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Projet architectural et coopération des acteurs, l’hôpital psychiatrique de Sainte Gemmes sur Loire

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Projet architectural et coopération des acteurs, l’hôpital

psychiatrique de Sainte Gemmes sur Loire

Philippe Bataille

To cite this version:

Philippe Bataille. Projet architectural et coopération des acteurs, l’hôpital psychiatrique de Sainte

Gemmes sur Loire. Lieux Communs - Les Cahiers du LAUA, LAUA (Langages, Actions Urbaines,

Altérités - Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Nantes), 1995, Le projet architectural et

urbain, pp.41-62. �hal-03173484�

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Les Cahiers du LAUA, n ° 3 , 1995

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Laboratoire "Architecture, Usage, A lté rité '

PROJET A R C H IT E C T U R A L

ET

C O O P É R A T IO N

DES

A C T E U R S ,

l'h ô p ita l p sych iatriq u e de

Sainte Gemmes sur Loire

P h ilip p e B A T A ILLE

S i tous les auteurs s'accordent à faire du p ro ­ cessus de conception un processus co lle ctif et ité ra tif, il n'en reste pas m oins v ra i que les démarches courantes restent m ajoritairem ent pensées comme linéaires, c'est à d ire instau­ rant d'abord une program m ation (au m ieux) ou quelques données q u i en tiennent lie u (au pire), puis un temps de conception sans déve­ loppem ent d'une co n fro n ta tio n raisonnée avec la demande et enfin une réalisation que les destinataires e ffectifs découvrent à ce stade, rendant aléatoires (au m ie u x) ou inexistantes (au pire), sa pertinence d'usage et son p o te n tie l d 'a p p ro p ria tio n . A ussi quand il est souhaité e n ric h ir la ré fle xio n sur l ’usage et sa prise en com pte dans la conception architecturale, i l fa u t tra v a ille r à la construction de ce collectif.

C'est dans cette problém atique de la coopé­ ration des acteurs autour du p ro jet architec­ tural que s'inscrit la présente co n trib u tio n en rendant com pte d'une situ a tio n de p ro je t particulièrem ent sig n ific a tiv e à un double titre : d ’une p a rt elle concerne un h ô p ita l psychiatrique d é fin i comme un lie u de soins après a v o ir été lo n g te m p s u n lie u d'enferm em ent de la m aladie m entale ; d'autre p art car elle relève d'une in te rve n

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-U s Cahiers du LA-UA, n ° 3 , 1995

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tio n vo lo n ta riste , délibérém ent construite, p ou r conduire la restructuration architectu­ rale de ce lie u q u i tente de rom pre, comme quelques autres, avec le caractère asilaire de la p sych ia trie et ce fa isa n t de nouer de n o u ve lle s re la tio n s à la v ille 1. Par les c o n d itio n s in s titu tio n n e lle s et hum aines spécifiques dont elle a bénéficiées, bien plus que par des soutiens financiers particuliers2, e lle s'apparente à une vé rita b le situ a tio n expérim entale.

Dans cette recherche-action finalisée sur l'é la b o ra tio n program m atique d 'u n « plan d ire c te u r » et où, selon les in ten tio ns q u i avaient m otivées la d ire ctio n de l'é ta b lis­ sem ent à nous s o llic ite r, la question de l'usage d eva it a vo ir une place centrale dans la d é fin itio n du p ro je t architectural, notre in te rv e n tio n co nsista it donc notam m ent à aider l'ém ergence de modes collectifs d'éla­ b o ra tio n du p ro jet. Cet o bjectif é ta it posé selon certaines exigences issues de nos propres expériences ou observations et de tra va u x sur l'im p lic a tio n des acteurs d 'u n p ro je t a rch itectu ra l3 : perm ettre l'expression ré e lle de la com pétence4 des d iffé re n ts destinataires de cet équipem ent de santé p u b liq u e en se dém arquant de certaines conceptions idéologiques, naïves ou délibé­ rées, de la p a rtic ip a tio n ; préparer la ré a li­ sation du projet de restructuration en évitant conjointem ent la paralysie du système de

1- U n précédent a rtic le re n d a it com pte de cette re­ cherche-action en re s titu a n t globalem ent les prem iers m om ents de la dém arche au plan des principes et des résultats acquis (v o ir « A pproche pour la restructuration d 'u n h ô p ita l p s y c h ia triq u e ; le cas d u CHS de Ste Gemmes sur Lo ire » in les Cahiers du L A U A , n ° l, 1993, pp. 85-99). Cette seconde co n trib u tio n , même si elle in ­ diqu e quelques développem ents chronologiques, est ex­ clusivem ent centrée sur l'analyse de la logique d'action. 2- Le Plan C onstruction et A rchite cture (P.C.A.) dans le cadre de son program m e C ité-P rojets a contribué pour 50% au coû t de la prem ière phase de la recherche action (1991-1992). A u -d e là le d is p o s itif a été entièrem ent assum é s u r le p la n fin a n c ie r par l'é ta b lisse m e n t hospitalier.

3- N ous faisons p lu s p a rticu liè re m e n t référence ic i au dom aine d u logem ent social et à la réh ab ilita tion . 4- A u sens é la rg i de la « com pétence habitante » telle que d é fin ie pa r H e n ri R aym ond, «L’A rch ite ctu re , les aventures spatiales de la raison architecturale», C C I- Centre G. P om pidou, coll. alors,Paris, 1984, pp. 178-181

décision et la création d 'illu s io n s chez telle ou telle catégorie d'acteurs de l'in s titu tio n . L'exploration des intentions par la confron­ tation des points de vue, comme condition de form ulation de la demande, et la négociation articulée à une contractualisation form alisée ou non, comme co n d itio n de fa isa b ilité du projet, constituent les deux principes essen­ tiels d'action adoptés. Ils sont à la fois issus de propositions a priori et construits dans le tem ps même du p ro je t. Ce tra v a il se nourrissait des réflexions, travaux et expé­ rim entations en cours sur les processus de conception et, notam m ent car elle fa is a it l'o b je t de ten tatives d 'a p p lic a tio n , de la « program m ation générative »5. N ous ten­ tions ainsi de croiser le tra v a il de connais­ sances élaboré sur l'usage à des situations concrètes de tra n sfo rm a tio n spatiale, en considérant le processus de conception comme un processus in scrit dans des logiques collec­ tives d'acteurs q u i l'in fo rm e n t6.

M ais avant de développer les m odalités concrètes de cette coopération, i l nous faut donner quelques élém ents de repère p our situer un m inim um l'espace physique et ins­ titu tio n n e l dont il va être question.

5- Cette m éthode m ise au p o in t par M ich e l Conan ré­ sulte de différents travaux q u 'il a mené sur les processus de con cep tion . Le P .C .A . q u i a v a it sou te n u ces recherches, ava it aussi encouragé son expérim entation à travers l'op éra tion « SEPIA », « Secteur expérimental pour une programmation innovante de l'h a b ita t pour personnes âgées » (v o ir notam m ent à ce sujet, M ic h e l Conan, Mémento de programmation générative pour l'h a b ita t des personnes âgées, P.C.A, coll. Expérim entations, décembre 1989. On tro u ve ra égalem ent d 'a u tre s élém ents de présentation de cette m éthode dans l'a rtic le de R ainier H oddé, « D ialoguer le p ro je t : de la p a rtic ip a tio n des habitants à la program m ation générative », in les Cahiers du LA U A n° 2,1994).

Par aille urs, à l'époque où s'engageait l'in te rv e n tio n sur l'h ô p ita l, nous avions eu l'o p p o rtu n ité d'approcher cette posture m éthodique à la fave ur d 'u n tra v a il é v a lu a tif mené sous la dire ctio n de M ich el Conan et de Bernard Salignon à propos des Foyers de Jeunes T ravailleurs dans le cadre du « Program m e Développem ent S olid arité » de la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC).

6- Cette analyse d u processus de conception com m e « processus social » est développée dans p lu s ie u rs travaux de recherche sur le processus de conception ; v o ir à ce propos : Robert Prost, « C onception : où en est la recherche ? » in Techniques et A rch ite ctu re , n° 406, fé vrie r 1993, pp. 86-88.

