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Effets de l'âge et de caractéristiques individuelles sur la compression temporelle

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Academic year: 2021

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Effets de l'âge et de caractéristiques individuelles sur la

compression temporelle

Mémoire

Marjorie Bernier

Maîtrise en psychologie - avec mémoire

Maître ès arts (M.A.)

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Effets de l’âge et de caractéristiques individuelles

sur la compression temporelle

Mémoire

Marjorie Bernier

Sous la direction de :

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Résumé

L’impression que le temps passe plus vite que ce qui est réellement le cas se nomme la compression temporelle. Ce mémoire comporte deux grands objectifs. Il vise d’abord à tester la croyance populaire voulant que cette impression augmente avec l’âge. Il vise éga-lement à savoir quelles caractéristiques individuelles, chez les adolescents, permettent de prédire cette impression.

Pour atteindre le premier objectif, 1212 participants, âgés de 15 à 97 ans, ont été re-crutés pour répondre aux questionnaires permettant de mesurer la compression temporelle, la pression temporelle vécue, la mémoire biographique et le niveau d’anxiété. Une analyse de régression non paramétrique a permis d’établir la forme de la fonction liant ces va-riables. Les résultats indiquent que la compression temporelle croît de façon linéaire avec l’âge. De plus, les participants ayant une bonne mémoire, un niveau d’anxiété élevé ou res-sentant une forte pression temporelle ressentent moins de compression temporelle.

Afin de prédire l’impression de compression temporelle d’un groupe d’adolescents en fonction de diverses caractéristiques individuelles, 237 personnes de 15 à 17 ans ont été recrutées. Les caractéristiques individuelles utilisées étaient le niveau d’occupation, le ni-veau d’anxiété, la mémoire, le genre, le nini-veau d’impulsivité et les résultats au Zimbardo Time Perspective Inventory (ZTPI). La méthode de régression pas-à-pas a permis d’identifier les meilleurs prédicteurs. Ainsi, les variables ayant le meilleur pouvoir prédictif sont le niveau d’anxiété et les perspectives futur et présent-hédoniste au ZTPI.

Cette étude apporte un regard nouveau sur l’évolution de la compression temporelle à travers les âges et sur les déterminants de cette compression.

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Abstract

The impression that time passes faster than what is really the case is called temporal compression. A popular belief is that temporal compression increases with age. The first objective of this thesis is to verify if that belief is justified. In this regard, 1212 participants, aged 15 to 97, were recruited to answer the questionnaires measuring temporal compression, time pressure, biographical memory and anxiety level. A non-parametric regression analysis allowed the study of the functional form linking these variables. The results indicate that temporal compression increases linearly with age. Participants with good memory, with high levels of anxiety, or with high temporal pressure experience less temporal compression.

The second objective of this thesis aims to predict the impression of temporal compression experienced by a group of adolescents according to various individual characteristics. To do this, 237 adolescents, aged 15 to 17, were recruited. Individual characteristics used were time pressure, anxiety level, memory, sex, impulsivity level and scores on the Zimbardo Time Perspective Inventory (ZTPI). Step-by-step regression method identified the best predictors. The variables with the best predictive power are the level of anxiety and the future and present-hedonistic perspectives of the ZTPI.

This study provides a new perspective on the evolution of temporal compression through ages and on the determinants of this temporal compression.

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Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... iv

Table des matières ... v

Liste des tableaux ... vii

Liste des figures ... viii

Liste des abréviations ... ix

Remerciements ... x

Chapitre 1 : Introduction générale ... 1

Chapitre 2 : La compression temporelle augmente-t-elle avec l’âge? ... 5

Hypothèses ... 12 Méthode ... 13 Participants ... 13 Matériel ... 14 Procédure ... 15 Analyses statistiques ... 15 Résultats ... 17 Régression linéaire multiple ... 17 Régression non paramétrique avec estimateur par noyau ... 20 Discussion ... 24

Chapitre 3 : Quelles caractéristiques individuelles des adolescents influencent la compression temporelle? ... 35 Hypothèses ... 39 Méthode ... 41 Participants ... 41 Matériel ... 41 Procédure ... 43 Analyses statistiques ... 43 Résultats ... 44 Régression linéaire multiple de type pas-à-pas ... 45 Discussion ... 47

Chapitre 4 : Conclusion générale ... 49

Limites et implications de cette étude ... 50

Références ... 53

Annexes ... 57

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Annexe B ... 60 Annexe C ... 61 Annexe D ... 62 Annexe E ... 69 Annexe F ... 70 Annexe G ... 72

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Liste des tableaux

Tableau 1 : Statistiques descriptives de la compression temporelle en fonction de l’âge, du genre, du niveau d’occupation et de la mémoire (n = 1050) ... 17 Tableau 2 : Régression linéaire standard de la compression temporelle en fonction de l’âge,

du genre, du niveau d’occupation et de la mémoire (n = 1050) ... 19 Tableau 3 : Paramètres de lissage de la régression nonparamétrique de la compression

temporelle en fonction de l’âge, du genre, du niveau d’occupation et de la mémoire et résultats au test d’effet individuel (n = 1050) ... 22 Tableau 4 : Statistiques descriptives de la compression temporelle en fonction du niveau

d’occupation, du niveau d’anxiété, de la mémoire, des résultats au ZTPI, de

l’impulsivité fonctionnelle et de l’impulsivité dysfonctionnelle (n = 115) ... 44 Tableau 5 : Régression de type pas-à-pas du modèle 1 (Futur), du modèle 2 (Futur et

Présent Hédoniste) et du modèle 3 (Futur, Présent hédoniste et anxiété) sur la

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Liste des figures

Figure 1 : Régression non paramétrique partielle (en rouge) du score de compression

temporelle en fonction de l’âge (intervalle de confiance, en noir, à 95 %) ... 25 Figure 2 : Gradients (vecteur de betas) de la régression non paramétrique partielle du score

de compression temporelle en fonction de l’âge (intervalle de confiance, en noir, à 95 %) ... 25 Figure 3 : Régression non paramétrique : représentation graphique de la relation entre le

score de compression temporelle en fonction du score de mémoire ... 28 Figure 4 : Gradients (vecteur de betas) de la régression non paramétrique partielle du score

de compression temporelle en fonction de la mémoire (intervalle de confiance, en noir, à 95 %) ... 29 Figure 5 : Régression non paramétrique : représentation graphique de la relation entre le

score de compression temporelle en fonction du niveau d’occupation ... 31 Figure 6 : Gradients (vecteurs de betas) de la régression non paramétrique partielle du score

de compression temporelle en fonction du niveau d'occupation (intervalle de

confiance, en noir, à 95 %) ... 31 Figure 7 : Régression nonparamétrique sur la compression temporelle selon le niveau

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Liste des abréviations

BAI : Inventaire d'anxiété de Beck QM : Questionnaire Maison

SCT : Score à l’échelle de compression temporelle LCLS : Local Constant Least square

LLLS : Local Linear Least square LQLS : Local Quadratic Least square MEM : Mémoire biographique

OCC : Construit du Questionnaire Maison mesurant le niveau d’occupation, soit la pression temporelle vécue

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Remerciements

J’adresse de sincères remerciements aux personnes qui me sont venues en aide dans la réalisation de ce mémoire.

Tout d’abord, j’aimerais remercier monsieur Simon Grondin, professeur à l’Université Laval. En tant que directeur de mémoire, il a su m’aiguiller dans mon travail et m’a permis de me dépasser.

Je remercie aussi Audrey-Anne Gagnon-Harvey pour l’entraide dont elle a fait part. La collaboration mise en place dans ce projet nous a permis d’atteindre avec brio le recru-tement d’envergure souhaité.

Pour son aide et ses conseils précieux, je remercie aussi chaleureusement Jean-Philippe Boutin. Audrey-Anne et moi t’avons demandé beaucoup de temps et de pédagogie, que tu as toujours su mettre à notre disposition avec entrain et motivation. Il s’agissait d’une contribution essentielle et pour cela, nous ne te remercierons jamais assez.

