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La Banque Européenne pour la reconstruction et le développement

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(2)

LA BANQUE EUROPÉENNE

POUR

LA RECONSTRUCTION

ET LE

DÉVELOPPEMENT

LAURE TOURNEFIER FACULTYOFLAW

McGILL UNIVERSITY - MONTREAL NOVEMBER 1993

Copy #1

A thesis submitted to the Faculty of Graduate Studies and Research in partial fulfilment of the requirements of the degree of Masters of

International Business Law

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(4)

RÉSUMÉ

Le 29 mai 1990 furent signés à Paris les statuts de la Banque

Européenne pour la Reconstruction et le Développement (BERD).

Institution mondiale à but régional, mélange de banque d'affaires et de

banque de développement, la BERD est sans aucun doute un organisme original. Mais presque trois ans après sa création, quel est son bilan?

Cette thèse vise à examiner non seulement les raisons d'être de cette

banque, ce pourquoi elle a été créée mais aussi à expliciter son

fonctionnement, cela tout en gardant une vision critique des opérations qu'elle a entreprises en Europe de l'Est.

ABSTRACT

On May 29, 1990 the Agreement establishing the European Bank for Reconstruction and Development (EBRD) was signed in Paris.

As an international institution with a regional purpose, as a mixture

of a priva te and development bank, the EBRD is without doubt a novel

organisation.

But almost three years after its creation what is the assessment of this institution?

This thesis attemps not only to explain the existence of the Bank, the reasons which led to its creation but also to make explicit its mode of operation while casting a critical eye on its actions in Eastern Europe.

(5)

REMERCIEMENTS

Je tiens à remercier le Professeur Cally Jordan sous la direction de

laquelle cette thèse a été écrite. Je veux aussi remercier l'Université McGILL

pour m'avoir décerné la bourse "Chief Justice R. A. Greenshields Memorial

Scholarship" qui m'a permis d'achever ma thèse.

Je tiens également à remercier Mme Mélanie Stein de la BERD pour m'avoir communiqué certains documents.

Enfin je remercie sincèrement ma famille et tous les amis qui m'ont soutenu et encouragé dans ce travail et tout spécialement Mlles Stéphanie Rinville et Annick Rousseau-Dumarcet qui ont très soigneusement relu ces pages ainsi que Me J. D. Hacala pour son aide et ses encouragements.

(6)

SOMMAIRE

INTRODUCTION 1

1-L'éclatement du bloc communiste 1

2-Historique de la BERD .4

2.1 Les négociations .4

2.2 L'aboutissement .5

-Le capital et sa répartition 6

-La présidence de la BERD 6

-Les exigences américaines 7

CHAPITRE I-CRITIQUES ET UTILITÉ DE LA BERD A-LES JUSTIFICATIONS PROPRES DE LA BERD

1-Les justifications géopolitiques 9

1.1 Vis-à-vis de l'Europe 9

1.2 Vis-à-vis des États-Unis l l

1.3 Vis-à-vis du Tiers Monde 13

2-Les justifications économiques 13

2.1 Un lieu de réflexion conceptuelle 13

2.2 Une banque d'affaires 14

3-Les justifications statutaires 16

3.1 Un rôle politique 16

(7)

B-LES CRITIQUES 17

1-L'inadaptation aux besoins 17

1.1 L'état de l'économie 17

1.2 Les critiques adressées à la BERD et leur réfutation 18

2-La multiplicité des aides et le double emploi avec

d'autres organismes internationaux 21

2.1 Le programme "PHARE" et le Groupe des 24 22

2.2 La Banque Européenne d'Investissement (BEI) 23

2.3 La Banque Mondial€-Généralités 25

-L'obstacle technique 27

-La Banque Mondiale: banque du Tiers Monde 28

-L'absence de condition politique 29

-La Banque Mondiale n'est pas une banque d·affaires 29

2.4 La Société Financière Internationale 311

3-L'echec des banques régionales pour le développement 31

3.1 Les critiques adressées à ces banques 31

3.2 La non-pertinence des critiques pour la BERD 33

CHAPITRE II-LES PARTICULARITÉS DU

FONCTIONNEMENT DE LA BERD: EXAMEN DES STATUTS

A-LES FONCTIONS DE LA BERD 36

l-L'assistance à la transition 37

1.1 La condition politique 37

-Description 37

-La difficile exécution des conditions politiques 39

-La légitimité d'une telle condition 42

L · d'" 44

- e nsque mgerence .

(8)

1.2 Les modalités de l'assistance 46

-Une aide surtout tournée vers le secteur privé 46

-Le point délicat de l'aide au secteur public .48

-La difficile combinaison banque d'affaires

banque de développement. .51

2-La protection de l'environnement ; 53

2.1 Les modalités .53

2.2 La position des autres institutions internationales 54

2.3 La situation environnementale en Europe de l'Est.. 55

3-La coopération avec les autres organismes internationaux 59

3.1 Description .59

3.2 Coopération ou concurrence? 61

B-LES MODALITÉS DE FONCTIONNEMENT DE LA BERD 62

1-Le financement de la BERD 62

1.1 Le capital de la BERD 62

-La teneur exacte du capital... 63

-Les droits de préemption lors d'une augmentation de

capital. 64

-L'allocation des revenus 66

1.2 Le pouvoir d'emprunt de la BERD 6;

-Un pouvoir général. 67

-L'utilisation des fonds 68

1.3 Les fonds spéciaux de la BERD 69

2-Les opérations réalisables par la BERD 70

2.1 Les types d'opérations réalisables et leurs modalités 70

-La dichotomie opérations ordinaires

opérations spéciales 70

-Les principes gouvernant les activités de la BERD 71

(9)

2.2 Les limites statutaires aux opérations de la Banque 74

-Les limites générales concernant les opérations 74

-Les limites imposées à un État en particulier 76

-L'interdiction d'exercer certaines activités 78

2.3 La suspension et la mise à terme des opérations 78

3-La structure organisationnelle de la BERD 80

3.1 Les différents organes et leurs pouvoirs 80

-Le Conseil des Gouverneurs 80

-Le Conseil d'Administration 81

-Le Président et son personnel... 82

3.2 Les questions relatives au statut 83

-Le statut de la BERD 83

-Le statut du personnel de la Banque 84

3.3 Les questions relatives à l'Accord 85

-L'interprétation 85

(10)

CHAPITRE III - BILAN DES OPÉRATIONS RÉALISÉES PAR LA BERD

A -LES FAITS 87

1-Les ressources de la BERD 87

1.1 La politique d'emprunt 88

1.2 Les autres ressources 89

2- Les secteurs d'intervention de la BERD 89

2.1 L'intervention "banque de développement" 90

- La transformation du cadre juridique des pays de l'Est..90

- L'établissement d'un réseau de transport fiable 91

- Les télécommunications 92

- L'énergie 93

- Le développement urbain et la décentralisation 94

-L'environneoment. , 94

2.2 L'intervention "banque d'affaires" 96

-L'établissement d'un secteur financier. 96

- La privatisation 97

- L'investissement direct étranger 98

B -UN BILAN MITIGÉ 99

1- Un contexte économique difficile 99

1.1 L'ouverture de l'Europe ? 100

1.2 Le manque de coordination 101

1.3 La situation des pays bénéficiaires 102

2- Une organisation contestée 103

2.1 Une institution de compromis 104

2.2 Les dépenses de la BERD 105

CONCLUSION 106

BIBLIOGRAPHIE

(11)

INTRODUCTION

Le 29 mai 1990 furent signés à Paris les statuts de la Banque

Européenne pour la Reconstruction et le Développement (BERD). Moins

d'un an après, le 15 avril 1991, cette nouvelle institution financière internationale fut inaugurée en grande pompe par les représentants de 40

États. Puisqu'il existe aujourd'hui une multitude d'organismes

internationaux dont nombreux sont déjà spécialisés dans l'aide financière, on peut valablement questionner l'existence de cette nouvelle Banque dont la mission pourtant unique est de faire passer les pays d'Europe de l'Est du communisme au capitalisme. En réalité l'analyse plus poussée de la BERD, que nous allons faire dans cette étude, ainsi que la mise en relief des projets qu'elle a entrepris en Europe de l'Est depuis sa création vont mettre en évidence sa spécificité et surtout permettre de démontrer son utilité.