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L 'H Ô P ITA L PSYCH IA TRIQ U E : un lieu à restructurer dans un dispositif de soins en transformation

Le C entre H o sp ita lie r Spécialisé de Sainte Gemmes sur Loire, com m une h orticole de l'agglom ération angevine, a pour origine la lo i de 1838 obligeant chaque départem ent à se doter d 'u n « asile d'aliénés ».

Sa création en 1842 par le départem ent de M aine et L o ire à la suite de cette lo i, ne correspond pas à la mise en œuvre d 'un mo­ dèle architectural comme ceux qui ont m ar­ qué la naissance de la psychiatrie, mais à l'u tilis a tio n d 'u n lie u déjà existant constitué par une propriété d'une vingtaine d'hectares avec u n château du X V II èm e siècle. Toutefois, cela n ’empêche pas le recours à certains d is p o s itifs architecturaux alors en v ig u e u r p o u r la ré a lisa tion des prem ières phases, références q ui se poursuivront tout au long de son histoire au fil des évolutions do­ m inantes, de sorte que son aspect actuel résulte largem ent du « collage » associant, p our ne cite r que les périodes extrêmes, un ensemble inspiré des principes d'Esquirol aux p avillo n s modèles du m inistère de la Santé des années soixante.

La seconde guerre m ondiale avec le lo u rd trib u payé p ar les m alades m entaux et l'expérience des camps de concentration que fe ro n t p lu sie u rs psychiatres, conduira au p la n n a tio n a l à l'in tro d u c tio n de change­ m ents im portants dans l'in s titu tio n hospita­ liè re psychiatrique7. Le courant de la « psy­ chothérapie in s titu tio n n e lle » q u i tra v a ille à fa ire reconnaître au m alade hospitalisé son statut de personne en est un des éléments m oteurs comme la « sectorisation » dont la prem ière circu la ire date de 1960 pour deve­ n ir effective une dizaine d'années plus tard et q u i vise à d iv e rs ifie r le d isp o sitif de soins

7- V o ir notam m ent à ce sujet les tém oignages recu eillis a u to u r de l'exem ple de l'h ô p ita l de V ille É vrard q u i in d iq u e n t à la fo is les prises de conscience opérées et la n a tu re des transfo rm a tion s progressivem ent engagées Gaëtane Lam arche-Vadel et Georges P réli, « L 'A sile », Recherches, n° 31, fé v rie r 1978.

par la prévention et le m aintien des malades dans des m ilie ux de vie sociale habituels8.

A Saintes Gemmes sur L oire, l ’in s titu tio n hospitalière rend compte de ces évolutions même si elle se transform e lentem ent, essen­ tiellem ent à p a rtir des années 70. Les p rin c i­ paux jalons en donnent la mesure à la fois du p oint de vue de leur nature et du p o in t de vue tem porel : la mise en place de la sectorisa­ tio n à p a rtir de 1971 ; l'in tro d u c tio n de la m ixité ; la création de structures de jo u r extra-hospitalières dont les prem ières n'ap­ paraissent qu'au m ilieu des années soixante- d ix. En termes de p op u la tion accueillie, les chiffres attestent égalem ent de ces é vo lu ­ tions et de le u r actualité : 2100 malades en 1968 ; 1400 en 1976 ; 1100 en 1981 ; 680 en 1992.

M ais l ’enjeu est national et quelle que soit la situ a tio n p a rtic u liè re d u CHS de Sainte Gemmes sur Loire, la question de la place de l'h ô p ita l dans le d is p o s itif de soins est au cœur des interrogations contemporaines de la p sychiatrie . Comme le d is a it encore de manière explicite au début des années 80 le Docteur Bonnaffé à propos d'une critiq u e de l'h o s p ita lo -c e n tris m e , « ...parce que c'est

avec les aigus qu'on fait les chroniques et que ce n'est qu'en soignant les "a ig u s ", sur le terrain même où leur sort se noue, qu'on fera moins de "chroniques" »9.

A Saintes Gemmes sur Loire, la restructura­ tio n de l'h ô p ita l é ta it d 'a ille u rs posée par la d ire ction dans une double perspective : celle d 'un recentrage sur les « soins actifs », avec toute l'am bivalence ou l ’im p ré cision d 'u n tel term e que ne m anqueront pas de souligner les soignants ; celle q u i lu i est liée

8- Le secteur est caractérisé par tro is options : un groupe de po pu latio n liée à un découpage géo-dém ographique d u te rrito ire ; une d iv e rs ific a tio n et une in s e rtio n u rb aine des équipem ents q u i m o d ifie n t le rô le de l ’h ô p ita l en o ffra n t des a lte rn a tive s ; une c o n tin u ité thé ra pe utiq ue assurée par une m êm e équipe p lu r i­ discip lin a ire sur l'ensem ble des équipem ents d u secteur. 9- Docteur Lucien Bonnaffé, « C a lig u la bâtisseur ou le s y n fro m e de la grosse vache », A rc h ite c tu re d 'A u jo u rd 'h u i N ° 214, a v ril 1981, pp. 2-4.

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d 'u n abaissem ent notable des capacités d'accueil, avec un objectif q u a n tita tif de 50 m alades hospitalisés par secteur, so it 350 personnes au to ta l. L'a ction sur l'h ô p ita l était dans son p rincipe liée à une dynam ique de soins sectorisée. E lle intervenait dans un contexte local dans lequel nous relevions tro is phénom ènes essentiels : la m ise en chantier du redécoupage sectoriel, d é fin iti­ vem ent adopté deux ans après (1993), pour perm ettre une m eilleure ré p a rtitio n entre le ru ra l et l'u rb a in avec notam m ent une pré­ sence de chaque secteur sur l'agglom ération ang e vin e et la cré a tio n d 'u n d ixiè m e secteur10; l'élaboration d 'un projet d'établis­ sem ent sim ultaném ent au lancem ent de la ré fle xio n sur la re stru ctu ra tio n ; l'achève­ m ent d 'u n a u d it m édical sur les pratiques de soins m ettant en évidence un certain nombre de constats plus ou m oins partagés par les équipes soignantes, certaines s'étant même très vivem ent opposées non seulement à ces derniers, m ais aussi au p rin cip e même de l'a u d it11.

A yan t l'espace comme objet, notre interven­ tio n ne s o llic ita it pas a priori de réserves de cette nature. N ous en décrirons ic i, sous l'a n g le de la coopération des acteurs, la période com prise entre janvier 1991, moment de notre « entrée sur le terra in », et ju ille t 1993, date du concours d 'architecture q u i perm ettra de choisir une équipe de m aîtrise d'œ uvre.

A N TIC IPER LA COOPÉRATION : proposi­ tion initiale et reformulation

C'est donc le hiatus entre la form e architec­ tu ra le de l'h ô p ita l et les pratiques théra­ peutiques actuelles q u i co n stitu a it le p ro ­ blème posé par la nouvelle équipe de direc­ tio n , le p o in t de départ de l'in te rro g a tio n .

10- A term e, ce secteur sera rattaché à l ’h ô p ita l général de Saum ur.

11- D octeur Jean-Luc Veret, Les pratiques de soin dans les secteurs de psychiatrie adulte du CJL.S. de Sainte Gemmes sur Loire, ra p p o rt de recherche, Émergence, H é ro u v ille , novem bre 1990.

La question de l'usage y é ta it donc centrale et s'appréhendait sous de m u ltip le s registres en a rtic u la tio n avec les perspectives de transform ations in stitutio n ne lle s.