Je tiens à remercier également, monsieur Jean Vézina, professeur à l’Université La-val, de nous avoir permis d'utiliser la plateforme en ligne PIANO. Je remercie aussi tous les participants de cette étude. J’aimerais notamment souligner la confiance dont ont fait preuve les responsables des écoles secondaires de Cardinal-Roy et de la polyvalente de Neufchâtel, leurs intérêts pour mon projet et le temps qui m’a été accordé. À tous les gens qui ont pris le temps de répondre à notre demande de recrutement, un très gros merci.

Je souhaite également remercier mes parents et Camille Blanchet pour leurs pré-cieux apports lors de la relecture et de la correction de mon mémoire.

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Introduction générale

Le temps et son estimation occupent une place omniprésente dans la façon avec la-quelle l’humain interprète, conçoit et organise certains des principaux aspects de son envi-ronnement. En effet, l’humain a besoin d’estimer le temps nécessaire à la réalisation de nombreuses activités de la vie courante, que ce soit pour planifier le temps nécessaire pour se rendre à un rendez-vous ou pour ordonner le souvenir d’événements passés. Il s’agit d’une capacité essentielle à la vie en société et elle pourrait être associée à divers procédés comme les réflexions, les émotions, la biologie ou un mécanisme fondamental du cerveau (Gibbon, Church & Meck, 1984 ; Grondin, 2018).

Même s’il n’existe aucun organe précis qui permet de mesurer le temps, l’humain semble être en mesure de le faire (Grondin, 2001). Cependant, l’estimation concernant le temps écoulé pendant un laps de temps n’est pas toujours exacte. Le temps objectif et le temps qui est perçu ne correspondent pas toujours et, de ce fait, découle la perception tem-porelle. Il s’agit de la conversion du temps objectif, ou chronométrique, en un temps sub-jectif et de la correspondance qui existe entre ceux-ci (Hornik, 1984). Par exemple, un sujet pourrait avoir l’impression que 15 minutes se sont écoulées pendant une tâche alors que le temps objectif indique que 30 minutes se sont réellement écoulées.

La perception temporelle peut être affectée par divers facteurs comme la méthode utilisée pour estimer le temps, les conditions environnementales, la quantité d’informations à traiter pendant l’intervalle à juger, les attentes du participant (Zakay & Block, 1996), l’impulsivité (Berlin, Rolls & Kischka, 2004), l’anxiété (Fraisse, 1984) et le genre du parti-cipant (Hancock & Hancock, 2014). La perception temporelle dépend aussi du niveau d’attention du sujet (Fraisse, 1984), de sa mémoire des détails et du nombre de change-ments contextuels qui se produisent pendant l’intervalle à juger (Craik & Hay, 1999).

Beaucoup d’études se penchent sur la perception temporelle puisque plusieurs pro-cessus mentaux, de même que plusieurs comportements, reposent sur ce concept. La

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per-ception temporelle revêt un rôle important dans la sélection et la poursuite de buts sociaux, pouvant être reliés, par exemple, à l’acquisition de connaissances ou à la régulation émo-tionnelle (Carstensen, Isaacowitz, & Charles, 1999).

La perception temporelle est liée à plusieurs fonctions cognitives essentielles (Block, Hancock, & Zakay, 2010), dont l’attention (Brown, 1985), l’activité motrice (Sur-nina & Lebedeva, 2008) et à la mémoire de travail (Brown, 1997). Un déclin dans l’un de ces processus cognitifs affecte la perception temporelle. Cela pourrait être relié à la croyance commune selon laquelle les personnes âgées n’ont pas la même perception tempo-relle que lorsqu’elles étaient plus jeunes.

La présente étude porte sur la compression temporelle, définie comme l’impression que le temps semble s’être écoulé plus rapidement que ce qui est réellement le cas. Cela se produit lorsque les gens sous-estiment un intervalle de temps donné, par exemple, si un sujet a l’impression que cinq minutes viennent de s’écouler alors que dix minutes de temps objectif viennent de s’écouler. Plusieurs études ont analysé la présence de ce phénomène chez les personnes âgées. Étant donné les résultats mitigés obtenus et le manque d’information à propos de ce concept chez les adolescents, il s’avère intéressant d’étudier la présence de la compression temporelle auprès de personnes de cette tranche d’âge et de contraster les résultats avec ceux obtenus auprès de personnes plus âgées.

L’étude vise à vérifier, dans un premier temps, la présence ou non du phénomène de compression temporelle chez les jeunes, ce qui devrait aussi permettre de vérifier certaines hypothèses disponibles dans la littérature à propos de ce qui fait varier l’expérience tempo-relle. La première phase de cette étude permet de contraster l’impression de compression temporelle vécue par des participants âgés de 15 à 97 ans.1 Cela permet d’observer l’évolution de l’impression de compression temporelle selon l’âge des participants.

1 Les aînés seront recrutés par une candidate au D. Psy réalisant une étude similaire à la présente étude avec

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Dans un deuxième volet, l’étude permet de décrire l’impression de compression temporelle vécue par le groupe d’adolescents en fonction de diverses caractéristiques indi-viduelles, soit le genre, le niveau d’impulsivité, le niveau d’anxiété et la perspective tempo-relle. Il existe plusieurs théories, brièvement répertoriées dans l’introduction au chapitre suivant, à propos de ce qui induit l’impression que le temps s’écoule rapidement. La pré-sente étude devrait permettre de voir lesquelles parmi l’éventail de variables sélectionnées permettent le mieux de prédire la compression temporelle chez les jeunes.

Ce mémoire se divise de la façon suivante. La présente introduction expose le con-texte théorique derrière l’étude. Le second chapitre concerne la relation entre l’âge et la compression temporelle alors que le troisième concerne l’effet de certaines caractéristiques individuelles sur la compression temporelle chez les adolescents. Le dernier chapitre com-porte une discussion générale et une conclusion.

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Chapitre 2 : La compression temporelle augmente-t-elle avec

l’âge?

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Introduction

L’idée que la compression temporelle croît avec l’âge, c’est-à-dire que, plus une personne est âgée, plus elle devrait avoir l’impression que le temps passe vite, est répandue (Wittmann & Lehnhoff, 2005). Il s’agit d’une idée qui devrait être davantage étudiée puisque la littérature demeure ambivalente à ce sujet. La perception du temps chez les ainés pourrait ne pas être conforme à cette croyance qui semble pourtant bien ancrée dans la cul-ture populaire. Différentes études ont investigué la compression temporelle dans le but de découvrir si l’âge est responsable de ce phénomène ou s’il existe d’autres construits qui pourraient aussi en être responsables.

Flaherty et Meer (1994) se sont penchés sur la perception temporelle avec l’objectif d’analyser les variations qui existent dans sa subjectivité. Ils ont conceptualisé la perception temporelle sur un continuum allant de l’impression que le temps subjectif (le temps perçu par le sujet) s’écoule plus lentement que le temps objectif (le temps indiqué par l’horloge) jusqu’à l’impression que le temps subjectif s’écoule plus rapidement que le temps objectif. Au milieu de ce continuum se situe la correspondance entre le temps subjectif perçu et le temps objectif. Leurs résultats indiquent que la relation entre l’âge et la compression tem-porelle n’est pas aussi claire que la croyance populaire le voudrait. Les participants les plus jeunes et les plus âgés auraient des perceptions temporelles similaires. Les participants d’âge moyen sont les plus touchés par l’impression que le temps subjectif passe significati-vement plus vite que le temps objectif. Leur conclusion principale est que les variations qui existent dans la perception subjective du temps résultent de variations dans le volume du contenu présent pendant le laps de temps à évaluer. Selon ces auteurs, la compression tem-porelle, soit cette impression subjective que le temps s’écoule rapidement, se produit lors-qu’une situation requiert moins d’expériences conscientes que ce qui est généralement le cas pour une durée donnée. Deux raisons expliqueraient la compression temporelle : la conduite d’événements habituels et la perte de mémoire causée par le passage du temps.

