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ARTheque - STEF - ENS Cachan | Les mots et les choses dans la formation professionnelle le cas des systèmes d'information géographique

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Academic year: 2021

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LES MOTS ET LES CHOSES DANS LA FORMATION

PROFESSIONNELLE – LE CAS DES SYSTÈMES

D’INFORMATION GÉOGRAPHIQUE

Otilia HOLGADO

Établissement National d’Enseignement Supérieur Agronomique de Dijon Équipe de recherche en Didactique Professionnelle

MOTS CLÉS : DIDACTIQUE PROFESSIONNELLE – FORMATION – CONTRAT BILATÉRAL

RÉSUMÉ : Aujourd’hui, dans la gestion du territoire, tout le monde a entendu parler de SIG, mais la signification que chacun lui donne diffère selon le type d’usage qu’il fait. Nous avons observé comment débute l’apprentissage du SIG dans la formation professionnelle continue : très rapidement, un conflit d’intérêts s’installe entre les apprenants, venus pour apprendre à s’en servir d’un outil et le formateur, qui lui, situe à la base de l’apprentissage du SIG la connaissance des concepts et des règles d’usage associés à ce même outil. Comment les formateurs maîtrisent-ils la situation ?

ABSTRACT : Nowadays, everybody working on land management have an idea about GIS. But yet, the meaning that every one gives to the GIS is different, according to the use they did. We have observed how a vocational training starts : at the very beginning, a conflict of interests takes place between trainees – who come to learn rapidly to use a computerized tool – and the trainer who situate theoretical concepts and methods at the heart of the GIS training. How the trainer gets out of such a situation ?

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1. INTRODUCTION

Aujourd’hui, dans le milieu agricole, tout le monde a entendu parler de SIG (Systèmes d’Information Géographique). Pourtant, la signification que chacun donne au SIG diffère selon la position qu’il occupe et le type d’usage qu’il en fait : outil de visualisation ou de dessin pour le technicien, outil de gestion de bases de données pour l’informaticien, outil d’aide à la décision pour les décideurs ou carte interactive pour le public passif, le SIG est tout cela à la fois et plus encore. Sa complexité et la mixité d’approches et de méthodes dont il est porteur nous amènent à le considérer comme une technologie. De ce point de vue, comme pour chaque technologie, un enseignement approprié est nécessaire, un enseignement qui ne se résume pas à l’apprentissage d’une suite de procédures mais relève également de processus de conceptualisation, ce qui en fait un enseignement complexe si l’on vise une maîtrise effective de la technologie et une appropriation et un usage élaborés de l’instrument.

Notre travail de recherche s’inscrit dans le cadre théorique de l’analyse de travail du point de vue de la didactique professionnelle, notamment dans l’esprit des travauxde Gérard Vergnaud, Pierre Pastré et Patrick Mayen. Nos interrogations portent sur plusieurs plans que nous essayons de mettre en relation en espérant pouvoir répondre aux questions suivantes : Qu’est-ce que le SIG et que signifie « savoir faire du SIG » ? Quels sont les savoirs en jeu, pour pouvoir prétendre « connaître le SIG » ? Comment apprend-on le SIG et comment l’enseigne-t-on ? Et en ce qui concerne la filière professionnelle qui est notre centre d’intérêt : qui sont les formateurs et quelles stratégies appliquent-ils pour transmettre – en même temps et de manière efficace – les connaissances et les pratiques nécessaires pour exercer un métier qui couvre un large champ d’utilisations et qui se trouve, de plus, en plaine et rapide évolution ?

Cette communication est centrée sur une question clé de notre recherche : comment enseigne-t-on le SIG aux professionnels en formation continue ? Pour cela, nous allons commencer par observer les premiers moments de l’activité de formation (filmée et analysée a posteriori) : l’implication du formateur et l’enrôlement des apprenants, par le biais de la parole.

