Cette notion évoque non pas l’ensemble des élèves des lycées de « zones sensibles », mais une petite fraction de ceux-ci, sélectionnés comme « méritants », « prometteurs » ou « divers ». Ainsi, la politique de démocratisation des grandes écoles est marquée par le principe élitiste, s’appuyant sur la définition d’une catégorie restreinte, cible des dispositifs, et sur l’invention de procédures de sélection dans le secondaire. Les reformulations du problème des inégalités s’expliquent aussi par les interprétations différentes que les dirigeants font de ce qu’est la légitimité de leurs écoles et de leur déficit éventuel de légitimité. Face à l’accusation de « formatage », d’incapacité à former des élites créatives et innovantes, les grandes écoles ont recours à la figure du « jeune issu de la diversité ».

2. Une catégorie instrumentale ? La diversité à l’aune de problématiques

locales et sectorielles

La diversité est saisie et construite comme une solution, ou une ressource, pour traiter des problématiques déjà construites. La question de la justice sociale est traduite34 dans des grammaires d’action plus larges, intégrant d’autres enjeux plus spécifiques, selon une dynamique bien connue dans l’étude de la construction d’un problème public. Il s’agit à présent d’étudier les modes d’appropriation des acteurs des grandes écoles à l’aune de contraintes plus spécifiques, liées à leur position dans des configurations ou des secteurs particuliers. Ce sont les raisons d’agir35 avancées par les responsables et chargés de mission qui sont ainsi étudiées de manière compréhensive36 : elles éclairent sur les usages qui sont faits des dispositifs, et sur la mise en sens et en pratiques de la diversité. Parmi ces usages, retenons ici deux types qui tendent à intégrer aux pratiques une logique de résultat, antérieure

34 La notion de traduction est développée par Michel Callon. Une partie des activités des acteurs consiste à traduire les normes, objets et problèmes qu’ils portent. Ce processus de « traduction » correspond à des opérations de problématisation, de mobilisation et d’enrôlement des acteurs, et à un travail d’intéressement par leur agrégation et leur ralliement à une cause. Michel Callon, « Éléments pour une sociologie de la traduction. La domestication des coquilles Saint-Jacques et des marins pêcheurs dans la baie de Saint Brieuc », L’Année sociologique, n°36, 1986, p. 174.

35 Le terme est emprunté à la sociologie de l’action collective. Il désigne à la fois les motivations, entendues comme « conditions initiales de l’action », et les motifs, définis comme « une verbalisation permettant, en situation, de produire une justification » de l’action. Le recours à l’explication par les raisons d’agir permet d’intégrer à la fois les dimensions subjectives et les contraintes objectives de l’action. Olivier Fillieule « Propositions pour une analyse processuelle de l'engagement individuel », Revue française de science politique, vol. 51, n° 1, 2001, p. 199-215.

36 Sur la reconstruction problématique des raisons d’agir à partir des enquêtes, voir Paul Lazarsfeld, « The Art of Asking Why ? », National Marketing Review, vol. 1, n° 1, 1935, p. 32-43.

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à sa formulation dans la sphère politique. Un premier usage concerne la question de l’augmentation du nombre de diplômés. Un second fait des dispositifs de diversité une solution à la désaffection de certains secteurs d’activité.

La question de l’accroissement du nombre d’étudiants formés est un problème central pour bon nombre d’écoles. Pour les écoles d’ingénieur, la croissance est un objectif général, défini par les autorités politiques et administratives centrales. « Grossir » est également un objectif pour d’autres écoles, comme des IEP, mais défini de manière plus autonome par la direction de l’école. Pour bon nombre des dirigeants d’écoles d’ingénieur rencontrés, cet objectif de croissance est au cœur de leurs préoccupations quotidiennes dans la gestion de l’école et des réformes à mettre en œuvre. Ils ne conçoivent la question de l’égalité des chances qu’en lien avec cette question centrale de l’augmentation du nombre d’ingénieurs formés.

