CROISEMENTS ENTRE LES RACES OVINES PRÉALPES DU SUD ET FRISONNE
(OSTFRIESISCHES MILCHSCHAF).
II. — REPRODUCTION,
VIABILITÉ,
CROISSANCE, CONFORMATION.G. RICORDEAU J.-C. FLAMANT
P. PETREQUIN B. MIRMAN M. CARPENTIER
Station de
Génétique quantitative
etappliquée,
Centre nalional de Recherches
zootechniques,
78 -Jouy-en-Josas
Institut national de la Recherche
agronomiyue
SOMMAIRE
Les différents types d’animaux croisés obtenus à
partir
des races Préalpes du Sud et Frisonneont été étudiés du
point
de vue des caractères dereproduction,
viabilité desjeunes
de la naissance à i an,poids
à la naissance, croissance etdéveloppement
desagnelles, qualité
bouchère des carcassesd’agneaux
mâles.Par rapport aux animaux de race pure Préalpes, les brebis croisées Frisonnes tendent à avoir un
début de saison sexuelle plus tardif, leur durée de gestation est plus courte de i
jour
en moyenne et leur taux deprolificité
estsupérieur
de 10 ou 26 p. 100 suivantl’âge
à lapremière
mise bas (1 ou2 ans). Au-delà de 5/8 de sang Frison, les animaux croisés manifestent une très grande sensibilité
aux affections
pulmonaires.
Par suite du format
plus
élevé de la race Frisonne, lesproduits
de croisement sontplus
lourdsà la naissance et ont une meilleure croissance. De même, les carcasses des mâles Fiont une moins
bonne conformation que celle des Préalpes et leur « maturité
physiologique
» est insuffisante à l’abat- tage.INTRODUCTION
L’amélioration
de laproduction
laitière des brebispeut
se concevoir de deuxfaçons,
d’ailleurs non exclusives : sélection en race pure ou croisement avec des racesplus productives.
La sélection en race pure étant réalisée en France sur une vaste échelle dans le cadre du contrôlelaitier,
il nous a paru utiled’entreprendre
un essaipréliminaire
pour déterminer lespossibilités
d’améliorationgénétique
de la racePréalpes
du Sud(très
voisine dans letype
et dans sesperformances
de la race Lacaunesoumise à la traite dans la
région
deRoquefort)
par croisement avec la race laitière de la Frise orientale(Ostf y iesisches 11¡1 ilchschaf)
reconnue excellenteproductrice
delait,
facile à traire et féconde dans sa zoned’origine,
maisréputée d’adaptation
difh-cile
(FLAMANT
et RICORDEAU,ig6g).
Cet essai a été
entrepris
au domaineexpérimental
deBrouessy,
de 1959 à19 66,
sur un effectif limité. Il a
permis
d’effectuer descomparaisons
entre lesperformances zootechniques
des animaux croisés et de leurs témoinsPréalpes
de race pure. Cescomparaisons portent
ici sur les caractères dereproduction
et de viabilité desfemelles,
sur le
poids
à la naissance de tous lesproduits nés,
sur la croissance et la conformation des femelles conservées pourl’élevage,
sur laqualité
des carcasses de mâlesPréalpes
et
F, (première
annéeseulement).
Les données concernant lesperformances
laitièresseront traitées ultérieurement.
MATERIEL
ETMÉTHODES
i. Matériel animal Les différents types d’animaux suivants ont été
produits :
Chaque génération
de brebis croisées a étécomparée
à un lotcontemporain
dePréalpes
de racepure. Le lot témoin de brebis Frisonne que nous avions créé au
départ
a été décimé par la pasteu- rellose et n’a pu être reconstitué par la suite ; avec les animauxqui
ont survécu et leursproduits,
nous
disposons
d’un lot trop réduit pour êtrereprésentatif,
mais dont lesperformances
peuvent servir derepère.
