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EFFETS PERVERS DES OPERATIONS DE DEGUERPISSEMENT AUTOUR DES PARCS NATIONAUX IVOIRIENS : CAS DU PARC NATIONAL DE LA MARAHOUE ET DU MONT PEKO, A L’OUEST DE LA COTE D’IVOIREpp. 57-77.

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Université Péléforo Gon Coulibaly de Korhogo sinanadaman@yahoo.fr

EFFETS PERVERS DES OPERATIONS DE DEGUERPISSEMENT AUTOUR DES PARCS NATIONAUX IVOIRIENS : CAS DU PARC NATIONAL DE LA MARAHOUE ET DU MONT PEKO, A L’OUEST DE LA COTE D’IVOIRE

Revue Africaine d’Anthropologie, Nyansa-Pô, n° 16 - 2014

RÉSUMÉ

La Côte d’ Ivoire a hérité de la colonisation un patrimoine forestier très dense. Pour mieux gérer ce patrimoine forestier, plusieurs politiques ont été élaborées. Mais depuis des décennies de gestion, les résultats escomptés n’ont toujours pas été à la hauteur des attentes. Et l’une des conséquences directes de cette gestion calamiteuse est l’infiltration « à ciel ouvert » et le gaspillage du couvert forestier protégé. Aujourd’hui, cette infiltration a atteint son apogée, et l’Etat ivoirien face à un dilemme : « sauver l’économie ivoirienne en sacrifiant la forêt ivoirienne et dans le même temps jouant le rôle du bon gardien » tente bien que mal de reprendre les choses en main. Et parfois, cette reprise des choses se solde par des actions de répression (déguerpissements de tout genre) ou des sensibilisations forcées aboutissant à des déplacements forcés. Ce qui ne va pas souvent sans provoquer de profondes perturbations (sociales, politiques, économiques et culturelles) au sein des acteurs sociaux concernés. IL s’agit dans cette étude d’analyser les effets pervers de ces opérations de déguerpissement sur les populations concernées et chercher à identifier des voies et des stratégies efficaces, viables à tout processus de déplacements forcés.

Mots-clés : Déguerpissement, Participation manipulée, Parc national, allogènes, autochtones.

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ABSTRACT

Côte d’Ivoire has inherited from colonization a dense forest heritage.

To better manage this forest heritage, several policies have been developed. But after decades of management, the forecast results have not already satisfied the expectations. And one of the immediate consequences of this mismanagement is the open infiltration and the waste of the protected forest area. Today, this infiltration has peaked and the Ivorian Government facing the dilemma of saving the Ivorian economy by scarifying the Ivorian forest and at the same time playing the role of guardian tries somehow to retake things in hand. And sometimes, this retaking of things results in repressive actions (eviction of any kind) or forced sensitizations leading to forced displacements. This often causes deep social, political, economical and cultural disruptions within the involved social actors. This study aims at analyzing the bad effects of eviction operations on the affected populations and trying to identify the ways and efficient strategies viable to any process of forced displacements.

Key words : Eviction, Manipulated participation, National reserve, Immigrants, Indigenous.

INTRODUCTION

Lorsqu’on se penche sur le déplacement forcé provoqué par le développement, qu’il soit spontané ou planifié, l’on constate que d’une part, il génère des effets positifs et que d’autre part, il provoque certaines ruptures sociales. De nombreux décideurs et planificateurs se refusent à admettre ce double impact (Banque Mondiale 1996). Il est cependant essentiel de le reconnaitre.

L’accepter, au lieu de le nier, c’est aborder sérieusement les inévitables perturbations sociales.

Le déplacement forcé des populations est une des profondes perturbations sociales qui surviennent au cours de certains programmes de développement économique. Il est toujours à l’origine d’une situation de crise. Les perturbations et les mutations qu’il déclenche, sont d’une ampleur inégalée dans le cadre du processus normal de développement durable. En fait, ce concept descriptif du

« déplacement forcé causé par le développement » (Walter 1991 ; Bare 1994 ; Thayer 1996 ; Dupriez 1980) couvre en réalité deux

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processus : d’une part la fracture de l’organisation socio-économique des communautés affectées par le déplacement forcé, et d’autre part, la reconstruction de leurs moyens d’existence.

La contribution principale de ce chapitre est de présenter un cadre d’analyse adéquat pour le déplacement forcé et réinstallation des populations sur de nouvelles terres en tant que processus et d’aborder une série d’aspects essentiels. Il convient de les envisager pour que les projets présents et à venir de déplacement forcé et de réinstallation, surtout ceux qui sont financés sur fonds publics ou mondiaux, puissent profiter à un grand nombre de populations à faibles revenus, sans pour autant dégrader l’environnement ou l’atmosphère.