Nature de la compétence sollicitée

Si l'o n se réfère, du p o in t de vue des m odali­ tés, à la demande in itia le te lle q u'elle est exprim ée dans un texte élaboré12 par le directeur, avant to u t échange avec nous, les perspectives d 'e xp lo ra tio n et de d é fin itio n du p ro jet architectural y apparaissent à la fo is comme novatrices et com m e assez conform es par ra p p o rt aux pratiques habi­ tuelles, dans la mesure où il é ta it envisagé de « constituer en collaboration avec un cabi­

net d'architecte un groupe de travail com­ posé de médecins, de représentants du per­ sonnel, de membres de l'équipe de direction, chargé d'étudier en prio rité un projet de restructuration des services adultes en prenant en compte trois types d'objectifs : inscrire dans l'architecture les caractères fondamentaux de la politique de santé men­

tale ; tire r le meilleur parti des bâtiments existants en les insérant dans le programme des besoins ; établir le programme des besoins »13. Ces perspectives rom paient avec

les pratiques habituelles par la recherche de m odalités p erm e tta n t une d é fin itio n p lu rie lle du projet, non seulement du fa it de la s o llic ita tio n des acteurs in s titu tio n n e ls concernés mais su rtou t par l'association du concepteur dès cette phase am ont de la ré­ flexion. Elles risquaient de ne se différencier qu'assez peu des pratiques courantes de p ro ­ gram m ation, dans la mesure où le tem ps de la conception paraissait sim plem ent succé­ der à celui de la d é fin itio n program m atique, comme deux moments séparés n'entretenant que des relations univoques. A cette vision linéaire du processus dont les lim ite s ont été

12- « R estructuration du Centre H o sp ita lie r Spécialisé de Saintes Gemmes sur Lo ire », note de ré fle xio n de M arc Pouvreau, D irecteur d u CHS, prem ier semestre 1990. 13- Ibidem p. 2.

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largem ent mises en évidence14, s'ajoutait le fa it que la proposition du recours à une com­ pétence extérieure, en l'occurrence celle d'ar­ chitectes, s’entendait comme l'a p pe l à une com pétence essentiellem ent « technique » sur l ’espace, même si la perspective d'une m odalité concertée é ta it posée. La question du statut de cette compétence tou t au long du processus, c'est à d ire de sa distance à l'objet et de son changement de rôle —le concepteur succédant au c o n s u lta n t— n 'é ta it pas e x p lic ité e .

Cette p ro p o sitio n in itia le se rvit en fa it de base pour les développements futurs adoptés et le recours à un laboratoire de recherche15 p lu tô t qu'à un cabinet de consultants/experts — re c o u rs e ffe ctu é p a r la m é d ia tio n d 'in stitu tio n s et de personnes 16— constituait en soi une prem ière m o d ific a tio n de la dem ande p o rté e p a r la d ire c tio n . En in tro d u is a n t un autre type de posture, ce choix in v ita it à une re form u latio n dans une perspective contractuelle des principes orga­ nisateurs de la démarche. Un second texte17 p ro d u it par nos soins après de prem iers échanges avec la d ire c tio n de l'h ô p ita l posait donc comme nécessaires l'approche m u ltid is c ip lin a ire et le recours à «des

méthodes d'observation et d'analyse qui fassent des acteurs de l'in s titu tio n des membres actifs des observations, des

en-14- V o ir les d iffé re n ts tra va u x sur le processus de conception et p o u r n'en cite r que deux : M ichel Conan, Concevoir un projet d'architecture, L'H arm attan, Paris, 1990 ; et R obert Prost, Conception architecturale : une investigation méthodologique, l'H a rm atta n, Paris, 1992. 15- en l'occurrence le Laboratoire A rchite cture, Usage, A lté rité (LA U A ) de l'É cole d 'A rchite cture de Nantes. 16- La DRASS et p lu s p a rticu liè re m e n t son D irecteur B ernard M a rro t a in si que l'in g é n ie u r en charge des p ro je ts, Lucien T ir illy . L 'o p p o rtu n ité de rencontre a résidé dans les journées portes ouvertes organisées par l'É cole d 'A rc h ite c tu re de Nantes à l'époque où s'enga­ geait la ré fle x io n en vue de la re stru ctu ra tio n à Sainte Gemmes sur Lo ire et à l'occasion desquelles le laboratoire a v a it notam m ent été amené à présenter ses travaux. 17- A v a n t de con stituer le Cahier des Clauses Techniques Particulières, ce texte a été élaboré conjointem ent par le d ire cte u r de l'E A N et le la b o ra to ire en ju in 1990 sous l'in titu lé « Proposition pour une étude pré-opérationnelle et de p ro g ra m m a tio n en vue d 'u n e ad a pta tio n et d 'u n e transformation des bâtiments du Centre Hospitalier Spécialisé de Sainte Gemmes sur Loire, (Maine et Loire) ».

quêtes et des analyses produites »18, le u r rôle

de « co-évaluateurs » étant posé ju s q u ’au terme du processus, c'est à d ire non seulement pour cette phase de d é fin itio n m ais en fa it jusqu'à l ’entrée dans les nouveaux espaces réalisés.

Ce texte in tro d u isa it ainsi les axes généraux de la démarche et in d iq u a it la co n stitu tio n de l'équipe et les rôles correspondants : deux chercheurs (une ethnologue et un architecte) assuraient le tra va il d'observation et d'ana­ lyse de l'existant, l'u n d'eux ayant en charge la conduite de l'ensem ble de la dém arche alors que la présence du second correspondait au temps de l'observation in itia le ; la com­ pétence d'un praticien, en l'occurrence une a rch ite cte -p ro g ra m m iste , é ta it s o llic ité e p o u r aider à la m ise en form e du p ro ­ gramme19.

O utre le croisem ent des regards et des ana­ lyses attendu des disciplines et savoir-faire ainsi réunis, l'idée générale de cette organi­ sation consistait à perm ettre certaines in te r­ ventions simultanées dans les phases in itia ­ lem ent prévues. La p ro po sitio n envisageait tro is moments en in clu a n t le p rin cip e d 'u n protocole d'observation avant l'engagem ent de la program m ation (deuxième tem ps) et de la mise en œ uvre du p ro je t a rch ite ctu ra l (troisièm e temps).

R éalisation expérimentale et c ritiq u e du modèle

Une seconde version de ce texte20, sans re­ m ettre en cause ces principes, y a jo uta it à la demande de la m aîtrise d ’ouvrage, une expé­ rim e n ta tio n vraie grandeur dans le souci —lé g itim e a priori— d'une v is ib ilité de la dém arche pour en favo riser la c ré d ib ilité . Elle consistait —dans un p a v illo n dénommé

18- Ibid.

19- A nn e-M a rie G iffo-Levasseur in te rv e n a it com m e ethnologue sur les d ix prem iers m ois de l'étud e et S ylvie Larcher in te rv e n a it com m e arch ite cte -p ro g ra m m iste jusqu’en ju ille t 1993.

20- Cette seconde version a ensuite constitué le Cahier des Clauses Techniques Particulières du contrat.

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le pavillon 14 et à très court term e vacant—, à m e ttre en œ uvre « une procédure de "p a v illo n e x p é rim e n ta l" afin de pouvoir

vérifier in situ et en grandeur réelle de nou­ veaux dispositifs spatiaux tout en apportant une réponse concrète à des besoins déjà formu­ lés par les personnels médicaux »21. Les

conditions de recevabilité de cette demande é ta ie n t précisées dans la convention et notam m ent la p o ssib ilité de sa remise en cause, du fa it de l'im p o ssib ilité à ce stade de d é fin ir la place de ce p a v illo n (m aintien ou d ém olition ; destination ; ...) dans le schéma directeur et le plan masse de l'h ô p ita l.

La dém arche et les d iffé re n te s analyses conduites ensuite devaient assez rapidem ent a b o u tir à m o n trer que derrière l'argum ent e xplicite de v is ib ilité , existait également un argum ent plus im p lic ite q u i renvoyait à la notion de « modèle », dans la mesure où pour la d ire ctio n une telle réalisation devait, par sa re p ro d u c tib ilité , perm ettre une ra p id ité opérationnelle. L'abandon de cette perspec­ tive in te rv in t après a voir m is en évidence ce qu'une telle visio n m oyennisante com portait non seulem ent d ’im p o ssib ilité au regard de l'a ty p is m e d u p a v illo n considéré m ais su rto u t de co ntra d ictio n intrinsèque au re­ gard de l'a d é q u a tio n recherchée avec les projets thérapeutiques22, dont les différences commençaient à poindre y com pris avec leurs incertitudes.