La pénurie d’ingénieurs formés au regard de la demande du marché de l’emploi est interprétée par les acteurs des écoles d’ingénieurs et nombre d’experts ministériels à l’aune d’un problème qui émerge à la fin des années 1990 : celui de la « crise des vocations scientifiques »37. La difficulté des écoles à remplir leurs bancs et à satisfaire la demande de diplômés en aval est interprétée en terme de désaffection pour les études scientifiques, et donc d’ingénieur. Les dirigeants identifient alors les caractéristiques sociologiques des étudiants recrutés comme une dimension complémentaire à ce problème. En effet, la sous-représentation des femmes38 et des étudiants issus de catégories populaires sont interprétés en lien avec ce problème. Reprenons schématiquement le raisonnement, qui, s’il n’est pas toujours aussi clairement explicité, sous-tend nombre d’entretiens avec des dirigeants d’écoles d’ingénieur. Les dirigeants confrontés à la difficulté d’augmenter le nombre de recrutés, identifient un déficit de candidats, qu’ils attribuent à une désaffection pour les formations scientifiques. Cette désaffection serait avant tout le fait des catégories populaires et des femmes, qui ne considèrent plus la formation d’ingénieur comme une voie d’accès à une position sociale valorisée. Tous les ressorts du raisonnement reposent ainsi dans une psychologisation de l’explication de processus macro-sociaux.

C’est donc sur ce point que s’opère l’articulation avec la question de l’égalité des chances. Les dispositifs de tutorat sont souvent conçus comme un moyen de communication à destination des catégories sous-représentées, devant permettre de susciter des candidatures. Il s’agit d’ « élargir le vivier de recrutement ». Les dispositifs de tutorat s’inscrivent dans les pratiques plus larges de communication des écoles visant à susciter des candidatures supplémentaires.

37 Nous renverrons ici aux travaux de Bernard Convert, et notamment Les impasses de la démocratisation scolaire. Sur une prétendue crise des vocations scientifiques, Paris, Raisons d’agir, 2006. Il explique comment la baisse statistique des inscriptions universitaires dans les filières initiée au milieu des années 1990 est ramenée dans les discours journalistiques, politiques voire scientifiques à une explication psychologique qui serait liée à des comportements individuels d’orientation vers d’autres filières devenues plus attractives. Il montre que la « désaffection » concerne en réalité toutes les formations académiques théoriques. Elle s’explique par des évolutions dans les processus d’orientation pré- et post-bac, notamment la concurrence avec les formations professionnalisées qui accueillent massivement les « nouveaux bacheliers ».

38 La sous-représentation des femmes est caractéristique de la plupart des populations étudiant en école d’ingénieur, à l’exception notable de certaines filières, notamment celles spécialisées dans la chimie.

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Plus rarement, le tutorat peut également être approprié comme une voie de recrutement. Pour certaines écoles, comme des IEP ou des écoles d’ingénieur disposant de classes préparatoires intégrées, recrutant ainsi après le baccalauréat, le tutorat constitue une forme de prérecrutement, ou de présélection de candidats qui sont incités à présenter le concours d’entrée, ou plus souvent, à intégrer l’établissement par des voies d’admission sur dossier. Cette logique d’articulation du tutorat avec des pratiques de recrutement est également à l’œuvre dans certaines classes préparatoires. Ainsi, des proviseurs de lycée sont incités à faire figurer la participation d’un élève à un programme tutoral sur le dossier scolaire, critère pris en compte par les CPGE au moment de la sélection des élèves. Les lycéens tutorés des établissements secondaires partenaires tendent ainsi à constituer de nouveaux viviers de recrutement pour les écoles, et le tutorat une voie de présélection de candidats. Ces pratiques relèvent, pour ce que nous avons pu en apprendre, plutôt d’arrangement locaux, entre des responsables de grandes écoles ou de CPGE, et des lycées partenaires de leurs dispositifs.