Mais pour bien comprendre les raisons d'être de la BERD, ses

caractéristiques ainsi que les enjeux existant pour un tel organisme, il est

avant tout nécessaire d'apporter quelques précisions sur le contexte historique précédant sa création.

l-L'éclatement du bloc communiste

Au lendemain de la seconde Guerre Mondiale, suite aUX accords de

Yalta entre les vainqueurs de la guerre, l'Union Soviétique occupa l'Europe centrale et orientale. Toute cette région du monde se trouva soudain sous

influence soviétique. Cela se traduisit d'abord par une coupure

géographique, la République Démocratique d'Allemagne, la Pologne, la Tchécoslovaquie, la Yougoslavie, la Hongrie, la Roumanie, la Bulgarie et l'Albanie se retrouvèrent derrière une frontière infranchissable qui se matérialisa en 1961 par le rideau de fer.

Cette domination soviétique fut également politique, tous ces gouvernements furent dirigés par des communistes, et les États devinrent membres du Pacte de Varsovie} manifestation de leur solidarité stratégique face à l'alliance du monde occidental.

ITous ces États, exceptée la Yougoslavie, dont le dirigeant, le maréchal Tito, refusa toujours de se soumettre au diktat de Moscou, signèrent à Varsovie un pacte de défense réciproque le 14 mai 1955.

(12)

Enfin, la dernière manifestation d.e Iii domination soviétique mais non la moindre, lut un isolement économique du reste du monde. Ainsi à l'initiative de Moscou fut créé en 1949 le Conseil d'Aide Économique Mutuel (CAEM), organisation économique interne au bloc communiste visant à promouvoir la coopération économique et à renforcer les liens commerciaux entre l'URSS et les pays "frères"; et surtout à pallier les manques résultant de

-~larupture des échanges d'avec le reste du monde.

Malgré plusieurs tentatives d'émancipation de ces pays2, ce n'est pas avant les années 1980 qu'un début d'ouverture se produisit. La dissidence politique active mais surtout une situation économique de plus en plus désastreuse poussèrent certains pays comme la Hongrie, la Tchécoslovaquie et la RDA3 à se rapprocher lentement du système économique capitaliste. De nombreux pays de l'Est, déjà membres du GATT4 depuis plusieurs années,s demandèrent à être admis au sein du Fonds Monétaire International (FMI) et

donc à pouvoir bénéficier de l'aide de la Banque Mondiale.6 Mais, ces pays

2A deux reprises, en 1956 à Budapest, puis en 1968 lors du Printemps de Prague, les Soviétiques n'hésitèrent pas à faire entrer leur armée dans ces

pays en révolte. Aucun pays de l'Ouest n'intervenant, ces tentatives

d'émancipation furent toujours des échecs.

3Ce fut notamment le cas de la RDA qui, culturellement très proche de la RFA, établit dès les années 1960 l'accord cadre de Berlin, grâce auquel allaient par la suite se développer les échanges commerciaux entre les deux pays, particulièrement au cours des années 1980. Pour un historique précis des relations économiques entre ces deux pays, voir l'ouvrage de G. Bertsch et CT. Saunders, éd., East-West Economie Relations in the 1990'5, 1re éd., London, Macmillan Press, 1989; et plus particulièrement le chapitre Il par D. Cornelsen, "Economic Relations Between the Federal Republic of Germany and the German Democratic Republic" 181.

4Le GATT ou General Agreement on Tariffs and Trade est un accord international signé lui aussi au lendemain de la seconde Guerre Mondiale qui vise à favoriser les échanges commerciaux entre les différents pays signataires.

sLa Tchécoslovaquie est le seul pays de l'Est à avoir été membre du GATT dès sa création; elle signa les accords en 1948, avant de passer sous régime

communiste, et resta membre par la suite. Après avoir eu le statut

d'observateur pendant de longues années, la Pologne devint membre en 1967, la Roumanie en 1971 et la Hongrie en 1973. Pour toutes les questions relatives aux relations entre le bloc communiste et le GATT, voir l'article de Ake Linden, "Relations Between CMEA Countries and the GATT" dans l'ouvrage cité supra note 3.

6La Yougoslavie, la Tchécoslovaquie et la Pologne adhérèrent au FMI dès 1945; la Tchécoslovaquie en fut expulsée pour défaut de paiement en 1953, et la Pologne se retira en 1950 avant d'y revenir en 1986. La Roumanie entra au FMI en 1972 et la Hongrie en 1982. Pour les relations entre les pays du bloc

(13)

demeura!lt sous forte influence soviétique, ils gardèrênt une économie dirigiste et planifiée, et restèrent géographiquement, politiquement, et économiquement isolés de l'Ouest.

C'est lors de l'arrivée au pouvoir en URSS de M. Gorbatchev en 1984, et suite aux réformes économiques entreprises par ce dernier,? que les pays d'Europe de l'Est ouvrirent progressivement leur économie au capitalisme, dévoilant ainsi dans quelle situation désastreuse ils se trouvaient. Les pays industrialisés occidentaux prirent alors conscience, avant même le véritable "éclatement" du bloc communiste, aujourd'hui symbolisé par la chute du

mur de Berlin en octobre 1989, de l'urgence à aider sur le plan économique

les pays de l'Est.

Outre l'aide fournie par le FMI et la Banque Mondiale8, de nombreux pays d'Europe de l'Est devinrent membres notamment de la Banque pour les

Règlements Internationaux.9 Même si cette banque n'agit que dans le

domaine de l'endettement, elle reflète néanmoins l'intérêt croissant porté

par le monde occidental à cette région du monde. De plus, lors du sommet

de Paris en juillet 1989, la Commission des Communautés européennes fut chargée par les pays industrialisés de coordonner l'aide en provenance de

tous les pays occidentaux accordéeà la Pologne et la Hongrie.

Mais c'est lors de l'effondrement du bloc communiste et de

l'ouverture subséquente à l'Occident que l'état exact de la situation

économique s'est véritablement révélé et qu'une forme d'aide spécialement adaptée aux besoins de ces pays a dû être envisagée. Il fallait créer d'urgence

un organisme international spécialisé dans l'aide à cette région.

Suite à la proposition lors du sommet européen du 18 novembre 1989

du Président français François Mitterrand10, les dirigeants des États de la

communiste, le FMI et la Banque Mondiale, voir notamment l'ouvrage de

V.J. Assetto,

The Soviet Bloc in the IMF and the IBRD,

1re éd., Boulder,

Colorado, Westview Press, 1988.

7Pour une analyse des réformes générées par M. Gorbatchev, notamment au

plan financier, voir dans l'ouvrage de C. Kessides et al., éd.,

Financial

Reforms in Socialist Economies,

1re éd., Washington D.C., World Bank, 1989 l'article de G. Grossman, "Monetary and Financial Aspects of Gorbatchev's

Reform" à la page 28.

8Voir l'article de M. Cogen, "The EC and Eastern Europe: The Birth of Pan-European Financial Cooperation?" (1990) 43 Studia Diplomatica 45.