L'am biguïté dem eura un certain temps sur la nature de cette expérim entation m ais elle contribua ainsi à éclaircir tant le devenir du p a v illo n lui-m êm e que toute une série d 'in ­ tentions sur la nature du projet de restructu­ ra tio n .

21- Cahier des Clauses Techniques Particulières, op. cit. 22- Le term e de « p ro je t thérapeutique » désigne ic i l'ensem ble des postures de soin adoptées : m odalités d'accueil, nature des protocoles, organisation des prises en charge q u o tid ie n n e s ... I l m et en je u des options fondam entales, à l'exem ple de celles relatives au statut des activités ou encore au m élange des pathologies.

Le d isp o sitif contractuel effectif

A la fois pour des com m odités adm inistra ­ tives mais surtout parce q u 'il correspondait à l ’état de com préhension m u tu e l entre le com m anditaire et le la b o ra to ire de re ­ cherche, ce d is p o s itif contractuel re stait là aussi sans doute pour partie dans une vision assez linéaire du processus de conception. T o u te fo is , i l in tr o d u is a it l'id é e de l'accompagnement du m aître d'ouvrage et de l'équipe de concepteurs23 dans la phase de mise au p oint du projet et de sa réalisation, a u to ris a n t a in si certaines ité ra tio n s et évolutions.

Et dans la pratique effective telle qu'on peut la saisir rétrospectivem ent, ce q u i ressort tie n t dans le fa it que, sans s'écarter fonda­ m entalem ent des perspectives in itia le s , ce qui était prévu avec ces im p licite s de linéa­ rité —on observe, on analyse, on propose, on expérim ente, on développe— d e va it être adapté et enrichi par la mise en œuvre d'une dynam ique d'échanges. C ette dynam ique d'échanges d eva it être d 'a uta nt p lu s riche qu'elle in tég ra it deux éléments :

- l'observation préalable (série d'entretiens, visite s commentées, o bse rvation p a rtic i­ pante dans plusieurs p a villo n s) q u i a vait permis, tout en établissant un certain nom bre de contacts et en présentant notre m ission et notre tra va il, de re c u e illir et de confronter plusieurs points de vue ;

- la saisie de situations concrètes de change­ ment qui servirent de support aux groupes de tra v a il, y com pris avec les lim ite s ou les craintes que nous pouvions a vo ir par rapport au non-respect du cadre m éthodologique de recherche et en p a rtic u lie r de la m ise en œuvre de solutions prém aturées par rapport au tra va il d 'élucidation engagé.

Mais avant de développer le processus et ses m odalités et, au-delà des « groupes de tra ­ va il » sur lesquels nous centrerons notre

ana-23- Selon le d is p o s itif des REX (R é a lis a tio n Expérim entale) m is en œ uvre par le P.C.A. p o ur le loge­ m ent social.

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lyse, il convient de présenter, car elles ont participé à des degrés divers aux logiques de coopération, les tro is instances q u i consti­ tu a ie n t le cadre in s titu tio n n e l de la dé­ m arche.

L'u ne est co njo n ctu re lle et e xplicitem en t créée avec la dém arche24. Dénom m ée « groupe de p ilotage », elle a en effet été instituée avec notam m ent l'o b je ctif de pou­ v o ir ré u n ir les instances de tutelle (DRASS ; DASS) et celles de l'établissem ent (CA ; CME ; Syndicats). E lle a au dem eurant au­ tan t servi d'instance de lé g itim a tio n de la dém arche et de préparation technico-adm i- n istra tive de la décision opérationnelle que de « pilotage » proprem ent d it, même si elle a perm is de débattre et de va lider les orien­ tations majeures.

Les deux autres instances sont par contre déjà existantes au sein de l'établissem ent puis­ q u 'il s'a g it de la « C om m ission M édicale d'E tablissem ent » (CM E) et du « C onseil d 'A d m in is tra tio n » (C A )25. La prem ière a statutairem ent un rôle consultatif pour pré­ parer le p ro je t m édical d'établissem ent par périodes de cinq ans et elle émet régulière­ m ent des avis p ou r to u t ce q u i concerne le fonctionnem ent des secteurs q u 'il s'agisse d'aspects budgétaires, de personnel ou encore des plans de form ation. Elle est composée de l'ensem ble des médecins-chefs de service et de représentants des personnels médicaux,

24- A ce d is p o s itif s'a jo u ta it aussi, de m anière plus in ­ terne à no tre équipe, un « com ité scie ntifiq ue » dont le la bo ratoire a va it souhaité se doter p o ur perm ettre une ré fle xio n c ritiq u e en favo risan t la distance à l'ob je t. A u titre de la coopération des acteurs, i l m érite tou te fo is d'être m entionné dans la mesure où en plus de membres d u la b o ra to ire (ou personnes a ffilié e s) non im p liq ué s dans la recherche-action (M ich el Boccara, A la in Brice, C laude Leneveu, D aniel Pinson), i l réunissait un méde­ cin psychiatre — le D octeur N icole H orassius-Jarrié— , exté rieu r à l'établissem ent m ais so llic ité par la direction sur la base de sa reconnaissance professionnelle, et un représentant d u Plan C onstruction, désigné par lu i mais extérieur, Jean A tta li, philosophe.

25- I l fa u d ra it égalem ent m entionner d'autres instances existantes q u i o n t p u être sollicitées à un m om ent ou à un autre dans le cadre habituel de leurs rôles comme le CHSCT, m ais ou tre qu'elles pouvaient ou quelles étaient amenées à s'exprim er sur les pro po sition s faites, elles é ta ie n t représentées dans les d iffé re n te s instances évoquées.

o dontologiques et pharm aceutiques. Le « Conseil d 'A d m in is tra tio n » est une in s ­ tance de décision, d on t le d irecteur, q u i a aussi un p o u vo ir propre, en est l'e xé cutif26. Ce conseil perm et, au-delà de la p a rticip a ­ tio n des représentants du personnel m édical et param édical, une représentation des d if­ férentes collectivités te rrito ria le s et des o r­ ganismes de la Sécurité Sociale. Ces deux instances ont été régulièrem ent sollicitées au fu r et à mesure de l'avancem ent de la dé­ marche soit à titre in fo rm a tif, s o it p o u r recueillir un p oint de vue ou pour valider une orientation susceptibles de faire progresser la réflexion.

Si la décision d'action en m atière de restruc­ tu ra tio n spatiale a p p a rtie n t au d ire cte u r agissant au nom du Conseil d 'A d m in is tra - tion, et si d'autres instances sont nécessaire­ m ent parties prenantes de cette décision, de fa it ic i ces instances décisionnelles ont, sans nullem ent se dém ettre de leur rôle, su laisser un temps et un espace d'échange su ffisa n t pour que puisse être explorée la demande et qu'elle puisse connaître une expression s u ffi­ samment élaborée pour que s'engage un tra ­ v a il de conception architecturale.

A N T IC IP E R LE PROJET : modalités concrètes de l'exploration de la demande et de la construction des intentions.

Les prem iers contacts noués à l'occasion de la commande et de sa contractualisation ainsi que les observations préalables menées en­ suite, nous avaient perm is d 'id e n tifie r les d iffé re n ts groupes sociaux présents dans l'in s titu tio n et leurs grandes ca ractéris­ tiques.

Acteurs et contexte

Du p oint de vue de l'a d m in istra tio n de l'h ô ­ p ita l, la p rin cip a le spécificité te n a it à ce

26- La présidence d u CA échoit au Président d u C onseil Général.

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que la quasi to ta lité des cadres de d irection a vait été récem m ent renouvelée sim ultané­ m ent à l'a rrivé e du nouveau directeur, alors que la com position du personnel adm inistra­ t if et technique restait identique. Cette pré­ sence nouvelle correspondait à la mise en œuvre d'une p olitiqu e de changement.