2
. Conditions
d’élevage
Les animaux croisés et leurs témoins
Préalpes
ont reçu une alimentationcomparable pendant
les deux
premières
lactations. Ils ont été saillis à 18 mois(i re
année del’essai) puis régulièrement
à7mois par la suite. Sauf
exception, la
traite a étépratiquée
i à 3jours après
la mise bas et les agneaux femelles ont été alimentés au « baragneau »( 1 ),
avec du lait de brebis (15premiers jours) puis
avecdu lait reconstitué
(pendant
z5jours),
le sevrage intervenant en moyenne à 40jours d’âge.
3
.
Reproduction
On a
utilisé 5 béliers
Frisons, i5Préalpes
et 7Fien saillie ou en insémination ; dans les deux cas, les interventions ont étérépétées lorsque
les chaleurspersistaient plus
de 24heures.Les
paramètres
de féconditécorrespondent
aux définitions suivantes(DES;IGNES
et DARPOT;X.19 64)
:
1- taux de fertilité : brebis
pleines
pour 100brebis saillies ;- taux de
prolificité :
agneaux nés pour 100mères ayant mis bas.4. Viabilité
Depuis
le début de l’essai, nous avonsenregistré
toutes les éliminations desagnelles,
de la nais-sance à i an, en les classant
schématiquement
de lafaçon
suivante :-
pasteurellose ;
-
pneumonie
sanspasteurellose :
(1
) Récipient spécial avec 12tétines pour le biberonnage en série (cf. C. N. E. R. X. rl., 1963)-
- déformation des membres, arthrites ;
- agneaux faibles à la naissance et
s’adaptant
mal aubiberonnage ;
-
agnelles
depetit
format à 7 mois, non saillies enpremière
année.Une telle
statistique
ne peutcependant prétendre
à unegrande précision
compte tenu de la difficulté dediagnostiquer
les causes de réformesqui,
par ailleurs, ne sont pasindépendantes
entreelles : une
agnelle guérie
de lapasteurellose
a, parexemple, beaucoup
de chance de se retrouveréliminée ultérieurement pour malformation ou insuffisance de
poids.
5
. Les pesées
Elles ont été effectuées tous les 20
jours
de la naissance à la saillie,puis ensuite 3 fois
par an :après
la mise bas, à 2mois de lactation et à lapériode
des saillies. On a calculé ensuite lespoids
àâge
fixe
( 1 ,
3, 5, 7, i2, i9, 26 et 36 mois) et 2gains
moyensjournaliers
(i à 7et 7 à iz mois). Nous consi- dérerons lespoids à
et 12 mois commereprésentant respectivement
lepoids
à lapremière
saillieet le
poids
à la mise bas.6. Les mensurations externes
Elles ont été effectuées i fois par an, i mois
après
les saillies environ(8,
20, ,,z, 44, 56 et 68mois).
On a retenu 5 mesures faciles à prendre à la toise et bien
répétables :
les hauteurs au garrot et au niveau des reins, laprofondeur
depoitrine,
lalargeur
du bassin au niveau des hanches et lalongueur
du corps
prise
de lapointe
del’épaule
à lapointe
des fesses.7
. Le
jugement
des carcassesIl a été effectué
uniquement
lapremière
année sur des mâles FIet desPréalpes :
3g agneaux F,(dont
55 p. 100dejumeaux)
et 27 agneaux Préalpes(dont
52p. 100dejumeaux).
Les mesures
prises
sur les carcasses (poids etlongueur
du canon,longueur
etlargeur
dugigot, longueur
queue-cou,poids
du gras derognon)
sont cellesindiquées
par BOCCARD, DuMONT et PEYRON(I964)!
RÉSULTATS
I. - CARACTÈRES DE REPRODUCTION
1
. Lutte -
Déealage
de la saisou sexuelleA
Brouessy,
la lutte dutroupeau
des brebis laitières commencerégulièrement
au début du mois d’août. Les 2
premières
années del’expérience,
les béliers Frisons adultes ont manifesté peu d’ardeur à couvrir les brebisPréalpes,
aussi avons-nousdû
pratiquer
l’insémination artificielle avec du sperme frais non dilué. Le taux de réussite a d’ailleurs été presque aussi bonqu’en
saillie naturelle(!3,.!
et9 6, 2
p.Iooaprès
i et 2cycles
sur 72 brebis inséminées contre8 2 ,5
et 95,2 p. 100 sur 103 brebiscontemporaines
sailliesnormalement).
