« Adolescences »
La première prescription de pilule
Christian Quéreux, Aurélien Binet
Institut M Institut MInstitut M
Institut Mèèèère Enfant Alix de Champagne re Enfant Alix de Champagne re Enfant Alix de Champagne re Enfant Alix de Champagne CHU Reims
CHU Reims CHU Reims CHU Reims
Conflit d’intérêt: bibliographie fournie par Bayer- Schéring
Collège de gynécologie Bordeaux 5 fevrier 2011
« Le moine qui vient de loin psalmodie* plus fort »
(* chanter, réciter)
• « Au mois de septembre, un laboratoire qui commercialise une pilule contenant un progestatif de deuxième génération organise une réunion à Bordeaux autour d'une…spécialiste en coagulation, qui ,à la faveur de récentes études, réactive cette recommandation un peu ancienne prônant un
progestatif de deuxième génération en première intention .
• Dans la foulée, nous apprenons… qu'une de nos consoeurs paloises, était mise en cause pour avoir prescrit en
première intention une pilule à la drospirénone chez une jeune fille qui a fait, dans les mois qui ont suivi une
thrombophlébite cérébrale, heureusement régressive. Le procès a eu lieu récemment et en première instance, il a été considéré qu'il s'agissait d'un aléa thérapeutique non indemnisable
• Depuis ces faits, le Sud ouest est le terrain d'une guerre de laboratoires qui destabilise nos idées » (AM Kern)
D u b ie n co nn u
Le risque veineux des EP
• L’utilisation d’un EP augmente le risque veineux, - avec tous les produits
- quelle que soit la voie d’administration:
• Les principales études cas-témoins et les études de cohortes récentes montrent un risque de TVP multiplié par 2,7 à 4,5 (3 à 11 littérature).
• Risque . non corrélé à la durée de l’administration . peut survenir dès le premier mois,
donc chez l’adolescente
. parait plus élevé en cas d’obésité et d’âge > 35- 40 ans
Le risque veineux des EP
•
L’estrogène est le principal responsable
- Hypercoagulabilité (formation de fibrine)
avec augmentation du fibrinogène, des facteurs VII, II et X de
coagulation associée à une diminution de certains inhibiteurs comme l’antithrombine, la protéine S ainsi qu’à une certaine résistance à la protéine C activée
- Hyperfibrinolyse
avec augmentation du taux de plasminogène, de t PA, du facteur XII et diminution de l’inhibiteur physiologique de la fibrinolyse PAI-1
- Ces 2 modifications s’équilibrent
. chez des patientes en bonne santé dont
l’hémostase est normale . Il n’en est sûrement pas de même en cas
d’anomalies acquise ou congénitale de l’hémostase
R is qu e T E V e t ut il is a ti on d e l a p il ul e - L’ in ci d en ce d es a cc id en ts T E V c he z un e fe m m e en b on ne s an té , d e 15 e t 4 4 a ns , n e pr en an t pa s la p ilu le , es t d ’e nv ir on 4 - 5 c as po ur 1 0 0 0 0 0 A F ( 1) - E lle p eu t s’ él ev er à 6 0 ca s po ur 1 0 0 0 0 0 A F e n ca s d e gr os se ss e (d an s 1 à 2 % d es c as , l ’is su e es t fa ta le ) et 3 0 0 p 10 0 0 0 0 A F e n po st -p ar tu m ( 2 ) - Po ur le s fe m m es p re na nt u ne p ilu le c on te na nt m oi ns d e 5 0 m cg d ’E E a ss oc ié s au L N G , l ’in ci d en ce d es T E V es t es ti m ée à en vi ro n 9 - 1 0 c as po ur 1 0 0 0 0 0 A F - Po ur le s as so ci at io ns c on te na nt d u d és og es tr el o u d u ge st od èn e (3 G ), l’ in ci d en ce e st d ’e nv ir on 2 0 c as po ur 1 0 0 0 0 0 A F
(??) Rapport public d'évaluation du comitédes spécialités pharmaceutiques .Afssaps; 2001.Rappel des épisodes
précédents
Risque et réduction des doses EE
• Le risque est dose dépendant
- La réduction à moins de 50 mcg de la dose d’EE ayant largement diminué le risque, on
pouvait espérer que la poursuite de la baisse à 20 et 15 mcg (ce que l’on trouvait dans les 3G) allait continuer dans cette voie
- Il n’en a rien été bien au contraire, les
progestatifs nouveaux associés à EE ayant
été pris dans la tempête glaciale de l’hiver
1995-96.