9 La Bulgarie, la Tchécoslovaquie, la Hongrie, la Pologne, la Roumanie et

enfin la Yougoslavie sont membres de cette banque située à Bâle en Suisse.

POlir de plus amples précisions voir l'article supra note 8.

10 Il demeure néanmoins une incertitude quant à la pérennité de l'idée.

(14)

Communauté, lors du sommet de Strasbourg des 8 et 9 décembre 1989,

envisagèrent la création immédiate d'une "banque européenne".

2-Historique de la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement

2.1 Les négociations

Les véritables négociations relatives à la création d'une banque

européenne débutèrent seulement en janvier 1990.

La dénomination Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement (BERD) fut déterminée lors de la réunion à Paris, le 15

janvier 1990, d'experts de 34 pays différents ainsi que de la Commission des

Communautés Européennes et de la Banque Européenne d'Investissement (BEI).

Les douze pays membres de la Communauté Européenne 11, les six

pays de l'Association Européenne de Libre Échange (AELE)12, ainsi que huit pays de l'Est: l'Allemagne de l'Est, la Bulgarie, la Hongrie, la Pologne, la Roumanie, la Tchécoslovaquie, l'URSS et la Yougoslavie; les membres restants de l'OCDE: l'Australie, le Japon, le Canada, les États-Unis et la Nouvelle-Zélande; et enfin Chypre, la Turquie et Malte étaient présents.

Pour de nombreux observateurs cela fut un sommet comparable à celui de Bretton Woods par lequel furent créés la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International.13 Dès ce sommet, où la création de la BERD n'en était qu'à un stade préliminaire, plusieurs points fondamentaux furent discutés.

octobre 1989 l'idée d'une banque aidant la Pologne à passer d'une économie

dirigée à une économie de marché. Voir l'article de D. Delamaide, "Eastern

Europe: Friends in High Places"

Euromoney

(juin 1990) 24.

D'autre part, si le concept a été proposé par F. Mitterrand, il est souvent

suggéré que l'idée initiale émane en fait de Jacques Attali, le premier Président de la Banque. Voir l'article de A.J. Blinken, "Jacques of Ali Trades"

The New York Times Magazine

(13 octobre 1991) 37.

11 La Belgique, le Danemark, l'Espagne, la France, la Grande-Bretagne, la

Grèce, l'Italie, l'Irlande, le Luxembourg, les Pays-Bas, le Portugal et la RFA. 12 L'Autriche, la Finlande, l'Islande, la Norvège, la Suède et la Suisse.

13 Ce sommet historique qui eu lieu en 1944aux États-Unis est à l'origine de

toutes les institutions financières mondiales actuelles. La comparaison avec celui de Paris pour la création de la BERD résulte du fait que la BERD est non seulement une nouvelle institution financière internationale mais aussi du fait que le sommet de Paris réunit encore plus de participants.

(15)

Le premier concernait le futur capital de la BERD: selon la France 15

milliards d'ÉCUS seraient nécessaires pour aider l'Europe de l'Est à passer du

communisme au capitalisme tandis que la Grande-Bretagne, les États-Unis

et le Japon estimaient cette somme à seulement 5 milliards d'ÉCUS.14

Le deuxième point de discussion fut relatif à la participation des

différents États. Il fallait d'une part décider quel pourcentage de capital et

donc de vote attribuer à chaque État membre;15 d'autre part se posa

l'épineuse question de la participation soviétique. Ne risquait-on pas, en acceptant l'URSS comme membre, de voir tous les fonds de la BERD

monopolisés ainsi à son profit?

Le troisième sujet de débat concerna la présidence de cette nouvelle institution internationale: où allait-elle se situer et qui en aurait le premier mandat?

Enfin la. dernière question, relative à la répartition des

investissements entre le secteur public et le secteur privé, fut longuement débattue.l6

Lors de la rencontre extraordinaire du Conseil Européen à Dublin en

avril 1990, les dirigeants accueillirent favorablement l'accord précédemment

acquis sur la nécessaire existence de la BERD mais tous les points litigieux que nous venons d'examiner demeurèrent en suspens.

2.2 L'aboutissement

Les représentants de 40 États, de la Commission des Communautés

Européennes et de la BEI se réunirent à l'Élysée le 29 mai 1990 pour signer la

charte fondatrice de la BERD. Ils définirent alors une organisation

internationale visant à financer le développement industriel et économique

des pays de l'Europe de l'Est grâce à des prêts, garanties, investissements en

capitaux, émission d'actions ou d'obligations po'.!r promouvoir le passage à

une économie de marché. Toutes les délégations reconnurent que la BERD

14Voir l'article "A BERD in the Hand"

The Economist

(20 janvier 1990) 92.

15Les États-Unis, par exemple, n'acceptèrent qu'avec réticence la prédominance européenne, Pour l'aboutissement des négociations sur ce

point voir le paragraphe 2.2.

16 Sur toutes ces questions il est intéressant de voir l'opinion de M. Félix Rohatyn, expert financier international et associé de la Banque Lazard Frères

et Compagnie; dans l'interview de R. Guttman, "The Financing of Eastern

(16)

ne pourrait être qu'une des multiples sources de financement des projets en Europe de l'Est mais insistèrent sur son rôle d'agence d'assistance technique et de coordination.

La Banque deviendrait opérationnelle lorsque les deux tiers des 42 États membres auraient ratifié leur signature à la charte constitutive. La date limite pour une telle ratification fut fixée au 31 mars 1991. Les questions restées précédemment en suspens furent clairement réglées.

-Le capital et sa répartition

Le capital détenu par la Banque fut fixé à 10 milliards d'ÉCUS, compromis entre la position française et la position britannique. La répartition de la participation et des voix entre les pays membres ne se fit pas sans difficultés. Il fut finalement décidé, et cela pour la première fois dans

l'histoire d'une organisation internationale, que la Communauté

Économique et ses membres détiendraient la majorité -51%- du capital et

donc des voix. Néanmoins, les États-Unis apportent à eux seuls la plus

grosse contribution individuelle avec 10 % du capital.

Enfin, pour la première fois dans l'histoire d'une organisation internationale, les pays de l'Est sont membres à part entière au côté des pays

développés comme le Japon, l'Australie etc..

P .

On accorda à l'URSS 6 %des

voix, à condition que son pouvoir d'emprunt se limite à cette contribution. On verra par la suite que ce plafond disparaîtra.

-La présidence de la BERD

Les discussions sur le siège de la BERD ainsi que sur sa présidence se

transformèrent vite en une question de politique internationale. En effet

plusieurs États s'étaient portés candidats18 mais en réalité l'affaire fut réglée

17Pour les participations exactes des différents États, voir le tableau tiré de

l'article de J. Attali, "An International Institution of the Third Kind" Europe

(avril 1991) 18 reproduit en Annexe 1.