2. CADRE THÉORIQUE

En regardant le formateur présenter aux apprenants la formation qu’il allait dispenser, les outils qu’il mobilise pour assurer le bon déroulement, les précautions qu’il prend et la façon dont il définit

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« contrat bilatéral ».

Dans une conférence sur le thème « comparaison entre la didactique des mathématiques et la didactique professionnelle », Guy Brousseau (2003) expliquait que « si quelqu’un demande un

savoir, on ne lui enseigne pas, on lui donne une réponse » et que, par conséquent, il ne serait pas

judicieux de parler de la « didactique » si il n’y a pas d’obligation institutionnelle pour l’enseigné de suivre l’enseignement. (La didactique n’aurait ainsi du sens que dans la scolarité obligatoire ? !)

« En ce qui concerne la formation professionnelle », ajoutait Guy Brousseau, « celle-ci se constitue comme une solution à un problème et par conséquent, les principes de la didactique classique ne seraient plus valables ». Faut-il penser que la didactique professionnelle, en se constituant comme

outil d’analyse pour l’enseignement professionnel, a complètement « coupé les ponts » avec la grande famille des didactiques ? Où bien, victime de sa différence, la didactique professionnelle a été déshéritée d’office de théories et valeurs de la didactique ?

Sans prétendre faire une comparaison, nous nous demandons si dans l’affirmation de Guy Brousseau « entre apprentissage et enseignement rien n’est identique », il ne serait pas possible d’adoucir le mot « rien » en admettant qu’on retrouve certains éléments sinon communs, au moins proches… ? Nous retrouvons dans la formation analysée, malgré une situation didactique spécifique (formation professionnelle continue), un certain contrat qui rappelle le « système d'obligations

réciproques », qui « détermine ce que chaque partenaire didactique a la responsabilité de gérer, et dont il sera responsable devant l'autre », qui « préexiste à la situation didactique », qui « se manifeste à l'occasion de ses ruptures » et qui « évolue en cours d’activité » (extraits de la

définition du contrat didactique par Astolfi, Darot, Ginsburger-Vogel, Toussant, 1997). Ne serions-nous pas en train de retrouver des traces de quelque chose qui rappellerait justement une théorie commune des didactiques ?

3. SPÉCIFICITÉS DE L’INSTRUMENT ET DE LA SITUATION

3.1. SIG, instrument particulier

La nécessité d’utiliser la technologie SIG découle de l’évolution du monde du travail. D’une part le SIG vient se substituer aux observations visuelles (très approximatives) et aux mesures directes (très coûteuses) sur le terrain, améliorant ainsi la qualité des résultats. D’autre part, la complexification des tâches fait qu’elles ne peuvent plus être réalisées sans l’aide d’un outil

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informatique. L’exemple1présente les mesures concernant un plan d’épandage. Celui-ci ressemble à un problème mathématique complexe. Sans l’aide de l’outil informatique, même s’il est possible d’y répondre, il est difficilement envisageable d’obtenir un résultat rapide et précis.

La principale particularité du SIG vient d’une confusion « des mots » : le SIG est un concept (et derrière on retrouve des notions, des règles d’action, des stratégies). C’est l’ensemble de savoirs théoriques nécessaires pour comprendre « comment ça marche ». Du même nom, de SIG, on appelle aussi l’instrument informatisé qui aide à appliquer le concept aux données géographiques pour en sortir un résultat (un produit), qui porte également le nom de SIG.

On peut résumer en disant que l’expression : « je fais du SIG » veut dire à la fois : je conçois l’architecture d’un SIG (je maîtrise les concepts), je les applique (je pratique, je maîtrise le logiciel SIG), mais aussi je consulte un SIG, je suis capable de récupérer des informations pertinentes.

3.2. Qui sont les apprenants et que cherchent-ils ?

À l’occasion du tour de table, en ouverture de la formation, nous allons écouter les apprenants se présenter. Chacun exprime ses besoins, son intérêt et sa motivation, qui sont d’une très large variabilité, comme illustré dans le tableau 1.

