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L'halloysite bleue du mont Vuache (Savoie)
VERNET, Jean-Pierre
VERNET, Jean-Pierre. L'halloysite bleue du mont Vuache (Savoie). Comptes rendus
hebdomadaires des séances de l'Académie des sciences, 1962, vol. 254, p. 2377-2379
Available at:
http://archive-ouverte.unige.ch/unige:146017
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MINÉRALOGIE. L'halloysite bleue du mont Vuache (Savoie).
?Sote (*) de M. jEA\-PiERRE VERXET, présentée
par
M.Jean Wyart.
Le plateau suisse est limité à l'Ouest
par
une virgation duJura.
Celle-cia été séparée du reste de la chaîne
par
l'érosion du Rhône qui y a taillé ledéfilé du
Fort
de l'Écluse. Ce prolongement Sud duJura
porte le nom demont Vuache; son flanc
Est
est constituépar
les calcaires massifs de l'Urgo- nien. Ces bancs sont très redressés et contre euxs'appuient
en discordanceles grès et les argiles de la molasse
chattienne
duplateau
genevois.Entre
ces deux formations ildevrait
y avoir les sédiments du Sidérolithique, mais ceux-ci ont généralement été remaniéspar
les eaux de ruissellementavant
le dépôt de la molasse. Ils ne se
trouvent
plus que dans des dépressions,des fissures ou des karsts. L'halloysite bleue du Vuache
provient d'un
de ces karsts remplispar
les sables sidérolithiques. Cekarst
setrouve
sur le bord de la route qui conduit du village de Chevrier au défilé duFort
del'Écluse,
à mi-chemin, côté montagne.Le remplissage de ce
karst
e~L donc constituépar
un sable sidérolithique accompagnéd'une
fraction argileuse kaollnique peuimportante.
Il semblequ'à
l'origine le minéral argileuxétait
une kaolinite et que celle-ci a été altérée par la percolation des eaux en minéral des argiles réfractaires.La circulation des eaux a aussi blanchi le sable de
quartz
enentraînant l'essentiel
de la fraction argileuse et des oxydes de fer. Il s'est alors formé une série d'auréoles concentriques dont les plusimportantes
sont, enallant
du centre à la périphérie une auréolede bayéritc et
d'hématite,
une auréolede goethite, et, au
contact
du calcaire urgonien, une zone de gibbsite et d'halloysite. Lapartie
Inférieure de cette dernière est constituée essentiel- lementpar
une halloysite translucided'un
bleu ciel très clair et opalin.Cette coloration particulière
avait
frappé unétudiant
del'Université
de Genève, M.J.
Martin!, qui nous a signalé ce gisement en ig6o déjà.L'auréole de gibbsite et
d'halloysite
est quasi exempte de grains dequartz
et nous pensons que ces minéraux sontindubitablement
secondaires.L'intense
circulation des eaux dans cette masse poreusequ'est
le sable sidérolithique a entraîné les ionsprovenant
del'altération
des minéraux argileux mélangés aux sables. Ces solutions ont déposé leur fer et unepartie
de leur alumine en deux étapes, et le
reliquat
a traversé l'auréole de goethite qui a servi de filtre semi-perméable perméableaux
solutions ioniques et imperméable aux grains de quartz. Au voisinage de la paroide calcaire urgonien, la circulation des eaux est canalisée et de ce
fait
plus intense; il en résulte que le pH est plus acide et que les conditions
de cristallisation de l'halloysite sont
atteintes.
La néoformation de l'halloysite et de la gibbsite de ce gisement est donc clairement mise en évidence.
L'étude
au diffractomètre à rayons X nous donne tous les pics de l'hal- loysite et la comparaison de nos diffractogrammes avec les valeurs donnéespar
la fiche A. S. T. M. n° 9-451 est très bonne. Le pic dontl'Intensité
est la plus grande est celui de 10,1 À, pic caractéristique del'halloysite
H.~0. Aucun picn'apparaît vers
A, ce qui exclut la présence de métahalloysite. Ilfaut
préciser que cette poche est constamment humide et que les échantillons récoltés ont été maintenus soigneusement dans une atmosphère de 100d'humidité
relative.L'examen au microscope électronique a montré la présence de formes
en rosace à côté des tubes classiques de l'halloysite. Ces rosaces
peuvent
faire supposer la présence de silice amorphe ou d'allophane. L'analyse chimique a permisd'écarter
la premièreattribution.
