A NNALES DE LA FACULTÉ DES SCIENCES DE T OULOUSE
H. B OUASSE
Sur les modules d’élasticité de traction du caoutchouc vulcanisé
Annales de la faculté des sciences de Toulouse 2
esérie, tome 6, n
o2 (1904), p. 177-276
<http://www.numdam.org/item?id=AFST_1904_2_6_2_177_0>
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SUR LES
MODULES D’ÉLASTICITÉ DE TRACTION
DU CAOUTCHOUC
VULCANISÉ,
PAR M. H.
BOUASSE,
Professeur à l’Université de Toulouse.
Dans deux
Mémoires,
parus ici même1’ ), j’ai déterminé,
avec la collaboration de M.Carrière,
la forme des courbes de tract.ion d’un caoutchouc vulcanisé etétudié les
particularités quelles présentent.
Nous n’avonsjamais prononcé
le motmodule de
traction,
nous bornant à classer les courbes et leurs variat,ions.Je vais montrer dans le Mémoire actuel la cause de cette
réserve,
et prouver à.
quel point
il estillégitime
de déduire la valeur du module de l’étude descourbes,
ainsi que l’ont fait autant dire tous ceux
qui
se sontoccupés
de laquestion.
Je décrirai
plusieurs appareils
corrects pour l’étude du module etje comparerai
les résultats
qu’ils fournissent ; je reprendrai
laquestion
controversée de la varia- tion du module avec latempérature ; je
discuterail’emploi
des méthodes basées surla
propagation
d’un ébranlementlongitudinal ;
enfinje
mesurerail’absorption d’énergie
dans les parcours de faible étendue.Je ne me propose pas tant de tout dire sur ces
phénomènes
que de poser le pro- blème sur des bases indiscutables et deprésenter
un résumécritique
des Mémoiresqui
abondent sur le caoutchouc.Chaque point
pourra ensuite êtredéveloppé
àl’infini en faisant varier la nature du
caoutchouc ;
mais ces rechercheslongues
et
minutieuses,
fort utiles pour lapratique,
toutexpérimentateur soigneux
lesconduira à
bien,
pourvuqu’il
consente àpartir
deprincipes
sûrs et à user de mé-thodes correctes.
(1) Courbes de traction du caoutchouc vulcanisé (Annales de Toulouse, t. V, p. 25,^, ). .
- Réactivité du caoutchouc vulcanisé (Annales de Toulouse, t. V, p. 285).
’
I78
DÉFINITION DU MODULE DE TRACTION EN PARTANT DES COURBES DE TRACTION.
i. La définition du module de traction
(ou
moduled’Young) qui
mesure l’élas- ticitéparfaite
des métaux n’est pasapplicable
apriori
à un corps aussi exten- sible que le caoutchouc. Il nes’agit plus
en effetd’allongements qui
sont del’ordre du millième de la
longueur initiale,
maisd’allongements qui peuvent
atteindre huit fois sa valeur. Lepremier problème
à résoudre est donc le choix d’une définition.Pour les
petites déformations,
les formules(où
P est lacharge, L, s
lalongueur
et la sectionactuelles, Lo,
so lalongueur
etla section
initiales)
sont évidemmentéquivalentes.
On a
proposé
encore les formules suivantes :Pour
distinguer
les différentsE,
nous leur donnons comme indice les numéros de la formule.Nous allons chercher d’abord ce que ces formules donnent pour la courbe de traction en admettant : I° que E est constant ; 2° que le volume ne
change
pas ; 3° que l’élasticité estparfaite.
Dans un article paru dans le Journal de
Physique
en~go3, j’ai
montré que laseconde
hypothèse
est très exactement vérifiée etqu’elle
revient àprendre o,5
comme valeur du coefficient cr de
Poisson,
en donnant à ce dernier une définitionproposée
parRôntgen
pour les corps très extensibles. On sereportera
à ce travail.(Voir
une Note à la fin de ceMémoire.)
La seconde
hypothèse
donne la condition s L = so s= s0-1
enemployant
les notations
déjà
utilisées dans mesprécédents
Mémoires sur le caoutchouc.Voici ce que deviennent les
équations
Portons A en
abscisses,
P en ordonnées et faisons varier A entre i et 00. Lescourbes se classent en trois groupes. La courbe
(l’)
est une droite. La courbe(3’) (4’) (5’)
est unehyperbole,
elle a uneasymptote horizontale;
pour degrands allongements,
lacharge
tend vers la valeurP = so E. Enfin,
pour le troisième groupe, lacharge
passe par un maximum. Nulle pour A = 1, elle redevient nulle pour A = oo. La courbe(2’)
admet un maximum pour A = 2 et unpoint
d’inflexion pour A =3 ;
la courbe(6’)
admet un maximum pour A = 2,~2 et unpoint
d’in-flexion pour A =
4,48.
