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DOSSIER

Infections neuroméningées

F. Bénézit

Les abcès cérébraux

Brain abscesses

F. Bénézit1, R. Sonneville2, P. Tattevin1

1 Service des maladies infectieuses et de réanimation médicale, hôpital Pontchaillou, CHU de Rennes, univer- sité Rennes 1.

2 Service de médecine intensive et de réanimation infectieuse, pôle Infection et immunité, hôpital Bichat – Claude-Bernard, AP-HP, Inserm U1148, université Paris-Diderot, Paris.

Les abcès cérébraux sont des suppurations intracrâniennes dans une cavité néoformée, à différencier des empyèmes sous-duraux ou extraduraux (suppurations intracrâniennes développées dans des cavités naturelles), dont la physiopathologie est proche. Cette mise au point se limitera aux abcès cérébraux de l’immunocompétent, les étiologies et la prise en charge étant nettement distinctes chez les immunodéprimés.

Historique

Jusqu’à la fin du XIXe siècle, les abcès cérébraux avaient une mortalité proche de 100 %, ce qui illustre bien l’inefficacité du système immunitaire face aux suppurations intracrâniennes. Les premières guéri- sons ont été obtenues par un chirurgien écossais, William Macewen, à l’aide de traitements unique ment chirurgicaux (drainages), facilités par une meilleure connaissance de l’anatomie du cerveau, bien avant les premières antibiothérapies. Les découvertes successives de la pénicilline, du chloramphénicol, du métronidazole et des céphalosporines de troisième génération ont contribué à améliorer le pronostic (1).

Le dernier quart du XXe siècle est marqué par l’avènement du scanner (1974), des ponctions ou biopsies stéréotaxiques (1980) et enfin de l’IRM cérébrale (début des années 1990), avec un pronostic transformé, aussi bien du point de vue vital (létalité

< 20 % dans les séries récentes), que fonctionnel, avec une récupération sans séquelle dans 70 % des cas en 2010, versus 20 % en 1960 (2).

Physiopathologie

L’abcès cérébral débute par une infection non circons- crite (“cérébrite”) secondairement entourée d’une capsule hypervascularisée qui limite l’extension de l’in- fection (3). Cette précession de l’abcès par une phase d’infection non ou mal circonscrite (la cérébrite) a été bien montrée par les modèles expérimentaux in vivo.

Les 4 étapes sont : cérébrite précoce (J1-J3) : inflam- mation localisée ; cérébrite tardive (J4-J9) : apparition

d’une zone nécrotique centrale et extension de la zone inflammatoire ; encapsulation précoce (J10-J14) : gliose ou fibrose périphérique avec hypervascularisation ; encapsulation tardive (à partir de J15) : la capsule est définitivement formée, encerclant l’abcès avec une paroi relativement étanche (4, 5).

Le phénomène initial, à l’origine de cette cérébrite, dépend de la porte d’entrée de l’abcès (tableau I) :

infection par contiguïté : la propagation se fait par voie veineuse, facilitée par l’absence de valves antireflux au niveau des veines émissaires, ce qui va permettre le passage des bactéries vers le cerveau. Il existe vraisemblablement dans la majorité des cas une thrombophlébite septique, associée à un infarctus céré- bral localisé d’origine veineuse, mais ces étapes ne sont habituellement pas symptomatiques et le diagnostic n’est fait le plus souvent qu’au stade d’abcès cérébral ;

infection par voie hématogène : les principaux facteurs de risque sont le caractère répété de la bactériémie (endocardites [6]), un shunt de la circulation pulmonaire (cardiopathies cyanogènes, fistule artérioveineuse pulmonaire), ou un foyer infectieux intrathoracique (abcès pulmonaire), ou dentaire (7).

Épidémiologie

Les abcès cérébraux sont devenus rares : leur inci- dence est < 1/100 000 habitants/an dans les pays développés, avec une baisse d’incidence rattachée à l’amélioration de la prise en charge des infections de la sphère ORL, et aux progrès réalisés dans les domaines de l’hygiène et des soins dentaires.

Les abcès cérébraux sont plus souvent observés chez des hommes : une série de 94 patients pris en charge en réanimation à l’hôpital Bichat – Claude-Bernard retrouvait un âge moyen de 48 ans (extrêmes : 17-85) et un sex-ratio de 3 hommes pour 1 femme (8).