I - METHODOLOGIE

I-1 Délimitation du champ d’étude I-1-1 Le champ empirique

L’espace géographique de notre investigation a été circonscrit à la zone forestière, sur la base des limites prescrites par le décret 68-80 du 09 Février 1968 (DPN et CI 2001) (avec un rayon de 10 km à partir de ces limites). Ce sont donc les populations rencontrées dans de cette zone qui ont fait l’objet de cette étude. L’investigation s’est donc déroulée dans les sous-préfectures de Bouaflé et Bonon en ce qui concerne le parc national de la Marahoué où 09 localités ont été sélectionnées pour l’enquête et également dans les sous- préfectures de Bangolo et de Duékoué pour le mont Péko où 06 localités ont été choisies.

I-1-2 Les enquêtés

Le groupe social de notre investigation est composé de trois catégories de personnes à savoir : les chefs de ménage, les femmes et les jeunes.

Les chefs de ménage : Ce sont les hommes qui dans le cadre familial ont la charge de tout le ménage, souvent la responsabilité des décisions et le pouvoir économique.

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Les femmes : Elles jouent un rôle très important dans le maintien en équilibre de la famille. Mais ce rôle important est parfois marginalisé.

Les jeunes : Ce sont les jeunes hommes qui dans la société rurale, sont en mesure ou participent à la production économique.

Cette décomposition du groupe cible parait évidente pour mieux cerner les réalités intrinsèques de chaque groupe d’acteurs.

I-1-3 Les techniques de sélection des répondants

Etant donné qu’il n’existe aucune base de sondage et que les individus sont disséminés sur un espace géographique très vaste, nous avons opté pour la technique aléatoire1. Ici, trois catégories de personnes ont été prises en compte. Il s’agit des chefs de ménages femmes et les jeunes. Ces personnes ont été réparties sur 15 localités choisies de façon aléatoire, c’est-à-dire une fois sur les lieux, les individus qui ont bien voulu se prêter à l’enquête, ont été interrogés individuellement, et cela de façon arbitraire. Aussi, toutes ces personnes ont été enquêtées tout en évitant d’interroger dans le même ménage : le chef, un jeune et une femme de cette famille.

I-1-4- La taille de l’échantillon

Ne disposant d’aucune information pouvant permettre de dire avec exactitude l’effectif des paysans vivant autour du parc, il est difficile de déterminer la proportion que représente l’échantillon choisi.

Cependant compte tenu de l’effectif présumé très élevé des paysans vivant autour du parc national de la Marahoué, un échantillon de 1000 répondants, nous a paru suffisamment représentatif, ainsi que le conseillent Ghiglione et Matalon (1978).Cependant, la modicité des moyens disponibles nous a obligé à limiter le nombre à 335 répondants pour les deux parcs soit 175 pour le parc national de la Marahoué (52,23%) et 160 pour le mont Péko (47,76%).

1 Le thème « aléatoire » ne doit pas être pris au sens de la fantaisie ou d’arbitraire.

Il doit être pris au sens mathématique. C’est un exercice de probabilité permettant à chaque individu de la population d’avoir la même chance d’être sélectionné dans l’échantillon mère.

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I-2 Matériel et méthode I-2-1 Matériel

a) Les fiches d’enquêtes

Les fiches d’enquêtes comportent des informations sur l’identification des répondants (nom et prénoms, âges sexes, localités d’habitations, état matrimonial, groupes ethniques, religion etc.

b) Le guide d’entretien

Le guide d’entretien nous a permis de circonscrire le cadre des échanges pour recueillir des informations utiles pour notre enquête dans une approche dynamique. Nous avons donc répertorié un ensemble de questions ouvertes relatives à leurs situations préoccupantes, déplacements forcés sans mesures d’accompagnement, leurs perceptions, les conséquences et les stratégies de résilience déployées.

I-2-2 Méthode

Nous avons essentiellement procédé par observation participative.

Cette méthode est le plus souvent utilisée dans la perspective sociologique. Elle consiste à étudier une communauté sur une période relativement longue en participant à sa vie collective dans le but d’en étudier son organisation, son mode de fonctionnement et les logiques sociales qui en découlent. Nous nous sommes donc inspirés de cette approche pour effectuer une enquête de terrain qui s’est déroulée sur une période de six mois à la faveur d’un stage à la direction du parc national de la Marahoué et celle du mont Péko. Cela nous a permis d’accéder de manière permanente aux différents sites où se déroulent les opérations d’évacuations ou de délocalisations des populations vivant autour des parcs. Ce faisant, nous nous sommes attelés à observer et à décrire le processus de déguerpissements, les différents acteurs indexés et les conditions dans lesquelles se font ces déplacements forcés (conditions matérielles, financières etc.). En appui à cela, nous avons eu des entretiens directs avec nos enquêtés.

Les résultats suivants ont donc été obtenus.

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II – RESULTATS

II-1- L’impact des opérations de déguerpissement sur les populations locales

II-1-1- La fracture de l’organisation sociale des populations déplacées

Quels sont les projets de développement qui donnent systématiquement lieu à un déplacement forcé des populations ? Souvent, l’on considère à tort, que le déplacement forcé est uniquement la conséquence de la construction des barrages. En réalité, les cas sont beaucoup plus nombreux. En effet, plusieurs types d’interventions de développement, pratiquement toutes celles qui supposent des changements importants en matière d’exploitation des terres ou d’utilisation de l’eau peuvent entrainer l’évacuation de ceux qui vivent dans les zones concernées.