Or la forme de la courbe de traction est connue
depuis
Villari etreprésentée figure
i. Ce n’est ni une droite ni unehyperbole, puisqu’elle possède
unpoint
d’inflexion. D’ailleurs elle n’a pas de maximum. En définitive elle ne
présente
aucune
analogie,
mêmelointaine,
avec les courbes que nous fournissent les six formules lesplus simples. Assurément,
comme nous le verrons, il n’estguère permis
de définir le module par la courbe detraction ;
toutefois l’allure duphéno-
mène diffère si
complètement
de ce que noshypothèses
feraientprévoir,
que nous pouvonsdéjà
conclureque le
module d’élasticité E ne peut être constant,quelle
que soit la
définition
que l’onchoisisse,
même ensuperposant
à l’élasticité par- faite que nous avonsadmise,
unphénomène
de réactivité quel’hystérésis
considé-rable du
caoutchouc
rend absolument nécessaire.2. Pour
comprendre
le sens des essaisprécédents
il ne faut pas oublierqu’il
n’existe aucune
analogie
entre les courbes dites de traction du caoutchouc et des métaux. Il n’estjamais
venu à l’idée d’aucunexpérimentateur
de déduire le mo-dule
d’Young
de la considération des courbes de traction d’unmétal,
parcequ’elles correspondent
évidemment à des déformations permanentes. Nous savons au con- traire(Sur
les cour°bes detr°action,
etc., n°~)
que les déformations du caout-chouc sont presque entièrement
temporaires.
Si donc nous considérons visoirement la réactivité commeaccessoire,
il n’est pas absurde apriori
dechercher à déduire de la forme des courbes de traction un
paramètre,
soit constant,soit fonction bien déterminée de la
longueur,
ou de lacharge,
ou de lalongueur
et de la
charge, qui
caractérise lespropriétés purement élastiques
du caout-chouc. D’une manière
plus générale,
si la réactivité n’intervenait que comme correctiontouj.ours petite
dans laforme
des courbes detraction,
unpourrait
tirer de celles-ci des indications sur les
propriétés purement élastiques
du caout-chouc,
vérifier si elles ne sont fonction que de lalongueur
et de lacharge,
ou si ellesdépendent
de l’histoire antérieure tout entière du filconsidéré,... quitte
ensuite àcorriger
les résultats de l’influence de la réactivité. Jerappelle,
ce quej’ai
déve-loppé
bien souvent, et enparticulier
dans un travail paru dans la Revuegénérale
des sciences pour
I904,
que nous devons nous efforcer de classer lesphénomènes
en groupes, et ne pas
rapporter
aprior~i
à la même cause despropriétés
aussidifférentes que les déformations
purement élastiques
et la réactivité.3. Les considérations du n° 1 nous enlèvent
l’espoir
de trouver un para-mètre constant pour caractériser les
déformations purement élastiques.
Il nesemble pas d’ailleurs
qu’on puisse espérer
découvrir unparamètre qui
ne soitfonction que de la
longueur
ou de lacharge.
La relationqui
existe entre lacharge
et la
longueur
n’est pasdéterminée;
pour une mêmelongueur
le filpeut,
suivant lesopérations antérieures, supporter
une infinité decharges différentes ;
demême,
pour une même
charge,
le filpeut
avoir une infinité delongueurs
différentes. En d’autres termes, lepoint figuratif peut
occuper uneportion plus
ou moins étendue duplan longueur-charge.
Dans cesconditions,
il ne sembleguère probable
queles
propriétés purement élastiques,
à supposerqu’on puisse
les distraire desphénomènes
deréactivité,
ne soient pas fonction de laposition
dupoint
consi-déré dans le
plan
et, parconséquent,
à la fois de lalongueur
et de lacharge.