Cette « maladresse » des béliersF y isons, déjà signalée
par MARRE en 1010 lors dupremier
essaid’accouplement
avec des brebisLacaune, peut s’expliquer
par un retard de lapériode
d’activité sexuelle desFrisons,
mais elle traduitplus
vraisemblablement un caractère de racepuisque,
même enseptembre
etnovembre,
l’ardeur sexuelle des béliers Frisons est restéeplus
faibleque celle observée avec les béliers
Préalpes
du Sud.Chez les
agnelles F I
les chaleurs sont apparues aussirapidement
que chez lesPréalpes.
Avec les5/ 8
et les3/4
F onenregistre
un retardde 7 à jours (fig. I ).
Pourle
petit
lotd’agnelles 7/ 8 F,
ledécalage
est encoreplus
net : 9,1 p. 100fécondées aucours des 4
premières
semaines delutte,
le reste au cours des 8 semaines suivantes.Ces résultats
correspondent
aux observationsantérieures,
notamment celles de GooT(
19
66)
en Israël et,plus généralement,
sont en accord avec les données d’HAFEZ( 1952
)
concernant les croisements entre races à saison sexuelle de durées différentes.Les brebis
F i
manifestent leur début d’activité sexuelle enjuillet-août,
à uneépoque
intermédiaire entre celle des
Préalpes (avril-mai : 1 ’I AUL É ON , 19 6 4 )
et celle des Fvi-sovcraes pures
(septembre-octobre),
cequi
ne les retarde pas nettement parrapport
aux
Pvéal!es puisque
le contrôle des chaleurs n’ajamais
commencé avant le débutdu mois d’août. Par contre, un accroissement du
pourcentage
de sang Frison décale le début de la saison sexuelle vers l’automne et il en résulte des retards sensibles parrapport
auxPréalpes
pures.2 . Fécondité
Le nombre
d’agneaux
obtenus pour 100 brebis à la luttedépend
du taux defertilité et du taux de
prolificité (tabl. i).
Taux de
fertilité.
Dans le cas de brebis mises à la lutte à 19
mois,
laproportion
depleines
variede 92 à 97p. 100avec les
Préalpes
et lesF i .
Cetteproportion
est moins élevée pour les brebis saillies à 7mois,
mais elle ne tombe pas en dessous de 88 p. Too avec les troiscatégories : Pvéalpes, F,
et3/4
F.Si les
agnelles
sont bien alimentées et si l’on évite de faire saillir les animaux ayant eu une faible croissance(i
à 8 p. 100 desagnelles
néesvivantes),
les sailliesprécoces
semblentparfaitement
réalisables enpratique,
sansqu’il
soit nécessaire de faireappel
à des traitements hormonaux.Pvoli fccité.
En
19 6 0
et19 6 1 ,
le taux deprolificité
estidentique
pour les femellesPréalpes
saillies par des mâles
Pvéalpes
ou des mâles Fvisoyas de race pure( 142
et 141 p.100 ).
Dans ce cas, la race du
père
il’a eu aucune influence sur laprolificité
des mères.A
l’âge
adulte( 4
ans etplus)
le taux deprolificité
des brebisPréalpes
est de157p. 100, alors que celui des Frisonnes atteint 200p. 100, chiffre voisin de celui cité dans la
bibliographie (FLAMANT
etR I C ORD EAU, 19 6 9 ).
Les brebis croisées ont une
prolificité supérieure
à celle des témoinsPréalpes,
surtout les
F, ayant
mis bas lapremière
fois à 2 ans. Dans le cas desagnelles
de i an,la différence moyenne, en valeur
relative,
est de6, 4
p. 100pour lesF i ,
de8, 7
p. 100pour les
5/ 8
F et de 10,3 p. 100 pour les3/4
F. Les 22agnelles F 2
ont un taux deprolificité
élevé(r 3 i,8
p. 100 à ian)
mais ce résultat a étéenregistré
sur une seuleannée
( 19 66)
et sans témoinPréalpes.