18 Pour le siège de la nouvelle institution plusieurs États européens

envoyèrent leur candidature: la Tchécoslovaquie invoquant sa situation au coeur de l'Europe de l'Est mais néanmoins très proche de l'Ouest, les Américains furent d'ailleurs sensibles à cette argumentation puisqu'ils soutinrent officiellement la candidature de Prague. L'Autriche quant à elle arguait de ses multiples expériences avec les États limitrophes d'Europe de l'Est, le Danemark invoquait le fait qu'aucune institution européenne n'y soit déjà établie et enfin la France revendiquait la pérennité de l'idée. Voir

(17)

suite à un compromis entre la Grande-Bretagne et la France et cela sur un tout autre sujet.19

Cet accord entre deux États déplut particulièrement aux Hollandais qui quittèrent les négociations estimant qu'il s'agissait là d'un mépris des grands États européens pour les membres plus petits de la Communauté, mais cette décision fut néanmoins acceptée par les autres délégations.2o

-Les exigences américaines

Les États-Unis apportèrent de nombreuses réserves à leur

participation. Ils insistèrent d'abord pour que seulement 40 % des ressources

soient utilisées pour des projets d'infrastructures, les 60 % restants devant

être impérativement consacrés à des financements dans le secteur privé. Ensuite ils exigèrent que les règles d'emprunt ne puissent être

modifiées sans l'accord d'au moins 85 % des partenaires, ce qui aboutit à leur

donner un contrôle sur toutes les opérations, leur vote réuni' à celui du Japon pouvant bloquer tout changement. De plus, ils refusèrent d'apporter leur contribution en ÉCUS, ne voulant assumer aucun risque de change.21 notamment l'ilrticle de P. Lemaitre, "La CEE va proposer à l'Europe de l'Est

15 % du capital de la banque pour la reconstruction" Le Monde (13 janvier

1990)25. '

Voir aussi l'article dans Le Monde (25 dé 'embre 1989) 14.

L'attribution de la présidence se transforma rapidement en une lutte entre M. Jacques Attali, souvent considéré comme le père spirituel de la BERD et M. Onno Ruding, ancien Ministre des Finances hollandais, particulièrement reconnu dans le milieu financier international. Voir notamment l'article

"The BERD Struggles to Leave the Egg" The Economist (7 avril 1990) 60.

19 La question fut débattue à l'occasion d'un sommet des sept pays les plus industrialisés, le groupe des G7, qui comprend les États-Unis, le Japon, la RFA, la France, la Grande-Bretagne, le Canada et l'Italie. Le pouvoir de vote de la France et de la Grande Bretagne au sein du FMI devant être renégocié, ils acceptèrent d'être à égalité à la quatrième place si, d'une part, Londres était

choisi comme le siège de la'~'lture BERD, et si d'autre part, la présidence

inaugurale revenait à un Français, en l'occurrence M. Jacques Attali, ancien conseiller spécial du Président de la République française et bien souvent cité

comme le "père" de la BERD. Pour de plus amples informations sur cet

accord controversé, voir l'article dans Euromoney cité supra note 10.

20A terme, même les Hollandais furent contraints d'accepter, tous les autres pays s'y étant résolus.

21Ainsi pour le Sous-secrétaire d'État aux affaires étrangères américain: "The ECU issue is one that is ':ery technical, but very, very important to us. As I said in my testimony, we cannot accept a commitrnent that puts the foreign currency risk onto us and provides in our budget system an

(18)

open-•

Enfin ils obtinrent que l'URSS ne puisse emprunter plus que le capital détenu dans la banque, c'est-à-dire 6% des fonds; et cela pendant au moins trois ans. La crainte que les besoins vertigineux de ce pays n'absorbent tous les fonds de la BERD, ainsi que l'incertitude face à la politique des dirigeants

communistes justifièrent cette décision.22 Néanmoins, suite à l'éclatement

de l'URSS en une multitude de républiques indépendantes, cette restriction fut rapidement levée.

Inaugurée à Londres les 15, 16, 17 avril 1991 en présence de trente-neuf chefs d'État ou de gouvernement 23, ainsi que des représentants de la Commission des communautés européennes et de la BEI, qualifiée par certains de "première institution de la Nouvelle Europe"24; la BERD a aujourd'hui un peu plus de deux ans et a déjà effectué plusieurs opérations dans les pays de l'Est. Il est donc désormais possible de faire le point sur cette institution.

Mais avant d'étudier les particularités du fonctionnement de la BERD grâce à l'analyse de ses statuts, ce qui sera l'objet du deuxième chapitre de

cette étude, il est nécessaire d'examiner les critiques adressées à cette toute

nouvelle institution pour déterminer si elle présente aujourd'hui une véritable utilité, cela sera l'objet de ce premier chapitre. Enfin, pour avoir une vision complète de cet organisme, nous dresserons, dans un dernier chapitre, un tableau des opérations qu'elle a jusqu'à présent effectuées dans

ended obligation.(...)We will not subject ourselves to a floating mechanism that would then create a precedent for other international institutions for them to change their basic standard of value in this direction, toward SDR's or sorne other composite unit, which would open up a very substantial budget problem for us." Pour toutes les citations tirées des débats devant la commission sénatoriale américaine voir: European Bank for Reconstruction and Development, Hearings before the Subcommittee on international economic policy, trade, oceans and environment of the committee on foreign relations United States Senaèe, one hundred first Congress, second

session. March 22 and July 18, 1990; U.S. Government Printing Office;

Washington, 1990.

22 Pour de nombreux officiels européens cette concession fut faite trop rapidement aux Américains, qui profitèrent de l'absence de cohésion entre

les différents délégués européens. Voir l'article paru dans

Euromoney

cité

supra note 10.

23 Des quarante États initiaux on est passé à trente-neuf suite à l'unification

de l'Allemagne.

(19)

les pays d'Europe de l'Est.

CHAPITRE 1- CRITIQUES ET UTILITÉ DE LA BERD

Si de nombreuses critiques ont été émises à l'encontre de la BERD,25 il est cependant certain que de nombreuses données peuvent justifier de son

existence, voire de son utilité. C'est pourquoi, après l'énumération des

diverses justifications de la BERD, nous réfuterons les critiques qui lui ont été faites afin de démontrer l'utilité de ce tout nouvel organisme.

A-LES JUSTIFICATIONS PROPRES DE LA BERD

Cette Banque présente à elle seule certaines caractéristiques que

d'autres organismes ne détiennent pas. Des considérations géopolitiques,

économiques et statutaires confèrent à la BERD une véritable spécificité dont aucune autre organisation internationale ne peut faire preuve.26

1-Les justifications géopolitiques

1.1 Vis-à-vis de l'Europe

La création d'un organisme international mais à majorité européenne n'est pas sans raisons dans un monde où toutes les grandes organisations internationales sont sous le contrôle des États-Unis. Si pour la première fois cela manifeste de la reconnaissance par le monde de l'entité politique européenne, la création de la BERD est également une préfiguration de ce

que pourrait être l'Europe en l'an 2000. L'émergence d'un bloc européen

dont le centre serait la CE est une idée que beaucoup défendent dès

aujourd'hui. Certains envisagent une "confédération européenne",27 tandis

25 Voir notamment l'article "A Bank in the Hand" The Economist (13 avril

1991) 14 par lequel l'auteur commence son article par ces mots: "If the

European Bank for Reconstruction and Development did not exist, it would not need inventing".

26Cette argumentation est essentiellement tirée de l'article de F. Demarigny et F. Vuillemin, "La BERD: une réponse adaptée aux besoins des pays de l'Est?" (1990) 11 Esprit 47.

27Cela est notamment la solution envisagée par le Président F. Mitterrand. Voir l'article cité supra note 26.

(20)

que d'autres parlent de système de "cercles concentriques".28 La BERD trouve sa place quelque soit le schéma envisagé dans l'optique d'une grande

Europe. Ainsi selon

J.