Diagnostic

Les signes cliniques sont variables en fonction de la localisation, de la taille et du nombre des abcès.

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En cas de pathologie associée (endocardite, abcès pulmonaire), les abcès cérébraux sont souvent au second plan. Les céphalées sont retrouvées chez 70 % des patients, et sont souvent sourdes, mal localisées et de début progressif. Une aggravation brutale des céphalées associée à l’apparition d’un syndrome méningé doit faire craindre la rupture intraventriculaire d’un abcès, avec ventriculite, dont le pronostic est sombre. Les autres signes sont la fièvre (50 % des cas), les signes de localisation neuro- logique (50 %), les troubles de la vigilance (40 %) et les convulsions (25 %) [2]. Le diagnostic est souvent tardif, avec un délai médian de 2 semaines après l’apparition des premiers symptômes. La recherche d’un souffle cardiaque, d’un foyer pulmonaire, l’examen du revêtement cutané et de l’état dentaire,

ainsi que l’otoscopie doivent être systématiquement effectués en cas de suspicion d’abcès cérébral.

Toute suspicion d’abcès cérébral impose une imagerie cérébrale en urgence, en privilégiant l’ima- gerie par résonance magnétique (IRM) lorsque cet examen peut être obtenu dans les 24 heures. Dans le cas contraire, une tomodensitométrie (TDM) avec injection de produit de contraste sera réalisée. La figure 1 (p. 102) propose un algorithme de prise en charge des suspicions d’abcès cérébral (3). Les figures 2 et 3 (p. 103) décrivent les aspects typiques des abcès cérébraux en IRM (figure 2, p. 103) et en TDM (figure 3, p. 103). En pratique, devant une lésion focale prenant le contraste en cocarde, l’IRM de diffusion est un examen sensible et spécifique pour faire le diagnostic d’abcès cérébral à pyogènes,

» Le pronostic s’est amélioré au cours des dernières décennies, avec une mortalité inférieure à 20 % dans les séries récentes.

Highlights

»Brain abscesses are rare (0.3 to 1/100 000 inhabitant/year).

»Brain abscesses develop from contiguous spread of bacteria in 40-50% of cases (otitis, sinusitis, or cranial trauma), or through hemato- genous dissemination in 30-40% of cases (e.g. endo- carditis or dental infection).

»Most common pathogens include streptococci (including the milleri group), and strict an - aerobes.

»A 6-week combination of third-generation cephalo- sporin and metronidazole will eradicate most pathogens responsible for brain abscess, in combination with surgery in most cases.

»The prognosis improved during the last decades, with lethality rates under 20% in recent series.

Keywords

Brain abscess Endocarditis Otitis Sinusitis Review Tableau I. Principaux mécanismes et leurs conséquences sur la prise en charge.

Facteurs favorisants Bactériologie Commentaires

Hématogène (30-40 % des abcès cérébraux chez l’immunocompétent) Endocardite Staphylococcus aureus,

streptocoques oraux, HACEK

Même sans valvulopathie connue, une échocardiographie doit être réalisée en cas d’abcès cérébraux bilatéraux et/ou cryptogéniques

Shunts droit-gauche (cardiopathie congénitale, fistule artérioveineuse)

Polymicrobienne : streptocoques, anaérobies (Actinomyces sp., Prevotella sp., Bacteroides sp., Fusobacterium sp.)

Examen cutané soigneux à la recherche de télangiectasies (15) [maladie de Rendu-Osler]

Infection dentaire Polymicrobienne : streptocoques groupe milleri (S. anginosus, S. constellatus, S. intermedius), anaérobies (Actinomyces sp., Prevotella sp., Bacteroides sp., Fusobacterium sp.)