Al’âge adulte,
le taux deprolificité
desF I
est voisin de 200 p. 100 et celui des
3/4
F doit être au moins aussi bon si l’on tientcompte
des résultats des 2premières
mises bas. Dansl’ensemble,
laprolificité
aug- mente avec lepourcentage
de sangFrison,
mais la différence est très faible entre lesF,
et les3/4 F ;
ces résultats sontpratiquement comparables
à ceux de GooT(ig66).
La saillie
précoce (à
7mois)
réduit le taux deprolificité
à lapremière
mise basmais semble
également
avoir une influence défavorable lors de la mise bas suivante.Cela est assez net pour les brebis
F I’
mais peu sensible pour lesPréalpes
dont la fécon- dité estplus
faible.3. - Durée de
gestation
La durée de
gestation
est en moyenne de14 6, 7 jours
pour lesPréalpes
contre144
,8 jours
pour les 19 Frisonnes de race pure(tabl. 2 ).
Les animaux croisés ont unedurée de
gestation plus
courte que celle desPréalpes.
En cequi
concerne lesP l ou 3/4 F,
la réduction est de 1,1jour (presque toujours significative).
Pour éliminer les variationsdues
à l’année et àl’âge
desanimaux,
nous avons calculé la différencepondérée (d i ) des moyennes annuelles entre chaque catégorie
de croisées et les
Préalpes
témoins de mêmeâge :
le résultat estidentique (tabl.
2b).
GooT( 19 66), DrMaKO
P
OUr,os
et al.( 19 6 7 )
observentégalement
des durées degestation plus
courtes(
2
à 5jours)
pour les brebis Frisonnes et croisées que pour les brebis Awassi et Chios.On notera
qu’en 19 6 0 ,
la durée moyenne degestation
des brebisPréalpes
sailliespar les béliers Frisons est
comparable
à celle de leurscontemporaines
saillies par des béliersPréalpes,
lepoids
de naissance des agneauxayant
étécependant
très diffé-rent dans les deux cas.
II. -
VIABII,ITÉ
La
statistique
des réformes estprésentée
dans le tableau 3. En19 6 0
et19 6 1 ,
lamortalité est peu
importante
aussi bien chez lesPréalpes
que chez lesF,.
En19 6 2 ,
la
pasteurellose apparaît
sur lesagnelles 3/4
Frison( 3 6
p. 100 deperte)
et toucheégalement
31 p. 100desagnelles Préalpes.
La situation est la même enI g6 3 ,
lespertes
dues à lapasteurellose atteignant
40p. 100 sur unpetit
lotd’agnelles 7/ 8
F. En19 6 4 ,
l’utilisation d’un autovaccin
supprime
directement lespertes
dues à lapasteurellose,
toutefois certaines
agnelles 7/ 8
Frisonprésentent
dessymptômes caractéristiques
de cette maladie
(les autopsies
etanalyses
révèlent unecongestion
du foie et despoumons mais ne
permettent
pas d’isoler dePasteurella).
En
19 65,
on vaccine à nouveau, mais seulement 7o p. 100des mères et des pro- duits pourapprécier
l’efficacité de la vaccination. Si onn’enregistre
pas depasteu-
rellosecaractérisée,
de nombreusesagnelles
sont éliminées pourpneumonie
ou touxpersistante (l’autopsie
dequelques
animaux malades mais non vaccinés nepermet
de déceler aucuneinfection).
Ces réformes sont de 3 p. 100pour lesF l ,
de 14 p. 100 pour lesF 2
et de 33p. 100pour les3!4
F.En cumulant toutes les
éliminations,
on a une idée assez nette de la sensibilitédes différentes
catégories
d’animaux. LesPréalpes apparemment
trèsrustiques
sonten fait très sensibles à la
pasteurellose,
celle-ci étantcependant
apparue initialementsur les croisées. Les
agnelles F I
ont donné d’excellents résultats( 10
et m p. 100 depertes
enig6o, 19 6 1
et19 65)
ainsi que lesagnelles possédant 6 3
p. 100 de sang Friso!a. Enrevanche,
lesagnelles possédant
75 ouplus
de 75 p. 100de sang Frison ont été réformées engrand nombre,
soit par suite depasteurellose,
soit par suite d’un mauvais étatgénéral.