Le personnel soignant était organisé selon les différentes strates habituelles du m ilie u h o s p ita lie r liées à la hiérarchie e t/o u aux s p é c ia lis a tio n s : m é d e cin s-ch e fs et m édecins ; in firm ie rs , psychologues et assistantes sociales ; aides-soignants (AS) et agents des services h o s p ita lie rs (ASH ). D eux tra its essentiels caractérisaient les so ig n a n ts : d 'u n e p a rt la d im in u tio n te n d a n c ie lle de l'e ffe c tif in fir m ie r — d'autant plus m al ressentie que la prise en charge p sych ia triq u e nécessite une forte présence in fir m iè r e — s 'a jo u ta it aux in certitudes sur la fonction induites par les réform es h o sp ita liè re s du s ta tu t et les évolutions dans les prises en charge ; d'autre p art un nom bre im portant de médecins-chefs sur le p o in t de p a rtir en retraite au cours des deux prem ières années de telle sorte que plus de la m o itié des secteurs o n t changé de responsables au cours de cette période. S'agissant de l'o rg a n is a tio n du soin, les rapports qu'entretiennent les secteurs entre eux co n stitu e n t une autre caractéristique d'im portance, les conceptions thérapeutiques pouvant susciter les affinités ou au contraire clive r sinon les équipes to u t au m oins leurs responsables.

Les malades accueillis se répartissaient en nom bre à peu près égal entre les secteurs, m ais l'im portance des pathologies lourdes et des « chroniques » constitu ait l'une des d if­ férences centrales, ré su ltan t à la fois des redécoupages sectoriels successifs liés aux arrivées des médecins-chefs et des modes de prises en charge développés par chacun. A cela s'ajoute le fa it qu'un certain nom bre de malades ne viennent que pour la journée sans h o sp ita lisa tio n com plète du fa it de la pré­ sence de certaines structures de jour au sein de l'h ô p ita l. Si globalem ent le u r sta tu t et les

conditions de le u r présence ont fortem ent évolué, il y a cependant de ce p o in t de vue une certaine hétérogénéité en fon ctio n des situations in d iv id u e lle s et des modes de prise en charge.

Les échanges form alisés n 'im p liq u a ie n t que les deux prem ières catégories d'acteurs, les interactions avec les malades ne se faisant que lo rs des d iffé re n te s o b se rva tio n s conduites ou de manière in form e lle à l'occa­ sion de telle ou telle rencontre. Cela résulte bien entendu de m ultiples raisons tenant à la fois au poids de l'h is to ire a sila ire et à la place du malade dans le soin. Il est cepen­ dant possible d'avancer deux considérations qui perm ettent de désigner des enjeux.

D'une part, comme nous devions rapidem ent en faire le constat, même si l'o b je c tif affiché de la commande et du tra v a il engagé visa it l'am élioration des conditions d'accueil des m alades, l'é ta t des ra p p o rts des acteurs salariés au sein de l'in s titu tio n é ta it te l q u 'il é ta it d iffic ile , vo ire im possible, d 'en­ visager une transform ation spatiale appro­ priable collectivem ent sans prendre le temps d'une élucidation in stitu tio n n e lle à laquelle la perspective de la transform ation spatiale pouvait servir d'analyseur.

D 'autre part, dem eure la d iffic u lté de tro u ­ ver les m odalités ad hoc d'une im p lic a tio n dans laquelle le m alade ne so it pas placé dans une situation d 'im p o sitio n et de d o m i­ nation27 q u i fasse de sa présence une parodie. Cette d iffic u lté , to u t au m oins dans la période ic i analysée, n'a été dépassée n i par les soignants, n i par nous-mêmes28, seules les données de l'o b s e rv a tio n p o u v a n t être ré in tro d u ite s dans le tra v a il d 'analyse co lle ctive .

27- A l'in s ta r de certains constats fa its dans des situ a ­ tions analogues tant d u p o in t de vue d u m ode d 'in te rac­ tio n que de la position dom inée de certains acteurs. 28- Nous l'avons rapidem ent posée auprès de la CM E q u i nous a orienté vers les « Com ités H o spita lie rs », ins­ tances propres aux malades et destinées à le u r perm ettre la gestion de certaines activité s. N ous n ’avons cepen­ dant pas su explorer, seuls, cette possibilité.

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Q uoiqu’i l en soit, te lle qu’elle é ta it définie, notre m ission nous perm ettait d'engager un processus de réflexion sur la question de la tra n s fo rm a tio n sp atia le en p riv ilé g ia n t l'id e n tific a tio n des problèm es et le u r ana­ lyse, sans tom ber im m édiatem ent dans la « so lu tion » selon une a ttitu d e fréquente, à la quelle p o u v a it conduire la pression que constitu ait la dynam ique de la direction très assurée dans sa volonté de changem ent. Fondée sur l'e x is ta n t, cette analyse, à l'émergence de laquelle nous devions co ntri­ buer, d e va it aussi se penser en termes de devenir avec toutes les inconnues que compor­ taient les quelques perspectives avancées sur l ’é v o lu tio n d u d is p o s itif de soins. Par ra p p o rt au fatalism e et à l'attentism e in d u it q u i sem blaient caractériser selon nous les soignants, à l'opposé donc de l'a ttitu d e du s ta ff d irig e a n t, i l nous fa lla it égalem ent fa ire en sorte que cette ré flexion a it pour cette catégorie d'acteurs un caractère concret car globalem ent deux écueils revenaient souvent. Le prem ier consistait à ce que soient posées des in te rro g a tio n s q u i excédaient l'o b je t p our lequel nous étions sollicités mais se rapportaient au devenir de la politiqu e de santé au plan national et à ses effets sur la question du devenir des personnels et des budgets disponibles. Le second écueil se tra d u is a it p a r le fa it d 'é v ite r to u te réflexion au nom d 'un principe de réalité, les réunions proposées dans le cadre de cette démarche n'apparaissant alors que comme un m oyen de la d ire ction d 'é vite r les interven­ tions réelles.

Par a ille u rs, l'engagem ent de notre tra v a il ne s ig n ifia it pas —et ne pouvait sig n ifier en aucune manière— un m oratoire sur les perpé­ tu e lle s tra nsfo rm a tio ns d o n t l'h ô p ita l est l'o b je t comme nous avions été rapidem ent amenés à le constater : sim ple entretien, aménagements en vue de l'adaptation à d if­ férents phénomènes plus ou m oins conjonc­ tu re ls , v o ire ré h a b ilita tio n lo u rd e de certains p avillo ns rendus im pératifs par leur état et le respect des conditions de sécurité. A u ta n t d 'in te rve n tio n s sur l'espace im pos­ sibles à co nte nir même si nous pouvions

craindre que certaines de ces transform ations risquent de rem ettre en cause assez fortem ent la cohérence de la réflexion engagée, comme celle de l'in te rv e n tio n des arch itecte s sollicités ultérieurem ent. Tout en étant donc c o n tin u e lle m e n t v ig ila n ts s u r c e tte préoccupation, nous nous sommes insérés dans ces situations p our lesquelles nous étions sollicités directem ent ou in d ire cte m e n t et que nous avons essayées d 'in v e s tir selon les principes m éthodologiques définis.

Les groupes de tra v a il

A lo rs qu'à l'issue d'une prem ière période d ’observation nous réfléchissions à la ma­ nière d'engager cette dynam ique d'échange, deux grands problèm es se tro u va ie n t ainsi posés : l'u n lié à un aménagement urbain de la commune autour de la création d'une nou­ v e lle entrée ; l'a u tre e xp rim é p a r le d ire c te u r a u to u r de son s o u h a it de développer « l'in te rs e c to ria lité »29. La p ro ­ p o s itio n de co nstitu e r deux groupes de tra va il sur chacun de ces objets de réflexion fu t esquissée au cours d'échanges avec la d ire ction et validée par le groupe de p ilo ­ tage. Ces groupes fondent les deux premières situations construites de coopération des acteurs salariés, situ atio n s em blém atiques tant par l'o b je t qu'elles visent que par les démarches de « form ulation/résolution des

problèmes » qu'elles perm ettent d'engager.

Un peu à la m anière des histoires b io g ra ­ phiques en c lin iq u e p sych ia triq u e , elles co n stitu e n t a u ta n t d'approches p ra tic o - théoriques de ce processus et, sans entrer dans le détail de leurs trib u latio n s, nous tenterons d'en indiquer les lignes de force.

