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Marin, marine ? Quand les femmes prennent la mer

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Academic year: 2021

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HAL Id: halshs-01298628

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Preprint submitted on 29 Apr 2016

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Marin, marine ? Quand les femmes prennent la mer

Aymeric Landot

To cite this version:

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Aymeric Landot

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ARIN

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M

ARINE

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Quand les femmes prennent la mer

À l’heure où les femmes viennent d’obtenir le droit de s’engager dans les sous-marins, la figure du marin frappe encore par sa représentation majoritairement masculine. Dans le roman d’aventure, dont L’île au Trésor de Stevenson est l’un des exemples les plus connus, le marin est fondamentalement un homme, généralement jeune parce que son âge est propice à l’aventure. Jeune, Corto Maltese l’est au début de ses voyages. Mais il peut être aussi plus âgé, comme c’est le cas pour Long John Silver, figure du capitaine aguerri et du vieux briscard des mers. Quoi qu’il en soit, le marin est un homme, à l’image de la profession, à l’image de l’époque dans laquelle se déroulent aussi les récits de pirates et de trésors. Et cependant, il a existé des femmes capitaines, comme le souligne Luky dans son entretien.

Les marines n’existent pas, ou en tout cas ne sont pas les personnages principaux des aventures maritimes. Elles ne sont pas pour autant absentes. Des figures féminines émaillent ces histoires : elles sont des auxiliaires comme Cassandre, qui aide Corto Maltese mais ne lui prédit que des catastrophes, à l’image de la Cassandre de la mythologie grecque. Elles sont aussi des partenaires ambiguës, comme la prophétesse caribéenne Bouche Dorée. Le marin d’Hugo Pratt se laisse facilement duper par cette sorcière imprévisible, chef de file des révolutionnaires d’Amérique Latine. Cette voyante antillaise se plaît à lancer Corto dans des aventures incomplètes, conservant précautionneusement les informations capitales des voyages dangereux vers lesquels elle l’oriente. Orfèvre de la manipulation, elle exploite les élans libertaires du marin pour renforcer l’influence et les intérêts de sa compagnie commerciale et révolutionnaire. Bouche Dorée, à la fois étrangère et auxiliaire, éduque le marin : il faut soulever le voile des choses pour connaître le monde. Elle attise sa curiosité en lui inculquant paradoxalement le respect de l’occulte et le nécessaire dévoilement du mystère. Les femmes constituent aussi des souvenirs nostalgiques, en toile de fond des rêveries romantiques de Corto Maltese ou simplement comme images entretenant le voyage, comme c’est le cas dans l’Épervier, bande dessinée évoquant les aventures d’un jeune noble breton des côtes atlantiques aux forêts de Guyane. Les femmes de Corto Maltese sont celles des lectures d’Hugo Pratt, elles véhiculent toute une imagerie traditionnelle de la femme médiatrice, présente dans l’aventure en tant que guide du héros, auxiliaire qui le conduit vers l’inconnu pour s’y fondre ensuite, retournant du côté des forces invisibles dont elle est l’émanation.

N’oublions pas que la mer est porteuse de connotations féminines fortes : tempêtes, sirènes et autres menaces sont présentées sous un aspect féminin, non seulement par le lexique mais également dans les allégories artistiques correspondantes. La liquidité appelle-t-elle la féminité ? À moins que ce ne soit l’homophonie entre « mer » et « mère » ? Quoiqu’il en soit, la mer est vécue et représentée comme une femme à laquelle les marins sont mariés, maîtresse insatiable, rivale sans mesure qui les arrache à leurs épouses. Et si quelqu'un peut affronter et maîtriser cet élément féminin, ce serait bien l’homme, le mari, le père.

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Aymeric Landot

Alors, pourquoi y a-t-il si peu de « marines » ? Ce n’est pas parce que l’aventure ne sied pas aux femmes : les figures de Nävis dans Sillage ou de Yoko Tsuno au cours de ses multiples aventures peuvent être invoquées pour combattre ce cliché. C’est probablement aussi du fait d’une profession fortement masculine, qui a ancré la figure mythique du marin, allant du jeune mousse découvrant la mer à l’aventurier romantique, portant casquette d’officier anglais et boucle d’oreille. Finalement, si marine il y a, c’est surtout le bleu du caban qui suit invariablement les aventures de Corto Maltese…

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