Ces projets de développement qui imposent souvent le déplacement forcé des populations, impliquent généralement la construction :

- de barrages pour l’irrigation, la production d’électricité et de l’approvisionnement en eau potable, qui crée des lacs artificiels dans les zones habitées2,

- de couloirs de communication : routes, lignes de chemin de fer, aéroports, lignes de transport d’énergie, réseaux de canaux d’irrigation et autres projets nécessitant un droit de passage,

- de nouveaux ports et de nouvelles villes,

- d’infrastructures urbaines : routes interurbaines, métros, systèmes d’égouts, grands immeubles publics, rénovation et aménagement urbain,

- de nouvelles mines, en particulier les mines à ciel ouvert, et de centrales thermiques,

- d’usines et de vastes zones industrielles qui requièrent de grandes superficies,

2 Le cas du barrage de Kossou construit en 1985, a provoqué le déplacement forcé de 85000 personnes dans la région de Béoumi (centre de la Côte d’Ivoire).

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- de zones protégées : réserves, zones de protection de la biodiversité, parcs nationaux3.

Ces différents projets de déplacement forcé contraignent toujours les populations à rechercher d’autres moyens d’existence. Ils imposent une situation de crise et suscitent d’énormes perturbations sociales, et provoquent parfois des conflits. Ces conflits et oppositions qui prévalent au sein des déplacements forcés, dus aux intérêts incompatibles entrainent nécessairement la fracture du tissu social.

II-1-2- La dislocation du tissu social

Les déplacements forcés exercent un impact pénible et coûteux sur les structures existantes de la vie culturelle et économique.

Ils donnent lieu au démantèlement en profondeur des modèles existants de l’organisation sociale (Michael 1996 ; Dumas 1982). Et ce démantèlement survient à de nombreux niveaux de l’organisation (économique, politiques, culturelle, et sociale) des populations concernées.

Lorsque des personnes sont contraintes de déménager, on assiste à une dislocation des systèmes de productions (Michael 1996 ; Patrick et Steven 1994). Les communautés établies depuis longtemps sur un espace donné, se désorganisent, tandis que les groupes de parenté sont souvent dispersés (Banque Mondiale 1995). Les réseaux sociaux informels qui assurent l’indispensable entraide sont détruits (alliances, associations de mariages). Les liens commerciaux entre producteurs et leur base de consommateurs sont rompus, et le marché local du travail est perturbé. Les associations, officielles ou non et les services autonomes sont anéantis par le départ soudain de leurs membres dans diverses directions. Les systèmes traditionnels d’autorité et de gestion ont tendance à perdre l’ordre hiérarchique établi et donc le pouvoir suprême (le roi, les chefs et notables). En outre, l’abandon des repères symboliques (sanctuaires et tombeaux ancestraux) et des milieux familiers (montagnes, cours

3 C’est justement ce thème qui fait allusion à notre investigation. En effet, centaines zones protégées parcs nationaux ivoiriens à l’image du PNM sont habitées. Et les populations qui habitent ces zones protégées font l’objet d’évacuation. Les opérations de déguerpissement débutées depuis le règne de la Première République jusqu’à nos jours se sont poursuivies sans résultats probants.

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d’eau, pistes, forêts sacrées et champs), qui incarnent parfois des valeurs religieuses ou symboliques revient à rompre tous les liens physiques et psychologiques avec le passé et à détruire les racines de l’identité culturelle4 des individus (Charles et Jules 1992 ; Cohen et Uphoff 1976). Même s’ils ne sont pas toujours visibles ou aisément mesurables, ces processus n’en sont pas moins réels. Leurs effets cumulés sont dévastateurs, ils déchirent le tissu social et de ce fait, engendrent de graves conséquences sur le terrain.

Ces conséquences varient en fonction des circonstances de l’ampleur des pertes au niveau des sources de revenus et du degré de vulnérabilité économique de la population. Elles se résument donc en un système comportant huit principaux risques typiques d’appauvrissement qui forment un modèle global de risques à appliquer aux déplacements forcés provoqués par le développement durable (Herbert 1978 ; Colson 1971 ; Deacon 1994). Lorsque ces huit risques, ne sont ni combattus, ni atténués de manière adéquate, le processus d’appauvrissement causé par le développement forcé est durable. Les risques issus des opérations d’évacuation forcées sont : la perte des terres, la perte des logements, la perte d’emplois, la marginalisation, l’insécurité alimentaire, l’accroissement de la morbidité et de la mortalité, la perte de l’accès aux ressources collectives, la désorganisation du groupe social. (Crozier et Friedberg 1992 ; Benoit et Ruf 1984).