En d’autres termes,
portant
normalement auplan P, L,
en unpoint
donné dece
plan,
unelongueur qui représente
lapropriété considérée, généralement
l’extré-mité de cette
longueur
décrira une surface(à
supposerqu’elle
neremplisse
pasun
volume) :
il est difficile d’admettre apriori
que cette surface est uncylindre
dont les
génératrices
sontparallèles
à l’un des axes de coordonnées.Mais on
peut
allerplus
loin et montrer quel’hypothèse que la
réactivité n’in- tervient que comme correction danslaforme
des courbes de traction est abso- lumenterronée;
en d’autres termes, ces courbes sont le résultatcomplexe
des deuxgroupes au moins de
phénomènes,
du même ordre degrandeur~, agissant
simul-tanément ;
il estimpossible
de tirergénéralement
de ces courbes une indicationprécise
ni sur l’un ni sur l’autre des deux groupes, considérés isolément. Cetteproposition
résulte de l’énormité desphénomènes
deréactivité,
de l’extraordinaire variabilité descycles
suivant latechnique,
de l’influence considérable que la vitesse a sur les parcours : tous faits tendant à prouverl’importance
de la variabletemps dans les résultats. Dans ces conditions, le module
d’Young,
tel que l’ontdéfini de trop nombreux
physiciens,
àpartir
des courbes de traction on mêmeplus spécialement
àpartir
decycles
degrande étendue,
ne peut servirqu’à
énoncerd’une manière
plus
ou moins habile lespropriétés
infiniment variables et com-plexes
des courbes detraction,
et nepeut
avoir aucuneprétention
àreprésenter,
même
approximativement,
lespropriétés
purementélastiques, dégagées
des autresphénomènes
et enparticulier
de la réactivité.4.
Quoi qu’il
ensoit, envisageons
d’abord laquestion
sous cetaspect.
Au
voisinage
d’unpoint
de coordonnéesA, P,
la courbe de traction est définie par sa tangente. Les formules(1), (2), (3), (4), qui
fontdépendre
le module E detoute la
partie
de la courbe de tractioncomprise
entrel’origine
et lepoint
con-sidéré,
ne peuvent être d’aucune utilité. Il nous reste donc le choix entre les for- mulesdéjà indiquées,
et la formulepour nous en tenir aux
pIns simples.
Ainsi Villari
(Pogg. Ann.,
t.CXLIII, 1871)
calcule la valeur de E par la for-mule (5),
àpartir
de la courbe decharge
d’un caoutchouc neuf. Le volume variantpeu, il
poseLa valeur
Vo
lui est fournie par des mesures de diamètre faites en ungrand
nombre de
points;
ellepourrait
être obtenueplus
aisément par la balancehydro- statique.
On areprésenté figure
i une courbeanalogue
à celles de Villari. Voici les conclusions que Villari tire de sesexpériences :
Le caoutchouc
possède
trois modulesd’élasticité,
unpremier
constant etpetit
de l’ordre de un second encore constant et
grand
de l’ordre de30 ;
et enfinun moyen et variable
qui
croîtrapidement
et relie lepremier
au troisième. Le pre- miers’applique
de A=1 i à A = 2, le second pourA > 4,
et le troisième pour les valeurs intermédiaires. Les nombres de Villari ne semblent pas vérifier ces con-clusions ;
disonssimplement
que leparamètre E5 de Villari,
trèspetit
et à peuprès
constantpour A
voisin de1, croît régulièrement quand A
croît. La courbeE5
(fig. 1), représente
l’allure des variations de E en fonction de A.Quant
aux valeursnumériques,
elles sont infiniment variables suivant le caout-chouc utilisé.
Eg
estexprimé
enkilogrammes
par millimètre carré. Pour le caout-chouc dont se
sert Villari,
unesurcharge
de serait donccapable d’allonger
de 1 pour 100 un fil ayant de
section, quand
il est tendu par unecharge
faible.
Pour faciliter les discussions et
préciser
lesidées,
nous admettrons que la com°be depremière
tractionpeut
sereprésenter
parl’expression
on en tire
, La courbe
présente
unpoint
d’inflexion pour ~3 = 2 a ; h. Latangente
à la courbeP, A
s’incline donc au début(au voisinage
de A=i),
devient leplus
hori-zontale
possible
pour t13= 2a : b(point
d’inflexionJ.A,..), puis
se relève indéfini-ment. On a
La
figure
1représente
en unités arbitrairesP, E5, E7
en fonction deA;
lescalculs ont été faits en
posant
a =800,
b = 80. Elle coïncide à peuprès
avec unedes courbes de Villari.
Il ne
s’agit
ici que depréciser
les idées. Il serait bien souventplus
exact deposer -
La courbe
présente
alors unpoint
d’inflexion pour A’’ == a b. On aOn
peut
avoirquelquefois
à considérer leproduit
Il est, suivant les
hypothèses,
I)
peut,
suivant les valeurs de a et deb, présenter
un minimum pour A > i.3. Les auteurs
qui
ont défini lemodule,
àpartir
des courbes detraction,
ontchoisi tantôt
l’une,
tantôt l’autre des formules(5 ), (6), (7).