- Prédilection pour les lobes frontaux

- Orthopantomogramme + consultation dentiste + soins dentaires

- Prévention secondaire = hygiène dentaire Par contiguïté (40-50 % des abcès cérébraux chez l’immunocompétent)

Otite, mastoïdite, sinusite Polymicrobienne : streptocoques,

entérobactéries, Streptococcus pneumoniae, anaérobies (Prevotella sp., Bacteroides sp.), S. aureus (sinusite)

- Prédilection pour les lobes temporaux (otite, mastoïdite, sinusite sphénoïdale), ou frontaux (autres sinusites)

- Examen ORL systématique en cas d’abcès unilatéral

- Une chirurgie peut être indiquée (drainage foyer de contiguïté) Traumatisme crânien Polymicrobienne : S. aureus, Streptococcus

pyogenes, anaérobies (Clostridium sp., Actinomyces sp.)

Facteurs de risque : plaie contaminée avec flore tellurique, antisepsie tardive ou absente

Neurochirurgie Polymicrobienne : S. aureus, staphylocoques coagulase-négative, entérobactéries

Facteurs de risque : corps étrangers, dont les dispositifs médicaux Cryptogénique (10-20 % des abcès cérébraux chez l’immunocompétent)

HACEK : Haemophilus spp., Aggregatibacter spp., Cardiobacterium spp., Eikenella corrodens et Kingella spp.

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Les abcès cérébraux

DOSSIER

Infections neuroméningées

Antibiothérapie empirique

Céphalosporine 3e génération (céfotaxime ou ceftriaxone) + métronidazole Suspicion clinique d’abcès cérébral

Céphalées, fièvre, déficit neurologique, troubles de la vigilance, convulsions

Oui Non

Non

Recherche de facteurs favorisants

Si imagerie initiale = TDM, compléter par IRM Si IRM non évocatrice, recherche d’un autre diagnostic Abcès par contiguïté

- Otite, sinusite - Neurochirurgie récente - Traumatisme crânien

Abcès par voie hématogène - Télangiectasies (Rendu-Osler) - Endocardite

- Pleuropneumopathie - Infection dentaire

Oui

Prélever 4-6 flacons (40-60 ml) d’hémocultures avant initiation des antibiotiques Sérologie VIH

Ponction abcès (stéréotaxie) - Tous les abcès ≥ 2,5 cm

- Si aucun abcès ≥ 2,5 cm, prélever un de ceux ≥ 1 cm (le + accessible)

- Microbiologie : routine (flacons hémocultures aérobies + anaérobies) ± biologie moléculaire (PCR 16S rDNA si négatif) + autres selon risques (tuberculose, etc.)

IRM rapidement disponible (< 24 h)

TDM avec injection en urgence

Imagerie cérébrale compatible avec abcès

Figure 1. Algorithme de prise en charge d’une suspicion d’abcès cérébral.

avec un aspect caractéristique en hypersignal au sein de la lésion et une restriction du coefficient apparent de diffusion (ADC) [9]. Ces caractéristiques permettent de différencier les abcès à pyogènes des lésions tumorales dans la plupart des situations.

Microbiologie

La microbiologie des abcès varie selon le méca- nisme (tableau I, p. 101). Le pourcentage d’abcès poly microbiens varie entre 20 et 60 % selon les études, d’autant plus souvent documentées que les prélèvements effectués sont de qualité, rapi- dement acheminés au laboratoire, avec ensemen- cement immédiat de multiples milieux de culture, en aéro- et anaérobie (10). Dans la plupart des séries publiées, on note la prédominance :

des streptocoques du groupe milleri (Strepto­

coccus defectivus, S. intermedius, S. constellatus), dont la propension à créer des lésions abcédées est bien établie, et dont le réservoir est essentiellement la cavité buccale ;

des anaérobies strictes (Bacteroides sp., Fuso­

bacterium sp., et streptocoques anaérobies), dont l’isolement nécessite un prélèvement de qualité, peu exposé à l’air et rapidement ensemencé en milieu anaérobie.

Le tableau II propose un protocole d’optimisation de la gestion des prélèvements d’abcès. L’examen direct (coloration de Gram) et la mise en culture du contenu d’un abcès sont positifs dans 80 à 100 % des cas lorsque la ponction est effectuée avant toute antibiothérapie et que les prélèvements sont exploités selon les règles de bonne pratique. Le taux de positivité des cultures a été estimé à 60 % lorsque les prélèvements sont différés par rapport à l’intro- duction de l’antibiothérapie.