Ces modèles dans le cadre des diverses tentatives d’opération d’évacuation des paysans installés dans les zones protégées du parc national de la Marahoué et celui du mont Péko n’ont pas été pris en compte par les planificateurs. Or les planificateurs et décideurs auraient dû prévoir ces risques avant d’entamer les opérations d’évacuation afin d’éviter ou réduire au maximum les risques d’appauvrissement des personnes déplacées (Dee 1991 ; Desjeux 2002). Parallèlement, l’« inversion » de ce modèle de guide d’orientation peut indiquer la marche à suivre pour le rétablissement des moyens d’existence des personnes déplacées. Force est de constater que, ce modèle de guide d’orientation appropriée n’a pas servi de repère aux planificateurs ivoiriens du parc de la Marahoué et

4 L’identité culturelle d’un individu se réfère à l’ensemble homogène et intégré de valeurs et de normes «déterminant» les comportements des individus et des groupes dans un milieu donné.

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bien d’autres (Azagny, Comoé, Sangbé, Péko). Au contraire, il a exacerbé, la pauvreté des paysans déplacés. En effet, des moyens d’existence n’ont pas été prévus, avant, après et lors des opérations d’évacuation des populations de certaines zones du parc notamment : à Adaïkro (Sud-est), à Assékro et Djessikao (Nord-est), autour du mont Péko dans les villages de Sawadogokro, Sokourani, Mandekro, Ouaga 2, Diallokro et Petit Bobo. Après les déguerpissements de 2006 et en 2013, les populations concernées se sont retrouvées dans des conditions pénibles d’existence.

Les terres qui les ont accueillies, étaient déjà occupées par les populations autochtones (Gouro).Ce qui occasionne souvent des litiges fonciers entre les groupes en présence. En outre, elles n’ont pas eu non plus accès aux infrastructures sociales (eau potable, centre de santé, logements, écoles). Ce modèle de déplacement forcé sans la prévention des moyens d’existence au préalable ruine davantage les personnes concernées.

Toute installation ou réinstallation spontanée (sans règles d’installation définies au préalable) est un processus difficile. Le déplacement forcé s’accompagne toujours d’épreuves culturelles, économiques et techniques très différentes et bien plus pénibles (Harrel et Barbara 1982 ; Ibrahim 1993). Il déclenche des réactions comportementales entièrement différentes : il s’agit souvent d’aliénation grave, d’incapacité et d’impuissance.

L’accroissement de la tension psychologique et socio-culturelle a tendance à inhiber l’action collective chez les paysans déplacés (Banque mondiale 1990 et 1995). En plus, les conséquences néfastes du déplacement forcé sont encore aggravées par l’absence de politique de réinstallation et de cadre légal pour remédier aux problèmes et le sous-financement des déplacements imposés par l’Etat (Curtis et al 1978 ; Conte 2003). De nombreux effets d’appauvrissement et de désorganisation sociale, générés par le déplacement forcé sont évidents depuis longtemps dans la gestion des aires protégées ivoiriennes ou de biens publics.

Pourtant l’Etat ivoirien et les planificateurs continuent de les négliger et souvent, ne conçoivent pas de mesures préventives (Diara 1997). En clair, cela signifie que l’Etat et les planificateurs chargés de la gestion des ressources naturelles, doivent subir de lourdes pertes et des épreuves difficiles qu’une stratégie, une planification et un financement mieux conçus auraient permis d’éviter ou d’atténuer.

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En définitive, le déplacement forcé détruit l’organisation sociale de toute société. C’est la raison pour laquelle, il s’avère indéniable que le dispositif participatif du parc national de la Marahoué et celui du mont Péko déterminent les mesures à prendre pour aider les personnes déplacées à reconstruire leurs fondements économiques, culturels et leur tissu social.

II-1-3- Conflits entre populations hôtes et populations d’accueil

Le projet de réinstallation des populations ne peut être considéré comme réussi que lorsqu’il implique la population hôte. Celle-ci peut être intéressée de deux manières. La première consiste à exploiter

«les connaissances locales» des hôtes pendant la planification et la mise en œuvre du projet. Le second est soit «l’intégration physique des hôtes» au sein du projet de réinstallation s’ils le souhaitent, soit «la protection de leurs droits sur les terres» s’ils désirent rester en dehors du projet.

Cependant, il convient de noter que la plupart des projets de réinstallation sont planifiés et mis en œuvre sans informations ou données adéquates sur l’environnement social, physique et biotique (Akindés 1994 ; Chauveau 1998 b). Ce qui est la principale raison de leur non-durabilité ou de leur incapacité à réaliser leur potentiel de développement. Or cette prise en compte des populations hôtes éviterait les litiges et la crainte des risques qui peuvent mettre en péril le programme de réinstallation tout en entier. En effet, la crainte du risque est une réaction qui permet d’affronter la tension et l’incertitude qui vont de pair avec la découverte d’un nouvel environnement et de nouveau voisin.