Aussi ont-ils énoncé les mêmes résultatsgénéraux
sous des formes très différentes donnant l’illusion de véritables découvertes.Voici,
parexemple,
Stevartqui,
dans une brochure surl’Élasticité
du caout-chouc vulcanisé
(Gauthier-Villars, 1888), prend
pour définition du module la formuleNaturellement
il conclut : «qu’à l’origine,
il a une valeur maximum correspon- dant au minimum d’extensibilité(le
mot maximum estincorrect);
il diminue ensuitejusqu’au
tiers de cette valeur au moment où lalongueur
est doublée(ceci
ne vaut que pour l’échantillon utilisé par
l’auteur), puis
augmente de nouveaujusqu’au point
de rupture ».Ilnbert
( Thèse
deMarseille, 1 880)
pose la mêmedéfinition,
se sert encore dela courbe de
charge
et naturellementparvient
aux mêmes résultats.Wertheim
avait,
luiaussi,
déduit leparamètre
E de la courbe decharge.
Cantone
( Rend.
Ist.Licmb.,
t.XXXI, 1 898 )
faitparcourir
descycles
au fil decaoutchouc et déduit les valeurs de E de la forme des courbes d’aller et de retour, par la définition
suivante,
dérivée de la formule(6) :
A défaut d’autres
avantages,
ces derniers calculs ont au moins celui de mettre en évidence la relativité de la définition. En somme, dire avec Cantone que le rnodule croît dans lapremière partie
ducycle (charges croissantes)
et décroît dans la seconde(charges décroissantes),
revient à donner des indications sur la forme des courbesqui
limitent lecycle
dans uneexpérience particulière.
Comme cescourbes sont différentes suivant les limites du
cycle,
la manière dont il est décritet
généralement
toutes lesopérations antérieures,
les nombres E sont naturelle-ment très variables. Ce n’est pas une
objection
contre leuremploi :
mais il estessentiel de remarquer
qu’ils
ne peuvent, en aucunemanière,
caractériser les pro-priétés purement élastiques
ducaoutchouc,
aucunprocédé
nepermettant
l’élimi- nation de l’influence de la réactivité sur la forme des courbes. ,Les
physiciens
ont le droit de traduire leursexpériences
comme il leurplaît,
àla condition de ne pas donner le
change
sur le caractère de leurs résultats.Or,
onattache au mot module l’idée d’un
paramètre caractéristique
despropriétés
pure-ment
élastiques;
on n’aplus
le droit d’en faire une fonction arbitrairement choisie des coordonnées d’unpoint
d’une courbe et de sa tangente, alors que cette courbeest le résultat de deux et même trois groupes de
phénomènes :
élasticitéparfaite,
réactivité,
déformationspermanentes.
,De
plus,
il est bien inutile d’introduire dans laquestion
le motmodule,
si lesimple
tracé des courbes donne des indicationséquivalentes :
dans toutes les défi-nitions
rappelées,
le module est une fonctionplus
ou moinscomplexe
deL, P,
s,quantités
que l’on connaît immédiatementpar le
tracé de la courbe.On ne
supprime
aucune difficulté en utilisant descycles
étendus fixés. Il n’est pas sûr que, mêmeaprès
un certain nombre derépétitions,
les courbesqui
leslimitent deviennent
indépendantes
de l’histoire antérieure dufil
i certainement elles restent sous ladépendance
desphénomènes
deréactivité, qu’il
fautprécisé-
ment s’efforcer d’éliminer pour obtenir une donnée nouvelle sur les
propriétés
dela matière.
6.
Définition
du module par la vitesse depropagation
d’un ébranlementlongitudinal unique.
-Supposons
que nous soyons parvenus en unpoint quel-
conque A d’une courbe de
charge
ou dedécharge
pourlequel
lacharge,
la lon-gueur et la section soient
P, L,
s.Après
untemps
d’arrêtplus
ou moinslong
ence
point, déplaçons brusquement
une des extrémités du fil d’unequantité
trèspetite,
soit pourdiminuer,
soit pour augmenter la tension. Il naît une onde lon-gitudinale
condensée ou dilatéequi
sedéplace
avec une vitesse que l’on mesure, Lapropagation
d’un ébranlementlongitudinal le long
d’uncylindre
se fait avecune vitesse uniforme donnée par
la formule
E5
est défini par la relation(5);
d est lepoids spécifique.