Première situ atio n : entrer/accueillir!sortir

La proposition de réaliser une nouvelle en­ trée de l'h ô p ita l é ta it liée à la création par

29- Ce term e désigne les collaborations entre plusie urs secteurs, q u 'il s'agisse de pro je t développés ensemble ou de la gestion d'équipem ents com m uns, la fro n tiè re n'étant pas toujours bien établie.

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la m u n icip a lité de Sainte Gemmes sur Loire d 'u n ro n d -p o in t p ou r perm ettre la desserte d 'u n nouveau lotissem ent. Antérieurem ent à n o tre in te rv e n tio n , cette o pération a vait donné lie u à une négociation entre la V ille et l'h ô p ita l q u i p ré vo ya it la cession g ra tu ite du te rra in par ce dernier, la V ille assurant en com pensation le réam énagem ent d 'u n p a rkin g lim itro p h e existant.

La co nstitu tion du prem ier groupe de tra vail s’o p é ra it sur cette perspective sim ultané­ m ent à la so llicita tio n d'un concepteur par la direction. N ous étions intervenus, non dans le choix de ce lu i-ci, mais p our a ttire r l'a tte n ­ tio n des deux contractants sur la d é lim ita ­ tio n précise de la m ission confiée et les m ettre en garde contre toute dérive éven­ tuelle, de sorte q u 'il n 'y a it aucune am biguïté possible dans la suite du processus au moment de la désignation d 'un concepteur en charge de la restructuration, quel que soit le mode de choix retenu. Cette exigence correspondait non seulement au respect des règles de dévo­ lu tio n de la commande publique, mais aussi à une exigence m éthodologique pour garantir à la démarche sa cohérence et pour que l'appel à ce concepteur ne se traduise pas par une né­ gation du processus d'élaboration collective des intentions de transform ation spatiale qui s'engageait. Toutefois, sim ultaném ent à ces risques et m algré la lim ite liée à l'absence d 'a ju ste m e n t m é tho d olog iq u e préalable, cette s itu a tio n o ffra it potentiellem ent l'o c­ casion d 'u n tra v a il ité ra tif sur les intentions m o b ilisa n t la compétence propre de l'a rc h i­ tecte.

Les prem ières intentions organisationnelles et spatiales alors posées pour cet aménage­ m ent associaient des réflexions internes à l'établissem ent déjà conduites antérieure­ m ent, form alisées ou non, et des suggestions de la d ire ctio n . Elles peuvent être traduites en deux points essentiels. Le prem ier objectif consistait à créer une structure d'accueil re­ g ro u p a n t la « conciergerie » (standard / renseignem ents) et le « service a dm inistratif des adm issions » a lors séparés par une longue allée, cause d'une com plication in ­ u tile dans le processus d'adm ission et, dans

ce m om ent essentiel de l'a rrivé e , d 'u n pos­ sible renforcem ent chez les malades du sen­ tim ent d'angoisse auquel p articipe le carac­ tère im posant de l'allée m algré son évidente beauté paysagère. Une seconde in te n tio n concernait la réorganisation u lté rie u re de l'ancienne entrée et de l'a llée d o n t l'accès sem blait d evo ir être in te rd it aux voitures. Ce dernier p oint faisait l'o b je t d'une certaine unanim ité tant p our re stitu e r aux piétons l'espace majeur de l'allée que pour m ettre fin à l'actuel « g o u lo t d'étranglem ent » p ro vo ­ qué par la concentration en un seul p o in t de toute la circu la tio n autom obile, en p a rticu ­ lie r lors des changem ents d'équipes soi­ gnantes, ce q ui avait m otivé au dem eurant l ’hypothèse d 'u n déplacem ent de l'accès vers le nouveau rond-point.

Dans le p re m ie r schéma présenté par l'architecte sur cette base, l'énonciation des problèmes devait céder le pas à la présenta­ tio n de la solution im m édiatem ent in d u ite par l'e x is ta n t et par l'analyse qu'en fa i­ saient la direction et les services techniques de l'h ô p ita l : l'accès s'effectuait par le nou­ veau ro n d -p o in t et le pavillon 1 4 , situé à p ro xim ité, devenait le lie u de « l'accueil ». Ce prem ier schéma esquissait par ailleurs un certain nombre de propositions sur l'ensemble du CHS, censé in fo rm e r le tra ite m e n t de l'e n tré e , selon l'id é e que le général e n g e n d ra it le p a rtic u lie r. En fa it le problèm e spécifique de l'entrée a lla it très exactem ent d é m o n tre r l'in v e rs e car, ra p ide m e n t, d e rriè re cette s o lu tio n en apparence évidente q u 'il sem blait seulement nécessaire de présenter p o u r v a lid a tio n , deux grandes questions surgirent : l'une sur le sens que donnaient les d iffé re n ts acteurs à l'accueil ; l'autre sur la destination fu tu re du

pavillon 14. Elles fa vo risè re n t to u te une

série de déplacem ents dans les analyses effectuées par les p a rticip a n ts et dans la reform ulation de leurs points de vue. Cette distanciation était également n ou rrie par les autres hypothèses élaborées par l ’architecte après q u 'il se so it lib é ré de la prem ière perspective de résolution. A la faveur du foisonnem ent des questions soulevées, nous

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l'a v io n s c o n va in cu d 'e x p lo re r le p lu s systém atiquem ent possible les différentes possibilités que présentait l'espace.

Cette nouvelle posture favorisa rapidem ent l'abandon p ro gressif de la fix a tio n sur le

pavillon 14 q ui, par sa vacance im m inente,

c ris ta llis a it bien des fantasmes et des désirs chez nom bre d'acteurs, ce q ui lu i donnait à nos yeux une valeur de symptôme quant aux enjeux et aux form es de négociation dont l'espace é ta it l'objet.

En l'occurrence, le secteur q u i y vo ya it la solution à l ’évidente carence de ses « bureaux m é d ic a u x »30 in sta llé s dans un ancien p a v illo n d 'h ab ita tion ne pou va it que n o u rrir de l'in q u ié tu d e face aux autres propositions d 'u tilis a tio n , b ia isan t le débat sur l'accueil et la nouvelle entrée. La reform ulation alors opérée a in si que les assurances données p ub liq u em en t par la d ire ctio n de prendre effectivem ent en compte cette demande dans le cadre de la démarche engagée, furent des conditions nécessaires à cette distanciation. La d ire ction elle-même m odifia une nouvelle fois son p o in t de vue sur ce bâtim ent, après a vo ir abandonné la proposition contractuelle de ré a lisa tion expérim entale. Ce faisant, il convient de souligner que cette attitude de la d ire c tio n , à la fo is déterm inée dans ses o b je c tifs et o u ve rte à re co nsidérer sa p o sitio n , est m anifestem ent une co nd itio n déterm inante des autres évolutions.

Concom itantes de cette prise de distance par ra p p o rt aux lie u x , les in te rro g a tio n s concernant l'accueil ont bien sûr été centrales et si elles peuvent se résum er autour de quelques grands tra its , le u r c la rific a tio n n'eut rie n d'im m édiat et d'unanim e. A p a rtir d 'u n constat partagé sur les insuffisances de l'accueil actuel, des divergences apparurent du côté des soignants face à la possibilité d 'u n lie u in te rse cto rie l que p ro po sa it la

30- Préalablem ent désignés sous le term e de « P.C. », les « bureaux m édicaux » sont en fa it le lie u de coordination de l'ensem ble des secteurs et le lie u de des consultations m édicales in te rn e s et externes. I l re g rou pe donc p lu s ie u rs in te rve n a n ts : m édecins, su rv e illa n ts chefs, in firm ie rs chargés de la c o o rd in a tio n , psychologues, assistantes sociales, secrétaires...