Tout ceci donne une vision claire à la population hôte de leurs potentiels nouveaux voisins, et l’attitude à adopter envers eux. De la sorte, la population hôte se prépare à accueillir les populations déplacées et à mener une vie de symbiose avec celles-ci (les pratiques, agricoles, les pratiques religieuses, le savoir-faire, les coutumes et croyances, logements). En clair, elles acceptent leur intégration et partagent tout avec elles. A leur tour, les nouveaux voisins sont obligés de se soumettre aux règles de vie de la société d’accueil, de saisir les diverses réactions des populations (hôtes) et de restaurer un climat de confiance entre ces groupes afin d’éviter les conflits qui

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découlent souvent, et ayant des effets néfastes sur les populations hôtes. Ceci dit, l’enquête préalable, auprès des populations hôtes demeure une étape capitale pour la réussite de tout projet de réinstallation.

Bien que les populations déplacées souffrent souvent d’un manque d’assistance gouvernementale appropriée, l’importance de l’aide et la manière de la dispenser peuvent rendre les populations financées dépendantes de l’organisation responsable du projet de réinstallation. La dépendance constante n’est pas souhaitable car elle retarde et réduit le potentiel de développement des nouvelles terres en diminuant l’initiative des personnes déplacées. Mais lorsque des organisations des personnes déplacées se forment, le risque que leurs activités portent de manière disproportionnée sur les relations avec l’organisation responsable est réel. Enfin, la dépendance accroit les coûts financiers de réinstallation, puisque l’organisme doit garder un personnel important, et continuer à effectuer une série d’activités qui aurait pu, dans le cas contraire, revenir à la gestion locale. La meilleure manière de l’éviter est de tenter d’impliquer dès le début les personnes concernées dans la prise de décisions et dans la gestion. L’octroi de subventions aux personnes déplacées doit être maintenu au seuil minimum à toutes les étapes de la réinstallation, puisque pendant la période d’implantation, les personnes déplacées peuvent avoir besoin d’abri, d’eau, de nourriture pendant qu’elles préparent la zone d’installation (si cela n’a pas été fait au préalable) ou avant la première récolte des produits alimentaires. Dans un tel cas, les planificateurs sociaux doivent évaluer précisément les diverses manières d’aider les personnes déplacées à devenir auto- suffisantes le plus rapidement possible en réduisant au maximum le risque d’une relation de dépendance. Logiquement, cette aide des Etats ou autres subventions devraient être nécessaire jusqu’à la première récolte. Dans ce cas, plusieurs options sont applicables, notamment l’aide alimentaire, le travail rémunéré dans le cadre du projet ou les allocations de subsistance jusqu’à ce que les personnes déplacées soient parvenues à l’autofinance. En outre, selon les données de notre investigation, il apparaît que l’octroi par l’Etat d’aide alimentaire en compensation du travail effectué produit de meilleurs résultats qu’une simple distribution de nourriture lorsque le besoin s’en fait sentir.

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Au total, le déplacement forcé provoque des bouleversements dans l’existence des personnes concernées. Voilà pourquoi, dans tout projet de déplacement ou de réinstallation, les planificateurs doivent toujours prévoir une assistance sociale capable d’atténuer les souffrances des personnes déplacées et restaurer leur niveau de vie sur les nouvelles terres.

III- DISCUSSION

Le déplacement planifié est-il un phénomène rare de faible envergure ou au contraire son ampleur et sa fréquence requièrent- elles la mise en œuvre de stratégies et d’orientations politiques ?

Plusieurs indicateurs peuvent être identifiés pour quantifier5 le déplacement et les pertes qu’il implique : le nombre de personnes physiquement déplacées ou à déplacer de leur région, le nombre de celles qui perdent leur emploi et de leurs terres, le nombre de celles qui perdent leurs moyens de production et de logements, les coûts de déplacement, les pertes de temps, la durée du déplacement, le nombre de celles qui perdent les édifices religieux et d’institution.

L’on procède rarement à la synthèse de statistiques de ces indicateurs pourtant essentiels dans les processus de réinstallation des personnes déplacées ou à déplacer. Parmi ces indicateurs, le nombre total de personnes déplacées est indéniable, car il peut servir à déduire les autres indicateurs. L’absence de chiffres exacts quant aux individus à déplacer constitue un handicap aux processus de déplacement, dans la mesure où elle ne peut permettre aux décideurs d’inventorier des mesures préventives quantifiables et conformes.

C’est pourquoi, pour tout projet de déplacement forcé tels que ceux du parc national de la Marahoué, et du mont Péko, il faut connaître le nombre exact des personnes à déplacer ou déplacées et prévoir des coûts et des mesures conformes au déplacement. Cette absence notoire de données statistiques constatées dans le processus de déguerpissement des parcs de la Marahoué et du mont Péko a davantage ruiné les populations concernées dans la mesure où de véritables mesures d’accompagnement n’ont pas été mises en place.

5 Quantifier c’est énumérer et faire la synthèse des statistiques de tous les indicateurs essentiels qui prennent part dans le processus de déplacement et de réinstallation des populations. …

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Cela a exacerbé la précarité des conditions de vie des populations délocalisées.

Les principaux volets du plan de réinstallation des populations déplacées ou à déplacer sont les suivantes : l’« enveloppe » développement et la stratégie des acteurs, le soutien au rétablissement et l’organisation sociale des personnes déplacées ou à déplacer, l’expertise des propriétés et l’indemnisation, l’offre de logements et de services sociaux, les mesures de protection de l’environnement et de gestion des ressources disponibles.