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Toujours selon Flaherty et Meer (1984), la conduite d’événements habituels entraine l’impression que le temps passe rapidement parce que le sujet ne dirige pas son attention consciente vers les différents détails de l’expérience, retenant alors une moins grande quan-tité de détails. Plus un sujet se rappelle de détails pour un laps de temps donné, plus il a l’impression que le temps a passé lentement, c’est-à-dire qu’il surestime la durée d’un laps de temps donné. Le fait de se rappeler de peu de détails pourrait alors entrainer l’impression que le temps passe plus rapidement.

La perte de mémoire causée par le passage du temps entraine quant à elle de la compression temporelle puisque, encore une fois, cela réduit le nombre de détails retenus pour un certain laps de temps. La perte de mémoire causée par le passage du temps se pro-duit davantage lors de rappels à long terme. Flaherty et Meer (1984) sont arrivés à la con-clusion que l’effet de la mémoire sur la durée perçue semble plus pertinent que l’effet de l’âge pour expliquer la compression temporelle, puisque la difficulté à se souvenir de cer-tains détails déclenche la compression temporelle chez tous les participants de leur étude.

Lorsque l’estimation temporelle concerne un événement de longue durée situé dans le passé distant, le participant à l’étude se rappelle du temps écoulé pendant celui-ci de fa-çon subjective puisqu’il ne peut pas objectivement se rappeler de la durée précise de l’événement sans indices. Cela signifie que le participant ne peut qu’estimer vaguement le temps écoulé pendant cet événement. Il est possible de situer ces événements passés à l’aide de souvenirs qui ne sont pas temporels, par exemple en se rappelant la date d’un évé-nement, comme un anniversaire, ou à l’aide de connaissances sur les durées écoulées, par exemple le fait qu’une session d’université dure quatre mois (Fraisse, 1984). Ainsi, si un sujet cherche à savoir la durée pendant laquelle il a été affecté à un certain dossier, il ne peut pas estimer de façon objective que cela a duré cinq semaines, sans se rappeler qu’il a commencé à y travailler le lendemain de son anniversaire de mariage, par exemple le 25 janvier, et qu’il y a travaillé pendant tout le mois de février, soit pendant quatre semaines. Il semble alors logique de penser que si peu de détails, qui serviront ensuite d’indices, sont rappelés pour juger la durée d’un intervalle temporel, cela affecte le jugement sur celui-ci.

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Ka Chun Ma et Cheung (2014) se sont aussi penchés sur la compression temporelle afin de découvrir les causes de ce phénomène. Certaines causes analysées concernent seu-lement les personnes âgées, comme le changement en âge d’événements mémorables, la théorie du ratio et les théories attentionnelles (Friedman & Janssen, 2010). Le changement en âge d’événements mémorables concerne le fait que les personnes âgées vivent moins de nouveaux événements que les enfants, pour qui tout est nouveau et distinct. Ils ont alors moins d’événements mémorables à retenir, et donc moins de détails dont ils se souviennent à propos d’une période de temps. La théorie du ratio repose sur le postulat que la perception de la durée d’un intervalle de temps tient d’une comparaison implicite de celui-ci avec le temps total vécu. Par exemple, lorsque quelqu’un de 20 ans réfléchit à la dernière année écoulée, celle-ci correspond à 1/20 de ce qu’il a vécu alors que la dernière année représente le 1/60 de la vie de quelqu’un âgé de 60 ans. Finalement, les théories attentionnelles con-cernent le déclin attentionnel vécu chez les personnes âgées. Le fait qu’elles doivent mobi-liser plus d’attention pour réamobi-liser une tâche pourrait être lié au fait qu’elles perçoivent que le temps s’écoule plus rapidement. Plus une tâche requiert d’attention, plus les participants croient qu’elle s’est déroulée rapidement (Block & Zakay, 2001 ; Zakay, 1989).

Certaines causes probables analysées par Ka Chun Ma et Cheung (2014) sont plus générales et s’appliquent à toutes personnes vivant de la compression temporelle, indépen-damment de leur âge. Il s’agit de la difficulté de rappel et de la pression temporelle. Comme mentionné précédemment, les intervalles temporels sont jugés par le nombre de détails qui peuvent y être rappelés : beaucoup de détails rappelés donnent l’impression qu’un intervalle est long. La difficulté de se rappeler certains détails peut entrainer l’impression que le temps passe rapidement. Le fait de ressentir une forte pression tempo-relle, soit l’impression de ne pas pouvoir réaliser toutes les tâches prévues dans le moment prévu, donne l’impression que le temps passe vite (Friedman & Janssen, 2010). Wittmann et Lehnhoff (2005) ont aussi observé que c’est surtout le fait de se sentir coincé dans le temps qui influence la compression temporelle vécue par les participants de leur expé-rience. Bref, la difficulté de rappel et la pression temporelle sont deux hypothèses présentes dans la littérature expliquant la compression temporelle. Puisqu’elles peuvent s’appliquer à tous les participants de cette étude, ces variables sont incluses dans cette étude.

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Les études ayant permis d’observer des différences de perception temporelle entre des participants jeunes et des participants âgés utilisent souvent dans leur méthodologie un paradigme prospectif. Ce paradigme implique la connaissance préalable chez les partici-pants qu’un jugement sur la durée d'un intervalle devra être effectué lors de l'expérience, alors qu’un paradigme rétrospectif implique d’apprendre une fois que le laps de temps est écoulé que sa durée devait être évaluée (Zakay & Block, 2004). Le paradigme utilisé dans la présente étude est différent puisque l’évaluation de la perception temporelle repose da-vantage sur l’impression de la vitesse avec laquelle certaines durées temporelles passées se sont écoulées. Il est intéressant d’utiliser ce type de tâche pour évaluer la perception tempo-relle puisque, lorsqu’il est question de réfléchir à la vitesse avec laquelle la vie en général se déroule, il est souvent question d’impressions et il n’est pas su d’avance que la durée devra être évaluée. Puisque ce paradigme se rapproche davantage d’un paradigme rétros-pectif et qu’il existe peu de littérature sur l’impression de la vitesse avec laquelle le temps s’écoule, certains articles cités utilisent un paradigme rétrospectif.

Par ailleurs, ces études utilisent souvent dans leur méthodologie l’estimation d’intervalles temporels courts, comme des millisecondes ou des secondes (Hancock & Hancock, 2014). Selon Wittmann et Lehnhoff (2005), les résultats observés s’expliqueraient par le fait que les adultes plus âgés estiment les intervalles courts avec plus de variabilité et moins précisément que les adultes plus jeunes, parce qu’ils vivent plusieurs déficits cognitifs au niveau de l’attention, de la mémoire de travail et de la vitesse de trai-tement de l’information. Les processus impliqués dans la perception d’intervalles courts peuvent différer de ceux impliqués dans la perception d’intervalles plus longs, comme des années ou même des décennies (Grondin, 2008). Il est alors pertinent d’utiliser de longs intervalles temporels, comme des semaines ou des mois, dans l’analyse de la compression temporelle afin de valider si les processus qui y sont impliqués permettent d’observer des résultats chez d’autres populations que celles qui vivent un déclin cognitif. En outre, l’utilisation d’intervalles courts peut s’avérer problématique parce que la plainte la plus fréquente des personnes âgées à propos du temps qui s’écoule rapidement concerne un ju-gement d’intervalles temporels longs (Wittmann & Lehnhoff, 2005). Il est donc adéquat

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d’utiliser ce type d’intervalle afin que les conclusions tirées soient applicables à la plainte la plus fréquente et concernent les processus qui y sont reliés.

À titre d’exemple, Craik et Hay (1999) ont voulu comparer le jugement de durées de participants jeunes et de participants plus âgés en comparant leurs estimations temporelles, soit l’estimation de la durée écoulée entre un point et un autre, et leurs productions tempo-relles, soit la reproduction du temps écoulé entre un point et un autre. Ils ont obtenu un effet robuste de l’âge sur le jugement temporel qui indiquerait donc que les personnes âgées vi-vent plus de compression temporelle que les participants plus jeunes. Cependant, il s’agit d’une étude utilisant un paradigme prospectif ainsi que de courts intervalles temporels à juger.