d ire c tio n . C eux-ci, et en p a rtic u lie r les m édecins, e stim a ie n t que l'a c c u e il d u malade, le prem ier accueil, d e va it im péra­ tivem ent se faire par le secteur concerné car il correspondait à un m om ent déterm inant du diagnostic. Cette exigence fu t adm ise sans grande d iffic u lté m ais en même tem ps i l é ta it fa it rem arquer p ar la d ire c tio n les d iffic u lté s à te n ir e ffe c tiv e m e n t cette exigence en continu, ne serait-ce que la n u it ou le week-end du fa it de l'absence de personnel en charge de l'accueil dans chaque p a villo n. Cette contradiction fu t égalem ent reconnue par les soignants, d 'a u ta n t que certains in firm ie rs présents au q u o tid ie n té m o i­ gnèrent dans ce sens. Le p rin c ip e d u d is p o s itif d 'a ccu e il a rrê té associe donc l'o b je c tif de répondre à certains m anques actuels to u t en respectant la volonté d'une prééminence de l'accueil par le secteur. Trois fonctions se trouvent ainsi associées dans un même lie u : un accueil renseignem ent et o rie n ta tio n ; un accueil a d m in is tra tif ; un accueil m édicalisé, e n fin , q u i est d é fin i comme un espace « m in im u m » à cette pratique, im m édiatem ent u tilis a b le la n u it p ar le s u rv e illa n t-in firm ie r de garde, actuellem ent en poste dans son p a v illo n de rattachem ent, ainsi qu'à l'in te rn e de garde. L'existence de cet accueil m édicalisé ne constitue qu'un statu-quo entre des positions contrastées, ce q u i explique la d iffic u lté et les avancées lentes de certains débats comme le reflète l'a v is donné par la C om m ission M édicale d'E tablissem ent : « Monsieur le

Président conclut que la CME n'a pas, en l'é ta t de la d iscu ssion , r e c u e illi l ’approbation de l'ensemble de ses membres pour la création d'une petite structure d'admission. Par contre il suggère d'une part de réserver des lieux pour l'accueil de familles et d'autre part de réserver un espace pour l ’accueil médicalisé dans l ’amé­ nagement des locaux d'accueil destinés à assurer la fonction renseignement et bureau des admissions »31.

31- Procès V erbal de la C om m ission M édicale d 'E ta ­ blissem ent du 4 ju ille t 1991; CHS de Sainte Gemmes sur Loire; E xtrait, § 4.

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Q u o iq u 'il en soit, ce problèm e central ayant reçu une réponse largem ent débattue et v a li­ dée par une instance lé g itim e , différentes hypothèses spatiales présentées sous form e de schémas affichés dans plu sieu rs lie u x publics de l'in s titu tio n , p erm irent à la fois de rechercher l'im p la n ta tio n la plus adé­ quate à l'accueil ainsi d é fin i et de proposer des réponses à un certain nom bre de p ro ­ blèmes évoqués to u t au long des séances de tra v a il : la circ u la tio n et le stationnem ent autom obiles, la re la tio n à la v ille , l'im age de l'h ô p ita l, les conséquences éventuelles par ra p po rt à la restructuration,...

La so lu tion retenue réside dans la création d 'u n e dou b le entrée : l'u n e destinée au personnel par le nouveau ro n d -p o in t à l'ouest ; l'a u tre éservée aux visiteurs à l'est au niveau des anciens bâtim ents agricoles. L 'o u v e rtu re à l ’est a va it déjà été émise précédem m ent m ais dans une perspective essentiellem ent liée à la c irc u la tio n et au stationnem ent. Ic i, elle a été d'une certaine m anière ré in tro d u ite , mais à p a rtir d'autres considérations et intentions. Et c'est d ’abord en réagissant négativem ent, du p oint de vue de la sortie, sur la p ro po sitio n d'entrée par le nouveau ro n d -p o in t, q u 'ils jugeaient co ntra d ictoire par son excentricité aux par­ cours des malades attirés par la vie du bourg, que les soignants va lidèrent l'idée de l'o u ­ verture sur la v ille et orientèrent le choix sur une im p la n ta tio n totalem ent opposée de cette « e n tré e /s o rtie ». L ’accueil est de ce fa it im p la n té dans l'u n des bâtim ents de « l'ancienne ferm e » jugé le plus adapté au program m e et le plus visible depuis le nou­ veau parcours d'arrivée.

A u-delà de la solution elle-même dont nous lim ite ro n s à ces quelques in d ica tio n s la d escription, la démarche effectuée à p a rtir de ce problèm e de l'entrée et du thème de l'accueil nous paraît révéler tro is caractères fondam entaux de la coopération.

E lle m ontre d'abord que la d é fin itio n finale est bien le résultat d'une mise à p la t d'une p lu ra lité de p o in t de vues, à la fois d iv e r­ gents et convergents, d o n t le processus a

permis la confrontation en créant un lieu et un tem ps de débat. C ette c o n fro n ta tio n se présente comme la co n d itio n d'une valeur ajoutée aux différents solutions in itia le m e n t envisagées par telle ou telle catégorie d'ac­ teurs qu'elles aient donné lie u à form alisa­ tio n, comme celle avancée par la d ire ction , ou qu'elles restent plus fragm entaires comme celles des autres catégories d 'a cte u rs. Sim ultaném ent à cet enrichissem ent considé­ rable de la solution par ra p p o rt aux points de vue in itia ux, elle a donné lie u à une négo­ c ia tio n ré e lle m e nt a p p ro p rié e dans la mesure où les acteurs o nt été im pliqués dans la prise de décision. E lle c o n s titu a it une avancée im portante dans les relations que pouvaient entretenir les agents salariés de l'h ô p ita l avec la d ire c tio n , d 'a u ta n t p lu s s ig n ific a tiv e q u 'e lle é ta it la p re m iè re concrétisation à la fois de la démarche enga­ gée et d'une am élioration du CHS. En ce sens elle pouvait désormais représenter un p o in t de référence dans la m obilisation des acteurs qui restait à développer plus largem ent.

Le second tra it s a illa n t de la dém arche adoptée réside dans le fa it que la décision reste ouverte à d'autres enrichissem ents en ménageant des possibilités d 'é volu tio n s u l­ térieures à la fois du p o in t de vue spatial et in stitu tio n n e l. Le lie u d 'im p la n ta tio n o ffre des ressources du p o in t de vue d'extensions possibles par l'existence de bâtim ents v o i­ sins et l ’investissement effectué par son m on­ tan t re la tivem en t m odeste n 'in te rd it pas d'a utre s in te rv e n tio n s u lté rie u re s p o u r conforter, développer, corriger certains d is­ positifs. Le fa it par exem ple de laisser une possibilité d 'é v o lu tio n sur un accueil soi­ gnant en est une belle illu s tra tio n , quel que so it le p o in t de vue que peuvent a v o ir aujou rd 'h ui les différentes catégories d'ac­ teurs concernées. De même un restaurant social, q u i renforce la re la tion à la v ille , a depuis été créé dans le bâtim ent p rin cip a l de « l'ancienne ferm e ». Et du p o in t de vue du processus de changement, de sa poursuite et du positionnem ent des acteurs, la va lid a tio n d'une so lution ouverte aux évolutio n s par ra p p o rt à des décisions h a b itu e lle m e n t

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posées comme d éfin itive s est sans n u l doute un acquis essentiel.

E nfin, ce prem ier essai d'élaboration collec­ tiv e , a rticu lée à un tra v a il de conception architecturale et concrétisée par une réalisa­ tio n , créait une situ atio n nouvelle à la fois sp atia le et o rg a n isa tio n n e lle concernant l'ensem ble des personnes présentes au CHS : a dm in istra tifs, personnel des services géné­ raux, soignants, malades. Il représentait une tentative réelle de dépassement de certains des clivages existants entre a d m in istra tif et m édical, m ais aussi de ceux existants entre secteurs, plus centrés sur leurs préoccupations respectives que sur la prise en com pte de celles-ci dans une p o litiq u e globale d'éta­ blissem ent. En p erm ettant d'envisager la m o d ific a tio n de certaines pratiques q u o ti­ diennes, i l débouchait sur une sorte d'expé­ rience en vraie grandeur, capable d'étayer et de dynam iser le débat sur l'espace au CHS. Cependant, elle n'a joué ce rôle que p a rtie l­ lem ent comme situation de référence poten­ tie lle dans la mesure où, en raison de délais de réalisation plus longs que prévus, la nou­ ve lle c o n fig u ra tio n ne sera véritablem ent opérationnelle que beaucoup plus tard et en l'occurrence après le concours de concepteurs.