La psychose…
• Quatre études indépendantes, trois épidémiologiques et une de cohorte ont montré un
risque de TEV accru chez les utilisatrices de CO contenant un progestatif 3G / EP de 2e génération
• Dans ces études, la CO s’accompagne d’un risque de TEV quatre fois supérieur à celui de non-utilisatrices et
environ 2 fois plus élevé avec les CO de 3e génération qu’avec les contraceptifs au LNG
• Dans la plupart des études, les pilules contenaient la même dose d’EE, 30 mcg ... ce qui a conduit à incriminer les
progestatifs nouveaux.
Bloemenkampf Lancet 1995, 346, 1593-6. Jick Lancet 1995, 346, 1589-93 Farley Lancet 1995, 346, 1582-88. Spitzer BMJ, 1996, 312, 83-8
3G: Que dire avec du recul?:
- L’augmentation du risque a été sans doute
surévaluée mais on ne conclut pas à l’absence de tout risque additionnel
- Les biais étaient nombreux, ... de diagnostic, de prescription, avec facteurs de
confusion et mise en évidence de prescription des 3G à des femmes plus à risque.
- Deux méta-analyses en 2001 ont pris en compte les reproches précédents et d’autres ; il en
ressort
un RR à 1,7 des 3G versus 2G.
Hennessy Contraception 2001; 64:125-33. Kemmeren BMJ 2001; 323:1-9.
“La vérité est éternelle, la connaissance est mouvante, les confondre est désastreux” (M Langle)
2009-2010
Nouvelle vague
d’effervescence médiatique
« CO et risque TEV: mise à jour »
• Récentes données
• Couverture médiatique importante
• La drospirénone parait la plus « attaquée », Pourquoi? Données nouvelles > concurrence EE 20mcg LNG?
• Attention à la psychose, elle a ses conséquences:
arrêt de pilule , IVG… (cf 1995-1996)
Reid R . JOGC 2010; 252:1198-1204
Drospirénone: un risque élevé de thromboses
veineuses
La revue Prescrire
Septembre 2010;323:673-5
Résumé: « en matière de contraception estroprogestative, mieux vaut s’en tenir à une association d’éthinyl estradiol et de lévonorgestrel ou de norethistérone »
BMJ 2009: Nouvelle vague d’effervescence médiatique
• Etude cas-témoins retrospective MEGA (Dutch Mega study)
Van Hylckama Vlieg A, Helmerhorst FM, Vandenbroucke
JP, Doggen CJ, Rosendaal FR.
The venous thrombotic risk of oral contraceptives, effects of estrogen dose and progestogen type:
Résultats de l’étude MEGA case-control study BMJ.
2009;339:b2921. doi: 10.1136/bmj. b2921
• Etude rétrospective de cohorte, danoise
Lidegaard Ø, Løkkegaard E, Svendsen AL, Agger C.
Hormonal contraception and risk of venous
thromboembolism: national follow-up study. BMJ. 2009 Aug 13;339:b2890. doi: 10.1136/bmj.b2890
Etude cas-témoins MEGA
• 1524 sujets vs 1760 témoins, Pays-bas
• RR moyen sous pilule: 5 - EE + LNG: 3,6 [3,7-4,6]
- EE + GSD: 5,6 - EE + DSG: 7,3 - EE + CPA: 6,8
- EE + DRSP: 6,3
• Risque plus élevé dans tous les cas dans les premiers mois d’utilisation
• Risque plus limité avec LNG mais …
Van Hylckama Vlieg. BMJ 2009 ,339: b2921 Bonne fiabilité des examens
complémentaires
ayant permis le diagnostic de TEV
Etude cas-témoins MEGA
• Nombreuses critiques méthodologiques - manque d’information sur les durées
d’utilisation
- nouvelles utilisatrices?