Par ailleurs, en cas de suspicion d’abcès cérébral, 2 paires d’hémocultures doivent être prélevées avant l’antibiothérapie, même en l’absence de fièvre. Elles peuvent être les seules documentations microbio- logiques dans les endocardites avec abcès cérébraux, notamment à Staphylococcus aureus, et pour les rares listérioses neuroméningées avec abcès. La rentabilité diagnostique des hémocultures au cours des abcès cérébraux a été évaluée à 11 %. La ponction lombaire (PL) est classiquement contre-indiquée en cas de processus expansif intracrânien en raison du risque d’engagement. Cependant, sa rentabilité diagnos- tique peut être intéressante dans certaines situations (culture positive dans 0 à 40 % des cas selon les séries), avec un risque d’engagement survenant dans les heures suivant la PL situé entre 0 et 4 % (11).

Il semble donc justifié de discuter la PL au cours des abcès cérébraux selon les situations : en fonction de l’imagerie (PL contre-indiquée en cas de lésions expansives avec effet de masse) ; en fonction des autres possibilités d’obtention du diagnostic micro- biologique (PL non indiquée si un abord direct de l’abcès est envisagé compte tenu de la rentabilité moindre de la PL par rapport à la ponction d’abcès).

Traitement

Les abcès cérébraux sont rares et hétérogènes dans leur présentation (terrain, bactériologie, gravité) et dans leur modalité de prise en charge (par des équipes médicales, chirurgicales ou médico chirurgicales selon les sites). Cette situation n’a pas permis la réalisation

(4)

d’études multicentriques rando misées. Les niveaux de preuve qui sous-tendent les propositions qui suivent sont donc généralement faibles.

Quelles sont les modalités optimales de traitement ?

Le traitement doit être médical et chirurgical dans la majorité des cas. L’abord chirurgical doit être précoce, avec une ponction à visée diagnostique et parfois thérapeutique. L’évacuation de la collection se fait spontanément, sans nécessité de forte aspiration compte tenu de la pression. Cet abord chirurgical s’effectue après repérage stéréotaxique qui apporte une grande précision à l’abord chirurgical (1-2 mm).

Elle repose sur la fixation d’un cadre dont les fiches sont attachées préalablement au crâne du patient. En l’absence de repérage stéréotaxique, la précision de la ponction guidée par le scanner

est moindre (4-5 mm), ce qui expose à un plus fort taux d’échec et de complications (12). Les abcès de localisation hémisphérique proches de la convexité présentent un risque faible d’aggravation neuro- logique dans les suites. L’abord des abcès profonds en zone critique (diencéphale, tronc cérébral, cervelet) est plus risqué, et souvent irréalisable.

L’excision complète de l’abcès et de sa coque n’a pas apporté la preuve de son bénéfice, alors qu’il s’agit d’un geste plus lourd, nécessitant une craniotomie, et présentant un risque important de dégradation de l’état Figure 3. Scanner cérébral avec injection : abcès céré-

braux avec images “en cocarde” : centre hypodense (pus), limité par la capsule rehaussée par le produit de contraste, et entouré d’une zone hypodense (œdème périlésionnel).

Figure 2. Abcès cérébral typique en IRM. A. Axial T1 : capsule fine hyperintense (flèche blanche), nécrose centrale hypo-intense, et effet de masse.

B. Axial T2 : le même abcès avec une capsule fine hypo-intense (flèche blanche), une nécrose centrale hyperintense, et un œdème périlésionnel hyper- intense. C. Axial diffusion : le centre de l’abcès est hyperintense. D. Axial, coefficient apparent de diffusion (ADC) : le composant central est hypo-intense.

E. Axial T1 avec gadolinium : prise de contraste de la capsule (flèche blanche).

Tableau II. Proposition de protocole pour l’exploitation des prélèvements d’abcès cérébraux (obtenus par voie stéréotaxique ou craniotomie).