Attali: "The EBRD was created precisely to help these

countries meet these formidable challenges. Even more, to help all the cO.'mtries of Europe become integrated into a larger European economic and political arena, to have a common framework with which to reflect together on the future of the continent. The European Bank is the harbinger, l

believe of a wider Europe, a political and economic space in which all will have a raie to play....Along with other existing institutions, the European Bank will be playing an important role in the pan-european debate."29

La participation de la CE et de la BEI dans le capital de la BERD30 renforce encore d'avantage la signification politique de cet organisme pour

l'Europe. La Banque Européenne pour la Reconstruction et le

Développement se veut aussi le symbole de la future coopération financière

en Europe. C'est pourquoi il était si important pour les européens d'en avoir

le contrôle permanent. Cela se retrouve d'ailleurs dans l'Accord établissant

la BERD puisque d'une part le préambule dispose que cette institution sera à

caractère "essentiellement européen" et que d'autre part, si d'autres pays peuvent en devenir membres, aucune nouvelle participation ne pourra résulter dans une réduction du nombre de parts détenues par "le bloc européen". Les pays membres de la CE, la CE et la BEI sont donc assurés de conserver leur majorité.31 L'accent mis sur le caractère pan-européen de la 28C'est le schéma actuellement proposé par la Commission européenne. Au centre se situerait le noyau composé de l'Union économique et monétaire, autour le deuxième cercle avec deux piliers, la CE et l'AELE qui établiraient des liens privilégiés avec les pays de l'Est et les pays du bassin méditerranéen, enfin le troisième cercle comprendrait les pays de l'ex-URSS. Voir l'article

cité supra note 26.

29Voir le discours de M.

J.

Attali, "The European Bank for Reconstruction

and Development" Vital Speeches of the Day (ler mai 1991) 422.

30U est rare que des organisations internationales soient elles-mêmes membres d'autres organismes internationaux. Ainsi les accords établissant la BIRD ou les banques régionales de développement ne le permettent pas. Seul le Fonds pour le Développement Africain a comme membre la Banque Africaine de Déve!oppement. La participation de la CE ainsi que de la BEI, en plus de celle des Etats membres de la CE renforce le caractère européen de la

BERD. Pour de plus amples détails sur les règles communautaires

permettant une telle participation, ainsi que sur la position de l'Accord établissant la BERD dans l'ordre juriUique communautaire voir l'article de D.R.R. Dunnett, "The European Bank for Reconstruction and Development:

A legal survey" (l991) 28Comm. Market L. Rev. 571.

(21)

BERD indique clairement le désir à long terme d'intégrer l'Europe de l'Est dans le système communautaire.32

L'hypothèse de la création d'une grande Europe n'est pas la seule raison pour laquelle on a voulu donner le contrôle de la BERD à l'Europe toute entière. La création d'une nouvelle institution multilatérale vise aussi à empêcher que les relations avec les pays d'Europe de l'Est ne soient monopolisées par un seul État. Or non seulement la nouvelle Allemagne issue de la réunification, profitant de sa situation géographique et de sa puissance économique;33 mais aussi les États-Unis représentaient de ce point de vue un certain danger.

1.2 Vis-à-vis des États-Unis

Initialement les Américains ne voulaient pas s'impliquer de façon trop hâtive dans le projet. M. Attali leur délivra un ultimatum: ou ils s'impliquaient dès le début du projet ou ils en seraient exclus.34 Puis par la suite les Européens eurent du mal à définir clairement leur position vis-à-vis de la participation américaine dans la BERD.

En effet, ils voulaient d'une part éviter à tout prix que les É-U ne se replient sur eux-mêmes et ne s'impliquent pas du tout dans l'aide à l'Europe de l'Est. L'engagement économique et politique des États-Unis en Europe est une longue tradition à laquelle les Européens ne souhaitent pas mettre fin même si l'émergence de l'Europe en tant qu'entité économique, politique, et bientôt monétaire lui confère une plus grande autonomie et un plus grand poids sur la scène internationale.35 C'est sans doute une des raisons pour lesquelles la BEI, institution purement européenne, ne s'est pas vu attribuer les fonctions actuelles de la BERD. S'il est vrai que les É-U se trouvent actuellement dans une situation économique difficile et qu'ils sont

32Voir l'article de M. Easton et K. Rorer, "The European Bank for

Reconstruction and Development" (1991) 32 Harv. Int. 1.

J.

527.

33Pour les initiatives de l'Allemagne en Europe de l'Est voir notamment l'article de 1. Carroué, "L'Allemagne en première ligne pour la conquête des

économies de l'Est"

Le Monde Diplomatique

(janvier 1992).

34Voir l'article "A BERD in the Hand"

The Economist

(20 janvier 1990) 92.

35Ce fut d'ailleurs dés le départ la position de l'Administration américaine. Ainsi selon M. Mulford: "Beyond the economic points l made, there is the broader political question. l believe it would be very difficult to justify not joining the Bank because the US has had a longterm commitment to Europe...To not join that effort, it seems to me, would be a great omission on

(22)

particulièrement attentifs à la création d'un marché commun avec le Canada

et le Mexique, il fallait cependant attirer leur attention sur la situation en

Europe de l'Est, leur faisant valoir qu'ils étaient d'une part indispensables à l'existence de la BERD et que, d'autre part, ils risqueraient de passer à côté de nombreuses affaires en s'abstenant d'y participer.36

Mais à l'inverse les Européens ne voulaient pas d'une prédominance

amériraine sur l'institution. Au contraire un certain contrôle sur cel

organisme visait aussi à contrebalancer la toute puissance politique

américaine issue du "Nouvel Ordre Mondial". Si la banque est une

organisation internationale, elle concerne surtout l'Europe, et en cela elle est d'autant plus européenne. Mais l'on verra par la suite que de nombreuses modalités gouvernant la BERD résultent en fait directement des exigences américaines exprimées lors des négociations. Si les États-Unis acceptèrent une prédominance européenne sur l'institution, ce fut seulement à ces conditions.

La difficulté d'impliquer d'autres États que ceux de l'Europe ne concernait pas seulement les États-Unis, puisqu'à terme tous les États de l'OCDE ont rejoint la Banque, ainsi que certains pays du bassin

méditerranéen. D'ailleurs le fait que la BERD soit "essentiellement

européenne de caractère" et cependant internationale quant à sa participation, est source potentielle de tensions. En effet, si l'on désire que l'Europe de l'Est s'intègre non seulement à l'Europe de l'Ouest mais aussi à l'économie internationale, il va falloir que les points de vue des différents acteurs quant aux modalités de l'intégration ne divergent pas de façon trop prononcée.37

36C'est pourquoi le Président de la BERD dans son discours devant la Foreign Policy Association de New York leur dit: "...And 1 may add that the contribution of American entrepreneurship and know-how will be

indispensable. 1 am aware of the tremendous interest here in Eastern

Europe, not only because so many Americans have their roots there, but also

because there are real business opportunities. Those who establish [a]

presence there now and who have long-term objectives in mind will be the

most likely to succeed. The European Bank will have a long-term

perspective. We will seek to create enduring relationships with our partners in the East and with yourselves, with the entire business and financial

community. Many contacts have already been made, and we hope to be

working actively with you." Voir article cité supra note 29.

37Ce perpétuel confli' entre les deux grands blocs participant à la BERD a été particulièrement bien mis en valeur par les auteurs de l'article cité supra

note 32. Cette lutte d'influence se transcrit quotidiennement à la BERD par

(23)

1.3 Vis":-à-vis du Tiers Monde

La création d'une nouvelle institution est également due à la situation et à la position de divers États du Tiers Monde. En effet, l'autre alternative internationale aurait été de confier à une nouvelle branche spécialisée de la Banque Mondiale, ou à la 5FI38 la mission actuelle de la BERD. Cependant, la situation très difficile dans laquelle se trouvent les pays en voie de développement a sans doute contribué à la création d'une autre banque. La dotation à une branche spécialisée de la Banque Mondiale du règlement des problèmes de l'Europe de l'Est risquait de drainer une grande partie des fonds de la Banque Mondiale vers cette région et cela aux dépends des pays

en voie de dÉveloppement. Il n'est d'ailleurs pas cert'\in que ces derniers,

membres de la Banque Mondiale, aient accepté une telle solution. Même

aujourd'hui, alors qu'une institution nouvelle a été créée, ces États demeurent inquiets quant aux possibles effets de désaffectation et de désinvestissement que l'ouverture des pays de l'Est pourrait provoquer dans leurs régions.39

Mais la création de la BERD n'est pas seulement justifiée sur un plan géopolitique, elle l'est aussi et surtout sur un plan économique.