- pas d’info sur l’IMC - combinaison inhabituelle de deux groupes
contrôles (appels téléphoniques aléatoires ou
partenaires d’hommes suivis dans une clinique de thrombose) - concernant le taux de patientes sous DRSP
(1,2%), il est trop faible pour une estimation fiable du risque (FDA 2010)
BMJ 2009 ,339: b 2921
Etude rétrospective de cohorte
• Danemark, 1995-2005, 10,4 millions AF dont 3,3 millions AF avec CO
• RR: 2,8 (vs non utilisatrices)
• Référence : EE + LNG - EE + NET: 0,98
- EE + NGM: 1,19 - EE + DSG: 1,82 - EE + GSD: 1,86 - EE + DRSP: 1,64
- EE + CPA: 1,88
• Risque plus élevé sous DSG, GSD, CPA et DRSP
• RR DRSP vs LNG: 1,64 [IC 95%: 1,27-2,1] mais…
Lidegaard BMJ, 2009;339; b 2890 diagnostic de TEV incertain
dans moins de 1% des cas
Etude rétrospective de cohorte
• Nombreuses critiques méthodologiques – IMC et antécédents TEV non renseignés
- Pendant cette période l’obésité a été
x par 3 au Danemark ( importance de la
combinaison des facteurs de risque) - Imprécision de la durée de prise LNG - Sous estimation possible du nombre de
primo-utilisatrices de LNG - RR 1,64 de DRSP: peu de valeur
épidémiologique car inférieur à 2 avec
plusieurs biais possibles
Pas d’augmentation du risque avec DRSP: plusieurs études
• EURAS
Dinger J et al. Contraception, 2007; 75: 344-54
• Etude prospective Etats-Unis
Seeger JD et al. Obstet Gynecol 2007; 110: 587-93
• Etude cas contrôle
DingerJ et al.J Fam Plann Reprod Health Care 2010; 36:
123-9
• Revue récente de la littérature Sehovic N et al. Ann Pharmacoter 2010;44:898-903
L’étude Euras
• Prospective (2000-2005), observationnelle (pratique courante), nouvelles utilisatrices (instauration ou changement) comparative
entre différents progestatifs (drospirénone, LNG, autres) multinationale, 58 674 femmes (142 475 AF)
• Il n’y a pas de différence significative dans la fréquence d’apparition des accidents TEV ou artériels dans les 3 groupes de patientes.
Dinger J et al. Contraception, 2007; 75: 344-54 (Conflit d’intérêt Bayer)
EURAS: effectifs
Number of patients at baseline
Baseline n = 58,674*
16,534
15,428
26,341
0 5,000 10,000 15,000 20,000 25,000 30,000
Jasmine LNG Autres EP
1°utilisatrices=20%
Age moyen = 18,5 ans Switchers = 80%
Age moyen =26,9ans
EURAS
Events/10,000 WY
Incidence des accidents TE:
pas de différence entre les 3 groupes
0 5 10 15 20 25
Yasmin LNG Other
VTE
0 5 10 15 20 25
Yasmin LNG Other
All TE
0 2 4 6 8 10
Yasmin LNG Other
ATE
Les CO contenant de la DRSP étaient prescrits
plus souvent aux femmes présentant un poids supérieur
Etude prospective Etats-Unis
• 22429 nouvelles utilisatrices de DRSP vs 44 858 « « « d’autre CO
• DRSP: 18 TEV;
Autres CO: 39 cas
• Aucune différence statistiquement significative
Seeger JD et al. Obstet Gynecol 2007; 110: 587-93 (Conflit d’intérêt Bayer)
Etude cas contrôle
• 2002-2008, Allemagne
• 680 cas de TEV vs 2720 témoins
• RR de la contraception orale: 2,3
• Pas de différence selon les molécules - EE + DNG: 1,1
- EE + DRSP: 1
DingerJ et al. J Fam Plann Reprod Health Care 2010; 36: 123-9 (conflit d’intérêt Bayer)
Revue récente de la littérature
• Cinq études retenues
- Lidegaard BMJ. 2009 Aug 13;339:b2890.
- Dinger . Contraception 2007; 75: 344-54 - Seeger . Obstet Gynecol 2007; 110: 587-93
– Pearce. Br J Clinic Pharmacol 2005; 60: 98-102 - Eng. Pharmacoepidemiol Drug Saf 2008; 17:297-305
• RR de la pilule: 3 - 6
• RR DRSP: 0,9 - 1,7
• Conclusion: pas d’augmentation démontrée du risque de TEV sous DRSP vs autres progestatifs
Sehovic N et al. Ann Pharmacoter 2010;44:898-903
En pratique: prévention d’abord
L’interrogatoire est l’étape la plus importante: Notion de phlébite ou d’embolie ou de traitement anticoagulant chez un parent au premier degré;
donnée pas toujours connue chez les ados qui ne souhaitent pas poser la question à leurs parents!