Laboratoire Prélèvement Cibles, commentaires

Bactériologie 10 ml de pus, à inoculer directement sur des flacons d’hémocultures (aérobies/anaérobies) 2 tubes secs, au moins 5 ml/tube

Streptocoques, staphylocoques, anaérobies (l’ensemencement sur flacons d’hémoculture améliore la rentabilité)

Coloration de Gram Cultures sur milieux usuels Biologie moléculaire indiquée si prélèvements stériles à 48 h Recherche de mycobactéries en cas de facteurs de risque

Histologie Si prélèvement liquide, tube sec Si prélèvement solide, eau stérile

Diagnostic différentiel (néoplasie)

Mycologie, parasitologie

Tube sec Seulement en cas d’immunodépression

Principes

Doivent être adressés immédiatement au laboratoire pour conditionnement “en direct”, 24 h/24 Deux paires d’hémocultures doivent être prélevées avant et après la chirurgie, idéalement avant toute antibiothérapie

Les caractéristiques du patient et la suspicion d’abcès cérébral doivent être communiquées au(x) laboratoire(s)

(5)

Les abcès cérébraux

DOSSIER

Infections neuroméningées

neurologique. Ce geste reste indiqué en cas d’abcès à bactéries multirésistantes et/ou en cas d’échec d’un traitement médicochirurgical bien conduit.

Le traitement doit-il toujours être médical et chirurgical ?

Les abcès de moins de 2 cm situés dans les zones corticales bien vascularisées ont une forte probabilité de guérison sous traitement médical seul. Certains patients ne sont pas opérés pour des raisons tech- niques (localisation de l’abcès) ou de terrain, et justifient d’une antibiothérapie présomptive, parfois guidée par d’autres prélèvements (hémocultures, PL).

L’association céphalosporine de troisième génération à fortes doses + métronidazole, pendant 6 semaines, est la mieux adaptée à la situation non rare d’absence de documentation microbiologique (tableau III).

Quelles sont les règles de l’antibiothérapie ? La plupart des experts recommandent 6 à 8 semaines d’antibiothérapie parentérale adaptée si possible à la documentation microbiologique. Les données de la littérature suscitent de multiples remarques où persistent des zones d’ombre :

Cette durée s’applique aux abcès documentés, à pyogènes, sensibles à une antibiothérapie ayant une bonne pénétration intracérébrale, et qui ont pu être

évacués. Dans cette situation, effectivement, on ne retrouve pas d’échec documenté dans la littérature.

Une durée de traitement raccourcie (à 3 semaines !) pourrait même parfois suffire.

Il n’y a pas de bases rationnelles à un relais par traitement oral au décours des 6 à 8 semaines d’antibiothérapie parentérale.

La pénétration des antibiotiques dans les abcès cérébraux reste mal connue, mais peut être estimée à partir de la diffusion dans le liquide cérébrospinal (13).

Comme pour tout abcès, l’efficacité des anti- biotiques n’est pas forcément corrélée à leur concen- tration intracavitaire. Ainsi, la pénicilline G a une activité diminuée en milieu acide, qui est illustrée par la possibilité de faire pousser une bactérie dans du liquide d’abcès contenant des concentrations de péni- cilline G au-delà de la concentration minimale inhibi- trice (CMI) de la pénicilline G pour cette bactérie.

À l’inverse, le métronidazole cumule les qualités requises à l’efficacité d’un antibiotique pour le trai- tement des abcès cérébraux : spectre adapté, bonne pénétration intracavitaire et efficacité conservée en milieu acide. Les céphalosporines de troisième géné- ration, dont la plus étudiée dans cette indication est le céfotaxime, ont également des profils pharmaco- cinétiques et pharmacodynamiques bien adaptés au traitement des abcès cérébraux. Les fluoroquinolones pourraient avoir un intérêt vis-à-vis de certaines bactéries (entérobactéries, staphylocoques), mais les faiblesses de leur spectre vis-à-vis des streptocoques et anaérobies, particulièrement pour les fluoroquino- lones les plus anciennes, n’en font pas un traitement de première intention dans cette pathologie.

Compte tenu du caractère fréquemment poly- microbien des abcès cérébraux, et de la sensibilité imparfaite des examens microbiologiques réalisés sur les prélèvements locaux, notamment pour la détection des anaérobies stricts, la désescalade n’est pas toujours raisonnable après documentation.

De nombreux experts privilégient la poursuite de la bithérapie céphalosporines de troisième géné- ration + métronidazole pendant 6 semaines même en cas de documentation. Cette règle de prudence ne s’applique pas aux abcès cérébraux compliquant les endocardites bactériennes, qui sont monomicro- biennes dans la grande majorité des cas.