Wittmann et Lehnhoff (2005) ont choisi d’analyser la compression temporelle en se basant, notamment, sur l’impression des participants quant à la vitesse avec laquelle le temps s’écoule (par exemple, «À quelle vitesse le temps s’écoule-t-il normalement pour vous ? » ou «A quelle vitesse vous attendez-vous que la prochaine heure s’écoule ? ») et sur l’impression de la vitesse avec laquelle certaines durées passées se sont écoulées (par exemple, «À quelle vitesse la dernière semaine s’est-elle écoulée pour vous ? »). Les ques-tions auxquelles devaient répondre les participants portaient toujours sur l’estimation de longs intervalles temporels. Les résultats obtenus sont bien différents de ceux obtenus par Craik et Hay parce qu’ils n’ont pas observé de différences concernant la perception tempo-relle des participants appartenant à différents groupes d’âge sauf pour la question : « À quelle vitesse les dix dernières années ont passé pour vous ? » (Traduction libre). Les autres intervalles à l’étude, comme une semaine, un mois ou une année, semblent passer au même rythme pour les gens de groupes d’âge différents. Leurs résultats indiquent que l’âge chro-nologique n’est responsable que d’une petite portion de la variance dans la perception de la vitesse avec laquelle le temps s’écoule. C’est pour cette raison qu’il est primordial d’identifier les autres facteurs reliés à la compression temporelle.

Afin d’évaluer la perception temporelle des participants, un questionnaire maison a été utilisé dans la présente étude. Ce dernier permet d’évaluer à quel degré les participants

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ont l’impression que certains délais temporels passés dans leurs vies se sont écoulés rapi-dement. Plus un participant trouve que le temps passe vite (plus un participant vit de com-pression temporelle), plus le score à ce questionnaire sera élevé. Puisque la comcom-pression temporelle semble reliée à différentes variables personnelles plutôt qu’à l’âge, il est attendu que la relation entre ces deux variables ne sera pas significative. Étant donné que le nombre de détails rappelés pour un intervalle donné affecte la durée perçue de cet événement, la mémoire des événements passés est aussi mesurée par le questionnaire maison. Il est atten-du que plus la mémoire des événements passés d’un participant est bonne, moins il rappor-tera vivre de compression temporelle. Cela signifie qu’un participant plus apte à se rappeler d’événements marquants de sa vie trouvera que le temps passe plus lentement (moins de compression temporelle) qu’un participant ayant une moins bonne mémoire.

Le genre du participant est une variable importante à prendre en considération, bien que l’influence de celle-ci sur la perception temporelle soit difficile à évaluer (Fraisse, 1963). Les femmes se souviennent de plus d’épisodes passés que les hommes (Pillemer et al., 2003). Puisque le nombre de détails rappelés pour un intervalle donné affecte la durée perçue de cet événement, il s’agit d’une variable importante. De plus, certaines études ten-dent à démontrer un effet du genre sur la perception de courts intervalles temporels (Block et al., 2000, dans le texte de Hancock 2014), mais aussi d’intervalles plus longs, voire d’intervalles aussi longs que la durée d’une vie (Hancock, 2010). Il est donc attendu que les femmes rapporteront vivre moins de compression temporelle que les hommes, en raison d'une meilleure mémoire des évènements passés. Ensuite, le questionnaire maison permet aussi d’analyser la relation entre la pression temporelle vécue par les participants et la per-ception temporelle. Plus un participant aura l’impression de manquer de temps pour ac-complir ce qu’il a prévu de faire dans une journée, plus il aura l’impression que le temps passe rapidement, c’est-à-dire qu’il vit plus de compression temporelle.

L’anxiété, caractérisée par la peur de quelque chose à venir (Krauss & Ruiz, 1967), influence aussi la perception temporelle. Par exemple, lorsque confrontés à un temps d’attente, les participants anxieux estiment qu’il a duré plus longtemps que les participants non anxieux. Selon l’étude de Krauss et Ruiz (1967), les gens avec un haut niveau

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d’anxiété pensent davantage aux événements situés dans le passé, plutôt qu’à ceux situés dans le présent ou dans le futur. L’étude de Muro, Castellà, Sotoca, Estaún, Valero et Gomà-i-Freixanet (2015) indique aussi que les personnes anxieuses sont davantage tour-nées vers le passé. L’anxiété influence donc comment le temps est perçu et quels événe-ments sont rappelés au profit de certains. L’anxiété est associée à des déficits dans certaines performances cognitives reliées à l’attention (Eysenck, 1992) parce que le contrôle atten-tionnel des individus anxieux serait plus faible que la normale. Il s’agit alors d’un trait à prendre en considération, car, comme mentionnée précédemment, l’attention est importante lorsqu’il est question de perception temporelle. Bien que certaines études évaluant l’effet de l’anxiété sur la perception temporelle soient réalisées dans un paradigme prospectif en rai-son de la relation existant entre l’anxiété et l’attention, il s’agit d’une variable pertinente puisque l’attention portée aux détails dans la vie de tous les jours pourrait être reliée à la qualité des souvenirs encodés. L’inventaire d’anxiété de Beck est donc utilisé afin de mesu-rer le degré d’anxiété vécu par les participants de cette étude. Il est attendu que, plus un participant sera anxieux, plus il trouvera que le temps passe lentement.

Hypothèses

Compte tenu de la recension des écrits ci-dessus, les hypothèses suivantes sont posées :

1: Il n’y aura pas de différence de compression temporelle en fonction de l’âge2.

2 : Plus un participant affirmera avoir une bonne mémoire des évènements (items 9, 11, 17 et 18 du questionnaire maison), moins il rapportera vivre de compression temporelle. 3: Les femmes rapporteront vivre moins de compression temporelle que les hommes. 4: Plus un participant affirmera vivre de pression temporelle (items 4, 7, 14 et 16 du

ques-tionnaire maison), plus il rapportera vivre de compression temporelle.

5: Plus un participant aura de traits anxieux (score élevé au BAI), moins il rapportera vivre de compression temporelle.

2 Cette hypothèse est posée puisqu’il est attendu que l’âge ne sera pas à l’origine de l’impression que le temps

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Méthode

Participants

Au total, 1212 participants ont été recrutés pour cette étude. Le recrutement s’est fait par l’envoi de courriels via la liste de courriels de l’Université Laval, dans certaines écoles secondaires de la ville de Québec et dans certains centres d’hébergement et de soins de longue durée de la région de Québec. L’échantillon est composé d’hommes et de femmes, âgés de 15 ans et plus. Mis à part l’âge minimal, aucun critère d’exclusion n’a été appliqué, et ce, afin d’obtenir un échantillon permettant de généraliser les résultats à la po-pulation. En guise de remerciement, les participants ont participé à un tirage de trois cartes-cadeaux de 50$ à Laurier Québec ou au Tim Hortons, selon leurs préférences.

De ces 1212 participants au départ, 148 participants ont dû être retirés de l’étude en raison de valeurs manquantes à certaines des questions. Ceci représente une perte de près de 12% des observations. Cette méthode a été privilégiée étant donné que les observations manquantes se distribuent aléatoirement à travers toutes les questions de la présente étude. De plus, une observation a été retirée puisqu’il était impossible de répondre «0» à l’une des questions. Enfin, la distance de Mahalanobis, qui permet d’identifier des observations trop rares pour être incluses dans les analyses, et ce, au seuil critique de .001, 𝜒"#$%& 5 = 20.52,

révèle que 10 participants ont fourni des réponses considérées comme étant rares. Ces der-niers ont donc été retirés aux fins de la présente analyse. De même, trois participants de genre « autre » ont été retirés de la présente analyse puisque la fréquence de cette catégorie est inférieure à 0.25 % de notre échantillon (Tabachnick et Fidell, 2013).

Ainsi, l’échantillon final est composé de 1050 participants dont l’âge moyen est de 34 ans et l’âge médian est de 26 ans. Le participant le plus jeune a 15 ans alors que le plus âgé a 97 ans.

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Matériel

Les participants ont répondu aux questionnaires autoadministrés via le site internet Portail intégré d’applications numériques pour ordinateur (Piano) ou sur la version papier des questionnaires. Le site Piano a aussi été utilisé pour la saisie des données. Le logiciel SPSS 24 a été utilisé pour la régression linéaire multiple. La régression non paramétrique a été réalisée à l’aide du logiciel R et de l’extension np (2018) de Jeffrey S. Racine.