Il a été
fait
trois analyses chimiques de cette halloysite bleue, soit deux au Laboratoire de Chimie minérale de l'École Supérieure de Chimie de Mulhouse, sous la directionde M. R. Wey, et unepar
Mme G. Krummenacher au Laboratoire de Minéralogie de l'Université de Genève.Muthouse I. MuthouseII. Genève. Moyenne.
ALO,
3t,~ 3o,() 32,3 3i,53±o,25SiO,
Na~O.
38 3y,5 0,0837,73y~3±o~5
o,o8K20 0,06 o,o6
1-1,0.
[6,6 16~ i6,65±o,o5H,0+.
16C) ;5,8i5,a±o,io
TOTAI. ;02 '00,0 10t,o5±0,65
!I:0', eau adsorbée et de cristallisation; H~0+, eau de constitution.
Dans les trois cas, l'échantillon en poudre a été séché à
l'air pendant
24 h.Rapport SiO~/Al~O~ Le
rapport
théorique pour tous les minéraux du groupe des kaolins est dei,i~83.
Pour l'halloysite bleue du Vuache, lerapport
moyen est de 1,196 et lesrapports
extrêmes des trois analyses sont de 1,161 et de 1,229. Il y a doncplutôt
un léger déficit de silice.Rapport HsO/SiOj Les
rapports
théoriques pour une kaolinite et une halloysite sont respectivement de o,3 et 0,6. Nous obtenons pour l'halloysite 0,86 et pour la métahalloysite 0,42. Ilapparaît
ainsi que cette halloysite contient plus d'eau que le minéral théorique 4 HsO, même après une mise en équilibrependant
24 h dansl'atmosphère
du laboratoire.Sa teneur en eau est de 5,~5 H.~0. Après séchage à
no°C,
soit après satransformation
en métahalloysite, lateneur
en eau mesuréecorrespond à un minéral dont la formule chimique est la suivante ALOa~SiOs.2,8
H~O.Par thermogravimétrie
sur des échantillons abandonnéspendant quatre
jours dans
l'atmosphère
du laboratoire, nous avons obtenu des valeurs encore supérieures, del'ordre
de 3,4 et 6,1 HaO. Il y a donc une persis- tanced'eau
adsorbée ou de cristallisation après chauffage àiio°C
qui est considérable.Lorsque cette halloysite bleue est déshydratée à
no°C,
son espacement basai est de A environ, II est probablequ'une partie
de l'eau de la couchede molécules d'I-LO orientées soit piégée
par l'enondrement partiel
duréseau, ce qui donne alors une teneur en eau de 2,2-2,3 H.jO selon Brindley (~). Il reste cependant encore.un excès d'eau de l'ordre de
o,5-iH,.0.
Cet excédent d'eau, le léger déficit de silice et l'observation au microscope électronique de grains arrondis à
structure
rosacée nous fontadmettre
laprésence, au côté
del'halloysite,d'allophane.
Dans lalittérature,
l'allophaneest généralement déterminée sur l'un ou
l'autre
des trois points sus- mentionnés. Sudo ('~) admet la coexistence de l'allophane avec les halloysites de basse cristallinité, alors que dans notre cas la cristallinité de l'halloysiteest élevée.
Une analyse
par Iluorescencc
X faitepar
M. A. Buchs au Laboratoirede Minéralogie de
l'Université
de Genève a permisd'attribuer
la colorationde l'halloysite du Vuache à une impureté de nickel. A côté de
cette
impu- reté, il y a des traces destrontium,
fer et cuivre.La coloration bleue de certaines halloysites
avait
déjà été signaléepar
Berthier lors de la première description de l'halloysite, sur un échantillonprovenant
d'Angleur, en Belgique. L'halloysite de Bedford (~o 12 A) dansl'Indiana
etd'autres
ont aussi une coloration bleue, mais, à notre connais- sance, son origineétait
inconnue. Relevons encore que cette halloysite bleue du Vuache devient irréversiblement blanchepar
séchage.(*) Séance du ;f) mars 1962.
(')
G. \V. BRINDLEY, Clays and Clay Technology, Bull. 169, California, Division of Mines, i<)55, p. 3y.~) T. SuDo et H. TAKAHAsm, Clays and Clay ~!nc7'a~, Publ. 456, Nat. Acad. Sc.- Xat:. Res. Coun., Washington, i;)56, p. 65-y<).
(Foncfs national Suisse pour la Recherche Scientifique, Laboratoirede A/i'nsra/o~'s, {7n!ue/'s!~e de Lausanne.)