En19 6 5
le taux de réforme a été nettementplus
faible pour lesagnelles F I
que pour lesagnelles F 2 possédant
le mêmepourcentage
de sang Frison(m
p. 100contre 28 p.100 )
cequi correspond
vraisemblablement à laségrégation
desgénotypes
Frison dans la deuxièmegénération.
Dans l’ensemble les
pertes paraissent élevées,
mais il faut tenircompte
des consi- dérations suivantes :- les éliminations sont
comptées (sauf
en19 6 5 )
de la naissance à lapremière
mise
bas ;
- toutes les
agnelles
nées viables(quel
que soit leurpoids
denaissance)
ont étéséparées
de leur mèrequelques jours après
leur naissance et sont restées en stabula- tionpermanente jusqu’à
lasaillie ;
- le
biberonnage
de tous les agneaux dans un seullocal,
et dans un espacelimité,
a favorisélargement
lapropagation
del’ecthyma
ou dumuguet
etpermis
ainsi le
développement
de lapasteurellose ;
-
beaucoup d’agnelles
sont issues de mères ayant mis bas à i an ;- la saillie à 7 mois a entraîné l’élimination
d’agnelles
insuffisamment déve-loppées qui
auraient pu, enpartie,
êtrerécupérées
pour unepremière
mise bas à2 ans ;
- ces réformes ont été observées dans un seul
troupeau
et dans des conditionsd’élevage
enbergerie
peu favorables aux animaux detype
Frison.III. - CROISSANCE
1
. Poids à la naissance.
Différences
moyennesLes résultats sont inscrits dans le
tableau 4
pour lesPréalpes
témoins et 5 caté-gories d’agneaux
croisés(F,, F,, 5/ 8, 3/4
et7/ 8
de sangFriso;i).
Poursimplifier
l’in-terprétation
des données(rendue
difficile par suite de lamultiplicité
des facteurs de variation et de ladissymétrie
dans la distribution despoids
à lanaissance)
nous avonsseulement tenu
compte
dutype
de naissance des agneaux(simples
oujumeaux)
etde
l’âge
des mères. Nous avons cumulé les données des mâles et des femelles etnégligé
les différences
d’âge
aupremier agnelage :
eneffet,
l’écart entre lespoids
de naissance des agneaux nés de brebisprécoces ( 2 e agnelage
à 2ans)
ou de brebis tardives(i e
r agnelage
à 2ans)
n’est passignificatif,
sauf dans un cas(tabl. 4 ).
Par
rapport
auxPréalpes,
les agneaux croisés de toutescatégories
sontplus
lourds en moyenne de
22 ,8
p. 100 s’ils’agit d’agneaux
néssimples
et de1 6, 4
p. 100 s’ils’agit
dejumeaux.
Pour éliminer l’influence de
l’âge
de la mère et del’année,
nous avons réalisé deig6o
à19 6 2
un schémad’accouplements réciproques
avec des brebisPréalpes
sailliesalternativement d’une année à l’autre par un bélier
Préalpes
et un bélier Frison. Les résultats obtenus(tabl. 5 )
montrent la différenceimportante
entre agneauxsimples
et
jumeaux (-!- 7 8 p.
100 dans le cas dePréalpes ;
+65
p. 100 pour les croisésF i )
et confirment la
supériorité
des agneauxF I
pour lepoids
denaissance,
c’est-à-dire +26
p. 100dans le cas de naissancesimple
et + 17 p. 100dans le cas de naissance double(i,o
et i,2kg respectivement).