Quels sont les traitements adjuvants indiqués ?

Pas de corticothérapie systématique, car elle expose à : une diminution de la pénétration des Tableau III. Antibiothérapie des abcès cérébraux en fonction des bactéries ciblées.

Bactérie Antibiothérapie Commentaires

Staphylococcus aureus

Oxacilline i.v. fortes doses (150 mg/kg/j)

La diffusion cérébrale de la cloxacilline et de la céfazoline est probablement insuffisante Streptococcus sp. Amoxicilline (200 mg/kg/j),

ou pénicilline G (300-400 000 UI/kg/j), ou ceftriaxone (2 g × 2/j),

ou céfotaxime (200 mg/kg/j)

En fonction des CMI

Anaérobies stricts (Prevotella sp., Bacteroides sp., Fusobacterium sp.)

Métronidazole, 500 mg × 3/j i.v. ou per os : efficacité comparable

Actinomyces spp. Amoxicilline (200 mg/kg/j), ou pénicilline G (300-400 000 UI/kg/j) Entérobactéries Ceftriaxone (2 g × 2/j),

ou céfotaxime (200 mg/kg/j) HACEK Ceftriaxone (2 g × 2/j),

ou céfotaxime (200 mg/kg/j)

Tests de sensibilité pas toujours fiables pour HACEK

i.v. : intraveineux; HACEK : Haemophilus parainfluenzae, Aggregatibacter spp., Cardiobacterium spp., Eikenella corrodens, et Kingella spp.

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MARDI 24 JUILLET

JEUDI 26 JUILLET MERCREDI

25 JUILLET

VENDREDI 27 JUILLET

Sous l’égide de Avec le soutien institutionnel de

Sous l’égide de La Lettre de l’Infectiologue - Directeur de la publication : Claudie Damour-Terrasson - Rédacteur en chef : Pr Pierre Tattevin (Rennes)

Attention, ceci est un compte-rendu de congrès et/ou un recueil de résumés de communications de congrès dont l’objectif est de fournir des informations sur l’état actuel de la recherche ; SITE RÉSERVÉ AUX PROFESSIONNELS DE SANTÉ

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Lorsqu’un traitement anti-œdémateux s’avère nécessaire (hypertension intracrânienne avec menace d’engagement), les corticoïdes ne sont pas formellement contre-indiqués, mais doivent être rapidement interrompus (sur 3 à 7 jours de durée totale, avec décroissance rapide à partir de 48 heures).

La mise en place d’une dérivation ventriculaire externe en urgence est parfois nécessaire en cas d’hypertension intracrânienne réfractaire.

À l’instar des méningites et des ménigoencépha- lites, le traitement antiépileptique n’est habituel- lement pas indiqué en prévention primaire.

Pronostic

Il est prédit de manière assez exacte par l’état de la vigilance au moment du diagnostic. D’autres facteurs pronostiques (taille et localisation des abcès, retard diagnostique, terrain) sont corrélés à cette variable, mais celle-ci est mesurée de manière standardisée (score de Glasgow), ce qui en fait le premier outil d’évaluation de la gravité des patients.

tification de la porte d’entrée et l’existence d’une rupture intraventriculaire (ventriculite) au moment du diagnostic (14). À la suite des progrès effectués au cours du dernier siècle (cf. rappel historique), la survie est actuellement la règle, avec une morta- lité < 20 % toutes catégories confondues, proche de 25 % chez les patients admis en réanimation. Le pronostic fonctionnel chez les survivants est mal apprécié du fait du manque de données prospectives récentes, mais les séquelles motrices et l’épilepsie sont fréquentes.

Conclusion

Les abcès cérébraux chez l’immunocompétent font partie de ces maladies infectieuses graves, avec une mortalité spontanée de 100 %, qui ont beaucoup bénéficié des progrès réalisés au cours du XXe siècle dans les domaines médicaux et chirurgicaux. Cela justifie d’en connaître parfaitement la présentation, et d’affiner la prise en charge thérapeutique de ces patients dans un cadre multidisciplinaire afin de leur donner toutes les chances de guérir sans

séquelle. Les auteurs déclarent ne pas avoir

de liens d’intérêts.

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DOSSIER

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Références

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