Ce plan est censé définir clairement sa stratégie de réinstallation, le cadre légal, et les droits de ceux qui sont affectés, et confier les responsabilités à des organisations de sorte que les activités de réinstallation soient synchronisées.

Les personnes déplacées et les organismes de réinstallation doivent commencer par s’occuper de la perte des moyens de production et des réseaux sociaux essentiels. L’indemnisation en espèce des moyens de production perdus ne suffit généralement pas pour assurer leur restauration. L’enveloppe développement doit donc contenir un ensemble de dispositions permettant de reconstruire une base de production solide pour ceux qui sont déplacés, qu’ils soient producteurs indépendants ou salariés. Deux types de stratégies peuvent être adoptés pour réinstaller les communautés villageoises : l’une est axée sur l’exploitation de la terre, l’autre sur l’emploi. Dans le cadre des stratégies basées sur l’exploitation de la terre, les personnes déplacées se voient offrir des opportunités économiques pour rétablir leurs activités professionnelles, qu’elles soient agriculteurs, ou artisans ruraux. Parmi ces opportunités, il y a les défrichements de terres, les programmes d’irrigation, l’intensification agricole, le développement de l’arboriculture, la pêche, et autres programmes d’utilisation commerciale ou sociale des ressources forestières.

Chacune de ces activités peut être menée de front avec un emploi non agricole. La terre est un élément essentiel de ces stratégies. Lorsque les personnes déplacées sont en majorité des agriculteurs ou des travailleurs agricoles tels que perçus dans le cas du parc national de la Marahoué, le rétablissement de leur potentiel de production dépend essentiellement de la superficie des terres disponibles. Les organismes d’exécution rechignent généralement à entreprendre les

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actions nécessaires à l’offre des terres libres aux personnes déplacées (ou elles ne disposent pas des compétences suffisantes à cet effet).

Toutefois, l’ « absence » apparente de terres disponibles résulte souvent : d’une mauvaise planification du projet, de l’insuffisance des efforts pour identifier les réserves de terres disponibles ou qui vont l’être, d’un manque de volonté politique pour faire usage de l’autorité gouvernementale, ou de réserves financières, afin d’offrir des terres, qu’il serait possible de libérer, d’un manque d’imagination dans la conception des solutions adéquates.

Tout ce plan de réinstallation rurale doit dès lors commencer par estimer cette donnée essentielle qui est la superficie nécessaire pour rétablir la base de production des personnes déplacées. Dans cette logique, les planificateurs de projets en concertation avec les personnes touchées doivent identifier des sites économiquement et techniquement viables qui conviennent aux exigences des personnes déplacées6.Aussi, lorsque les déplacements forcés se produisent dans les zones urbaines, le plan de réinstallation doit prendre en considération les complexités du droit de propriété des sites urbains, la légalité de leur conception et les services requis.

Le soutien à l’autonomie des personnes déplacées dans les sites de réinstallation est souhaité par certaines structures internationales notamment la banque mondiale. Car pour elle, le déplacement forcé est considéré comme une source d’appauvrissement des personnes déplacées. C’est pour cette raison qu’elle exige que les plans de réinstallation apportent un soutien aux institutions sociales et culturelles des personnes déplacées et se reposent sur elles autant que possible. Il convient donc de stimuler l’esprit des initiatives des personnes déplacées en proposant des mesures d’encouragement à l’entraide, plutôt qu’en offrant uniquement une assistance, voire une assistance d’oppression et de torture sur les individus ou groupes déplacés telles que celles perçues sur le parc national de la Marahoué et du mont Péko. En effet les populations déplacées des zones protégées du parc national de la Marahoué des localités

6 Dans certains pays développés comme la chine, le japon où les terres sont extrêmement rares, les stratégies de réinstallation sont souvent basées sur l’emploi, plutôt que sur les terres. Il convient d’offrir des opportunités aux personnes déplacées pour qu’elles puissent intégrer le secteur de l’industrie ou des services de l’économie locale régionale

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d’Adaikro, Koffikro, Assekro, Djessikro, n’ont pas eu le soutien des populations autochtones vivant aux alentours du parc. Elles ont, au contraire envenimé les rapports sociaux. Ce sont donc des rapports de rivalités qui brillent entre les populations déplacées et l’autre vivant autour du parc. IL en est de même dans les villages de Sawadogokro, Sokourani, Mandekro, Ouaga 2, Diallokro. Ces dernières n’ont pas fait de preuve de solidarité et d’entraide qui sont les principes fondamentaux d’une organisation sociale.

Le démantèlement des systèmes anciens, d’autorité affaiblit donc la capacité de la communauté à se mobiliser de sa propre initiative.

Pour cela, il est essentiel de travailler avec les personnes déplacées, les hôtes et leurs chefs respectifs avant et après la réinstallation.