2-Les justifications économiques 2.1 Un lieu de réflexion conceptuelle

Le passage sans précédent du communisme au capitalisme soulève de nombreuses interrogations car il y a là un vide théorique énorme, personne n'ayant écrit sur cette question ni ne l'ayant d'ailleurs véritablement prévue. Or la BERD peut sans aucun doute être un lieu de réflexion conceptuelle sur cette transition, sans pour autant se détacher de la réalité du monde des

soutenue par les américains voulant consacrer le maximum de fonds de la BERD au secteur privé; et la division "Banque de développement" s'occupant des projets d'infrastructures et plus proche de la vision

européenne de la BERD. Voir notamment l'article de R. Evans, "Eastern

Europe's Last Dictator"

Euromoney supplement

(avril 1992) 3.

38Pour plus d'informations sur cette filiale de la Banque Mondiale voir notamment le § 2.4 à la page 32 de cette étude.

39Voir notamment l'article d'E. Levy, "Du communisme au capitalisme: une

(24)

affaires, qui en sera le reflet évoltitif.4o De par son rôle particulier, elle a une

vision à la fois macro-économique et régionale des problèmes liés à ce

changement. Si plusieurs schémas existent actuellement quant à la transition

possible d'une économie planifiée à une économie de marché 41 il est certain

que la BERD devra plus ou moins adopter un de ces schémas directeurs. En fait, de par ses interventions elle permettra également de favoriser l'une ou l'autre politique et de finalement déterminer laquelle permet le mieux une transition rapide et sans trop de dfficultés.

2.2 Une banque d'affaires

Mais c'est surtout l'activité de banque d'affaires, activité qui n'existe dans aucune institution internationale (sauf dans la SFI), ni dans les bariques régionales de développement, qui justifiait la création de la BERD au plan économique. En effet la Banque pouvant prendre des participations dans des entreprises privées, elle participe ainsi directement au processus de

privatisation en cours. Ses représentants pourront siéger au Conseil

d'Administration des sociétés et pourront orienter les choix stratégiques de

40Certains Américains prirent d'ailleurs rapidement conscience que, cette

organisation spécialisé~risquant de devenir l'organe de référence pour les

entrepreneurs et les Etats industrialisés souhaitant investir à l'Est, ils

perdraient, en ne participant pas à la BERD, le bénéfice de l'éventuelle

assistance technique que la Banque pourrait leur apporter dans le futur. A ce sujet voir notamment l'intervention du Sénateur Sarbanes:

"But 1have another concern that relates to U.S. participation, which is that

this bank will become the source of technical expertise for Eastern European countries-the place they will look to for advice and counsel, where they will interact essentially with the West as they seek to develop their economies. For these purposes their primary resource will end up being the staff of that institution, and the absence of the United States from that institution would

leave us outside that process.(. ..) It is important for the United States to

continue to play a leadership role." dans les débats devant la Commission

du Sénat, supra note 21.

41L'article cité supra note 26 fait référence à trois modèles différents. Le

premier prône une libéralisation totale de l'économie pour effectuer la

transition le plus rapidement possible. Mais cette alternative risque

d'aggraver le délabrement des infrastructures suite aux restrictions budgétaires, de renforcer l'inflation suite à la libéralisation des prix et enfin

de contribuer à l'augmentation du chômage. La deuxième politique viserait

plutôt une transition lente nécessaire vu la complexité du phénomène,

l'ampleur des réformes institutionnelles à réaliser et la nécessité d'amortir le

choc social dans le temps. Enfin, certains prônent une transition

(25)

l'entreprise en y apportant une vision plus macro-économique et régionale. En tant que banque d'affaires, la BERD a également un rôle de conseil

financier à jouer, d'assistance aux fusions et acquisitions, de création de

sociétés mixtes; rôles qu'un organisme comme la Banque Mondiale n'aurait pu tenir.42 La SPI, filiale "privée" de la Banque Mondiale en aurait eu les capacités mais il faut rappeler que les problèmes de l'Europe de l'Est étant très spécifiques et surtout très différents de ceux des pays du Tiers Monde, seule une totale spécialisation àans cette région était susceptible de fournir

l'expertise indispensable à une assistance valable.

Enfin, et en cela la BERD ne pourra être rangée au même rang que les banques régionales de développement, critiquées pour ne pas assez intervenir auprès des gouvernements afin de promouvoir des politiques économiques plus sensées; la BERD apportera une aide technique aux gouvernements afin de les aider à mettre sur place les institutions politiques, économiques et sociales nécessaires au bon fonctionnement de la démocratie et de l'économie de marché.43

Parce qu'elle est aussi bien une banque de développement qu'une banque d'affaires, la BERD est unique et va donc pouvoir répondre aux bescins très spécifiques de l'Europe de l'Est.

Mais d'autres particularismes vont également se retrouver dans les statuts de la banque et vont justifier encore plus de son utilité.

42Ainsi selon M. Jacques Attali; "The Bank will not be a replication of

existing traditional institutions. It will use Qifferent techniques, and act in

both the private and public sectors. It wH! lend and invest in equity,

cofinance with the multilateral institutions, with commercial and

investment banks, and through other sources of funds. It will operate

through joint ventures, and will guarantee and underwrite issues and securities." Voir son article "An International Institution of the Third Kind"

Europe (avril 1991) 18.

43Toujours selon le directeur de la BERD: "The institutions of a market

economy must also be created. The history of Europe has shown that a

market can operate effectively only if a legal and institutionnal framework

exists to organize, monitor, and channel market forces. The EBRD will

advise governments in this field, and help to establish laws, institutions and

instruments. A number of preliminary contacts have been made in that

(26)

3-Les justifications statutaires 3.1 Un rôle politique

La justification statutaire essentielle de la BERD est politique. En effet aucune autre institution internationale n'a comme elle un but politique aussi clairement défini. Toutes ont des buts économiques et sociaux précis

mais seule la BERD a un but politique explicite: faire passer les pays d'E~rope

de l'Est d'un régime communiste totalitaire à un régime capitaliste

démocratique. C'est là son objectif nettement énoncé dans son article 1er: "In

contributing to economic progress and reconstruction, the purpose of the Bank shall be to foster the transition towards open market oriented economies and to promote private and entrepreneurial initiative in the Central and Eastern European countries committed to and applying the principles of multiparty democracy, pluralism and market economics."44

3.2 Autres justifications

Certaines caractéristiques de la BERD ne se trouvent dans aucune autre banque multilatérale de développement et témoignent encore plus de sa nécessité.

La participation des pays d'Europe de l'Est en tant que membre3 à part

entière, la combinaison banque d'affaires-banque de développement, mais aussi et surtout le lien établi entre l'aide et un progrès certain vers des

régimes démocratiques pluralistes, ainsi que l'attention portée à l'impact sur

l'environnement des projets, tout cela témoigne de la spécificité de cette institution. Mais cela sera surtout l'objet d'un examen plus approfondi lors

du deuxième chap'tre de cette étude où nous expliquerons le

fonctionnement de la banque en mettant justement ces diverses

caractéristiques en exergue.

Après avoir énuméré les justifications propres de la BERD, et afin de prouver totalement son utilité, il est maintenant indispensable d'examiner les critiques qui lui ont été adressées.