Les grandes écoles sont, à des degrés divers, soumises à des pressions exercées par les pouvoirs locaux, ou par des entreprises locales qui leur versent la taxe d’apprentissage. Les plus « petites » écoles de gestion et d’ingénieur se voient ainsi confrontées au problème de la désaffection des carrières dans les PME. Entreprises et pouvoirs locaux leur reprochent ainsi de ne pas fournir en main d’œuvre les structures locales, par exemple les sous-traitants des grandes entreprises. Le problème posé est celui de la pénurie de cadres dans les PME qui peinent à recruter des diplômés de grandes écoles, qui leur préfèrent les grandes entreprises. Les dirigeants d’établissement sommés de fournir en cadres les entreprises de la région établissent un lien avec la question de la mixité sociale de leurs étudiants.

Des pratiques informelles de sélection sont ainsi mises en place, visant à favoriser, principalement dans les voies de recrutement dérogatoires, les candidatures d’étudiants socialement défavorisés, dont on suppose qu’ils seront moins mobiles géographiquement.

Pour le cas des écoles devant fournir des corps d’Etat, ou préparant aux concours administratifs, comme l’école des Mines, l’école Polytechnique, les écoles vétérinaires, ou encore, les IEP, la crise de légitimité s’accompagne d’une remise en question possible de leur statut d’école publique. Il s’agit pour leurs dirigeants de travailler à remplir les bancs des filières service public. L’ouverture sociale est parfois perçue comme une solution à ce problème. Les dirigeants comprennent la désaffection pour les carrières publiques comme découlant de la féminisation de la population étudiante, ainsi que de l’homogénéité sociale des étudiants, qui en raison de leurs origines sociales, seraient plus portés vers les carrières dans le secteur privé ou libéral. Le problème est donc envisagé comme un problème de recrutement, et les solutions envisagées visent à intégrer des étudiants socialement défavorisés39.

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Les mesures mises en place dans ce sens n’ont rien d’officiel, et s’incarnent dans des pratiques de discrimination positive dans les dispositifs de sélection oraux. Elles constituent également une forme de résistance à l’égard de la définition dominante du problème et de son mode de traitement. Les dirigeants de ces écoles donnent ainsi, de manière très officieuse, des consignes aux jurys faisant passer les épreuves orales, afin qu’ils « valorisent les candidatures atypiques ». Les dirigeants d’école mettent ainsi en place des mesures relevant très largement du bricolage, dans lesquelles ils font jouer toute marge de manœuvre qui s’offre à eux dans les dispositifs de sélection ne relevant pas du concours écrit. Les sélections sur dossier peuvent ainsi être également une voie investie pour diversifier les origines sociales des étudiants recrutés.

« Et l’autre différence avec l’IEP de Paris, eux, ils ont cette loi qui leur permet d’expérimenter, et dont je rappelle que le législateur l’a adoptée uniquement pour l’IEP de Paris. C’est écrit noir sur blanc. Donc nous on a essayé de faire la même chose, et qu’on a été discuter au rectorat, ils nous ont dit ‘ben si vous faites ça, il n’y a aucun problème, au premier recours contentieux, votre concours est annulé’. Donc on essaie de prendre des initiatives de démocratisation, mais dans des systèmes beaucoup plus bricolés et artisanaux, de partenariat avec [des] lycées. (…) Ceci dit éventuellement, rien ne nous empêchera, sauf qu’on le fera et qu’on le dira pas, de… dans les gens qui voudront [rentrer en deuxième année, ou dans nos masters], je pense que c’est évident, même si on ne va pas le marquer sur le site web, que entre les candidats qu’on va trouver d’égale valeur et dont on se dit que c’est des gens bien, si on peut filer un coup de pouce à des gens qui sont de milieux populaires, pour autant qu’on le voie dans le dossier, parce que quand on a 22 ou 23 ans on dit pas forcément que papa est ouvrier ou qu’il est PDG. On peut voir s’il est boursier, c’est tout. Mais si on peut jouer là-dessus, si à l’entretien préalable pour les sélectionner, on voit qu’il y a des gens qui ont des profils sociaux atypiques, on fera jouer. Ça aussi c’est pas enregistré, mais quand on recrute [sur dossier], maintenant, [si parmi les meilleurs, il y en a qui sont boursiers], je les fais passer sur le dessus. C’est totalement illégal, mais je n’ai pas d’autre solution. »40