Au départ, le formulaire de consentement était présenté aux participants. Ces der-niers ont ensuite été invités à remplir une courte fiche sociodémographique afin d’amasser les informations concernant leur genre et leur âge.

La version française de l’inventaire d’anxiété de Beck (BAI ; voir Annexe A) est utilisée afin de mesurer le niveau d’anxiété des participants (Freeston, Ladouceur, Thibo-deau & Gagnon, 1994). La version française a un α de 0,85. C’est un questionnaire qui in-clut 21 symptômes de l’anxiété, pour lesquels le répondant indique jusqu’à quel point le symptôme l’a affecté au cours de la dernière semaine. Il répond sur une échelle de 0 (pas du tout) à 3 (beaucoup), pour un résultat maximum de 63 points. Les résultats sont ensuite convertis afin de former une variable catégorielle : un score de 0 à 20 correspond à un ni-veau léger d’anxiété, un score de 21 à 35 correspond à un nini-veau moyen d’anxiété et un score de plus de 36 correspond à un niveau élevé d’anxiété.

Les participants ont répondu à un questionnaire maison de 18 questions portant sur diverses variables liées à la compression et à l’impression temporelles (QM ; voir Annexe B). Ce questionnaire est inspiré de celui utilisé par Friedman et Janssen (2010), lui-même inspiré de Wittmann et Lehnhoff (2005). Les items 1, 3, 6, 8, 10 et 12 portent sur l’impression de la vitesse du temps par rapport au passé. L’item 15, quant à lui, est lié à l’impression de la vitesse du temps par rapport au présent. Les items 4, 7, 14, et 16 portent sur le niveau d’occupation de la personne, soit la pression temporelle vécue par le partici-pant. Les items 9, 11, 17 et 18 portent sur la mémoire biographique de la personne. On ré-pond aux items de ce questionnaire à l’aide d’une échelle de Likert en sept points, 1 (si le

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participant est en total désaccord ou si l’énoncé lui semble complètement faux) à 7 (si le participant est en total accord ou si l’énoncé lui semble complètement vrai). Le score de compression temporelle est obtenu grâce à l’addition des items portant sur l’impression de la vitesse du temps par rapport au passé et au présent. Le score permettant de juger le ni-veau d’occupation du participant est obtenu en additionnant les items portant sur la pression temporelle vécue par celui-ci. Finalement, le score permettant d’évaluer la mémoire bio-graphique de la personne est obtenu en additionnant les résultats aux items ayant trait à ce sujet. Ainsi, un score global est obtenu pour chacune de ces trois variables.

Procédure

Les participants ont été invités à remplir en ligne cinq questionnaires regroupés en un seul. Pour les participants désireux d’avoir une version papier du questionnaire, il était possible de l’obtenir. Les réponses ont ensuite été codifiées sur le questionnaire en ligne pour éviter les erreurs de transcription. Cela permet à tout le monde de répondre aux ques-tionnaires, et ce, même en n’ayant pas facilement accès à internet ou en ne possédant pas les compétences informatiques requises. Le fait d’avoir les questionnaires regroupés en un seul permet aux participants de répondre sans avoir à ouvrir plusieurs liens internet.

Analyses statistiques

Afin d’évaluer si l’âge affecte la compression temporelle et, le cas échéant, com-ment cet effet se manifeste, une analyse de régression linéaire multiple a d’abord été réali-sée. Ce premier pas de l’analyse permet de voir si l’effet de l’âge affecte la compression temporelle, après avoir contrôlé pour d’autres facteurs explicatifs. Toutefois, le modèle paramétrique (modèle linéaire) peut ne pas être l’approche idéale pour explorer la relation réelle qui existe entre ces deux variables, puisque cela consiste à établir à priori un cadre dans lequel cette relation doit s’exprimer. Afin d’approfondir la nature de la relation qui existe entre la compression temporelle, l’âge et les autres facteurs, l’analyse de régression non paramétrique par la méthode de noyau a été utilisée.

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La démarche adoptée débute par la présentation des résultats du modèle linéaire, puis un test de spécification est réalisé afin d’évaluer s’il s’agit d’un modèle approprié. Compte tenu des résultats obtenus, une régression nonparamétrique est ensuite effectuée.

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Résultats

Régression linéaire multiple

La variable dépendante est le score de compression temporelle (SCT), 0 signifiant l’absence de compression temporelle et 56 signifiant que le participant vit beaucoup de compression temporelle. Les variables indépendantes utilisées sont l’âge, la pression tem-porelle vécue (0 signifiant peu de pression temtem-porelle et 28 signifiant que le participant vit beaucoup de pression temporelle), le niveau d’anxiété (léger : score de 0 à 21 ; moyen : score de 22 à 35 ; et élevé : score de 36 et plus), la mémoire (score de 0 à 28, un score plus élevé signifiant une meilleure mémoire biographique) et le genre des individus. Le Tableau 1 présente d’abord les statistiques descriptives de l’échantillon.

Tableau 1 : Statistiques descriptives de la compression temporelle en fonction de l’âge, du genre, du niveau d’occupation et de la mémoire (n = 1050)

Variables M ET MED MIN MAX

Compression temporelle 45.37 9.15 48.00 8 56 Âge 34.14 19.07 26.00 15 97 Niveau d’occupation 18.04 3.70 18.00 4 28 Niveau d’anxiété Léger .91 .27 1 0 1 Moyen .07 .25 0 0 1 Élevé .01 .10 0 0 1 Mémoire 20.09 3.83 21.00 5 28

Hommes (255 participants), Femmes (795 participants)

Le questionnaire permettant de mesurer la compression temporelle a un alpha de Cronbach de 0,87 alors que le questionnaire permettant de mesurer la mémoire a un alpha

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de Cronbach de 0,47. Quant au test qui permet de mesurer le niveau d’occupation de la per-sonne, il a un alpha de Cronbach de 0,14.

Le modèle de régression linéaire multiple utilisé inclut les variables âge, niveau d’occupation (Occ, c.-à-d. la pression temporelle), mémoire (Mem), le genre et les diffé-rents niveaux d’anxiété. Aux fins de la présente analyse, les gens ayant un niveau d’anxiété léger selon le BAI serviront de groupe de référence. Le modèle estimé correspond ainsi à l’Équation 1 ci-contre.

SCT = β-+ β/Age + β&Occ + β5Mem + β8Genre + β<Moyen + β?Élevé + ϵ (1)

Les principaux postulats de la régression multiple ont été testés. Tout d’abord, le test de Breusch-Pagan, qui permet de tester le postulat d’homoscédasticité du terme d’erreur est non-significatif, 𝜒&(6) = 5,09, p > 0,01, ce qui signifie que l’hypothèse nulle

d’homoscédasticité n’est pas rejetée. Ainsi, la variance du terme d’erreur ne diffère pas significativement selon les différents niveaux des prédicteurs.

Avec un seuil de signification de 5%, le modèle postulé explique une part significa-tive de la variabilité du score de compression temporelle. En effet, les résultats de la régres-sion indique que l’ensemble des prédicteurs explique 7,43 % de la variance, F(6,1043) = 13.96, p < .001, R2 = .074. Les résultats sont présentés dans le Tableau 2.