44Voir l'accord établissant la Banque: Agreement establishing the European

Bank for Reconstruction and Development, May 29, 1990, reprinted in 29

(27)

B-LES CRITIQUES

Elles sont nombreuses mais peuvent néanmoins être regroupées en trois points: l'inadaptation face aux besoins énormes de la région, le double emploi avec d'autres organisations internationales et enfin un avenir compromis au vu de l'échec des banques régionales de développement.

1- L'inadaptation aux besoins 1.1 L'état de l'économie

Si l'on se doutait de l'état de l'économie des pays d'Europe de l'Est avant l'ouverture au monde occidental, l'étendue'ictèc. défaillances du système, ainsi que les retards pris par rapport aux économies capitalistes ne se

sont véritablement révélés qu'après l'ouverture à l'Occident.

Outre l'état de récession dans lequel se trouve l'économie mondiale, de nombreux problèmes graves caractérisent l'économie des pays d'Europe

de l'Est. Les infrastructures sont obsolètes, la productivité de la force de

travail est particulièrement basse, révélant ainsi une inadéquation des ressources humaines au mode de production capitaliste; le système de

distribution est totalement inefficace, spécialement suite à la disparition du

Conseil d'Aide Économique Mutuel (CAEM) qui régulait les échanges entre

les pays "frères". Leur dette extérieure est très importante et ne fait que

s'accroître.45 La pollution provoquée par le secteur industriel dépasse de loin

toutes les normes européennes, voire internationales. L'importance du marché noir a créé un secteur entier d'économie parallèle qu'il est particulièrement difficile d'évaluer et encore plus de contrôler. La bureaucratie excessive retarde considérablement la bonne marche de toutes les transactions. Enfin, l'émergence et parfois l'éclatement de conflits ethniques, comme dans l'ex-Yougoslavie empêche toute stabilité politique et

45La défaillance du système de distribution ainsi que l'accroissement de la dette extérieure peut notamment être expliquée par la disparition du CAEM,

courant 1991. L'approvisionnement en biens de consommation et surtout

en matières premières ne se fait plus de façon privilégiée entre pays "frères".

Le pétrole n'étant plus fourni à des tarifs privilégiés par l'ex-URSS, la facture

pétrolière des pays d'Europe de l'Est et donc leur dette extérieure s'alourdissent considérablement. Voir notamment l'article d'A. Kaslow,

(28)

donc tout progrès économique.

Considérant tout cela, on estime aujourd'hui les besoins des pays

d'Europe de l'Est à environ 2000 milliards de dollars, sans compter les

besoins de l'ex-URSS, et il est donc certain que le capital de 13,5 milliards de

dollars de la BERD peut comparativement sembler dérisoire.46

1.2 Les critiques adressées à la BERD et leur réfutation

Plusieurs auteurs, dont notamment Y.-M. Laulan,47 économiste à la

Banque Mondiale et au Fonds Monétaire International, estiment que la BERD, telle qu'elle se présente actuellement, n'est pas un organisme adapté aux besoins de cette région. Selon eux, le capital de ia Banque est d'abord trop faible, considérant l'énormité des besoins en question. C'est pourquoi la

Banque devrait restreindre son champ d'action et cela à double titre.

Elle devrait tout d'abord exclure toute intervention dans des projets d'infrastructure ou d'équipement pour ne s'occuper que du secteur privé. Nous pensons néanmoins que l'auteur est ici incohérent avec lui-même dans la mesure où il cite la reconstruction rapide des infrastructures comme une des conditions fondamentales à la relance de l'économie. S'il est donc certain que la Banque ne saurait consacrer tous ses fonds au secteur public,48 elle doit intervenir aussi dans ce domaine' si elle veut créer un

environnement favorable à la, venue d'investisseurs étrangers.49 Cela

46Voir notamment l'article de Y.-M Laulan, "BERD, mode d'emploi" (1991)

Politique Internationale 113.

47Pour toutes les critiques, et surtout celles qui ne seront pas reprises ici voir

l'article cité supra note 46.

48Tout simplement parce que d'autres organismes tels la Banque Mondiale ou la Banque Européenne d'Investissement s'en chargent. C'est d'ailleurs pourquoi on peut d'ailleurs parler de complémentarité entre ces divers organismes et non de concurrence.

49Quelle entreprise irait donc investir dans un pays où les voies de communication sont défectueuses, où les télécommunications sont inexistantes? Ces conditions sont d'ailleurs souvent invoquées par les

investisseurs occidentaux potentiels comme étant de véritables barrières à

tout investissement éventuel. Même les Américains, qui ont d'ailleurs

oeuvré tout particùlièrement pour une limitation des prêts au secteur public, ont reconnu la nécessité d'investir dans des projets d'infrastruéfure afin de

rendre le terrain plus propice à la venue d'investisseurs étrangers. Voir

notamment la déclaration de M. Mulford, représentant de l'administration

américaine:

"In the negotiations we accepted the idea, which

1

think

is

valid,

that there must be some infrastructure developmeid supportive of the

private sector in many coulztries before credible private sector development

(29)

explique sans doute pourquoi la Banque a finalement opté dans ses statuts pour une intervention à la fois dans le secteur privé, auquel elle peut consacrer 60 % de ses fonds; et dans le secteur public, sa participation ne pouvant alors aller au delà de 40 %.so Ce mélange entre banque d'affaires et banque de développement est d'ailleurs une des originalités de la BERD dont nous parlerons plus tard.

De plu~, selon M. Laulan, une exclusion géographique est également

nécessaire. En effet, la BERD ne pouvant subvenir d'emblée à tous les

besoins, il faudrait immédiatement bannir de son champ d'action tous les

pays d'Europe de l'Est n'ayant pas encore opéré une transition assez rapide vers une économie de marché, ce qui incluerait la Bulgarie, la Roumanie, l'Albanie et enfin bien sûr les républiques de l'ex-URSS dont la taille et donc l'énormité des besoins risqueraient en plus d'engloutir tous les fonds de la Banque. A ces propos \-'-Ilsieurs objections peuvent être faites.

D'une part, cette exclusion plus politique que géographique risquerait de scinder encore plus l'Europe et de créer ainsi en son sein un autre Tiers Monde. D'autre part, on ne voit pas très bien sur quels critères se base l'auteur pour aboutir à de telles exclusions à part le fait que ce soient des "régimes restés plus ou moins fidèles à l'idéologie communiste"Sl. Ce genre de raisonnement risque de marginaliser davantage ces pays et de les rendre encore plus hostiles à l'Occident et au capitalisme. De plus, cela révèle une méconnaissance des statuts de la BERD puisque cette dernière, et c'est l'une de ses particularités fondamentales, lie l'aide qu'elle procure à un certain

progrès vers la démocratie.s2 De par cette clause, si ces pays n'ont

effectivement pas fait de progrès véritable en ce sens, alors ils s'excluent

can take place.

At the moment there

is

a lack of absorptive capacity in these

countries for pure priva te sector investment.

Most of these countries have

very substantial problems with regard ta infrastructure, environment and

sa

on which at this point, preclude effective development of many privat'e

sector activities."

devant la commission sénatoriale, supra note 2l.

sOSelon

J.

Attali: "Infrastructure projects, transportation, telecommunications

and energy networks, urban planning and environmental rehabilitation, without which a market economy cannot function effectively, will be a major focus for the European Bank. Close cooperation will be maintained with the EEC, the EIB, the World Bank and private banks ar:d companies in the development of these projects." Voir infra l'article cité note 55.

slVoir l'article cité supra note 46.