Cette vitesse est rela-tivement faible pour le
caoutchouc,
comme te montre le calcul suivant. SoientE = o,
I enkilogrammes
par millimètrecarré,
ô =1 I enkilogrammes
par déci- mètrecube;
pourappliquer
la forrnule nous devons poser ~r =9,8
1 etexprirner
toutes les
quantités
dans lesystème
dukilogrammètre.
On aura doncE = 105
kilogrammes
par mètre carré, 0 == 103kilogrammes
par mètrecube,
Je donne ce nombre seulement pour fixer les idées....
Assurément,
la formuleprésente quelques
incertitudes. Outrequ’on ignore
sila déformation est isotherme ou
adiabatique,
le frottementintérieur,
dont nous neconnaissons
pas laloi,
maisqui
estconsidérable, peut
modifierprofondément
lavitesse.
Quoi qu’il
ensoit,
admettons cornmelégitime
de poser, dans les condi-tions précédentes, E5 = kv?,
k étant un coefficientindépendant
de la tension etde la
température;
la formule fournit un moyen de déterminerE5
pour des ten- sions et destempératures quelconques.
7. Il est essentiel de remarquer que la
quantité L s,
déterminéed’après
ces
hypothèses,
serapporte
aupoint
A considéré de la courbe decharge
et dedécharge.
Lequotient ‘~~ dL
est celuiqui correspond
à la courbe de déformation obtenue àpartir
dupoint
Aquand
la tension augmente ou diminue. Il résulte de là que cequotient
doitgénéralement
avoir une valeur trèsdifférente,
si l’on pro- duit unallongement
ou si l’onproduit
un raccourcissement. En d’autres termes, àpartir
d’un état déterminé detension,
obtenu par une suite déterminéed’opéra- tions,
une onde dilatée(qui correspond
audéplacement brusque
d’une des extré-mités du ’fil dans le sens d’un accroissement de
longueur)
ne se propage pas avecla même vitesse
qu’une
onde condensée(qui correspond
audéplacement brusque
d’une des extrémités du fil dans le sens d’une diminution de
longueur).
Onpeut
même
prévoir
que cette vitesse variera notablement avec letemps
que le fil aurapassé
sous une certainecharge
et que, pour untemps suffisant,
les deux vitesses que nous venons dedistinguer
serapprocheront
l’une de l’autrejusqu’à
se con-fondre.
Ainsi,
cette méthodedonnera,
avecbeaucoup
dedifficulté
etquelque
incerti-tude,
des résultats tout aussi variables que ceuxqu’on
obtiendrait en calculant E àpartir
des courbes decharge
ou dedécharge.
Il serait assurément duplus
haut tintérêt de voir si
Inexpérience
confirme cesraisonnements,
mais cela n’ajamais
été fait et, autant
qu’on
peut enjuger,
il faudrait unesingulière
habileté pourmener à bien des
expériences
aussi délicates.8. En
1872,
Stefan(Wien.
Acad.Sitzungsberichte,
t.LXV)
aproposé
uneméthode, appliquée depuis
par Exner(ibid,
t.LXIX, i8y/{), qui s’appuie
sur lamesure de la vitesse de
propagation
d’un ébranlementlongitudinal,
maisqui, malheureusement,
est d’uneinterprétation
extrêmement difficile.Ils utilisent le
chronoscope
deHipp.
C’est un mouvementd’horlogerie
àpoids réglé
par une lame vibrante. Un ouplusieurs électros, agissant
sur une armatureunique, peuvent
instantanémentembrayer
oudésembrayer
lesaiguilles
entraînéespar le mouvement. L’une d’elles exécute un tour de son cadran en un dixième de seconde et donne les millièmes de
seconde;
l’autre fait un tour de son cadranen i oS et donne les dixièmes de seconde. Nous supposerons, par
exemple,
que larupture
d’un circuitélectrique
A faitpartir
lesaiguilles
et que la fermeture d’un circuit B lesarrête;
peuimportent
lesdispositions mécaniques.
Voici maintenant le schéma del’appareil employé
et le résumé de laméthode (fig. 2).
Fig. 2.
Le caoutchouc tendu
applique
lespièces métalliques a
etb,
mobiles autour desaxes a
et ~,
contre lespièces
fixes a’ et b’. Le circuit A est alorsfermé,
le circuit Best mis en court-circuit et rien ne passe à travers. Les
pièces
a et b sont tiréesvers les huttoirs e par les ressorts r.
Enfin,
le caoutchouc est relié à lapièce a
parun fil à coudre
f :
sa section est d’environ2mmq,
sacomposition
est telle que ïoos doublent salongueur.