Deuxième s itu a tio n : de l'in te rs e c to ria lité aux lieux partagés

La seconde situation trouve son origine dans le problèm e posé par la destination d 'u n certain nom bre de lie u x vacants —d on t le

pavillon 14 précédem m ent évoqué— et

a rtic u lé à l'id e n tific a tio n des « besoins à

satisfaire ». Ces deux axes q u i avaient servi

à caractériser le second groupe de tra v a il recouvraient en fa it un champ beaucoup plus large de problèm es et de questions à élucider qu'ava ie n t m is en évidence les différentes observations menées au cours de ce prem ier semestre : regroupem ent ou non des bureaux m édicaux ; re la tio n des bureaux m édicaux a ux lie u x d 'h o s p ita lis a tio n et p lu s largem ent im p la n ta tio n au sein de l'h ô p ita l ou sur le secteur ; d é fin itio n des lie u x

d'hospitalisation avec le m aintien ou non du pavillo n comme m odule de base ;... M ais en prem ier lie u , et cela explique aussi le titre retenu, ce q u i était visé concernait la ques­ tio n de l'existence ou non d'activités et donc de lieux intersectoriels. Comme nous devions rapidem ent le constater, les activités in te r­ se cto rielles re sta ie n t re la tiv e m e n t peu développées et dans le cadre in tra -h osp ita - lie r, deux étaient recensées comme telles32. Leur création récente, et ce qui se dessinait en e x tra -h o s p ita lie r, la is s a ie n t cependant ouverte la possibilité d 'in tersecto ria lise r un certain nombre de structures spécifiques au sein du CHS à l'occasion de sa restructura­ tio n spatiale. C ette p e rsp e ctive fa is a it explicitem ent partie des propositions faites par la d irection et, notre e xté riorité, à l'é ta ­ blissem ent et à la psychiatrie, nous am enait très naturellem ent à en in terro ge r la p e rti­ nence d'autant qu'elle est assez couram m ent développée dans d'autres centres hosp ita ­ liers comme nous avions pu le constater dans ceux que nous avions visité s : la cafétéria centrale e t/o u le centre de sociothérapie en sont deux des m odalités les plus courantes. Ce fu t l'une des dim ensions à explorer par le second groupe de tra vail en s'appuyant sur le devenir de certains lie u x vacants.

Des échanges sur cette question, il est ra p i­ dem ent ressorti que de tels d is p o s itifs ne correspondaient pas aux attentes d'une m ajo­ rité d'équipes médicales q u i s'y opposait au nom du p ro jet thérapeutique lui-m êm e. A l'in s ta r de ce q u i avait été opposé à la p ro ­ position d 'u n accueil m édicalisé intersecto­ rie l, ces équipes faisaient v a lo ir l'im p o s s i­ b ilité même d 'a ctivité s intersectorielles au nom des exigences du transfert. D 'autres y étaient plus silencieusem ent opposées to u t sim plem ent pour des raisons de com m odité de fonctionnem ent présenté par des lie u x spécifiquem ent attachés à chaque secteur et seules celles, m in o rita ire s , déjà engagées

32- L 'u n e , l'A IR A , (A te lie r In te rs e c to rie l de Réadaptation A gricole ) in itié pa r deux secteurs (5 et 7), est une a c tiv ité de soin ; l'a u tre le D IM (D épartem ent d 'in fo rm a tio n M éd ica le ) concerne l'en sem b le des secteurs et est un o u til d'analyse des activités de soins.

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dans des pra tiqu e s de ce type restaient ouvertes à des propositions de développe­ ment.

En revanche, quel que soit le u r positionne­ m ent et après un certain nombre d'analyses et d'échanges, tous s'accordaient à reconnaître la nécessité de lie u x plus collectifs que ceux d o n t ils a vaien t l'usage p o u r de p e tits groupes de malades, ne serait-ce qu'au nom de la nécessité d 'o ptim iser les moyens, argu­ m ent égalem ent avancé par la d ire ctio n sim u lta né m e n t à ce lu i de la dynam ique d'établissem ent, soit p our am éliorer les d is­ p o s itifs de soins existants, so it p our per­ m ettre d'en obtenir de nouveaux. La term ino­ logie de « lieux partagés » retenue à l'issue des échanges indique clairem ent la nature de la re la tio n intersectorielle alors validée.

Toutefois, même sur cette option et au moins dans u n p re m ie r tem ps, la « C om m ission M édicale d ’Établissem ent », s'est m ontrée réservée si l'o n en juge par la position alors exprim ée : « L'aménagement de locaux en

commun ne soulève pas d'enthousiasme. Les hypothèses avancées au cours de séances de groupe de travail suscitent un scepticisme certain. Les secteurs développent des activi­ tés sociales, culturelles, thérapeutiques au sein de chacun des services et réclament des bureaux propres »33. Cette prem ière attitu d e

est cependant nuancée par la reconnaissance, qu'au-delà d 'a c tiv ité s devant être o rg an i­ sées au sein des secteurs, « d ’autres peuvent

trouver place dans des locaux qui peuvent être partagés ». C ette p o s itio n sera accompagnée d'une demande effectuée par le Président de la CME auprès de certains de ses membres p our tra va ille r à cette question. Ce nouveau groupe, principalem ent constitué de psychologues et d'assistantes sociales, tra v a illa — d'abord seul, to u t en so llicita n t notre soutien ponctuel, puis très vite en lie n avec le groupe déjà constitué— à la d é fin i­ tio n d 'u n certain nom bre de lieux en corres­ pondance avec des types d 'a ctivité s déjà existantes ou à créer. Ceux liés à l'expression co rp orelle (danse, gym nastique...) et ceux

33- P .V. de la C M E du 4 ju ille t 1991 ; op. cit.

destinés aux a c tiv ité s re le va n t de l'a rt- thérapie (théâtre, danse,...) intègrent ce q u i existe. Le lieu d'hydrothérapie correspond à une perspective nouvelle comme l'hypothèse d'un self ouvert à la fois aux soignants et aux soignés, perm ettant à ces derniers de manger à l'extérieur des pavillons et éventuellem ent aussi avec leurs fam illes ou amis.

Les interrogations relatives à la vacance de certains lieux et à le u r ré u tilis a tio n avaient ainsi progressivem ent laissé la place à une élucidation des intentions en termes croisés de pratiques et de lieux. Ce faisant la ques­ tio n des différentes localisations se posait de m anière globale à travers la dim ension urbanistique de l ’h ô p ita l a u to u r de deux o rie n ta tio n s possibles, l'u n e fa v o ris a n t l'id é e de c e n tra lité , l'a u tre te n d a n t au contraire à l'éclatem ent des a ctivité s. Ce débat s'alim entait to u t à la fois de considé­ rations thérapeutiques, de constats sur les pratiques et les configurations existantes, de références à des d isp ositifs urbains archéty­ piques ou sim plem ent de com m odités fonc­ tionnelles. I l p e rm e tta it égalem ent à une grande m ajorité de p articip a n ts d 'e n ric h ir leur connaissance du te rrito ire h osp ita lie r, tant leurs déplacem ents étaient lim ité s en correspondance avec certains cloisonnements et découpages territo ria u x.

M ais cette approche autour des « lie u x par­ tagés » donna également lie u à un débat très v if, en l'occurrence au cours d'une CME à laquelle nous avions p articipé . U n certain nom bre d'acteurs posèrent la question de l'u tilité de tels lie u x, propres selon eux à favoriser la dim ension asilaire de l'h ô p ita l, alors q u 'il leur sem blait plus pertine n t d 'in ­ ve stir les lie u x p ub lics existants dans la v ille de m anière à favoriser au m axim um l'inte ra ction des malades avec les situations de la vie courante. D 'autres, to u t en s'accor­ dant sur la nécessité de com battre les ten­ dances asilaires, opposaient les d iffic u lté s auxquelles ils é ta ie n t co nfro n tés : refus diversem ent form ulés de m ettre ces lie u x m unicipaux à d isp o sitio n ; d iffic u lté p our emmener les malades les plus régressés dans des lie u x extérieurs. Ils insistaient sur l'im

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