Le groupe est constitué d’une grande diversité de publics de divers statuts. Leurs motivations est également variée, forte ou faible, en allant jusqu’à l’obligation institutionnelle de suivre cette formation. Nous trouvons, dans plusieurs cas, des indicateurs d’une mauvaise représentation du SIG par la hiérarchie, car la mise en place du SIG dans l’institution est déléguée aux techniciens, alors qu’il ne s’agit pas d’une procédure purement technique).

Nous voyons ressortir une diversité d’intentions et de buts : à long ou a court terme, pour un usage limité à une tâche ou élargi à une classe de tâches, pour appliquer des procédures (réaliser une opération) ou pour concevoir des choses (savoir enchaîner des opérations ; ordre des opérations). En ce qui concerne les buts, la majorité des apprenants ont des buts bien définis (nous considérons que « venir découvrir » est un but précis). Aucun d’entre eux ne dit « je ne sais pas trop pourquoi je

suis là ».

« SIG » n’a pas la même signification pour tous. Nous nous trouvons face à une diversité de niveaux de connaissance et de représentations que les apprenants se font de l’objet de formation (le SIG), de la façon dont ils envisagent de l’approcher (entrée par les concepts ou par l’outil). Les

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apprenants n’ont pas tous conscience de la structure conceptuelle qui se trouve (ou se cache ?) derrière l’outil logiciel.

Tableau 1 : Profil des apprenants

3.3. Le dilemme du formateur

Devant une telle situation, le formateur est coincé. Comment faire pour répondre à toute cette diversité d’attentes ? Comment s’y prendre avec un public qui vient trouver des solutions et qui a choisi cette formation à partir d’un intitulé très bref (titre et courte description des objectifs) ? Il est intéressant d’observer comment, dans le tour de table, les apprenants utilisent l’intitulé du stage comme ressource pour composer, recomposer ou tout simplement mettre en mots leurs buts. Mais il y a également un autre aspect - l’effet du collectif : on pourrait penser qu’en échangeant des idées, en présentant leurs buts au formateur, les apprenants vont aussi recomposer, réajuster ces buts au regard de ce que disent les autres.

Comment faire pour aider les apprenants à construire leur engagement dans la formation, à partir de leurs buts, leur motivation ? Après avoir animé ou réorienté les intentions des personnes, le formateur propose le contenu – et aussi la forme – de son intervention, qui correspond au mieux aux besoins et attentes des apprenants. Il se lance dans la négociation de buts (et d’actions) pédagogiques.

3.4. Négociation du contrat bilatéral

Extrait du discours du formateur : « Pour cette semaine : alors, ce stage a pour but d’utiliser… et

on va commencer par vous initier aux systèmes d’information géographique, et toute suite ça revient à prendre conscience que ce ne sont pas seulement des outils mais c’est aussi des hommes derrière, des méthodologies. Quand on parle SIG le premier réflexe, actuellement c’est ça, la personne pense à l’outil mais ce n’est pas que ça. Et j’espère qu’on va vous démontrer tout au long de la semaine, et pour vous démontrer, bon, alors… ce qu’on compte faire c’est d’essayer de mixer un petit peu la partie cours et la partie TP. »

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Sur un plan général, deux interprétations sont possibles. Premièrement, nous pouvons considérer que le but du formateur, ce qu’il veut mettre en avant, est de mixer cours et TP (dans une démarche pédagogique) et dans ce cas il a besoin de se justifier face à des gens qui viennent pour apprendre l’instrument : on fait ainsi parce que « le SIG n’est pas que des outils ». Mais il est possible également que le formateur ait voulu mettre en avant le fait que « le SIG n’est pas que des outils ». Dans ce cas nous nous trouvons devant quelque chose d’essentiel que le formateur veut faire comprendre aux participants. Il est déjà engagé dans le contenu de la formation. Il s’attaque aux représentations des apprenants. Dans ce cas, le but du formateur serait avant tout d’enseigner le SIG et alterner cours et TP n’est que la modalité choisie.