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Tableau 2 : Régression linéaire standard de la compression temporelle en fonction de l’âge, du genre, du niveau d’occupation et de la mémoire (n = 1050)

Variables b ES B 𝒕 𝜷 p Sr2 Âge 0.098 0.015 6.583 .204 0.000 .04 Genre -1.712 0.641 -2.674* -.08 0.008 .01 Niveau d’occupation BAI 0.161 0.08 2.52** .065 0.012 .00 Faible (groupe de référence) - - - - Moyen -1.643 1.091 -1.506 -0.046 0.132 0.00 Élevé -6.265 2.587 -2.422** -0.073 0.016 0.00 Mémoire 0.054 0.07 0.753 .023 0.451 .01 Constante 38.65 1.951 19.809*** 0000 0.000 *p < .10 **p < .05 ***p < .01 𝑅&= .074 𝑅IJ& = .069

Dans leur étude, Wittmann et Lehnhoff (2005) avaient constaté que la relation entre l’âge et la perception temporelle ne semblait pas linéaire puisqu’elle atteignait un plateau entre 50 et 60 ans. Ils ont donc réalisé une régression non linéaire. Cette dernière expliquait 11% de la variance totale de la compression temporelle en fonction de l’âge alors que la régression standard expliquait 9,2% de la variance totale. Ce dernier résultat est d’ailleurs similaire à celui obtenu dans la présente étude pour la régression linéaire multiple. À la lumière des résultats de Wittmann et Lehnhoff (2005), il est possible que la relation entre la compression temporelle et l’âge des participants ne soit pas linéaire. Ceci impliquerait que l’effet de l’âge sur la compression temporelle est non seulement présent, mais qu’il diffère d’un groupe d’âge par rapport à un autre.

Le modèle postulé par l’Équation 1 et le modèle de Wittmann et Lehnhoff sont res-trictifs sur certains points. D’abord, il faut spécifier la forme de la fonction entre les va-riables, qui est, dans notre cas, linéaire. Or, cette spécification peut être inadéquate et ainsi, conduire à des interprétations parfois erronées. Ensuite, il suppose a priori la nature de

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toutes les interactions possibles entre les variables indépendantes. Dans le modèle postulé cela pourrait engendrer de multiples variables explicatives, sans compter les interactions de deuxième ordre. Ceci conduit à une perte de puissance de même qu’à rendre extrêmement compliquée l’interprétation des effets principaux.

Afin de tester si un modèle linéaire est approprié pour analyser les présentes don-nées, le Nonparametric Consistent Model Specification Test (NPCMST)3 est utilisé (Li & Racine, 2007). Ce test permet de déterminer si la spécification du modèle (1), soit sa forme linéaire, est adéquate. Le résultat, Jn= 7,29 p < 0,01 permet de rejeter l’hypothèse nulle de spécification linéaire du modèle. Qui plus est, l’analyse des erreurs (voir annexe C) à l’aide d’un graphique suggère que le modèle linéaire semble présenter certaines lacunes en ce qui concerne la distribution du terme d’erreur. Cela laisse penser que le modèle linéaire ne semble pas être le plus approprié. La transformation des variables n’est pas une solution dans le cas présent puisque l’interprétation en serait affectée.

Ainsi, puisqu’un modèle linéaire n’est pas le plus adapté pour capter les subtilités de la relation entre les variables, une régression nonparamétrique à l’aide de l’estimateur de densité par noyau et avec une validation croisée est utilisée. L’avantage de cette technique est qu’elle permet d’estimer la relation entre les variables sans émettre d’hypothèse sur la nature de la relation entre les variables de même que sur la distribution des erreurs, comme le fait la régression standard. Elle est ainsi robuste face aux erreurs de spécifications aux-quelles sont davantage sujets les modèles paramétriques.

Régression non paramétrique avec estimateur par noyau

La méthode par noyau estime la fonction de régression en calculant une moyenne pondérée des observations y (ici, SCT) pour l’ensemble des valeurs possibles des variables indépendantes. Ainsi, différentes régressions seront effectuées en fonction de certains

inter-3 Ce test utilise une méthode de bootstrap afin de déterminer la distribution empirique qu’a le test statistique

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valles de valeurs que l’on désigne par « paramètres de lissage ». Ce sont ces derniers qui détermineront l’intervalle des données nécessaires afin d’effectuer localement la régression. Par exemple, si le paramètre de lissage est de « 2 » pour la variable « âge », ceci signifie que la régression sera effectuée en considérant toutes les observations dans un intervalle de deux années. La pondération des observations s’effectuera alors en fonction du noyau choi-si, qui est une fonction servant à pondérer les observations selon les écarts qui existe entre une observation et le reste des observations. Le choix du type de noyau est arbitraire et il importe très peu (Li & Racine, 2007). Enfin, dans le présent mémoire, la méthode de vali-dation croisée par les moindres carrés a été utilisée afin d’estimer les paramètres de lissage des différents modèles.

La finalité de cette méthode est qu’elle permet d’estimer plusieurs paramètres de ré-gressions qui sont d’ailleurs représentés graphiquement. Contrairement à la régression li-néaire et non lili-néaire, la régression nonparamétrique ne suppose pas à priori de forme de relation entre les variables. Cela permet d’assouplir certaines hypothèses plus contrai-gnantes présentes lors de l’exécution d’une analyse paramétrique et qui concernent la forme de la relation. Ainsi, il est possible de rendre compte de toutes les interactions entre les va-riables.

L’équation du modèle nonparamétrique estimé, l’Équation 2, est la suivante. Ici, m(.) signi-fie qu’aucune supposition n’est faite sur la relation. Les variables utilisées sont spécifiées à l’intérieur de cette fonction.

SCT = m(age, genre, occ, mem, BAI)+ e (2)

Tout d’abord, nous avons utilisé un polynôme local de degré 04 , communément ap-pelé estimateur local constant, afin de valider la pertinence des variables incluses dans le modèle. Li et Racine (2007; p.73, p.85) ont démontré qu’avec cette méthode, où les para-mètres de lissage sont choisis à l’aide d’une méthode de validation croisée (ce que

4 Ceci revient à estimer, pour différents intervalles une régression, dont la forme est la suivante : 𝑦 = 𝛽

-. En d’autres termes, la moyenne de SCT selon les groupes préalablement définis par le paramètre de lissage.

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l’extension np permet de faire), il est possible d’évaluer la pertinence des variables de notre modèle. Ceci survient lorsque le paramètre de lissage tend à prendre des valeurs très impor-tantes. Dans ce cas précis, cela signifierait que le modèle utilise toute les données pour es-timer une seule régression dont la valeur serait une constante et signifierait que la valeur de SCT ne change pas selon les niveaux des autres variables.

Dans un deuxième temps, nous avons utilisé un estimateur de premier degré5 (appe-lé estimateur local-linéaire) afin d’évaluer si les relations sont linéaires ou non. En effet, Li et Racine (2007) montrent que, combinée avec l’estimateur localement linéaire, la valida-tion croisée par les moindres carrés permet également de détecter les relavalida-tions partielles linéaires (paramètre de lissage devient très grand). Dans ce cas, si tout l’intervalle de la variable âge est utilisé, ceci revient à n’effectuer qu’une seule régression linéaire. Les résul-tats des paramètres de lissage sont présentés dans le Tableau 3.

Tableau 3 : Paramètres de lissage de la régression nonparamétrique de la compression temporelle en fonction de l’âge, du genre, du niveau d’occupation et de la mémoire et résultats au test d’effet individuel (n = 1050)

Variables Local constant Local Linéaire Valeur de p

Genre 0.34 0.30 0.022

Age 18.85 90.29 0.000

Occupation 2.29 5.01 0.001

Mémoire 1.50 1.92 0.000

BAI 0.10 0.16 0,067

Selon la méthodologie présentée par Li et Racine (2007), les paramètres de lissage pour l’estimateur local constant indiquent que l’ensemble des variables incluses dans le modèle sont pertinentes. En effet, les intervalles employés semblent raisonnables. Ensuite, les paramètres de lissage utilisés pour l’estimateur local-linéaire révèlent que la variable

5 Ceci revient à estimer, pour différents intervalles une régression dont la forme est la suivante : 𝑦 = 𝛽

/𝑋 + 𝛽-.

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âge est susceptible d’être linéairement reliée à la variable SCT. Cette dernière affirmation sera davantage étayée dans la section suivante.

Enfin, les résultats de la régression nonparamétrique montrent que le modèle ex-plique une part significative de la variance, F(5, 1045) = 77.41 , p =.024, 𝑅& = 0.20. Ceci

représente une amélioration dans la capacité du modèle d’expliquer la variabilité de la compression temporelle. L’extension np permet de tester si les effets individuels observés sont significatifs ou non. Le test est basé sur Racine, Hart et Li (2006) et Racine (1997). Ce dernier est analogue à un simple test t dans un cadre de régression paramétrique. Les résul-tats sont présentés dans le Tableau 3. Ainsi, individuellement, les variables, âge, genre, niveau d’occupation et mémoire sont significatives au seuil critique de 5 %. Pour sa part, l’anxiété est significative au seuil critique de 10 %. Le fichier de commande de cette ana-lyse se trouve en annexe D.