Ainsi, lorsqu’une réinstallation est déclenchée, le plan de réinstallation doit impliquer les systèmes d’autorité des personnes déplacées et des hôtes afin de prévenir les effets environnementaux de la seconde génération notamment l’empiétement sur les forêts, l’érosion des sols, la surexploitation et le surpâturage. Les personnes déplacées préfèrent généralement déménager en groupes, en unités culturelles (groupes de parenté, familles étendues, groupes ethniques, voisins, hameaux, sous-unités villageoises).

Cela leur permet de mieux s’organiser et de devenir productives plus rapidement sur leurs nouveaux sites. Or au niveau du parc national de la Marahoué et celui du mont Péko, les tentatives d’opération d’évacuation des populations illégalement installées se font par « bateau », c’est-à-dire tout le monde monte dans le même bateau (sans distinction d’affinités, familiales, ethniques) et à une destination inconnue (sans identification des sites d’accueil au préalable). En effet, les populations déplacées des villages d’Adaïkro (Sud-est) ; Assékro et Djessikro (Nord-est) illustrent parfaitement ce schéma de réinstallation qui semble illogique. Le choix de déménagement en groupes organisés doit être encouragé pour autant qu’il ne soit pas incompatible avec le sélection des sites de développement durable, ou avec la volonté de certains individus de choisir eux-mêmes leurs sites de réinstallation. Le soutien à la réinstallation d’unités culturelles intégrées aide à préserver un important «capital social», les modèles viables d’organisation de groupes. Sur le nouveau site, ce «capital social» attenue souvent les perturbations, et accélère la réinstallation.

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Transformer le déplacement en processus de développement durable passe par la fixation de normes élevées en matière de planifications matérielles et de services, il ne s’agit pas de reproduire simplement ce qu’existait auparavant. Dans le cas de la réinstallation en groupes, de l’habitat comporte deux aspects : construire de nouvelles installations humaines en tant que systèmes communautaires viables dotés d’infrastructures et faciliter la reconstruction par les familles de leur propre logement. Lorsque de nouveaux établissements humains résultent d’un déplacement, il est important de prévoir leur développement futur, en prenant en compte la croissance démographique escomptée et l’accroissement des besoins en ressources. Les infrastructures, les écoles, les services de santé, les réseaux routiers, la superficie des lotissements et des quartiers doivent être soigneusement conçus pour répondre aux besoins des familles qui s’agrandissent. En plus, l’on doit tenir compte de la seconde génération du nouvel établissement humain et éviter l’évaluation des projets de déplacement se limitant uniquement aux besoins du présent. Malheureusement les projets de déplacement et de réinstallation des populations planifiés au niveau des aires protégées ivoiriennes en l’occurrence le parc national de la Marahoué et le mont Péko n’ont prévu ni des constructions d’habitats, ni même des sites d’accueil pour les populations déplacées de Adaïkro (Sud-est), de Djessikro et de Assékro (Nord-est et bien d’autres tels que Diallokro, Petit Bobo). Ce qui constitue déjà un handicap sérieux pour l’opération d’évacuation de l’ensemble des paysans installés illégalement dans les zones protégées de ces aires protégées. Parfois, dans d’autres cas, les logements sont prévus mais, ils ne sont pas compatibles avec les besoins des populations déplacées (le cas de Tos et de V). Dans les faits, les lotissements fournis par l’Etat restreignent l’organisation sociale de la famille des personnes déplacées. Cela entrave les activités des familles et leur cycle normal de développement. En clair, la prise en compte de logements et services sociaux, espaces cultivables et autres, constituent des conditions préalables à la mise en place d’un projet de réinstallation réussi.

Pour la banque mondiale, les procédures de déplacement et de réinstallation des populations doivent se fonder sur l’idée que les compétences professionnelles des spécialités sont plus que jamais

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nécessaires, voire impératives (surtout les sciences sociales).

Atténuer l’épreuve du démantèlement d’un groupe social, planifier le transport de la population et la réinstaller sont des tâches qui requièrent toute l’ingénierie sociale (Bond, 1986). La préparation d’un projet de réinstallation requiert les compétences de nombreuses professions techniques mais elle doit également s’adjoindre sur le terrain, les services d’au moins un sociologue ou un anthropologue spécialisé dans la réinstallation de préférence un ressortissant du pays dans lequel le projet est mis en œuvre. Pour la banque mondiale, il semble donc logique de s’interroger sur la manière dont la politique et les procédures de réinstallation, prenant en compte les variables sociologiques, influent les opérations pratiques de réinstallation dans le cadre de leur mise en œuvre. Ainsi, les principales améliorations que la banque mondiale exige dans le cadre des diverses catégories de projets de réinstallation sont les suivantes : l’amélioration de la planification du calendrier des déplacements forcés, la promotion de réinstallation axée sur le développement et la production plutôt que sur l’indemnisation financière (assistance à court terme),une certaine augmentation (quoique insuffisante) des ressources financières et institutionnelles qui permettent d’aider les personnes déplacées, un progrès dans la préservation du niveau de vie et de la protection des droits des personnes qui subissent des effets néfastes des projets de réinstallation.