Si nous regardons plus en détail :

« ce stage a pour but d’utiliser… et on va commencer par vous initier aux SIG… »

Le formateur rentre dès le départ dans le rapport savoir (connaître)/opérer, que nous percevons comme un rapport de forces, négocié et renégocié en permanence, en tout cas par le formateur, car au moins pour l’instant, personne ne s’y oppose. « …quand on parle SIG (…) la personne pense à

l’outil …mais ce n’est pas que ça … c’est aussi des hommes derrière, des méthodologies » évoque la représentation que le formateur a de la façon dont les apprenants se représentent le SIG. Par la phrase « … ça revient à prendre conscience … », le formateur introduit la conceptualisation comme but explicite de ses actions et pour appuyer son propos il lance à la fois un engagement et une demande pour qu’on lui fasse confiance (« … on va vous démontrer… »). Par la suite, le formateur commence à citer des notions, en défendant leur utilité « ces questions (…) vont survenir dès que

vous allez dans votre coin essayer de monter quelque chose ». Pour appuyer la nécessité des cours

théoriques, il fait directement appel à une situation de travail générale et impersonnelle : ni objet, ni lieu, ni action. Il renvoie à la représentation des situations de chacun. « Ensuite on va vous faire

découvrir [le SIG] (…) on va s’appuyer sur un logiciel SIG (…) qui s’appelle … ». On assiste à ce

moment à un double usage de l’instrument : à but professionnel (instrument pour réaliser un SIG comme tâche de travail) et à but pédagogique (comprendre et apprendre à réaliser un SIG).

Nous venons d’identifier deux composantes du contrat : la négociation du rapport savoirs théoriques/apprentissage pratique et la représentation de l’instrument dans la construction de la représentation du SIG.

Une troisième composante pourrait se définir ainsi : l’auto-didactisation des situations de travail. Cela est une forme de didactisation des situations professionnelles, autant que la simulation ou l’alternance mais beaucoup moins employée par les formateurs. Les apprenants sont invités à

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demande plus générale, on est là pour ça aussi », donc se référer à leur situation de travail mais

aussi à soumettre cette situation au groupe, à but didactique. Le formateur propose une mobilisation permanente de l’expérience professionnelle et des situations de référence. Nous pouvons penser que cela stimule également les sujets moins initiés ou moins expérimentés, qui, même sans exposer leurs propres expériences, s’imprègnent du vécu des autres. De plus, le formateur annonce une certaine flexibilité dans le programme de la formation (« On va vous donner un programme, à

partir de là… »), ce qui permet et autorise les participants à faire référence à leurs préoccupations

professionnelles lors de la formation.

Et le formateur conclu par la présentation du programme de la semaine.

BIBLIOGRAPHIE

ASTOLFI J.-P., DAROT É., GINSBURGER-VOGEL Y., TOUSSAINT J. (1997). Mots-clés de la

didactique des sciences. Repères, définitions, bibliographies. Bruxelles : De Bœck.

BROUSSEAU G. (1998). Théorie des situations didactiques. Grenoble : La Pensée Sauvage.

MAYEN P. (1999). Des situations potentielles de développement. Éducation Permanente. 139, 65-86.

VERGNAUD G. (1996). Au fond de l’action la conceptualisation. In Barbier J-M. (dir.), Savoirs

théoriques et savoirs d’action, Paris : Presses Universitaires de France.

JONNNAERT P., VANDER BORGHT C. (2003). Créer des conditions d’apprentissage. Un cadre

de référence socioconstructiviste pour une formation didactique des enseignants. Bruxelles : De

Figure

Tableau 1 : Profil des apprenants

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