Cepoids plus
élevés’accompagne
rarement dedifficultés à la mise bas. Grâce à des
pesées
effectuées avant etaprès l’agnelage
enig6i-i
9
62,
nous avons d’ailleurs vérifié quel’importance
relative de l’ensemble(placenta,
annexesembryonnaires
eteaux)
diminue avecl’augmentation
dupoids
de la
portée, puisqu’elle
passe de 40à 28 p. 100pour desportées
de 3-5 àplus
de 7kg.
2
. Croissance
pondérale
Nous avons résumé dans le tableau 6 les
principaux
résultats concernant la croissance desagnelles : poids, écart-type,
coefficient de variation. Afin d’illustrer les différences(fig. 2 ),
nous retiendrons lepoids
à 3 mois pourlequel
onpossède
lemaximum d’observations et les
poids
à 7 et 12 mois. La vitesse de croissance varieavec le
pourcentage
de sang Frison.- elle est maximum avec lesF,
et surtout les5/ 8 F, puis
diminueau-delà,
c’est-à-dire avec les3/,!
et7/ 8
Frison. Chez lesF,,
lepoids
moyen est assez bonjusqu’à
3mois,
mais lesagnelles qui
survivent ont undéveloppement
très voisin de celui des
Préalpes
de race pure ; cecipeut
faire supposer l’existence d’uneségrégation,
les animauxpossédant
legénotype
Frison de formatplus
élevé ayant vraisemblablement été éliminés pour des raisons sanitaires.En ce
qui
concerne les coefficients devariation,
si l’on retient celui observé à 3 mois(tabl. 6),
on constatequ’il
est maximum chez lesF 2 (cv = 1 8,6
p.100 ),
mini-mum chez les
F, ( 13 , 3
et15 ,8
p.100 )
et intermédiaire chez lesPréalpes ( 1 6, 2
et1
6,
9
p.100 )
et les3/4
Frisons( 1 6,8
p.100 ).
Au-delà de cetâge,
les observations sonttrop
peu nombreuses chez lesF 2
pour effectuer descomparaisons
valables.Le
poids
moyenenregistré
à la saillie(ou
à la misebas)
parrapport
aupoids
adulte atteint à 3 ans, est relativement
plus
faible pour lesPréalfies (5 9
et56
p.100 )
et les
3/4
F( 5 8
p.100 )
que pour les croiséesF I (6 2
p.ioo).
Ces valeurs déduites du tableau 6 traduisent la meilleureprécocité
dedéveloppement corporel
desF,
et lesincidences sanitaires dans
l’élevage
des3/4
Frisons.Le
poids
à i an est étroitement lié aupoids à mois (r
= o,gi, tabl.7 ),
mais ildépend
encore defaçon significative
dupoids
de naissance(r
=0,5!).
La vitesse de croissance réalisée entre la saillie et la mise bas estindépendante
de la vitesse de croissance initiale( 1 - 7 mois)
et influence assez peu lepoids
à I an ; il semble doncnécessaire,
pour obtenir unpoids
satisfaisant à lapremière
mise bas d’intensifier l’alimentation desagnelles
bien avant la saillie surtout pour lesjumelles
dont lepoids
de naissance est inférieur à celui des
simples.
IV. - MENSURATIONS SUR 1/ANIMAL VIVANT ET
QUALITÉ
DES CARCASSESLe tableau 8
rapporte
les mensurations réalisées sur les femellesappartenant
aux différentes races ou croisements
indépendamment
del’âge
à lapremière
mise bas.La
profondeur
depoitrine
et lalongueur
du corps,qui
caractérisent le formatgénéral,
sont
plus
élevées à 8 mois pour les animaux5/ 8
Fqui
ont eu par ailleurs la croissance lameilleure ;
l’écart est trèssignificatif
avec lesPréalpes, F i , F 2
et7/ 8
F mais peusignificatif
avec les3/ q
F(fig.
2a). Cependant,
le classementétabli
selon ces mensura-tions n’est pas tout à fait le même que celui établi
d’après
lespoids :
ainsi à 7mois,
les
F,
ont unpoids supérieur
à celui des3/4 F,
mais à 8 mois on observe le classement inverse pour les mensurations(fig.
2b).