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Discussion

L’objectif principal de cette phase de l’étude est d’analyser la relation entre l’âge et la compression temporelle. Dans cette optique, l’analyse de régression non paramétrique par estimateur de noyau permet d’étudier la relation qui existe entre ces variables, tout en contrôlant l’effet des autres variables indépendantes. Pour la suite de cette section, certains graphiques, teintés de bleu, représenteront la relation réelle entre une variable explicative et la variable dépendante. Graphiquement, la droite en rouge représente la fonction liant ces dernières. Les droites en noire correspondent aux intervalles de confiance pour le 2.5e per-centile et le 97,5e percentile (équivalant à un intervalle de 95 %). Enfin, les zones ombra-gées en bleu représentent une densité (concentration) de données plus importante. Les autres graphiques permettront d’observer les gradients, soient les vecteurs de betas, de la relation entre une variable explicative et la compression temporelle. Tel qu’expliqué ci-dessus la méthode par noyau estime plusieurs droites de régression sur un intervalle précis et défini. C’est la valeur de ces paramètres que nous trouvons dans les graphiques des gra-dients.

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Âge

Figure 1 : Régression non paramétrique partielle (en rouge) du score de compression temporelle en fonction de l’âge (intervalle de confiance, en noir, à 95 %)

Figure 2 : Gradients (vecteur de betas) de la régression non paramétrique partielle du score de compression temporelle en fonction de l’âge (intervalle de confiance, en noir, à 95 %)

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La Figure 1 montre la relation entre l’âge et le score de compression temporelle. Il est possible d’observer que la relation est linéaire. Ceci signifie que, en moyenne, plus une personne gagne en âge, plus elle tend à vivre de la compression temporelle. L’effet de l’âge est le même que la personne soit âgée de 20 ans ou de 80 ans. Ainsi, la contribution d’une année supplémentaire sera la même sur le score de compression temporelle (ap-proximativement de 0,9 tel que démontré par la figure 2).

La Figure 2 illustre l’ensemble des valeurs possibles des paramètres pour tous les âges. Le fait que la ligne soit droite indique que la relation est linéaire, tel qu’énoncé précé-demment. Cela signifie que les personnes âgées perçoivent que le temps passe plus rapide-ment que les personnes plus jeunes, et ce, lorsque tous les énoncés du questionnaire maison sont pris en considération.

Les résultats observés concernant la relation entre l’âge et la compression tempo-relle vont à l’encontre de l’hypothèse à ce sujet. Il était attendu que l’âge n’ait pas d’effet sur la compression temporelle, donc que son effet soit constant. Ceci impliquait qu’un par-ticipant rapporterait vivre la même compression temporelle peu importe son âge. Or, la relation entre l’âge et la compression temporelle semble plutôt linéaire comme le montre la Figure 1 et suppose ainsi un effet de l’âge sur la compression temporelle.

L’hypothèse au sujet d’une absence d’effet de l’âge sur la compression temporelle vécue découlait du fait que les participants devaient juger de longs intervalles temporels, et ce, selon leur impression de la vitesse avec laquelle le temps s’écoule ainsi que des résultats observés par Wittmann et Lehnhoff (2005). Selon leur étude, l’âge chronologique n’est responsable que d’une petite portion de la variance dans la perception de la vitesse avec laquelle le temps s’écoule et il ne semble pas y avoir de différences quant à la perception temporelle des participants jeunes et des participants âgés sauf lorsqu’il est question de réfléchir à la vitesse à laquelle se sont écoulées les dix dernières années. Ainsi, il semblerait

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que, plus les participants avancent en âge, plus ils trouvent que le temps passe rapidement, et ce, même en éliminant l’effet des autres variables du modèle.

Mémoire

La mémoire est aussi une variable d’intérêt dans cette étude. En effet, les modèles servant à expliquer le rappel rétrospectif de durées reposent, pour la plupart, sur la mé-moire. (Zakay & Block, 2004). Le modèle de changement contextuel (Block, 1989 ; 1990) propose que la durée d’une période, rappelée dans ce type de paradigme, soit basée sur la capacité de se rappeler les changements contextuels encodés en mémoire durant la période en question. Plus il y a de changements contextuels disponibles en mémoire, plus la durée paraît longue. Les gens avec une bonne mémoire trouveraient donc que le temps passe plus lentement que ceux ayant une moins bonne mémoire.

Pour les participants à cette étude ayant un score entre 10 et 20, la relation entre la mémoire et la compression temporelle est positive. Cela signifie que pour chaque point additionnel à l’échelle de mémoire, le sujet trouve que le temps passe d’autant plus vite. À partir d’un score de 20 sur 28, la relation est négative. Cela signifie que les gens qui rappor-tent avoir une bonne mémoire trouvent que le temps passe plus lentement (c’est-à-dire qu’ils rapportent vivre moins de compression temporelle). De plus, il semble que plus les scores pour la mémoire sont extrêmes (très faible ou très élevé), qu’elle soit bonne ou mau-vaise, plus l’impact est incertain, comme le montre les intervalles de confiance très impor-tants. Par contre, il est possible d’affirmer que la relation n’est pas linéaire et qu’elle est significative.

Ce résultat est conforme avec ceux de certaines études traitant du lien entre la mé-moire et la perception temporelle (Ornstein, 1969 ; Block, 1990). L’hypothèse concernant la qualité de rappel est donc partiellement confirmée, puisqu’il existe un seuil en deçà du-quel le fait d’avoir une meilleure mémoire augmente la compression temporelle vécue. La figure 3 permet d’apprécier cette relation.

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Il est important de souligner que les barres d’erreurs incluent le gradient 0 pour la plupart des scores de cette échelle ; il faut donc interpréter ces résultats avec prudence. La figure 4 permet d’observer les gradients de la relation entre la compression temporelle et la mémoire.

Figure 3 : Régression non paramétrique : représentation graphique de la relation entre le score de compression temporelle en fonction du score de mémoire

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Figure 4 : Gradients (vecteur de betas) de la régression non paramétrique partielle du score de compression temporelle en fonction de la mémoire (intervalle de confiance, en noir, à 95 %)

Genre

De l’hypothèse sur la relation entre la mémoire et la compression temporelle décou-lait une hypothèse sur l’effet du genre sur la compression temporelle. Il était attendu que les femmes vivent moins de compression temporelle (c’est-à-dire qu’elles trouvent que le temps passe plus lentement) que les hommes. L’effet du genre sur la compression tempo-relle est significatif. Les résultats indiquent que les femmes vivent moins de compression temporelle que les hommes et, puisque c’est ce qui était attendu, cela rejoint l’hypothèse à ce sujet. Cependant, cette hypothèse était formulée sur la base qu’il en serait ainsi puisque les femmes ont une mémoire plus précise des événements (Pillemer et al., 2003; Wang, 2012). Cette hypothèse est infirmée puisque la relation entre la mémoire et la compression temporelle ne diffère pas selon les genres (les résultats de la modération et de la médiation non-significatifs sont présentés en Annexe E). Cela va donc à l’encontre des conclusions tirées par Grysman et Hudson (2013) qui rapportaient qu’il existe des différences au niveau de la mémoire autobiographique attribuables aux genres des participants. Il est probable

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que les femmes aient effectivement une meilleure mémoire autobiographique que les hommes mais qu’elles soient plus modestes lorsqu’il s’agit de questionnaires semblables au questionnaire maison.