Planifications rigoureuses, intégrations d’approches opérationnelles novatrices, octroi de ressources financières et institutionnelles largement supérieures à la moyenne de celles allouées par le passé, telles sont les grandes orientations de la banque mondiale concernant les projets de réinstallation des populations. Aussi, celles-ci doivent être renforcées par les réglementations existantes du milieu.

L’expérience sur le terrain nous a montré que produire sur le papier une stratégie de réinstallation et de déplacement ne suffit pas. Transformer une bonne stratégie en une bonne opération de réinstallation n’est pas facile : les gouvernements hésitent et résistent, les gestionnaires tergiversent et les organismes d’exécution ne sont pas toujours désireux de garantir les belles paroles des espèces sonnantes et trébuchantes. Les entorses à la stratégie et aux objectifs du projet doivent donc être identifiées avant qu’il ne soit tard. Il est donc essentiel de procéder à un suivi sociologique des processus

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économiques et culturels dans lesquels les populations touchées s’engagent au processus du déplacement et de la réinstallation.

Dans un tel cas, les équipes de supervision doivent accorder une attention particulière aux aspects socio-culturels, économiques et techniques de la réinstallation et à noter les réactions des groupes déplacés. Souvent lorsque les personnes déplacées sont informées de leurs droits, du calendrier du départ et de la réinstallation et des objectifs du programme, elles deviennent les meilleures « gardes » des normes fixées dans la stratégie de réinstallation. C’est à ce juste titre que les groupes de surveillance, composés de spécialistes (sociologue ou anthropologue, économiste, technicien et autres gestionnaires) doivent se rendre régulièrement sur le terrain, évaluer les normes figurant à la base des opérations de déplacement et de réinstallation, et identifier les problèmes éventuels. Le suivi des dimensions socio- culturelles, par opposition à l’observation des seuls indicateurs matériels permet également aux personnes déplacées d’exprimer leurs besoins et leurs réactions.

En clair, la réinstallation reste un processus traumatisant dans la vie de ceux qui sont soumis. Elle constitue également une tâche titanesque à laquelle les décideurs et les gestionnaires de projets doivent s’atteler. Toutefois, la réinstallation forcée au même titre que d’autres perturbations statiques peut devenir une opportunité de développement et de changement pour autant que les gouvernements la traitent sérieusement, et que les moyens institutionnels et financiers adéquats soient attribués. Etant donné que les perturbations sociales continueront d’accompagner les mutations techniques et économiques à l’avenir, il est impératif de poursuivre l’amélioration des stratégies de déplacement et de réinstallation, des cadres légaux et des approches pratiques de mise en œuvre.

CONCLUSION

Il semble utile de souligner que la gestion équitable des parcs nationaux ivoiriens en l’occurrence le parc national de la Marahoué et le mont Péko, véhicule à la fois une certaine philosophie du développement et une stratégie opérationnelle pragmatique. Le postulat de cette philosophie, c’est le rôle central des populations dans la protection des domaines permanents de l’Etat, celui des innombrables surveillants devenus exploitants agricoles. Elle rompt radicalement avec le stéréotype

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qui veut que la gestion sociale ou la participation accrue soit l’apanage de tous les acteurs. Quant à la stratégie opérationnelle destinée à mettre cette philosophie en pratique, elle porte sur des questions pragmatiques et est décimée lors de chaque projet ou de chaque expérience sociale audacieuse qui tente d’impliquer les populations dans le processus démocratique de surveillance des parcs. La pratique de l’expérience participative est ouverte à une multitude d’approches à la création de divers modes d’organisation sociale comme modèles d’action à des combinaisons d’innovations imaginatives. Elles sont fondées en matière de régions de propriété de la terre, richesses naturelles, de formes de droits de propriété ou d’usufruit, de techniques plus ou moins éprouvées, ou orthodoxes et de structures sociales des plus anciennes au plus récentes, et à tous les types de groupes créés à desseins. Toutes ces options disponibles montrent qu’il n’existe pas d’approches sociales « idéales » qui conviennent de façon optimale à toute situation du développement durable des espaces protégés. Les stratégies envisageables sont multiples. Voilà pourquoi, il faut prendre en compte toutes les options, chercher à les réorganiser afin d’assurer une surveillance équilibrée de ces lieux. En outre, les organisations non gouvernementales qui inscrivent leur développement durable et la protection de l’environnement dans leurs programmes, elles peuvent également devenir les animatrices des associations de protection et aider les populations villageoises à agir et à se structurer en tant que premiers surveillants des espaces protégés. Toutes ces connaissances sont utiles et indispensables et exigent une compréhension sociologique des tâches à accomplir et les méthodes d’organisation sociale. Dans un tel cas, les formes sociales ne doivent pas être créées en ex-nihilo.

Les aptitudes des acteurs doivent être améliorées par le renforcement, l’adaptation et l’innovation organisationnelle de sorte que la participation puisse être pratiquée à une très grande échelle, ce qui est aujourd’hui une nécessité absolue.

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