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La colonisation de l’Irlande

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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Géographie et cultures 

62 | 2007

La nature dans les villes du Sud

La colonisation de l’Irlande

Paul Claval

Édition électronique

URL : http://journals.openedition.org/gc/2410 DOI : 10.4000/gc.2410

ISSN : 2267-6759 Éditeur

L’Harmattan Édition imprimée

Date de publication : 1 juillet 2007 Pagination : 139-141

ISBN : 978-2-296-05038-9 ISSN : 1165-0354 Référence électronique

Paul Claval, « La colonisation de l’Irlande », Géographie et cultures [En ligne], 62 | 2007, mis en ligne le 24 décembre 2012, consulté le 22 septembre 2020. URL : http://journals.openedition.org/gc/2410 ; DOI : https://doi.org/10.4000/gc.2410

Ce document a été généré automatiquement le 22 septembre 2020.

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La colonisation de l’Irlande

Paul Claval

1 Ce gros ouvrage1 passionnant résume toute une vie de recherche : William J. Smyth a fait progresser de manière décisive la connaissance des géographies passées de l’Irlande. Il s’est plus particulièrement intéressé aux débuts des Temps Modernes, période où l’Irlande est colonisée et conquise par l’Angleterre aidée, en Ulster, par des presbytériens écossais.

2 L’ouvrage est d’un bout à l’autre un exercice de géographie culturelle. Il faut d’abord apprendre à faire parler les documents (première partie), presque tous issus de la conquête. Ce que l’on sait de l’Irlande d’alors vient de la cartographie à laquelle procèdent les envahisseurs et qui efface l’essentiel de la toponymie et des signes de la présence irlandaise (chapitre 1), ou des archives des tribunaux mis en place par les vainqueurs et des rapports de l’administration qu’ils créent. William Smyth s’ingénie donc à reconstituer les visages ainsi cachés de l’Irlande en montrant comment se construit alors la mémoire irlandaise (chapitre 2).

3 La pénétration commence dans les années 1530, mais le choc essentiel se situe entre 1641, date de la grande révolte, et 1654, lorsque la reconquête dirigée par Cromwell s’achève (chapitre 3). La réorganisation du pays est menée par William Petty, qui est tout autant un géographe qu’un administrateur (chapitre 4). Le recensement de 1659 donne une image précise de la diversité du peuplement irlandais (chapitre 5).

4 La deuxième partie analyse les conséquences de la conquête à travers trois monographies, consacrées aux comtés de Dublin, de Kilkenny (au sud-ouest de l’île), de Tipperary (au nord-ouest) (chapitres 7 à 9). La troisième partie évalue les transformations de l’organisation territoriale de la société (chapitre 10) et les bouleversements de l’économie, de la langue et des noms de famille (chapitre 11). En analysant les liens qui existent alors entre l’Irlande et le Nouveau Monde, William Smyth replace l’Irlande dans un contexte global (quatrième partie, qui ne comprend que le chapitre 12).

5 L’illustration est remarquable. L’appareil critique (notes et références, bibliographie, index), qui fait de l’ouvrage un merveilleux outil de travail, occupe plus de 110 pages.

La colonisation de l’Irlande

Géographie et cultures, 62 | 2007

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6 Ce travail est si riche qu’on risquerait de ne pas en mesurer tous les apports s’il ne se terminait par une longue conclusion (18 pages) qui énumère tous les thèmes abordés et montre comment ils se croisent. L’Irlande de 1530 est un pays gaélique, qui a été balayé au XIIe siècle par une vague de peuplement anglo-normand, dont la spécificité n’est pas oubliée, mais dont les membres ont fini de se sentir irlandais. Tout change avec les Tudor : Henry VIII lance la conquête. L’Irlande devient le laboratoire où les Anglais, secondés par les Écossais, mettent au point leurs méthodes d’expansion impérialiste. Ils s’appuient sur les techniques modernes de la cartographie pour mener leurs campagnes militaires, créent des tribunaux qui rendent la justice en leur faveur, expulsent les propriétaires irlandais et prélèvent des taxes. L’Irlande n’est pas un État : les réactions de ses élites sont mal coordonnées ; ce qui cimente très vite la résistance, c’est le refus d’adhérer à l’Église des vainqueurs : elle est anglicane presque partout, presbytérienne en Ulster. Le catholicisme devient le pivot de l’identité gaëlique. La conquête cromwellienne efface les élites locales et contraint une bonne partie des populations des régions riches à se réfugier dans les terres ingrates de l’Ouest et du Nord, où elle subsistera grâce à la culture de la pomme de terre sur de micro- exploitations.

7 Mais l’histoire est plus complexe qu’il n’apparaît. Que la résistance irlandaise soit efficace, rien ne le montre mieux que la persistance des quelques 60 000 unités fondamentales de peuplement, les townwlands, à travers tous les remaniements fonciers ; c’est la capacité de l’Église catholique, dont les églises ont été confisquées par l’Église anglicane (qui, faute de fidèles, se révèle incapable de les entretenir – d’où la présence de ruines d’édifices religieux dans toute l’île) à se doter d’une nouvelle base paroissiale, plus adaptée aux besoins de la société que celle qui datait du Moyen Âge.

8 La conquête de l’Irlande est, au mieux, une demi-conquête. Les deux sociétés qui cohabitent désormais dans l’île s’influencent. Une partie de la population irlandaise s’anglicise ; les catégories juridiques ou territoriales importées d’Angleterre s’imposent à tous. La nouvelle aristocratie foncière venue d’Angleterre crée un paysage de grandes propriétés, de châteaux et de parcs au charme duquel les Irlandais de souche ne sont pas indifférents.

9 La conquête est motivée par des considérations stratégiques. Elle a pour but de créer une économie d’élevage complémentaire de celle de l’Angleterre : c’est pour faire place aux troupeaux que les populations locales sont chassées. La modernisation est brutale.

L’élite anglo-irlandaise en vient rapidement à souffrir de se voir préférer les Anglais de souche : comme toutes les élites créoles, elle se détache de la métropole et invente un nationalisme qui inspire celui des Irlandais de souche.

10 La formation de William J. Smyth est classique. La géographie historique qu’il pratique repose sur les bases solides qu’elles s’est données, dans le monde anglophone, depuis l’époque de Clifford Darby. Mais ce qu’il nous offre va bien au-delà des reconstitutions historiques habituelles. C’est une étude sur les identités, les cultures, leur rapport à la terre et aux paysages. C’est une réflexion sur l’impérialisme, ses modalités et ses effets.

William J. Smyth nous propose la plus belle étude de géographie postcoloniale que je connaisse.

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NOTES

1. William G. Smyth, 2006, Map-making, landscapes and memory. A geography of colonial and early modern Ireland c. 1530-1750, Cork, Cork University Press et Field Day, XXXIII-584 p.

AUTEUR

PAUL CLAVAL

Université Paris IV-Sorbonne

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Géographie et cultures, 62 | 2007

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