S2 Ce lien entre des progrès vers la démocratie et l'aide procurée par la Banque est totalement nouveau et constitue l'une des caractéristiques fondamentales de la BERD sur laquelle nous reviendrons plus en détail lors du deuxième chapitre de cette étude.

(30)

d'eux-mémes de l'assistance que pouvait leur apporter la BERD; il n'est

donc pas nécessaire de les en exclure à priori de façon arbitraire en risquant ainsi de provoquer par réaction leur retour au communisme. Face à cette première critique il faut se rappeler que la BERD ne vise pas à combler tous les besoirls des pays d'Europe de l'Est, que là n'est d'ailleurs pas le but qu'elle s'est fixée. Sa raison d'être figure dans j'article premier de ses statuts,53 et il est clair, comme les multiples projets entrepris conjointement avec d'autres institutions le démontrent, que la Banque ne cherche pas à elle seule à faire sortir l'Europe de l'Est du marasme économique dans lequel elle se trouve. Les besoins de cette région sont énormes mais dans la mesure où la BERD n'a pas comme vocation de les combler seule, elle peut, dans la limite de ses capacités, aider ces pays à effectuer la transition vers une économie de marché.

La deuxième critique adressée à la BERD concerne le manque d'accent mis sur les ressources humaines. La formation des hommes est essentielle à la réalisation de tout progrès économique. Il ne sera pas facile de changer du jour au lendemain la mentalité de millions d'hommes élevés pendant des

années dans l'orthodoxie marxiste communiste.54 Mais l'attention

indispensable à la formation n'a jamais été déniée par la BERD, et}. Attali en a plusieurs fois fait mention.55

Enfin la dernière critique adressée à la BERD est relative au risque, qu'à l'image des autres organismes internationaux, elle se transforme en un forum politique sans aucunement bénéficier aux économies de:; pays d'Europe de l'Est. Pour éviter cela elle ne devrait pas, à l'instar de la Banque Mondiale et plus particulièrement du FMI et de ses programmes

d'ajustement structurels, assumer le rôle de conseil en politique

économique.

53Pour le texte précis de cet article voir la page 40 de cette étude ainsi que la

.!'.ote qui s'y rapporte pour les références exactes de l'Accord établissant la BERD duquel cet article est tiré.

54L'auteur fait ici une comparaison avec le programme Fulbright mis en place aux États-Unis en 1947 afin d'accélérer la reconstruction en Europe en facilitant la venue aux É-U d'étudiants européens afin qu'ils se familiarisent avec les méthodes de "management" américaines.Voir supra note 46.

55"First, in areas such as accounting, management, banking, distribution, and services, there are many shortages. Technical assistance and training will be a priority for the European Bank, which will act in this field on its own account and in conjunction with others, through cofinancing and other

means." Voir

J.

Attali, "The European Bank for Reconstruction and

(31)

Cependant il est aujourd'hui fondamental pour ces pays de construire

de nouvelles institutions politiques, économiques et financières à l'image de

celles existant en Occident et ils ne peuvent le faire sans l'expertise de ce

dernier. n.~s institutions, des lois, des mécanismes doivent être mis en place

pour que fonctionnent la démocratie et l'économie de marché. Et cela le

Président de la BERD,

J.

Attali l'a bien précisé: "The institutions of a market

economy must be created. The history of Europe has shown that a market cml operate effectively only if a legal and institutionnal framework exists to

organize, monitor and channel market forces. The European Bank will advise governments in this field, in he/ping to establish laws, institutions and instruments. A number of preliminary contacts have already been made

in this respect."56

Il ne faut pas minimiser le lien établi par les statuts de la BERD entre la démocratie et l'économie de marché, lien fondamental dans la compréhension de la Banque et de sa raison d'être.

Nous allons maintenant voir si les deux autres critiques faites à la

Banque sont justifiées.

2-La ?nultiplicité des aides et le double emploi avec d'autres organismes interna tionaux

Comme il a été dit brièvement en introduction,57 avant même la

création de la BERD, d'autres programmes d'aide et d'assistance58 ainSI 'que divers organismes internationaux se sont préoccupés de l'état économique des pays de l'Est. Il est intéressant d'examiner ces divers types d'aide afin de déterminer si la BERD n'est pas en réalité un organisme superfétatoire et si

elle peut apporter une aide plus spécialement adaptée aux besoins de

56Voir article cité supra note 49.

57Voir pages 1à 4.

58Ahsi dès 1974, la CEE établit des contacts avec certains pays du bloc communiste afin de créer des liens économiques plus denses, en vue de conclure des accords bilatéraux. En 1986, des relations stables furent établies

avec l'ex-CAEM et suite à cela des accords d'échange furent conclus avec

tous les pays membres. C'est dans ce cadre que furent signés les "accords européens" notamment avec la Pologne, la Hongrie, la Tchécoslovaquie, la Bulgarie, la Roumanie et la Yougoslavie; accords réglementant les questions

relatives à la coopération économique, mais aussi culturelle et politique.

Pour plus de précisions sur tous ces projets voir les articles de P. Rashish,

"Lending a Helping Hand" Europe (mars 1990) 21; et "Stepping Up EC

(32)

l'Europe de l'Est.

2.1 Le programme "PHARE" et le Groupe des 24

Dès 1989, la CEE mit en place un programme d'aide destiné à quelques

pays d'Europe de l'Est, programme intitulé PHARE ("Pologne, Hongrie

Assistance à la Reconstruction des Economies") et qui malgré sa

dénomination englobait d'autres pays que les deux mentionnés. Ce

programme qui débuta en octobre 1989 visait à restructurer l'agriculture,

améliorer l'investissement étranger en créant des conditions favorables, à

mettre sur place des programmes de formation, et à protéger davantage

l'environnement. La CEE promit d'y consacrer 300 millions d'ÉCUS de son

budget de 1990, et avait projeté d'y affecter J milliard d'ÉCUS en 1992.59

Visiblement favorablement impressionnés par l'initiative européenne,6o les

pays industrialisés ont par la suite décidé de confier à la CEE la coordination

de l'aide internationale aux pays de l'Est. C'est lors du sommet de Paris des G7 en juillet 1989 que ces derniers décidèrent au nom des 24 pays les plus

industrialisés de confier à la Commission des Communautés européennes la

coordination de l'assistance internationale à la Hongrie et la Pologne. Le

cumul des diverses initiatives des 24 a atteint un montant de 7 milliards de

dollars échelonné sur trois ans.61 Mais depuis, d'autres pays de la région, comme la Tchécoslovaquie, la Roumanie et la Bulgarie veulent également

bénéficier d'une aide internationale, or le programme PHARE, à moins d'en

modifier la structure, ne peut s'appliquer à tous ces pays.

D'autre part, ce groupe des 24 n'est qu'un regroupement informel, il n'est pas institutionnalisé et ne bénéficie pas d'une véritable structure

autonome, il ne peut donc régler à lui seul tous les problèmes des pays en

question.

Enfin, du fait du rôle central donné à la Commission,62 ni les

États-59Voir l'article "Jacquerie at the Bank"

The Economist

(IO août 1991) 41.

60Pour une vue complète des initiatives européennes d'aide à l'Europe de l'Est, voir notamment les articles suivants: "E.C. Efforts in Eastern Europe"

Europe

(novembre 1990) 18; B. Barnard, "Going to Market"

Europe

(mars

1992) 7; et B. Cassan, "L'aide ou le chaos: Un plan Marshall pour les pays de

l'Est?"

Le Monde Diplomatique

(février 1992) 4.

61Voir notamment l'article cité supra note 8.

62L'auteur souligne à juste titre qu'il est remarquable que le premier mandat

dans le domaine de l'aide financière internationale pour ces pays ait été

confié à une institution européenne, alors même que les traités

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