Si ces pratiques restent marginales, ou du moins très rarement explicitées par les dirigeants d’école, elles n’entrent pas moins dans le cadre des dispositifs d’égalité des chances. Elles constituent une facette dont on peut difficilement mesurer la portée. Cependant, des acteurs appartenant à des types de formations très différentes ont tenu des propos de teneur équivalente, généralement à demi-mots et en refusant tout enregistrement. Ainsi, des pratiques peu dicibles d’ouverture sociale peuvent constituer une solution à des problèmes de désaffection de certaines filières.41

L’analyse du cas d’une école vétérinaire, sous tutelle du ministère de l’Agriculture, confirme l’hypothèse d’un tel mode d’intéressement.

40 Entretien avec un directeur de grande école, le 17 juin 2007.

41 Outre la question de la mesure et de l’impossible généralisation, le discours cynique doit également être appréhendé comme un biais de l’entretien, en lien avec les anticipations de l’enquêté vis-à-vis des attentes du chercheur et de ses catégories d’analyse. La situation d’entretien, obligeant l’acteur à discourir et s’interroger sur ses pratiques, crée artificiellement une prise de distance, un discours distancié à son action routinière, et donc certaines formes de cynisme.

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« Le problème actuel, c’est d’arriver à pourvoir ces secteurs d’activité [animaux de compagnie et de loisir ; élevage ; industries agro-alimentaire et pharmaceutique ; secteur public, incluant l’enseignement et la recherche, et les services vétérinaires] à la hauteur de leurs besoins. Le problème, c’est que les étudiants véto se destinent plutôt à l’exercice libéral et à l’animal de compagnie. Donc du point de vue de la tutelle se pose la question de savoir si le ministère doit payer une formation pour soigner des chiens et des chats. Ça pourrait être une école privée. Les vétos sont attendus sur des missions de service public […], et sur d’autres secteurs sinistrés, comme les secteurs salariés [industrie]. Tout ça découle de la principale question à laquelle on est confronté aujourd’hui – comme en médecine ou ailleurs : c’est l’impact de la féminisation sur la profession. […] Depuis quelques temps, il y a une préoccupation du ministère de l’Agriculture sur la diversification des publics en terme de recrutement. […] J’ai discuté avec [quelqu’un] de la direction générale de l’enseignement supérieur […]. Je sais qu’ils réfléchissent là-dessus, de voir si ça ne pourrait pas être une voix de réponse à ces questions là, car ces étudiants [titulaires de BTS et DUT] n’ont pas le même profil social et pas forcément les mêmes motivations : ils n’ont pas fait des BTS pour faire du chien et du chat a priori – mais ça peut changer après. »42

L’égalité des chances est une question qui est comprise sous l’angle du genre dans cette école, et les problématiques de désaffection de certaines filières de recrutement sont analysées comme découlant de la féminisation de la population étudiante. Il s’agit d’une école très dépendante de sa tutelle, l’intéressement à la question de la diversité s’opérant ici au niveau de l’administration centrale. En 2007, le tutorat est uniquement appréhendé dans les écoles vétérinaires comme une injonction du ministère de l’Éducation nationale, trouvant ainsi peu d’écho.

Ainsi, selon les problématiques spécifiques que les dirigeants des grandes écoles arriment à la question de la démocratisation, la catégorie « diversité » est conçue comme articulant les critères de genre, de l’origine sociale et de l’appartenance ethno-raciale. Ceux-ci se combinent selon une logique de plus ou moins grande publicité des dispositifs.

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