Les différences de format
enregistrées
sur les femellesd’élevage
se retrouventdans une certaine mesure sur les carcasses
d’agneaux
mâles(tabl. 9 )
pour lespoids
etles mesures liées fortement au
poids (largeur
dugigot
etlongueur
queue-cou : Boc- cARD
, DUMONT et
PE YR O N , 19 6 4 ) :
les carcassesd’agneaux
croisésF i
sont en effetplus
lourdes que celles desPréalpes.
En ce
qui
concerne lalargeur
du bassin(tabl. 8, fig. 2 ),
seules lesF, présentent
une différence
significative
avec les autrescatégories qui
sont touteségales
entre elles.La
longueur
du corpsaugmentant
avec lepourcentage
de sangFrison,
il en résulteque les femelles de
type
Frisonparaissent
relativementplus
étroites que les femelles detype Préalpes.
A 8mois,
lerapport largeur
dubassin/hauteur
dugarrot,
indice deconformation,
estplus
élevé pour lesPréalpes
etF, ( 0 , 29 )
que pour les5/ 8
F et3/4
F( 0 ,26)
et les7/8
F(o,2q).
Cette moins bonne conformation se retrouve sur lescarcasses des
mâles,
lesgigots F,
étantplus longs
que lesgigots Préalpes ( 2 8, 3
contre2
6, 4 cm).
Quoique provenant d’agneaux
abattus au mêmeâge,
les carcassesF,, plus lourdes, présentent
une moindreprécocité
dedéveloppement
tissulaire que les car- cassesP y éalpes.
Lepoids
de gras de rognon,identique
pour les 2 lots( 145
g enmoyenne)
révèle uneproportion plus
faible de tissusadipeux
chez lescroisés,
tandisque le
poids
de l’os canon(indice
dedéveloppement
dusquelette)
estproportionnelle-
ment
plus
lourd chez lesF’1
que chez lesPréalpes.
Pour obtenir une même maturitéde carcasse, les agneaux croisés doivent donc être abattus à un stade
plus
avancé(
40 -
45 kg)
alors que lesPréalpes
sont normalement commercialisés vers 30-35kg.
DISCUSSION ET CONCLUSIONS
Dans
l’ensemble,
les résultats obtenus ici concordent bien avec les conclusions de notre étudebibliographique (Fr,a M nvT
etRrco!D!AU, ig6g),
toutparticulière-
ment pour la vitesse de croissance des agneaux et les caractères de
reproduction ;
ilsapportent
des informationscomplémentaires
sur la valorisation bouchère des pro- duits de croisement et la viabilité des animaux en relation avec lepourcentage
desang
Frison,
ce dernieraspect
étant certainement un desplus importants
que nous devons discuter.i. Par suite du format élevé de la race
Frisonne,
les agneaux croisés ont unpoids
de naissance
plus
élevé et une bien meilleure vitesse de croissance que lesPréalpes
du Sud. Cette observation a été faite avec la
plupart
des croisements depremière génération
effectués dans les pays méditerranéens oud’Europe
centrale(FLAMANT
et
RrcoRD!!u, ig6g). Indépendamment
d’un taux deprolificité élevé,
la race Fri-sonne, race de
grand format, permet
donc deproduire
unequantité
de vianded’agneau plus importante. Mais,
conformément au faitgénéral (FLAMANT,
CaTTrN-ViDat, etP OLY
, zg6 7 ),
cette meilleure vitesse de croissance estliée génétiquement
à une moindreprécocité
dedéveloppement
tissulaire des carcasses. En outre, les croisés Frisons sontproportionnellement plus
étroits et ont desgigots plus longs.
Laqualité
des car-casses
produites
estdonc,
en moyenne,plus
mauvaise.2
. L’observation de la date des venues en chaleurs des animaux de race pure et croisés
apporte
une preuvesupplémentaire
du déterminisme héréditaire de ce carac-tère,
encore que nousn’ayons
pas eu le soucid’analyser systématiquement
ce pro-blème. Le raccourcissement de la
période
d’activité sexuelle à la suite d’unapport
de sang Frison est un faitimportant
àsouligner.