On brûle le fil
f ; brusquement
le circuit A est rompu, lesaiguilles
du chro-noscope se mettent à tourner. L’ébranlement se propage, la tension décroît le
long
du
fil ;
au bout d’un certaintemps,
lespièces
b et b’ seséparent,
le court-circuitdisparaît,
le courant passe dans le circuit B et lesaiguilles
s’arrêtent. On mesureainsi le
temps t qui
s’écoule entre larupture
du contact aa’ et larupture
ducontact bb’. Le
quotient
de la’longueur
du fil(quelques mètres)
par letemps t
donne une vitesse vqu’il s’agit d’interpréter.
9.
C’estjustement
cequ’il
estimpossible
defaire, l’expérience
ne correspon- dant pas à des conditions bien déterminées. Nous sommes loin des définitions du n° 6. Dansl’expérience
deStefan,
onn’impose
pas unpetit allongement
ouraccourcissement à
partir
d’unpoint
duplan longueur-charge ;
on revientjusqu’à
la tension nulle à
partir
delongueurs qui peuvent
atteindre 5 fois lalongueur
initiale.
Or,
pour que le ressort n écarte l’une de l’autre lespièces
b etb’,
il fautque la tension du caoutchouc au niveau de la
pièce
b soit descendue au-dessous de la tension actuelle du ressort r. Pour nous faire une idée duphénomène,
sup- posonsqu’on déplace
successivement de trèspetites longueurs
l’extrémitéf
ducaoutchouc,
conformément à latechnique
du n° 6. Pour chacun de cespetits déplacements,
il naît une onde condenséequi
se propage lelong
du caoutchoucet dont la vitesse varie
(et,
comme nous le verrons,diminue)
à mesure que le caoutchouc se trouve de moins en moins tendu. Donc la vitessequ’on enregistre
doit être peu
supérieure
à la vitessequi correspond
à la tension du ressort r,quelle
que soit d’ailleurs la tension initiale du caoutchouc. Pourqu’il
soit pos- sibled’interpréter
lesrésultats,
il faudrait donc que la tension du ressort r fût variable avecl’expérience
ettoujours
très peu inférieure à la tension du caout-chouc au moment où l’on brûle le
fil f.
Il ne semble pas que les auteurs aientsystématiquement
réalisé cettecondition ;
les résultats obtenusindiquent,
eneffet,
une
augmentation
de la vitesse depropagation beaucoup trop petite quand
la ten-sion initiale
croît,
conformément au raisonnementprécédent.
La tension duressort r devait
être,
enréalité,
assez peu différente d’uneexpérience
à l’autre.Mais cette
précaution
eût-elle étéprise,
que la méthode n’en resterait pas moinsmauvaise, puisqu’il
estimpossible,
avec latechnique employée,
de déterminer la succession des valeurs de E lelong
d’uncycle.
A la fin dechaque expérience,
eneffet,
latension
estnulle ;
les résultats successifs necorrespondent
pas aux diverspoints
d’un mêmecycle,
mais aux extrémités decycles
différents. Sansparler
de la brutalité de la déformation et de la difficulté de comparer les résultats
d’expériences séparées
par de tels chocs.Comme
je
l’annonceplus haut,
ces considérations sontjustifiées par les
faits.Voici les vitesses trouvées par
Exner,
àpartir
desallongements
A(page I07
ddMémoire,
Tab)eauII),
Les valeurs de
E5
sont déduites de la formule en prenant E ‘ I pour 11--_ 2.Or,
nous avons vu queVillari,
calculant Jes valeursnumériques
deE,
à
partir
de la courbe decharge
et avec la mêmedéfinition,
trouve des nombresqui
varient dans les mêmes conditions de i à 13, ou de i à34,
suivantqu’on
considère les Tableaux II et III ou le Tableau 1 de son Mémoire.
Assurément,
ilfaudrait faire le calcul sur la courbe de
décharge
du caoutchouc lui-même utilisé par Exner : il estcependant
certain que les variations de E seraient d’un autre ordre degrandeur.
’
Considérons d’ailleurs la
quantité E7 qui
estproportionnelle
à dP : dA. Onl’obtient, à
un facteur constantprès,
en divisantE5
par le carré de lalongueur
actuelle. Comme nous le verrons, dans une définition correcte de
E5, E; présente toujours
un minimum auvoisinage-
deA ==2,5,
même sur une courbe dedécharge.
Or,
nous trouvons,d’après
les nombresd’Exner,
ce
qui
est sûrement inexact.Ainsi,
même correctementappliquée,
la méthode basée sur la vitesse de pro-pagation
d’ujiedéformation unique
revient àprendre,
pourpoint
dedépart
dela définition du
module,
les courbes decharge
et dedécharge
et estsujette
à denombreuses incertitudes.