La différence observée entre la compression temporelle vécue par les femmes et celle vécue par les hommes abonde dans le même sens que les observations de Block, Han-cock et Zakay (2000). Ils ont analysé les résultats de 87 expériences, publiées dans 71 ar-ticles de journaux et deux chapitres de livres. Leurs conclusions indiquent que les juge-ments rétrospectifs de durée montrent un effet significatif du genre. Les femmes tendraient à trouver que le temps s’écoule plus lentement que les hommes, c’est-à-dire qu’elles per-çoivent une durée subjective comme étant plus longue que le temps objectif. Cela signifie-rait donc que les femmes vivent moins de compression temporelle que les hommes, comme il a été observé dans cette étude. Les estimations des femmes avaient aussi davantage de variabilité intragroupe comparativement à celles des hommes. Dans la présente étude, la variance chez les femmes est aussi plus élevée que la variance chez les hommes. Cepen-dant, ces auteurs expliquent la relation entre le genre et la compression temporelle par un effet de la mémoire. Ils ont conclu cela puisque les femmes seraient meilleures que les hommes en ce qui a trait à la mémoire épisodique, alors qu’elles ne seraient pas différentes des hommes pour les tâches reliées à la mémoire de travail et à la mémoire sémantique (Herlitz, Airaksinen, & Nordstroem, 1999; Herlitz, Nilsson, & Backman, 1997). L’avantage des femmes dans les tâches de mémoire serait petit comme l’indiquent 18 études sur le su-jet, alors que deux études ont révélé un avantage des hommes dans certaines tâches de mé-moire (Herlitz & al., 1997). La relation entre la mémé-moire et le genre mériterait donc davan-tage d’investigations. Il semblerait que la relation entre le genre et la compression tempo-relle pourrait avoir d’autres explications qu’un avantage des femmes lors de tâches mné-siques.

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Figure 5 : Régression non paramétrique : représentation graphique de la relation entre le score de compression temporelle en fonction du niveau d’occupation

Figure 6 : Gradients (vecteurs de betas) de la régression non paramétrique partielle du score de compression temporelle en fonction du niveau d'occupation (intervalle de confiance, en noir, à 95 %)

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Ensuite, il était attendu que l’impression de pression temporelle vécue par les parti-cipants soit positivement associée à la compression temporelle. Sur la Figure 5, on re-marque que la relation est d’abord positivement reliée au niveau d’occupation, puis devient progressivement négative. Cette forme en U inversé est qualifiée de quadratique. Cette forme implique que le niveau d’occupation (lorsqu’il est faible) tend à faire augmenter la compression temporelle chez les individus, puis après un certain degré d’occupation, les gens tendent à percevoir moins de compression temporelle. La figure 6, quant à elle, pré-sente les pentes de la relation entre la compression temporelle et la pression temporelle. En deçà d’un score de 20, la relation est positive et à mesure que l’occupation de l’individu augmente, l’impact de ce facteur tend à devenir de moins en moins important. Il est aussi possible de remarquer qu’après un score de 20, l’effet de la pression temporelle devient négatif. Cet effet devient d’ailleurs plus important à mesure que l’individu se sent très oc-cupé. Ainsi, l’hypothèse selon laquelle plus un individu affirme vivre de pression tempo-relle, plus il vit de compression temporelle est donc supportée par la présente analyse. Il en est ainsi jusqu’à un score de 23 et ensuite la relation devient négative. Une personne très occupée (score de 23 et plus sur 28) trouve donc que le temps passe plus lentement qu’une personne moyennement occupée.

Selon la théorie du Dynamic Occupation in Time (DOiT) (Larson, 2004), plus un individu passe d’une situation routinière vers une situation engageante, plus il trouve que le temps passe vite. Une situation routinière contient des activités habituelles, concrètes et intuitives alors qu’une situation engageante est abstraite, nouvelle et en est une pour la-quelle l’individu n’est pas habitué. Le fait d’être occupé entraîne l’impression que le temps passe vite. Une situation perçue comme étant simple et commandant un faible engagement cognitif et émotionnel est perçue comme se déroulant plus lentement. Cependant, l’auteur de cette théorie mentionne que si les événements deviennent chaotiques ou trop engageants, la compression temporelle atteint un plateau et tend à diminuer. Les résultats de la présente étude apportent un soutien à cette théorie. Ils sont aussi alignés avec l’hypothèse d’Hogan (1978) selon laquelle, lorsqu’on passe d’une situation simple à une situation avec une com-plexité optimale, la durée perçue diminue alors qu’elle augmente lorsqu’on passe d’une situation avec une complexité optimale à une situation trop complexe.

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La relation entre la pression temporelle et la perception temporelle ne semble donc pas être linéaire, mais quadratique. Un plateau serait atteint pour un score de 23 sur 28 et indiquerait que la personne ne se sent plus confortable et compétente mais bien inefficace à gérer sa vie quotidienne et accablée par les événements. Une personne qui affirme manquer souvent de temps, avoir une vie qui n’est pas du tout routinière, être très occupée et ne ja-mais s’ennuyer (score de 23 et plus sur 28) rapporte vivre moins de compression tempo-relle.

Anxiété

Finalement, l’effet du niveau d’anxiété des participants sur la compression tempo-relle est conforme à l’hypothèse à ce sujet. Même si la variable n’est pas significative au seuil de 5%, il semblerait que les participants ayant un niveau d’anxiété élevé vivent moins de compression temporelle que les participants ayant un niveau d’anxiété léger ou modéré.

Figure 7 : Régression nonparamétrique sur la compression temporelle selon le niveau d'anxiété avec intervalle à 95 %.

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Les participants anxieux trouvent donc que le temps passe plus lentement que les partici-pants qui sont peu ou pas du tout anxieux. La Figure 7 illustre ce résultat.

Ce résultat est conforme à ceux observés lors de deux études sur le lien entre l’anxiété et la perception temporelle dans un paradigme rétrospectif (Sarason & Stoops, 1978, Watts & Sharrock, 1984). Les participants de ces deux études estimaient le temps comme étant plus long lorsqu’ils présentaient de l’anxiété que lorsqu’ils n’en présentaient pas, comme c’est le cas dans la présente étude.

En somme, il semble que plus les participants avancent en âge, plus ils ont l’impression subjective que le temps s’écoule rapidement. Cela indique que la compression temporelle pourrait augmenter de façon linéaire avec l’âge. Comme il était attendu, plus un participant a une bonne mémoire biographique, plus il trouve que le temps passe vite. Ce-pendant, à partir d’un score de 20 sur 28, la relation devient négative. Les gens qui rappor-tent avoir une très bonne mémoire trouveraient donc que le temps s’écoule plus lentement. La relation entre la mémoire et la perception temporelle pourrait donc ne pas être linéaire. Les femmes semblent vivre moins de compression temporelle que les hommes. Cela con-firme l’hypothèse qui était formulée à ce sujet. Cela était attendu sur la base de la meilleure précision de la mémoire des femmes. Étant donné que la relation entre la mémoire et la compression temporelle ne diffère pas selon les genres, la relation entre le genre et la com-pression temporelle mériterait davantage d’investigations. Les résultats du présent chapitre supportent la théorie du Dynamic Occupation in Time (DOiT) (Larson, 2004). Les résultats indiquent que plus un individu passe d’une situation routinière vers une situation enga-geante, plus il trouve que le temps passe vite. Cette relation se trouve renversée lorsque la situation devient trop engageante et que l’individu se sent très débordé. En effet, lorsque les participants vivent trop de pression temporelle, la compression temporelle atteint un plateau et diminue. La relation entre ces deux variables ne serait donc pas linéaire. Finalement, tel qu’attendu, le fait d’être anxieux amènerait à trouver que le temps passe plus lentement.

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Chapitre 3 : Quelles caractéristiques individuelles des

adolescents influencent la compression temporelle?

Figure

Tableau 1 : Statistiques descriptives de la compression temporelle en fonction de l’âge, du  genre, du niveau d’occupation et de la mémoire   (n = 1050)
Tableau 2 : Régression linéaire standard de la compression temporelle en fonction de l’âge,  du genre, du niveau d’occupation et de la mémoire (n = 1050)
Tableau 3 : Paramètres de lissage de la régression nonparamétrique de la compression  temporelle en fonction de l’âge, du genre, du niveau d’occupation et de la mémoire et  résultats au test d’effet individuel (n = 1050)
Figure 1 : Régression non paramétrique partielle (en rouge) du score de compression temporelle en fonction  de l’âge (intervalle de confiance, en noir, à 95 %)
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