Laquasi-totalité
des races ovines(autres
que laFrisonne) exploitées
à la traite est en effetoriginaire
des pays médi- terranéens ou de latitudes semblables etprésente généralement
un anoestrus deprin- temps
peumarqué.
Cetteaptitude permet
une lutteprécoce
dès le mois de mai et donc une lactation d’hiver et deprintemps
avant les fortes chaleurs et les sécheresses del’été ;
il estégalement possible
de réaliser 3 lactations en 2ans comme enEspagne
avec la race Chzivva. Une amélioration
génétique
par croisement Frisonrisque
decompromettre
la réalisation de cespratiques d’élevage
fort intéressantes et de limiter l’intérêt et le rendement des brebis croiséesmalgré
unpotentiel
laitierplus
élevé que celui des brebis locales. Enrevanche,
la race Frisonneapporte
uneaptitude
très recher-chée dans
l’élevage
ovin moderne : laprolificité.
Parrapport
auxPréalpes,
le nombred’agneaux supplémentaires
obtenu pour 100mères adultes croiséesF,
est de l’ordrede 30. Cette
aptitude
adéjà
été reconnuepuisque
desreproducteurs
Frisons sontintervenus au cours de la création de la race Colbred
conjointement
aux Bovdev Lei- cestev et aux Chmi Forest(BARBER
et YOUNG,rg65).
3
. En ce
qui
concerne la rusticité des animauxcroisés,
nos résultats confirment les essais effectués àl’étranger, plus particulièrement
en Israël(GooT, 19 6 2 ; GooT,
s 9
66 ;
EYALetGooT, i 9 68).
Enrègle générale
les animauxF I
et même5/ 8
de sang Frison neprésentent
pas deproblèmes majeurs d’élevage.
Les taux de réforme et de mortalitéimportants apparaissent
chez lesagnelles
et les adultespossédant plus
de63
p. 100 de sang Frison. Dans notre cas, il est difficiled’invoquer
la sensibilité à la chaleur ou aux variations detempératures qui
caractérise la raceFrisonne, puisque
les animaux sont restés la
plupart
dutemps
à l’abri enbergerie
et que les accidents sont intervenus souvent bien avant les chaleurs d’été. Parailleurs,
les conditionsclimatiques
de la ferme deBrouessy (région
deVersailles)
ne sont pas fondamenta- lement différentes de celles del’Allemagne, malgré
des variations detempératures plus importantes (tabl. 10 ).
Ils’agirait
doncplutôt
d’une sensibilitépulmonaire intrinsèque
à la raceanalogue
aux différences deréceptivité
auxparasites
intestinauxenregistrées
par EU2EBY et al.(ig6i)
sur 4 races ovines. Ces auteurs observent eneffet que les animaux de race Charmoise
paraissent capables
de limiter les surinfes-tations,
voire de se libérer desparasites,
alors que les animaux Texel et surtout Bleu du Maine ou Southdown sont moins résistants.Outre la nécessité de leur
ménager
des abris durant l’été et d’éviter de les élever dans desrégions
à maximum detempérature élevé,
les animaux detype Frison,
croisés ou de race pure, doivent donc être conduits avecbeaucoup
desoins,
enpetits
lots pour réduire les
risques
decontagion,
et enplein
air pour éviter les courants d’air desbergeries.
Nous retrouvons ici les observationsqu’effectuait
MARRE en 1909etqui
sont donc
toujours
valables. ’Ces
caractéristiques
degrande
sensibilité constituent une nouvelle limite auxpossibilités
d’amélioration des races méditerranéennes par lesreproducteurs
Frisonset
expliquent
les échecs rencontrés enélevage lorsque
le croisement a étépoussé
au-delà de la
F l ,
soit par un croisement en retour Frisonqui
conduit à des animauxplus sensibles,
soit par laproduction
d’une1!2 plus hétérogène
danslaquelle
les ani-maux de
type
Frison tendent à être moins résistants dans les conditions de milieu locales. Ces inconvénients viennents’ajouter
àl’allongement
de l’anoestrus saison- nier dont nous avonsdéjà parlé.
Reçu pour