Appliquée
comme l’ont fait Stefan etExner,
il estimpossible
d’en tirerquoi
que ce soit.Ces auteurs ont aussi étudié l’influence de la
température.
La vitesse diminue notablementquand
latempérature
croît. Nous aurons l’occasion de revenir sur cerésultat,
intéressant aupoint
de vuequalitatif.
DÉFINITION DU MODULE PAR LES CYCLES TRES PETITS.
10. Nous sommes donc amenés à baser sur les
propriétés
descycles
trèspetits répétés
ungrand
nombre de fois une définition du module..
Un tel
cycle
est défini par son inclinaison2014y- == Ci
les deuxprincipales
méthodes utilisées dans ce Mémoire fournissent directement cette
quantité.
Ellene diffère du
paramètre E7
que par le facteurLo
so. Connaissant6,
onpeut
cal-culer la valeur de
E;; d’après
la loi très suffisamment exacte, engénéral,
que le volume est invariable. On a, eneffet,
Il snffit de
multiplier
6 par le carré de lalongueur
actuelle pour obtenirE5
envaleur relative. Ce
paramètre
intervient directement dans lapropagation
desondes
longitudinales :
il est immédiatement déterminable parl’expérience.
Le calcul de
E~,
àpartir
deC, exige
quel’appareil permette
de déterminer nonseulemcnt la
longueur actuelle,
mais encore la tension actuelle. Même en admet-tant la loi
précédente,
on trouveLa méthode
statique,
dont il seraparlé,
fournit toutes lesquantités
nécessaires.’
Le
paramètre E6
necorrespond
pas à uneexpérience directe;
il a étéproposé
par 31.Cantone,
commeconséquence
d’idéesthéoriques passablement confuses,
surlesquelles je
megarderai
biend’insister,
etqu’on
trouvera tout aulong
dans leNuovo Cimento pour
1 898.
J’aidéjà
dit que M. Cantone le calcule àpartir
descourbes de traction.
11. Dans ]a
première
méthode de mesure duparamètre C,
ou méthode sta-tique à charye
moyenjie constante, onapplique
strictement la définition. Onimpose
unecharge périodiquement variable,
suivant une loi connue, entre deux lirnites fixes etrapprochées PI
etP:,
et l’on mesure la variationcorrespondante
de
longueur.
Je reviendraiplus
loin sur latechnique :
on sereportera
utilementau
Chapitre
1 de mon Mémoire Sur les courbes dedéformation
desfils
métal--liques,
où cette méthode estappliquée,
pour lapremière fois, systématiquement
et correctement
(Ann.
de la Fac. deToul., i8gg).
On obtienL un coefficientproportionnel
àEy.
12. Dans la seconde
méthode,
ou méthodedynamique
âlongueur
moyenne constante, on utilise l’élasticité ducaoutchouc
à entrenir des oscillationspendu-
laires. Voici la théorie de
l’expérience (fig. 3).
Un
pendule
estsuspendu
aupoint
0 et oscille dans leplan
du tableau. Soient ~li,son moment
d’inertie,
C03B8 lecouple
dû à la pesanteur pour uneélongation 9;
ladurée d’oscillation
Tt
est donnée par la formuleFixons maintenant au
point
B dupendule
le milieu d’un caoutchoucAC, plus
ou moins tendu entre les
points
fixes A. et C. Soit d = OB.Quand
lependule oscille,
lepoint
B sedéplace
de lalongueur
bd. PosonsLe
couple qui résulte
de la variation de tension des deux moitiés du caoutchouc Fig. 3.agissant
dans le même sens est 2~ d? 8. Sous l’influence combinée de cecouple
etde la
pesanteur,
la durée d’oscillation devientd’où l’on tire aisément
Cette méthode
permet
les mesuresabsolues,
mais seprête
surtout aux mesuresrelatives,
le coefficient C : 2 d2 étantrigoureusement
invariable.Il semble
qu’il
existe une méthodeplus simple :
fixons un fil de caoutchouc parson extrémité
supérieure
etsuspendons
librement à son extrémité inférieure une masse Mqui
donne unallongement
A. Faisonsosciller
la masse : la durée desoscillations est .
La
difficulté "Jechnique d’application
de la méthodedynamique,
encoreplus
grande
sous la seconde forme que sous lapremière,
réside dans l’entretien desoscillations.
Ils’agit, en effet,
de mesurer, non la durée d’oscillations dont l’am-plitude
décroisserapidement,
mais la durée d’oscillations maintenues avec la mêmeélongation
untemps quelconque.