Respect sans faille des mauvaises indications (obésité…) ou contre-indications
Choix de la 1
èrepilule:
recommandation n’est pas obligation
• Chacun est Docteur et fait ce dont il prend la
responsabilité en fonction de son savoir et du profil de la patiente
• Chez mademoiselle « tout le monde » Le remboursement est essentiel
priorité aux 2ème générations
ou 3G remboursées (pour les étourdies!) La sécurité aussi
l’association EE + LNG (ou norethistérone) est la moins thrombogène
• … et comme le risque TEV est un risque des premiers mois, autant choisir au début la moins thrombogène, il sera toujours temps de voir ensuite, après un an ou en fonction de la tolérance ou d’un problème annexe
Principe de précaution
• « Chez les femmes utilisant des contraceptifs oraux pour la première fois, et tout au long de la première année d’utilisation, ce risque relatif serait plus important quelque soit l’association utilisée » Vidal 2011*
• Alors, utiliser les pilules de deuxième génération parait légitime au début, à 30 ou à 20 mcg EE.
Pas de différence significative entre 30 mcg EE / 150mcg LNG et 20 mcg EE /1OO mcg LNG:
OR:1,1; IC 0,4-3,1 [2]
* Notice Leeloo* 2- Van Hylckama Vlieg. BMJ 2009 ,339: b2921
Commission de transparence
• Avis du 10 octobre 2007:
- Les contraceptifs oraux de 3
èmegénération sont des traitements de
deuxième intention (avis d’expert) - les CO de 3
èmegénération n’apportent
pas d’amélioration du service médical
rendu (ASMR V)
Principe de précaution
• Utiliser les pilules de deuxième génération paraît légitime au début, à 30 ou à 20 mcg EE.
- Pas de différence significative entre 30 mcg EE / 150mcg LNG et 20 mcg EE /1OO mcg LNG:
OR:1,1; IC 0,4-3,1 [1]
- Si utilisation de 3G risque de TEV diminué de
18% si l’on compare GSD OU DSG à 30 et 20 mcg de EE [2]
1- Van Hylckama Vlieg. BMJ 2009 ,339: b2921 2- Lidegaard BMJ, 2009;339; b 2890
Chez Mademoiselle acnéique Quelle pilule?
Toutes peuvent avoir une certaine
efficacité par l'action anti gonadotrope
Le choix peut être guidé par - les propriétés anti-androgéniques du P
. l'acétate de cyprotérone (CPA)
Diane® et nombreux génériques . la drospirénone: Yaz ®, Jasminelle ®
. l'acétate de chlormadinone: Belara ® . dienogest: Qlaira ®
- une AMM reconnue: Tricilest®,Triafemi®
Acné et contraception
2 traitements intéressants:
-
Pilule
et isotrétinoine associée à une
dans les acnés sévères,
-
la pilule
dans les acnés modérées. S’il existe une acné toute pilule peut
être efficace (rappel) . Utiliser une CO anti-androgénique
si apparition d’acné sous pilule 2G ou persistance de l’acné malgré pilule 2G
L’association à une hyper androgénie
peut justifier le recours à des doses plus fortes d’acétate de cyprotérone
Melle B…19 ans vient pour une première demande de pilule; elle présente de l'acnéet une pilositéqu'elle trouve exagérée àla lèvre supérieure, sur les seins et la face interne des cuisses Le bilan hormonal est normal: lequel? Testostérone 17 OHP
Mme B… présente de l'acné et une pilosité exagérée à la lèvre supérieure, sur les seins et la face interne des
cuisses. Le bilan hormonal est normal :
Elle souhaite une primo contraception
Une pilule à l’acétate de cyprotérone serait
suffisante pour l’acné, pas pour la pilosité.
2 schémas:
-Pilule x* 1 bte de 3 plaquettes renouvelable 6 mois et Androcur* 1 cp (50mg) les 10 premiers jours de pilule, renouvelable…
-Androcur* 1 cp 20j / mois et oestrodose*
2 pressions / jours, 20 j / mois, renouvelable…
Finalement, pour le risque TEV…
« Deux théories s'opposent toujours
- les 2G sont meilleures car le progestatif androgénique s'oppose à l'effet de
l'estrogène sur le foie
- rien n'est prouvé disent les 3G car toutes ces études sont biaisées par le fait que
les femmes sous 3G sont plus souvent des nouvelles utilisatrices donc plus à risque »
Christian Jamin
Conclusions
• Faibles différences, sources de discussion mais pas de conclusion
• Pas d’argument irréfutable (NP1) pour différencier l’impact des progestatifs
• La dose d’estrogène parait finalement
importante: argument pour les 20 ou 15 mcg
• Mentionner sur votre observation la raison de votre choix contraceptif (penser au
médico-légal)
Avec le salut de la Champagne
christian.quereux@gmail.com