A cette seulecondition,
les résultats ont un sensprécis; c’est,
enpartie,
parcequ’il
n’en a pas été tenucompte
dans lesexpériences
de Mallock(Proceedings,
t.X.LVI) qu’elles
n’ont aucun intérêt.àlallock utilise un
pendule analogue
à celui de lafigure 3,
avec un seul caout-chouc. Il le laisse osciller librement et détermine la durée d’oscillation. Le décre-
ment est considérable et, outre la mauvaise définition
théorique
durésultat,
ilest
impossible
d’obtenir uneprécision
suffisante dans la mesure de la durée.3Iallock se borne d’ailleurs à une détermination
unique
parespèce
de caoutchoucet nous verrons à
quel point
ce nombre est insuffisant.La méthode
dynamique
fournit des mesuresabsolues,
tant de laquantité 6
quede
l’énergie
absorbée par les oscillations. Soit 8’l’élongation
maxima d’une desoscillations;
calculonsl’énergie
au passage par la verticalequi
suitimmédiatement,
en prenant
T 2
pourpériode.
La vitesseangulaire
estalors,
trèsapproximative-
ment,
27t6’: T?,
etl’énergie cinétique
contenue dans lependule
en mouvement apour
expression
en
appelant j
=~’dl’allongement
du caoutchoucquand l’élongation
est 9’. Si l’onconnaît
T~
et les variations de8’,
on détermineral’énergie
absorbéependant
lesoscillations. Nous étudierons
plus
loin lamanière
de réaliser ces mesures(n° ~0).
L’amortissement
peut
être rendu aussi faiblequ’on
veutquand
on utilise unpendule :
il suffit d’abaisser le centre degravité,
cequi
augmente la valeur ducouple
C. L’amortissement esttoujours plus grand, quand
une masse est directe-,ment
suspendue
au caoutchouc : C est alors nul et iln’y
aplus qu’un
seul caout-chouc.
Mais le
désavantage
de cette seconde méthode consiste surtout dans la difficultétechnique
de l’entretien : au lieud’opérer
àlongueur
moyenne constante, onopère
àcharge
moyenne constante et, parconséquent,
àlongueur
moyenne variable. Leréglage
desappareils
devient si difficilequ’il
est à peuprès impossible
de maintenir
l’amplitude
constante, sans modifier la duréethéorique
d’oscillation.Enfin,
la seconde méthodeprésente
l’inconvénientqu’on
nepeut
pas faire varier arbitrairement etindépendamment
l’une de l’autre la tension et la durée d’os- cillation.13. Ondes
longitudinales
stationnaires. - On obtient très facilement nnsystème
stationnaire de noeuds et de ventres sur une corde de caoutchouc vibrantlongitudinalement. L’expérience
sedispose
absolument commel’expérience
clas-sique
.de Melde pour l’obtention des vibrations transversales. Lafigure 4 repré-
sente
l’appareil.
L’une des extrémités de caoutchouc est attachée à l’une des branches du dia- pason ; l’autre est
prise
dans unepince qu’on peut déplacer
lelong
d’unbanc
etarrêter dans une
position quelconque
à l’aide de la vis depression
v. Lebanc, long
de5m,
est facilement construit avec du feuillard et desrègles
de bois visséessur une
pièce
de bois en forme de T renversé. Le banc est aussirigoureusement
que
possible
normal aux branches dudiapason qui
est entretenuélectriquement.
Quand
la tension du caoutchouc atteint etdépasse 1 kg,
lapièce qui supporte
le talon dudiapason
fléchit et l’une des branchesfrappe l’électro-aimant;
lephéno-
mène devient
irrégulier.
Pour obvier à cetinconvénient, j’ai
fait monter le dia-pason sur une
pièce qui peut
tourner, à frottementdur,
autour de l’axe 0 : elleest terminée par une
pièce rigide prise
entre les vis V. Par leur moyen, onrègle
convenablement la
position
dudiapason, quelle
que soit la tension du caoutchouc.Les branches du
diapason
oscillent sansbattements, malgré
la tension ducaoutchouc,
cequi
est conforme à la théorie. Pour obtenir desbattements,
il faut, non pas exercer une tension sur l’uned’elles,
maisajouter
une masse.L’expérience actuelle,
sur le détail et la discussion delaquelle je
reviendraiplus loin,
a un sensthéorique précis.
Les oscillations sontpetites
et nombreuses.On s’étonne que Stefan ait cherché à lui substituer une
expérience (n° 8)
beau-coup